Documente Academic
Documente Profesional
Documente Cultură
NOUVELLES PRATIQUES
ET PERSPECTIVES
© Groupe Eyrolles, 2013
ISBN : 978-2-212-55696-4
Introduction
Le travail de coach :
vivre et laisser mûrir
13
Du labeur à la belle ouvrage :
le coaching au travail
Plus qu’un métier, le coaching est au- financier à un horizon de plus long terme
jourd’hui une profession. À ce titre, en développement personnel (Béatrice
l’Université est un laboratoire d’expé- Guynamant), tant pour le client que pour
rimentation des techniques et des pos- son coach car l’argent a toujours une
tures, entre World Café et jardin d’enfants odeur, un sexe, des usages porteurs de
récréatif (Christophe Duval), qui enseigne sens (Émilie Devienne). D’autre part, le
aussi que le diplôme ne suffit pas pour de- rapport au pouvoir est modifié, le lien
venir coach (Olivier Louche) ; un training, tissé l’emportant sur l’autorité formelle
long et diversifié (Reine-Marie Halbout), (Wadih Choueiri), ce qui pose question
et une supervision régulière (Sylvie de quant à la finalité de certains coachings de
Frémicourt) sont aujourd’hui indispen- conformité, voire de surveillance (Pauline
sables pour exercer un coaching pro- Fatien-Diochon).
fessionnel. Mais vaut-il mieux se former En profondeur, le coaching réenchante le
au coaching ou réfléchir sur le coaching travail, mais il démystifie l’entreprise. Au-
(Christophe Duval) ? Et les spécialistes du delà d’un training sur l’image ou l’affirma-
coaching s’accordent pour dire qu’il n’y a tion de soi (José Redondo), un coaching
pas de parcours balisé pour rencontrer fait aujourd’hui surgir les valeurs qui ani-
cette vocation singulière d’accompagner ment tout manager, qu’il soit vertueux
autrui (André de Châteauvieux), souvent ou non (Catherine Voynnet-Fourboul). La
liée à la façon dont on a soi-même été gestion des talents, le développement des
accompagné dans sa vie professionnelle compétences et l’investissement d’une
(Jérôme Lena). marque employeur font du coaching sous
De fait, c’est tout le système de gestion diverses formes un outil central pour les
qui se trouve bousculé et réinventé par DRH, dans un équilibre fragile entre leur
le coaching. Proclamant le primat de vision humaniste de l’entreprise (Monique
l’obligation de moyens sur l’obligation Chézalviel), d’une part, et la tentation
de résultats (Hélène Sancerres), défen- normative sous la menace des risques
dant l’harmonie possible entre la crois- psychosociaux (Matthieu Poirot), d’autre
sance économique et le développement part. À mesure que la défiance s’installe
humain (François-Daniel Migeon), le dans l’ère fordienne, le coaching s’impose
coaching change les pratiques managé- comme l’ultime respiration de l’entreprise
riales et interroge leurs fondements an- (Claude Allary), pour conjuguer paradoxe
thropologiques. D’une part, le rapport à et diversité (Hélène Sancerres).
l’argent est revisité, du très court terme
© Groupe Eyrolles
Introduction 15
Vers un nouveau modèle productif ?
Ce Livre d’or l’atteste : le coaching consi- à « faire mûrir » autrui en pratiquant le
dère que la vulnérabilité est au cœur de « non-agir » au cœur de l’action entrepre-
la performance professionnelle. Les failles neuriale (Sybille Persson).
du client ont droit de cité, elle est même Le coach est-il un agent subversif du ca-
universelle tant la carence de soins est lé- pitalisme ? En veillant à rester éternelle-
gion dans les élites managériales (Thierry ment coach en puissance, il se prémunit
Chavel). En conscience de sa propre bles- contre le syndrome d’imposture (Jérôme
sure première, le coach est comme un Lena), même s’il convient de relativiser la
profiler qui aime résoudre les énigmes réputation du coach (Émilie Devienne).
originelles (André de Châteauvieux). Tel Au demeurant, les auteurs du Livre d’or
un confesseur jésuite, le coach est, certes, du coaching réinventent jour après jour
dans la réalité de l’entreprise, mais il ne la notion même de leadership. Ils expéri-
procède pas de l’idéologie de l’entreprise mentent un mode d’être où la confiance
(Monique Chézalviel). Quoi de plus étran- dans le mouvement de la vie l’emporte
ger à la froide logique de l’argent que le sur la peur (Bernadette Babault), une
corps, véhicule d’énergie et porte de la autorité en actes qui réhabilite l’authenti-
matière vers l’immatériel (Paule Boury- cité (François-Daniel Migeon), une qualité
Giroud) ? À côté des sciences de gestion d’écoute impeccable plutôt qu’un atti-
réputées dures, les techniques psychocor- rail de recettes managériales (Françoise
porelles en coaching, à commencer par Maggio).
la respiration consciente (Claude Allary), Le coaching s’infiltre dans les pratiques
font la part belle à l’humilité d’un acteur managériales et dans la formation conti-
de l’entreprise qui ose se connecter à nue, préfigurant une écologie du travail
plus grand que lui en lâchant sa volonté plus éveillée (Alain Gauthier), et offrant
(Stéphane Broutin). des méthodes pédagogiques mariant sub-
Loin du soupçon nombriliste, le coaching tilement liberté et contrainte comme en
est aujourd’hui un moyen efficace pour tutorat (Janik Blouin, Jean-Paul Burgues
travailler au bien commun. Souvent, un ac- et Patrick Chauvin). En faisant grandir
compagnement fait réfléchir à l’éthique du son enfant intérieur, le coach guérit ses
pouvoir en entreprise (Matthieu Poirot), propres blessures (Thierry Chavel) dans
parfois même à une conscience élargie une démarche sans fin de connaissance
de la responsabilité morale du manager des organisations, de travail sur soi, de
(Catherine Voynnet-Fourboul). C’est le supervision et de formation, mais aussi
lieu maïeutique par excellence, une leçon dans un processus de travail invisible qui
de pédagogie où le processus de dévelop- s’apparente à l’œuvre au noir de l’alchi-
pement prime sur le résultat (Janik Blouin, miste (Reine-Marie Halbout). Le cadre
Jean-Paul Burgues et Patrick Chauvin). d’une supervision de coach peut parfois
© Groupe Eyrolles
Introduction 17