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Leçon 3
L'interview
par Christina Scott
3.1 Introduction
Comment maximiser le rendement des interviews avec des chercheurs spécialisés? Voilà
tout un défi pour les journalistes scientifiques alors que les chercheurs sont plus habitués à
donner des cours à des étudiants et à écrire pour d’autres scientifiques hautement qualifiés,
qu’à communiquer avec le grand public.
Une interview peut façonner ou détruire une histoire. Sa préparation est importante mais
pas toujours possible. Comment poser des questions alors qu’on ne connaît rien du sujet?
Comment persuader un scientifique pressé et stressé de prendre le temps de parler?
Comment amener quelqu’un qui ne vous connaît pas à discuter avec vous comme un vieil
ami? Que faire si vos notes ne reflètent pas exactement l’interview?
Avec ces aspects pris en considération, vous devriez essayer de préparer et réaliser les
interviews différemment. N’hésitez pas à faire des appels ou écrire des courriels après
l’interview pour préciser tel ou tel détail. N’oubliez pas le facteur de la peur: beaucoup de
scientifiques ne sont pas formés à entrer en contacts avec les médias. Ils ont peur que la
couverture médiatique nuise à leur réputation, et les interviews les effrayent vraiment. Ne
perdez pas de vue l’objectif ultime de l’interview : intéresser et même intriguer le lecteur, le
téléspectateur ou l’auditeur.
Prenez en note toutes les coordonnées de toute autre personne que vous pourriez
interviewer qui vous sera recommandée en pré-interview. Même si vous n’utilisez pas
immédiatement ces autres ressources, vous améliorez d’autant votre carnet d’adresses pour
des usages ultérieurs.
Attention : demander aux mêmes personnes des informations en pré-interview peut finir
par les ennuyer. C’est aussi risquer de n’être dirigé que vers les mêmes collègues et amis.
Essayez de trouver des gens différents à interviewer, y compris des chercheurs concurrents.
Les étudiants aux études graduées (maîtrise ou doctorat) peuvent être difficiles à joindre
par téléphone, mais ils sont constamment proches des départements des sciences et sont
donc de bonnes sources d’informations. S’il y en a qui s’expriment bien, vous pouvez même
les interviewer formellement. Parfois, les jeunes étudiants ont une meilleure prestation en
télévision que leurs aînés dans la profession. En même temps, les interviewer pourrait être
une façon diplomate de montrer à certains scientifiques haut placés qui bloquent l’accès à
leurs collègues qu’ils ne sont pas indispensables. Dans ce cas, une technique efficace peut
être d’insister sur combien ces personnes autorisées sont occupées, ou sur l’importance de
diversifier les points de vue.
C’est pendant la pré-interview qu’il est bon de demander des illustrations. Une photo ou un
dessin de bonne qualité peut beaucoup aider votre propre compréhension, faciliter la
conduite de l’interview et même servir à illustrer votre histoire. Par exemple, vous pourriez
demander au scientifique : « Que représente cette photo? » « Que voyons-nous ici? ».
Parfois, demander des illustrations aide les personnes interviewées à faire la différence
entre la communication entre experts et la communication au public. Vérifiez toujours que
vous avez l’autorisation de reproduire les images qu’on vous remet, que les relationnistes
ou les scientifiques ne violent pas les lois sur les droits d’auteurs. Aussi, assurez-vous de
garantir à chaque photographe, chaque caméraman ou artiste le crédit de son travail en
mettant son nom avec.
Lors d’une interview pour faire le portrait d’un chercheur Posez des questions personnelles,
intimes, concernant sa personnalité, et non seulement le scientifique. Vous pourriez même
parler à ses collègues, ses amis ou sa famille.
Lors d’une interview sur la recherche Concentrez-vous sur les résultats et leur pertinence et
leurs implications.
Lors d’une interview pour un dossier Faites de petites interviews d’une gamme variée de
personnes comprenant des scientifiques, des décideurs politiques, des éducateurs et autres.
Il faut donner une perspective large au sujet, et des opinions sous plusieurs aspects.
Lors d’une interview de controverse parfois appelée « sur la sellette », on veut la prise de
position claire du scientifique. Soyez critique dans ce cas, faites l’avocat du diable.
Demandez « quelle est la pertinence de… » Prenez la place du lecteur ou de l’auditeur le
plus critique, parce qu’alors le scientifique est obligé de se montrer aussi persuasif que
possible.
Lors d’une interview de controverse, vous pouvez utiliser des questions exprimées par
d’autres organisations. Faites porter la responsabilité des questions et des affirmations par
d’autres. Par exemple : « des campagnes d’environnementalistes arguent que les
manipulations génétiques que vous faites causent de problèmes… » ou « Certains critiquent
votre approche ou vos conclusions… »
Une révélation-choc? Le ministère en charge des sciences n’a pas dépensé ses fonds; les
résultats des recherches sont falsifiés; ou bien le chercheur n’a pas révélé à l’avance ses
intérêts commerciaux? C’est mieux d’avoir d’abord interviewé les auteurs des allégations
avant d’affronter la personne responsable. Vous devez vous être bien préparé à la
confrontation. Enregistrez tout. Gardez le magnétophone ouvert même lors des salutations
à la fin de l’entretien. C’est souvent à ce moment là que les gens livrent par inadvertance
d’importantes informations ou révèlent leurs pensées les plus profondes.
Une interview insolite? Y a-t-il réellement 181 choses à faire sur la Lune, comme la NASA
l’affirme? Est-ce que vous pouvez réaliser une interview dans un laboratoire de test
d’utilisation du condom? Le journalisme scientifique peut être très divertissant, et si vous
arrivez à convaincre un scientifique à se prêter au jeu avec vous, cela contribuera
certainement à conquérir votre auditoire.
Ne lisez pas tout l’article car vous allez vous perdre dans des détails souvent
incompréhensibles. Lisez le résumé (« abstract ») de quelques paragraphes, puis les
conclusions et recommandations. Adressez par courriel seulement quelques questions à
l’auteur principal dont les coordonnées se trouvent presque toujours sur la première page.
Lisez les commentaires du responsable de l’éditorial. Au cas où le rédacteur en chef serait
une bonne personne à interviewer, envoyez-lui par courriel quelques questions aussi, ou
bien appelez-le si possible. Pensez à demander : y a-t-il des chercheurs locaux qui peuvent
parler de ce sujet?
Certains aspects ne sont pas toujours traités dans les revues scientifiques qui
intéresseraient pourtant vos lecteurs. Vous devez ainsi poser des questions comme « à
partir de quand disposerons-nous des applications concrètes? », notamment quand
l’interview traite d’une nouvelle recherche médicale. Dans ce cas, le processus de test
peuvent durer jusqu’à une décennie, et pire, les gouvernements pourraient ne pas appuyer
la mise en marché.
De toute évidence, vous n’aurez pas le temps de couvrir tous les aspects de la recherche.
Choisissez-en un angle d’attaque particulier et couvrez-le à fond. Vos questions doivent
alors refléter ce choix d’approfondissement.
Ces technologies amènent la communauté scientifique entière à votre table de travail pour
une interview. Mais il y a un inconvénient : le contact impersonnel. L’interview – sauf si
vous avez l’accès vidéo par Skype grâce à une caméra de part et d’autre – est réalisée sans
contact visuel. Il est difficile dans ce cas de capter les signes de communication non
verbale, ceux indiquant par exemple que l’interlocuteur évite une réponse, ou qu’il a
quelque chose de plus à dire, ou qu’il y a un collègue dans la même salle disposant de plus
d’information. C’est pourquoi cette technologie est plus appropriée pour la préparation de
l’interview que pour l’interview elle-même.
Pour toute interview, quel qu’en soit le type, il est important d’utiliser un enregistreur
miniature ou un magnétophone. Mais ça ne remplace pas votre cahier de notes et deux
crayons à bille au moins : les machines peuvent tomber en panne. Prenez le temps avant
l’interview de vérifier les piles, les cassettes ou les disques de stockage, les câbles et autres
matériels qui pourraient ne pas fonctionner. Vérifiez aussi que vous avez du papier pour
écrire et que vos crayons, surtout s’ils sont à l’encre, fonctionnent bien. Si c’est une
interview par téléphone, n’oubliez pas de prévenir l’interviewé que vous allez enregistrer
l’interview. Vous pouvez lui dire qu’il est libre d’indiquer quand un propos est fait hors
micro, mais alors ce doit être aussi clair pour toutes les parties quand les propos peuvent à
nouveau être enregistrés. En tout cas, le journaliste ne doit pas permettre aux scientifiques
de décider après coup ce qui est ou n’est pas hors micro.
Attirez leur attention sur le fait que les bailleurs de fonds, les universités et les ministères
en charge des sciences aiment qu’il y ait des reportages sur leurs recherches. Bien sûr, il
arrivera qu’on demande à ce qu’un bailleur de fonds soit cité dans votre article. Il faut
refuser. Ne vous laissez pas entraîner dans des promesses que vous ne pourriez pas tenir.
Rappelez que de nombreuses demandes de financements réfèrent aux interviews comme
des aspects importants de vulgarisation et de communication scientifiques, et que les
chercheurs peuvent, de ce fait, en faire état dans leurs demandes futures. Si un chercheur
argue qu’il manque de temps pour vous accorder une interview, demandez-lui ses
coordonnées en dehors du travail. Vous pouvez aussi lui offrir de pouvoir prendre
connaissance avant la publication des parties importantes de votre article afin d’en valider le
contenu. N’oubliez pas qu’en faisant relire tout votre article, vous en perdez le contrôle. Il
est ainsi préférable de faire ce suivi par téléphone. Faites savoir aussi que, si vous ne
pouvez pas joindre le chercheur, ou si les délais de parution ou de diffusion sont
contraignants, vous ne pourrez pas le lui faire voir. Mais aussi, ne promettez pas de faire
relire partiellement votre article si vous n’avez pas l’intention de le faire. Quoi qu’il en soit,
ne faites pas ce travail de validation avant publication avec les politiciens, y compris les
responsables des ministères en charge des sciences et leurs chargés de presse et porte-
paroles.
Quand vous travaillez sur un sujet à controverse, vous pouvez en aviser vos interlocuteurs.
Très peu refuseront d’être interviewés. Mais prenez garde qu’on ne cherche pas à influencer
vos écrits.
Rappelez-vous que, pour l’essentiel, c’est le contribuable qui paie pour la recherche. En
conséquence, le public est en droit de savoir ce qui est réalisé avec son argent. Pour une
demande d’entrevue, n’acceptez pas un non comme réponse. S’il le faut, présentez-vous-
même sans vous annoncer ou sans rendez-vous. Aussi, il est préférable de poser des
questions ouvertes qui ne se répondent pas par oui ou non. (Comment…? Pourquoi…?
Quand…? Où… Expliquez-moi…). Soyez imprévisible si nécessaire, surtout s’il s’agit de
controverses ou de cas de mauvaises pratiques.
Il se pourrait que des scientifiques demandent à avoir une liste de questions à l’avance pour
les aider à se préparer. Une telle liste, avec trois à quatre questions clés, peut l’aider à se
préparer, mais prenez soin d’avertir que vous allez devoir poser d’autres questions selon
l’évolution de la conversation. Refusez que les chercheurs s’accrochent à leurs réponses
préparées à l’avance. Gardez en réserve des questions car vous pourriez les utiliser pour
provoquer des réponses plus spontanées. Ou bien répétez des questions une fois que votre
interlocuteur devient plus détendu.
Selon le type de média, la préparation diffère.
Le préenregistré en radio
N’importe qui peut réaliser en studio des questions et réponses par téléphone. Mais un
reportage avec des sons typiques du lieu dont vous parlez bien choisis et montés, que ce
soit pour un reportage de deux minutes ou d’une demi-heure, vous permet de donner aux
auditeurs l’impression qu’ils sont véritablement dans le laboratoire ou la salle de classe.
C’est comme s’ils accompagnent le scientifique. Donc, la qualité du son – surtout les sons
d’ambiance - est importante. Certes, l’interview même reste importante mais l’ordre des
questions devient secondaire puisque vous ferez du montage. Vous pouvez répéter des
questions afin d’obtenir un meilleur son ou plus de clarifications sur le sujet; vous pouvez
aussi demander au scientifique de démontrer certains aspects de ses recherches tout en en
parlant. Si le temps et les piles dans votre appareil le permettent, vous pouvez poser des
questions additionnelles pour mieux établir le lien de confiance avec le scientifique, même
en sachant que vous n’allez pas forcément en exploiter les réponses. Vous pouvez juger
utile de bien expliquer votre approche de travail au scientifique, de sorte qu’il ou elle
comprenne bien que beaucoup d’autres catégories de personnes seront interviewées dans
l’émission à produire. Ceci permet d’éviter que votre interlocuteur pense être seul mis en
scène, avec des attentes que vous ne pourrez pas satisfaire, et comprenne qu’il ou elle est
seulement une voix parmi tant d’autres.
Le préenregistré en télévision
Une interview ne suffit pas. Vous avez besoin des images du scientifique dans différentes
situations de travail et, peut-être, en train de parler avec vous. Le fait qu’il ou elle regarde
dans un microscope ou marche dans le laboratoire peut être plus important que ce qu’il ou
elle dit. Avez-vous prévenu votre interlocuteur du temps qu’il faut pour tourner une
séquence?
Nous avons tendance à fonctionner selon des habitudes. Soyons-en conscients. Évitez
d’aligner successivement dix interviews de gens du gouvernement. Si les organisations vous
orientent continuellement vers des scientifiques d’âge mûr et de sexe masculin, insistez
pour parler à des plus jeunes et à des femmes pour disposer de voix et opinions variées.
Très peu de départements de relations publiques se donnent pour mandat d’aider les gens
des médias. Ils ont tendance à se concentrer sur tout ce qui aide à améliorer l’image de
leurs institutions. Ne donnez pas l’occasion aux relationnistes d’assister aux interviews.
Servez-leur au contraire du café hors du lieu de l’interview. Si cela n’est pas possible pour
une raison ou une autre, installez-les là où vous pouvez les avoir bien en vue, sans que vos
interlocuteurs les voient. Ensuite, ignorez-les. Un interviewé ne sera pas totalement à l’aise
pendant l’interview en présence de ses collègues. Essayez d’interviewer chacun de vos
interlocuteurs individuellement. Rappelez-vous que vous êtes responsable de ce qui se
passe. Ne cédez pas le microphone, mais gardez-le en main. Si l’interviewé se met à parler
au cameraman, arrêtez et recommencez. S’il se met à parler dans un langage compliqué,
arrêtez-le aussi. Vous devez vous souvenir que vous travaillez pour votre public.
Télévision en direct
Assurez-vous que vous avez vos questions en mémoire pour pouvoir parler à vos
interlocuteurs les yeux dans les yeux. N’hésitez pas à changer l’ordre des questions ou
même en laisser tomber certaines pour pouvoir explorer des avenues intéressantes qui
s’ouvrent pendant l’entretien.
Malgré la contrainte de temps lors des interviews en direct, prenez soin de reprendre les
réponses si vous ne les comprenez pas. Dites par exemple : « en d’autres termes, il s’agit
de… », au lieu de simplement sauter à d’autres questions de votre liste. Ne considérez pas
que le téléspectateur vous est acquis une fois pour toute pendant l’interview : faites
régulièrement le point des détails, de contexte et du sujet en passant à d’autres questions,
dans l’intérêt des téléspectateurs qui arrivent en cours d’interview. Évitez les questions
auxquelles vos interlocuteurs peuvent répondre par oui ou non, des questions qui peuvent
couper le rythme de l’interview en direct. Aussi, ne posez pas des questions permettant à
vos interlocuteurs de prendre le contrôle de la conversation, par exemple : « Dites-moi ce
qui est important dans votre travail ». Il est possible de supprimer de telles questions dans
les montages pour les médias électroniques, internet ou imprimés, mais pas pour des
émissions en direct.
À l’écrit, puisque les délais ne sont souvent pas aussi contraignants que ceux des médias
électroniques, vous pouvez parfois interviewer seulement pour construire une relation avec
l’interlocuteur. Commencez par quelques courtes questions de vérification d’informations
comme l’orthographe du nom du chercheur ou de l’organisation, en attendant que votre
interlocuteur se détende. Vous pourrez commencer par des questions indiquant votre niveau
de connaissance du sujet au lieu des questions plus importantes. N’oubliez pas de prendre
avec vous un appareil photo numérique ou un téléphone cellulaire avec appareil photo
incorporé sachant que les photos agrémentent beaucoup un reportage.
C’est pourquoi il faut s’arranger pour que votre interview soit différente. Arrangez-vous pour
parler avec des gens ordinaires affectées par le même sujet. Par exemple, des gens atteints
de la maladie concernée, les infirmier(ère)s et médecins traitant la maladie, ou les paysans
qui souhaitent produire une culture génétiquement modifiée. Si vous réalisez ces interviews
avec ces gens avant la conférence de presse, cela pourrait vous aider à poser des questions
encore plus pertinentes ou appliquées lors de la conférence de presse.
En général, seuls les chefs de département ou les chercheurs de haut niveau parlent lors
des conférences de presse. Mais les gens impliquées dans la recherche sont une mine d’or
d’information. Par exemple, les techniciens de laboratoires, les étudiants aux cycles
supérieurs ou les gens de terrain. Ne vous contentez pas des gens au sommet des
hiérarchies.
Prenez à part en interview un des panélistes à la fin de la conférence. Vous pouvez avoir la
chance d’obtenir une information en exclusivité, ou bien plus d’information spécifique sur la
personne, des pistes et adresses pour des recherches additionnelles.
C’est toujours une bonne idée d’interviewer après la conférence au moins un spécialiste qui
peut relever des aspects critiques de la recherche, ou ce qui reste à approfondir. Mais il
s’agira d’identifier quelqu’un qui n’a pas été impliqué dans la recherche en question, ne
travaille pas dans le même département et, si possible, ne travaille pas dans la même
université.
Normalement, vous ne devriez pas interviewer pendant plus de 10 minutes sans vérifier la
compréhension par une de ces questions. Si l’interview dépasse 30 minutes, cela suggère
que vous n’avez pas fait votre devoir et que vous n’avez pas compris le sujet. Envisagez de
revoir vos notes à partir du début pour récapituler les aspects discutés avec la personne
interviewée. Vous pourriez ainsi vérifier que toutes vos questions sont répondues. En même
temps, si de nouvelles informations plus intéressantes apparaissent, vous devez être prêt à
vous y adapter et laisser tomber du contenu préparé d’avance.
Encore une fois, n’oubliez pas de laisser le microphone ouvert à la fin de l’interview. Les
gens commencent à vous dire des tas de choses quand ils ont l’impression que l’interview
est terminée.
C‘est très important de se donner ce droit pendant une interview sur un sujet scientifique. «
Je ne comprends pas. Pourriez-vous me l’expliquer autrement s’il vous plaît? » Dites cela en
toute confiance. Vous n’avez pas à rougir. Dites-le encore et encore, jusqu’à ce que votre
interlocuteur explique les choses de façon compréhensible pour vous.
Qu’il s’agisse d’article de journal ou dans internet, le fait d’enregistrer ne doit pas évacuer la
nécessité de clarifier les choses pendant l’interview. La tentation est grande de penser à la
question suivante en se disant qu’en réécoutant une réponse enregistrée vous comprendrez
les choses, mais ce n’est pas sûr. Si les choses ne sont pas évidentes pour vous pendant
l’interview, comment s’attendre qu’elles le soient plus tard quand vous serez seul, et ensuite
pour vos lecteurs?
Évitez les termes techniques et les concepts scientifiques tirés des publications des
chercheurs, sauf si leur utilisation s’avère incontournable lors de l’interview. Si c’est le cas,
posez la question pour que votre interlocuteur explique les termes et concepts en question,
qu’il s’agisse d’un « superconducting super collider » en physique des particules, ou de «
mémoire immunologique » en recherche sur les vaccins.
Parfois, des scientifiques douteux ou qui ont des intérêts commerciaux, cherchent à se faire
voir grâce aux médias. Ce n’est pas nécessairement un bon signe quand un scientifique
aime se placer devant une camera ou un microphone. Il faut parfois dire non aux
scientifiques dont les recherches ne méritent pas de faire l’objet d’article de presse.
Soyez prudent avec les sujets proposés par les entreprises. Dès qu’il apparaît évident qu’il y
a intérêt à promouvoir le sujet, identifiez et interviewez un scientifique plus neutre.
Ne parlez pas aux scientifiques dans leur langage. Même si vous connaissez bien le sujet,
cela n’aide pas votre lecteur ou auditeur qui n’est pas un spécialiste du domaine. Truffer
l’article de trop d’informations peut aussi être dangereux.
Une autre bonne question est « Quelle est la chose la plus intéressante dans votre travail?
», question délibérément directe qui amène le scientifique à exprimer des points de vue plus
personnels et intéressants. Un auditeur ou un lecteur pourrait ne rien connaître sur la
bioinformatique, mais pourrait toujours s’intéresser à un scientifique qui dit: « la chose la
plus agréable en bioinformatique est que vous pouvez aller vous asseoir dans la nature avec
votre ordinateur portable et travailler en toute liberté. »
QUESTION 2: Alors que vous parlez à quelqu’un qui représente une institution ou un
ministère en charge des sciences lors d’une interview en personne, elle dit : « Cette
question n’est pas importante. Je ne répondrai pas à cette question. » Comment réagirez-
vous?
QUESTION 3: Il y a une épidémie de grippe aviaire dans votre région. Pourquoi la question
posée à chacun n’est-elle pas bonne?
QUESTION 4: Les personnes influentes peuvent vous intimider lors des interviews. Mais
elles sont généralement habituées à être interviewées, alors parfois, la difficulté la plus
3.19 Réponses
Les questions suivantes vous aideront à réviser les aspects développés dans le cours 3.
Réponses possibles
QUESTION 2: Alors que vous parlez à quelqu’un qui représente une institution ou un
ministère en charge des sciences lors d’une interview en personne, elle dit : « Cette
question n’est pas importante. Je ne répondrai pas à cette question. » Comment réagirez-
vous?
Réponses possibles
a. C’est une réponse acceptable, si elle est donnée calmement et de façon professionnelle.
Si le journaliste montre sa gêne ou son irritation, il montrera qu’il se sent
personnellement attaqué.
b. C’est une bonne réponse, parce qu’elle ouvre la possibilité que la personne interviewée
réponde à la question initiale.
c. C’est une réponse désastreuse. Vous abandonnez ainsi le contrôle de l’interview à
l’interviewé. Vous avez abdiqué.
d. C’est une réponse possible, mais il peut apparaître ennuyeuse en radio ou télévision
d’entendre la même question répétée de façon identique. Cette manière de répondre
peut être cependant appropriée en interview de presse écrite ou reportage sur Internet.
e. Cette tactique n’aide pas l’interview. Elle peut être appropriée seulement si vous savez
que vous aurez à interviewer souvent cette personne.
Réponses possibles
a. C’est là une mauvaise question car la réponse que vous obtiendrez est soit oui, soit non.
Or, ni l’une ni l’autre ne vous mène bien loin. Aussi, il n’y a aucun avantage à
interviewer une personne qui n’est pas un scientifique sur un sujet scientifique.
b. Ce que nous souhaitons savoir, c’est ce qu’il fait et que l’on doit faire en face d’un
cadavre de poulet. Nous ne voulons pas rendre un individu responsable de toute la
politique du gouvernement, surtout pour une maladie hautement infectieuse et encore
insuffisamment connue. Et puis, la question ne nous dit pas grand-chose sur son travail.
Lors d’une interview, un vétérinaire Indien se confia sur son stress d’avoir à lutter contre
la grippe aviaire seulement en abattant les poulets malades, et avec une situation où les
résultats attendus des laboratoires arrivent des mois après.
c. Dans certaines circonstances, vous pouvez embrouiller votre interviewé de cette manière
si votre public est suffisamment informé. Mais que penser des récents incidents suivants
: une campagne de vaccination contre la polio au Nigeria et des parties de l’Inde alors
que des allégations ont circulé selon lesquelles les vaccins rendent les enfants stériles ;
le refus du gouvernement Sud-Africain de croire en l’existence du VIH/SIDA ; la
prétention du Président de Gambie de pouvoir guérir le SIDA avec des plantes en trois
jours ; la police du Zimbabwe qui confisque les matériels hygiéniques des femmes sous
prétexte qu’ils sont empoisonnés. Il est important, dans ces situations, de donner des
avis croisés pour ne pas avoir à faire une publicité imméritée à quelqu’un dont les points
de vue ne valent pas la peine d’être rapportés.
d. Les gens estiment toujours que quelqu’un d’autre doit faire beaucoup face à une
situation donnée. Vous avez à connaître ce qu’il fait, non ce que le gouvernement
devrait faire
e. Avez-vous déjà entendu quelqu’un d’une entreprise pharmaceutique avouer qu’ils
vendent beaucoup de leurs médicaments?
f. Poser des questions dont les réponses vont faire appel à une litanie de chiffres va vous
embrouiller en même temps que les utilisateurs de l’information. Limitez au minimum
l’utilisation des chiffres. Par contre, le nombre de poulets morts est une donnée
importante à rapporter.
Réponses possibles
a. Ne pensez-vous pas que le sexe devrait être considéré comme une menace pour la vie?
b. Qu’est-ce que cette maladie va changer dans votre manière de gouverner?
c. Ne devrions-nous pas vaincre d’abord toutes les guerres et la pauvreté avant de nous
préoccuper de changement climatique?
d. Comment pouvez-vous convaincre mon public/mes lecteurs que ce sujet n’est pas l’un
des plus ennuyeux qui soit dans le monde?
e. Comment vos recherches ont-elles un impact dans la vie des gens?
Ces travaux portent sur le chapitre 3 du cours en ligne. Vous pouvez les faire et les envoyer
à un tuteur, à votre mentor ou d’autres mentorés et les discuter avec eux/elles.
Contactez une organisation s’occupant de science dans votre pays ou région: il y a une
Académie des Sciences dans la plupart des pays. Vous pouvez contacter la plupart d’entre
elles en cliquant sur « Membership » dans le site de l’Académie des Sciences des pays en
développement à l’adresse suivante : [ www.twas.org ], le site du Panel Inter Académies,
section « IAP Members » [ www.interacademies.net ]. Sinon, beaucoup de pays disposent
d’une organisation similaire au CRSI (Conseil pour la Recherche Scientifique et Industrielle).
Ou encore, allez voir les Facultés de Sciences dans les universités. Identifiez aussi bien les
scientifiques parmi les plus anciens et les nouveaux. Il doit y avoir quelque part des sujets
intéressants pour vos articles et émissions. Si possible, visitez des personnes ou allez voir
dans les cafétérias ou autres endroits où il est possible d’engager des conversations avec
des scientifiques. Cherchez vous-même. Demandez ce qu’ils/elles font. Demandez à garder
contact avec eux/elles. Demandez ce qui est intéressant dans leurs travaux. Il s’agit là de
construction de contacts. À long terme, cela rapporte : cela peut vous amenez à faire un
article ou une émission biographique, ou à garder en vue un sujet scientifique en cours mais
pas encore publié, ou encore reportant sur le processus pénible de la recherche scientifique,
sur les réductions budgétaires affectant le financement de la recherche. Tout ceci est à faire
pendant les jours de sous emploi.
C‘est un exercice facile à faire dans le cadre du travail normal. a) Pendant l’interview en
personne, consacrer cinq autres minutes pour interviewer la personne dans un style
complètement différent. Par exemple, si vous êtes en train de faire un reportage sur un
sujet d’actualité, essayez de réaliser aussi une interview biographique. Si vous faites un
reportage pour une nouvelle à la radio, pourquoi ne pas faire en même temps quelque
chose pour l’émission de débats? Il se pourrait que vous puissiez utiliser les deux interviews
pour des médias différents. b) Vous pouvez faire la même interview et l’utiliser pour
différents marchés. Il faut se demander si on poserait les mêmes questions pour aboutir à
un article de 800 mots destiné à un site d’informations scientifiques comme SciDev.Net, que
pour un article de nouvelle de trois paragraphes à publier dans un quotidien local, ou encore
pour la section d’information du journal Nature.
Essayez de réaliser une brève interview internationale par courriel, messagerie instantanée,
Skype, internet, ou toute autre technologie, téléphones cellulaires compris. Essayez avec un
collègue (un mentoré ou un journaliste) qui pourra se montrer ouvert à l’exercice avec la
nouvelle technologie considérée. Mais essayez de ne pas le faire avec quelqu’un de votre
voisinage ou de votre pays. Si vous êtes intéressé par les technologies les plus récentes,
essayez de créer votre propre blogue ou baladodiffusion (podcast) pour y mettre vos
interviews. Pour commencer l’adresse suivante est recommandée pour savoir étape par
étape comment procéder : [ http://www.commentcamarche.net/faq/sujet-2647-blogs-
choisir-un-hebergeur-de-blog-et-creer-son-blog#1-1-choisir-un-hebergeur-de-blog ] Sur le
site Comment ça marche
Sélectionnez le candidat le plus approprié pour votre interview, selon le sujet scientifique à
aborder. Par exemple, si vous détestez les mathématiques, ou si vous n’avez jamais
compris la physique, ou encore si votre rédacteur en chef pense que les géologues ne sont
pas bons pour des interviews, choisissez quelqu’un de fort dans ces domaines. Essayez de
comprendre un de leurs travaux, et faites une interview dans ce domaine, peut-être une
interview biographique, de sorte que vous n’avez pas forcément à parler beaucoup de
science, mais vous traiterez davantage de sa vie, de son épouse ou mari, aussi bien que de
ses enfants. Demandez pourquoi ils ou elles aiment leur travail, plutôt que de mettre
l’accent sur le travail. Rédigez-en un article de moins de 800 mots pour un auditoire
international. Envoyez l’article au site à but non lucratif www.scienceinafrica.com [
http://www.scienceinafrica.co.za ] si vous croyez que l’article peut leur plaire. Il se pourrait
qu’il soit publié, spécialement si vous l’illustrez avec une photo. Ils feront l’édition du texte
et vous ne serez pas payé.