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Habiter : le lieu et son atmosphère

Author(s): F. Esquier
Source: Revue de Métaphysique et de Morale, No. 1, Descartes en débat (JANVIER-MARS
2000), pp. 81-103
Published by: Presses Universitaires de France
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40903716
Accessed: 05-07-2018 20:49 UTC

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Habiter : le lieu et son atmosphère

Résumé. - Le vif d'un lieu habité réside dans son atmosphère. Cette supposition
oriente vers le pouvoir que dedans et dehors, tels que V architecture les détermine,
exercent sur l'homme. Ainsi centrée, l'analyse recourt, en un mouvement progressif et
tournant, à trois acceptions de la spatialité locale. Le concept kantien de l'espace ainsi
que celui de « contrée » du premier Heidegger permettent deux réponses complémen-
taires. La troisième réponse, plus développée, se fonde sur le pouvoir de vérité que l'art
lui-même détient : en fidélité au cubisme, rôle déterminant de l'organisation spatiale
dans une vue extérieure de la Villa Savoye de Le Corbusier ; faisceau de composantes
locales (matérielles et formelles) dans le cas du dedans ( saint Jérôme dans sa cellule,
gravure de Dürer).

Übersicht. - Der Hauptzug jedes Wohnortes gehört zu seiner Stimmung. Daher


kommt der Einfluss, den durch Baukunst bestimmtes Inneres und Äusseres auf den
Menschen ausüben. Die auf diese Weise zentrierte Frage und Analyse werden mit Zuzei-
hung dreier Sinne der Ortsräumlichkeit weiter geführt. Darauf antworten ergänzend
Kants Raumbegriff sowie der frühere Gedanke von « Gegend » bei Heidegger. Eine dritte
ausführlichere Antwort ist auf die Wahrheitskraft der Kunst selbst gegründet : aus Treue
zum Kubismus bestimmende Rolle der räumlichen Organisation nach einer äusseren
Sicht der Villa Savoye von Le Corbusier ; Bündel örtlicher Bedingungen (materieller
und formeller) was das Innere betrifft (Sankt Hieronymus in seiner Zelle von Dürer).

Le thème et la question d'un habitat de l'homme ne sont plus depuis long-


temps des sujets étrangers à la réflexion philosophique. « De l'homme seul,
soutient-on parfois, on peut dire qu'il habite » ; et cette proposition prend alors
une portée décisive dans la perspective d'une anthropologie - portée aussi
décisive que serait celle d'un : « seul l'homme possède la parole », ou bien celle
d'un : « seul l'homme travaille », etc. Habiter témoigne alors éminemment de
ce que l'homme est dans son être propre. Mais il apparaît aussitôt que le thème
et la question de l'habiter humain et de son sens se laissent appréhender d'une
autre façon. Car il est tout autant possible de voir dans l'habitat la réponse
donnée à sa destinée par un être qui a à être, qui est voué à se définir en
aménageant l'espace, en bâtissant dans l'ombre portée d'une mort à venir. Le
sens de l'habitat relèverait alors d'une métaphysique générale, voire même, si
l'on tient la réponse qu'il constitue comme élaborée sous la condition détermi-
nante d'une entente de l'être, d'une nécessaire référence à une ontologie.

Revue de Métaphysique et de Morale, N° 1/2000

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82 Ε Esquier

Notre démarche
deux ou trois dire
attention quant à
sur la nature des
en vue la prise en
comme c'est le c
espace bâti, avec
dans le cadre restreint d'une relation à l'édifice d'architecture et à son site. Et
certes, sur ce point, il n'y a pas lieu de s'interdire, sous prétexte de naïveté, les
descriptions possibles de ce qui a été d'abord conçu et construit selon ces
conceptions. Il n'y a pas lieu d'exercer à leur encontre une censure qui détien-
drait sa justification de ne pas méconnaître que le geste primordial de l'habiter
réside, au premier chef, dans la construction même, dans le bâtir même. Ce
serait en effet oublier que l'édification est inséparable de la fréquentation qu'elle
permet dans l'exacte mesure où, pour la majeure part, elle l'anticipe. Or, la
donnée que l'on peut tenir pour quasi générale sur ce sujet, celle que l'édification
destine à une fréquentation qui l'appelle, c'est l'opposition entre un dedans et
un dehors.
L'habitation habituelle de l'édifice construit est, malgré qu'elle en ait, presque
toujours marquée du sceau d'un étonnement. L'édifice en effet coordonne ou
articule les données concrètes, les espaces et les valeurs spatiales d'un dedans
et d'un dehors. Il les articule en les séparant ou même souvent, en ce qui
concerne l'architecture traditionnelle, en les opposant. Dès lors, la fréquentation
de l'édifice est l'expérience d'une différenciation telle généralement que, se
fondant sur des vues obtenues à partir du dehors, le sujet ne peut jamais tout à
fait anticiper les impressions qui seront les siennes une fois enveloppé par
l'espace intérieur du bâtiment. On peut même soutenir à ce sujet qu'une archi-
tecture qui cherche à abolir ou qui paraît ignorer la distinction dedans/dehors
ne peut se soutenir que d'en supposer la notion, afin de tenter cette fois d'en
bouleverser les implications émotionnelles. L'étonnement auquel nous référons
est donc bien celui qui a trait à la différenciation à la fois initiale et finale à
partir de laquelle un édifice est ce qu'il est.
Allons plus loin en précisant mieux ce qui fait l'objet de cet étonnement. Ce
qui diffère en effet entre le dedans et le dehors, ce sont les espaces mêmes, ce
sont les lieux. L'édifice s'inscrit dans un site, il appartient à un entour, que
celui-ci soit urbain ou naturel. Il en reçoit les incidences, voire les prestiges, et
il participe aussi du dialogue que rend possible une localité ouverte. Quant au
dedans, parfois totalement étranger à l'extérieur, il marque de son caractère
englobant et unitaire l'aptitude émotionnelle de l'habitant. Nous n'insisterons

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Habiter : le lieu et son atmosphère 83

pas ici, pour l'avoir fait ailleurs ' sur la nécessaire dist
sur un plan concret, entre espace et lieu. Les deux not
d'être assimilables ou interchangeables. Endroits de
recherche en viendra à s'attacher surtout aux qualités
quitaires, qui leur sont donc coextensives. Notre visée
tel symptôme mal éclairci qui s'inscrit dans le lieu, à s
Car, c'est bien dans l'atmosphère qu'ils recèlent au p
ou bien qu'ils sécrètent, que le lieu ou l'endroit se m
sont : des totalités auto-unifiées.

Un édifice se dresse là. Il se dresse ou bien il s'étend. Et il a un entour -


entour dans lequel il s'insère. C'est au sein de cet entour que le regard rencontre
l'édifice ; ou bien, c'est du sein d'un entour qu'un édifice, dans sa présence
manifeste, s'adresse à un regard pris lui-même dans cet entour. L'édifice fait
corps avec son emplacement. Il n'est pas seulement édifié sur le sol, mais il
possède, dit-on, une masse et un volume, c'est-à-dire qu'il coïncide avec cette
sorte de corporéité spatiale qui est sienne. Il a donc une masse, et d'une certaine
grandeur. Or, de cette masse ne sont visibles que la surface externe ou, plus
précisément, que les plans articulés entre eux et circonscrits en lesquels cette
surface se décompose. D'autre part, et généralement, en son corps même, l'édi-
fice montre des ouvertures, dont on sait qu'elles annoncent un dedans, une
vacuité interne, une suite de vides et d'intervalles cachés. La masse de l'édifice
est donc une masse creuse, pleine en son enveloppe ou en telle de ses parties,
et évidée en d'autres, lesquelles peuvent en venir à constituer un dedans. Avec
l'édifice donc quatre espaces se coordonnent ou même se subordonnent :
l'espace extérieur de l'entour où se situe l'édifice, l'espace plein du corps de
l'édifice, les surfaces externes du même corps et enfin l'espace vide du dedans,
des ouvertures, des parties externes abritées. De ces quatre espaces, l'un s'iden-
tifie avec le plein des masses matérielles, le troisième est surface, le premier et
le dernier relèvent de la nature de l'intervalle.
Appréhendé de l'intérieur, un édifice ne se laisse pas envelopper du regard,
comme tout à l'heure, mais ressentir comme dedans englobant. Qu'il s'agisse
du cas limite d'une salle unique ou bien d'un intérieur plus complexe, il faut
que la tête pivote ou que le corps se déplace pour explorer le vide interne, pour
palper à distance les parois internes qui le limitent. Ce sont les possibilités de
mouvements et de parcours que l'édifice enferme qui donnent accès aux surfaces
et aux intervalles du dedans. Cependant, de l'intérieur aussi l'édifice possède

1. Francis Esquier, Arts du Lieu, essai sur l'espace concret de l'architecture et de la statuaire,
chap, πι, p. 98-141, Amilly, Éd. du Cyprès, 1996.

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84 F. Esquier

masse et grandeur,
piliers des cathédr
modernes, qui perm
ici. Ainsi appréhen
tout autre manière
participe maintena
Γ en tour de l'édifi
dernier s'oppose : c
sement ; ce qui es
inversement. Pris
analogue à celle de
l'édifice, quatre esp
de l'entour où se si
sépare son dedans
corps et enfin le v
De ces quatre espac
des masses matér
dernier relèvent d
d'étonnement : la
articulés entre eux
Qu'en est-il donc d
et assumer dans la
et cela, selon les de
et du dehors. L'édif
lui-même une dem
possède son lieu pr
de sa corporéité sp
rigoureusement irr
son aspect externe
sorte d' autopositio
dial à soi. Habiter se
de cette coordinati
coordonnées. Il est
entretient comme
en particulier, par
s'inscrire dans son
il modifie globalem
la sphère d'attracti
Le dedans est à l'év
le dedans est aussi u

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par la perception, traversé par la perception. Mais i


enclos, comme espace marqué par une clôture et par
ne possède plus d'horizon inaccessible, reculant a
déplacements. L'horizon du sujet percevant et mote
constant et fixe, qui coïncide avec l'enceinte de l'éd
dedans constituent un système de référence concurr
L'espace du dedans est une totalité qui est présente
chaque endroit ou chaque place n'étant endroit et pl
tous les endroits, c'est-à-dire du dedans. Ainsi l'espa
t-il, et il se constitue comme séparé.
La notion d'horizon fermé ou d'horizon limite gag
espace interne peut faire l'objet d'une exploratio
percevant rend possible. Le mouvement confère
interne et sur ce qu'il contient. Husserl permet d
motricité pourvoit le sujet en une diversité indéfini
d'esquisses de choses et, nous ajouterions aussi : e
Cependant, l'étude des relations de la motricité à
blage ou au système d'endroits qu'il est, relève de d
Γ L'espace du dedans est horizon en ce sens que le t
tement présent à tout point de vue et à tout parcou
perspective sur le dedans est déjà prise dans le deda
se meuve ou qu'il demeure immobile, le dedans com
diatement présent comme tout, et aussi comme orig
d'emblée toujours déjà situé. Le dedans possède une
gue à celle de l'horizon bordant l'expérience de l'esp
cité permet au sujet d'explorer la totalité d'un espace
l'épuiser. D'ailleurs, les mouvements du corps propr
diques du système oculomoteur, etc., s'appliquent à
d'autant plus de pertinence que l'architecte en a ant
sibilités. C'est en un autre sens que le dedans est
proprement husserlien où toute visée intentionnelle
parcourir, le dedans devient plus qu'un cadre qui
déplacements. D se développe en une multiplicité ef
une série de différences au sein d'un même et à par
au déploiement qu'il permet, et par quoi progressent
un habitat du lieu.
Pensé sous la catégorie de la totalité, le dedans, comme espace intérieur,
contient le sujet percevant, qui, en retour, lui appartient. Un séjour s'esquisse
à ce niveau : l'espace intérieur est soustrait aux turbulences du devenir et se
trouve préservé comme tel dans une stabilité quasi invariante. L'appartenance

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au dedans est d'ab


nature de cette e
identique à soi et
ception avec le de
comme espace sép
intérieurs, il fav
une exploration p
dehors. Ces faveu
en face d'autres c
tence ; et ceci, de
accomplissemen
donne la mesure.
réseau fermé de
inscrit dans la s
naissant.
Une référence précise peut ici servir d'illustration. À Bourges, par exemple,
une cathédrale sans transept dévoile d'emblée au visiteur qui y pénètre l'unité
et la simplicité de son immense vide interne. La volonté d'unifier l'espace entre
la nef et les bas-côtés est manifeste. Les bas-côtés sont doubles, et il s'en faut
de 0,6 mètre que leurs largeurs ne soient égales. Mais la hauteur sous voûte du
bas-côté intérieur est égale à la hauteur du bas-côté extérieur χ 2,3 - élan repris
par la nef dont la hauteur sous voûte est égale à la hauteur du bas-côté intérieur
χ 1,8. Cette nef culmine ainsi à près de 35 m au-dessus du sol. Sur une coupe
transversale de l'élévation, une tangente est quasi commune aux arcs brisés
extérieurs de la nef, du bas-côté intérieur et du bas-côté extérieur. Une idée de
la force ascensionnelle de l'espace, qui se développe lorsqu'on passe des bas-
côtés dans la nef, est fournie par l'angle très refermé (30° ) que forme la tangente
en question avec la verticale passant par la clef de voûte des arcs doubleaux ou
diagonaux de la nef. Ainsi, l'idée architecturale de cette cathédrale fut sans
doute de concevoir une nef qui, sans perdre de son unité propre et de sa grandeur
en profondeur et en hauteur comme nef, se trouvât aussi doublée de volume de
part et d'autre par les bas-côtés internes. Il y a là un procédé d'amplification,
où le vide de la nef s'accroît dans son règne par le concours puissant de deux
vides vassaux. L'effet produit est celui, quantitatif, du dépassement d'une limite
- effet de béance, effet d' illimitation, où béance et illimitation de la vacuité du
vide interne deviennent expressives d'elles-mêmes. Effet d'immensité, donc.
Effet de sublimité.
Le gothique témoigne-t-il de l'imminence parousique de l'Autre à partir du
haut ? N'emporte-t-il pas, au contraire, de toutes ses forces vers l'image close
d'un empyrée ? On peut sans doute admettre ces deux lectures. À Bourges, plus

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Habiter : le lieu et son atmosphère 87

elle s'élève, plus l'architecture se réduit à une ossatur


à l'efficience du vide spatial, lequel en retour confè
relief, leur dessin. Cette dialectique affecte néce
dedans au dehors et le dosage de la lumière. Que
dedans : les bas-côtés extérieurs comportent une ou
côtés intérieurs, dans leurs parties hautes, compo
surmontés d'un médaillon médian ; dans la nef, l
dévoré par trois vitraux de grisaille surmontés d'un
La dominante de grisailles dans la nef oppose celle-c
et aux bas-côtés, elle confère à la lumière une orientation descendante. Les
voûtes sexpartites de la nef, à cheval sur deux travées, possèdent des voûtains
profondément creusés qui les rendent d'autant plus sensibles aux variations de
la lumière pénétrant à flots par les grisailles. Tout concourt vers des effets
plastiques rigoureux dans la profondeur lointaine du haut, scheme ou symbole
d'un mixte d'ordre et d'infini.

C'est à un habitat marqué du sceau de la religion et de l'émotion du sacré


que nous convie l'illustration précédente. Nous ferons remarquer cependant que
l'épreuve de cet habitat se soutient d'abord d'une expérience spatiale étroitement
dépendante de l'influence du lieu. L'atmosphère pénétrante du lieu continue
d'agir même en l'absence de toute connivence préalable du sentiment religieux.
D'autre part, dans l'état actuel des prémisses dont nous sommes parti, nous
pouvons tenir le caractère émotionnel de cette expérience spatiale comme l'épa-
nouissement du fait premier selon lequel elle est l'expérience de la coordination
de quatre espaces sur le mode du dedans. L'atmosphère du lieu intérieur peut
être tenue pour la résultante globale de la coordination en question. Dès lors,
la précision s'impose de savoir de quoi, à propos de l'édifice, l'expérience de
la coordination de quatre espaces ainsi que celle de la séparation d'un dedans
et d'un dehors sont-elles les expériences.
Une réponse semble s'offrir : par-delà les quatre espaces, on peut tenir
l'espace unique lui-même dans lequel ils se découpent pour le principe sensible
de l'extériorité réciproque des phénomènes ou de leurs parties ainsi que de leur
coexistence. C'est à l'espace qu'il revient d'ordonner, de coordonner et de
subordonner. La thèse kantienne permet d'aller plus loin. Sous le double titre
de structure formelle de la représentation sensible et d'intuition sensible a priori,
l'espace intègre la diversité hétérogène externe à laquelle l'homme est sans
cesse confronté dans sa vie sensible à la diversité homogène que lui, l'espace,
enferme a priori, conférant ainsi au sensible sa spécificité spatiale. Habiter,
c'est découvrir le renouvellement possible des perspectives et des endroits,
explorer la kaléidoscopie des relations de position ou de grandeur qui surgit
entre les choses et les lieux. Et cela, dans l'intuition d'un phénomène originaire

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88 F. Esquier

uniforme, l'espace
L'homme habite so
cifique d'une intuit
divers homogène.
L'habitation se pré
être-à-F espace bien
tique et coordonna
inépuisables de mo
pour autant que la
sentiment de plaisi
d'une habitation r
de l'être-à-1'espace,
D'autre part, la qu
à sa source, comm
compte de la sépar
espace intérieur. T
qualifier au mieux
principe accordée
Selon l'exposition
que Kant s'éloigne
unifiée. Il amorce l
comme quantité.
synthétiques a prio
ses prédécesseurs,
isotrope. Or, un es
deux endroits, d'att
Ce type d'espace pe
volumes irréguliers
ne coïncidera jamai
Dans un petit écrit
entre situation et
des parties placées
que la région désig
unique donné dans
l'appartenance de d
rendre identiques,
là, de radicalemen

2. Emmanuel Kant, Qu
des régions dans l'espac

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Habiter : le lieu et son atmosphère 89

espace extérieur demeureront séparés, quand bien m


particulier s'ingénierait à les rendre semblables. Ma
ment pas pour comprendre l'opposition réciproque
qu'elle se vit et telle qu'elle se montre avec évid
familière de l'espace concret, du mouvement de
ces espaces avec les modifications de leurs atmosp
comme principe de coexistence du simultané et de co
dans l'extériorité, l'espace comme phénomène or
ouvert comme être-à-Γ espace, permet de comprend
l'édifice. Mais cette compréhension va jusqu'à un cer
est encore beaucoup trop approximative. Elle demeur
obscure sur les points les plus saillants de l'interrog
Peut-être conviendrait-il ici de modifier notre po
nous allions de l'être-à-l'espace, propre à l'homm
Ou bien, ne devrions-nous pas partir de l'édifice, du
dans sa destination et dans sa fréquentation possibles
compréhension plus complète et plus claire de l'a
l'opposition du dedans au dehors, sur quoi se fondent
habiter ? Plus encore : pourquoi résoudre l'habiter a
sens d'un sujet moteur ? L'habitation n'est-elle, pou
d'un être-à-1'espace lui-même fondé dans la percept
Lorsqu'il s'agit de comprendre l'homme dans sa re
ger fait remarquer, dans Sein und Zeit, que l'être-à
téristique de cet étant, n'est pas primordiale. Cette t
En effet, comme être-au-monde, l'homme entret
l'espace en un sens qu'une relation au monde ; mond
ambiant, dont il faut s'occuper et tirer parti, qu'il
d'entretenir. Les desseins d'un être producteur et
d'emblée à une totalité de choses possibles ou actuel
de la finalité, de l'ustensilité, de la fonctionalité. Et
que l'être-au-monde se reconnaît lui-même, qu'il se
quant à une forme de ses raisons d'être.
On peut admettre que la relation de l'habitat à l'es
dimension-là, ou bien comprendre la relation à l'esp
cette modalité d'être-au-monde. La spatialité de l'éd
ici à partir de son usage, de son ustensilité - ust
separable d'un complexe organisé, marqué par la fon
tème de renvois d'ustensile à ustensile, de moyen à f
qui conduisent toujours pour terminer à l'être-au
projets de son activité et de sa préoccupation pratiq

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90 Ε Esquier

qui le raccordent
l'orientation par
fonction générale
activités pratiques
complexes, qui son
tue donc le dedans
du dedans dérive de la fonctionalité de ce dernier, et c'est un monde de la
fonctionalité, ainsi décrit comme ce à quoi est destiné l'homme de l'activité,
de la préoccupation (Besorgen) et du sens pratique (Umsicht), qui confère une
signification directrice à l'opposition en question.
L'édifice n'est-il que cela, n'est-il qu'un « ustensile » parmi d'autres fait pour
abriter et protéger un homme primordialement voué à la vie pratique ? Le para-
graphe 18 de Sein und Zeit3 autorise une appréhension de l'essence de l'édifice
qui soit moins fonctionnelle et, en même temps, plus respectueuse de l'homme
comme être-au-monde. On sait, en effet, que le terme « monde » est à entendre,
non comme monde réellement en soi, extérieur à l'homme, mais comme le cor-
rélat de l'être-à. La structure d' être-au-monde possède une unité de principe indé-
composable. Ainsi, l'homme qui se comprend lui-même comme homme de
l'affairement, de la préoccupation et du sens pratique se trouve du même coup
ouvert à un monde qui est celui de l'ustensilité et de la fonctionalité. Ce monde
lui-même, dé-couvert comme monde de la fonctionalité, ne peut pas être un usten-
sile, ne présente pas de fonction. Il est à proprement parler au-delà de tout usten-
sile. Il est la dimension générale qui rend possible pour l'homme, en son entente
comprehensive de l'être, la rencontre de quelque chose comme un ustensile et de
ses fonctions. Or, comme tout ustensile appartient par essence à un complexe
organisé et à un système de renvois d'ustensile à ustensile, de moyen à fin, de
fonction à fonction, on ajoutera que c'est encore le phénomène-monde ainsi
entendu qui fonde le caractère global de cette complexification de renvois. Nous
pouvons ainsi revenir à l'édifice et le tenir cette fois pour bien plus qu'un ustensile,
c'est-à-dire pour un analogon de monde. Le dedans de l'édifice, en particulier,
est comme un monde. C'est sur la base de la familiarité de son entente compre-
hensive de l'être de monde ambiant que l'homme, « imitant la nature » pour ainsi
dire, se donne un dedans en tant que la dimension globale lui permettant d'avoir
affaire ad libitum avec un ensemble complémentaire d'ustensiles. Et comme, en
dernière analyse, l'homme, en toutes ses activités, se trouve toujours rapporté à
lui-même, à ses desseins et à ses projets, le phénomène-monde d'un édifice et de
son dedans devient aussi son monde, le monde familier de ses possibilités d'être,
- microcosme intime pour son épanouissement.

3. Martin Heidegger, Sein und Zeit, Tübingen, Niemeyer, 1963 (abrégé ensuite en SuZ).

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Habiter : le lieu et son atmosphère 91

En accordant, comme le fait Heidegger au trois


l'être-au-monde la primauté sur Γ être-à-Γ espace
usine, bureau) apparaît donc, en sa fonction d'abri,
comme un ustensile qui se dépasse en dimension
L'édification, la séparation-opposition d'un dedans e
propre d'un homme qui, comme être-au-monde, s'y
Cette compréhension ou entente de l'être est ren
l'articulation en un tout solidaire, grâce à l'édifice,
en même temps que leur opposition ; et, à la fois au
dedans à la façon d'un monde complet en soi.
Dans ce qui précède, la spatialité de l'édifice ainsi q
présentes, mais elles le sont enveloppées dans l'u
corrélatives d'un être-au-monde pris dans son activ
l'on désire maintenant faire ressortir cette spatialité
de la spatialité propre à l'être-au-monde et de celle
mondain.
L'homme actif, engagé dans ses affaires et recourant sans cesse à son sens
pratique, ne se meut pas dans le continuum sensible d'un « milieu » spatial
tridimensionnel. Distances, intervalles mesurables, volumes ne comptent pas
comme tels. Ce qui marque bien plutôt l'être-au-monde, c'est le coefficient de
familiarité et de présence, donc, en ce sens, de proximité, de tout ce qui peut
être mis en œuvre et intégré à un réseau d'ustensilité et d'efficacité. Ce qui
compte, ce sont les prégnances pratiques des choses et les orientations qu'elles
offrent à l'activité. L'homme comme être-au-monde est donc capable d'une
« dotation d'espace » sous les formes déplace accordée à l'ustensile dés-éloigné
ou rendu proche et familier et de « contrée » (Gegend) comme englobant a
priori de places pour ce qui est des complexes organisés d'ustensiles. Ainsi
est-ce par la vertu de proximité de l'être-au-monde, ainsi que par l'orientation
qu'elle permet, que les choses disponibles font partie d'une « contrée » et émer-
gent en leurs places. On comprend dès lors comment un édifice a sa place
inscrite dans un contexte local qui l'enveloppe (contrée) et aussi comment à sa
nature de complexe et de « monde » correspond en ce qui le concerne un lieu
ou contrée. L'analyse de l'homme, comme structure unitaire d' être-au-monde,
rejetait précédemment le présupposé jugé confortable d'un sujet placé en face
d'un monde. Elle demeure conséquente en court-circuitant la représentation
tenue habituellement pour originaire d'un espace tridimensionnel objectif. La
spatialité de l'étant disponible (telle place, tel endroit, tels pièce ou local) relève
de la spatialité a priori d'une contrée et celle-ci, à son tour, de la mondanité,
laquelle n'est rien en dehors de l'être de l'homme.
On peut admettre que la subordination de la spatialité de l'édifice à la mon-

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92 Ε Esquier

danité de Γ acti
ambiant, suffit i
d'habiter. C'est d
miner par rappor
urbanistes ont af
l'espace géométr
tenir pour le pri
faisant, malgré s
lorsqu'on s'en tie
comme un systè
illustration appro
dentes. Robert V
met l'accent sur
du bâtiment par
l'espace », enten
d'un lieu ou cont
prend la forme d'
et l'extérieur par
en question. Ven
remarquable : la
presque carré, éc
l'on aperçoit par
sité de l'aspect gé
l'exemple d'une s
brisée et un inté
adapté aux multi
au mystère parti
l'unité de « l'idée
qu'elle domine e
importerait certe
ainsi que celui de
pas. L'usage du p
manière décidée l
équivoque. Ainsi
intérieur du prem
mur courbe bâti
extérieure, etc. C
sur « l'intensité

4. Robert Venturi, D

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Habiter : le lieu et son atmosphère 93

appréciation sur l'apparence esthétique de la construc


émotionnelle - appréciation qui prend en compte au
l'édifice que la vue extérieure, dans la mesure préci
se trouvent engagés dans le jeu unitaire d'une contr
le cas de cet édifice, un parti architectural de contr
de cette intensité de l'aspect général. Or, on ne
esthétiquement fort différente eût aussi bien fait
l'usage et de la fonction, mais que, dès lors, le site
du dedans au dehors eussent été bien autrement ma
disons que l'ensemble eût formé un autre lieu. L
savoir si l'organisation de l'espace dans l'espace peut
entre places et contrée ou bien si la localité de l'é
qui le spécifient ne devraient pas être pensées à nou
D n'est nullement assuré que l'apparence esthétiqu
l'atmosphère d'un lieu, mais la Villa Savoye, établie
à rechercher comment l'édifice peut être tenu pour
de l'atmosphère en question. Il s'agira donc de consi
corporelle et spatiale de l'édifice, d'envisager celle-c
de l'espace dans l'espace sous un aspect autre que fon
le pouvoir qui peut être le sien de déterminer la qu
se trouve intimement marquée la fréquentation d'u
Prenons en considération une vue extérieure de l'é
à l'échelle du champ où elle se situe. Elle s'y déploie
sans avoir à composer avec l'existence et avec les di
tions voisines. Elle oppose sa forme nette, cohérent
du cadre naturel environnant. Le sensible de l'appar
lumière, dans la silhouette d'un objet sculptural fer
contours. Π faudrait ici s'attacher à l'analyse sépa
de la forme et des matériaux du bâtiment. Insistons surtout sur la forme dont
les composantes sont la silhouette, les proportions, les rapports des pleins et
des vides, la composition des parties, etc. Dans tous ces détails, il faut prendre
en compte des portions d'espaces ainsi que leurs rapports, donc le jeu de leur
entrappartenance.
Ainsi, par exemple, à supposer que l'on prenne son départ dans une repré-
sentation générale de l'espace continu, homogène et isotrope, on peut dire que
la structure interne de la Villa Savoye découpe dans cet espace trois niveaux
superposés. Ces trois niveaux ne lui préexistent naturellement pas : ils n'existent
qu'avec elle, qu'en elle, qu'à partir d'elle. À chacun de ces trois niveaux, espace
vide et espace plein connaissent une interprétation différente de leur composition
réciproque. Au rez-de-chaussée, le vide extérieur envahit partiellement le des-

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94 F. Esquier

sous de la maison,
comme Test l'espa
la bâtisse sous la
lumineux des faça
se coupant à angle
les larges entailles
maison, révèlent
métamorphose en
rejette avec répuls
courbes où conve
sur le ciel. À l'oss
donc en niveaux s
vide ouvert. Et re
deviennent autant
maison. Ainsi y au
qui est liée à l'hab
que les sens pris p
organique d'ensem
La « façade libre
d'animation des su
tionnels (ferronn
lements aux conso
espaces : formes g
nisées entre elles,
organique des com
sorte d'intégrisme
considérée comm
stéréotypes tradit
organisés en fonc
de 1922, les dime
avaient à assurer l
adjuvante d'une l
s'inscrire dans un
succession de piè
rassemblement d
principalement i
l'unification esthé
nomie spatiale pro
en tant que figur

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Habiter : le lieu et son atmosphère 95

trouve masquée par la prégnance esthétique général


avec laquelle elle se confond.
Des remarques analogues s'imposent à propos des p
Ils détachent du sol la machine à habiter, faisant ai
d'habitation comme fonction. Ils libèrent le sol pou
activités d'extérieur. Ils permettent un vide sanitai
position élevée dominante par rapport au spectacle
lointains, etc. Mais, là encore, les sens fonctionnels
sous les apparences pures, et la qualité émotionne
l'édifice en vient à déborder la seule satisfaction de
et même la joie d'une vie active dans un cadre qui la
la Villa Savoye a rompu avec le sol. Elle est en état d
ou moins ombreux permet au premier étage et au to
objet sculptural clos sur soi. Cette clôture sur soi es
l'édifice, désormais inséparable de l'œuvre qu'il est,
tout rationnel, fort, cohérent et médité. À quoi il f
ceux qui relèvent d'une science des proportions q
équilibres qui ne se déduisent pas, bref des caractèr
cation d'une indémontrable eumétrie. L'unité spatia
autorégulation qui lui est propre, - autonomie spati
imposée par le complexe ou le monde de foncti
assumer et à favoriser.

Les éléments d'analyse qui précèdent semblent suffisants pour circonscrire,


certes sans aucunement l'épuiser, la dimension esthétique qui est celle de la
Villa Savoye. Ces indications paraissent suffisantes aussi pour montrer comment
cette dimension spécifique relève de l'unité spatiale - organique et spatiale -
de l'édifice, en même temps qu'elle se fonde sur elle. C'est cette organisation
de l'espace-là qui conditionne l'espace à l'entour, c'est la localité propre de
l'édifice qui confère sa marque au lieu d'ensemble, au site. Et ce sont donc ces
phénomènes de localité qui président à la fréquentation et à l'habitation de
l'édifice considérées comme expériences émotionnelles et esthétiques d'un
espace architecturalement organisé.
Il y a plus, cependant. En effet, les descriptions et analyses précédentes, issues
d'une expérience esthétique, empruntent moins à la subjectivité de l'expérience
qu'à l'objet de celle-ci. Elles découlent d'une habitation possible de l'édifice
pour autant que cette habitation peut se produire sous les auspices de ce dernier
comme lieu, dans l'épreuve d'une spatialité concrète et sensible faite de points
de vue, de parcours, de variations de distances, d'entrées et de sorties. Et tel
est bien le postulat de l'architecte : organiser des lieux de vie ; donner une
structure d'âme à une demeure dont l'habitant futur alimentera à sa façon le

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96 F. Esquier

contenu. D est vra


d'un monde de la f
rience dite « esth
des phénomènes
descriptions et a
d'expérience, elles
spatialitélocale en
lieu. Nous suppose
comme telle, elle
Épreuve du lieu,
devraient pouvoir
Mais ce génie du
nagement même d
ce dernier. Peut-êt
est en grande part
le lieu d'une stru
précédents ne peuv
esthétique, laq sur
tural plus satisfai
déterminée par la
dit, en devenant m
locale qui est enve
ture comme art. D
sphère du lieu se t

De quelle entente
de théâtre ne tém
pectives, éclairage
magique d'illusion
déjà vécues altern
charmes des lieux
auteur. Dans ce do
l'inconnu au connu en fonction des idées de la mise en scène, mais la scène
imaginaire elle-même, fondée sur les modes de la représentation et de la dis-
tanciation, place à tout moment le spectateur en état d'accéder à quelque vérité.
Le décor participe de l'art théâtral et de son pouvoir de dévoilement.
On pourrait se demander jusqu'à quel point il convient de soutenir l'analogie
entre décor théâtral et architecture. Cette analogie va, en un sens, plus loin
qu'on ne le pense. Car, le décor de théâtre offre, avec la force d'une représen-
tation concentrée sur elle-même et détachée des circonstances de temps et de

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Habiter : le lieu et son atmosphère 97

lieu réelles, la possibilité de l'expérience d'un lieu autr


son ambiance propre, qui consonne avec l'action. Tout
ce qu'elle présente d'épuré et de condensé, le spectateu
prend. Le théâtre l'a arraché à son ancrage dans ce qui
des données de fait, pour lui faire éprouver le possible
empathie certes, mais seulement de ce qui pourrait être,
pas. Il n'empêche que le décor de théâtre est à mêm
apparaître la puissance du lieu en suggérant au spec
ainsi dire imminente d'expérimenter l'immersion e
aussi, crée un décor, s'offre à la contemplation, mais p
nous l'avons vu, est toujours déjà pris dans le cercle d'
et réelle, dont l'art de bâtir a par avance aménagé les
donc pas contempler à distance seulement. Cependan
non plus une habitation qui serait aveugle à un espace
ne se contente certes pas de hanter. C'est pourquoi, pa
tation démontrait précédemment qu'elle n'ignorait pas
qu'elle fréquentait. Mais, ce que nous comprenons mieu
l'habitation méditante est à même de retrouver dans se
locales la puissance d'un lieu tel que V architecture com
révéler. Tout art détient un pouvoir de vérité, un pouvo
à se montrer tel qu'il est. Descriptions et analyses
ex-posent et ex-plicitent les conditions locales d'une
art de bâtir les avait lui-même préalablement mises en
vert.

C'est la Villa Savoye, disions-nous, qui intègre en sa st


modalités du vide ; c'est elle qui oppose la simplicit
houette au « désordre » de la nature ; c'est elle encore
dialectique d'« une enveloppe stricte partiellement brisé
lement révélé ». Conformément aux esthétiques cubist
Villa Savoye, en tant qu'édifice, offre un spectacle don
Car, cet espace qui est le sien n'apparaît pas comme le
et des forces que sont les plans, les lignes, les volumes
en est la résultante, il est engendré par la structure dy
fice, par les lois propres de cette structure. D'où la fort
figure globale, qui est l'expression directe, et d'abo
question. Certes, l'espace alentour apparaît d'une autre
amorphe et indéterminée, mais le site tout entier est
présence active, vigoureuse et quelque peu cérébrale du
n'a pas à s'inscrire dans un cadre de symétrie, ou dans
ou encore entrer en tractation avec le paysage com

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98 Ε Esquier

possède une auton


est le soutien par
la Cité universitair
sions. Vue du nord
articule trois volu
matériaux bruts c
teurmatérialisent
des escaliers d'ac
légèrement concav
de quatre étages
cohérence la co de
dont l'édifice a lu
tionnée par la natu
celui du contrappo
approche multiple
sur l'espace-temp
structure de l'édifi
à la fréquentation
multiple et renouv
la conviction en u
sollicité à connaîtr
claires, nettes, p
solidité et de la s
voyante, inventive
par opposition, co
pectiviste de la Re
aux nefs des église
constamment que l
puissent se donne
points de vue pri
lieux, tout autrem
tonalité.
Telle la chaîne aim
et ce dernier aux
trouve inspirée p
premier chef par
tecture comme ar
Π conviendrait donc d'aborder maintenant dans les mêmes conditions l'étude
de l'espace interne de l'édifice, l'étude du dedans. Tel est bien notre objectif
pour terminer, mais nous chercherons à l'atteindre par une autre voie. Il faudrait

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Habiter : le lieu et son atmosphère 99

en effet pousser plus loin l'approche concrète, c'est-à-


près une atmosphère ambiante non seulement dans sa f
son contenu qualitatif unique, bref atteindre à ce q
singulière. Pour ce faire, nous n'interrogerons pas un
non plus que tel décor de théâtre on ne peut plus éphé
rons encore au pouvoir véridique de l'art, mais en nou
celui d'entre les beaux-arts qui joua pendant longtemp
jusqu'à Matisse, par exemple, le rôle directeur d'une
d'une pensée par Idées esthétiques, dirait Kant, et qui
que du trait, des ombres et des clartés, à savoir : au de
dessin donne à voir. Est-il possible de compléter ou
comprehensive de l'atmosphère d'un lieu ? Nous cherche
si le dessin peut, à propos du dedans, donner à voir le si
s'il peut dévoiler la présence avec les raisons de la p

Dans l'œuvre gravé d'Albrecht Dürer, il est un Meist


entre deux autres, le Chevalier, la Mort et le Diable, d
/, daté de 1515. Il s'agit d'une gravure de 24,7 cm χ 18
Saint Jérôme dans son cabinet de travail. Dès le premi
se trouve captée par le génie visionnaire qui s'y dé
d'une exposition organisée, en 1996, au Petit Palais,
de Bussière écrivait ceci : « Saint Jérôme, la tête illum
l'inspiration divine écrit sur un petit pupitre posé sur
dans laquelle il se tient, ensoleillée et bien ordonnée
sécurité et d'intimité chaleureuse en harmonie avec la
Or, par le génie de Dürer, il n'est pas un seul élément d
lumière ou perspective) qui ne contribue à créer une im
atemporel, presque envoûté. » Dans cette description t
compte, touche juste, et certes se place aussi sous l'aut
écrivait dans le même sens : « Cette atmosphère de bie
mieux se décrire que par deux adjectifs allemands intr
stimmungsvoll, exprimant l'intimité chaleureuse et l'i
règne dans cette cellule, illuminée d'un rayon de soleil
mort posée sur le rebord de la fenêtre semble plus fam
même ces mots sont impuissants à évoquer le climat sp
l'accent se trouve-t-il placé sur l'atmosphère du lieu et
atmosphère : la sérénité. Toutes les choses autour du s
elles et toutes choses consonnent avec lui. Voilà ce que
Dürer, malgré les limites de la technique du burin, do
son, si l'on a à l'esprit l'architecture intérieure artificie

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100 Ε Esquier

qui est celle du Sain


(peinture, 1473, Lo
de l'atmosphère pr
ainsi cependant, no
techniques de la gr
dont le concours
question. Là encore
« génie » du lieu,
atmosphère.
Dans cette gravur
l'horizon pénètre
ouvertures d'inspir
de vitraux aux bou
possibles de reflet
Contrairement à la
l'espace empli de lu
ration. Parmi bien
d'une manière gén
directement éclairées et les trois formes d'ombre : ombres consubstantielles aux
choses, ombres portées (ou relatives) et ombres absolues. On peut dire que toute
la gravure constitue un milieu optique complexe où l'artiste s'est efforcé avec
méthode de restituer pour chaque zone de l'espace concret un mélange et une
intrication appropriés d'ombre et de lumière. Et ce milieu optique est aussi un
milieu de type musical en ce sens qu'il présente de multiples variations d'ombres
et de lumières. De ce point de vue donc, remarquons qu'il n'y a pas de contrastes
violents, que les ombres ne sont jamais excessivement profondes. La règle
voulue par Dürer est celle d'un équilibre des proportions. Et c'est cette loi
d'équilibre, mais d'équilibre en faveur de la lumière, qui constitue comme la
101 du gradient des variations de valeur de la lumière et des ombres dans
l'ensemble de la gravure. Un tel milieu optique confère aux êtres et aux choses
une certaine qualité de présence.
Cette présence des êtres et des choses n'est pas seulement rendue visuelle-
ment ; elle l'est aussi de manière tactile par le traitement des matières. Il s'agit
là d'un second aspect de l'œuvre, qui entre en jeu dans la composition de
l'atmosphère qui règne dans cette cellule. Que l'on considère le bois du plafond,
de la table et de la cloison du fond, ou encore le moelleux des coussins, ou
encore la pierre des murs, le pelage des deux animaux, le rendu de la crinière
du lion, etc. : le trait d'union de toutes ces références pourrait se résumer dans
une impression d'ensemble que Victor Hugo notait déjà à propos de toute
l'œuvre de Dürer : « la vie sourde de la matière ». Tout semble animé de vie.

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Habiter : le lieu et son atmosphère 101

Le bois paraît se souvenir d'avoir été arbre ; et il en va ai


même. Comment cet effet est-il obtenu ? Comment cette vie sourde est-elle
partie prenante d'une atmosphère d'ensemble ? Sans doute faut-il mettre en
avant l'habileté de l'artisan qui s'attache à rendre les apparences matérielles
dans leur grain et dans leur texture. Mais cette visée est subordonnée à une
visée plus essentielle. Celle-ci repose sur la connaissance exacte d'une sorte de
dialectique naturelle selon laquelle la lumière et l'ombre modifient les objets
qu'elles enrobent et font ressortir leur matière en même temps qu'en retour ces
objets modifient, par une réflexion ou par une absorption qui sont fonction de
leur matière, la lumière et les ombres. C'est cette dialectique naturelle inscrite
dans les apparences qui est responsable de ce trait unitaire que nous avions
relevé dans les apparences visuelles et tactiles.
Du point de vue de la composition spatiale, cette gravure témoigne à l'évi-
dence de l'intention d'appliquer les règles de la perspective linéaire. Les solives
du plafond, l'étagère inférieure qui longe le mur extérieur constituent, entre
autres éléments, les indices sûrs d'un système de coordonnées qui permet la
mise en place exacte des divers objets coexistants. Cette unité synoptique ou
synthétique du milieu ambiant dévoile au spectateur, dont l'œil coïncide avec
le centre de projection, une légalité générale inhérente à l'espace. Et c'est bien
ce que pensaient les peintres de la Renaissance. Mais cette représentation unifiée
de l'espace ne représente que la membrure invisible et abstraite de l'atmosphère
d'ensemble. On pourrait montrer que la perspectiva artificialis, essentiellement
linéaire, est rectifiée ici par la perspective atmosphérique. En particulier, elle
subit en chaque endroit de la cellule de saint Jérôme les modifications dues au
jeu complexe et sans cesse renouvelé des mélanges d'ombres et de reflets de
lumière. Ainsi l'espace géométrique, purement dimensionnel , perd-il de son
pouvoir séparateur par rapport à ses contenus et ainsi aussi se trouve-t-il investi
par un autre milieu optique plus qualitatif, à la fois optique et plus qu'optique,
c'est-à-dire quasi musical en son pouvoir d'expansion, de fusion et de diffusion.
Cependant, une autre remarque est essentielle du point de vue de la compo-
sition spatiale. D s'agit de la concurrence qu'exerce un autre principe de com-
position vis-à-vis du système perspectif. On peut remarquer en effet que, par
rapport aux objets qui l'entourent (table, banc, etc.) et par rapport à son éloi-
gnement dans la pièce, saint Jérôme paraît d'une stature presque colossale. De
même, la coiffure cardinalice, le sablier, la tête de mort semblent quelque peu
surdimensionnés, alors que le lion, malgré sa situation au premier plan, n'obstrue
pas une bonne portion de l'espace, comme ce devrait être le cas. Ces anomalies
traduisent des ruptures d'échelle par rapport à l'application des lois strictes de
la perspective. Elles relèvent d'un parti esthétique plus ancien. Conformément
à la plastique médiévale et au dernier gothique, auquel Dürer se rattache encore

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102 F. Esquier

partiellement, on do
émotionnelle. Ainsi,
de la figuration spat
eux. Ils constituent a
la mise en scène plas
précipitent et cristal
Examinons enfin les
gravure. Bon nombre
et par un consentem
sur l'étagère, crâne p
endormi). Dans le s
pantoufles reposent
familières ou terrest
Jérôme lui-même co
peu tassée sur elle-m
immobilité à lui ne c
la concentration inte
son aura rattache sai
cellule. La vie intérieure du saint consonne avec l'ambiance ensoleillée. Ainsi
les qualités posturales des choses, des animaux et de saint Jérôme contribuent
à définir une atmosphère dont la tonalité est celle a' une irradiation de lumière
au sein d'une immobilité paisible.
Les composantes principales que nous venons de dissocier à l'analyse sont
en réalité étroitement unies et intégrées les unes aux autres dans l'unité de
l'œuvre. En leur conjonction, elles semblent être les agents responsables de
l'unité d'atmosphère que la gravure expose. Nous détiendrions ainsi le secret
de la tonalité de sérénité qui règne dans le lieu représenté - cellule d'un saint
et d'un savant simultanément si suggestive de ce que pouvait être le cabinet de
travail d'un érudit de la Renaissance. Ce secret résiderait dans un faisceau de
traits remarquables, susceptibles d'offrir une richesse et une variété sensibles,
qui nous conduisent à la plénitude singulière d'une ambiance unique. Remar-
quons cependant que, parmi ces traits, certains ne relèvent pas « à proprement
parler » du lieu intérieur qu'est la cellule, à condition toutefois qu'il soit permis
de séparer un lieu de son contenu. Il s'agit de ce monisme figuratif, où matière,
vie et même esprit s'indifférencient à des degrés divers, ou encore de ces formes
posturales de sommeil, de pesanteur et de repos paisible qui font bien plus
qu'additionner leurs effets. On pourrait même ajouter la construction perspec-
tiviste qui constitue un cadre rigoureux de mises en place, mais qui joue un
rôle moins important et subtil ici que les multiples mélanges ou contrastes
locaux de la lumière et de l'ombre. Faut-il donc, dans le but de conclure notre

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Habiter : le lieu et son atmosphère 103

démonstration, accorder « une valeur d'atmosphère » plus


d'ambiance plutôt qu'à d'autres et accentuer leur connot
On peut en effet accorder quelque privilège au rendu d
aux dosages locaux d'ombre et de lumière tels que le ded
unifiant ; ou encore, porter une attention plus grande aux
dont la prégnance et la valeur émotionnelles paraissent p
Certaines de ces conditions dépendent d'un espace archit
dimensions et la nature des ouvertures, en particulier. D'
Mais l'essentiel n'est peut-être pas dans ces remarques. L
gne plutôt que l'unité partout diffuse du dedans ciment
ainsi dire, tout ce qui est là. Chaque chose ou chaque
comme un fruit parvenu à maturité, existe ainsi séparé
propre, tout en entretenant des correspondances occult
quoi il faut adjoindre, comme déjà dit, la vertu rassemblan
et de son éclat. Le dedans agit d'être un dedans unitaire
temps qu'une modalisation de la lumière. Il faut en
deuxième point. En effet, l'ambiance imaginée par Dürer
pas réellement separable de la présence humaine qui l
saint lui-même qui vit une belle journée dans le cadre d
et de méditation, qui la vit comme la séquence d'une har
tout ce qui l'entoure, Jérôme connaît une plénitude d'êt
le conduit à s'absorber en lui-même, entièrement à sa
temps, il ressent comme proches la somnolence des anim
les réunit, il perçoit les feux du soleil à travers le verre, i
des outils et des objets placés derrière son dos. Et, certe
et l'échéance inéluctable de la mort sont bien là eux a
lieu. Le lieu, la lumière, le temps ancrent saint Jérôme da
terrestre, dans la paix d'une essence acceptée, tandis que
Saint, consonnant avec l'ambiance lumineuse de la vig
vocation à une transcendance dont, à son tour, l'atmosp
marquée. Celle-ci n'est donc pas simplement un symptôm
pendant d'une habitation. L'atmosphère participe de l'ha
de la rencontre d'un habitant et d'un lieu. Pour que cett
rencontre inspirée, il est nécessaire qu'intervienne un tie
réciproquement l'habitant et le lieu. La nature de cet
encore, semble-t-il, et l'atmosphère préserve une part d
la gravure ne permet guère d'aller plus loin, mais c'e
interprétation nous conduit à présupposer.

F. Esquier

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