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INTERNATIONAL LIBRARY
OF GENERAL LINGUISTICS
Herausgegeben von
EUGENIO COSERIU
BAND 25 • 1972
LOUIS HJELMSLEV
60^
ACTA JUTLANDICA VII,1
LOUIS H J E L M S L E V
PREMIERE PARTIE
UNIVERSITETSFORLAGET I AARHUS
1935
*•
Bayerische
Staatsbibliothek
München
AVANT-PROPOS
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VIII OUVRAGKS CITRS
Dais les systcmes casuels, les nonis de chacun des cas sont
indiquis par les abreviations suivantes:
Ab = ablatif Intd = interdirectif
Abs = abessif Intrd = introdirectif
Ac = aecusatif It = iteratif
Ad = adverbial L = locatif
Ade = adeomitatif Lt = latif
Add = additif M = multiplicatif
Ads = adessif Md = modal
Af = affectif Mt = motif
AI = allatif N = nominatif
Am = admotif 0 = cas oblique
At = attributif Ob = objeetif
Av = adversif PI = prolatif
Cc = circumessif Pr = predicatif
Cd = commoditatif Prs = prosecutif
Cm = comitatif Ps = possessif
Cp = comparatif Psc = postcomitatif
Cs = causal Psd = postdirectif
Cv = conversif Psl := postlatif
D = datif Pst = postessif
Dl = delatif Pt = partitif
Dr = directif Pv = proventif
Ds = distributif S = subjeetif
E = elatif Sb = subessif
Eq = equatif Sbc = subcomitatif
Er = ergatif Sc — sociatif
Es = essif Si = similatif
F - facti f
i Sl = sublatif
G = genitif Sp = superessif
Id = identitif Spc = supracomitatif
11 = illatif Spd = supradirectif
In = instrumental Spl = supralatif
Ine = in comitatif Sv = subversif
Ine = inessif T = translatif
Inl = interlatif Tm — terminatif
Int = interessif TP " temporel
Inte — intercomitntif V vinl
XII SYMROI.KS. ABHKVI.VTIONS. TERMINOLOGIE
PROBLEME
A. THEORIE GRECO-LATINE
1. THEORIE GRECQÜE
Le vieux grec est une langue qui se prete mal ä une premiere
orientation grammaticale. Präsentant dans l'expression une
exuberance de formations et une richesse d'anomalies, presen-
tant sur le plan significatif des nuances multiples d'une delica-
tesse souple et affinee, la langue grecque ne laisse apercevoir
qu'indirectement, et par des artifices de methode, le Systeme
constant qui doit etre ä la base de la realitc variee. D'autre
part, les realites, bien que variees et complexes, laissent soup-
conner derriere elles un Systeme simple, clair et symelrique, et
d'une strueture harmonieuse.
A ne considerer que les cas dont l'existence se repete cons-
tamment ä travers la plupart des paradigmes particuliers, le
nombre des cas est en grec relativement tres limited C'est dire
que chaeun de ces cas doit recouvrir une etendue assez grande
de l'espace de signification devolue ä la categorie casuelle. Sans
parier du nominatif, qui est dans toute langue une forme qui
ne se definit que negativement, Paccusatif, le datif et surtout
THEORIE GRECQUE 3
independance N
C'est la meilleure theorie des cas grecs qui ait et€ faite.
On ne nous objectera pas que chercher a faire entrer la
pensee grecque dans un cadre aussi simplifie c'est en violer les
intentions. C'est un procide utile pour mettre en relief les
avantages et les manques de la theorie. Une theorie consistante
sur la signification d'une categorie grammaticale se laisse tou-
jours formuler dans un tableau. On peut mesurer la perspicacite
et la consequence d'une theorie par le degre de facilite avec
lequel eile permet une Interpretation systematologique. Or il est
significatif que, en restant sur le terrain de la theorie grecque,
la seule doctrine qui se laisse ramener ä un tableau clair et
simple est celle de Maxime Planude.
II y a lieu d'ajouter deux remarques.
D'abord, le vocatif reste ä part. Maxime Planude ne nous
le dit pas expressement, mais l'exclusion du vocatif est la conse-
quence inevitable du point de vue adopte.
Ensuite, il convient de se rendre compte du fait que la
deuxieme dimension du Systeme n'est pas n^cessairement locnle
THEORIE GRECQUE 13
dans le sens propre ou massif de ce ternie. Le rapprochement
est identique ä l'hmoyavl[, l'eloignement ä reiönoujn'j de Theodore
Gaza. Par lä nieme il est evident qu'il s'agit toujours des rap-
ports entre le sujet et l'objet, sans egard au milieu dans lequel
ces rapports sont en jeu; ce milieu peut etre local, comme c'est
evident surtout pour les r6gimes des prepositions eic; et ££, ou
grammatical, comme c'est le cas lorsque d'apres Apollonius
Dyscole l'accusatif indique l'effet de l'action d'un verbe transitif
et que le genitif indique l'origine, ou lorsque d'apres Theodore
Gaza l'accusatif indique l'effet d'une action du sujet et que le
genitif indique une absorption dans le sujet.
Maxime Planude et Theodore Gaza ont etabli judicieusement
la theorie casuelle dite localiste en mettant ä la base des defi-
nitions la notion abstraite de la direction, applicable ä la fois
aux rapports concrets ou locaux et aux rapports abstraits ou
grammaticaux. Par lä meme ils antieipent de beaucoup sur les
progres acquis pendant les XIXe et XXe siecles.
Ils n'ont pas exerce d'influence sur le developpement gene-
ral. Ce sont les theories beaucoup moins clarifiees des Stoiciens
et d'Apollonius Dyscole qui devaient etre adoptees par les Ro-
mains et par le grand mouvement europeen, qui ä son tour est
determine par les insuffisances du point de derart.
2. THEORIE LATINE
1
Cf. SERVIUS dans GHAMMATICI LATINI IV 433.
THEORIE LATINK 17
quelle le Systeme de huit cas a ele abandonn<5. Ce ne peut pas
etre par la force de la tradition. La tradition grecque posait les
Romains devant une alternative: ou bien il fallait maintenir le
Systeme grec en y ajoutant simplement, et par un procede^ exte-
rieur, le cas d'ablatif, ou bien il fallait porter les aires seman-
tiques de chacun des cas grecs sur le registre des cas latins.
Que Ton choisit Tun ou l'autre des deux proced^s possibles, le
nombre des cas serait plus grand que celui reconnu par les
Grecs. Suivre de tres pres la tradition grecque etait pour le
grammairien de la langue latine chose impossible.
Si le Systeme de huit cas a ete abandonne, c'est par une
consideration du latin meme. Les grammairiens romains ont
fini par respecter judicieusement les distinctions faites par la
langue. Les pretendus casus septimus et octauos ont ete quali-
fies de simples genera elocutionis, c'est-ä-dire que l'on a reconnu
qu'il s'agit de differents emplois d'une seule et meme forme
grammaticale.
La grammaire logique, qui consiste ä elablir des distinctions
admises par la pensee au lieu de s'en tenir empiriquement aux
distinctions faites par la langue, a donc ete vaincue chez les
Romains par la grammaire linguistique. Et la grammaire »lou-
chante«, qui est ä cheval sur plus d'un seul etat de langue sans
cependant etre vraiment generale, a ete1 supplantee enfin par
une theorie idiosynchronique dirigee par les meines principes
que la doctrine grecque, c'est-ä-dire par une theorie fondee
strictement sur l'etude d'un seul etat de langue, mais qui se
reclame implicitement et ä tort d'etre valable pour le langage.
La methode adoptee est la bonne, les consequences qu'on en
tire sont inquietantes. On sait en effet que la doctrine romaine
a 6te adoptee presque universellement par la grammaire euro-
peenne, et que toute langue etudiee par eile a iti astreinte au
modele latin.
Mais il y a plus a dire. II est evident qu'une theorie generale
fondee sur la consideration d'une seule langue est prödestinee
ä etre entravee ä tous les egards par les particularites de la
langue consideree. Non seulement la structure du Systeme latin,
et le nombre des cas reconnu dans ce Systeme, ont eti pris pour
modele d'une theorie universelle. La structure particuliere du
18 THEORIE LATINE
+
deterrninant
rel. syntagmatique N Ac
rel. locale G Ab 1)
2. L E S L O C A L I S T E S
+
Ac
1
Comme Pott lui-meme, nous employons dans ce travail le terme
de preposition de facon a y comprendre les postpositions au meine
titre que les elements d'ordre analogue qui precedent 1c nom.
I.'ubjeetion qui l'en litnl a Ictyinologie de ce terme technique
est futile. Nous nOUl sei vuns rfialeinent du terme d'aecusatif:
nous soupconncra-t-on de vouloir definir ce cas par l'idee A'accii-
sation?
LES LOCALISTKS 43
3. LES ANTILOCALISTES
1
On voit que la distinction que nous faisons entre linguistique et
stylistique differe de la distinction operee par AI BR0NDAL entre
ce qu'il appelle »morphologie« et ce qu'il appelle »syntaxe«. La
»syntaxe« de Hr0ndal est une fusion de stylistique generale et de
linguistique, et qui neglige ii tort les faits inorphologiques de la
rection. IVautre part la morphologie de Br0ndal est en principe
d'ordre transscendental.
LES ANTILOCALISTES 53
4. LES DKMI-LOCALISTES
D a n s cette deuxiöme e p o q u e de la l i n g u i s t i q u e i n d o - e u r o p e -
enne, qui s'oppose ä la p r e m i e r e (plus h a u t , p. 35 SV.), la base
d'explication n'est plus cherchee d a n s un Stade ideal c o i n p o i t a n t
un m i n i m u m absolu, inais d a n s le stade de l ' i n d o - e u r o p e e n com-
m u n a u q u e l o n a t t r i b u e lc Systeme maximum t r o u v e p a n n i les d i -
verses langues indo-europcennes, c'est-ä-dire le Systeme s a n s k r i t .
P u i s q u e d a n s ce Systeme l'ablatif, ( ' i n s t r u m e n t a l et le locatif ne
se plient pas a la theorie s y n t a x i q u e , on acconle ä la theorie lo-
caliste u n d r o i t relatif. On a d o p t e d a n s u n sens n o u v e a u le p r i n -
cipe de la relation ä double face. Selon la theorie de H.-L. AHRENS,
q u e n o u s citons d ' a p r e s HOLZWBISSIG ', il y a d ' u n e p a r t des cas
»topiques«, de l ' a u l r e des cas »logiques«.
L a p r e m i e r e chose qui frappe d a n s le Systeme d ' A h r e n s c'est
q u e meine p o u r les cas »logiques« (qui regoivent la definition
s y n t a x i q u e ) on n ' e c h a p p e pas ä la coneeption localiste. 11 est
vrai que la theorie ne distingue pas les directions. Mais eile dis-
tingue d ' u n e p a r t le m o u v e m e n t , de l ' a u t r e le r e p o s , et ces con-
cepts m a n i f e s t e m e n t localistes sont utilises p o u r les cas logiques
aussi bien que p o u r les cas topiques, de fa§on ä c o n s t i t u e r u n
parallelisme systematologique. Si l'on i n d i q u e p a r + le coneept
de m o u v e m e n t , p a r -=- le coneept de repos, et p a r 0 1 1 la t r a n s i -
tion entre les d e u x t e r m e s e x t r e m e s de m o u v e m e n t et de repos,
la theorie d ' A h r e n s se r e s u m e au tableau s u i v a n t :
+ o|i -5-
cas logiques Ac i) G
cas t o p i q u e s Ab L In
1
Holzwcissig developpe la theorie d'Ahrens saus documentauon.
11 doit s'ajjir d'une plias< avancee des wies d'Ahrens, puiM[in-
dans la premiere edition de sa grammaire grecque (1852) il pro-
fesse la theorie ordinaiic des localistes. Nous n'avons pas pu met-
tre la inain sur la demeieme edition.
LKS DEMI-LOCALISTES 57
relation I II III IV
N Ac AI 11
G Es Ads Ine
Pt Abs Ab E
1. PRINCIPES GENERAUX
a) Delimitation de la categorie.
-T -ae -a /
y -7s -Ts
-US -a /-um
/ -0 •S -0
/
f
DELIMITATION DE LA CATEGORIE 7:i
b) Definition de la categorie.
Sans entrer au prealable dans la theorie des cas etablie par
WÜLLNER il faut dire des l'abord que la nouvelle grammaire ge-
nerale devra suivre les principes poses par Wüllner. (Voir plus
haut, p. 37.) La grammaire est la theorie des significations
fondamentales ou des valeurs et des systemes constitues par
elles, et pour resoudre son probleme eile doit proceder par une
mithode empirique.
On discutera dans la suite bricvement les trois faces essen-
tielles de cette definition: la signification fondamentale, le
Systeme, la methode empirique.
a) Signification fondamentale.
me
II s'ensuit du 2 principe de Wüllner que le principe de la
metonymie, qui a ete de mode depuis l'antiquite (cf. p. 6), doit
ßtre abandonne. Ce principe a gagnc de terrain pendant l'epoque
recente. L'utilisation de ce principe a ete rendue inevitable sur-
tout par la theorie demi-localiste qui attribue ä certains cas une
signification uniquement concrete et locale; les emplois plus
abstraits de ces cas dits »locaux« doivent par consequent rece-
voir l'explication par metonymie. Mais le meine principe est un
DEFINITION DE LA CATEGORIE 85
1
Sur ce point nous sommes d'aecord avec M. BRONDAI. (49).
DEFINITION DE LA CATEGOIUE 89
y) Methode empirique.
Du principe de la signification fundamentale il s'ensuit imme-
diatement que les unites linguistiques doivent etre respectees en
tant que telles. Afin de reconnaitre les unites de la langue, et afin
de ne reconnaitre que les unites qui fönt partie de la langue,
il faut adopter la methode immanente et intra-linguistique
dont il a 6te parle plus haut (p. 50). L'unite linguistique est
definie comme une valeur exprimee; le criterium de son carac-
tere linguistique est qu'elle est constituee par le rapport d'un
signifiant ä un signifie.
De ce point de vue il y a lieu de prevenir surtout contre trois
deviations previsibles:
1° II est illegitime d'imposer ä la langue une table de cate-
gories qui n'a pas ete etablie selon la methode intra-linguistique.
Tout au contraire, la täche de la grammaire consiste ä d£gager
la table de categories propre ä la langue et d'en montrer les ana-
logies et les differences avec toute autre table cat^gorielle. (Cf.
plus haut, p. 29 et 32.)
DEFINITION DE LA CATEGORIE Ol
ment dans les cas, mais les cas se repartissent sur elles sans
que les delimitations operees par le Systeme casuel recouvrent
Celles du systfeme categoriel. Le cas de la reprcsentation serait
le nominatif, mais seulement dans quelques emplois particuliers.
Le cas du jugement est egalement le nominatif, savoir lorsque
le nominatif contribue ä constituer un »jugement double«,
c'est-ä-dire lorsqu'il designe le sujet ou le predicat. Le cas de
l'interet serait le datif, mais seulement le datif dit ethique; il
est vrai que le vocatif, que Marty n'hesite pas ä compter parmi
les cas, y appartient egalement. Les rapports casuels constitues
ainsi par quelques emplois du nominatif, par un seul emploi du
datif et par le vocatif appartiennent selon Marty ensemble et
s'opposent ä toute autre relation casuelle qui est designee par
le nom commun de cas oblique. Sous la categorie des cas obliques
Marty opere encore un nombre considerable de distinctions sub-
tiles qui n'ont rien de parallele dans le signifiant.
On n'a pas besoin de poursuivre Fexpose de la doctrine de
Marty. II est evident qu'elle separe ce qui au point de vue lin-
guistique appartient ensemble. C'est une theorie eminemment
transscendentale.
La meme methode se trouve en principe dans la theorie casu-
elle de NOREEN (V 178 sv.). Noreen distingue deux ordres de
faits: celui de casus et celui de »status«. Status est le nom
des categories de notions qui correspondent ä ces categories
morphologiques qu'on appelle casus (cas). II va de soi qu'une
teile terminologie pourrait rendre service pour faire ressortir
d'une facon commode les rapports du signifiant au signifie.
Mais la möthode de Noreen est autre. II etablit pour le suedois
moderne un Systeme de cas dont le nombre depasse toute pre-
vision. Ce ne sont pas seulement, ainsi qu'on pourrait l'attendre,
les status qui sont nombreux. Ce sont les casus eux-memes.
Noreen confond le fait linguistique qui est le casus avec le fait
extra-linguistique qu'il appelle status. II etablit un casus dans
tous les cas oü il y a un status concevable, sans considerer les
formes de la langue. Ainsi en suedois moderne (oü la gram-
inaire traditionnelle ne distingue que deux cas seulement, le
genitif et le cas general ou nominatif), le nombre des cas est
selon Noreen »ä peu pres legion«.
DEFINITION DE LA CATEGOIUE 93
Nous sommes persuade que les principes qui ont ete poses
dans ce paragraphe, et les critiques qui en sont la consequence,
seront une fois ä l'avenir consideres comme des paroles super-
flues. A l'heure actuelle, oü le courant general des recherches
prend une route entierement differente et meme opposee, il a
ete juge necessaire de les enoncer.
Les principes une fois poses, on pourra en les utilisant discu-
ter les hypotheses et les re'sultats, qui sont par definition moins
stables que les principes.
DIVISION DU PROBLEME. RESULTATS PROVISOIRES 95
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München
98 DIVISION DU PROBLEME. RESULTATS PROVISOIRES
locatif nominatif s
+- J-
0 0
/
/
SYSTEME
A. STRUCTURE GENERALE
On va passer maintenant ä l'expose' systematique qui d6-
passe les resultats obtenus ou rendus possibles par la gram-
maire traditionnelle.
On va poser d'abord les principes qui dirigent la structure
generale du Systeme casuel, en reprenant le probleme oü nous
l'avons quitte dans la partie p r e ^ d e n t e de ce travail. (Cf. p.
98—104).
Dans les exemples qui seront choisis pour illustrer les prin-
cipes il convient de faire, sur ce premier stade de notre expose,
quelques simplifications. On fera abstraction des syncretismes
engages entre les cas d'un seul et meme Systeme. On fera abs-
traction d'une tension possible entre la tenue intensionale et
la tenue extensionale des cas consideres. On fera abstraction
encore du rapport qui existe entre le Systeme fondamental et
les systemes particuliers. On evitera des exemples qui posent
le probleme de l'effectif casuel et de la distinction du Semanteme
et du morpheme. Enfin on se bornera ä considerer dans ce para-
graphe les etats de langues oü la categorie casuelle ne comporte
qu'une seule dimension, celle de la direction.
Mais ces simplifications servent ä restreindre considerable-
ment le champ d'observation, et les exemples que nous pouvons
donner dans ce paragraphe sont par consequent peu nombreux.
II pourra meme y avoir qui semblent peu ^vidents sur quelque
point. Ainsi il n'est peut-etre pas toujours evident au premier
coup d'oeil que les systemes qui seront consideres ne comportent
112 STRUCTURE GENERALE
+ (rapprochement)
0 (»repos«)
-J- (eloignement)
+ a -r-
0 c 0
b +
1 i
ß B
116 STRUCTURE GENERALE
m
1 T
ß N
B Ac
T D
rG
Le Systeme presente l'orientation negative. Le nominatif
designe ä la fois eloignement et rapprochement, puisqu'il est ä
la fois cas »sujet« et cas »predicat«; mais il insiste sur la face
negative de la dimension parce que la valeur de »sujet« pre-
domine. En outre le nominatif peut ötre neutre ä l'egard de
STRL'CTURE GENERALE 117
l'opposition; ainsi s'il est mis hors contexte ou s'il prend le röle
du vocatif. L'accusatif designe ä la fois eloignement et rapproche-
ment puisqu'il est ä la fois »sujet« et »objet« dans la construc-
tion dite accusatif avec infinitif; mais l'accusatif insiste sur la
face positive de l'opposition parce que la valeur d'»objet« prevaut
et est souvent la seule envisagee. En outre l'accusatif peut etre
neutre ä l'egard de l'opposition, comme c'est le cas lorsqu'il in-
dique le temps, l'espace temporelle ä l'interieur de laquelle un
fait est situe. Le datif gotique occupe la place qui revient le
plus souvent ä un datif: il indique ä la fois eloignement et
rapprochement mais peut indiquer aussi indifference. C'est la
definition du cas datif qui a etö donnee dejä par Maxime Planude
(plus haut, p. 11 sv.) et qui a ete donnee de nos jours par Wüll-
ner (plus haut, p. 38 sv.) et par Ahrens (plus haut, p. 56).
L'»objet indirect« est un terme de phrase qui etablit une cer-
taine connexion ou reciprocite avec le »sujet«; le datif indique
donc principalement qu'il y a rapport reciproque, accompagne
souvent d'une connexion constante ou d'un etat d'equilibre et de
»repos«, entre les deux objets qui subissent la relation casuelle.
Mais le datif gotique n'est pas uniquement le cas de l'»objet
indirect«. Par sa signification d'instrumental, de locatif et de
deuxieme terme de comparaison il insiste encore sur la recipro-
cite et sur l'etat d'equilibre ou de »repos«. En effet le datif
gotique n'est ni eloignement net ni rapprochement net, mais il
est le plus souvent eloignement et rapprochement ä la fois.
Le genitif enfin est situe autrement en gotique que dans le
Systeme particulier qu'on vient d'etablir pour l'anglais moderne.
On va cependant voir dans un instant que la difference entre le
gotique et l'anglais n'est pas si profonde qu'il parait ä n'envi-
sager que les systemes particuliers que nous avons jusqu'ici
etablis. Le genitif anglais n'est pas et dans tous les systemes
particuliers. Mais il y a entre le gotique et l'anglais cette difTe-
rence que le genitif anglais est susceptible de la definition a
dans quelques systemes particuliers, alors que le genitif gotique
n'est jamais susceptible d'une teile definition. On sait que le
genitif gotique comporte des emplois beaueoup plus larges et
un contenu semantique beaueoup plus lourd et moins retreci
9
118 STRUCTURE GENERALE
lement par leur ordre respectif. A ces trois cas s'ajoutent dans
le gerne personnel le genitif en -s. Les substantifs ordinaires du
genre personnel possedent donc un Systeme normal dont l'ef-
fectif est a quatre. Le Systeme a la structure que voici:
ßs
B T
YD
rG
On voit ici que la definition du genitif a change par rapport
au Systeme particulier etudie plus haut. C'est un fait qui se
rencontre souvent, et dont le principe sera discute dans un pa-
ragraphe specialement consacre ä ce probleme dans la deux-
ieme partie de ce travail. Le fait vient de ceci qu'une meme defi-
nition intensionale peut recevoir plusieurs interpretations ex-
tensionales. La definition extensionale est une definition de
valeur et depend exclusivement du nombre et du caractcre des
termes avec lesquels le terme envisage' entre en Opposition. II
est donc tout indique que dans un Systeme ä quatre termes les
definitions seront autres que dans un Systeme ä deux termes
bien que les faits intensionaux soient en partie les memes. En
outre il importe d'observer que le Systeme particulier envisag6
plus haut n'a qu'une valeur restreinte: il ne s'applique qu'au
nom isole de la serie syntagmatique qui seule met en vigueur les
rapports casuels. De plus il va de soi que si le genitif est sus-
ceptible de plusieurs definitions extensionales, il n'en est pas
susceptible de n'importe quelle. Le genitif anglais ne pourrait
pas etre defini comme B par exemple (etant entendu que le
Systeme presente l'orientation negative).
Dans le Systeme normal des substantifs ordinaires du genre
personnel le genitif anglais est defini comme le gönitif gotique:
il insiste sur le repos ou la neutralite mais admet aussi l'expres-
sion de l'eloignement et du rapprochement. La possessivitö est
donc conijue principalement comme une sorte d'immanence; on
1
L'ordre change selon des regles fixes dans le modc interrogatif et
dans l'etnt d'emphase, dont on fait abstraction ici.
9*
120 STRUCTURE GENERALE
ß S
B T
T D
et P r
A N
ß Ac
B G
r D
a D
A N
ß Ac
B Ab
Y G
r L
Le pivot du Systeme est constitue par le datif, qui designe
toujours un rapprochement bien marque et exclusif. Le datif
marque d'une facon concrete la direction vers, le point vers lequel
tend un mouvement; dans ces emplois le datif turc peut etre
caracterise du point de vue intensional comme un pur allatif.
Mais il indique aussi d'une facon plus abstraite le point vers
lequel tend une action, c'est-ä-dire il indique l'objet indirect d'un
verbe, et l'objet simple et unique des verbes dits intransitifs (tels
que bakmak 'regarder', sasmak 's'etonner de'); il peut indiquer
aussi la »cause finale« (ne-y-e 'pourquoi', litteralement 'vers quoi,
en vue de quoi'), la limite et la comparaison. Le datif est le seul
cas du turc qui indique un rapprochement exclusif. L'accusatif
sert uniquement ä marquer l'objet direct d'une action; il ne com-
porte pas l'acceptation concrete contenue dans le datif; il joue
le meine röle qu'un accusatif ordinaire et occupe la place gene-
ralement d^volue ä un tel cas (cp. p. 116 pour le gotique (rap-
peler que le Systeme gotique presente l'orientation inverse de
celle du turc) et p. 121 pour le haut allemand; cp. aussi la de-
finition donnee du translatif anglais, p. 119, 120). L'accusatif
n'est pas si different du nominatif que Test le datif, fait qui se
marque exterieurement par le syncretisme frequent entre l'ac-
cusatif et le nominatif.
L'orientation positive du Systeme est evidente. Le datif est
le seul cas qui recouvre une seule case de la zone semantique,
et il n'y a qu'un seul cas qui insiste clairement sur l'öloignement,
savoir l'ablatif. Le genitif turc est possessif-conjonetif dans le
sens large de ce terme; il designe le complement d'un nom sans
124 STUUCTURE GENERALE
i ?} - f
A B> lr
II s'ensuit encore qu'il y a 7 systemes-types possibles, ä
savoir:
a A
ß BY
ß B r
ß B y r
a A ß B Y
a A ß B r
a A ß B Y r
O co
Mais l'opposition de la deuxieme dimension des cas et des
prcpositions n'est pas toujours exactement celle qui vient ici
d'etre decrite. Au lieu de s'agir d'une difference entre une rela-
tion interieure et une relation exterieure, il peut s'agir d'une
Opposition entre une relation ä contact et une relation sans con-
tact; soit:
positif negatif
CD OO
Cette forme speciale de la deuxieme dimension s'observe le
plus facilernent dans les prcpositions et locutions sur et au-des-
sus de, cp. l'anglais on d'un cöte, abovc et over de l'autre, et cp.
encore allemand auf et über, danois paa et over.
Ces deux formes particulieres de la deuxieme dimension ne
sont pas essentiellement difförentes. On peut les reunir cn de-
finissant le terme positif de la deuxieme dimension comme
cohirence, et le terme negatif comme incoherence. Par coherence
nous comprenons le fait gcneral d'etre lie par une connexion
relativement intime ä un autre objet. En choisissant pour la
definition generale un concept aussi abstrait, il sera possible de
l'utiliser egalement pour les cas oü l'emploi concret et local est
rare ou inexistant.
Les deux formes particulieres prises par l'idee generale de
coherence peuvent, s'il y a lieu, recevoir les noms d'inherence
et d'adherence: il y a inherence quand la distinction est celle
130 SYSTEME SUBLOGIQÜE
+ 0
rapprochement x rapprochement rapprochement X
coherence; penetrant sans difference de incoherence; rappro-
dans ou prenant con- coherence et d'inco- chant de, sans pene-
tact avec herence tration ou sans con-
lat. in + acc. fr. par tact
all. in + acc. angl. along lat. ad
dan. ind i dan. ad all. an + acc.
dan. hen ved, hen til
au-dessus
devant- -dcrriere
au-dessous
Mais un examen des faits fera voir que cette hypothese n'est
pas soutenable. Si eile etait juste, le Systeme sublogique des cas
et des prepositions devrait comporter 4 dimensions: les deux
dimensions de rapport horizontal et de rapport vertical devraient
etre multipliees par les deux dimensions de direction et de coh6-
rence. Or les faits fönt voir que Ia pretendue dimension de rap-
port vertical n'est jamais multipliee par celle de cohörence. Dans
le langage, l'idee de au-dessus admet la distinction de coherence
et d'incoherence, mais l'idee de au-dessous ne l'admet pas. Ainsi
dans la sphere de l'idee de au-dessus l'allemand distingue auf,
qui insiste sur la coherence, et über, qui insiste sur l'incoherence,
alors que dans la sphere de l'idee de au-dessous l'allemand
n'admet qu'une seule preposition, unter, qui est indifferente ä
l'egard de la distinction de coherence et d'incoherence (de con-
tact et de non-contact). De meme l'anglais distingue on, qui
insiste sur la coherence, et over (et above), qui insiste sur l'in-
132 SYSTEME SUßLOGIQUE
coherence, alors que linder (et below, beneath) est indifferent.
De meme danois paa, over, linder. (Plusieiirs langues telles que
le frangais et le latin possedent des systemes de prepositions
trop simples pour admettre toutes les distinctions dont il est
question ici. C'est pourquoi nos exemples ne sont pas puises
dans ces langues.) Le fait est universel et sera illustre encore
par les systemes casuels etablis plus loin.
La chose se repete pour l'opposition de devant et de derriere.
Les systemes de prepositions des langues europeennes ne sont
pas assez complexes pour le faire voir, puisqu'ils ne comprennent
que tout au plus les idees simples de devant et de derriere
sans aucune specification de coherence-incoherence. Le fait ne
s'observe bien que dans quelques systemes d'une complexite
particuliere. Le fait consiste en ceci que lä oii il y a, dans la
sphere de l'opposition de devant et de derriere, une distinction
de coherence et d'incoherence, cette distinction ne se manifeste
que dans la sphere de devant, jamais dans celle de derriere.
Ces faits fönt voir que la difference entre au-dessus et au-des-
sous et celle entre devant et derriere est une difference qui opere
dans la dimension dejä etablie de coherence-incoherence: les
deux idees de au-dessus et de devant sont complexes ä l'egard
de cette dimension, puisqu'elles admettent la distinction qu'elle
comporte, alors que les deux idees de au-dessous et de derriere
sont neutres ä l'egard de la dimension de coherence-incoherence,
n'admettant pas les distinctions qu'elle comporte.
Reste ä voir en quoi consiste la difference entre le couple
au-dessus-au-dessous et le couple devant-derriere. C'est selon
nous une difference A'objectivite et de subjectivite.
Une relation entre deux objets peut etre pensee objective-
ment, c'est-ä-dire sans egard ä l'individu pensant, et eile peut
etre pensee subjectivement, c'est-ä-dire par rapport ä l'individu
pensant. Dans le Systeme sublogique, l'idee commune de au-des-
sus et de au-dessous est une relation entre deux objets pensee
objectivement, alors que l'idee commune de devant et de der-
riere est une relation entre deux objets pensee subjectivement.
II faut une remarque pour prevenir ä un malentendu pos-
sible. Selon notre hypothese il y aurait dans l'expression pre-
positionnelle il est sous l'arbre une relation de l'ordre objectif.
SYSTKMK SUBLOGIQUK 133
2mt dim.
0
rapprochani du rapprochant de
devant en pre- l'cspace devan''
nant contact
etant devant,
avec contact
s'eloignant du
devant en ces-
sant d'etre en
contact
2nie dim.
0
approchant
(par)
neutre ä tous
les egards
(entre)
s'eloignant
(ä travers)
2me dim.
0
montant sui^ allant au-des- montant au-des-
avec contact sous sus, s.ans contact
+
etant'sur, etant au-des- etanl au-dessus,
avec contact sous sans contact
a) Tabassaran.
A. DIRR, *Sbornik XXXV. Einf. 1928.267 sv.
La description donnee par DIKR fait voir que le tabassaran
possede
1° un nominalif, sans desinence;
2° 4 cas ä desinences, et dont le theme est identique ä celui
du nominatif; ce sont Vequalif, le postessif temporcl, Vablatif-
comparatif et Y adverbial;
3° 3 cas ä desinences, et dont le theme differe dans quelques
paradigmes de celui du nominatif; ce sont Yinstrumental-ergatif,
le gcnitif et le datif;
1
Longtemps on a presumc ä fort que le lak conitltue pour le Sys-
teme casuel le maximum empirique. Ainsi SXINKNC 130 sv., qui
fixe le nombre de cas comporte par le lak ä 47.
TABASSARAN 139
I II
ß I er adessif (particule -A-c-) II m e adessif (particule -h-)
B I er inessif (part. -',-) II m e inessif (part. -/-)
Y interessif (part. -q-) superessif (part. -]il)
F postessif (part. -q'-) subessif (part. -A--)
1
Ce fait s'observe egalement en lak, qui sera etudie plus loin (p.
160 sv.). Dans cette langue, le superessif et le subessif admettent
plus d'emplois abstraits que le postessif, le circumessif, le localif
et l'adcssif, pour ne pas parier des cas dits »grammaticaux« qui
sont par definition »abstraits«.
TABASSAHAN 145
Systime. -4-a A ß B
A
AI 11 im Spl s
7
Ade II In Cm Spc /Sbc
/
In-Er G Ab Ell, Dl AbSb
a
/ A P /' B Tf r
+o III Inl Psl
/
A Ine Inte Psc
/ 'Adel
/
Notes explicalives.
fiaa equatif-prddicatif, en -s-u-. Voir p. 140. Ce cas signifie
'comparable ä, identique a, possedant certaines qualites
au meme degre que'. II exprime une comparaison qui
consiste ä rapprocher un objet d'un autre; mais en
meine temps il peut designer vaguement la case neutre de
la zone semantique de la premiere dimension, puisque
l'egalite qui est signalee entre les deux objets se confoit
naturellement comme un etat d'equilibre, donc comme un
etat de repos; et il peut designer vaguement la case nega-
tive parce que dans une comparaison Tun des objets est
juge du point de vue de l'autre. En tenant compte de la
sfructure du Systeme, l'equatif-predicatif est le multiple
de l'equatif et du predicatif. Or puisque ces deux cas
sont indifferemment 2a leur multiple doit rester dans
cette meme position. Ensuite, le predicatif est lß3A,
l'equatif ll';$a. En portant ß sur I" le multiple naturel
sera ß, et l'equatif-predicatif est donc Iß. Quant ä la troi-
sieme dimension, il est tout indique que l'equatif doit l'em-
porter sur le predicatif puisque c'est l'equatif qui com-
porte une valeur bien definie en elle-meme, et aussi parce
que les faits de l'expression paraissent denoter que l'equa-
tif est le facteur dominant du multiple (la particule de
l'equatif se met avant celle du predicatif, contrairement
au genitif-equatif qui est par consequent cas6 dans 3A et
recoit, comme on le voit dans le tableau, la definition I A A ) -
Baa postessif iemporel, en -lan, signifiant 'apres', ex. sa-ß ocidza-
-lan 'apres un mois'. Ce cas indique I'incoherence et un
certain ecartement, donc eloignement, entre les deux ob-
jets (dont Tun est un point dans le temps, ou la fin d'une
espace temporelle). II faut se souvenir qu'en tabassaran
la forme particuliere prise par la deuxieme dimension est
celle de l'inhcrence, et non celle de l'adherence. C'est dire
que le postessif temporel sert ä indiquer qu'un fait est
exterieur ä un point ou une espace temporelle et qu'il s'en
ecarte. Traduit dans le plan local il signifie 'paraissant,
surgissant de derriere'. Cette definition n'empeche pas
qu'il puisse y avoir des situations oü le cas en question
148 TABASSARAN
i n d i q u e plus ou m o i n s v a g u e m e n t u n r a p p r o c h e m e n t ou
u n repos, tout en i n s i s t a n t t o u j o u r s sur l ' e x t e r i o i i t e . E n
p o s a n t le t e r m e d ' u n e v e n e m e n t on le r a p p r o c h e de ce
t e r m e , on l'y c o m p a r e et fixe u n c e r t a i n e t a t d ' e q u i l i b r e ou
de repos e n t r e l'evenement et le t e r m e pose d a n s le t e n i p s .
T a a equatif, en -0- + -sä- + -0 1 , ex. ner-sä ' c o m n i e u n t o r r e n t ,
c o m m e u n fleuve'. Ce cas a la m e m e signification q u e
l'equatif-predicatif, m a i s il en diffcre p a r le fait de p o u -
voir etre attributif. II recoit p a r c o n s e q u e n t la definition
l T 2 a c o m m e l'attributif, m a i s il en differe p a r le fait
d ' e t r e , du m o i n s d a n s u n e faible m e s u r e , m o i n s objectif
q u e celui-ci; il y a d a n s l'equatif u n c e r t a i n s o u p c o n de
j u g e m e n t , d ' a p p r e c i a t i o n subjective. II designe l ' i n c o h e -
r e n c e n e t t e : il n ' i n d i q u e q u ' u n e c o m p a r a i s o n e n l r e d e u x
objets qui r e s t e n t d i s t i n c t s e n t r e eux. II n ' i n s i s t e p a s
c o m m e l'equatif-predicatif sur le r a p p r o c h e m e n t : d ' u n e
p a r t il ne c o m p o r t e p a s l'idee de r a p p r o c h e m e n t e n t r a i n e e
p a r l'idee de p r e d i c a t i o n , et d ' a u t r e p a r t le r a p p r o c h e m e n t
e n t r e les deux objets est dejä accompli d ' a v a n c e p a r l'at-
t r i b u t i o n . On p e u t dire que la c o m p a r a i s o n , m e m e e n t r e
d e s objets dejä r a p p r o c h e s e n t r e eux, consiste en u n r a p -
p r o c h e m e n t ; et il reste vrai q u ' e n consequence de ce fait
l'equatif conserve, p a r sa definition de IT, la faculte de
designer la case positive de la zone s e m a n t i q u e de la di-
r e c t i o n . Mais il possede u n e faculte egale de d e s i g n e r la
zone opposee, celle d'eloignement, l'un des d e u x objets
c o m p a r e s e t a n t j u g e du point de vue de l ' a u t r e . Mais p l u s
q u e s u r le r a p p r o c h e m e n t et l'eloignement l'equatif insiste
s u r la case n e u t r e , sur le »repos«: il constate u n etat
d ' e q u i l i b r e e n t r e les d e u x objets, u n e c o m m u n e m e s u r e ,
u n e egalite stable.
11
150 TABASSARAN
C'est sans doute dans tous les emplois l'idee partitive qui
est la valeur de ce cas. Par rapport a la premiere dimen-
sion c'est donc surtout une idee d'eloignement, aecom-
pagnee d'une idee de reeiprocite et d'un rapport de stabilite.
Et par rapport ä la deuxieme dimension le partitif-ablatif
insiste sur l'incoherence, sur l'exteriorite\ ce qui n'empeche
TABASSARAN 151
1
Le zero est la marque qui oppose le genitif au genitif-equatif.
156 TABASSARAN
b) Lak.
A. SCHIEFNER 1866. F. MÜLLER III, 2, 85 sv.
*P.-K. USLAR 1890. A. DIRR 1928.238 sv.
Dans la description de P.-K. USLAR, qui forme la base de
notre connaissance de cette langue, il a ete dit que le lak pos-
sede »vers 50 cas«. Le caractere approximatif de ce bilan est
du uniquement ä l'cmploi de la methode classique qui n'admet
aucune definition exacte de la categorie casuelle. L'effectif
casuel est pour le lak facile ä etablir. La langue presente une
regularite prononcee. Le Systeme ne comporte pas de syncre-
tismes. Le principe d'univocite est suivi d'une facon absolue. Les
seuls systemes particuliers qui existent sont des systemes defec-
tifs d'adverbes qui n'admettent que quelques cas »locaux«. Le
Systeme est extremement symetrique et harmonieux. Le carac-
tere casuel et morphematique des formes entrant dans le Sys-
teme est evident. II n'y a que quelques formes, tres peu nom-
breuses, dont l'appartenance au Systeme casuel parait douteuse
ä premiere vue; mais la Solution methodique de ces problemes
est facile.
On distingue d'ordinaire pour le lak trois sortes de mor-
phemes casuels:
1° cas dits »grammaticaux« ou »abstraits«
2° cas dits »locaux«
3° cas qui pourraient etre qualifics de »secondaires«, c'est-
ä-dire exprimes par des formants qui possedent la faculte
de s'ajouter ä des formes casuelles dejä completes.
12
166 LAK
Systeme.
11 Cc Psl n/ AI
Notes explicalives.
a ß a IIme elntif-circumessif, en -c'- + -at'u (avec allongement
transitoire de la voyelle), 's'eloignant en cessant d'ßtre
(au)pres de'; ex. q'at'lu-c'üt'u 's'eloignant apres avoir ete
pres de la maison'; bnta-cTiVu ük'rn 'je suis venu du
pere'; usui-cWu murx' lasi 'prends la fouet au fröre!'
On voit bien que, tout en designant un eloignement net.
LAK 167
Avant-propos p. III
Ouvrages cites p. V
Symboles. Abreviations. Terminologie p. X
/. Probleme p. 1
A. Theorie greco-latine p. 1
1. Theorie grecque p. 1
2. Theorie latine p . 13
3. Les temps modernes p. 22
B. Theorie indo-europeenne p. 33
1. Introduction p. 33
2. Les localistes p. 36
3. Les antilocalistes p . 45
4. Les demi-Iocalistes p . 55
C. Theorie panchronique p. 62
D. La position du probleme. Directives pour sa Solu-
tion p. 71
1. Principes generaux p. 71
a. Delimitation de la categorie p. 71
b. Definition de la categorie p. 84
2. Division du probleme. Resultats provisoires . . p. 95
//. Systeme p. 111
A. Structure generale p. 111
B. Systeme sublogique p. 127
C. Systemes ä trois dimensions p. 137
a) Tabassaran p. 138
b) Lak p. 160
LOUIS HJELMSLEV
DEUX1EME PARTIE
UNIVERSITETSFORLAGET I AARHUS
LEVIN & MUNKSGAARD - K0BENI1AVN
1937
AVANT-PROPOS
1
Cf. I p. 135.
2 AVAH
a) Avar.
A. SCHIEFNER 1862, 1872, 1873. F. MÜLLER III, 2, 67 sv.
• P.-K. USLAR 1889. N. JAKOVLEV 1924. L. ZIRKOV 1924.
A. DIRR, Ein/. 1928.162 sv. K. BOUDA 1932.
1
Pour notre terminologie se reporter ä I p. xij.
4 AVAIl
faits recls, qui sonl nioins compliques, seiont indiques dans nos
notes explicatives a la suite du Systeme.
Les 36 cas de l'avar sont scindcs par la grammaire tradition-
nelle en deux groupcs: un »Systeme« de cas »locaux«, qui sont
au nombre de 6 fois 5, etablis sur deux dimensions, plus 6 cas
»abstraits« ou »grammaticaux«. Pour qui cherche la Synthese,
il saute aux yeux que les 6 cas »abstraits« ne sont que les six
termes de la premiere dimension compris sous 2 F.
La premiere dimension presente l'orientation negative; le
seul cas vraiment bien defini et retreci, l'elatif, indique l'eloigne-
ment. La dimension comprend six termes:
a elatif (particule - ( s ) n ) , designant un eloignement net.
A illatif (particule -e), designant un rapprochement vague,
et souvent accompagne d'une idee de reciprocite ou
de repos.
ß ablatif (particule -(s)aXun), designant la direction d'un
eloignement: 'allant dans la direction de, en s'eloi-
gnant'.
B allatif (particule -eXun), designant la direction d'un rap-
prochement: 'allant dans la direction vers'.
y prosecutif (particule -(s)an), designant 'par, ä travers',
et par consequent ä la fois eloignement et rapproche-
ment.
T locatif (particule -0), designant le »repos«, ni eloignement
ni rapprochement.
La deuxieme dimension, qui comprend egalement 6 termes,
presente l'orientation positive. La forme particuliere prise par
la dimension de coherence est en avar ä la fois celle d'inherence
et Celle d'adherence, tout en insistant sur l'inherence comme la
face essentielle de la dimension. Or le seul cas bien defini et
retreci est l'inessif I er , qui designe une interiorite nette. Les
termes de la deuxieme dimension sont les suivants:
a Ier inessif (particule -ü- 1 ), designant une interiorite ab-
1
II n'y a pas pour cela eoineidence reelle avec le locatif. En gram-
maire, deux elements homonymes restent distinctss'ils apparliennenl
ä deux ordres morphematiques differents (deux paradigmes dif-
ferenls). Ici la premiere et la deuxieme dimension constituent deux
AVAK ".>
solue, sans distinction de contact et de non-contact:
'content! ou renferme dans l'interieur de'.
A snperessif (particule -rf(a)-), designant dans les emplois
concrets 'sur' (avec contact) ou 'au-dessus de' (sans
contact), et sans distinction entre l'interiorite et l'ex-
teriorite: il signifie a la fois 'contenu dans la surface
de' et 'etant sur, mais restant exterieur a la surface
de'; il est donc neutre ou complexe par rapport ä la
distinction de coherence et d'incoherence. Mais le
superessif admet nombre d'emplois »abstraits« qui
fönt voir que l'idee propre et locale de 'sur, au-dessus
de' n'est pas sa valeur essentielle; la cellule de super-
essif est definie uniquement par le fait qu'elle designe
indifferemment coherence, incoherence et neutralite.
ß //""' inessif (particule -tl'-), signifiant 'dans' ou 'ä', sans
faire valoir l'interiorite dans la meme mesure absolue
que le I er inessif. II n'est pas meconnaissable que le
II m c inessif insiste sur la coherence, mais il insiste
plus sur l'adherence que sur l'inherence. Le I e r in-
essif designe souvent une interiorite sans adhcrence
(DIRR 164 dit que le I er illatif est forme particuliere-
ment volontiers des noms »die von allen Seiten ge-
schlossene und einen leeren1 Raum in sich einschliesz-
ende Dinge bezeichnen«); en revanche le II m e inessif
indique surtout une adhcrence sans interiorite. C'est
ainsi que la coherence indiquee en avar est a la fois
une inherence et une adhcrence, l'inherence restant
la face essentielle de l'idee; mais cette face essentielle
1
Pour les symboles voir I p. x.
AVAR 7
Systeme.
+ a A ß B y r
E I Dl I E II E Ads E Sb Cp
11 I Spl 11 II 11 Ads Sl D
Ab Inel Dl II Ablnell Ab Ab Sb Er
Notes expticatives.
a a I" elatif (elatif-l" inessif), en -0- + -(.s)a, 'sortant
de l'interieur de'; ex. ruq' 'maison' I er 61. ro'q'o-sa '(sor-
tant) de la maison'; yan'sini-sa 'biq'un 'b-ugo larac' 'de
la malle ils ont vole l'argent'.
Aa l" illatif (illatif-Ier inessif), en -0- + [indice de rappel
du genre de l'autre objet du rapport casuel] + -e, '(en-
trant) ä l'interieur'; ex. masc. ro'q'o-u-e '[i7 entra] dans
la maison', fem. ro'q'o-i-e '[eile entra] dans la maison',
ntr. ro'q'o-b-e '[cela entra] dans la maison'.
ßa ablatif-l" inessif, en -0- + -(s)aXun, 's'eloignant de
l'interieur de', en insistant plus sur la simple direction
de ou sur l'eloignement que sur le fait de sortir; ex.
ro'q'o-saXun va'c"ina 'vugo hau vas' 'ce garcon vient de
la maison'. Ce cas est utilisß pour traduire 'de' avec les
AVAlt
•1
III AVAR
2*
12 AVAK
1
Ajoutons pour etre complet que dans quelques conditions, fixees
par la structure phonematique du »theme«, l'alteration du phonc-
matisme thematique, occasionnee par l'absence de l'indice du genre
et nombre dans la fonction adverbiale, est plus compliquee, sans
pour cela compromettre le principe. Cf. k'ois 'mal', k'oiia-u, -i, -b,
-I, -va-u, -ja-i, -ba-b, -la-l niauvais'. De plus l'indice de genre peut
s'clargir par un element sigmatique: iaq'a 'aujourd'hui', 'iaq'a-seu,
-sei, -seb, -sei, zaq^a-vese-seu, -jese-sei, -bese-seb, -rese-sel (celui)
d'aujourd'hui'; que l'elenu'nt sigmatique fasse partie du formant
de genre decoule du fait qu'il se repete dans le redoublement
generique.
AVAR 23
1
Cf. plus haut, p. 1.
24 AVAR
b) Hurqili.
A. SCHIEFNER 1871. F. MÜLLER III, 2, 110 sv. »P.-K. USLAR 1892.
L. ZIRKOV 1926. A. DIRR, Einf. 1928. 210 sv.1
Systeme.
H-a A ß B f
Ab I E I Ab-E I
Ab II E II Ab-E II
Id D AI 11 Al-Il
Si Er Ab IV E IV Ab-E IV
Eq N
Notes explicatives.
ßa comparatif, en -(i)iii (precdde du morpheme de nombre
(comme tous les cas dont le formant ne präsente pas une
fusion avec celui du pluriel) et suivi d'un indice de rappel
du genre de l'objet compare), ex. dis 'couteau' comp, dis-
HUKQILI 33
ßiguq'u '[cela] lui plaif. Dans les deux emplois, qui sont
en realite inseparables, l'idee de rapprochement est au pre-
mier plan.
yA ergatif, en -(/-)i'(-'/i(0), ex. dis-li, dis-liin, dis-liini.
(Autres desinences au pluriel.) Les emplois multiples de
ce cas justifient bien la definition par ly, qui lui va aussi
bien que celle par Iß qui le rapprocherait plus du cas
correspondant du tabassaran et de l'avar. II est le sujet
du verbe transitif ä l'aspect non-duratif: nu-ni c'a/ni
a-d-ilq^ulla 'y'allume le(s) feu(x)'; di-la udzi-li ßic'
haßusiß 'mon frere a tue le loup'. II designe l'instrument,
ce qui implique l'idee d'une reciprocite, d'un etat de ten-
sion entre les deux objets: nu-ni Iwari xaßu&ira t'up'an-li
'le Iievre a ete tue au moyen du fusil, d'un coup de fusil'.
II est aussi cas adverbial et regime de prepositions.
TA nominatif, en -0. Le nominatif est, comme dans les autres
langues etudiees, le cas neutre par excellence. II designe
le sujet des verbes transitifs a l'aspect duratif: nu c'am-a
(gen.) elq'ulla 'je (masc.) suis en train d'allumer le feu\
et l'objet des verbes transitifs ä l'aspect non-duratif (voir
l'exemple ßif plus haut sous yA ergatif).
aß Ier ablatif (pur) (Ier ablatif-I" adessif), en -\i- + indice de
rappel du genre de l'autre objet de la relation casuelle
+ -ßßif, 'se detachant des environs de, en s'eloignant de
celui qui parle'. Noter que selon des lois phoniques
regulieres l'indice du masculin -w- et celui du neutre -ß-
se reduisent ä ze>o devant le consonantisme -ßß- de la
particule du I er ablatif. Ex. wac^ali-li-ßßit' (m., n.),
wac'ali-li-r-ßßiV (f.) 's'eloignant de la foret en s'en allant
de moi'.
Aß IIme ablatif (pur) (IIme ablatif-Ier adessif), en -li- + indice
de genre + -ad 'se detachant des environs de, en montant';
ex. wac'ali-li-wlrlß-ad 'montant des environs de la foret'.
ßß lllme ablatif (pur) (III"" ablatif-I" adessif), en -li- +
indice de genre + -xad, 'se detachant des environs de,
en descendant'; ex. wac'ali-li-wlrlß-xad 'descendant des
environs de la foret'.
nriioin
r
BfJ alltilif (latif-I> adessif), en -li- + -0, 'allant vers, se
dirigeant dans les environs de'; avec l'indice de gerne
insere entre les particnles casuelles l'allatif signifie 'etant
dans les environs de, ä cöte de, prcs de'. Ex. wac'ati-li
'vers la foret'; wac^ali-M-wlrlß '(etant) dans les environs
de la foret'; maza ßit'aifiß wac^ali-li-ß 'le mouton a cte
perdu, s'est egare aux environs de la foret'.
yß /V'«f ablatif (pur) (IV"" ablatif-I" adessif), en -\i- +
indice de genre + -sad, 'venant des environs de'; ex.
wac'ali-li-wlrlß-sad 'venant des environs de la foret'.
aB / " elatif (I"~ ablatif-inessif), en -zi- + indice de genre +
-ßßiV, 'sortant de, en s'eloignant de celui qui parle'.
w, ß > 0 devant ßß (cp. aß I " ablatif). Ex. wac'ali-zi-ßßiV
(m., n.), waca-li-zi-r-ßßiV (f.) 'sortant de la foret en s'en
allant de moi'.
AB II"" elatif dl"" ablatif-inessif), en -zi- + indice de genre
+ -ad, 'montant de l'interieur de'; ex. wac'ali-zi-wlrlß-ad
'montant de l'int6rieur de la foret'.
ßB III"" elatif (III"" ablatif-inessif), en -zi- + indice de genre
+ -xad, 'descendant de l'interieur de'; ex. wac'ali-zi-wlrlß-
-xad 'descendant de l'interieur de la foret, descendant
apres etre sorti de la foret'.
BB illatif (latif-inessif), en -zi- + -0 'se dirigeant ä l'interieur
de, penetrant dans'; avec l'indice de genre insere entre les
particules casuelles l'illatif signifie 'etant dans, ä l'interieur
de'. Ex. hit'-is wac'ali-zi wasis ßiguq'u 'il aime aller
dans la foret'; wac^ali-zi-wlrlß 'etant dans la foret'; hii
galgali-zi-ß umXa liß 'dans cet arbre il y a im creux'
(de galga 'arbre').
yB IV"" elatif (IV"" ablatif-inessif'), en -zi- + indice de genre
+ -sad 'venant de l'interieur de', ex. wac'ali-zi-wlrlß-sad
'venant (en sortant) de la foret'.
ay ablatif-I" elatif (l" ablatif-II"" adessif), en -du- + indice
de genre + -ßßiV 's'eloignant de quelque chose et de celui
qui parle', w, ß > 0 devant ßß (cp. aß I er ablatif). Ex.
wae'ali-du-ßßit' (m., n.), wac'ali-tu-r-ßßit' (f.) 's'eloignant
de la foret et de moi; disparaissant de la foret*.
HURQILI :t?
mt me
Ay (iblutif-ll elatif (11"" ablatif-II adessif), en -du- +
indice de genre + -ad, 's'eloignant de, en montant'; ex.
wac'ali-öu-wlrl/3-ad 's'eloignant de la foret en montant'.
ßy ablatif-IIIme elatif (lllme ablatif-IIme adessif), en -tu- +
indice de genre + -xad. 's'eloignant de, en descendant';
ex. wa&ali-cu-wlrlß-xad 's'eloignant de la foret en de-
scendant'.
By allatif-illatif (latif-Ilme adessif), en -iu- + -0 'allant ä
(vers ou chez)'; avec l'indice de genre insere entre les
particules casuelles l'allatif-illatif signifie 'etant pres de,
etant aupres de, etant chez'. Ex. wac^ali-cu 'allant ä la
foret', 'zum Wald'; ßic'-lis wac^ali-cu-ß ßuis ßiguq'u 'le
loup aime vivre pres de la foret', 'beim Walde, am Walde'
(ßic' 'loup' etant du genre neutre; dans la meme construc-
tion, si le sujet-datif etait du genre masculin, on aurait
wac'ali-tu-w, et s'il etait du feminin, wac'ali-cu-r).
YY ablatif-lVm< elatif (IVme ablatif-11""? adessif), en -cu- +
indice de genre + -sad, 'venant de'; ex. wac^ali-cu-wlrlß-sad
'venant de la foret'.
1
MÜLLER ne rend pas compte des cas proprenient locaux.
:« KURI
I V " -
c) Kurt.
A. SCHIEFNER 1873. F. MÜLLER III, 2, 129 sv.
*P.-K. USLAR 189G. A. DIRR, Einf. 1928.286 sv.
• LIONIDZE-SLLTANOV, Sbornik XIV.
Le küri (du groupe samourien comme le tabassaran, le tsaxur
et l'agul qui viennent d'etre mentionnes) offre un effectif de 19
cas ranges dans un Systeme dont la structure est particulierement
instructive.
Si les descriptions grammaticales de cette langue ne donnent
d'ordinaire que 18 cas dans chaque paradigme, c'est que
l'adverbial n'y figure pas. Mais puisque l'adverbial est un cas
(voir I p. 97 sv.) il convient d'en tenir compte dans le Systeme
casuel. On verra que le küri est instructif pour elucider ce
probleme de principe: sans l'adverbial le Systeme serait contraire
aux lois generales de structure; sans l'adverbial il n'y aurait
pas de veritable Systeme casuel.
A part ce probleme de principe, sur lequel il y aura lieu de
revenir apres l'etablissement du Systeme, le Systeme küri presente
au premier abord une nettetc extreme. II comporte en eflet
l c 4 cas proprement syntagmatiques, ä savoir un nominatif,
un ergatif, un datif et un ginitif;
T un »Systeme« de cas proprement locaux dont l'expression
procede par des particules constantes, et dont les cellules se
KURI Sfl
On aurait de la sorte
a inessif (particule zero)
A adessif (part. -w-)
ß superessif (part. -/-)
B postessif (part. -qc-)
r subessif (part. -k1-),
soit par multiplication
<x A
Ine Ads
|3 Ab E -0-e Ab -w-e
B Lt II1 AI -w-Q
Y Prs Prs Ine -0-rfi Prs Ads -w-di
ß B r
Sp Pst Sb
ß Ab Dl -l-e Ab Pst -q'-e Ab Sb -k'-e
B Lt Spl -1-0 Psl -qc-0 Sl -k<-0
Y Prs Prs Sp • l-di Prs Pst -q'-di Prs Sb -Ac-rfi
entre ces cinq cas n'est pas une difference par rapport ä la
deuxieme dimension; d'autre part les oppositions syntagmaliques
s'expliqueraient fort bien par la premiere dimension, ä condition
d'y admettre cinq termes au lieu de trois. La configuration
a Er
A N
ßG
B D
Y Ad
a El Er
A II N
Dimensions:
1 a Ier ablatif (pas de particule)
A Ier latif (pas de particule)
ß //'"<• ablatif (particule -e)
B//"'* latif (particule zero)
y prosecutif (particule -dl)
2 a inessif-siipercssif (particule -/- entrant en combinaison
avec le H" ,e ablatif, le II lne latif et le prosecutif seulement)
A essi/ (pas de particule), indifferent a l'egard de la distinc-
tion entre adhcrence et inadherence
ß adcssif (jiarticule -w-)
B postessif (particule -q'-)
r subcssif (particule -Äc-).
i*
44 KURI
Systeme.
+ ct A ß R r
El Er
11 N
Dl G Ab Ab Pst Ab Sb
Spl D AI Psl Sl
Notes explicatives.
aa elatif (Ier ablatif-inessif), en -e, desinence indeconiposable
en particules, mais phoniquement identique ä la particule
du II m e ablatif, ce qui n'entraine aucune confusion. Une
Situation analogue vaut pour AA nominatif: sa desinence
coi'ncide au point de vue phonique avec la particule du
II m e latif, ce qui va sans inconvenients. Dans un tel cas
les homonymes restent distincts parce qu'ils ne relevent
pas d'un seul et meme paradigme dans le sens etroit de
ce mot, c'est-ä-dire d'une seule et meme dimension: le
-c du II m e ablatif et le zero du II m e latif relevent de la
premiere dimension exclusivement, alors que le -c de l'e-
latif et le zero du nominatif relevent de deux dimensions
ä la fois.1 Superflu d'ajouter que ces considerations sont
d'ordre strictement synchronique, et qu'il peut y avoir
identite diachronique lä oü il y a difference actuelle. —
On sait deja que l'elatif signifie 'sortant de l'interieur de'.
1
Gp. notre remarque p. 4, note.
KUI1I 45
(I) Tchetchene.
A. SCHIRFNBR 1864. F. MÜLLER III, 2, 105 sv.
*P.-K. l"si..\H 1888. A. DIRR, Einf. 1928.131 sv.
A.-G. M.U'.IKV 1929. J.\xnAR0V-MAClEV-A'vT0RXAN0V 1 9 3 3 .
D'entre les langues vejnax le bats est celui qui offre le Sys-
teme casuel le plus riche (cf. plus haut, p. 24). Le tchetchene
50 TCHETCHENE
Systeme.
+ ß B Y
11 AI Mt
Cp G Er
Dr Tm Eq
E Ab Dl
|
D Ad In
i
Ine Ads N
Notes explicatives.
a ß illatif, en -A", ex. deX, de da 'pere', 'entrant dans, penetrant
ä l'interieur de'. Ex. lehi buili c^ina-X 'le serpent est entre
(a rampe) dans la maison' (de c'n 'maison'). II y a ici rap-
prochement prononce et exclusif, en insistant sur la cohe-
rence. La forme particuliere prise par la deuxieme di-
mension est en tchötchene Celle de l'adherence (cf. plus
loin, sous ßß directif), mais pour l'illatif (aussi bien que
pour Tß inessif) l'usage affecte l'interpretation par l'inhe-
rence qui est toujours possible. A cet egard on peut com-
parer le hurqili (p. 30).
Aß comparatif, en -/ (precede quelquefois d'une voyelle non-
thematique), ex. de-l 'que le pere, comme le pere'. D'abord
le comparatif sert ä designer le deuxieme terme d'une com-
paraison entre deux objets possödant une qualite ä un
degre inögal; ex. uaSa jiii-l dik'i vu 'le frere est meilleur
52 TCH&TCH&NE
val'); mära-na j-iezq st'ie 'la fenime (|iii est chere OH mari,
la fenime qui est aimee de son mari' (de mär 'mari'); se
de-na suo v-ieza 'je suis eher a mon pere = mon pi're
m'aime'; se b]ergis-na guo 'n mes ijeux c'est visible = mes
yeux voient = je vois de mes tjen.i'. Remarquons en pas-
sant que dans le demier exemple le datif s'assimile de
YY instrumental qui par rapport a la premiere dimension
reeoit la meine definition, tout en restant nettement diffe-
rent par rapport a la deuxieme dimension. Mais le datif
tchetchene ne rend pas seulement les Services precites. II
est aussi le regime des prepositions spatiales indiquant
une coherence nette, et rapprochement aussi bien
qu'eloignement: &ien-na du julli t unnl Thumidite a perce
dans la maison' (de cVi 'maison' avec 6u '(entrant) dans',
comportant le sens d'illatif); Xie-na Ve '(montant, se met-
tant) dans, sur un arbre', Xie-na Ve-h '(etant) dans, sur
un arbre', Xie-na t'-ieri '(descendant) (de dessus) d'un
arbre' (de Xie 'arbre' avec Ve 'sur', comportant le sens
d'illatif, et dont on peut tirer l'inessif Ve-h et l'ablatif
t'-ieri). Dans le role de regime de ces prepositions le datif
concourt avec 1'Y nominatif, mais avec cette difference que
le datif est requis des qu'il s'agit d'un rapport eminem-
inent concret et local, et surtout d'indiquer le contact entre
les deux objets entrant dans la relation casuelle.1 C'est ce
trait qui est le plus caracteristique du datif tchetchene, et
qui lui assure la definition extensionale que nous lui assi-
gnons: il insiste sur la coherence. l'intimite, et alternative-
ment sur le rapprochement et l'eloignement, en admettant
aussi l'idee de »repos«. II se distingue par lä du datif de
toutes les autres langues caucasiques que nous avons exa-
minees dans ce chapitre, et il s'assimile d'un type de datif
qui est plus familier ä la mentalite europeenne: il se com-
porte en principe comme le datif du gotique, de l'anglais
1
»Im Hause heiszt nun c'a-cul.i . . ., wenn ich mehr den leeren Raum
innerhalb des Hauses meine, will ich aber von dem Materiellen des
Hauses, den Wänden z. 13. oder der Decke, sprechen, so musz ich
den Dativ wählen« (Dum 134). TDIRH 134 ligne 9 d'en bas lire:
»im Nominativ oder im Dativ«.]
f>4 TCHETCHENE
5
58 TCH£TCH&NK
e) Udi.
A. SCHIEFNER 1863. F. MLLLER III, 2, 140 sv. A. DIRR »1904. 1928.
Einf. 1928.334 sv.
Un Systeme net de 12 cas ranges sur deux dimensions se
trouve en udi (dans le sud-est du Caucase; appartenant, comme
les autres langues examinees jusqu'ici, a la famille tchetcheno-
lesghienne). Le Systeme udi comporte deux cas qui insistent
sur l'eloignement, le genitif et l'ablatif, et quatre qui insistent
sur le rapprochement, ä savoir l'accusatif, le terminatif, l'allatif
et le datif. La premiere dimension doit donc presenter Porienta-
tion positive et comprendre six termes. La deuxieme dimension
en comprend deux seulement; mais, outre le locatif peut-etre, il
n'y a pas en udi des cas designant l'adhesion exclusive; c'est dire
62
• +• a A
Ac Tm
+a -X -/
Cs Ads
-sta
AI D
voyelle
G Ab
-n, -#• -Xo
Er Cm
-n -Xol(an)
N L
-0 -iX
f) Eskimo.
Pour citer un Systeme regulier et bien etudie comportant 8
cas on ne saurait guere choisir un meilleur exemple que celui
de Veskimo. (Voir dernierement HAMMERICH, avec bibliographie;
pour l'effectif casuel surtout p. 38 sv., 43 sv.)
La grammaire magistrale de KLEINSCHMIDT, qui inaugure la
tradition moderne pour l'etude scientifique de cette langue,
enseigne que, outre les deux cas proprement syntagmatiques:
le »subjectif« et l'»objectif«, sur lesquels on va revenir, il y a
en eskimo cinq cas »dependants«. Sur ce point comme sur beau-
coup d'autres, l'oeuvre de Kleinschmidt offre un interet theo-
rique considerable. S'inspirant de la pensee de W. von Hum-
boldt et de l'ecole boppienne, Kleinschmidt conserve, ä une
epoque oü la theorie antilocaliste etait ä la inode, la conception
localiste dans le sens de Wüllner. Selon lui les cas {beziehungs-
formen, casus) dcsignent une relation (.verhältniss), ou bien
locale (orlsverhaltniss) ou bien modale (artverhältniss). Cette
premiere distinction correspond en principe ä notre deuxieme
dimension: la relation locale ä la case de coherence, la relation
modale ä celle d'incoherence. Abstraction faite de la relation
locale pure et simple (le »repos« ou l'indifference a l'egard des
distinctions de la premiere dimension) cette relation admet
trois concepts differencies: l'eloignement (ausgangsverhältniss)
(c'est-ä-dire -^ß), le rapprochement (zielverhältniss) ( - H B ) et
66 ESKIMO
1
Nous donnons les desinences groenlandaises qui se trouvent au
singulier non muni de morphemes de personne. D'ailleurs les de-
sinences sont en principe les meraes dans tous les paradigmes et
dans tous les dialectes.
2
Nous suivons ici la terminologie de M. THALBITZER (HANDBOOK
de BOAS 1016 sv.).
G8 ESKIMO
1
Voir THAUUTZER 1930.324.
ESKIMO 73
Avant-propos p. III
Ouvrages cites _ p. V
//. Systeme (continue):
D. Systemes ä deux dimensions p. 1
a) Avar p. 2
b) Hurqili p. 25
c) Küri p. 38
d) Tchetchene p. 49
e) Udi p. 61
t) Eskimo p. 65
E. Remarques sur les systemes ä une dimension . . p. 76
Bayerisch»
Staatsbibliothek
München