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Philosophiques
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ARTICLES
UN CONSEIL DE FREUD
AUX PHILOSOPHES
par Gérard Vachon
INTRODUCTION
— la méconnaissance de l'inconscient ;
— la prétention d'offrir un tableau complet de l'univers ;
— la surestimation de la valeur cognitive de nos opérations
logiques ;
6. Sigmund FREUD, «L'homme aux rats», Cinq psychanalyses, Paris, P.U.F., 1985,
pp. 247-248.
7. Sigmund FREUD, Nouvelles conférences sur la psychanalyse, Paris, Gallimard, 1952,
p. 219.
8. I bid., p. 225.
UN CONSEIL DE FREUD 7
11. Gaston BACHELARD, La terre et les rêveries de la volonté, Paris, Librairie José Corti,
1948, p. 112, note 5.
12. Voir Emmanuel MOUNIER, Introduction aux existentialisme s, Paris, Gallimard, 1962,
pp. 120-123.
13. Voir Jean-Paul SARTRE, Les mots, Paris, Gallimard, 1975, p. 211.
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23. Karl STERN, Refus de la femme. Essai, Montréal, Éditions HMH, 1968, p. 115.
24. Ibid., p. 118.
14 PHILOSOPHIQUES
29. J.O. WISDOM, « The Unconscious Origin of Schopenhauer's Philosophy », The Interna-
tional Journal of Psycho-Analysis, 1945, Vol. X X V I , p p . 44-52.
30. J.O. WISDOM, « T h r e e Dreams of Descartes», The International Journal of Psycho-
Analysis, 1947, Vol. XXVIII, pp. 11-18.
31. J.O. WISDOM, The Unconscious Origin of Berkeley's Philosophy, London, T h e H o g a r t h
Press and the Institute of Psycho-Analysis, 1953-
UN CONSEIL DE FREUD 17
pas des causes dont les effets peuvent être prédits de façon
précise ; elles décrivent plutôt, la plupart du temps, les
causes d'un effet déjà connu.
4. Les interprétations doivent être du même type que celles
faites dans la clinique, et préférablement utilisées largement
dans la pratique clinique.
5. L'épreuve la plus importante serait l'effet des interprétations
sur un patient, mais ceci manque entièrement dans des
interprétations comme celles dont nous parlons. 32
Malgré la qualité du travail de Wisdom, il faut dire que
certaines de ses interprétations laissent le lecteur mal à l'aise,
même celui qui connaît les théories freudiennes et ne les rejette
pas automatiquement. Dans plusieurs cas, ses interprétations
reposent sur des conclusions établies par l'expérience clinique de
nombreux psychanalystes, comme l'exige son quatrième critère,
mais sans confirmation dans les faits connus à propos de Berkeley.
Avant d'exposer un exemple de cette lacune, il faut voir une
partie du parcours préalable de Wisdom. Après avoir démontré
comment Berkeley souffrait d'une peur exagérée du poison, et
après avoir établi des liens entre cette peur et sa doctrine selon
laquelle la matière n'existait pas, ainsi qu'avec sa foi absolue dans
les vertus curatives de l'eau de gaudron, Wisdom tente d'expliquer
l'ambivalence de Berkeley envers la matière. D'un côté, elle
n'existait pas, mais il fallait néanmoins déployer des efforts
énormes pour l'éliminer sous la forme du poison. Wisdom offre
l'interprétation que Berkeley souffrait d'un sentiment de culpabilité
inconscient à cause d'un désir refoulé d'avoir quelque chose d'inti-
mement relié au poison. Jusqu'ici, Wisdom fournit des justifications,
quelquefois ténues, mais dont le lecteur peut prendre note et
évaluer la valeur démonstrative.
Cependant, à la prochaine étape, Wisdom déclare qu'il faut
aller plus loin et trouver le précurseur de tous ces genres de poison,
c'est-à-dire la matière fécale. Il avance donc l'interprétation selon
laquelle, pour Berkeley, à l'âge adulte les fèces étaient du poison. 33
Comme Wisdom le souligne, les liens psychiques entre le poison et
34. Sigmund FREUD, «Constructions dans l'analyse», Résultats, idées, problèmes, II,
1921-1938, Paris, P.U.F., 1987, pp. 273 et 277.
UN CONSEIL DE FREUD 19
37. Wisdom donne son appréciation, très critique, de l'analyse philosophique, du positivisme
logique et de la philosophie linguistique, ibid., p p . 40-44.
38. Wisdom compare ses propres vues et celles de Lazerowitz, ibid., pp. 193-195.
39. Le professeur Lazerowitz a présenté ses thèses à de nombreuses reprises. Ici, nous en
résumons certains aspects surtout à partir du chapitre intitulé « T h e N a t u r e of
Metaphysics », The Structure of Metaphysics, London, Routledge and Kegan Paul,
1955, pp. 2 3 - 7 9 ; et de l'article « T h e Relevance of Psychoanalysis to Philosophy»,
Psychoanalysis, Scientific Method and Philosophy, éd. par Sidney Hook, N e w York,
New York University Press, 1959, pp. 133-156.
40. Voir The Structure of Metaphysics, pp. 261-268.
UN CONSEIL DE FREUD 21
47. Voir, e.g., The Structure of Metaphysics, pp. 67-79 ; Psychoanalysis, Scientific Method
and Philosophy, p. 136 et p. 153 ; Philosophy and Illusion, pp. 109-110.
24 PHILOSOPHIQUES
Dans les divers articles des quatre livres que nous avons
énumérés, les thèses que nous avons déjà résumées sont inlassa-
blement appliquées à une grande variété de sujets tels que l'existence
des universaux, le mouvement, l'espace, le temps, la perception,
l'induction, et beaucoup d'autres. Comme chaque article est plus ou
moins autosuffisant, on trouve beaucoup de répétitions d'un
article à l'autre, mais aussi des nuances nouvelles ou de nouvelles
façons d'exprimer les mêmes idées.
Comme nous l'avons signalé plus haut, la partie de l'argu-
mentation qui est fondée sur la logique et la linguistique est très
élaborée. Par contre, les exemples donnés pour illustrer la motivation
inconsciente des théories de divers philosophes sont très peu
Même s'ils ne sont pas bien documentés, les liens que Lazero-
witz suggère entre les théories de nombreux philosophes et leur
inconscient, pourraient très bien être valables. Dans un de ses
articles, «The Nature of Metaphysics», il exprime la conviction
que tôt ou tard la philosophie deviendra un domaine auquel les
psychanalystes consacreront plus d'attention. Il déclare également :
Certainly philosophy is of sufficient importance as an intellectual
phenomenon to deserve to have more light thrown on it than it has had
up to the present, and by investigators who do not have a vested
interest in it.6()
(2) que nos fonctions mentales imposent sur nos sensations des
formes et des structures nécessaires et universelles.
Feuer donne à la première de ces propositions le titre de
« estrangement assumption » ; 7 0 c'est-à-dire que les sensations ne
sont pas fiables, qu'elles constituent un mur entre nous et la
réalité. Il décrit ensuite le genre de personne qui est enclin, pour
des raisons émotives, à déprécier le rôle des sensations. De telles
personnes cherchent à refouler ou à retenir leur sexualité au
moyen de divers mécanismes de défense. Surtout, ce sont des
personnes pour qui ce qu'elles reçoivent des sens évoque un
sentiment de culpabilité.
L'odorat inspirait un grand dégoût à Kant. Freud a noté que
l'hostilité envers l'odorat était caractéristique des personnes qui
sont offensées par la sexualité. Kant a également exprimé son
malaise à propos de la vue. Il déclarait que beaucoup d'hommes
sont incapables de faire abstraction d'un défaut qu'ils voient chez
des femmes qu'ils pourraient autrement aimer. Kant était grande-
ment distrait si un bouton manquait au manteau d'un de ses
étudiants, ce qui aurait évoqué le déshabillage, et provoqué la
crainte de perdre le contrôle de ses sentations. Kant est devenu
aveugle temporairement à deux reprises, et le professeur Feuer est
d'avis qu'il s'agissait d'une cécité « which was evidently neurotic in
its origin. » 7 1
Kant se sentait obligé de résister à la soif. Il ne voulait pas être
vu lorsqu'il buvait du thé. Les sens étaient une autre source de
perturbation pour lui. Il les comparait aux odeurs qui se répandent
dans toutes les directions et que l'on doit subir même contre son
gré.
Feuer apporte beaucoup d'autres indications, toujours docu-
mentées, pour appuyer sa thèse selon laquelle Kant souffrait d'une
grande méfiance émotive envers toutes les formes de sensation. Il
passe ensuite au deuxième postulat qu'il voit dans la «proto-
philosophie» de Kant — celui selon lequel la raison impose à
notre expérience des formes et des catégories nécessaires. Il
entend démontrer que la déduction transcendantale des catégories
UN BILAN PROVISOIRE
B) Quand l'appliquer ?
E) Les bénéfices
Université d'Ottawa
BIBLIOGRAPHIE