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- L é g e n d e s r e f i l e uses
■La ‘F oi
Cd r é s i s t a n c e à fa c o n q u ê t e c o l oni al e
Editions Mehdi
5 3 0 .0 0
Poèmes Kabyles
Anciens
ISB N : 9 7 8 - 9961 - 8 3 4 - 4 8 - 0
D L : 1 3 0 5 -2 0 0 9
Poèmes Kabyles
anciens
Editions M ehdi
BP 309 Boghni Tizi-Ouzou
T él: 0770 30 59 79
Introduction
Les deux textes, berbère et français, qui se font ici vis-à-vis sont
censés dire la même chose. J ’ai tenté de donner des vers originaux la
traduction française la m oins infidèle possible. P ourtant, à qui a
l’usage fam ilier des deux langues, il suffit d ’une lecture rapide pour
s’apercevoir que les deux versions poursuivent en réalité deux
discours distincts.
Les différences — ou bien plutôt la différence — ne sont pas dans
la form e : la correspondance term e à term e est pour l’essentiel
respectée. Elle est dans le sens et la valeur que prend chacun des
deux ensembles, si bien que l’on assiste à cet étrange résultat de deux
textes dont les éléments de détail coïncident et l’expression globale
diffère. C ette constatation, faite après étude achevée, a apporté un
éclairage essentiel et servi de fil conducteur à l’analyse qui suit.
On peut naturellem ent m ettre ce constat d ’hétérogénéité sur le
com pte d ’une insuffisance d ’analyse et poser com m e postulat qu’à
un certain degré de conceptualisation ou de profondeur deux
discours qui sont censés rendre la mêm e réalité se rejoignent.
Si l’étude qui suit aboutit à une conclusion différente, c’est que le
projet n’en est pas d ’ordre purem ent scientifique. D ans l’espace
intem porel et l’atm osphère stérilisée où se déroule l’analyse
abstraite, faite en cham bre (autant dire en laboratoire) par un savant
inconcerné, il est loisible de dégager et suivre à la lettre des règles de
m éthode qui, par un glissem ent plus ou m oins inconscient,
deviennent des conditions de validité. M ais les poèmes ici rapportés
ne sont pas pour moi des docum ents indifférents, des pièces dont la
seule valeur com ptable est d’argum entation. Ils vivent, ils font partie
7
des réalités qui donnent un sens à l’existence du groupe qui les a
créés et, à travers lui, à m on existence. Ils sont engagés drastique-
m ent (et, d ’aventure, dram atiquem ent aussi) dans la pratique sociale
dont dépendent pour une grande part la couleur et la densité que
notre vie et celle de nos enfants prendront. Cette valeur existentielle
pour moi passe l’autre sans com paraison possible. Il se peut que,
selon les canons de l’épistémologie reçue, cette condition biaise les
conclusions ou les hypothèses ici proposées. Si je prends ce risque,
c’est parce qu’en même temps je suis persuadé q u ’une vision exté
rieure et hérétique est plus prégnante qu’une docile application des
normes dégagées par une culture allogène.
D ’autant qu’à dire vrai l’expérience, loin d ’être singulière,
intéresse une grande partie du m onde, en particulier le m onde
récem m ent décolonisé. L ’apparent paradoxe est m aintenant bien
connu : ce n’est pas pendant la période coloniale que les cultures
traditionnelles connaissent les m utations les plus décisives, avec les
risques que cela encourt (y com pris celui d ’une totale disparition).
C ’est après l’indépendance acquise.
En effet, le dém antèlem ent violent des sociétés autochtones par
l’agression coloniale n’a pas du tout eu pour effet (com m e on s’y
attendrait) d’accélérer leur évolution, voire d’initier leur révolution,
mais au contraire de les figer dans la rigidité de structures dites
traditionnelles et en réalité anachroniques. L a raison en est
évidente : le postulat d ’une tradition im m uable, concrètem ent
définissable de l’extérieur, intervient com me élément d’une stratégie
plus ou m oins consciente et com me notion sécurisante. L’autre
rendu transparent par l’analyse, et aussi fossilisé, condam né à
l’immobilité des choses, devient p ar là m anipulable, il cesse d ’être
imprévisible.
Cette vision cohérente et sim ple est naturellem ent un leurre (pour
le visionneur quelquefois, mais pour les visionnés à to ut coup), car
qu’est-ce qu’une tradition à qui on a enlevé toutes les sources vives
d ’existence, toutes les conditions qui non seulem ent lui perm ettaient
d’être m ais aussi la dotaient d’im agination, de possibilités d’ad apta
tion, voire d ’invention ? Q u’est-ce sinon une form e vide et, dans le
moins m auvais des cas, un décor vain, un jeu creux, parce
qu’adonné à la m ascarade il voit le m asque, m ais oublie ce qui le
conditionne ?
Sur ce plan, curieusement, les deux projets contradictoires du
colonisateur et du colonisé aboutissent au même résultat : un im m o
bilisme outrancier ; le prem ier parce qu’il voyait dans Panachro-
nisme et le caractère onirique de la tradition un gage d’inefficacité, le
second parce qu’il cherchait dans un conservatism e rigoureux,
form aliste, quelquefois régressif aux termes mêmes de sa propre
culture, un moyen de sauvegarder une identité tragiquem ent
menacée.
La réalité est naturellem ent plus nuancée. La résistance même a
évolué, consentant à l’événement la dose de concession com patible
avec le m aintien de l’essentiel. En ce qui concerne en particulier le
dom aine qui nous occupe ici, elle est allée s’effilochant un peu plus à
chaque génération, à m esure que s’étiolaient les institutions et les
hommes qui en assuraient l’existence.
Le processus de décom position s’est, peut-on dire, effectué en
trois étapes. A la veille de la guerre de libération algérienne, il était
clair qu’il était très avancé et qu’à vrai dire on assistait aux dernières
passes avant l’estocade finale. Mon adolescence a coïncidé avec les
brandons des derniers feux. J ’ai vu m ourir les derniers vieillards
pour qui le sens de l’existence et sa valeur résidaient encore dans les
vers am oureusem ent conservés.
A près la conquête de la K abylie, devenue effective en 1857, les
hom m es continuent de faire vivre les genres et les pensées anciens,
p ar m éconnaissance d ’autres formes d ’expression. Pas pour long
tem ps. La catégorie des poètes prestigieux, dont le rôle dans la cité
était souvent de prem ier plan, disparaît peu après : grosso m odo au
lendem ain de la révolte de 1871.
La fin du siècle produit encore de grands talents (H adj M ohand-
ou-A chour, M oham m ed Larbi Ikaabichen, Ism aïl Azikiw) et deux
poètes de génie, encore que très différents l’un de l’autre : Cheikh
M ohand-ou-E lhocine et Si M ohand-ou-M hand. M ais cette seconde
période, c’est-à-dire en gros le demi-siècle qui sépare les deux
guerres (1871 et 1914), apparaît com m e un prolongem ent dégradé
de la prem ière : elle est en quelque sorte (et com m e souvent en ce
cas) en retard sur l’événement. A plus d’un titre, on peut même dire
que les deux plus grands créateurs de cette période sont une
survivance ; ils sont les derniers fruits, prestigieux m ais condam nés,
d ’un systèm e qui continue de prévaloir par l’effet de la vitesse
acquise, aussi com m e un cadre refuge ou de com pensation, mais
dont en réalité les sources de régénération sont taries.
On le verra clairem ent à la période suivante. A près la Première
G uerre m ondiale, les conditions de la colonisation vont produire
leur plein effet. Ludique ou ignorée, la poésie est cette fois réellement
menacée. Elle survit chétivem ent dans le répertoire, chaque jo u r plus
9
détérioré, d ’am eddahs1 de second ordre, dans les litanies convention
nelles des sizains d ikr2. Le talent de deux disciples de Si M ohand
(Yousef-ou-Lefki et Bachir Amellah) ne suffit pas à sauver ces restes
de la dégradation.
Je suis venu à l’étape avant-dernière de cette lente désagrégation.
J’avais la chance de me trouver au bout d’une chaîne de transm is
sion privilégiée. M ais aussi j’avais conscience d’être le maillon
faible, celui qui risquait de céder parce qu’à partir de moi à peu près
aucune des conditions qui avaient permis la survie de ces poèmes
n’existait. Les vieillards qui les vivaient et les faisaient vivre
quittaient la scène, souvent longtemps avant de quitter la vie. La
génération d ’hom m es m ûrs qui les rem plaçait était, sans qu’elle le
sût très bien elle-même, à la fois différente et moins concernée. Tous
ou presque étaient bilingues, quelquefois trilingues. Beaucoup
avaient vécu de longues années à l’extérieur, coupés du pays, de sa
pratique et de ses normes. Une dém ographie galopante, de nou
veaux besoins, les conditions devenues draconiennes d’un pacte
colonial qui durcissait à l’usage leur laissaient beaucoup m oins de
loisirs qu ’à leurs pères, m oins de désir aussi de continuer les pra
tiques anciennes. Les jeux, jad is passionnants, de la cité étaient
devenus ou nuls ou m écanique dérisoire depuis que de toute façon
les acteurs avaient perdu l’initiative politique.
Il était tem ps de happer les dernières voix, avant que la m ort ne
les happe. T an t qu’encore s’entendait le verbe qui, depuis plus loin
que Syphax et que Sophonisbe, résonnait sur la terre de mes pères, il
fallait se hâter de le fixer quelque part où il pût survivre, même de
cette vie dem i-m orte d’un texte couché sur les feuillets m orts d’un
livre.
Par chance, le pouvoir colonial, m isant sur une éventuelle division
du peuple algérien, avait opté pour une scolarisation relativem ent
(encore que m odestem ent) plus poussée en K abylie. Les premières
écoles ont été ouvertes dès 1883. C ’est-à-dire à une époque où le
souvenir et souvent les productions de l’époque ancienne étaient
encore vivaces. On ne saurait assez souligner le m érite des premiers
lettrés — en particulier des instituteurs et, parm i eux, un fervent
10
berbérisant : Si Saïd Boulifa, prem ier éditeur de Si M ohand — qui,
pieusem ent, ont rempli des cahiers d ’écoliers avec des vers dont
pourtant leur form ation n’était pas faite pour leur donner le goût.
N ous avons encore quelques-uns de ces recueils m anuscrits qui
rem ontent à la fin du x ix e siècle et pouvaient, par conséquent,
contenir des pièces de beaucoup antérieures. Le présent recueil est
donc le produit d’une oralité m itigée3. C om m e tel, il partage le sort
de la société dans lequel il est né, et à laquelle il est destiné.
L’équivoque même sur laquelle il se fonde est la m arque de son
authenticité. S’il était écrit en berbère pour les Berbères, il eût été
différent. Iî n’eût pas distrait artificiellement (com m e il le fait) le
texte poétique de son contexte existentiel, il n ’eût pas arbitrairem ent
coupé l’une de l’autre les valeurs éthique et esthétique, il n’eût pas
ainsi entassé pêle-mêle les pièces et les genres dans l’ordre formel,
c’est-à-dire faux, d’un inventaire. Il eût (et pas seulement en filigrane)
rétabli le riche environnem ent qui donnait à certaines de ces
productions leur profondeur et leur densité.
En effet, dans leur culture d’origine, chacun de ces poèmes est un
tout ; il a une valeur singulière, il a un visage, un nom , une histoire et
souvent un destin. Égarés, à leur corps défendant, dans les us, les
outils et les canons d ’une culture où ils font figure de m onstres
insolites, ils subissent nécessairem ent les effets d’une m anipulation
qui, mêm e avec les meilleures intentions, équivaut à leur m ort. Le
dépaysem ent dans le livre leur enlève toute substance, les prive de
tous les harm oniques de la transm ission vivante, qui est eux autant
que la suite m orte des m ots qui les com posent. Le sens épuise la
valeur du vers écrit : il est ce q u ’il veut dire, com m e de la simple
prose. Quelquefois aussi, il est vrai, il est ce qu’il suggère, m ais la
suggestion m êm e ne dépasse pas les possibilités m esurables du sens
et de la m usique. Le vers d it p ar un hom m e à des hom m es, en des
circonstances données, souvent au cours d’un rite où la ferveur de
l’attente orchestre et m ultiplie les réussites de la réalisation, dépasse
de p a rto u t les lim ites form elles d ’un texte.
M ais je n’avais pas le choix. L’histoire me pressait de plus en plus
instam m ent. A un systèm e artificiellement bloqué par la colonisa
tion, l’indépendance avait redonné la mobilité. L’adm inistrateur
11
parti, l’ancien colonisé est acculé aux options. Les parties les plus
caduques de sa manière d ’être, il les m aintenait à force et, pour ainsi
dire, à bout de bras. Il ne peut plus désorm ais arguer de son im puis
sance ni échapper à la nécessité de définir lui-même son destin. Il est,
qu’il le veuille ou non, contraint de répondre de lui pour lui. D échi
rantes ou non, les révisions sont le pain quotidien des lendem ains de
l’indépendance.
Ainsi en est-il pour la société kabyle et sa culture. Celle-ci était
pour l’essentiel orale ; elle ne l’est plus4. Elle était relativement
insulaire ; elle a cessé de l’être. Ces deux traits expliquent en grande
partie la phase p ar où elle passe aujourd’hui. Pendant un siècle de
colonisation, la production poétique a été en gros l’application des
factures et des genres anciens aux expériences nouvelles5. Puis
brusquem ent, en dix ans d’indépendance, sont apparues non seule
m ent des formes mais aussi une inspiration inédites. On écrit des
pièces de théâtre (en prose ou en vers). On en tra d u it6. On tente en
poésie une expression inconnue jusque-là. A partir des racines
anciennes, on crée de nouveaux term es. Des journaux, le plus
souvent de facture artisanale, paraissent, de plus en plus nom breux.
Cette ferveur ou ces recherches en ordre dispersé risquaient de
fonder l’illusion des com m encem ents absolus. Une m utation est
toujours une naissance nouvelle et l’illusion com m une des prophètes
est q u ’il n ’y avait que néant avant eux. C ’est naturellem ent toujours
erroné. On m ute, mais à partir de quelque chose qui, souvent à l’insu
des néophytes, informe leur nouvelle foi, car, pour que ces créations
nouvelles soient possibles, il a bien fallu que quelque chose arrivât
du fond des siècles ju sq u ’aux créateurs actuels et leur m énageât des
structures d’accueil, ne fût-ce que l’instrum ent d’expression.
Mais sans doute par-delà lui y a-t-il autre chose encore. C ’est
pour aider à le dégager que j ’ai entrepris de recueillir ces poèmes.
Ce faisant, je sais q u ’aux term es de la science dont eût dû relever
cet ouvrage je blasphèm ç. C ’est tard que j ’ai découvert l’anthropo-
4. A vrai d ire, elle ne l’a ja m a is été entièrem ent. En p a rtic u lie r, une c aste de
clercs (les m a ra b o u ts) y a ssu ra it un m inim um de littéralité. U n certain n o m b re de
poèm es o n t été écrits en alp h ab et a ra b e et ré p a n d u s ou conservés ainsi, tel
« E lm o u rsel ».
12
logie. Je ne sais s’il en est que ces exercices d ’école, y com pris les
plus sophistiqués ou les plus apparem m ent rigoureux, satisfont. Moi
qui étais le sujet de l’exercice, non son auteur, ni a fo rtio ri son
bénéficiaire, l’im pression d’assister au déroulem ent d’un discours
sans rap p o rt avec la m atière s’im posait à moi ju sq u ’au vertige.
Longtem ps, j ’ai voulu m ettre tan t de répugnance sur le com pte de
l’espoir déçu ; peut-être obscurém ent de la nouvelle science atten-
dais-je le m iracle : par exemple, qu’elle nous légitim ât ou rehaussât
aux yeux des autres et, pourquoi pas, aux nôtres.
M ais non, le péché n’était pas d’intention., il était d ’essence.
Ce n ’était pas tellement les constructions extérieures qui étaient
défaillantes. C ertains avaient mis une intelligence visiblem ent très
déliée au service d ’une inform ation inquisitoriale im placable. Ce
devaient être les bases qui étaient m al fondées. A utrem ent, on ne
pouvait pas expliquer que, sur des m orceaux de docum ents sûrs,
m inutieux, on pût asseoir des conclusions aussi étrangères à la
réalité qu ’elles étaient censées rendre.
Dès lors com m ença de m’effleurer le soupçon que l’ethnologie
n ’était que le m ythe que les tribus d’Occident bâtissaient à leur
usage particulier, et dont nous n ’étions que le prétexte. T out de
même que nos am ousnaw (sages) avaient aussi pour fonction de
résorber l’insolite et de le rendre perm éable à nos catégories
fam ilières, les ethnologues, am ousnaw tronqués de l’O ccident, nous
enrobaient des rets de leurs raisonnem ents pour nous exorciser,
ram ener notre étrangeté à leur raison, qui était la raison. Le
grouillem ent des pleuplades ethnologiques est signe d’incom plétude,
de développem ent arrêté ou à to u t le m oins retardé sur la voie royale
de l’histoire, celle qui aboutit à l’Occident chrétien. Mieux : la vision
réductrice était en même tem ps thérapeutique. Au term e de la civili
sation brillante auquel elles étaient parvenues, les tribus d ’Europe
s’aperçoivent qu’elles souffraient aussi de leurs m aux, dont tous
n ’étaient pas guérissables par le m oyen des catégories grecques.
Alors elles ont découvert (ou inventé) des hum anités m iraculeuse
ment im m unisées contre les maladies qui les affectaient. Elles sont
allées traq u an t les paradis perdus de p a r le monde. Com m e les
peuplades qu’elles finirent p ar refuser d’appeler « prim itives », elles
ont im aginé des fables pour guérir, des fables à la vérité tran sp a
rentes, com m e il sied aux sham ans de peuples qui, depuis longtemps,
ont laissé m ourir en eux le sens de la nature, la perception des
sym boles et des correspondances. C e qu’aisém ent je lisais à travers
un verbe qui tendait à devenir ésotérique (com me celui des vrais
sham ans) était à peu près ce qui suit.
13
Avant leur prochaine et inévitable m ort, les peuplades ethnolo
giques peuvent servir à éclairer les hommes, les vrais, les civilisés,
sur les tem ps de leur passé sauvage. Leur sim plicité rend leur lecture
plus aisée, pour nous bien sûr, car les acteurs eux-mêmes se vivent
mais ne se voient pas, ou plutôt ils se voient faussem ent, à travers le
prisme déform ant des fables et des m ythes dont ils enrobent le réel à
défaut de le résoudre et de le dominer. Incapables d ’élucider
l’opaque, ils le mythifient et, ce faisant, se mystifient. M ais nous, à la
fois étrangers, savants et arm és, heureusem ent som m es là pour
dém onter la m écanique, décoder le systèm e et aux sauvages mêmes
expliquer leur sauvagerie. De toute façon, nous ne pouvons plus être
taxés d ’oubli, nous avons comblé la lacune : nous avons délimité la
réserve indienne off-limits, où des hum anités provisoires peuvent
continuer de m ourir, pendant qu’ailleurs se déroulent les jeux haute
ment rationnels de la vraie civilisation.
A la belle harm onie de ce système, il est à la vérité quelques
accrocs. Il n ’est pas toujours aisé de plier des réalités hum aines dans
le lit de Procuste d’une construction réductrice. La réalité violentée
quelquefois hurle et regimbe aux cadres préparés pour qu’elle y
coule sa m ouvance. Q u’à cela ne tienne ! Il suffit de faire intervenir
dans le système, à titre de com posante com plém entaire, plus
m alaisée à m anier mais en définitive m esurable, donc prévisible, une
dimension nouvelle : la diachronie. Que ceux que la simple mention
de la m obilité des hommes épouvante ne s’effraient pas cependant.
C ar la diachronie n’est pas l’histoire, entendez par là qu’elle n’est
pas inventive quant au fond, que le projet des hom m es ne s’y inscrit
jam ais qu ’à titre d ’illusion subjective. Il arrive parfois que les
Barbares croient faire leur destin, voire même qu’ils donnent cette
impression à un observateur superficiel, m ais l’hom m e de science
sait que cette agitation stérile, ce vain sentim ent de puissance et de
liberté se déroulent sur fond de déterm inism es contraignants. La
liberté, le pouvoir d’agir sur un destin collectif, c’est le lourd
privilège de l’hom m e d’O ccident, les autres ne sont jam ais que les
protagonistes inconscients d ’une harm onie préétablie.
De découvrir que l’ethnologie n’était que le discours m ythique de
la tribu ennemie eût dû am adouer en moi le traum atism e premier. Il
l’aggrava dans la m esure où un silence total, quand il n’équivalait
pas à un assassinat dans l’ombre, laissait du m oins aux oubliés des
chances d’une récupération ultérieure. L a nouvelle science, en
opérant sur le terrain même de notre intimité, la violait, la m enaçait
dans son être. Ouverte ou feutrée, l’agression nous acculait à la
réaction, à tout le moins à la réponse. Les intéressés, et pour cause
14
(ils avaient d ’autres chats à fouetter), ne se doutaient même pas du
m auvais coup qu’on perpétrait contre eux dans l’om bre. Mais
nous ?... N ous, c’est-à-dire la petite cohorte des voleurs de feu.
N otre rôle est évidem m ent d ’empêcher que le crime se com m ette,
fût-ce dans l’ombre. Après avoir usé de divers m oyens puisés dans
l’arsenal du savoir prestigieux qui nous éblouissait les yeux, vite il
nous est apparu que la seule m éthode qui risquât d’aboutir était de
renverser la perspective de la science occidentale à notre égard. Elle
m archait sur la tête (du moins selon notre code), il fallait la remettre
sur les pieds. N os poèmes entraient com m e des choses m ortes, des
argum ents dans l’édifice conceptuel que la société d ’Occident
érigeait dans le double but de nous réduire et de se com prendre. Elle
avait, pour ce faire, élaboré un instrum ent (ce qu’elle appelle une
m éthode scientifique) dont l’efficience avait été largem ent éprouvée
par ailleurs. Les effets q u ’elle en obtenait la satisfaisaient sinon
pleinement, du moins de façon largem ent déterm inante et, comme
toujours en ce cas, elle appelait objective et applicable à tous la
science q u ’elle avait ainsi de façon idiotique élaborée pour elle.
M ais nous, sujets de cette objectivité supposée, étions dans le plus
com plet désarroi. C e n ’était pas seulement notre épiderm e ou nos
sentim ents qui étaient heurtés, c ’était notre raison. D ans ces
abstraites géométries, aim antées vers des visées à nous insolites,
dans cet échantillonnage à la dérive, dans ces lam beaux déchiquetés,
que restait-il encore de ce qui pour nous faisait le sens et la joie de
l’existencc ? Après les affres du doute, il fallait se résigner à
l’am ertum e de la certitude : il n ’y a pas de m éthode innocente et
l’objectivité n ’est souvent, dès q u ’on parle des hom mes, que le
paravent de nos préjugés, de nos nostalgies ou de nos intérêts.
Dès lors, la conclusion ressortait d ’elle-même. Que nous em prun
tions des procédés opératoires, soit (c’est souvent une nécessité),
m ais il fallait chaque fois assortir le choix de la perception lucide
des présupposés. Et de toute façon le dessein dernier, la m ainm ise de
sens, c ’est à nous-mêmes et à ce qui restait de notre passé, même
m eurtri, qu ’il fallait les dem ander.
C ’est à ce retournem ent du processus que j ’ai tenté de procéder
ici. Je sais ce que l’entreprise garde d ’ambiguïté. J’ai conscience
d’œ uvrer dans une période de transition, où certaines possibilités
(peut-être certaines audaces) me font défaut. M ais j ’ai espoir de
préparer le lit à des desseins plus radicaux et qu’un jo u r la culture de
mes pères vole d’elle-même.
C ar c’est de propos délibéré que je me suis placé dans le droit fil
de cette culture, dans ce q u ’elle a d ’essentiel (car la forme ou les
15
conditions de réalisation peuvent changer, pourvu que continue de
souffler l’esprit qui meut la masse).
Jadis, les aèdes am bulants, les assemblées, les réunions consti
tuaient des canaux naturels à la fois de création et de com m unica
tion. C ertains ont disparu, l’efficacité des autres a beaucoup décru.
M ais (on le verra plus loin) une des norm es de la civilisation où ces
poèmes sont nés est que la culture n ’est pas seulem ent un héritage
reçu, c’est aussi un projet assum é. Voilà pourquoi publier ces
poèmes, c’est continuer le projet poursuivi pendant des siècles par
les générations qui les ont créés.
J ’étais encore enfant quand j ’ai com mencé à recueillir les
premiers, sans autre dessein que de les conserver. Je n’ai pas cessé
depuis. D urant mon adolescence et dans m on âge mûr, j ’ai été les
quêtant avec passion, avec d’autant plus de passion que quantité
d’indices m ’en m ontraient la fragilité. Je suis resté des heures à
écouter des am ousnaw dérouler de longues harangues émail lées de
citations poétiques. Beaucoup des pièces, que je consigne ici comme
des docum ents m orts, sont venues à moi magnifiées, inscrites dans le
dense contexte d’une culture hors de laquelle ils sont mutilés et
éteints. C ertains se sont inscrits dans mon esprit avec le tim bre
même de la voix m aintenant m orte qui me les a un jo u r révélés.
Aucune analyse, avec des instrum ents élaborés ailleurs et, fût-ce
inconsciem m ent, pour d’autres desseins, ne p o u rra prévaloir contre
cela, qui n’est pas seulem ent une expérience vécue m ais une raison
d’exister.
16
précis dans une perspective historique ? De ce point de vue, la
situation se présentait de façon peu encourageante. A peu près
aucune des pièces recueillies n’était datée, la m arge d’indécision
pouvant aller de quelques années (pour les productions les plus
récentes) à quelques siècles (pour les genres à sujet général, qui sont
les plus nombreux).
Pour ces derniers, les points de repère sont proprem ent inexis
tants : les sujets sont de tous les tem ps, il n ’y a pas de nom d’auteur.
La langue même est d ’un secours incertain : il y a une koïné
poétique sur laquelle la plupart des poètes s’alignent, et de toute
façon le translateur ne reproduit pas nécessairem ent la forme
originale, il tend à régulariser les tournures idiotiques, qui sont
naturellem ent les seules révélatrices.
M ais, même pour les poésies qui, pour avoir eu un rapport
quelconque avec l’événement, devraient être datables, on reste assez
démuni. On attribue à un poète prestigieux des pièces qui manifeste
ment ne sont pas de lui7. On « nationalise » des productions
étrangères8. O n abrège des poèm es longs9. On interprète ou simplifie
les passages difficiles10.
Surtout, à m esure que les années passent, la fa m a popularis pour
diverses raisons (stratégiques, sentim entales, intellectuelles) restruc
ture le passé. La m anipulation est le plus souvent inconsciente, mais
en faussant les données elle risque de fausser aussi les conclusions.
C ela reconnu, il restait possible de tenter une dém arche historique
et, à l’issue, d’évaluer les bénéfices qu’on en aurait tirés. Les données
en ce dom aine, relativem ent nom breuses et précises pour la période
récente (grosso m odo celle qui a suivi la conquête française, c’est-à-
dire environ le milieu du x ix e siècle), deviennent beaucoup plus
incertaines pour la période m oyenne (approxim ativem ent les x v n e et
x v m e siècles), pour cesser presque absolum ent pour les siècles
antérieurs au x v ie.
Les deux guerres m ondiales ont donné lieu à un nom bre restreint
de poèmes sans grande portée. En com paraison, la cam pagne de
9. P ar exem ple le n° 23, p oèm e réduit à six vers au lieu de trente q u atre, pour
lui d o n n er la m êm e fa c tu re q u e le poèm e précédent.
17
M adagascar (1896), où des K abyles ont été enrôlés comme
convoyeurs, a suscité davantage l’inspiration des poètes. Yousef-ou-
Lefki, disciple et continuateur de Si M ohand, m eurt en 1955. La
génération précédente s’est éteinte au début du siècle : H adj
M ohand-ou-A chour après 1913, Si M ohand en 1906, le cheikh
M ohand-ou-Elhocine en 1902. La tradition (et en grande partie
H anoteau) a gardé le souvenir de toute une pléiade de poètes
contem porains de la conquête française (1 8 3 0 -1 871): M ohand
M ousa des Ait O uaguennoun, M ohand Saïd des Ait M elikech,
M am m ar des Ihasnawen. Au-delà, nous avons des nom s, mais
assortis de repères imprécis : il est difficile de dire à quelle époque
vivaient Sidi M hem m ed-ou-Saadoun, Ahm ed A rab d ’Ighil H em m ad,
Larbi Ait Bejaoud, Sidi K ala, voire le plus grand de tous, Yousef-
ou-K aci. Difficile, m ais non impossible. On peut par exemple,
concernant ce dernier, arriver par une série de recoupem ents à
établir l’époque à laquelle il vivait avec une précision relative :
probablem ent à cheval sur le x v n e et le x v m e siècle” , son âge adulte
ayant dû couvrir en gros la prem ière moitié du XV IIIe.
Dans l’état actuel de nos connaissances, il n’est pas possible
d’arriver à une précision plus grande. M ais cette m arge d ’im préci
sion est-elle vraim ent décisive ? A utrem ent dit, hors la satisfaction
érudite de pouvoir fixer deux (ou plusieurs) dates précises, quel
bénéfice tirerait-on d’une localisation plus étroite de Y ousef dans le
temps ? Probablem ent peu de chose. C ar on sait par ailleurs que
cette période (celle com prise entre le x v ie et le x ix c siècle) fut un
temps de relative stabilité. Aucun événement historique décisif,
aucun changem ent social déterm inant (le phénom ène m araboutique
y com pris) n’est venu affecter une société kabyle qui, pour l’essen
tiel, se présentait ainsi.
A l’intérieur, une m osaïque de tribus, indépendantes non seule
ment du pouvoir central mais aussi l’une de l’autre. C hacune d’elles
est faite d’un nom bre restreint de villages (de trois à vingt), qui sont
les vrais centres de la vie civique. A l’extérieur, l’É tat deylical, avec
lequel l’ensemble du pays kabyle entre dans des rapports ambigus,
tour à tour ou tout à la fois antagoniques et convergents, dans la
m esure où les tribus dans le même tem ps reconnaissent au makhzen
d ’Alger une sorte de légitimité sym bolique et lui refusent toute
emprise concrète. P ar l’entremise des grandes fam illes djouad (les
plus renom més étant les Ait Kaci), quelques familles m araboutiques
18
habilem ent m aniées12 et par-dessus tout la constante référence à la
solidarité islam ique13, le pouvoir essaie de m ordre sur le bastion
d ’un pays kabyle dans le principe hostile, m ais dont les franges
peuvent être contraintes à com position quand le rapport des forces
est en leur défaveur.
Sur le plan politique donc, la donnée fondam entale est cette
dualité à la fois antagonique (l’État turc est senti com m e une
contrainte q u ’il faut com battre) et com plém entaire (le lointain sultan
d ’Istanbul a la charge du m onde islam ique tout entier). Sur ce
schém a de base, le détail de l’événement peut se projeter avec des
péripéties diverses, m ais sans jam ais affecter quant au fond la nature
même du phénom ène.
Or, une étude des poèm es de Y ousef poursuivie dans cette pers
pective fait ressortir cette réalité avec une clarté à laquelle, à notre
sens, la chronologie ne peut rien ajouter de décisif. On trouve en
effet représentés dans ses vers les trois term es de cette conjoncture
historique : la république libre, qui dans la m ontagne continue de
s’adonner aux jeux traditionnels, exaltants et m eurtriers, de
l’anarchie codifiée ; le systèm e et les prestiges d ’un É tat turc
d’envergure internationale, mais vigoureusem ent contré sur le plan
intérieur ; entre les deux, la formule hybride, am biguë des pays de
piém ont, lieu de la confrontation entre les deux m ondes, entre les
deux m odes précédents, dont le sym bole visible est la caste des
djouad, tour à tour fourriers de l’É tat turc parm i les tribus irrédentes
ou cham pions de la liberté contre l’em prise du pouvoir central.
Prem ière aporie, du m oins en term es de logique grecque, la
littérature classique présente les deux prem iers de ces États comme
fondam entalem ent antagoniques, exclusifs l’un de l’autre. Un groupe
était ou m akhzen (et donc soum is aux contraintes et plus rarem ent
aux avantages de l’autorité, en to u t cas toujours taillable et
corvéable à m erci) ou sib a 14 (et donc dissident et hostile). Or,
Yousef, selon l’occasion, le contexte, prône l’un ou l’autre des deux
term es, quelquefois dans le même poème. Le plus bel éloge qu’il
12. L a p lu p a rt des fam illes m arab o u tiq u es de K ab y lie sont arriv ée s à peu près en
m êm e tem p s q u e le p o u v o ir tu rc (fin du x v i', d éb u t du x v n ' siècle), au q u el elles se
so n t, au d éb u t su rto u t, so uvent opposées.
13. C e tte m an ip u latio n id éologique a été une c o n sta n te du pouvoir o tto m an dans
toutes les p a rtie s de son em pire. L ’histoire en a à plusieurs reprises dém ontré
l'efficacité.
14. Le term e m êm e est p ris d an s la term inologie p o litiq u e m aro cain e, m ais le
p h én o m èn e est au ssi bien algérien.
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croit pouvoir décerner à des citoyens d ’une république libre de la
haute m ontagne, c’est de les com parer aux T urcs, les mêmes Turcs
contre lesquels il s’élève quand ils s’attaquent à l’indépendance de sa
propre tribu par Ait K aci interposés :
Ben A li a bafoué
L a protection que j ’avais accordée15
L evez-vous et fra p p e z inconscients A i t Jennad !
Par contre, pour l’aristocratique m ais libre fam ille des Izwawen, il
n’a pas assez de termes élogieux :
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parcourir les arm ées du dey ou la cavalerie m akhzen des djouad.
M ais, de l’autre, ils sont appuyés à tout le bastion com pact des
tribus irrédentes, où les jeux de la liberté d’antan peuvent se donner
libre cours. D ’un côté sont les allées de la servitude, assorties il est
vrai d’échappées com plém entaires (le m onde islamique) ou antago
niques (la chrétienté) sur le vaste monde, de l’autre s’étend le lieu de
leurs nostalgies : la liberté anarchisante des petits É tats à l’horizon
étroit, m ais où la densité et la qualité de la vie sont des avantages
sans prix, la « m ontagne de la dignité » (adrar l-laaz).
C ’est à leur corps défendant que les petites républiques de la
m ontagne sont intégrées dans le systèm e d’une autocratie militaire
centralisée16, en général, après un ou plusieurs conflits armés. 11 y a
antagonism e en ce sens que pour elles les deux avantages de la
liberté et de la m ondialité sont inconciliables. M ais, à tout prendre,
elles préfèrent encore renoncer aux bénéfices de la civilisation pour
s’épargner les contraintes de la servitude. Surtout quand, et c’est le
cas de la tribu de Yousef, elles sont placées au point de rencontre des
deux m ondes. C ontraintes d’entrer, sporadiquem ent et selon des
m odes divers, avec un degré différent d ’aliénation, dans l’ordre et les
idéaux d ’un É tat autocratique, elles ne sont pas du tout résignées,
elles gardent non seulement le souvenir m ais, autant qu’elles
peuvent, les pratiques d’une liberté enivrante, du reste à portée de
balle, puisque les prototypes vivants pèsent sur leurs frontières du
poids de leur exemple et de leur dédain à peine voilé.
M em bre d’un groupe tam pon, en vivant les dangers, les incerti
tudes et les am biguïtés, Y ousef les reproduit aussi dans ses vers. A
côté de la dure nécessité des Turcs, les nostalgies mal éteintes, à
fleur de peau, ardentes quelquefois, de la coûteuse m ais exaltante
anarchie d ’antan, avec com m e terme m édiat cette espèce d’État
hybride que représentent les djouad, qui tentent d’allier les vertus
républicaines à l’efficacité et aux tentations d’un pouvoir établi.
Cette perspective médiate, si elle était fondée en droit, aiderait en
effet à com prendre un des aspects de la poésie de Yousef, sa
polyvalence (du moins quand on s’en tient à la lettre des poèmes),
m ais au sens et à la valeur des vers qu’apporte-t-elle d’essentiel qui
ne s’y trouvât déjà ?
Encore som m es-nous là en quelque sorte à l’horizon moyen de
l’histoire algérienne : les XVIIe et x v m e siècles, pour lesquels il est
21
encore possible d’avoir quelques données localisables. Plus loin, on
ne peut plus procéder que par déterm ination de périodes assez
larges, où les références ponctuelles font à peu près entièrem ent
défaut. Ainsi peut-on affirmer que les poèmes religieux sont
d’époque relativem ent récente, du moins la plupart d’entre eux. On
peut fixer au moins une limite a quo pour ceux d’entre eux qui
relatent la légende dorée d’un saint dont par ailleurs l’histoire même
remaniée est connue17. O utre quelques éléments repérables (plutôt
rares), cette conclusion se fonde sur des indices tirés de l’idéologie
explicite des textes qui nous sont parvenus. En effet, à quelques
exceptions près18, l’islam des poèmes religieux est l’islam de la
période de décadence qui a suivi la chute des A lm ohades ; il est
même à peu près sûr que la plupart des poèmes, dont beaucoup sont
d’inspiration m araboutique et un certain nom bre com posés par les
m arabouts (en quantité plus grande que leur proportion réelle dans
la masse des laïcs), sont postérieurs à l’établissem ent du m ouvem ent
m araboutique en K abylie, c’est-à-dire en gros le x v ie siècle.
Le dogm e est d’une pureté toute relative. L’islam est surtout celui
des m arabouts, une série de pratiques volontiers mêlées de
croyances thaum aturgiques .ou païennes. Des anecdotes m iracu
leuses ou épiques tiennent lieu d’histoire. Les saints sont les
m arabouts : M oham m ed même n’est quelquefois que le plus grand
d’entre eux. Une idéologie m ilitante, plus m ilitante qu’idéologique,
antichrétienne et, quelquefois, anachroniquem ent antijudaïque.
Quand elle ne fuit pas dans les m ythes d’un passé plus onirique que
réel, la poésie s’enfonce dans la désespérance d ’une philosophie
pessimiste ou le rigorism e form aliste de pratiques censées garantes
d’orthodoxie.
Ces caractères sont m anifestem ent ceux de la période m oyenne
(x v c au x ix e siècle), c’est-à-dire de l’époque de la décadence. D epuis
que la découverte de l’Am érique et des causes internes de stagnation
ont fait perdre à l’islam l’initiative historique q u ’il avait possédée au
Moyen Age, la pensée, cessant d’être créatrice, s’est repliée sur
elle-même. L’adage déclare « fermées les portes de la recherche
personnelle ». Alors com m ence l’âge scolastique des sommes,
c ’est-à-dire du savoir clos. Depuis q u ’Espagnols et Portugais, ayant
achevé la reconquista, portent la guerre en M aghreb même, un islam
17. A insi le p o èm e de Sidi Y ah ia des A it Aïdel est n écessa irem en t p o sté rieu r à
l’arriv ée d u sa in t en K abylie.
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acculé à la défensive se crispe sur les croyances adventices du
m araboutism e, !e refus de l’ouverture ou de l’innovation, l’émiette-
ment tribal sécurisant.
Le pays kabyle en particulier reçoit (surtout au xvie siècle) une
quantité considérable de m arabouts, la plupart venus du Sud
m arocain, et qui finissent' par réaliser un véritable quadrillage de la
région. Us inspireront peu ou prou la littérature religieuse : quand ils
n ’en seront pas les auteurs, ils en dicteront l’esprit. La valeur
littéraire sera très inégale, le dessein prem ier étant ici l’édification.
On peut, pour les com m odités de l’exposé, distinguer trois genres
de poésie religieuse : un, m ystique et personnel, expression souvent
rem arquable de sentim ents originaux, est le plus rare. Un autre, fait
de sortes de petites épopées qui relatent les exploits militaires ou
dram atiques des héros islamiques, ceux de l’histoire classique
(O m ar, Y aala, Ali surtout et le Prophète), ou les saints locaux ; c’est
le genre plus particulièrem ent dit taqsit. Un autre enfin, le plus
abondant, et qui se renouvelle sans cesse, est constitué par une
masse de sizains d’édification, chantés le plus souvent (mais non
nécessairem ent) sous forme de litanies par des groupes d’exécutants,
en particulier les confrères des ordres religieux ; c’est le genre dit
dikr.
Le prem ier s’oppose à l’ensemble des deux autres par sa fonction,
ses caractères, souvent sa valeur. M ais les taqsit et les sizains dikr
sont de beaucoup les plus nom breux. Aussi les plus répandus ; les
deux derniers genres sont infiniment plus populaires que le prem ier
qui, vu ses difficultés (tant dans l’inspiration que dans la forme),
reste le fait d’une m inorité. Cette distinction va, ainsi qu’on tentera
de l’établir plus loin, fournir un élément de base à l’explication d ’un
aspect im portant de la société kabyle aux siècles moyens.
La m asse des docum ents, ici considérable, peut se répartir en
deux groupes : les longs poèmes taqsit et les sizains dikr.
Parm i les premiers, un fonds classique — « H istoire de Joseph »,
« La M ort de M oïse », « Le Sacrifice d ’A braham » — appartient au
dom aine m aghrébin com m un. Un lot, plus divers et moins générale
ment répandu, est constitué par la geste d ’A li19 plus encore que par
les m iracles et les épreuves du Prophète. Une série de récits édifiants,
apparem m ent entièrem ent inventés, dont en tout cas on ne discerne
pas l’origine, tels les taqsit du cham eau (Taqsit bbw elyem ), du Juif
converti (bbuday isteslem), de la D am e sage (l-lhadqa ikeysen),
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de l’esclave calom niateur (A k li alem m am ), de la gazelle (ta yza li),
etc. Enfin, quelques poèmes consacrés aux m arabouts locaux : Sidi
Y ahia des Ait Aïdel, les deux cheikhs M ohand.
La m asse des sizains dikr est pratiquem ent illimitée, parce qu’à
côté d’un lot généralem ent répandu en existe un grand nom bre
beaucoup plus mobiles, qui naissent, m eurent ou ne subsistent q u ’en
des zones restreintes, au gré des circonstances.
La plupart de ces productions, tan t taq sit que dikr, sont
anonym es. La valeur en est très diverse : « Joseph » est un
chef-d’œuvre, « A braham » une honnête et difficultueuse création,
certains dikr condensent en six vers bien frappés to u t un poids de
vérité et de profondeur, la plupart sont des variations m oyennes
autour de thèm es devenus com m uns.
Les deux genres, prolifiques tous les deux, ont fini par acquérir
une sorte de facture conventionnelle. Les héros des taqsit vivent leur
foi dans le dram e, ils m anifestent tous une espèce d ’exaltation
euphorique et contagieuse. Ils sont im pavides, prom pts au sacrifice
et néanm oins invulnérables, ils se battent à un contre cent et
néanm oins sont toujours victorieux, ils sont bons ju sq u ’à la faiblesse
avant l’épreuve, indom ptables pendant. On le voit : ce sont les
caractères classiques de toutes les épopées, pas nécessairem ent
primitives. Peut-être s’ajoute-t-il ici un dessein d ’édification plus naïf
et envahissant.
Le genre était certainem ent populaire et panm aghrébin : il en
existe une série d’exemples en arabe dialectal. La tram e, les senti
ments, à quelques variantes de détail près, se retrouvent assez
sem blables d ’un poème à l’autre.
Le poèm e de W asisban (peut-être une déform ation de Oued
Sisbane) qui relate un épique com bat entre m usulm ans et chrétiens
(par ailleurs non attesté dans l’histoire) peut en fournir un exemple.
Les m usulm ans ont tué le m ari et les frères d’une noble dam e
chrétienne, qui dés lors fixe com me condition à qui veut l’épouser
que d’abord il la venge en tuant au m oins trois m usulm ans
notoires : Ali, H am za et le Prophète lui-même.
Effectivement, un roi chrétien qui prétendait à sa main lui amène
bientôt le cadavre de H am za, q u ’il a tué en com bat singulier.
Q uand la bataille s’engage entre vingt mille chrétiens et sept cents
m usulm ans, Ali est absent : il est à quarante jo u rs de m arche. Le
com bat dure des jo u rs ; à la fin, il ne reste plus que soixante-dix
m usulm ans, dont certains sont blessés. M oham m ed en vient à
regretter l’absence de son neveu.
Loin de la bataille, Ali mène bonne vie. Il est couché et, en
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s’éveillant, s’étonne de voir que son cheval piaffant d’im patience a
creusé de son sabot un trou si profond q u ’il y est englouti, seule sa
tête dépassant. Il com prend que M oham m ed est en danger, va
détacher le cheval, prend en croupe son épouse F atim a, fille du
Prophète, et s’élance : il couvre en deux heures la distance de
quarante jo u rs qui le sépare du lieu du com bat.
A son arrivée, il s’enquiert d’un certain nom bre de com pagnons.
Ils sont tous m orts. On délibère sur la m éthode de com bat : indivi
duel (yiw en y e ry iw e n ) ou en masse (d'ahum m u) ? Ali entre au cœur
de la mêlée. Les chrétiens tom bent par pans entiers devant lui. Ceux
qui restent vont rendre com pte au roi, qui, reconnaissant là les coups
d’Ali, sort le com battre en personne. La bataille dure trois jours. Le
roi chrétien porte la noble dam e en croupe.
C haque fois qu’Ali va frapper, la dam e intervient en criant :
« Dieu est son g arant ! » (fellas R ebbi). Ali aussitôt baisse le sabre.
Au bout du troisièm e jo u r, le Prophète s’étonne qu’un adversaire ait
pu tenir si longtem ps devant son invincible neveu ; il lui conseille de
prendre lui aussi F atim a en croupe. Ce qu’il fait. Q uand il va
frapper, la dam e de nouveau s’écrie : « Dieu est son g arant ! » M ais
Fatim a lance le youyou strident qui exalte Ali. Le sabre d ’Ali fend
en deux le cavalier, le cheval, et va se ficher au sol qui se plaint :
« Et moi, que t’ai-je fait ? »
D onc une vision apparem m ent triom phaliste. M ais les taqsit
religieuses ne sont pas toutes de ce type. Il en est un autre très
répandu et qui rend un tout autre son. Les héros y sont aussi des
modèles de courage et de foi, ils sont aussi confrontés à des épreuves
hors de l’ordre com m un, ils en triom phent aussi m ais à quel prix
(souvent la m ort) et surtout... surtout de quelle victoire navrante
ju sq u ’à l’absurde. Y aala est l’enfant unique de sa mère ; quand les
m usulm ans vont com battre l’infidèle, ils exigent de l’em m ener avec
eux. Q uand ils reviennent, vainqueurs, la mère cherche son fils parmi
eux, en vain, car lui ne reviendra pas. A illeurs, M oïse s’offre à aider
des anges à creuser une tom be sur le bord de la route, m ais le trou
est-il assez grand ? Le m ort a justem ent à peu près la taille de Moïse.
Il entre pour voir : la m esure est juste... car la tom be est pour lui.
D ans un autre poème, le K halife O m ar, renom m é pour sa justice,
apprend que son fils, prenant du bon tem ps avec une femme, s’est
laissé enivrer par elle. La sanction légale est de cent coups de bâton.
O m ar la fait exécuter ; malgré les supplications de son fils, le
K halife presse l’esclave qui frappe, au centièm e coup l’enfant meurt.
Sans doute ne fait-on pas nécessairem ent de bonne littérature
avec de bons sentim ents, mais toutes ces m orts im m éritées, pire :
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odieuses ! Pourquoi ces preux, ces prophètes et ces saints ne par
tent-ils pas dans la gloire et la joie du retour à D ieu, comme tant
de vers appellent la m ort ?
C ar les sizains dikr, en principe destinés à rappeler aux hommes
les vérités consolantes de la foi, ne dégagent pas une impression
différente. Le thème préféré, rebattu, ressassé ju sq u ’à la hantise, c’est
la m ort. Et, curieusem ent, non pas la m ort sereine, voire heureuse,
du croyant qui y va comm e à la porte ouverte sur l’éternité. Non,
mais la fin cruelle, la déchirante séparation de ceux qui s’aiment,
l’adieu à une vie que les lèvres déclarent à satiété vallée de larm es et
que le cœur quitte dans les affres, la m ort « amère com m e le lau
rier » ( i-tarzagant am-milili).
Il suffit d’entendre com m ent elle est présentée dans les sizains
dikr :
Un jo u r on creusera ma tom be
A l ’aide d'un p ic on en taillera les parois
On bâtira les m urs
A v e c un m ortier boueux
On t ’emportera m a tête aimée
Tu auras la terre p o u r oreiller et tu v pourriras.
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prédictions com m e devant être le plus pervers. A la place de la foi
naïve se sont installés l’incroyance, les calculs intéressés, Pégoïsme.
Peut-être l’heure (entendez celle de la fin du monde) est-elle proche ?
Il n’y a point d’issue en vue, ni de m iséricorde à attendre. La seule
attitude à adopter, c’est non seulement une aveugle application des
règles (les subsidiaires et autres additions à la limite de l’hétéro
doxie, autant que les fondam entales), m ais une sorte de refus morose
de la vie, en attendant la grande délivrance. Les exemples ici sont
innom brables20.
On est dès lors amené à chercher s’il n’existe pas de cause
com m une qui explique à la fois le triom phalism e systém atique des
premières pièces et le pessimisme souffreteux et rigoriste des
secondes. Ici intervient l’histoire sous la forme relatée plus haut. S’il
est vrai q u ’après l’effritement des grands em pires (abbasside en
Orient, alm ohade au M aghreb), la découverte de l’Am érique, la
nouvelle route des Indes par le sud de l’Afrique, les invasions
mongoles, bientôt la chute de G renade se conjuguent pour détourner
vers d ’autres voies le com m erce international, affaiblir la puissance
politique du m onde islam ique et le réduire bientôt à la défensive,
alors on explique aisém ent l’aspect particulier pris par l’inspiration
religieuse dans la poésie kabyle. C ar sans le vouloir expressément,
c’est cet islam -là que les poèmes religieux propagent. Les deux a tti
tudes que l’analyse décèle s’expliquent désorm ais comme deux
réponses diverses à une même agression de l’histoire. C ar le type à
prem ière vue m ilitant et triom phaliste apparaît comm e une réaction
de fuite ; tous les héros positifs, si l’on peut risquer cet an achro
nisme, appartiennent à un passé depuis longtemps révolu : les débuts
idéalisés de l’islam , ou une époque biblique encore plus m ythique et,
à vrai dire, souvent confondue avec la précédente. On se sauve de la
laideur et des cruautés du présent dans les fantasm es d ’un âge d ’or,
fait de désirs refoulés sur le fond de quelques souvenirs sélectifs et
remodelés.
Q uand on ne fuit pas dans le rêve, on se console par l’interpréta
tion m étaphysique. Deux idées simples mais efficaces : puisque tout
doit m ourir, à quoi bon tro p s’inquiéter d ’un m onde par essence
condam né ? Et de toute façon une intelligence suprêm e déterm ine
l’événement, selon des principes à nous im pénétrables.
D ans la pratique, l’ignorance et le doute appartiennent à notre
20. D a n s l’é ta t actuel de l’inform ation, il est m alh eu reu sem en t im possible de
d a te r les siz ain s d ik r p o u r déterm iner si la vision pessim iste q u ’ils exprim ent est le
p ro d u it d ’une ép o q u e ou une loi du genre.
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nature d'hom m e comme la chaleur tient au feu. La seule voie qui
reste ouverte est celle d ’un rigorism e désenchanté.
Tout se passe comme si une société qui sent qu’elle n’a plus prise
sur l’histoire interprète ses propres blocages en termes de destin.
D ans une espèce de réaction m asochiste, elle tourne contre elle-
même la conscience irritée de son im puissance, attribue ses échecs
ou ses m anques à une application insuffisam m ent stricte des rites et,
faute de pouvoir agir sur les événem ents, bat sa coulpe et exige
d’elle-même encore plus de tension absurde ou de crispation scléro
sante. Elle a renoncé aux affres du doute, aux risques de la quête (et
donc à ses chances), pour le m onolithism e d’une foi qui confond la
pureté de l’intention avec la rigidité de la pratique.
Tout cela, que l’on retrouve dans les poèmes à sujet religieux,
serait inexplicable si l’histoire ne venait lui apporter un éclairage
décisif par l’image qu’elle rend de ces siècles m oyens de l’islam.
Il est probable que la très grande m ajorité des pièces de cette
veine qui nous sont parvenues ne rem ontent pas plus loin que,
disons, le x v ie siècle. Elles sont pour ainsi dire m odernes et portent
la m arque de cette relative m odernité. Il est difficile de rem onter plus
loin et, par exemple sur la période im m édiatem ent précédente,
d’avancer quoi que ce soit de précis, faute de docum ents. On peut
seulement raisonner par conjectures et ce sera le dernier élément que
l’histoire m aghrébine sera susceptible de fournit'.
Des historiens, en particulier maghrébins, ont tenté de m ontrer
com m ent l’histoire m aghrébine obéit à une espèce de m ouvem ent
pendulaire qui la fait osciller entre des périodes d’intégration relati
vement poussée (où la réalité d’un État et d’une civilisation tend à
s’im poser à l’ensemble du pays) et des périodes d’éclatem ent (où le
pays profond fait revivre l’éparpillem ent de ses groupes quelquefois
minuscules et revenus aux ressourcem ents anciens). D e fait, on
discerne assez bien à l’époque où nous som mes parvenus (le
xv* siècle environ) une de ces périodes charnières où le m ouvem ent
du pendule historique s’inverse. En effet, les grands em pires unitaires
du Moyen Age berbère (A lm oravides, A lm ohades, M érinides) et les
grands royaum es qui les ont par la suite m onnayés (M érinides,
Zeyanides, Hafsides) s’effritent. En Algérie, le dernier en date aura
été le royaum e ham m adite de Bougie. A la place se dessine un émiet-
tement plus ou m oins poussé de la société m aghrébine, un m ouve
ment de retribalisation, que sans doute la lente mais continue
expansion hilalienne a revigoré et qui, dans le cas des groupes
berbères, se présente aussi com m e un mouvem ent de récupération
(ou de recréation) d’une identité culturelle éprouvée par plusieurs
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siècles et plusieurs formes de colonialism e étranger. Le temps d ’Ibn
K haldoun (x iv e siècle) peut être considéré com m e la charnière entre
ce que schém atiquem ent l’on peut appeler l’époque des empires et
celle des tribus ; il apparaît clairem ent dans l’œuvre du grand
historien que le m ouvem ent d’empiétem ent de celles-ci sur ceux-là
est suffisam m ent avancé pour q u ’il en soit fait m ention dans un
ouvrage historique. Deux siècles plus tard, les « royaum es » de
K oukou et de Béni-Abbès conjugueront dans des limites étroites les
souvenirs déjà adultérés d ’un ordre étatique révolu avec la réalité
d’É tats déjà tout pénétrés de valeurs tribales.
Peut-on rem onter plus loin que ces visions, si imprécises soient-
elles, du M oyen Age m aghrébin ? Il semble que non, qu’à partir de
là toute conjecture devienne hasardeuse. D ans cette nuit rendue
totale par le m anque de docum ents, à peine peut-on inférer de
l’existence de la flûte libyque ou de l’évocation p ar Salluste des
guerriers m arocains de Bocchus passant toute une nuit à chanter la
veille du com bat, que, jadis comme aujourd’hui, poésie et m usique
étaient intim em ent mêlées chez les Berbères.
Au term e de cette analyse historique, si m alaisée fût-elle, on peut
tenter d ’estim er la valeur des apports. Il semble que le bénéfice en
aura été surtout de rem ettre en perspective les poèmes ici recueillis,
en quelque sorte de les relativiser. Ils portent la m arque d ’un tem ps ;
de là à dire qu’ils en sont le produit, il n’y a qu’un pas. Les
ethnologues l’ont franchi.
Cette conclusion va contre l’intime conviction des sujets eux-
mêmes. Illusion classique, dira-t-on : lors même qu’ils sont mus,
souvent étroitem ent, par des m écanism es contraignants, les groupes
comme les individus ont toujours l’im pression, fausse, qu’ils
œuvrent dans une entière liberté. M ais, pour être contingente, pour
quoi une attitude serait-elle nécessairem ent erronée ? Singulièrement
dans le dom aine des valeurs et des interprétations du m onde, une
prise de position est toujours liée aux conditions objectives dans
lesquelles elle est née et seule un ethnocentrism e n aïf attribue une
valeur absolue à une contingence particulière. Toute expérience est
vraie qui a été vécue par des hommes.
Q u’im porte après to u t q u ’une vision pessim iste du destin soit en
partie le produit d ’une histoire décadente ? La hantise de la m ort,
l’am our m ystique, la fuite de la réalité dans le m ythe sont-ils des
vérités d ’un seul pays ou d ’un seul tem ps ? Celles-ci peuvent
em prunter provisoirem ent l’habit d ’un terroir et d ’une époque ; m ais,
par-delà les couleurs dont la singularité d’une histoire les habille, ce
qui fait leur valeur profonde c’est ce par quoi elles s’entendent sur
29
l’universel fonds de nos douleurs et de nos espérances. Ceux qui
disaient les unes et les autres, en des termes qu’ils croyaient valables
pour tous, en définitive n’avaient pas tort, et dans ce cas c’est le
relativism e historique des historiens classiques qui est lui-même
relatif.
Si l’hypothèse d’une poésie com posée aux siècles moyens du
ressourcem ent tribal est fondée, il faut tout de suite lever une
objection : celle de la diversité d’origine des poèmes ici recueillis. Si
la société kabyle est réellement cette m osaïque de groupes étroits
dont chacun se pense com m e un absolu, le seul sujet pertinent
d ’étude est la production d ’un seul de ces groupes, le plus restreint, ie
plus caractérisé possible. Or, c’est une formule tout à fait différente
qui a été adoptée ici. Les poèmes ne viennent pas tous du même
endroit : ils intéressent pratiquem ent toute la région où le kabyle se
parle. L’aire en est donc relativement considérable : de la côte médi
terranéenne (Yousef-ou-Kaci) au versant sud du D jurdjura, de la
région de Tizi-Ouzou à la limite orientale de la Petite K abylie (Sidi
Kala). Et voilà violée la sacro-sainte loi de la focalisation m aximale
de l’étude anthropologique.
D ’autant qu’à cet inconvénient s’ajoutent pour l’aggraver les
préjugés particuliers de l’ethnographie m aghrébine, pour qui le pays
kabyle d’antan était une m osaïque de groupuscules mutuellem ent
exclusifs et qui ne pouvaient entretenir entre eux que des rapports
d ’hostilité ouverte ou sourde. On change de m onde en passant de
l’un à l’autre et ce qui est vérité en deçà de la frontière peut n ’être
plus valable au-delà.
C ’est de propos délibéré que j ’ai été à ren co n tre de ce qui était
devenu règle indiscutable. Je voudrais m ontrer que cela n ’est pas le
résultat d’une option fortuite ou arbitraire, m ais un choix dicté par
la nature mêm e de la réalité que je vivais avant de la soum ettre à
l’analyse. D ’autant qu’au départ mon inform ation rem plissait, sans
l’avoir cherché, les conditions optim ales : elle était puisée dans un
seul groupe, mieux, presque auprès d ’un seul inform ateur, il est vrai
privilégié. Puis, obéissant aux lois du genre, telles q u ’elles sont dans
le groupe (et non point telles que les exige une anthropologie dont à
cette époque j ’ignorais ju sq u ’à l’existence), j ’ai été quêtant d’autres
exemples de la sagesse dont les élém ents déjà recueillis me donnaient
l’avant-goût.
Vite j ’ai fait la constatation, rem arquable, que d’un groupe à
l’autre un même ensemble de poèmes, pour ainsi dire classiques, se
retrouvait : « H istoire de Joseph », « La M ort de M oïse », « Le
Sacrifice d’A braham », M ohand-ou-M hand, le cheikh M ohand,
30
quelques sizains soit dikr, soit profanes. Les variantes, quand elles
existaient, étaient le plus souvent insignifiantes.
A ce fonds com m un un groupe pouvait ajouter un petit nom bre de
pièces qui lui sont particulières, en général parce qu’elles se
rapportent à des événements locaux. Elles dépassent rarem ent un
niveau moyen, car des poèmes consacrés à l’histoire d ’un groupe
précis acquièrent une audience très large et souvent pankabyle dès
l’instant que le génie d’un poète les a magnifiés et en quelque sorte
dotés d ’une dim ension universelle. Ainsi de Yousef-ou-Kaci.
Cela pour le corpus pour ainsi dire moyen.
A un degré plus haut, les sages (am ousnaw ) disposent eux aussi
d’un lot com m un, où les mêmes vers reviennent pour illustrer les
mêmes situations ; les auteurs sont moins populaires, m ais plus
prisés des connaisseurs : H adj M okhtar Ait Saïd, Larbi A it Bejaoud,
Sidi K ala, Sidi M hem m ed-ou-Saadoun, H adj R abah...
A ce phénom ène inattendu on peut tenter de trouver des causes
concrètes. La prem ière et la plus apparente étant qu’au sein de cette
société dite atom isée il y a d’actifs agents de com m unication.
En prem ier lieu les poètes eux-mêmes, ceux du m oins qui le sont
de profession. Leur statu t social même les dote d ’une certaine
imm unité : leur vocation est de traverser tous les groupes, auxquels
ils proposent à la fois leurs œuvres personnelles et celles de leurs
devanciers. Cela même quand (et c’est le cas de Y ousef par exemple)
ils s’avouent publiquem ent les hérauts d ’un groupe précis : ils
peuvent sans crainte se rendre même dans le groupe ennemi, car leur
fonction les couvre.
Cette m obilité est évidem m ent précieuse. Au sein de ces entités,
dont beaucoup de m em bres m ouraient à l’endroit qui les avait vu
naître, souvent sans avoir atteint l’horizon pourtant étroit que leurs
yeux contem plaient toute une vie, le poète c’était une image du
dehors, le héraut d ’une form ule autre, et bien que l’éloge de la
puissance m ilitaire turque n’apportât que déplaisir aux auditeurs
d ’une tribu anarchique, surtout quand c’était Y ousef qui le faisait,
lui qui venait de l’autre côté de l’horizon, on ne l’en écoutait pas
moins.
L’autre agent actif (et à vrai dire équivoque) de relations entre
groupes, c’étaient les m arabouts. La caste tout entière tissait sur le
pays kabyle un réseau serré de groupes fam iliaux de tous les types,
depuis les grands aristocrates prospères et craints ju sq u ’aux gueux
besogneux et plus ou moins laïcisés, m ais tous unis par le com m un
prestige de leur appartenance supposée à la lignée du Prophète.
Leurs alliances, leurs actions, souvent leur prestige traversent les
31
groupes auxquels ils s’im posent en se superposant. C ’est eux qui ont
répandu, de façon plus ou m oins concertée, la com m une idéologie
d ’une orthodoxie islam ique très largem ent mitigée de berbérité. Ils
ont l’apanage quasi exclusif de l’instruction et, par voie de
conséquence (aussi parce qu’ils disposent de plus de loisirs),
s’adonnent volontiers à la poésie. Ils peuvent en particulier la
transcrire et donc la répandre : ainsi en a-t-il été d ’« Elmoursel » et
probablem ent d ’autres poèmes.
De la troisième catégorie enfin, celle des am ousnaw , il sera plus
longuement question par la suite.
M ais, à tout prendre, ces causes sont secondaires et quelquefois
occasionnelles. Une analyse plus poussée m ontre que ce qui est à
reconsidérer, c’est la notion même de société à la fois insulaire et
atom isée qu’aurait été la société kabyle à la veille de la conquête
française (et d ’ailleurs toute société sem blable à celle-là). Des
conditions géographiques d’abord, sociologiques ensuite, plaident en
effet en faveur d’un certain isolement : un bastion m ontagneux
difficilement accessible, excessivement m orcelé, sans voies de com
m unication autres que des chemins m uletiers m alaisés, une société
de type segm entaire, sans É tat, faite de la juxtaposition de groupes
très restreints qui se posent surtout en s’opposant et dont seuls la
religion ou le danger extérieur peuvent faire l’unité occasionnelle
ment.
M ais q u ’en était-il dans la réalité ? T out d’abord, cet extrême
isolement n’est pas viable. La nourriture nationale kabyle est le
couscous, norm alem ent introuvable dans une m ontagne qui n’est pas
productrice de céréales. On a pu qualifier d’absurde l’économie
kabyle traditionnelle, où l’on consom m e des mets à base de farine
dans une m ontagne faite pour l’arbre et l’herbe. M ais, contraints de
se procurer dans la plaine les céréales qui leur m anquaient, les
Kabyles devaient com pter avec l’au-dehors et jad is il n’était pas rare
qu’un m ontagnard s’associe avec un paysan de piém ont, l’un offrant
sa terre et l’autre son travail, des bêtes et éventuellem ent de l’argent.
Plus récem m ent, des A rabes d’A um ale ou de Sidi-A ïssa traversaient
les cols, à la fin de l’été, avec leurs cham eaux chargés de blé qu’ils
allaient vendre dans les villages kabyles.
Par ailleurs, la montagne était tributaire de la ville pour un certain
nom bre d ’objets m anufacturés, en particulier le plus précieux d’entre
eux : les arm es. On allait chercher les canons de fusil à Tunis,
l’argent et la poudre à Alger, où l’on vendait l’huile.
Politiquem ent, ces irrédents qui accueillent les troupes turques les
armes à la m ain, quand elles veulent entrer dans la « m ontagne de la
32
dignité », reconnaissent au pouvoir d’Alger une sorte de légitimité
sym bolique.
M ais c ’est surtout la religion qui dotait ces petites républiques
d ’une dim ension universaliste. Au point que l’on peut dire que le
sentim ent d ’appartenance d ’un individu sautait tout de suite de
l’horizon tribal, à portée de regard et de course, au grand ensemble
de l’oum m a islam ique, aux contours im précis mais très vigoureuse
m ent sentis, par-delà l’entité plus controversée, moins intériorisée,
d’une nation algérienne en principe représentée par l’autorité
deylicale d ’Alger. Aussi bien les clercs, agents actifs de socialisa
tion, propagent abondam m ent les valeurs de celle-là, et presque pas
du tout les visées de celle-ci, sau f quand les deux perspectives se
recoupent ou coïncident. Annuellem ent, des pèlerins se rendent aux
lieux saints de l’islam : pour la plupart, ce sera leur seul contact avec
l’extérieur durant toute leur vie. Ainsi le m onde d ’« Elmoursel »
s’étend-il du Sind à l’A tlantique, de l’Espagne à l’Abyssinie, en
passant par le M aroc, les hauts plateaux algériens, le Sahara, la
Tunisie, l’Égypte, le Soudan, la Syrie, l’Irak, la Turquie, l’Inde,
même si ces nom s n ’évoquent que des réalités im précises dans
l’esprit du poète qui les cite.
A vrai dire, on ne peut que m odérém ent s’en étonner. Ce bastion
réputé im prenable n’a pas plus de 400 kilom ètres dans sa plus
grande dim ension. Il est à portée de m éhalla, d’école, de confrérie, de
visée politique. Il est vrai qu’il est un peu en marge de la routine de
l’histoire : en particulier, les contraintes de la plaine l’épargnent ;
voire même, il sert de refuge à ceux qui fuient des conditions qu’ils
trouvent inacceptables dans le bas pays. M ais aussi l’histoire l’a
intégré souvent : les Quinquégentiens sont un choc en retour de la
m ontagne contre un ordre rom ain qui pesait sur ses franges (ou bien
même tentait de la pénétrer : D jem âa Saharidj). Au M oyen Age, les
Z ouaoua vont aider les K etam a à im poser la dynastie fatim ide :
c’est déjà une entreprise à l’échelle du m onde. Plus tard, ils vont
participer à la civilisation ham m adite de Bougie. Au mom ent où
l’islam en perte de vitesse va rem ettre entre les m ains des Turcs le
soin de défendre la foi, m aintenant m enacée, deux royaum es kabyles
(K oukou et Béni-Abbés) vont tenter de prolonger la vie d ’une nation
algérienne de partout démantelée. C ’est d’une garde de Z ouaoua que
ses deys de plus en plus algérianisés vont s’entourer et, quand les
troupes françaises débarqueront à Sidi Ferruch en 1830, des contin
gents kabyles (les mêmes qui com battent les troupes des janissaires)
vont descendre pour défendre Alger contre cette agression venue de
l’extérieur.
33
Force était donc, à la fin de l’analyse de ce second élém ent, de
conclure à une confirm ation des résultats dégagés par la prem ière
investigation. L’autorité turque, surtout adm inistrative et m ilitaire, a
eu pour effet en K abylie une sorte de retour aux sources et comme
une revivification de l’état enchanté d’avant l’histoire, ses am puta
tions et ses dram es. M ais, naturellem ent, ce ne pouvait pas être un
retour m écanique au bonheur d ’avant la naissance. L ’histoire a, dans
l’intervalle, opéré dans les vies, les consciences et com m e le souvenir
collectif des hom m es. La replongée donne donc à la vie des
individus à la fois profondeur et authenticité, dans la m esure où ils
sentaient confusém ent que dans l’ordre existant l’accession à une
réalité sociale plus vaste ne se pouvait faire qu’au prix d’un
renoncem ent à soi, c’est-à-dire au prix d’une aliénation absolue.
Si bien q u ’ici aussi la m éthode de l’école est déficiente et
réductrice. Être soi, oui, être entre soi, voire, n’être que soi, c’est une
formule sans grand sens pour la tribu la plus perdue de la forêt
am azonienne, mais pour un groupe qui depuis deux mille ans
participe aux rem ous d ’une histoire agitée, c’est un non-sens.
Aucun des m em bres de la société où ces poèm es ont été recueillis
n ’est capable de les réciter tous, ni même une notable partie. Mais il
en sait l’existence, et que quelqu’un dans le m onde, en définitive
familier, qui l’entoure les connaît et les dit. C ette connaissance, en
quelque sorte en creux, en est une aussi, dans la mesure où le
m anque est perçu com me tel et le chaînon m anquant assum é,
com m e faisant partie du patrim oine au même titre que les poèmes
effectivement sus ; tant il est vrai que la culture n ’est pas seulement
un lot d’éléments existants, m ais aussi une som m e de projets
revendiqués. Seule cette vision, tout entière projetée vers l’au-delà
d ’une culture en expansion, en projet était vraie, le repli souffreteux
des ethnologues sur la désespérance d ’un enclos étroit étan t tout au
plus un procédé com m ode de réduction de l’étrange.
H restait à tester la validité du principe qui fonde en anthropologie
le choix du groupe lé plus restreint possible. Il est aisé à cerner ; la
perception en est pour ainsi dire plus réelle, sans l’ap parat des
éléments m édiats rendu nécessaire p our les grands ensembles par
leur volume même. Surtout, les dim ensions réduites du groupe en
font une unité plus intégrée, plus proche de l’unité physiologique
d’un être vivant. C ’est dire que, comme pour celui-ci, on peut en
expliquer la nature par le rôle d ’un certain nom bre d’organes
spécifiques et les rapports qu’ils entretiennent entre eux et avec
l’ensemble. La tentative (il faudrait presque dire la tentation) fonc-
tionnaliste s’im posait donc ici d’elle-même. J ’y ai cédé.
34
Un certain nom bre de pièces peuvent être considérées comme
fonctionnelles par définition : ce sont les fameux chants du travail.
Cette considération est passablem ent théorique, car des chants du
travail il n ’y en a quasim ent pas. Il y a bien quelques vestiges épars,
mineurs tant par les dim ensions que p ar l’inspiration, en général
figés, im personnels, excluant à peu près toute possibilité de création,
quelquefois archaïques par la langue, de toute façon confinés à des
rôles purem ent conventionnels : couplets des travailleurs com m u
nautaires des tiw izi11, berceuses, chants des batteuses de lait,
formules des faiseuses de philtres ; à un degré plus élaboré, éloges
rituels des jeunes m ariés. Quelle que soit leur authenticité ou leur
valeur de docum ent, ce sont des genres m ineurs et vécus com m e tels
par les usagers eux-mêmes.
D ’une fonctionnalité un peu particulière sont les poèmes qui ne
dem andent à la fixité du vers que le rôle de conservation qui
norm alem ent revient à l’écrit dans les sociétés lettrées. Le genre en
était très répandu, à peu près tout événem ent notable, surtout quand
il intéressait la collectivité, donnant lieu à création plus ou moins
durable, plus ou moins valable.
M ais déjà ici la fonctionnalité est de nature ambiguë. Il est rare, et
à vrai dire à peu près impossible, que la seule utilité du vers en ce
cas soit de garder le souvenir d’un événement m ém orable. En réalité,
la sensibilité de l’auteur, sans doute plus ou m oins le reflet de la
sensibilité collective, intervient d’une façon ou d’une autre dans cette
interprétation versifiée. Il dépendra souvent du talent du poète que sa
com position dépasse les limites quelquefois étroites de l’événement
qui lui a donné lieu ; à la limite, on peut faire de la grande poésie sur
des données épisodiques.
M ais, à ce point où l’invention peut prendre des proportions qui
outrepassent de loin le prétexte qui l’a suscitée, peut-on encore parler
de fonctionnalité au sens étroit du term e ?
Il en est de même d’un genre très particulier de com position, la
joute poétique, qui semble se prêter de! façon privilégiée à
l’explication fonctionnaliste, ta n t p ar le cadre bien défini qui lui sert
de support que p ar sa forme conventionnelle. La jo u te a lieu pendant
35
les fêtes. Le caractère form aliste de la procédure, la régularité du
scénario triphasé font de Ihenni la donnée rêvée de l’analyse
fonctionnaliste. C ar on voit im m édiatem ent la tentante explication
à laquelle invite une cérémonie, où la règle d ’un jeu relativem ent
élaboré souligne les symboles et les significations.
36
C ’est un poète partisan, c’est-à-dire partial. Ii ne s’en cache pas :
L eurs parangons
C e sont les Turcs qui hantent les mers.
N o u s devons chanter leurs louanges
Tous ju s q u ’à ce que nous soyons au tombeau.
C ’était sim plem ent la règle du jeu. Le poète interprète avec une
liberté abusive ju sq u ’aux faits les plus évidents :
« T aourirt-el-H adjadj est à une journée de m arche... et ils [les
adversaires! la convoitaient. »
Dans la réalité, cette journée représente à peu près une heure. Un
sizain im m ortalise le nom et la valeur d ’A m eur Ait M hemmed, chef
du parti favorable aux Ait Yenni. M ais le parti était m inoritaire, et
de la masse des habitants et de leurs chefs on ne saura jam ais rien,
pas même le nom 23.
L’interprétation des événements est toujours partisane. Q uand une
attaque des Ait Yenni échoue, c’est la volonté de Dieu ; quand une
autre, deux jours plus tard , réussit, c’est grâce à la valeur des
com battants24.
Ici, la poésie est arm e, on la crain t et, de fait, elle peut de l’arm e
avoir ju sq u ’à la vertu m eurtrière. Un guerrier qui, pour se distinguer
au com bat, avait pris un habit bleu voyant a préféré se tenir dans un
endroit défilé le jo u r du com bat. Y ousef com pose six vers là-dessus,
cela suffit pour que, la fois suivante, le m anteau bleu se portât loin
en avant... Il n ’en est pas revenu, m ais il avait lavé l’opprobre du
décri d’un poète. C orollairem ent, l’éloge fait de soi dans un poème
23. C f. n u 17.
24. C f. n os 22 et 23.
37
était hautem ent prisé. L’expression consacrée pour dire de quelqu’un
qu’il se distingue, c’est : « L’aède l’a m entionné dans un poèm e25. »
Yousef lui-même dit des Ait Yenni :
L es A it-Y e n n i
O ù un seul com m ande
sont plus des vœux inquiets que des constatations. C ar, ailleurs, le
poète prie :
38
cités l’un pour sa science l’autre pour son prestige, et un chef de
parti, m ais celui-ci n’a d ’autre valeur que d’être justem ent le
porte-étendard d’un clan. De lui personnellem ent on ne sait rien, que
son efficience ; il est :
— la valeur guerrière :
39
Ils sont hom m es de parole29
Ils ne trahissent ni ne se dédisent
Une fo is q u ’ils ont p ro m is30
— la constance :
3 1. N ° 2 6 , vers 4 5 .
40
fois dynastique et personnel tente de se substituer à l’anarchie
organisée des tribus du centre.
Un pouvoir à la vérité équivoque, puisqu’il peut être, selon les
circonstances, le fourrier des visées du pouvoir central (c’est le cas
des Ait K aci) ou le défenseur des libertés tribales, mais qui, malgré
cette am biguïté (ou à cause d’elle), représente to u t de même une
forme plus évoluée d ’organisation sociale. Enfin, nous avons vu que
Yousef lui-même, quand il veut faire l’éloge des A it Yenni, ne trouve
pas de référence plus prestigieuse que celle du pouvoir turc. C ’est
une habitude, presque un tic : les Ait Yenni sont Turcs de
Bab-Azoun, T urcs des Indes (entendez d’Asie), Turcs qui hantent les
mers.
Alger, puis l’Asie, puis, plus loin encore, les océans, voilà ce
qu’aux citoyens d ’une m inuscule république, pratiquem ent bloquée
au milieu d ’un m assif m ontagneux difficile, le poète propose comme
points de mire.
D ’autres ont souligné ce caractère de la tribu m aghrébine, voire
plus généralem ent islam ique34, dont la segm entarité est im pure dans
la m esure où elle n’ignore pas (où au contraire elle suppose)
l’existence d’un É tat centralisateur, vigoureusem ent com battu, mais
néanm oins reconnu com m e porteur d’une légitimité d ’une autre
essence (religieuse en particulier).
On ne saurait assez insister sur ce dernier point. Le poète n’a pas
seulement fonction d’intégration d’un groupe étroit, il en étend aussi
l’horizon, il en projette la visée ju sq u ’où les m oyens m atériels des
hommes des tribus ne peuvent norm alem ent atteindre. Le jeu tribal
n ’est pas (m algré le schém a classique) seulement activité introvertie,
crispée sur l’exiguïté d ’un dom aine au-delà duquel com m ence
l’étranger qui est souvent l’ennemi, il est aussi proposé sous une
form e qui n’est pas celle de l’agression à un environnem ent dont on
reconnaît l’existence positive et dont on sollicite la reconnaissance,
voire l’adm iration, par le moyen d’un verbe véhicule de valeurs
sym boliques, comme si, contrainte de défendre au plus près des
frontières vite atteintes, la tribu poursuivait en profondeur une visée
plus am ple et tentait d ’échapper sur le plan des signes à l’étouffe-
ment que lui im posent ses structures.
Au term e donc de cette tentative d ’explication fonctionnaliste, il
apparaît que le poète même qui eût dû être (et qui par certains côtés
41
est effectivement) le représentant type de la poésie tribale ne l’est en
définitive que de façon très impure et dans les limites d ’une vision
réductrice. Encore avec Yousef som mes-nous en plein dans la
période enchantée de la société tribale (à cheval sur le x v n e et le
xvm e siècle).
D ’autant que les interventions de l’histoire peuvent fournir un
élément quelquefois im portant d’indéterm ination et en quelque sorte
fausser le jeu. Cela s’est produit au moins une fois pour la société
kabyle à époque récente.
En effet, tant q u ’il s’agit des siècles m oyens, c’est-à-dire de cette
période d’au moins quatre siècles qui a précédé la conquête fran
çaise, l’explication de la poésie kabyle en termes de fonction, pour
boiteuse et insuffisante qu’elle soit, offre au moins les apparences
d’une certaine cohérence. L a société kabyle a dans l’ensemble atteint
une sorte de profil d’équilibre, qui y rend les changem ents suffisam
ment lents pour donner à l’ensemble la fam euse im pression d ’im m o
bilité des sociétés dites froides. L’ignorance des événements histo
riques aidant, on se trouve presque en face du sujet idéal pour
explication fonctionnaliste. Il est même probable q u ’une connais
sance plus étendue et plus précise de l’histoire de la Kabylie pen
dant cette période eût peu modifié les conclusions, dans la mesure
où ce qui aurait changé au cours du temps, c’étaient les figures du
jeu, la règle dem eurant identique. L’ordre n’était certainem ent pas
serein, m ais il était régulier, donc à la rigueur décodable.
Sur ces architectures, quelquefois très délicates, l’agression
coloniale du milieu du X IX e siècle va opérer non seulement avec une
brutalité inusitée, m ais surtout com m e un élém ent violemment
allogène, perturbateur et à la limite délétère, justem ent parce que
hors de la règle du jeu.
J’ai essayé de m ontrer ailleurs35 com m ent la conquête coloniale,
en brisant les rigides cadres tribaux d ’antan, a certes atom isé un
corps social jadis sécurisant, m ais aussi a libéré l’individu des
contraintes anciennes, souvent astreignantes jusq u ’à l’ankylose.
H asard ou expression d ’un déterm inism e plus profond, cette libé
ration a pu se m anifester de façon éclatante en deux dom aines, en
partie grâce à la valeur des deux hom m es de génie qui lui ont donné
forme : le lyrism e personnel (avec Si M ohand-ou-M hand) et le
lyrisme prophétique (avec Cheikh M ohand-ou-Elhocine). Il est pro
42
bable que la notoriété et l’action de l’un com me de l’autre n’auraient
été ni aussi étendues ni aussi profondes si la brutale conquête
coloniale n’avait créé les conditions m atérielles et psychologiques de
leur succès.
C ar le lyrism e m ohandien est détaché de toute attache avec un
groupe précis. Icheraïwen, dont il est, n ’intervient q u ’à titre épiso-
dique dans ses vers. Le dram e très éprouvant dont il sort (son père,
un des chefs de la révolte de 1871, a été fusillé) est à l’échelle de
l’Algérie tout entière, voire de l’islam. Son inspiration est à la
mesure de cet élargissem ent : il s’adresse à tous les Algériens, voire à
tous les homm es, dialogue avec le destin et avec Dieu. Il est déjà à
l’échelle du monde.
Je com pte m ontrer dans une prochaine étude com m ent la voca
tion de Cheikh M ohand, d ’abord née et grandie au sein des
structures anciennes, soudain s’en détache (très précisément pendant
et au lendem ain de la révolte de 1871, qui constitue la charnière
décisive) et, rom pant avec le form alism e étroit des vieilles
disciplines, se libère et rejoint la source d’un prophétism e vivant, qui
tente de résoudre les problèm es les plus essentiels en les transcen
dant par le verbe et les valeurs d’un ordre supérieur, intemporel,
hum ain, du tout indépendant des classifications segm entaires, de
partout dépassant la chétive portée des petits m arabouts locaux.
On ne saurait assez insister sur le caractère rem arquable de ce
m ouvem ent de la seconde m oitié du x ix ' siècle. Au m om ent où la
défaite entraîne aussi la disparition des autorités anciennes (ou leur
dém ission), où un vide dangereux se crée dans l’ordre des valeurs et
du sens à donner à un m onde qui sem blait trah ir de partout, la
société kabyle a trouvé en son sein deux individus dont le talent
supérieur a su créer les instrum ents sym boliques de restructuration
d ’un m onde éclaté.
J’ai ailleurs brièvem ent rapporté com m ent les deux hommes, aussi
contrastés p ar la nature qu’égaux p ar le génie, se sont un jo u r (le
seul) rencontrés, reconnus et mutuellem ent adm irés. On peut
regretter que leur entreprise soit restée sans lendemain : de toute
façon, les données objectives de l’ordre colonial les avaient en partie
créés, m ais la politique consciente de l’ordre colonial ne pouvait que
leur interdire toute postérité. Ils n’en ont point eu, et c’est d’un autre
événement capital, l’indépendance algérienne, que viendront les
conditions d ’un nouvel essor. On ne saurait néanm oins m énager son
adm iration aux deux esprits qui, dans des conditions particulière
m ent dram atiques, ont imprimé aux valeurs et au verbe de la société
où ils étaient nés la m utation décisive qui lui a perm is de survivre.
43
Au terme de cette partie de l’analyse, il apparaît donc que la litté
rature kabyle n’est, pas plus qu’une littérature plus élaborée, tribu
taire d’une explication fonctionnaliste qui en épuiserait toutes les
résonances. Ce qui ressort au contraire, ce sont les homologies
fondamentales. Si l’on met de côté la fonction très générale de toute
littérature dans n’im porte quel groupe social (une fonction justem ent
trop générale pour q u ’on pût la traiter avec un minim um de rigueur
et de précision), force est de revenir à la société berbère elle-même et
de tenter d ’expliquer sa littérature de l’intérieur, tel que le groupe
l’appréhende et la vit. Peut-être le point de vue des K abyles sur leur
propre littérature est-il au moins aussi valable et éclairant que le
regard extérieur qui, en tentant de la saisir, la désagrège. Peut-être,
en prenant au m ot les utilisateurs (et créateurs) de ces productions, y
réintroduira-t-on un sens qui, sans cela, s’envole en fumée ou se
rapetisse à un point tel que l’attachem ent quelquefois passionné qui
leur a été porté pendant des siècles devient une aberration. Au vrai,
c ’est de langage qu’il faut changer.
Si l’on adopte cette perspective nouvelle, la prem ière donnée qui
d’abord s’impose est que la civilisation kabyle traditionnelle (et, à
vrai dire, la civilisation berbère tout entière) était une civilisation du
verbe. N on pas seulement parce que l’inexistence pratique de l’écrit
hypertrophiait du même coup la valeur de la parole, mais par choix
ou par vocation. D ’autres peuples se sont exprim és dans la pierre, la
musique, le com m erce ou les mythes. Ici, la parole a valeur
éminente, voire despotique.
On cite des m ots, une grande partie de la culture courante est faite
de cela. Une seule phrase suffît parfois à résoudre une situation
difficile. On se bat pour des mots. D ans les assem blées, la parole est
maîtresse. Le proverbe dit : « Qui a l’éloquence a tout le m onde à
lui36. » Le m aître du dire (bab n wawal) est souvent aussi le m aître
du pouvoir et de la décision (bab n rray). On peut payer d’un poème
une dette. On aime donner à un beau geste la consécration d ’un beau
dit, et à vrai dire c’est usage courant et presque obligé.
Dans cette optique, la poésie apparaît com m e le degré le plus
éminent, le plus exalté (exaltant) d ’une pratique par ailleurs
44
com m une. L’analyse du système ancien des valeurs que l’on va
tenter d’établir m aintenant va le m ontrer de façon concrète.
En effet, l’échelle des codes de la société traditionnelle com portait
pour ainsi dire trois paliers non seulement inégalement accessibles,
mais aussi inégalement répartis. Au plus bas, lew qam , la voie droite,
est en principe à la portée de tous et donc exigible de chacun. A
l’étape interm édiaire, taqbaylit est le code kabyle de déontologie.
Tout en haut enfin tam usni, que l’on peut rendre très approxim ative
m ent par la sagesse, une sagesse à base de science. De celui qui agit
selon lew qam , on dit d argaz I-laali (c’est un honnête hom m e) ; de
celui qui se conform e à taqbaylit, d argaz tout court (c’est un
homme) ; et l’adepte de la tam ousni est un am usnaw (un sage).
Le rapport qui lie à la poésie chacune de ces trois conditions est
différent : un argaz l-laali peut ne pas connaître un seul vers (encore
que la chose soit rare), un argaz en connaît norm alem ent quelques-
uns, un am ousnaw non seulement est tenu d’en savoir le plus grand
nom bre m ais à l’occasion en compose.
L ew qam , en effet, s’applique à la vie quotidienne. 11 est la somme
d’un certain nom bre de vertus m oyennes, de règles et conventions
qui perm ettent le fonctionnem ent optim um ou désirable de la vie du
groupe. C ’est un idéal plus social q u ’individuel.
Taqbaylit est d ’une nature toute différente. La différence n ’est pas
seulement de degré, elle est d ’essence. Elle suppose une participation
active de l’individu, un effort de dépassem ent quelquefois exacerbé
et que n’im pliquent pas nécessairem ent les vertus plus prosaïques de
lewqam.
Le term e réfère surtout à la vertu considérée ici comme prim or
diale : le nif, l’honneur. Le n if c’est le sentim ent de ce que vous vous
devez, et par voie de conséquence de ce que l’on vous doit. Exigeant
ju sq u ’à la cruauté, om brageux, pointilleux quelquefois ju sq u ’au
byzantinism e dans l’interprétation des « cas », le nif, s’il est exigé de
tous, s’exerce surtout dans les circonstances extrêmes. Alors il
pousse aux sacrifices les plus décisifs, quelquefois les plus cruels,
souvent dans une aura d’exaltation barbare, que la rigueur des
conditions et la nature de l’enjeu (il y va souvent de la vie)
em pêchent d ’être purem ent ostentatoire. Il y a tout un code du nif,
souvent subtil, qui, sauf quelques cas classiques, dem ande à être
chaque fois interprété.
M ais taqbaylit consiste tout autant à rendre à l’autre tout ce qui
lui est dû. De là des règles im pératives d ’hospitalité, fût-on person
nellement dém uni, de solidarité, fût-on personnellem ent étranger à
l’objet du litige.
45
Dans ce sens, taqbaylit c ’est le respect des règles souvent strictes
qui régissent les rapports de la vie sociale, non pas tant dans sa
pratique journalière que dans les circonstances solennelles. Il y a des
règles de l’amitié (au sens kabyle du term e, plus institutionnel que
sentim ental, plus social qu’individuel), de l’hospitalité.
L’argaz fait face aux amis et aux ennem is : le même verbe
s’applique aux deux (i\qabal ihbiben, i[qabal iâdaweri), il est
courageux (d bab ggiyil, ikkat uzzal), il tient table ouverte
(iccecéay). Il n’a pas seulement les qualités de Yargaz l-laali, par
prétérition des travers, mais aussi les qualités positives, actives de
quelqu’un qui contribue par son action personnelle à la concrétisa
tion d’un idéal. A la limite, il tend davantage à être un héros qu’un
simple homme de bien. D ans la mesure où sa conduite est dictée par
le respect de valeurs apparem m ent gratuites et souvent aux dépens
de ses intérêts m atériels, il contribue à donner un sens à l’existence
de tous, y com pris de ceux qui personnellem ent ne peuvent pas (ou
ne veulent) suivre comme lui la voie ardue.
Au degré le plus haut de la hiérarchie se trouve am ousnaw 37.
Com m e pour taqbaylit, la notion n’est pas seulement hiérarchi
quement supérieure, elle est aussi qualitativem ent différente.
D ’abord en extension : appeler taqbaylit un idéal38, c’est en
reconnaître explicitement les limites, comme si les valeurs cessaient
d ’avoir cours en dehors du groupe. A l’intérieur mêm e de la société
kabyle, la caste des m arabouts ne s’y sent pas astreinte.
La tam ousni, au contraire, s’adresse à tous les hom mes. Bien sûr,
elle s’exprime en langue berbère, elle puise ses exemples, ses
procédés et peut-être plus subtilem ent certaines de ses valeurs dans
le contexte de la culture qui l’a sécrétée. Il n ’en reste pas moins
qu’elle a vocation universaliste. L’am ousnaw c’est l’hom m e qui tente
d’accéder à la vérité la plus générale, en quoi to u t se fonde et qui
peut se proposer à tous.
On ne naît pas am ousnaw , on le devient, car tam ousni suppose
une longue pratique doublant un long apprentissage. Ici, la
différence entre l’argaz et l’am ousnaw est évidente : taqbaylit est de
l’ordre de l’action, elle consiste surtout en la pratique d ’un code ; la
mise en œuvre exige évidemment un m inim um de réflexion, ne
38. T a q b a ylit est le fém inin de l’ad je c tif qui signifie « kabyle » et veut d o n c dire
littéralem en t « la voie k ab y le ».
46
serait-ce que dans l’effort d ’application du code à chaque cas parti
culier, m ais pour l’essentiel l’argaz connaît chaque fois la règle du
jeu, il n’a charge que de l’appliquer.
En regard, tam ousni est autant de l’ordre de la science que de
l’ordre de l’action. Les am ousnaw anciens ont fait l’effort d’analyser
les situations. Le prem ier soin du néophyte sera donc d ’« apprendre
les exemples », c’est-à-dire les vérités déjà dégagées p ar ses devan
ciers.
Voilà pourquoi la possession du verbe (particulièrem ent de cette
forme élaborée du verbe qu’est le vers), éventuellem ent nulle chez
argaz l-laali, circonstancielle et sélective chez argaz, est indispen
sable à l’am ousnaw , car le vers, nous l’avons vu, constitue l’écriture
d’une société pratiquem ent illettrée ; il sédimente et fixe les expé
riences anciennes.
Voilà pourquoi aussi, d’une génération à l’autre, les am ousnaw
form ent (et ils en ont conscience) une chaîne qu’il est vital de
continuer. La briser quelque part revient à annihiler d ’un coup
toutes les créations des générations antérieures. De là le soin inquiet
que, sur la fin de leur âge, les am ousnaw m ettent à se trouver un
successeur, souvent à l’instruire.
Cette solidarité à travers le temps se retrouve aussi dans l’espace.
La tam ousni ne connaît pas de frontières. L’ensemble des am ousnaw
ont conscience de former, par-delà les limites des petites républiques
aux dim ensions étroites auxquelles ils appartiennent, un groupe uni
par un projet com m un. Ils cherchent la com pagnie les uns des autres
(ggalasen), profitent de toutes les occasions pour rencontrer les
am ousnaw les plus réputés, dont la notoriété s’étend souvent bien
au-delà de leur groupe d’origine. Ils vont de tribu en tribu, de m arché
en m arché, quêtant la tam ousni et, ainsi qu’ils disent eux-mêmes,
« apprenant » les uns des autres. Il n’y a pas de limite à un savoir que
ses conditions matérielles de réalisation condam nent au disparate et
à l’occasionnel. Le proverbe dit : « O n apprend ju sq u ’à l’âge mûr, dit
l’un, ju sq u ’à la m ort, dit l’autre39. » Ainsi finit-il par se constituer une
espèce de « som m e » de la tam ousni, dont on retrouve d’une région à
l’autre non seulem ent les éléments souvent sem blables, m ais surtout
une espèce de clim at dans la m ouvance duquel un am ousnaw évolue
et à l’occasion crée.
Au vrai, c’est cette « somme » que ce livre eût dû être, mêlant
47
« T A M U S N I » ET SON ENVIRONNEMENT
L ’e n v i r o n n e m e n t h i s t o r i q u e L ’e n v i r o n n e m e n t c u l t u r e l
x v ie siècle : ro y au m es de
- K oukou
— B eni-A bbés
2. L ’â g e d e s t r i b u s
x v i ' - x i x ' siècle : p ério d e turque xvit' - x v ii i' siècle : Y ousef-ou-K aci
1830 : ch u te d ’A lger
1857 : prem ière co n q u ête de la K ab y lie
4. L e tem ps présent
4 1 . V oir n ° 5 6 .
42. Voir n° 4 0 et s.
50
d ’am ousnaw , dont la notoriété s’étendait plus ou m oins loin. Si bien
que dans le tem ps et dans l’espace était réalisée comme une constel
lation de la tam ousni, encore étayée sur ses limites par des activités
de nature différente, m ais qui entraient dans un systèm e d’enrichisse
ments réciproques avec elle, comme la poésie, les prophéties, la
prédication des clercs, l’enseignement des confréries.
Ce retournem ent de la perspective est naturellem ent un péché
d’hérésie ethnologique. Il fallait de toute façon être l’hérésiarque de
quelqu’un, ou, de façon plus positive, choisir ses fidélités. J ’ai de
propos délibéré élu le côté de ceux qui ju sq u ’ici étaient sans voix.
Justem ent pour leur en donner une si faible, si contrainte fût-elle.
C ’est pour cela que, contrevenant à toute m éthode classique, au lieu
de déduire la tam ousni au terme d ’une longue, prudente et, si
possible, rigoureuse analyse, je pars d’elle délibérément.
Je ne me dissim ule pas toute l’am biguïté et en quelque sorte le
caractère im pur de l’entreprise. Une m aintenant longue pratique de
la culture des autres (qui tend de plus en plus à être la culture univer
selle) fait de moi un porteur peut-être plus perverti qu’averti.
M ais même ce risque d’hérésie est prévu dans le code de ceux dont
je tâche ici de faire souffler l’esprit.
C ar tam ousni n’est pas un cadre clos. O uverture sur la vie, elle
l’hum anise et en intègre à mesure les cas inusités. L a presque totalité
des am ousnaw ont été les partisans résolus de la liberté kabyle
contre l’entreprise coloniale43. Tous ont usé de leur verbe, de leurs
conseils, souvent de leurs arm es pour com battre l’agression. Mais,
après la défaite, ils ont tenté avec des fortunes et sous des formes
diverses de faire entrer les données nouvelles dans le cadre des
valeurs et des concepts anciens. L ’un d ’eux, chargé d ’une m agistra
ture occulte tolérée mais non reconnue par les autorités coloniales,
décréta que les émigrés qui revenaient dans la tribu seraient
exemptés d ’am ende pendant quarante jours parce que, durant leur
absence, ils avaient été soumis à un genre de vie différent de celui de
la taqbaylit.
C ar l’ouverture est un des caractères essentiels de la tam ousni.
L’am ousnaw considère qu’une sagesse étrangère ne peut pas contre
51
dire la tam ousni, au m oins quant au fond. Elle peut en offrir des
variantes exotiques, m ais implicitement il est adm is qu’à ce niveau
l’étranger ne peut pas être étrange. Voilà pourquoi les am ousnaw
recherchaient entre autres la com pagnie des lettrés, pour des
desseins d’édification religieuse certes, m ais aussi par désir d ’enri
chir la tam ousni de toute la sagesse incluse dans les livres. Les plus
récents opéraient de même avec les livres fran çais44.
Aussi les am ousnaw les plus grands ne se contentent-ils pas
d’acquérir un savoir et de le transm ettre. Souvent ils tirent de
l’expérience, la leur et celle des autres, des élém ents d ’extension,
d ’approfondissem ent. Alors ils coulent à leur tour en vers frappés
comme des m axim es le fruit de leurs réflexions personnelles, car
tam ousni est par définition prégnante. Q uand le cours des événe
ments lance au groupe un défi insolite, c’est à l’am ousnaw que
revient la tâche de l’intégrer à un ordre familier ou logique. Le
dram e certainem ent le plus décisif que la société kabyle eût vécu
depuis des siècles a été la conquête coloniale du milieu du
x ix e siècle. Une partie de l’énorm e popularité des poèmes de Si
M ohand, qui avaient évidemment d ’autres titres à la célébrité, vient
de ce qu’ils opéraient cette réintégration de l’inédit dans un code
accessible, rétablissant p ar le verbe et dans le dom aine des signes un
ordre que la réalité violait.
44. C f. n° 10.
45. A la co u r de M a ssin issa, la langue des relations in tern atio n a les sem ble avoir
été le punique. C ’est en latin q u ’o nt écrit sa in t A u g u stin , T ertu llien , A pulée, saint
C y p rien , F ro n to n . P o u r l’ép oque islam ique, nous av o n s le tém o ig n ag e averti d ’Ibn
K h ald o u n : « On ne peu t signaler avec précision [les g uerres et les victoires des
Z e n a ta ], vu le p eu de so in q u’ils ont m is à en con serv er les d étails. L a cau se de cette
négligence fut le g ran d p ro g rès que fit l’em ploi de la langue et de l’éc ritu re ara b e s à
la suite d u trio m p h e d e l’islam ism e : elles finirent par p rév alo ir à la c o u r des princes
52
conséquences que cela implique et en particulier celle-ci en quoi se
fondent toutes les autres : l’existence durant plus de deux mille ans
d ’une culture d ’abord étrangère, puis légitimée, parce que c’était
celle des tenants du pouvoir, interdisait à l’expression berbère des
dom aines entiers qui, même s’ils n’étaient pas les plus authentiques,
étaient toujours les plus prestigieux — la politique, les sciences,
l’histoire, l’idéologie et d’une façon générale toutes les disciplines
nobles. Ainsi s’opérait dans les faits et pendant des siècles une sorte
de division des dom aines, réservant à la culture allogène le soin de
rendre les plus éminents et confinant la culture berbère dans
l’expression des activités idiotiques (et donc condam nées) ou
secondaires (et donc sans effet), une culture des m arges ; et si des
personnalités hors pair ont réussi, en général épisodiquem ent, à lui
donner les caractères d ’une grande culture, c’est effet du hasard. De
toute façon, cela ne peut déboucher sur rien parce que, au moment
où les conditions objectives ou fortuites am ènent la culture du
peuple berbère au seuil de cette m utation décisive, elle rencontre
l’arsenal tout prêt d ’une culture officielle, doublem ent arm ée des
instrum ents m atériels que le pouvoir politique met à sa disposition et
du poids sym bolique que lui confère une légitimité qu’elle défend
avec d’autant plus d’acharnem ent q u ’elle la sait contestée.
Il convient cependant d ’apporter ici une addition essentielle, qui
introduit dans cette perspective historique un changem ent im por
tant. Un élém ent crucial de différenciation, dû à la dernière agres
sion coloniale, est intervenu qui a de façon décisive changé la règle
du jeu et fait que la situation actuelle de la culture berbère n’est pas
la simple reconduction d ’un état m illénaire sous des formes renou
velées.
On connaît assez la thèse qui fait de l’antagonism e m akhzen-siba
un des m oteurs de l’histoire du M aghreb, quels que soient par
53
ailleurs les prolongem ents idéologiques ou l’interprétation, souvent
antithétique, qu’on lui donne. Ce qui était chez Ibn K haldoun
évolution cyclique d ’un rythm e ternaire, fatalem ent déterm iné, va
devenir chez les historiens coloniaux une sorte de confrontation
irréductible de deux mondes opposés dans l’essence46. A quoi
s’opposent les interprétations anticolonialistes plus ou m oins marxi-
santes ou m arxiennes : ainsi la thèse de la com plém entarité des
économies sédentaire et pastorale, dont justem ent l’agression
coloniale est venue briser l’équilibre47 ; ou, plus récem m ent, les
théories des historiens nationalistes qui, dans leur désir de com battre
l’idéologie colonialiste, apostasient une forme d’organisation poli
tique et sociale qui n ’a probablem ent jam ais existé telle qu’ils la
reconstruisent.
Sans doute convient-il de s’attarder davantage sur cette dernière
forme.
La thèse est connue. L’État m aghrébin, du m oins pendant la
période islamique, était fondé sur le consentem ent de la com m u
nauté, qui pouvait l’accorder rituellem ent (cérém onie de la beïa) ou
le refuser et entrer ainsi en état de siba. L ’existence, patente ou
latente, de ce choix définissait la règle du jeu de l’histoire
maghrébine. Il était toujours proposé aux individus et plus encore
aux groupes. L a distribution des deux m odes dans l’espace et la
chronologie était affaire de conjoncture.
Une accom m odation supplém entaire de cette thèse fait de la
forme étatique et centralisée du M oyen Âge islam ique non seule
ment un état supérieur d ’évolution, m ais surtout un état dernier. Le
pendant, déjà stigm atisé sous la dénom ination en réalité norm ative
de tribalism e, est défini en termes d ’hérésie et de régression. Il est le
lieu de toutes les négations, de toutes les puissances destructrices de
l’histoire m aghrébine48, la tentation toujours proposée et la régres
sion toujours néfaste au m onde enchanté de l’enfance, au passé
anté-historique, anhistorique. Une histoire adulte commence par sa
réduction.
Telle est la thèse qui sous-tend, plus ou m oins explicitem ent, la
pratique politique des gouvernem ents m aghrébins actuels, si bien
54
que la poésie berbère — et, par-delà elle, la culture berbère tout
entière — récupère le statut secondaire qui a été le sien depuis les
débuts de l’histoire.
Je pense cependant qu’il est erroné de dire que ce statut de culture
tolérée en face d’une autre, savante et seule légitime, soit la simple
reconduction d ’une condition m illénaire sous des formes modernes.
Et d ’abord (et ceci n’est pas le m oindre argum ent), après l’ordre
colonial, il n ’y a plus de zones refuges possibles : l’avion, les routes,
le transistor ont pratiquem ent supprim é les m ontagnes, les déserts,
tous les lieux ingrats m ais préservés où une culture pouvait survivre,
voire se développer. Ensuite parce que les instrum ents d’analyse
élaborés par les sciences de l’hom m e ont m aintenant acquis une
sûreté telle qu’ils ont au moins l’avantage d’avoir mis en évidence le
caractère fortuit, relatif, toujours historiquem ent déterm iné et de
toute façon scientifiquem ent indéfendable de toute dom ination
culturelle.
Si bien que, dans le même temps que les progrès m atériels et
techniques les exposaient de façon cette fois critique aux agressions
extérieures, les cultures m arginales ou dominées disposaient aussi
des instrum ents décisifs de leur libération.
Le tem ps n’est plus où une culture pouvait se tuer dans l’om bre,
par la violence ouverte, et quelquefois avec l’acquiescem ent aliéné
des victimes. En ce siècle de m onde rapetissé, où les contraintes
d’une civilisation technicienne tendent à niveler la vie des hommes,
désorm ais la som m e des variantes civilisationnelles fait peau de
chagrin (peut-être l’ère n’est-elle pas loin où nous pourrons les
com pter sur les doigts de la m ain) ; il n ’est pas vain d ’en pouvoir
sauvegarder le plus grand nom bre. D ’autant que, parm i celles qui
restent, les plus répandues tendent de plus en plus chaque jo u r à se
rapprocher d ’un patron unique. Il n ’y aura bientôt plus d’échappa
toire au m onde rond, huilé, astiqué, m onochrom e et désespéré que
nous nous forgeons.
Ce n ’était pas là la m otivation prim itive de ce recueil. M ais de la
rencontrer a renforcé le sentim ent que j ’avais déjà de l’urgente néces
sité de l’entreprise. Il convenait de recueillir ces poèmes non seule
ment parce qu’ils sont tissés à notre vie indissociablem ent, mais
aussi parce qu’ils véhiculent les canons et les idéaux d’une manière
d’être particulière et q u ’à ce titre on doit préserver en ce tem ps d’uni
form isation planétaire.
M ais, naturellem ent, le projet n ’est pas d’hypostasier ce qui a un
jour et de façon contingente été. A ucune vision passéiste n ’a présidé
55
à l’élaboration de ce recueil. Il se veut, au contraire, tourné vers
l’avenir et com m e un palier d’élan.
Tant les valeurs que les formes ici contenues ne sont des absolus :
elles com portent toute une part d’éléments contingents, imposés à
elles par une histoire souvent contrainte. M ais, p ar beaucoup de
côtés, elles dépassent ces limites étroites. Il ne s’agit point de propo
ser Yousef-ou-Kaci ou Cheikh M ohand com me des m aîtres, mais
comme de prestigieux exemples. Les trahir quelquefois, c’est souvent
leur être le plus fidèle, dans la mesure où ce qui im porte c’est plus
l’esprit que la lettre de ce qu’ils ont créé. L’essentiel est bien de tenter
pour ce siècle (m ais avec des instrum ents infiniment plus perfec
tionnés) ce qu’ils ont réalisé pour le leur. Ils en ont sur le plan des
valeurs et de l’expression (fût-il superstructurel) prolongé et amplifié
l’existence ; quelquefois même, ils ont aidé à sa survie dans les con
ditions d’une histoire bloquée, comme firent Si M ohand ou Cheikh
M ohand. Etre fidèles à eux, c’est être m odernes résolum ent, enter la
création sur les problèmes ou les visées de la réalité de ce temps,
dût-on dans le détail abandonner (ou dépasser) quelques-unes des
valeurs anachroniques qu’une histoire aliénée leur avait trans
mises.
C ar là est l’essentielle interrogation. Q u’est-ce qu’une culture
vraie sinon un instrum ent de libération ? Pour que la culture berbère
de ce tem ps soit un instrum ent d’ém ancipation et de réelle désaliéna
tion, il est nécessaire de lui donner tous les m oyens d’un plein déve
loppement. Elle ne peut pas être une culture de réserve indienne ou
une activité m arginale, plus tolérée qu’adm ise. A ucun dom aine ne
doit être en dehors de sa prise ou de sa visée. Rien de ce qui est
humain ne doit lui être étranger, c’est un M aghrébin de l’antiquité
qui l’a écrit, en latin il est vrai.
De toute façon, il me plaît de croire que si les am ousnaw dont j ’ai
en faible partie recueilli la tradition revivaient, ils reconnaîtraient
cette œuvre com m e leur. J’ai vu m ourir le dernier d ’entre eux. A la
ferveur que je m ettais à « apprendre de lui », je suis sûr qu’il eût
approuvé cette entreprise. Q uoiqu’il l’eût probablem ent jugée en
deçà de l’inaccessible akm é et surtout très im pure. Im pure parce
qu’insuffisamment tissée aux fibres mêmes de m a pensée et de mes
actes, parce que j ’ai traité com m e lettre m orte la m ouvante pensée
qui eût dû informer la vie, la mienne et celle des hom m es et des
femmes qui, vivant dans le même tem ps et les mêmes lieux que moi,
n ’avaient pas eu loisir d’apprendre comme moi.
Cette intime fusion avec les hom m es et les jours, c’est, de tous les
caractères de la tam ousni, le plus dram atique. Tiraillé entre les exi
56
gences idéales de la tam ousni et les servitudes et les manques de la
pratique du m onde, l’am ousnaw n ’arrive à rétablir un équilibre sans
cesse menacé qu’au prix de Pécartélem ent de son existence ou d ’une
héroïque tension.
Cette double fidélité fait son dram e et sa grandeur ; un distique
célèbre dit :
A lger, m ai 1976
57
Tazwart
59
In’asen :
— T am acahut d ajlal n tmusni, kkes ajlal iwakken ad-d-dher
temsirt yellan ddaw as, acku...
Yusef-u-Qasi
Autour de
Yousef-ou-Kaci
Yusef-u-Qasi
62
Yousef-ou-Kaci
63
Yusef-u-Qasi
62
Yousef-ou-Kaci
63
Irna ilaq bnadem ad inadi ansi sen d-ekka i Lejdud nney lihala
nni, iw akken ass nniden attennejbar m a yella w ayen ideg txus ; ulac
atan war asafar. Ihi di teswiât nni lehkwem d lerzaq t-tyerm a llan di
tem dinin d luda isseg d-irwet wugar 1-Leqbayel di îfayet zdat
yenbazen iberraniyen yeswayen tam urt nney achal d abrid. Asmi
ttuhersen lejdud nney s-adrar, ideg yugar Ixelq rrezq, ideg ddula
ulac akw, uyalen tmimbwaten bbw agarasen, arm i tazm ert nnsen
akw truh deg-wmihfer n gmas y er gmas.
Imi leqraya ulac (bexlaf leqraya d-ikkan si berra) iw âar i-wemdan
bbwassen, i tebyu tili tm usni-s, ad isuk tit is akin i-wayen illan
zdates kan, ad izzger asekkud is si tm eqlac n teqbilin y e r tm usni
tahraw ant, tin izduklen T am azy a m erra ney aad talsa yakw.
W alakin y as akken llan im ukan ideg issuref Yusef-u-Qasi leqmid n
teqbilin, issegmed armi d ayen i tent izduklen ney ayen yaanan ilsan
anda ma llan. D inna deg-gwid nessen ur t-icbi hed.
Di tehrayt di lweqt ideg idder Yusef ur izm ir ara a-d-yawi kra
bbwebrid nniden, m ulac ula d ahesses ur as thessisen ara. M aca
y a s akken atas n tyaw siw in i-gellan di tm edyazt is s-wazal nnsent d
am eqqran, t-tim eyri i-yat zik t-ti.meyri i-yat tura.
64
une inform ation aussi précise1. Il est probable cependant que Yousef
est venu plus tard, car il cite dans ses vers comm e déjà intégrés aux
Ait Yenni les trois villages qui ne s’y sont adjoints qu’après les
hostilités ; pas beaucoup plus tard cependant, car le souvenir des
exploits passés est encore très vivace dans ses vers. En réalité, les
com bats n’ont pas cessé brusquem ent à la fin des hostilités ; il a dû y
avoir encore sporadiquem ent des engagem ents, dont Yousef a pu
être le tém oin et q u ’il relate dans ses vers.
D ’un autre côté, H anoteau, citant quelques vers de lui, le situe à la
fin du x v m e siècle, naturellem ent sur les indications plus ou moins
fidèles de ses inform ateurs2. La m arge d ’indécision est donc de plus
d’un siècle.
M ais d’autres indices perm ettent de résorber en partie l’écart.
Ainsi le poète a eu à faire p ar deux fois au caïd Ben Ali de la célèbre
famille djouad des O ukaci. D ans la généalogie des Ait Kaci dressée
par R in n 3, on trouve trois personnages de ce nom. Le plus récent
(Ben Ali III), chef des contingents kabyles qui se sont opposés aux
troupes françaises en 1856, est évidem ment à exclure. Restent son
arrière grand-père (Ben Ali II) et le grand-oncle de ce dernier (Ben
Ali I). L’ordre de filiation s’est fait selon le schém a suivant :
K aci-ou-H enda
A h m e c f^ ^ ^ Ben Ali II
65
Si l’on pose que le chef de la résistance de 1856 n ’a pu jouer ce
rôle que si déjà à cette époque il était adulte, il faut situer sa
naissance vers le début du siècle. Si l’on prend com m e mesure
moyenne trois générations en un siècle, le second Ben Ali serait né
vers le début du x v m e et le prem ier vers le milieu du x v n e siècle.
A utres contem porains de Y ousef : les deux m arabouts de T aourirt
M imoun cités dans ses vers, Sidi R abia et A hm ed-ou-Elm ouhoub,
tous les deux descendants à la deuxième génération du fondateur de
la lignée, Sidi A li-ou-Yahia. O r on sait p ar ailleurs q u ’E lm ouhoub a
été l’instigateur de la construction de la mosquée de T aourirt
M imoun par des artisans d’Alger vers 1630. Son fils Ahmed,
contem porain de Yousef, avait une certaine notoriété au m om ent ou
le poète en parle ; c’est donc déjà un adulte.
Enfin, sur un autre contem porain de Yousef, nous avons une date
précise. M ouh A it M essaoud, en effet, a représenté les A it Yenni à la
réunion des notables qui a consacré l’exhérédation des femmes le 21
décembre 17484. D ans une société volontiers gérontocratique
comme était la société kabyle, il faut supposer que M ouh était au
moins quinquagénaire. Il serait donc né à la fin du x v n e siècle. Or, il
appelle Yousef dadda, ce qui laisse entendre que celui-ci était plus
âgé que lui. On peut donc présum er que le poète est né aux environs
de 1680.
4. a P arm i les gens des Beni Y enni, on rem a rq u a it le ch érif, l’h o n o ra b le Sidi
M oham m ed A m ezian e, et les ak al de so n village, sa v o ir : M o h a m m e d ben J a b e r, El
H ocine ben M a m m a r, M oham m ed ben M essaoud... » ( H a n o t e a u et L e t o u r n e u x ,
op. cit., t. III, actes divers.)
66
Toute leur histoire et leurs particularités viennent de cette
situation à la frontière de deux mondes : d’un côté la m ontagne des
tribus pauvres, belliqueuses et libres qui se battent à pied, vivent
d’orge, de glands, de fruits, d ’huile ; de l’autre la plaine à blé et aux
troupeaux des A m raoua, relativem ent riche, sur qui le pouvoir du
dey d ’Alger exerce une autorité épisodique par l’interm édiaire de la
famille des djouad O ukaci, capables d ’aligner des cavaliers relative
ment nombreux.
Les deux m ondes s’opposent avec des fortunes diverses, les Turcs
à l’aide de leurs fourriers, djouad et m arabouts, tentant de pénétrer
ou briser la m ontagne, les tribus défendant farouchem ent, souvent
au prix du dénuem ent, voire de la famine, une liberté démunie mais
réelle.
La situation n ’a pas que des désavantages. Sur le plan écono
m ique, leur rôle de zone interm édiaire fait la prospérité de leur
marché du lundi (Letniyen A t Jennad), où en particulier les
m ontagnards viennent échanger leur huile contre le blé de la plaine.
Sur le plan politique, les Ait Jennad sont les défenseurs de
l’indépendance tribale contre les menées du pouvoir central : ils sont
aux prem ières loges de la lutte, ils sont la ligne avancée du front de
la liberté, ce qui ne va pas toujours sans dom m age mais les pare
d’un prestige certain.
D ans la pratique, les O ukaci usent de la force quand ils le
peuvent ; ils ont une cavalerie ; les autorités turques les fournissent
de fusils « algériens » qui sont de bonne qualité, de m unitions,
probablem ent aussi d’argent pour payer d ’éventuelles collabora
tions. Le reste du tem ps, ils com posent avec les irrédents. Ils usent
de leur contrôle de la plaine, où en période norm ale les m ontagnards
descendent cultiver des céréales, en particulier du blé, et que l’on
peut toujours leur interdire au risque de les affamer. Un m oyen au
moins aussi efficace, c’est le jeu sur la partition binaire de la société
kabyle, les O ukaci appuyant l’un des deux sofs contre l’autre.
Par ailleurs, leur position interm édiaire oblige les A it Jennad à
avoir une politique « internationale ». Ils traitent d’un côté avec
l’État turc p ar Ait K aci interposés ; de l’autre, et sur un pied
d’égalité, avec les tribus irrédentes : A it O uaghlis, Ait Yenni,
Tikobaïn. P our tous les événements m arquants de la vie du groupe,
et tout particulièrem ent dans ses rapports avec l’extérieur, le
représentant désigné est Yousef-ou-Kaci, à la fois aède, poète,
am bassadeur et hom me politique, en un m ot am ousnaw .
67
A. Akw d A î Qasi
1. Agraw iderwicen
68
A. A vec les Ait Kaci
69
— I-W terkwi d gmat-wen ?
— Ulac A terkw ’ i-y-inigen. A syar uâwij ctiq it.
— A nnger ggemmat-wen, ad-d-awed tyerza ugilban (acku
agilban xeddm en-t A t Jennad deg-w zayar, #aam m iden asen
yem nayen At Q asi a-d-subben seg-gwedrar a-t zraan din).
Iruh lqayed ar Uterkwi di L ej^ayer inna yas :
— At Jennad aâsan iyi. Ugin annaaddi di tm urt nnsen.
Inna yas Uterkwi :
— A ta rras 1-Le??ayer, awi-t. Win y ugin ad ixdem neyt-ej,
awit-ed aqerru yis, mkul aqerru a-wen-fkey xemsin. (X em sin n
teryalin ney n duru, assen atas).
Tebbwd-ed tyerza ugilban. Subben ifellahen ar u zay ar. A t Qasi
âussen ten id. G-giwet teswiât im nayen uççayen nneylen-d ff A t
Jennad, kul am nay itubâ it wuççay, u leslah nnsen d leslah
1-Le£fayer d lâalit. Afellah d-mlalen truqqin degs, im iren ad-d
rsen seg-gwâudiw a-s kksen aqerru, arm i bbwin xem sa u rebâin
iqerra deg-giwen was. Twehcen A t Jennad.
Iâadda wayen iâaddan. Nnan as At Jennad : — A-d nerr ttar.
U rgan armi d ass 1-legmaa, tebra-d taklit A t Q asi i-w qdar, tebbwi-t
ad yeks deg-Gweglagal. At Jennad berrzen-d, nehren aqdar,
ssawden-t armi d Umayen, zlan k ra din. A r Jberrihen : — Y yaw ay
A t Jennad attaw im aksum . Im ir im egran t-tferyin rhan ten
deg-gwedrar A t Qdiâ. A r J;}awin iqecwalen bbweksum.
Lexbar ibbwed y e r Legmaa, anda yella lqayed A t Qasi. N nan
as : — Aqdar bbwin-t At Jennad.
Inna yas : — U m baad ?
N nan as : — Ala tistan tileqqaqin, imi thejibent akw t-tyugwin,
i-d yeqqimen.
Inna yas : — M acci d X ufac ay bbwin. (X ufac d yiwen si Tgersift,
sersen aqerru yis a f ikufan). D iâajm iyen kan ay bbwin. A nef iy-At
Jennad iârar ad llxelxen aksum . Inâal akka d w akka nnsen m a d
wig’i d im danen. Yak d iâarrum en ay bbwin. A zekka d ssebt, ad
ruhey ar ssebt A am raw a ad-d awiy m eyya.
Teqqim ddaaw ’ akken.
70
cavaliers m akhzen, chacun suivi de son lévrier, surgirent. Ils tira ien t
sur to u s ceux qui se présentaient sur leur chemin, puis d e s c e n d a i e n t
de cheval pour couper les têtes : ils en réunirent q uarante ce jour-là*
Les Ait Jennad ulcérés cherchaient l’occasion de se venger. Un
vendredi, une bergère noire des Ait K aci ayant fait sortir son
troupeau, ils razzièrent toutes les bêtes, les égorgèrent et appelèrent
la tribu au partage de la viande. La nouvelle en parvint au caïd, Qul
se répandit en injures, mais préféra en rester là 9.
71
— I-W terkwi d gmat-wen ?
— Ulac A terkw ’ i-y-inigen. A syar uâwij ctiq it.
— A nnger ggemmat-wen, ad-d-awed tyerza ugilban (acku
agilban xeddm en-t A t Jennad deg-w zayar, ftaam m iden asen
yem nayen At Q asi a-d-subben seg-gwedrar a-t zraan din).
Iruh lqayed ar Uterkwi di L ej?ayer inna yas :
— At Jennad aâsan iyi. Ugin annaaddi di tm urt nnsen.
Inna yas U terkw i :
— A ta rras 1-Lezyayer, awi-t. W in yugin ad ixdem neyt-e}:,
awit-ed aqerru yis, mkul aqerru a-wen-fkey xemsin. (X em sin n
teryalin ney n duru, assen atas).
Tebbwd-ed tyerza ugilban. Subben ifellahen a r u zay ar. A t Qasi
âussen ten id. G-giwet teswiât im nayen uççayen nneylen-d ff At
Jennad, kul am nay itubâ it wuççay, u leslah nnsen d leslah
l-L e^jayer d lâalit. Afellah d-mlalen truqqin degs, imiren ad-d
rsen seg-gwâudiw a-s kksen aqerru, armi bbwin xem sa u rebâin
iqerra deg-giwen was. Twehcen At Jennad.
Iâadda wayen iâaddan. Nnan as A t Jennad : — A-d nerr ttar.
Urgan armi d ass 1-legmaa, tebra-d taklit A t Q asi i-wqdar, tebbwi-t
ad yeks deg-Gweglagal. At Jennad berrzen-d, nehren aqdar,
ssawden-t armi d Ilm ayen, zlan kra din. A r fberrihen : — Y yaw ay
A t Jennad attaw im aksum . Im ir imegran t-tferyin rhan ten
deg-gwedrar A t Qdiâ. A r #aw in iqecwalen bbweksum.
Lexbar ibbwed y e r Legmaa, anda yella lqayed A t Q asi. N nan
as : — A qdar bbwin-t At Jennad.
Inna yas : — U m baad ?
N nan as : — A la tistan tileqqaqin, imi thejibent akw t-tyugwin,
i-d yeqqimen.
Inna yas : — M acci d Xufac ay bbwin. (X ufac d yiwen si Tgersift,
sersen aqerru yis a f ikufan). D iâajm iyen kan ay bbwin. A nef iy-At
Jennad iârar ad llxelxen aksum . Inâal akka d w akka nnsen m a d
wig’i d im danen. Yak d iâarrum en ay bbwin. A zekka d ssebt, ad
ruhey ar ssebt A am raw a ad-d awiy m eyya.
Teqqim ddaaw ’ akken.
70
cavaliers m akhzen, chacun suivi de son lévrier, surgirent. Ils tiraient
sur tous ceux qui se présentaient sur leur chem in, puis descendaient
de cheval pour couper les têtes : iis en réunirent quarante ce jour-la.
Les Ait Jennad ulcérés cherchaient l’occasion de se venger. Un
vendredi, une bergère noire des Ait K aci ayant fait sortir son
troupeau, ils razzièrent toutes les bêtes, les égorgèrent et appelèrent
la tribu au partage de la viande. La nouvelle en parvint au caïd, qui
se répandit en injures, m ais préféra en rester là9.
71
2. U siy-d rekbey a f ttmaa
Yusa-d useggwas 1-laz, ajrad yuy tam urt. At Qasi yursen igran,
truhun-d yursen imegguga. N nan as yibbwas At Jennad i Yusef :
— Ruh ar leflani n At Qasi d sseltan, a-k-d yeflc tasaat ggirden
atterrtihed, kecc d am eddah n nnbi, ur-k id itta rr’ara.
Iruh Yusef :
— A c’i-k id icqan akka, a dda Y usef?
Inna yas : — A leflani, ruhey-d ad ii tefked tasaat ggirden, tezrid
At Jennad ifuk iten ujrad, lluzen ;
Inna yas : — A-wen irnu Rebbi. Ur iqqid ara wefwad iw f-febrid d
ii teqdaam ar Tem gut. Ad ak fkey tasaat ? Welleh alam m a tectaqed
taqnuct !
— A hya leflani, kecc d sseltan : tiserfin, imegguga, aklan,
taklatin.
Ihi fkan as-d ayrum , tazart, imi Jiteymumuden ibawen.
Inna yas : — Therm iyi takurt nn’ ara ssum tey m a cciy-f.
— A c’ara k issiwden ar At Jennad, kecc hafi ?
Inna yas : — Mi-d usiy rekbey af ttm aa ; tu ra m ’ara-y uyaley
ad rekbey af uybel.
N nan as : — Ruh ad ig Rebbi ur ak nâiwed a ra tizri.
Iruh, iâadda A glagal. ibbwi lgiha n zelmed, arm i yebbwed ar
yiwen um kan qqaren as A im a G gem nayen ? Yaf-en din yiwet txunit
qqaren as Taw diât, rb aa tyugwin, rb aa ixem m asen.
— A dda Yusef, ac’ i-k id yecqan ?
Inna yas : — Ruhey ar leflani n A t Q asi, delbey degs tasaat
ggirden, yerra yi lebher d aqerqar, inna yi : xati.
Tenna yas : — D nek ara-k-yefken tasaat, irn’ard atîensed.
Zlan as ikerri, ccan, swan, ixem masen, arraw is, tislatin. Azekka
nni fkan as-d sin iserdyan, yiwen irkeb fellas, wayed iâabba ta sa a t10.
72
2. Fam ine
73
3. Kkret attewtem
K k r e t attew tem
A y A t Jennad ur n a a rif
Begset u l’anda tefrem
77i f M u h en d A zw a w lyir
K r ’akka yed d er iffuseggem
T lif m a nkesb it axir.
4. Igwra-d Berfaer
A b iz a r uyalen d Iflisen
A t Y aader d Izerxfaw en
Igw ra-d Berber d M ira
A d wtey agejdur yessen.
74
3. L evez-vous el frappez
L evez-vous et fra p p ez
Inconscients A it Jennad
A rm ez-vo u s car où trouverez-vous refuge
M ieu x vaut M ohand A zo u a o u que d ’autres
T ant q u ’il vit q u ’il est dans la voie droite
I l vaut m ieux l ’avoir com m e allié.
4. Il m e reste Berber
Il dit aussi :
12. iflissen 1-lebhar : trib u voisine des A it Je n n a d , à l’ouest de leur te rrito ire , sur
le litto ra l d e la M éd iterran ée.
75
5. Tabzert
A B en A a li hader im anik
N n a n -i ssyadi yehrem .
76
5. Im pôts
77
sen ihedder i-y A t Jennad armi yuy al ibbwi yasen-d asefru ixetm it
akka :
78
provoqua une assemblée des Ait Jennad, à laquelle il se présenta la
tête ceinte d ’une corde en guise de turban, en signe de deuil. Puis il
fit à l’assem blée une harangue qui se term inait ainsi :
7. D e peu je ne me soucie
9. Bu tu eg za
80
B. A vec les Ait Jennad
8. D ilem m e
9. A u m anteau bleu
19. A b iz a r : p rin cip al village des A it Je n n ad , à l’ex trém ité ouest de la tribu.
81
Izzi-d imenyi nniden. Yuyal bu uzegza. Innuy di lebraz. W ten-t
id, nyan-t.
82
La fois suivante, le bleu-vêtu partit, com battit en des endroits où il
était très en vue... Ce fut aussi son dernier co m b at20.
22. C es deux p erso n n ag es sont inconnus p a r ailleurs. Une fra c tio n des Izarazen
(A it Je n n ad ) p o rte le nom d e A it Si Saïd.
23. Salem A it M aam m er d isa n t ces vers les faisait lui-m êm e suivre de cette
citatio n de V oltaire p o u r souligner l’identité de l’in sp iratio n : « C e tem ps ne se
retro u v era plus où un duc de La R o ch efo u cau ld , l’a u te u r d es M a xim es, au so rtir
de la c o n v ersa tio n d ’un P ascal ou d ’un A rn a u d , allait au th é â tre de C o rn eille »
(E ssa i su r les m œ u r s, ch a p . 32).
83
C. Akw t-teqbilin
11. A kw d A t W aylis
84
C. A vec les tribus
85
— Awladi, ma ulac uyilif, a wen-d awiy kra.
Nnan as : — D ya d ayen iyef netnad’ ay am yar.
Ar-d ttawden lyaci yiwen yiwen armi teccur tejm aâit, Yusef
mazal la yekkat. Baqi la t.temcukkuten degs medden, wa yeqqar
as : d Ajennad, wa yeqqar as : ala. Armi-d inteq um edyaz inna yas :
1 A s m i terbeh ddunit
ar wanida k-ihw a ddu
D i Letnayen n A t Jennad
dinna ay-d ibda laadu
A weylis si zik d ahm r
m acci d yiw en ad as y e h k u
86
1 A ux jo u rs heureux d ’antan
O n p o u v a it aller où bon sem blait
Puis au m arché des A it Jennad
O nt com m encé les troubles
L es A it O uaghlis sont de toujours nobles hom m es
A qui le dire qui déjà ne le sache
27. A k fad o u : col d e la p artie o rien tale du D ju rd ju ra sur le chem in qui m ène des
A it Je n n a d aux A it O u ag h lis.
87
12. A kw d A t W agennun
Ssalam u aalikum
a ssyadi ssam âin
Taddart m i m echur y isem
a y A t Q ubâin
N u sa -d ansehhi ttiâd
annettixxer i txeddiâin
A nn essew w ’illan y e ffu d
ifellahen a-tzerriâin
A lb a a d deg-gwalbaad isud
R eb b i yeggew w iz tiswiâîn
M aday tugim
anhell R e b b ’ ad ay iâin.
13. A kw d Y eflisen
A tn a begsen-d Iflisen
s A b iza r a d nnayen
S a lu t à vous
hom m es qui m ’écoutez
Village réputé
de Tikobaïn31
3 1. T ik o b a ïn : v oir note 11. C es vers sem blent indiquer que les deux p arties ont
choisi T ik o b a ïn co m m e tiers p our régler leur différend.
89
D . Akw d Izwawen
14. A zw aw G gezw aw en
I f f i r ad m m te'i d A zw a w
w a l’ad â ic e j d H lim a.
90
D. A vec les A zouaou
91
15. Am tnina di zzerzur
A lehm am ar k nceyyaa
neqqel deg-gifeg ik aajel
33. Yiwen deg-G ezw aw en ism is H m ed ; seg-gw akken a n d a tella tecn aay t
a-t-id yaw i q q arcn as : H m ed bu ccn ay a a.
92
15. Epervier parmi les étourneaux
M o h a n d des A zo u a o u
D igne fils de son père A m a r
E st avare de paroles
Les décisions il les p ren d à part lui
Epervier p a rm i des étourneaux
A in s i est-il ou p is encore.
93
E. Akw d At Yanni
A a m e r u M hem m ed a Ixetyar
a ssbaa di tezg ' um eyrus
A tm a te n is bhal ttyar
ass n ttrad hed ur ixus
A t Yanni sm edn as leqmar
a yt rray deg-giwen ufus.
Imi tebda tad d art y e f sin, kul lâarc ikkr-ed ad-d inhel
yef-fidenn-is, ulam m a qbel ayenni ur m saadaw en ara. Ikker ttrad
anda ur ilaq. Q qaren d Yusef i-d yebbwin assen :
35. Ney : A l Y a n n i y a k w d A t W a s if
36. N ey : T errez nn esba d i Hnasif.
94
E. A vec les Ait Yenni
17. Partisan
Excellent A m e u r A it M h em m ed
L ion dans une fo r ê t de jeu n es p la n ts
Tes frères com m e des oiseaux de proie
L e jo u r du com bat sont tous là
Les A it Yenni t ’ont p rêté m ain-forte
En gens à décisions unanimes.
95
19. G edha s Ibarud lexzin
37. NeY :
A Ibarud a bu u m eq ya s
a w in issfalen i tizz a
96
19. G loire à la vieille poudre
G loire à la vieille p o u d re
M on recours au jo u r critique
97
D A y a n n iw akw d U w asif
i-t im zayaden s leyla
L uka n am-M erbah m eskin
(ili t-icca d lâula.
M m is n taggalt aras
ur itfagw ad tirsasin
Ur ikka t ur ifwexxir
ur itfadded di tyaltin
21. N e y ijeylaf
W eyya k a rrsas
taw id abrid aardi
N ey ijeyla f
widen ifnusun ger wulli
98
Un Yenni et un O u a sif
Enchérissant l ’un sur l ’autre se la disputaient
Quant l'Arhah le pauvre
Il l ’aurait mangée com m e farine.
99
22. A ss n ftlata
W in ur n-hdir
A s s n Hlata tam eddit m i-d ccuddu
100
22. Mardi
Après quatre ans de guerre indécise, les Ait Yenni, pour en finir,
décident d ’attaquer un m ardi. Ils sont repoussés.
101
23. A ss l-lexmis
102
23. Jeudi
103
v.23 Tlatin hesbey kam la46
ssarden sem m dit
A y geylin deg ttw ila47
y e f teqbaylit
K ra b b w iy e tte fh e d l-îyila
icca ten ttrad m sakit
Cwit seg ifra ttrad iruh Yusef ad iwet di tad d art At A abbas deg
A t W asif. Yufa-n izw ar it yiwen um edyaz ism is Belqasem. Ibda la
ikkat, jm aan as sebâa fjaabgat n zzit, arm ’ ata yiwen ifly-ed seg-
gwexxam is, isteqsa wi la ikkaten, nnan as : d leflani. Inna yas : D
ac’i-t-id ibbwin yurney ? N e # a d ahbib A t Y anni. Yak d nefj’i d as
innan :
104
v .23 Ils étaient trènte en tout
Lavés et refroidis
C om bien de longs fu s ils sont tom bés
P our l ’honneur kabyle
L ’instant critique les a saisis
L a guerre les a dévorés pauvres d ’eux
W in u r neh d ir
/ I s s l-lexm is ta m ed d it m i tem b w etta j
105
A belleh ar-k azeny a ttir
ssbeh zik huzz afriwen
Tlata tuddar nni
u ryessen t aadley yiw en
Ihi :
N e k d A t Y a n n ig ren t tesyar
nitni inu nek baney nnsen
N e k ur lliy d aheqqar
nitni ssnen ay-d ffaken
A t uqerm ud akw inu
at lesduh n Belqasem .
106
Par D ieu oiseau sois m on messager
E t de grand m atin bats des ailes
Vers les trois villages50
A q u o i j e ne trouve p o in t d'égal
M ais :
50. A v an t le co n flit, les A it Yenni étaien t effectivem ent com posés de trois
villages : T a o u rirt M im o u n , Ait L a rb a a , A it L ahcen.
51. Ces vers su p p o sen t q u’à l’ép o q u e les m aisons des A it A b b a s étaien t à
terrasses. Elles so n t a u jo u rd ’hui à tuiles, m ais il reste encore d a n s les villages de la
région les plu s p ro ch es d e la m on tag n e b eau co u p de m aiso n s à terrasse s.
107
1.1 B ism illeh annebdu lhasun
a ihadeq fhessis
K k a te y Imaani s rrzun
ssakw ayey Igis
M a d zza a y m nni ten ifraggun
issen deg-gul is
108
i.l A insi j e m 'en vais préluder p ar D ieu
Q ue l ’avisé m ’écoute
Je com pose les apologues avec art
J'éveille le p euple
M o i le p reux qui place m es espoirs
E t m a confiance en lui
109
VI. 31 L em m er d imsaafen berka ddwas
rray a-t-sewwben
i.'..i
L am a a n 'A lb a a d d laadda s
m ti-t-helled ard ibbwaaben56
vm.41 D h u -d d îmersul
belleh a ttir ma d w ’ifsusen
A brid ik m ellul
ers Iwad zger iftisen
Sellem aala S tem b u l
A t Y a n n i lem bat yursen
59. N ey : L leh la iy e b b n -e k a n s a s
110
vi.31 S ’ils avaient été p lu s accom m odants à quoi bon les
[querelles
Ils auraient suivi la voie de la raison
U
M ais tels sont quelques-uns que
Plus on les supplie et p lu s ils regim bent58
v m .4 1 Porte m on message
P our D ieu oiseau sois léger
B lanche est ta route
D escends dans la rivière traverse la vallée
E t p o rte m on salut à Istanbul
A u x A it Yenni ton gîte p o u r la nuit
58. P a r ces vers, le poète sem ble av o ir épousé ce qui est m anifestem ent
l’idéologie d u p o u v o ir (celui des deys d ’A lger), p o u r qui les trib u s k ab y les irrédentes
étaien t su rto u t un g ro u p e de récalcitra n ts.
111
Ur âadiley fe fh u l
d w id illan d afrasen.
Ibbwed Yusef yer At Yanni, ikcem tad d art n Tew rirt m-M im un,
iluâa ten akka :
112
Je ne m ettrai ja m a is sur le m êm e p ie d les preux
E t la lie des hommes.
113
dart nnan as : — La-k iqqar leflani d leflani d leflani n at leflani m’
ad-d rrem zzit ? Bdan A t A abbas la-d teffyen. A r ffarran akka d
w akka ; sani rran ad w alin tak u rt bbw abbu usebsi la teftafeg deg
genni (assen ulac girru, d asebsi kan i-gellan). Irr-ed lam in inna ya-
sen-d : — Int asen i leflani d leflani d leflani n at leflani, assa imensi
nnwen yuri, ruht-ed a-n-tawin zzit.
1 14
25. Après
u .7 Tribu émérite
P ar sa f o i sa p iété
Q uand ils ont p ris les armes p o u r le com bat
Ils sèm ent l ’effroi p a rm i leurs ennem is
L a victoire s ’ojfre et ils la saisissent
Car ils ont la fa v e u r divine
64. L ’a rtisa n a t (en p articu lie r l’arm u rerie, la bijouterie et la forge) é ta it très
dévelo p p é ch ez les A it Y enni et p articu liè rem en t d a n s ces deux villages.
115
L em bal Taw rirt-m -M im un
akm in fellasen i-gaaqqed
S e lle m -iy eflq u b b a l-lemdun
fellasen i-glaq anmegged
116
G îter la nuit d Taourirl M im oun
É tai de l ’honneur
Porte m on salut d la m étropole des villes
D ont il fa u t pleurer les épreuves
En cet endroit, quelqu’un fit rem arquer à Yousef qu’il n ’avait pas
fait mention des gens de T aourit-el-H adjadj, qui se trouvaient
m aintenant parm i les assistants. Le poète fit une fois le to u r de la
natte sur laquelle il évoluait et, ad o p tan t un autre systèm e de rimes,
enchaîna :
67. Les recueils de tra d itio n s du P ro p h è te o n t fini par don n er lieu à une véritable
science.
70. L ettre de l’alp h a b e t ara b e qui co rre sp o n d à / , ici p u rem en t sym bolique.
117
VIII .43 Tawrirt l-Lheggag mechur
y is m is di teqbal kaffa
S e lle m -iff a t wagus yeccu r
ur fhezziben i Ixufa
W ahed leklam d in y e q q u r
ay din y as tidef d ssfa69
118
v in .43 D e Taourirt-el-Hadjadj le nom est célèbre
E st la sainte K aaba
Salu t aux hom m es bien armés
Q ui ignorent les hésitations la peur
D o n t les décisions sont inébranlables
E t qui sont toute vérité et toute fra n ch ise
74. Sehhel : deg w nam ek anesli, ruh seg g w ed rar s a z a y a r (y e r ssah el) ; dagi d
win i glaqen, ack u ilaq as i ttir ad-d isub si ty a ltin A t Je n n a d s asif.
75. N ey : m a d a h b ib y e r B u Yesser.
y bu : u r d-iqqim a ra u m yag-a a m m a r ad y il t- ta ly a tis sn a t n jb u ?).
76. « J j e r », isseg d ik k a « su te r » d « m m ter », = d leb ; ixulef « t.ter « (s
« r » ufay) = jq irrew .
78. Iqder xussen sin ify ar ger 2 0 d 21.
120
26. Longtemps après
121
— y er A t Y a n n ’ aazm ey i sjfer
uyey abrid nefyaw al
A n h e llR e b b ’ ad ay yesser
yur yehbiben d nemyaacar
79. T afuli : seg gw em yag « fel » (s tefran sist : d éb o rd er, env ah ir).
80. A m ey d u s -, a ru m i, im i ten y ettse n zik deg gw am an iw akken a ten seb y en
belli tfekkin di dd in n S idna A isa (s tefransist : bap tiser).
122
j ’ai dessein de m e rendre chez les A i t Yenni
S u r la route j e presse le p as
Je prie D ieu q u 'il m e garde la fa v e u r
D e m es am is fam iliers
123
Lew qam din ay ge((ili
ayl Ixiryu g a r atas
81. Sin y efy ar agi (5 9 d 60) ad yil rn an , ack u tjem cab in d 43-44,
ta s e d d a rt degs 8 y efy ar, m acci 6 kan am -m im esdisen nniden.
Pourvus de droiture
Et de biens à profusion
125
F. Isefra nniden
M âam m er
1 N n a n -i ya a b a Y u s e f 1
ssn ey-t-d ssid n Ssehra
M aday gella d lâaref
a nnem m ïksab i tussra
M a ïkecm it leghel y e x r e f
annem cettab iqerra
Yusef
7 A ngabik ar bu Imedmer
d bu leqsad n zzit
Izz an am gud iketter
ayla-s irefd it
Y u s e f issed lem dam er
ar-t ifâanad bu tkufit
M i-d iddem ssegs terrewrew
ur degs izid n tallit*3
M âam m er
15 A s i f m B ubhir iwâar
winna ur izegger uterras
126
F. Autres pièces
M am m ar
1 On m ’a d it Y o u s e f hors pair
E l j e le sais lion des sables
S ’il est sage
N o u s nous épargnerons
M ais si une fo lle dém esure l’habite
N o u s nous arracherons les cheveux
Yousef
M am m ar
15 R u d e est le B oubhirM
Q ue nul ne traverse à pied
84. B oubhir : affluent gau ch e du S ebaou, q u ’il rejoint un peu après F réh a. O n y
trouve un m a ra b o u t renom m é.
127
M cubâad d lâud im cem m er
m i-t iw et iqelb as lehlas
A ssa tegr as-d lâinser
isseg d-}}agwment tullas
Yusef
21 N e k am Iwad Lherrac
m aalum m ’aa-d ifkerkir
M i-d ihm el iddem akw legyac
kra bbw in t-iâaden laxir
Tegr as-d iyzer Ixecxac
iffurqad ifâinsir
M âam m er
33 C udden-t m ekrus
d im dehheb izuzar
N a yt Ikabus
b e x la f im dehheb n teytar
I-s-d iffyen di W ad D hus
afus deg-wfus
Iterkw iyen zdan-d adar
D ad d a k d A terkw i Igamus
ixerz // ssahel adrar
Tura tegr as-d bu ttnus
iby ’ ad y ides yem ya g a r
128
I l n ’est pas ju sq u 'a u cheval sellé
Q u ’il n ’abatte et ne desselle
E t voilà q u ’on lui oppose la source
O ù viennent puiser les jeu n es filles
Yousef
M am m ar
85. E l-H a rra c h : petit fleuve qui se je tte d a n s la m er une q u in zain e de kilom ètres
à l’est d ’A lger.
86. L’éten d ard levé est un des thèm es classiq u es de la poésie héroïque.
87. O ued D h o u s : n o m que prend l’oued Sahel su r le territo ire des A it Y aala.
129
44 C clayem b b w eyd ’atarus
m i gger im i brant tinzar
Tam da um alus
ku l ayrus hat d in yu g a r
T ugw ed a rrehba ukerrucss
teqqim ed a tin ujenjar
Yusef
68 A zg e r acerq’ u ry a a n a d
m 'a d ak iqren91
Itfa k tayet i laatab
deg zayaren
D eg s [...]
tegr as-d ahguz ansab
ikessen deg geqdaren
Yousef
50 Q uand en février
Les nuages couvrent le ciel
Prenez garde elles languiront après le soleil
Les eaux des m ers profondes
El les tempêtes
s V déchaîneront
62 R u d e bédouin
D es m ontagnes
H abitué à com battre avec acharnem ent
P arm i les cam pem ents
M aintenant que les tem ps so n t changés
D es m outons t ’affrontent
90. Le co u sco u s de g lan d s de chêne était un p lat de d isette, les figues noires
passent p o u r être les m eilleures de to u tes.
131
75 A ttaleb yerban lektab
ifnadaren
Ifqeddim en yel Imehrab
deg gid meqqwren
Innum ijebbed leqlam
win itnudren
L a ifqam ar ukeffab
ccix i-t id isseyren.
M uh A t Lem saawd
A dadda Y u s e f ay ungal94
ay i x f l-lehl is
Tecbid ttaleb l-lersal
iyran d i Wedris
Ul iw fe lla k d amaalal
A w i k-isâan d ccix is.
92. Iqder ru h en as i teq sit-a k ra ggefyar (m d. afir 72), a c k u g w ran-d sin nniden ur
iban san d a m a n deg-gw ayen d-iqqim en :
N e k d afsih d A je n n a d
s y u r R e b b ' i-d u y e y isem
132
75 L e clerc qui tient sur ses genoux le livre
E t y porte les y e u x
Q ui se rend à la m osquée p o u r la prière
D e l ’aube encore ténébreuse
E t sans cesse m anie la p lu m e
E st ceint de lumière
E t voilà que l'élève se lève p o u r affronter
L e maître qui l'a enseigné.
M ouh
96. T itre que l’on d o n n e aux frères aînés et, p a r extension, aux hom m es plus âgés
que soi.
97. O u d ris : célèb re z a o u ia fondée sur le territo ire des Illoulen O u m alo u (village
Ait A li-o u -M o h am m ed ) p a r Si M o ham m ed O udris.
133
Irra yas
Yusef
A m -m in isennden s-uffal
d win ay d letkal is
N e f afsih deg Imitai
ur nessefruy seg g ix f is95.
134
A quoi Y o u s e f répondit
Yousef
135
29. A d yefk zzin igrawen
1 A y ix f iw a bu fferyis
W iyya k a lhabel stehfed
A d y e fk d-zzin d aqusis
wi y e f iwgeb atlehned
Testehzam qbel ur teqris
a k ra y e lla n d amrabed
1 Im la l ssini d ufdis
w ’ idm aan Ifayda fa y e d
A y agellid ur nettis
!frey-k a Lleh taalm ed
K u lh a tfekd as Iheq is
ur itfay hed ccayed.
136
Les cinq pièces qui suivent sont attribuées à Yousef.
1 A Ibaad am m um essendu
deg gir wal i getwella99
A d ak issefrah laadu
a sen issebdad Im edlaa100
D i ddunit ur k-ifeddu
di laxert ur k-iccafaa
138
31. N o s am is s’envoleront
139
13 Yir Igar m i-k iffaadu
iberra ssegs axxi ccraa
D leb di R e b b ’ a-t ihdu
ney ja n e b segs n ih qlaa
A m m em kan A k e ffa d u
degs izem degs aqettaa.
1 Urarey ssbeh
nwiy ulac tam eddit
N ezh a nmerreh
la nlaab deg tem yerrit
Sslaf n sseh
d sslaf y e fk a nnbi ngelz it
7 T yu rr iyi m m lerwayeh
tessa-d lemtareh
nek yiley ddunit teftim
Z iy e n win tetbaa tyed l it
tefyur w ’illan d aye c c im 102.
140
13 Un voisin m échant qui se dresse contre toi
L e droit m êm e l'abandonne
Prie D ieu q u ’il l ’amende
O u bien fu is va décam pe
C ar il est co m m e la fo r ê t d ’A k fa d o u 101
Brigands et fa u v e s s ’y côtoient.
Les Ait Yenni ayant fait un jo u r rem arquer à Y ousef que dans ses
vers il n ’était question que de ce m onde, contrairem ent à ceux de
Sidi M hem m ed-ou-Saadoun103, lequel, quand il allait faire ses
prières, voyait de visu le Prophète, Y ousef dit :
141
AaV u-Yusef
142
Ali-ou-Yousef
143
7 T e fk a y i d u m d rrateb
terna twennaa deg lebzar
A r tara d kecc ay teryeb
/xilek sem m d as leqtnar
A rgaz yellan d Imedheb
y i f ad irrez a d y a w i laarm .
144
7 Elle m ’a donné p o u r salaire un douro
M ’a servi cuisine aux épices choisies
Ses vœ ux vont encore à toi
D e grâce réponds-y
Car l'hom m e de noble race
Préfère le dédit à l ’opprobre106.
A zouaou des Izouaouen était trop vieux pour vaquer encore aux
travaux dans ses cham ps.
Quand vint l’époque des labours d’autom ne, ce fut sa femme,
surnom m ée T ouhricht (l’Avisée), qui, prenant son fils aîné en croupe
sur son mulet, descendit diriger les travaux des m étayers. Q uand elle
revint des cham ps, au milieu de la journée, elle trouva Ali-ou-Yousef
sur la place avec son m ari. Dès q u ’il la vit, Ali s’adressa à
A zouaou :
— A zouaou, puis-je dire ?
— Dis !, répondit Azouaou.
T ouhricht aussitôt arrêta son m ulet et Ali dit :
145
dem tessen it. Im yaren qqaren : ifsihen m ensubit yer law leyya. Ak-
ken-d dal Tuhrict, inteq Aali :
— A Azwaw, ad-d iniy ?
Inna yas : — Ini-d.
A R e b b iz y e z f as lâamer
T uhrict akw d warraw is
D zzw a g is ay d im hekker
d bab n ttabaa-y ukyis
Te[farew ta zd a yt {{mer
ttejra tettabâa azar is.
3 6 .1 y a t T aq q a
Jebbden zzn a d
teddun f y iwet ddefqa
D eg-gwas n ttrad
kra bbw in ten yaaw den yelqa.
146
Prolonge m on D ieu les jo u rs
D e ! A visée et de ses enfants
147
37. D ul iw ays d ccix iw
D ul iw ays d ccix iw
abrid iyer in h ’ ar-t ayey
D ul iw ays d afrag iw
abrid y e f i-ihud ttixrey.
1 N e k d lefsih ne[meggiz
ncekker legw ad ilaqen
W ’illan d Igid a-t nhib
ifâuddun ijferriqenn0
Ur ak âannuy aguliz
nek reggwley seg m ectaqen
148
37. Guide et mentor
M on cœ ur est m on guide
L a voie q u ’il m ’indique j e la suis
M o n cœ ur est m on m entor
L a voie q u ’il m ’interdit j e la fu is.
7 II t ’accueillera avec jo ie
En sa demeure ouverte à qui veut s'y rendre
Épargne-lui toute contrariété m on D ieu
P ar la grâce du Prophète ton envoyé.
1 P oète sagace
Je loue les nobles qui le m éritent
J ’aim e l ’hom m e bien né
Sagace et sensé
Je ne vais p o in t cherchant les pauvres hères
Je fu is les gueux
149
7 A d c e k k r e y S id iB a a ziz
Ixetyar deg Zerruqen
M aalum ed ay am nay u y y i z " 1
ugin lehbab a -kfarqen
A tm aten ik d ddheb ubriz
m aana d kecc i gm aacuqen.
150
Je louerai S id i Baaziz
L e m eilleur des Z e rro u k [U
Preux chevalier tu es notoire
Tes amis ja m a is ne sont repus de toi
Tes frères sont or fin
M ais c ’est toi que l ’on prise.
151
Muh A t Lemsaawd
1 A y i x f iw ignen yesraa
ur-k ziden iy u ra f
T idef yesgag i( tpnaa
tu ya l d rrefraf
M t' ara d ihder legmaa
tneggzed qaraa
k u lw a y u y a l d a allaf
152
Mouh A it Messaoud
153
B ettu deg tuddar yew qaa
y u za nnhas b e zza f
K ra itezzu kra iqellaa
ttuqten iâangaf
C cukten m edden lebdaa
kulw a d gm as im xa lla f
Sslaf y e jk a nnbi m k u l as
rray d aqissi
Ilia U yanniw d asalas
itegg ddrasi
I[ruz laadu deg gw am m as
hed m ’ a-t iâasi
Tura yenduder uyilas
Ihiba tekks as
tegr as arebbi tixsi
A â d a w ihba-t nnhas
iccidd’ ifessi
Ifn a y ttrad d amessas
L h ib a ulaci
S i un jo u r j ’avais le p o u vo ir
Je nouerais l'affaire
N o u s irions ju sq u 'a u x frontières de l'ennem i
Y installer des tranchées
A u m atin il nous y trouverait
N o u s l ’aborderions
I l tom berait sur un stratagèm e qu ’il n ’aurait p o in t prévu
Y ya w annexdem iherqan
a-d nerr ssw aybi
A la a ra f ifhessisen
(tennitt iyi
I tefsiht y u y e n akwsar
ihefd if H end-u-Ssaadi
G gw exxam is u r y u fi z z it
y ur m edden la icerred udi.
156
F oin de la p aix q u ’ils escom ptent
S i nous n ’entrons pas dans la mêlée
L ’accord est à ja m a is exclu.
158
troupeau et son fagot de bois, elle lui en firent la remarque. Il
répondit :
159
A mur wis sin
Zzman ggiyil
D eu xièm e partie
163
culier, on n’annexe pas de territoire. La plupart du tem ps, on se bat
pour le nif, pour l’honneur, c’est-à-dire quand un groupe estime que
la règle du jeu des rapports entre unités égales a été violée à ses
dépens. La somme d’intelligence et d ’énergie dépensée aux jeux
souvent subtils et apparem m ent vains des villages (qui ne sont pas
sans rappeler les rivalités des anciennes cités grecques) est certaine
ment sans com m une mesure avec les enjeux m atériels presque
toujours m odestes et le plus souvent inexistants. M ais le code des
valeurs était certainem ent très différent de celui des estim ations
mercantiles (par gain et perte chiffrés) des sociétés dites développées.
Chacune de ces entités m inuscules qu’étaient les cités anciennes se
considérait comm e un état souverain, en quelque sorte un absolu.
Les événements où elles étaient engagées peuvent paraître de
modeste envergure à l’aune d’une autre estim ation des enjeux ; pour
les intéressés, il n’en était rien. Et, à vrai dire, l’étalon de jugem ent
ici n’im porte guère. On peut sur un événem ent véniel engager tout un
destin et essayer à travers lui de répondre aux interrogations essen
tielles, les mêmes qu’en des civilisations plus prestigieuses des
hommes de plus vaste renom ont tenté de dénouer : où com m encent
les droits de l’individu, où finissent ceux du groupe ? Com m ent
résoudre les cas conflictuels ? A quelles conditions une vie
mérite-t-elle d’être vécue ? En quelle extrém ité faut-il préférer la
risquer et la perdre ?
Cette partie n’est donc une chronique que par l’habit extérieur.
Par le fond, elle est actuelle, elle est à vrai dire de tous les temps.
164
43. A heddad 1-Lqalus
T addart 1-Lqalus tura trab. Q qaren asmi-t m azal tebded, ilia degs
yiwen uheddad isaa cci, im a yures tam ettut tzad di ssifa. Yibbwas
qqimen kra 1-lyaci la heddren di tejm aayt, inetq-ed yiwen inna yas :
— Lem m er ad iyi tcehhdem , ad-d kksey i w heddad tam ettut is.
N nan as : — I kecc s laaqel ik ?
Inna yasen : Reggemt iyi kan ard ad ii tcechhdem . Reggemn as.
Iruh yer tejm aayt n ccraa, inna yasen :
— Sliy i w heddad ibr’ i tm ettut is n tlata fi tlata.
Ihi yekks as-J: ccraa. Aqliyi nek byiy a H -ay ey .
N nan as : — D lm uhal !
Inna yasen : — D ayen zran medden.
N nan as : — Awi-d inagan.
Iruh ibbwi-d widen akken s ireggmen di tejm aayt. Cehhedn as.
Tajm aayt tehkem tebra tm ettut. Truh. Yay if urgaz nni. yer taggara
uyalen armi kksen iwheddad ula t-tiferkiwin is.
Telia di tad d art 1-Lqalus yiwet tem yart tegwra-d wehdes, ur tesâi
hed. Tebbwd-ed tefsut ; bdan medden la teffyen yer tferkiwin nnsen.
Ar tam y art nni, ack’ ula w uyur tegg axxam is. A ssen truh s aheddad
tru yas. Inna yas :
— M a tebyid ad am gey ttawil.
Tenna yas : — Lem m er atxedm ed tinna...
Inna yas : — Ad am xedmey tasekkw art aa yejfekkwiren axxam
im si berra.
Di lweqt nni tibbura ftekkwirent kan si zdaxel. At taddart, akken
walan tam yart, mi tsekkw er tabburt is atruh, bdan ar-d ^azzalen ye.r
uheddad iwakken ad asen ixdem tisekkw arin si berra ula d nitni.
Ixedm itent, m aca mkul yiwet yuqm as snat tsura, yiwet igga-J yu-
res.
Yibbwas am esbatli nni t-tm ettut is txuss iten tm es, inna yas i
tm ettut :
— Ruh awi yay-d times syur uheddad
Tenna yas : — A nnay ! Anwa udem iyes ara t-qabley ?
Inna yas : — N niy am ddem aceqquf truhed.
Truh. Mi tebbwed ur tnebdat n tebburt tebded, teggum m ’ atqer-
reb. A heddad iwala-d tili, inna yas :
166
43. Le forgeron d’A kalous
167
— Qerrb-ed.
Tenna yas : — D nek !
Inna yas : — N niy am qerrb-ed
Tenna yas : — Nniy ak d nek. U r ii-d aaqiled ara.
Inna yas : — Zriy d kem, qerrb-ed.
Tekcem , tenna yas :
— Acu la txeddm ed a bu nnkuz ?
Yerr as s tm eyrut agi (« uz ») :
Ul iw iffagw em ineqqel
ata d i Ihem ur ixus
168
s’arrêta, n ’osant entrer. Le forgeron, voyant son om bre sur le seuil,
lui dem anda d’approcher.
— C ’est m oi, dit-elle.
— Eh bien, approche.
Elle répéta :
— C ’est moi, tu ne m ’as pas reconnue.
— Je sais que c’est toi, dit-il, entre.
Elle approcha.
— Que veux-tu ?
Elle crâna :
— Quel stratagèm e prépares-tu ?
Il lui répondit en vers (et sur la rim e que la question elle-même
com portait) :
M o n âme bouleversée
S u b it des épreuves à n'en p o u vo ir mais
M o n cœ ur est m eurtri écrasé
T out m iné par-dedans
D e grâce saints
D 'A it M eraou et d ’A r o u s 120
A l ’arme que j e fo u rb is
H o m m es de D ieu adaptez un manche.
169
Inna yas : — Ilaq taassast nnwen mkul id a-n tq araa s-axxam iw ;
Mi n-tw alam yer ttaq aqajih n tmes azzelt-en.
Yiwen yid adu la issafag iqrem yad. M edden akw ttsen. A heddad
ikker, ibda-d i taddart si tterf. Axxam iyef iâadda isekkwer as tab
burt si berra. Yuli yer taarict bbwexxam is, iddem tadla ggeylel, is-
say if, isâadda J;-id si ttaq. A adaw en walan-d aqajih m baâid, az-
zlen-d s leslah. Zzin i taddart si mkul idis, m ekknen as times. Ten-
deh, tlehhu arm i-d bbwed s ixxamen im ezw ura n tad d art. L âayad ik
ker. Win im m yen f tm ekwhelt, ad iruh ad-d-ili tabb u rt, yaf if tsekk-
wer si berra.
A ta wakken texla tad d art 1-Lqalus.
Deg giwet tad d art Igawawen la jn a y e n sin lesfuf arm i yiwen issu-
fey wayed. Ggugen, mkul axxam sanda yerra. Sseg ruhen la
ftaaraden ad-d uyalen, la-d ftattafen di lamin iwakken a ten yerr.
Asmi bbwden rrb aa iseggwasen, aqerru bbwedrum nni yuqem asefru
iceggaa-t i lam in, yenna yas degs :
A y ul iw ifna-k nndab
a war ahbib
y uri adrum d akeddab
ur i(hezzib
Lâar / lusun-t d ajellab
teggn as nnsib
K u l y iw e n d wanga isab
ur sâin ttbib
A}}a tasa-w tenneqlab
la tefnehhib
Ssura-w irkwel terrebrab
y u s r iyi ccib
170
Un soir de grand vent que tout le m onde dorm ait, le forgeron se
leva et, com m ençant par un bout du village, visita toutes les portes
qu’il ferma de l’extérieur. Puis il prit une botte de paille, la passa par
la lucarne du haut de sa m aison et y mit le feu. Une grande flamme
s’éleva.
Les ennem is aussitôt accoururent. Ils entourèrent A kalous et y
m irent le feu de partout. Q uand les flammes atteignirent les
premières m aisons, les hommes réveillés se précipitèrent sur leurs
fusils. L’un après l’autre, ils venaient buter sur les lourdes portes de
frêne fermées de l’extérieur.
Ainsi disparut le village d’Akalous.
L’un des deux partis d’un village ayant contraint l’autre à l’exil, le
chef des bannis au bout de quatre ans envoie à l’amin du village
cette adresse :
171
L leh L leh a Yebrahim
m a n-nek a d m m tey d a yrib 121
Yuyal lam in irra tn-id, slid yiwen uxxam , iqqim-en acku d nitn’ i
d ssebba n taadaw t, nyan argaz i ssef 1-lamin deg gw akal 1-lemnaa.
U rgan arm ’ uysen. Yibbwas nnan as : A nruh ad-d nzur Yemma
X liga T ukrift (z. n° 91).
Ruhen deg gwas ugeffur d am eqqw ran. Mi bbwden nnan as : — A
Yemma X liga, ayen idran yidney tezrit-t. T ura, m aday tw alad an-
nuyal ur tm u rt nney, in’ ay-d, annargu ard iferreg Rebbi. M a tw alad
ulac n ttm aa, in’ay-d, nekw n’ annezzenz ayla nney di tad d art, imiren
rray asaadi a-t id iqeddem Rebbi. Tenna yasen : — A ssag’ ur walay
aa d awen n-iniy ; ruhet ar azekka tuyalem -d. A zekka nni kkren,
ufan itij issehseh. U yalen ur Yem m a X liga, tenna yasen :
Rnan cwit. Yuyal ula n-nitni yerra tn-id lam in arm i t-taddart nn
sen.
172
Ib ra h im 122 par Dieu
Vais-je m ourir dans l'exil ?
L’amin laissa alors revenir toutes les familles, sau f une, qui avait
été à l’origine du conflit en tuant un hom m e de l’autre sof dans un
lieu en principe couvert par la trêve. Le dernier carré attendit onze
ans ; après quoi ses membres décidèrent d ’aller consulter l’oracle
« Mère K h ad id ja124 », vieille femme paralysée et pourvue du don de
voir, qui était retirée dans un erm itage au pied du T am gout, pic
culm inant du D jurdjura. C ’était un jour de tem pête. « Mère K ha
didja » déclara qu’elle ne trouvait rien à leur dire. Elle leur dem anda
de revenir le lendem ain. Q uand ils se levèrent, ils trouvèrent un
tem ps radieux. Ils se présentèrent de nouveau devant la vieille
femme, qui rendit son oracle en ces vers :
Peu après, les derniers bannis purent eux aussi rentrer dans leurs
foyers.
124. C f. n “ 91.
173
Lâarbi A t Bjaawd
1 A y ul m i te(ban tafat
m ’ attilid seg m usnawen
Iban webrid n tifrat
nekw ni anbâad i wsawen
Ubacir y e y z -i tasrqftils
nek ëcurey as-( d afrasen
174
Larbi A it Bejaoud
A m ousnaw d’A ourir, tribu des Ait M anguellet.
1 C œ ur illum iné
A giras-tu en am ousnaw
Claire est la voie qui aboutit
A lo rs évitons le chem in m ontueux
O u-B achiru i a creusé la trappe où j e devais tom ber
M ais j e l ’ai com blée
175
7 L hem d-ileddun nezra-t
a win aa-[ id isyersen
Uheq Jeddi M angellat
d ssaddaf widen i-s innden
Im i d ay-d aawjent tifrat
anneqqen d izelm aden126
I m i d A m ejjud nsaa-t
ur-d nerni lhem iden111.
Deg Gwewrir llan sin lesfuf, yiwen l-L âarb’ A t Bjaawd, wayed n
Lhag A t U m yar. Ssef iqwan d win 1-Lhag. Isâa L âarbi yiwet tferka
qqaren as Aima, Jtalasen degs abrid at-taddart di tefsut d unebdu.
Yuyal rran-t d abrid n dim a, fâaddin degs ula di ccetwa. K kan ayen
kkan, yer taggara yuyal d ssef 1-Lâarbi i gettuqten. Inna yas :
1 K u lc i m a iâadda neffu-t
ar A Ima rran d Imerked
Ilia webrid nâannu-t
iiseylit degs tâarred
Siw a deg wnebdu t-tefsut
yura-t baba d i Ikayed
176
7 N o u s savons quelles épreuves nous attendent
S i nous déclenchons la guerre
J'en ju re p ar Jeddi M anguellet129
E t les saints qui l ’entourent
L ’issue ne sera pas tout unie
N o u s devons com poser avec la nécessité
E t puisque nous avons cette m audite Tam jout
É vito n s de nouvelles tribulations.
46. Serment
13
177
Irra im anis zun y e m m u t
win iâaddan d ar-t irked
A r -d iffey unebdu t-tefsut
w ’ iqam en ad as-d iâarred131
A d a w e n h ku y lejrida
ay arrac iw ezwazen
178
E t fa i t le m ort
O n l ’écrase en passant
M a is vienne le printem ps et l'été
Q ui p e u t lui barrer la route
47. Floué
Q ue j e vous conte
M ignons enfants
179
T adyant idran abrid-a
âakkan fe lla y yergazen
ggan ay arm i nâabba
rran ay isuka ycrrzen
R n a n fe lla y rrekba
ar dessen (m iym azen
fgan m i nqettu Im edza
i-y-ufiy la d ii qqazen
N w iy s s e fiw yaâba
ssbeh z ik m i fgerrizen
S lekwabes am ttelba
win aa hazen a-t id rzen
X e w ze n akw yer taggara
knan s iâdawen [[anzen
M i sen nniy affa Iqebla
zzallen s A g em m u n Izem
19 A h si j ’avais père
Et frères vigilants
Ils m ’auraient battu à tour de rôle
R o u é de coups
M a langue m ’a attiré cette avanie
Puisse-t-elle être cousue
134. La prière se fait en M a g h reb vers l’est. A g uem o un Izem est décalé
rapp ort à l’est d ’Aourir. Ce n ’est d o n c pas la b onne direction.
Ikker umerzi deg giwen ssuq qqaren as Ssuq 1-Lhed ger At W asif
d At Yanni. Ssuq izdukel akw tiq’o ilin i-s-d izzin, ideg Jfekkin At
M angellat. Ibbwi-d fellas L âarb’ At Bjaawd :
1 A y agellid ur nettis
a win i-{ id iâussen
H e k m A y a n n iw d U w a sif
b e z z a f di L h e d ssuqsen
N a a m er ssuq di //n a sif
lejdud nney d wigi nnsen
182
4 8 . M a rch és
138. Le m a r c h é du had se tenait prés de la rivière dite plus tard Souk Eldjema,
sur le territoire des Ait Manguellet.
183
Lhag Lmexfar A t Sâid
Si Tirwal n At B uâakkac
184
Hadj Mokhtar A it Saïd
140. H o cin e O u zen ou c h , mort plus que centenaire le 2 dé cem bre 1874, est
donc né vers 1770.
185
49. Inza yi lehdit llil
A a n iy d b a b ’ iy ’ idaan
in z a y i lehdit llil
Ttsen akw medden hennan
am m idlen am m ur ndil
D nek ay d bu inezm an
arm i d iyi âabban s Imil.
186
nommé par la puissance coloniale bachagha sym bolique des
Z ouaoua avec mission d’am ener la soumission effective de la confé
dération. Il est, avec Hocine Ait Hadj A ra b 141 de Tikichourt et
H adj Boudjema Ait Y aakoub des O uadias, un des chefs de la résis
tance. Il le restera ju squ ’à la défaite.
49. V ocation
50. D éfinitions
C om prenez-m oi vous
Q ui êtes ici à m ’écouter
187
N e([aw i-d Imaanat
l-lefhul iggalasen
N ettabâa ccirât
d-eggan ssy a d ’ iwufqen
N se ll i ssurat
bbwaw al r-R eb b ’ âazizen
N ferru Iwehlat
ger ddalem d w ’ifdelmen
A b r id n tifrat
if[awi t id Imumen
J'xilek a Iqelb ay u m m il
d hed ur-k ihm il
Ifaken ak medden akw iles
J ’use des paraboles
D es experts qui ont beaucoup appris
C ar les solutions
L ’h om m e aux intentions droites les trouve
Je sais la Voie j e la dis
Sans besoin q u ’on m e la m ontre
D e grâce cœ ur ballotté
N u l ne t ’aime
O n te paie seulem ent de belles paroles
142. Sou m eur : village des Ait Itto u rag h, rendu célèbre par l’héroïne Lalla
F a d m a (voir no te 403) qui y résidait. Ikhlidjen : village des Ait O u m a lo u (Ait
Iraten). T a sg a Melloul : village des Ait Manguellet.
189
Ttbiâa inu am m ugertil
ur teffem biddil
f yiw en w udem ard iqqers
A â d a w nefqabal it g g iy il
w a l’ ad as nehtil
ff e h b ib ad ccey times.
F ehm et a ssamâin
a k r a y i- d izzin d aqusis
A Ibâad ifheddir
s rryem izerrâa ils is
A Ibâad isihriw
lm âallem inegger yefqis.
190
M o n hum eur à m oi est telle la natte
Q ui toujours m ontre
L a m êm e fa c e ju s q u ’à l ’usure
54. Pâturages
Dagi kra yeqqar irra yas-d yiwen U budrar s usefru yenm eyran
ula d nefta s « u », am min 1-Lhag Lmexfar ; ay-d iqqimen ssegs ala
sin ifyar ineggura :
192
C ar blanche est la voie de D ieu
Qui s ’en écarte s ’en repent
E t à q u i laisse passer l ’occasion nous disons
Que nous com ptons quant à nous dès le m atin sur les fatigues.
55. T rois vœ ux
144. A m es ure q u ’ils ap prennent les versets qu ’ils écrivent sur des planchettes,
les élèves des écoles c oraniq ues enduisent celles-ci d ’argile blanche.
193
Akken d-ibbwed yaaqel Lhag Lm exjar, iqqim yer Iqaa, yuyal di ftel-
biba : — A dda Lhag, di laanaya-k aafu yi, ur-k id aaqiley ara. Inna
yas : - A mmi, aafiy ak, d nek i d ddalem , aadday ak deg giger.
Inna yas : — Ihi, m a tsemmehd iyi, dâu yi s lxir.
înteq Lhag Lmexfar inna yas :
194
A mur wis kra4
Lemtul
T roisièm e p a rtie
Apologues
— Puissé-je ne pas revenir du P aradis, répondit H adj.
— A ttends-m oi là, dit l’homme.
H adj M okhtar s’assit. L’hom me arriva bientôt en colère. Quand il
fut assez près, il reconnut H adj M okhtar et se confondit en excuses ;
— H adj, pardonne-m oi, je ne te reconnaissais pas.
— C ’est moi qui suis fautif, dit H adj. J’ai traversé ton cham p sans
t’en avertir.
— Si tu m ’as pardonné, Hadj, adresse pour moi une prière à
Dieu.
H adj dit :
195
Le genre gnom ique est à la fois prolifique et varié. Il n’est même
pas possible d’en présenter dans des lim ites étroites un échantillon
nage suffisant. En l’absence d’une typologie qui reste à faire — et
dont du reste l’utilité serait purem ent didactique —, on peut suggérer
quelques distinctions grossières.
Form ellem ent, le genre peut aller du proverbe (en général un
distique) au long apologue (cf. n° 78 : 277 vers).
Du point de vue de la pratique sociale, les poèm es gnomiques
rem plissent une triple fonction. Us constituent d’abord un ensemble
de préceptes qui servent de systèmes de référence et éventuellement
de guides d ’action. En second lieu, ils interviennent de façon quasi
obligatoire dans le discours soutenu, com me ornem ent et peut-être
plus encore avec valeur d ’argum ent, com m e si la mise en forme était
par elle-même épreuve de vérité. En dernier lieu, et pas toujours
secondairem ent, la valeur esthétique du dit est à considérer, sans
qu’il soit toujours facile de la distinguer de la valeur éthique, comme
si la beauté était incom patible avec l’erreur.
Le genre gnom ique de toute façon n’est pas figé. L’ensemble des
valeurs est connu et reconnu de tous, m ais la pratique non seulement
y apporte chaque jour une illustration (fût-ce a contrario : cf. le
thème abondant et vivace des valeurs niées ou oubliées), elle peut
éventuellement l’enrichir aussi. Il y a toujours quelqu’un pour
insérer l’expérience dans le tissu de mots bien agencés ; c’est très
souvent le fait des am ousnaw ou des poètes professionnels ; il y a
même des spécialistes du genre (Bou A m rane, Sidi K ala), voire des
199
Hedrey s yimaniw nnan as deg w nejm aa n tad dart i yiwen umus-
naw mi g e k f am eslay : « A leflani, tigi t-tim ucuha n at zik. Nekwni
macci d arrac ad ay tessedhud s tm ucuha ». Ihi tedra t-tm ucuha
nney tiqdim in am Tunes n Ccix M uhend : kul yiwen d ayen i-s illan
deg gui yaf-it degs. W in ijnadin asedhu t-tatu t di tm ucuha yufa-ten
degsent, win ibyan tam usni d leqraya ggwtent.
Zik, imi taqbaylit ur te,twaru yara, heddren medden s lem tul, ack’
ulac di tm eslayt awalen iwimi qqaren s tefransist « abstraits » (s tma-
ziyt : imadwanen). Lkw etra 1-lemtul bnan f tarm it, w a yeggagga ten
id i wa, iwakken ayen sâaddan im ezw ura ur asen ifruh ara i-yneg-
gura, ad asen-d iqqim t-tam sirt.
Igwra-d, di lweqt-a deg nella, lemtul imezwura ilha m a netm ektay
iten id, yif it m a nerna yersen, yif it akw ma nezdukel iten nitni t-
tmusni taâlay an t t-tussna tatrart. Acku ur m sexdan ara lemtul iqdi-
men t-tussna bbw assa ; m adw a m kul wa deg gwemkan is ; am m ar
ad y il yugar akken m wafaqen akken m nafaqen.
Irna, akken ibyu yili, yas tbeddel tesw iât, iâadda Iweqt nnsen ney
n kra degsen, ilaq a ten id nefm ektay, tam ezw arut am -m etm atart bb-
wayen d-snulfan im ezw ura nney, tissnat imi di tm eslayt llan degsen
wid iâaban. Di tehrayt laaqliyya n lkw etra degsen taâ n a akw tim ura
d akw lewqat.
200
cycles146 ; tout le monde s’y livre peu ou prou. N aturellem ent, la
distinction ici faite entre caractères éthique, esthétique et historique
est de pure forme ; la réalité n’offre que des exemples polyvalents.
Le genre est aussi alimenté par une source plus sophistiquée où
l’on peut soupçonner (sans pouvoir l’affirmer) l’influence des clercs,
où en tout cas se décèlent les traces de rapports plus ou moins
directs avec des genres attestés en d’autres points du dom aine
m éditerranéen (fable, apologue, conte). En effet, la (n° 77) ou les
(n° 78) leçons peuvent s’insérer dans le corps d’un apologue, qui ne
leur sert pas seulement de prétexte ou d ’illustration, et dont certains
atteignent les dim ensions d’un dram e élaboré, passible d’une explica
tion certainem ent plus profonde que la simple traduction littérale ne
le laisse voir ici.
201
56. D i ttahra tafukt acraq
A y am ekraz n tleclac
texlid m a tergid im y i
A y aseggad l-lehnac
win d ssem ay-d itfawi
W ’ ilâaben ger txenfyac
wissen tam eddit sani.
A amer Azkuk
2 02
56. « Q uos vult perdere Jupiter... »
203
58. Lhan m a seg giw en ar sin
Z z iy am gud s ttaqa
di litfaa medden swasin
H em m ley adriz m a ineqqa
y ir Im edheb ur-t nessin
A k k e n ihbiben iheqqa
lhan m a seg giwen ar sin.
Llan sin yehbiben di tm urt ufella kulci icerk iten, lâam er mxalla-
fen deg gwaccem m a. Yibbwas tferq iten yiwet ddaaw a, mkul wa d
abrid d-ibbwi. Akken ur as ufin ara 1-lufeq, inetq-ed yiwen inna yas :
— A nruh ar Ben A al’ A crif ad ay d-ifru. Ruhen, hkan as i Ben
AaPAcrif, inna yasen : — A tarw a, tigi ur asent ssiney ara. A y sent
izemren d Ccix Ubelqasem. Ruhen ur Ccix U belqasem , hkan as
day, inna yasen-d :
204
D ans l’impossibilité de présenter tous les thèmes de la poésie
gnomique, on en a choisi deux, du reste classiques : l’am itié (n os 58 à
61) et la dém esure (nos 62 à 65).
149. Ben Ali C h é rif : famille m a r a b o u tiq u e de C h ellala (Illoulen O u sam m cur),
descendants du c h é r if Ben Sidi M o u s a ; zao uia célèbre.
205
1 A Ihanin keëc d lla tif
a bab l-lqedra âalayert
Uheq kra izedyen H n if
law leyya widen i s innden
S y is m ik a Ben A a l’A c r i f
d ssellah Igawawen
7 N e k bdiy Usas si llif
da isub da d asawen
Ssber gm as d a y ilif
win t-isâan welleh ar islem
lh b ib en y e zd u k e l n n if
d lâar m a yexd â a yiw en.
C c ix U b e l q a s e m
L ehbab tefhibbid ay ul
k ka n garaney isaffen
A brid isâab irna idul
lacci d kra d-ffalen
A R e b b ’ ahbib f s i cckul
abrid a d âaddint wallen
A n z e r lehbab at Imul
igadfella y d~i([alen
A d ihlu Iqelb amâalul
m ebla tira d iseflen.
S i d i R r a b i â A t S i d i A a m e r (seg A t Cebla)
206
C om patissant tu es m iséricordieux et tout-puissant
J'en appelle aussi aux saints de H n if
E t des lieux qui l ’entourent
A toi Ben A li C h érif
A vous saints des Z ouaoua
J ’ai tout p esé depuis le début
207
Tenna yas : — Ala, nek tary alt ay byiy.
Inna yas : — Ih ’ ad ii tedâud
T enna yas : — A am aazuz, nek d leyna ay ssney ad yenniy.
Inna yas : — Ruh, ur ixsir wara, m a d leyn’ ay tessned, yenni-d.
Tenna y a s :
A y ajeggig n tfidas
a win iss tfuraren
Ify ir win m i gwran wussan
wala win im i zwaren.
208
son insistance, il finit par céder à la condition que la vieille femme
fît pour lui une prière à Dieu. L’inspirée déclara qu’elle ne savait
pas faire de prière, mais que par contre elle pouvait chanter. Il
accepta. Elle dit :
F leur de Fenugrec
D o n t on jo u e
M ieu x vaut être heureux à la Jîn
Q u'au départ153.
Les pèlerins qui se rendaient chez Ben Ali C hérif ont fini par être
si nom breux que le m arabout avait décidé de ne plus les recevoir
individuellem ent. Sim plem ent, quand tous étaient rassem blés, ses
209
inetq-ed yiwen inna yas : — A ssag’ ad-d snetqey ccix, ad ay-d ihder.
Aarden medden a-t id qerraan, yugi. Ruhen-d iqeddacen. Lyaci uq-
men sin idurra. Ifîy-ed ccix. La-d ilehhu ger idurra. Akken-d ibbwed
almend bbwergaz nni, iluâa t : — A naam a ccix’anaam a ccix ! Inné-
qlab yers ccix. Ikemmel inna yas : — A naam a ccix nekw n’ uiac
kecc ulac.
Ibded Sidi M uhed W aali, yewhem. Ikemmel urgaz deg wmeslay
inna yas : — A naam a ccix, annect agi 1-lyaci d-yusan yerk, m acci d
udem ik kan i ten id ibbwin. Mkul yiwen d ayen t-icqan, w a d atan,
wa d dderga, wa d inig, wa t-taadaw t, w a d nnesba. K eccini, mi-d
ffyed, ad-d âaddid garaney atruhed. Inna yas cpix : — Akk i-gsar a
mmi ? Inna yas : — A kka. A naam a ccix lem m er ad iyi tsam hed ad
ak-d iniy. Inna yas : — Ini-d. Inna yas :
210
hommes leur faisaient form er deux rangs entre lesquels le saint
passait sans adresser la parole à personne.
Un jour, un visiteur excédé se fit fort de le faire parler.
Effectivement, dès que le cheikh fut à sa hauteur, il l’interpella, lui
reprocha son indifférence à toutes ces préoccupations rassemblées et
à la fin lui dit en vers :
De ce jou r, Ben Ali C hérif fit vœu de voir un à un tous ceux qui
venaient en pèlerinage à sa z a o u ia 157.
211
at taddart w’ aa-s iheggin imensi. A m edyaz la ikkat, m azal ifuk, ata
yebbwd-ed lexbar belli lqayed atay a ula d nefj;a yer tad d art ; ilia la
yettseggid, ittf it id yid. Ihi ilaq ad as swegden imensi ula d nefta.
N nan as i win iheggan i wmedyaz : — Imi taabbw led d y a zdukl iten.
Lqayed ibbwd-ed. Iruh ad yecc imensi. Iw ala netja d um edyaz aa
yeqqim. Iwexxer inna yas : — U r te{.{ey a ra nek d um eddah. Inteq
um edyaz inna yas :
N e k m a bbw iy y id i m em m i
nnan-i medden isuleh
A - t nesseyra di Imaani
w a l’ ad-d iffey d imfelteh
M a c c ’ am m em rabed ur ney ri
ger medden iban d Ifayeh.
212
d’entre eux qui allait préparer le repas du soir à un poète de passage.
Sur ces entrefaites arrive la nouvelle que le caïd qui chassait dans les
environs allait lui aussi passer au village, où la nuit l’avait surpris.
On décide de confier au même hom m e le soin de recevoir aussi le
caïd. M ais, le soir venu, celui-ci refuse de s’asseoir devant le même
plat qu’un m eddah. Le poète dit :
Chasseur de perdreaux
Tu erres j e le vois
Car com bien n ’ai-je p as vu de cavaliers m ontés
A v e c étriers et babouches de cuir
Passer les bornes et disparaître
P our le m alheur de leurs enfants.
213
Sidi Qala
g At Jlil
67. Agem m ay
Yuqem Sidi Q ala yiwen usefru yef isekkilen n tâa ra b t, m kul asek-
kil s yefyar is. M aca ala sin isekkilen i-d iqqimen ssegs.
(ini) Mim
(ini) Waw
bâad i wdeggwaî bu tirtaw
d lexwal i-gcebbu wayaw.
214
Sidi Kala
Un poète gnomique des Ait Jlil158
67. A bécédaire
D is « m »
F uis un vieil ennem i
C ’est à ta tête q u ’il en veut
Q ue l ’occasion se présente il ne t ’épargnera pas.
D is « ou »
215
68. D dw a usem m id
D dw a u sem m id t-tim es
di ccetw ’ ur tesâi nnuba
A n eb d u teqqim wehdes
alam m a tella ssebba.
A y ul am ehbul yexlan
berka-k asuget bbwawal
L e remède au fr o id c ’est le fe u
Toujours là l'hiver
70. Illusions
C œ u r vain et distrait
A sse z de te répandre en paroles
A sse z de l ’am our des fe m m e s
I l p a sse com m e une om bre
217
72. Lm edheb yugar cci
N n i f ik m aday t-fkid
a l' ibbwas i gefâici
F k as kan ad y e c c atas
ya a d el m a thud ney taâmer.
A m e k sa itubâ it llum
m a iyfel welleh ar idlem
74. Pasteurs
E t le m al que le m échant fa it
C ’est l ’hom m e de bien qui le paie.
219
75. Win iqqazen i gmas lly
Z d a t medden d ddalem
yur R ebbi tew zen tweqqit
N effa d ahnin d rrahim
a-t isderbez ismenâ it.
76. T riades
Q ui habite la fo r ê t
L e lion et le sanglier
Q ui habite les cités
L ’avisé et le sot
D e grâce fa u c o n
N e m 'abandonne pas à la chouette
Lion
N e m ’abandonne pas au sanglier
A visé
N e m ’abandonne p a s au sot.
161. D ans une lettre écrite en fra nçais à Salem Ait M a a m m e r , son maître
puis son c o m p a g n o n en t am o usni, Sidi L o u n as (voir Intro duction) a cité ces
vers en ber bèr e, puis les a fait suivre de la trad u ctio n su ivante :
C e lu i q u i creuse à so n fr è r e u n e to m b e
I l se m et au loin et a tte n d le d o m m a g e de son dit p arent
L a p o p u la tio n l'appelle B ru ta l
E t D ieu a déjà p e n s é et ju g é so n f a it
I.e C réa teu r Ja it sa u v er celui à q u i le piège est tendu
E t f a i t to m b e r d ed a n s celu i q u i l'a creusé.
Certains att rib uent ces vers à A m r a b e d Saïd de Tililit (Ait Manguellet).
221
Tamacahut n tsekkurt
15 Inna y a s G edha s m em m i
m acci d ssyada bbukyis
A d nadin iâabbwamen
ad mlilen d rric-is
A d y a w e d lexbar ledyur
lbaz icca tagaret-is
25 Inna y a s G edha s m em m i
m acci d ssyada bbukyis
A d-d-iqqw zl useggwas n rrha
k u lw ’ ad ifqed tasraft-is
A d y a w e d lexbar ledyur
lbaz icca tagaref-is
222
Le dit de la perdrix
I Scribe
avisé entends-m oi
Il y avait au désert un palm ier
A u haut fa îte
S u r les palm es vivait un fa u co n
Près des racines une perdrix
7 L e fa u c o n un jo u r
D élibéra avec ses enfants
C o m m en t fa ire dites-m oi
A v e c celle qui habite près de nous
II L ’aîné se leva
E t dit
Père laisse-la-moi m anger
A la m er je jettera i ses plum es
21 L e cadet se leva
E t dit
Père laisse-la-mol m anger
D ans un silo j'en fo u ira i ses plum es
223
31 lkkr-ed um ejtuh degsen
isella deg-gwawal-is
Fk-iyi-[ a b a b ’ af-t-eccey
ad zw irey g rric-is
35 Inna y a s Gedha s m em m i
Tagi d ssyada bbukyis
M a m m utey g g iy-d laamara
baba-k irgel-d amdiq-is
W ' iccan IhejV ar / ifak
isuk ta la b a f yim i-s.
224
31 L e plus jeu n e se leva
E t dit
Père laisse-la-moi m anger
Par les plum es je com m encerai
225
Taqsit 1-ledyur
Q qaren, asmi tekker attejweg tnina, nnejm aan akw ledyur, mkui
wa yebya a-t-yay. Shedren-d lewhuc nniden d inagan. N nan as i
Tnina : — xtir win tebyid. Tenna yas : — hdert-ed, mkul yiwen deg-
wen a-d yaw ’ ayen issen. Im iren ad w aliy. N nan as : — N teq ay isyi,
d kecc ay d am eqqwran.
Isyi
226
Le dit des o iseau x
Le percnoptère
163. Une séquence de m étap h o res se m bla ble s se retrouve cu rieusem en t dans
saint Aug ustin , avec cette conclusion extrap olée : « Ht la be auté de toi-mêm e c’est
ton âme. »
227
wi-y ibyan ur-t nebyi
sswab
iyab
A wufan rrsem ur yefxab
u ry e ffilifa ru q ger lehbab
T anina
17 Tenna ya s R u h awlidi
ur qqim ey d aanqur
B âad syenni
berka-k Ikwetra l-lehdur
A k s u m ur tezli tefrut
ur-t-tetfey a gm a merikur
Igider
T anina
29 Tenna y a s R uh awlidi
ur qqim ey d aanqur
B â a d syen n i
berka-k Ikwetra l-lehdur
A k s u m ur tezli tefrut
m a teccit-t a gm a m enkur
228
T el nous aime que nous n ’aim ons pas
M orte
E st la voie droite
Les principes ne devraient p a s être abolis
N i les am is désunis
Tanin a
17 D it Va am i
Je ne suis pas laissée pour com pte
Éloigne-toi
E t assez de vaines paroles
L a viande que le couteau n ’a pas égorgée
J e ne la mange p a s elle est im pure164
L’aigle
T anina
29 D it Va am i
Je ne suis pas laissée p o u r com pte
Éloigne-toi
E t assez de vaines paroles
L a viande que le couteau n ’a p o in t égorgée
C ’est péché de la manger
229
A bâuc
Y e n n a y i baba cfiy as
Im sihrem wer din y e x lif
— N teq a lebhem !
Lebhem
Yenna y i baba cfiy as
36 Tam azirt m m yeb rid en 165
L m â a rn yesqerbuben
T am ettut m m yerbiben
Tarewla ay ihbiben
— Nteq a tirellil !
Tirellil
Y e n n a y i baba cfiy as
40 Tlata tem sal ssrunt igenni
W in ikecm en s agraw
ur issin ad iselli
W in iruhen ad ya kw er
deg gid ar ifyenni
Ccada r-Rrebbi
s w ayen ur nezri
— Nteq ay am cic !
Amcic
Yenna y i baba cfiy as
230
L ’in secte
La bête de somme
Parle, chauve-souris !
La chauve-souris
Parle, chat !
Le chat
Izem
Y e n n a y i baba cfiy as
Izirdi
62 I[ru wul ye[ru izirdi
f f i n ur nelli d aheqqi
di tejmaâit ad iccernenni
M i-d hder tidej
ad i((egwnenni
ad irwel s axxam
ad ijfer aqerru-s am m in inisi
A cerreqraq
232
L ’hom m e riche
D ont la fa m ille se nourrit d ’herbes
Le père de m échants enfants
Q ui se vante d ’avoir un fils
— Parie, lion !
Le lion
— Parle, putois !
Le putois
62 L e cœ ur du p u to is déplore
L 'injuste
Q ui sur la place se vante
E t à l ’heure de la vérité
Se recroqueville
S ’enfuit vers sa m aison
E l s ’y cache com m e un hérisson
— Parle, rallier !
Le roi lier
233
N n an as : — N teq a y azrem !
Azrem
Itbir
77 A y a re zg ik a fa a l Ixir
ur y effw a t ur iffudeggir
A buâam m ar
Y e n n a y i baba cfiy as
79 Tlata tem sal degsent jfem yiz
Tam ettut deg giri bbwergaz
nef fa ad y ers ifneggiz
W inna yen/an di tm urt is
idmaa ism is ad y aâziz
W in ittam âan Igennet
tazallit lâamer i-s y u n iz
L âailaqa
234
- Parle, serpent !
Le serpent
73 L e cœ ur du serpent déplore
L es frères désunis
L e s am is indiscrets
L ’hom m e qui critique qui vaut m ieux que lui
— Parle, pigeon !
Le pigeon
— Parle, épervier !
L’épervier
Le loriot
2 35
N n an as : — N teq a sib b u s !
Sibbus
90 W ' iwalan ttâam drus166
ye c c cw it izm ed agus
A buheddad
Ttebbib
96 A c ’ara y in i ttebbib
A qerru-w ikfa si ccib
f tm ettut isâan arbib
tasa-s kulyu m am m eyrib
D eg gw exxam attefâatfib
yas attili d nnaqib
Ttebbiba
236
Ils dirent : — P arle, roitelet !
Le roitelet
La mésange
La huppe mâle
96 Q uoi dire
C e qui fa it m a tête chenue
C 'est la fe m m e qui a m beau-fils
Elle est toujours une étrangère
M algré ses peines à la m aison
E t en fû t-elle l ’intendante
La huppe femelle
237
N n an as : — N teq a y iblinser !
Iblinser
108 L e h r a m d a setta f
win d-izewgen seg gir lasel
ar ani y e b y u y is y is
taggar’ a-s-t-id sseydel
A zukertif
112 Tlata tem sal degsent Ih if
W in d-iseggden
a d y ili w e r y e ttif
W in aa yesbedden lyerd
nef fa wer t-ilq if
W in rnan Igiran is
d win ay d Ih if
N ntir
Ijirmed
122 Tlata tem sal usem yaarred
W ’ isâan axxam am ejtuh
N e f fa ar iâ a n ed
238
— P arle, ib lin ser167 !
L ’iblinser
— Parle, merle !
Le merle
— Parle, n etir169 !
Le netir
Le ver de terre
122 Trois choses sont pure encom bre
C elui qui a m aison m enue
E t y amène des invités
169. N e t i r : an im al n on identifié.
239
W ’ isâan iyil d aqucah
Ihem m a degs iqerred
Win isâan y ir xenfuc
ne{{’ ar icerred[6B
Afalku
Tagerfa
Mergwed
168. N ey :
(123) win ur nesâi axxam
(125) win isâan y ir tagmaf
(126) n ef;' ar ikerred.
240
C elui qui a courage court
E t va cherchant querelle
C elui qui a fille laide
E t exige grosse dot
— Parle, vautour !
Le vautour
— Parle, corbeau !
Le corbeau
Le dorm eur
241
N n a n as : — N te q a ta b !
Tab
Ajehmum
A c ’a ra -d y in ’ ujehm um ?
148 Â udubilleh
seg gw in ur nessin ad im m eslay
ne}}’ar ifqem qum
ney w ’iqum ren sseltan
y iV ur isâi Iqum
Tikkuk
A c ’ ara-d y in i tikku k ?
174. N ey : d a h e m u k ?
242
— P arle, p etit d u c !
Le petit duc
— Q ue dis-tu, merle ?
Le merle
Q uoi dire ?
148 L o in de m oi
Celui qui m alhabile à parler
B afouille
O u bien celui qui se dresse contre le roi
Sa n s avoir de partisans
Le coucou
Q uoi dire ?
153 J e suis fru stré
L e s fru its dès q u ’ils sont m ûrs so n t partagés
H eureux qui a p u en avoir un peu
M a is qui se p la ît aux intrigues
Un jo u r restera seul176
— Q ue dit l’étourneau ?
243
Azerzur
A c ’ a a -d y in i uzerzur ?
158 A rg a z illan d Imechur
iffak Iheq ix e tt’i Igur
ur iëôehhid s zzu r
d ayen i-ghelken d i leqbur
Amergu
A c ’ aa-d y in ’ umergu ?
16 2 C cbab yellan d lâali
y e n n u m ijebbed asedru
tu r a y u y a l am y e s y i
win illan seddu w ezru173
Im i d Iqern rebâatac
aybub yeq q w el d afalku
A asfur
A c ’ a a -d y in i uâasfur ?
168 Ccbab yellan d Imechur
yerra im anis d Imedrur
iruh la ikerrez d i Ibur
Lâinser n tagm af yeq q u r
244
L ’étou rn eau
Q uoi dire ?
158 L ’h o m m e de renom
E st ju s te il n'opprim e p a s
I l ne rend p a s de fa u x tém oignage
C ause de grands tourm ents dans la tom be
La grive
Q ue p e u t dire la grive ?
Le passereau
Q uoi dire ?
177. A llu sio n à une co m p tin e (dite zarellu) que les en fan ts c h a n te n t en ag itan t
des t i s o n s : « L ’œ il de l’o g r e / A sa u té, t r e s s a u t é / I l a m an g é les en fan ts du
hibou / D u h ib o u em p riso n n é so u s la pierre / Si tu y m ets d u sel il m o u rra / Si tu y
m ets d e l’huile il g u érira. »
178. Le x iv ' siècle islam iq u e, qui a co m m en cé en nov em b re 1882, passe d an s la
cro y an ce p o p u la ire p o u r être celui de la p erte de to u tes les valeurs. Il est p ro b ab le
que ce p assag e est une in terp o la tio n récente d a n s un poèm e certain em en t plus
ancien.
245
k u l ahbib ard ak-k idur
Im i d Iqern rebâatac
a n e fk a n w ’ibyun y im y u r
Ttawes
A c ’ aa-d y in i ttawes ?
17 5 Ccbab yellati d imheiles
ffasen-d medden yures
Iï? u x x u yasen s yiles
ziy zzuga-s tettulles
m i-d b b w i ssm id a-t-teftel
terr it akw d berkukes
A rg a z a a y ilin wehdes
m ig e s l'i ddhis ad ibges
w ten-t n a n -d ix fin e s
tam eddit a -d y a w i nnqes
T asekkurt
A c ’ a ra-dini tsekkurt ?
T aqubaat
A c ’ ara-d ini tqubaat ?
179. N ey :
(1 8 8 ) I w in ur nesâi tarbaat
a yen aa y e q q im iqjm aayt.
E t tes amis cherchent à te nuire
En ce quatorzièm e siècle
Laisse s ’élever q u i veut
Le paon
Q uoi dire ?
La perdrix
Q u e dira la perdrix ?
— Et toi, alouette ?
L’alouette
Q ue dira l ’alouette ?
247
ar iccettin di tejm aayt
yib b w a s a-t wten s txeddaat
A azzi
— I kecc a A am er Suksan ?
Aam er Suksan
— I kem a tajquqt ?
Tajquqt
19 6 T am ettut m m tehluqt
yib b w a s ad-d arew tafelquqt
— A yen akw deg la heddren akka ledyur, lbaz iqqim m ebâid issu-
sem . N nan as : — I kecc a lbaz ? A ta ur-d ntiqed ara. Inna y a s :
Lbaz
248
Intrigue sur la pla ce
Un jo u r recevra des coups à l ’im proviste
— Et toi, rouge-gorge ?
Le rouge-gorge
Q ue dira le rouge-gorge
— Et toi, A m ar Souksan180?
A m ar Souksan
— Et toi, ta jk u k t181 ?
La tajkukt
Le faucon
181. A n im al n on identifié.
249
M i fella s tebrek tit iw
af-(-ëcey lajl is m eksur
Tanina
Lbaz
Igider
250
Q uand m on regard a fo n d u sur elle
Je la dévore m ettant fin à son destin
T anina
Le faucon
L ’aigle
251
Isy i
Tanina
Lbaz
Tanina
Igider
252
L e percn op tère
Tanina
C ’est toi seul fa u c o n que j e veux
N u l autre ne com ble m es désirs
Le faucon
Tanina
236 D it Va am i
Je ne suis p a s là p o u r les arguties
Q ui m ’épouse est bien heureux
A u jo u rd 'h u i seulem ent j e p e u x décider
L’aigle
253
Win ur nw it uzza l
a-s qqaren medden yeqber
Tanina yebbw i-f lbaz
W ' ibyan ad iddu y e k k er
T anina
Igider
254
Q ui ne se bat pas avec courage
Passe p o u r pusillanim e
Tanina est échue au fa u c o n
Il ne reste p lu s q u ’à p artir
Tanina
L’aigle
255
Isyi
270 Â u h d e y -k a ccbab
ur hdirey sswab
alamma t-tagwni(
ggum Ihisab
Iddem if ger w accaren is, ihuzz ij. abrid, isrekw m aj i}. Tem m ut
Tnina.
256
Le p ercn op tère
270 A m is j e fa is vœu
D e ne p lu s ja m a is dire la sagesse
Jusqu'au jo u r
D u ju g e m e n t dernier
Le faucon prit T anina dans ses serres, la balança une fois puis
l’é c ra sa 186.
186. D an s sa liv raiso n n° 83 du 3 ' trim estre 1964, le F ich ier p ério d iq u e d’A lger
a d o n n é d eux versio n s de « T a q s it 1-ledyur» ainsi que le dénouem ent.
257
AaliAamruc
«
n At M eddur
258
AU Amrouch
Les tribulations d ’un poète
187. On trouve dans H a n o te a u , op. ci!., un poème d’A'i Amrouch (3' partie,
n° 8).
188. A it Y aala : trib u du v ersan t sud du D ju rd ju ra , au-dessus d ’EI Esnam .
A h n if ; v o ir n o te 137.
189. A gouni G u eg h ran : village des A it B o u c h en ach a, région de B oghni.
259
80 . A y din d luquf
Ikkat Aali deg At Yaala. Yiwet tm ettut tsell as-d, teby’ at-t-ay,
tenna yas : — Ruh, sutr iyi deg m aw lan iw, ad iyi tayed. Iruh Aali
aî-t-issuter. Mi bbwden ar taâm am t, credn as-d ayen iwim ’ ur izm ir
ara. Inna yas : — A nnect-a bezzaf, ur as zmirey ara. Inna yas babas
n tm ettut : — m ’ak k ’ a-f-tawid, m ulac ak-k-ihenni Rebbi ihenni yay.
Bettlen si jjw ag nni.
Ssin yer da iruh yiwen urgaz d am erkanti ad issuter tam ettut.
Ayen d-as-d cerden di taam am t ifka-t. Yay ij.
yer tag g ara A al’ A am ruc yuyal idderyel. L am aana yas akken
m azal itm eddih am zik. Yibbwas irra yer tad d art deg tella tm ettut
nni. La yekkat ; tesla yas-d tm ettut ; taaql it id ; tenna yas i wergaz
is : — Ddu yidi yer tejm aait ad waliy am eddah agi la yekkaten.
Idda yides. Tufa-n din Aali, nefta yedderyel, ur-f id iw al’ ara.
Tenteq yers :
A fsih bu le k lu f
ifyurrun tidm a s ssda
Tagm ert m m le h fu f
m i âadlen algam d ssrug
Bbwin-} at llh u f
igad ikesben ayla
Iq q im u m esh u f
i-s innan b e z z a f uya.
Akken i-s isla um edyaz, yaaqel tayect, irra yas s-usefru iwimi aa-
dlent tm eyra d usefru mi yesla :
U sem ha m em hus
b e x la f llif d nnesba
T itbirt y e f rrfu f
taalgef deg nnexba
A y din d lu q u f
w am m a laamal d Ixayba.
26 0
80. Le mariage d ’un poète
Poète intrigant
Tu séduis les fe m m e s de tes accords
L a ju m e n t harnachée
Bridée et sellée
A été em portée p a r les hom m es aux fin s vêtem ents
E t p o urvus de fo rtu n e
E t le pauvre hère est resté
Q ui a ju g é qu'on lui dem andait trop.
261
Maammer9 Ahesnaw
«
262
Mammar des lhasnawen 190
81. Parodie
263
Ikn a am aday issa-t
ibded ur iyli
Ihbes Imal di Tiklat
ksant akw wuîli
A m edyaz
C cetw a
Le poète
L’hiver
192. T ik la t : un h am eau de la rive gauche de l’oued S ahel, non loin d ’E! K seur,
porte ce n o m (on y tro u v e les ruines de l’ancienne T u b u su p tu s) ; m ais s ’agit-il ici de
lui ?
193. L’ex p ressio n co n sacrée est : « a m e r com m e le la u rie r» .
265
A m edyaz
A d a m rewley s A y e n ju r
anida-d cerreq tafukt
A d e jl im m 'a a -d iyelli
ad am t-tesseblaa akw tm urt
C cetw a
A tit uhuli
t-tim ital ik i-f ixellun
B abak n-teggid yud en
ku lyu m haat deg wnezgum
Y em m a k la tmegger mejjir
haaf s tiqqad yer Ikanun194
A m edyaz
C cetw a
A m edyaz
N e k ay lliy d igider
ur ffe k k iy deg at ttnun
11 Je fu ir a i à A g h en jo u rl9S
Où le soleil brille
A m esure que ta neige tom bera
Elle fo n d ra au sol
L ’hiver
15 Œ il de bouc
Tu es de ceux qui ruinent tout
Ton père que tu as laissé malade
Chaque jo u r s ’inquiète
Ta mère se nourrit de feu illes de m auve
Toute couverte de cautères au coin du f e u 196
Le poète
L’hiver
Le poète
31 Tel l ’aigle
L es querelles m esquines ne m ’atteignent pas
267
A s i f annerg’ ard izzer
ard as qqaren akw laayun
M i d y e b rir annem bw iw el
itij ibded y e f îeqrun
A n eb d u a-t id nezger
acu m i ye zm e r um eybun
A n id a kem je n b e y texlid
f lehdem i tebnid Usas
M a d kem tell cchur i tlid
tezg id -d felli d axem m as
A -d y a w e d yebrir uqsih
aw ed y e rB u jlil tint as.
L a rivière j ’attendrai q u ’elle baisse
Q ue toutes ses sources tarissent
En avril j e m e m ettrai en route
Q uand le soleil sera haut dans le ciel
C e sera l ’été j e traverserai la rivière
Q ue pourra-t-elle alors la pauvre
39 Où j e vois que tu es vain
C 'est que tu bâtis sur des ruines
Tu n ’as droit q u ’à trois m ois après tout
C o m m e m on quintenier'91
A v r il chaud viendra et
Tu iras à B oujelili9S y conter tes p ein es199.
269
A mur wis ukkuz
Tiqsidin
Quatrième partie
Légendes religieuses
83. Sidna Yebrahitn Lxalil
L a fê te du sacrifice approchant
I l dem anda à D ieu de le réjouir
F ais-m oi bénéficier de ta grâce
D ieu bon et p ourvois-m oi
A son réveil
I l alla conter son rêve à son épouse
L a fê te du sacrifice approchant
J ’ai dem andé à D ieu de m e réjouir
D e m e fa ire bénéficier de sa grâce
E t dans sa bonté de m e pourvo ir
Tnetq-ed Iqedra
tenna y i Z lu Sm aâil
Iguz i tthegga
tasebhit bbwas l-lâid
Tenna y a s Z lu-t
N esdaa i sid nney atwil
Y uy as taqendurt
iwennaa-s gg Itfasil
Y yay a m em m i
ass' annessireds leysil
(D dan tallit)
Iluâa-t id bu thila
d am yar icaben isim lil
Inna y a s A y aqcic
m a d kecc i d Sidna Sm aâil
H edrey i wheddad
m i gerha Ihend iffettil
B abak d a xed d a â
yaabbw el ak-k izlu s leqtil
Inna y a s X z u -t
a m m i winna d nnaâil
A n w ’ ara yezlu n m m is
Yebrahim m ‘ ad izlu Sm aâil
Iluâ-t id bu thila
d agerfiw i-s-d isawel
In n a y a s A y aqcic
ma d kecc i d Sidna Sm aâil
H edrey i wheddad
m i gerha Ihend itfettil
21 L e D ieu puissant prenant la parole
M ’a dit d'égorger Ism aël
En sacrifice licite
L e m atin de la fê te
E lle dit Égorge-le
N o u s som m es soum is à notre Seigneur c'est L u i qui sait
200. C ette fo rm u le répétée sem ble en deh o rs du texte p oétique et d ite u n iquem ent
pour é c lairer l’au d ito ire.
275
R wel a f babak
u la y y e f a k -k izlu s leqtil
In n a y a s X z u - t
a m m i winna d nnaâil
A n w ’ ara yezlu n m m is
n e ff’ ad iqqim d agujil
lïu â -t id bu thila
d adrar i y as-d isawel
Inna y a s A y aqcic
ma d keàc i d S id n a Sm aâil
H edrey i wheddad
m i gerha Ihend iffettil
B abak d a xeddaa
dag ara-k izlu s leqtil
T xilek a baba
a ssbaa iraaden iciqer
L e m m e r d laabd
ihedr-ed lady ’ a-t nenker
W agi d adrar A araja
ifban y e f fu d m is Iher
Inna y a s T-tidef
a m m i buddey d-aa-k nenker
Irba-t deg rebbi-s
izri-s iyleb laanaser
Tas a-s tehlales
ay aw hid d-rebbay m eqqw er
69 A b ra h a m d it C ’est la vérité
C o m m en t le nier m on fils aim é
I l le p rit
S u r ses g enoux en pleurant
Son cœ ur tressaillit
L e fils unique que j ’ai élevé est m aintenant grand
277
y urek ddbiha
am m ar UzV ad ak texser
Fihel akw arruz
ur ffagw ad a-k nerwel
Jm aa ledyab ik y urek
u la y y e f ak-k nyegger
Itte k k a q f ujenwi
iffi yeq q w el as f ddher
Jibril âalih ssalam
seg lëennet ay-d inuder
Y uzn as axerfi
d aberkan deg nnwader
Izla -t i tthegga
idleq i w uzyin n nnder
Lailaha il Elleh
A w hid ur trebba yem m a s
Ib d a tam urt d iy allen
itte f igenni mebla isulas
yefr ay a L leh m a nedneb
jm iâ a kka -d nefmehsas.
81 Prends garde
Q ue ton égorgemenl ne soit p a s licite202
Inutile de m 'attacher
N ’aie pas peur j e ne me sauverai pas
R etrousse ton vêtem ent
P our ne p o in t le salir
202. II y a des règles précises p o u r le sacrifice ritu el, voire le sim ple
égorgem ent.
2 03. L a tra d itio n p o p u laire, faisan t fi de to u te co n sid ératio n ch ronologique,
su b o rd o n n e to u s les p ro p h ètes au dernier d ’en tre eux : M oham m ed.
2 0 4 . Le sacrifice d ’A b rah am est brièvem ent évoqué d an s le K o ra n (so u rate
X X X V II, versets 1 0 0 et s.) : « L o rsq u ’il [Ism aël] fut p arv en u à l’âge de
l’ado lescen ce, son p ère lui dit : ” M on enfant, j ’ai rêvé que je t ’offrais en sacrifice à
D ieu. R éfléch is u n peu , q u ’en penses-tu 7 — 0 m o n p ère, fais ce que l’on te
co m m an d e ; s ’il p la ît à D ieu, tu m e verras su p p o rte r avec ferm eté.” Et q u an d ils se
furent to u s deux résig n és à la volonté de D ieu et q u ’A b ra h a m l’eut déjà couché, le
front co n tre terre, n o u s lui criâm es ? ” O A b ra h a m , tu as cru à ta vision, et voici
com m en t n o u s réco m p en so n s les vertueux. ” » S ur ce can ev a s assez sim ple, les
exégètes e t l’im ag in atio n p o p u laire o n t brodé.
279
84. Taqsit n Sidna Yusef
280
84. Histoire de Joseph
281
vi. 31 A tm aten is segm ’ ay-s sîan
imiren ay-d bdan s s e f 06
N nejm aan deg ddiwan
ar heddren deg le h s a y e f07
— Y u s e f ad y u y a l d sseltan
n ekw n ifella y d im seq q ef
206. N ey : B d a n la céu d d u n s s e f
207. N ey : K u l y iw e n Iqelb is y e k n e f
282
V I . 31 D ès qu ’ils eurent entendu
Ses frères com m encèrent à conspirer
Ils se réunirent
Et se mirent à récriminer
Joseph va devenir roi
E t nous dom iner
208 . Sic.
283
— G as-d Ihigab yef-fam an
am m ar a-t id y a w e d cc d e f
A -t-gaaled seg-gw ’ithayan
aatq it ur ixdim a y y e f
284
M ets un paravent entre l ’eau et lui
Q ue le fl o t ne l ’atteigne p a s
Sauve-le de la m ort
Épargne-le il est innocent
285
X d a a y-k a nnbi di laman
ma jegghey Sidna Y u s e f
286
Je n ’ai p o in t trom pé ta confiance Prophète
J e n ’ai p o in t défiguré Joseph
287
A k s u m ireqqen am iehlal
y u y a l am zerzur udâij214
Itm ehhen lgid ur ( iklal
ziy R e b b ’ ihedder it i-lh if
288
S on corps ja d is brillant co m m e un astre
A v a it la maigreur de l ’étourneau
Car le noble enfant avait enduré d ’intolérables peines
M ais telle était la volonté de D ieu
289
A se d su x ir n Iwizan
d sser y effuddum fella s
290
E t dents de perle
I l était tout grâce
291
T em m ey as ftq e n d u r t isfan
tegg limara g-lkeswa-s
Y u se f d ccater yellan
izzi iqleb irwel as
292
Elle le saisit par son m anteau éclatant
Y laissant une m arque
Joseph agile
F it volte-face et lui échappa
x l 23 5 In n a y a s —A wi-d ukan l
tarw iht affa di [feqdas
Ceggaat yures s-lâqjlan
sufyet-e[[-id seg m ehbas
M a ifu k-iyi seg yweblan
aqli d lew zir seddaw-as
294
x x x v iil 2 2 3 D e tant d ’hom m es
Cavaliers fantassins
Jeunes vieux
N u l ne savait le m ot de l ’énigm e
Ils étaient perplexes
E t ne com prenaient p a s
295
Ixed d em deg lemdamer
i m edden ad agwen fella s
B bw den-t id at ileym an
ya a q el arraw m babas
21 9 . N ey : M a teb b w im iyi-d a m e z zy a n
296
I l f i t construire des silos
A fin d ’y vendre du blé
L es caravanes vinrent à lui
Il fin it par reconnaître ses frères
221. V ar. :
S i vous m 'a m e n e z le jeu n e enfant
Il s’agit n atu rellem en t d e B enjam in, dont le nom ne figure p as d a n s le K o ran tout
297
A tta w im seg gwayen illan
lerzaq attâabbim kullas
M a tugim ccer iban
int as a-d cehhdent tullas120
2 20. N ey
M a u r-d id d i laz iban
d ccer a lteb n u m fe lla s
223. N ey
yerrzen tiyra r a k k e n llan
n itn i rrw i rekben fe lla s
B b w in abrid s in ezm a n
a m e k ara qablen babas
224. N ey la-s heddren ur issem has
ney ic â q f tcehm it tasa-s
298
J e vous donnerai de tout
Vous em porterez des biens chaque jo u r
M ais si vous ne voulez pas votre m alheur est assuré
D ussent les jeunes fille s intercéder p o u r vous222
2 2 6 . V ar. (2 9 5 -2 9 8 ) :
T o u s rappo rta ient des charges
E t eu x m o n ta ie n t leurs bêtes
Ils fa is a ie n t ro ute so u c ieu x
C o m m e n t allaient-ils a ffro n ter leur père
2 2 7 . V ar. :
S o n c œ u r éch a u d é le rendait f o u
228. Sic.
299
Y a k y u y a l seg gw ’ issethan
m i kettren tu zzm a fella s
230. N ey
S se lta n ilâa a xed d a m
ata tk il i d thirfa-s
— M ' ara tâ a d d id ar Imizart
a m e z zy a n n n i ze g g d as
W ' ib b w in z z a y e d d i Ikilan
a-t i t t e f ccrâa im ehbas
231. Ney U kren zz y a d a w ’izran
300
Jacob fin it p a r avoir honte et céder
A leurs objurgations nom breuses
229. Var. :
V o u s sa v e z ce q u e j 'a i enduré
301
l v ii.3 35 Ibbw i-t yer Iberg lâalyan
isdill it a f Ibadna-s
A r as ihedder y efru
itniren i-t y aaqel d gm as
Ih k u y a s ayen yedran
isal f-fe m y a r m babas
302
lvii .335 Joseph l ’em m ena dans le haut palais
E t lui révéla la vérité
I l pleurait en parlant
C ar il avait reconnu son frè re
I l lui conta ce qui s ’était p a ssé
E t s ’enquit de son vieux père
lv iu .341 D es voisins
E t de sa vieille mère
I l p r it un m anteau d ’apparat
L e leur rem it co m m e signe de lui
Ils l ’enfermèrent dans les sacs
Q u ’ils ficelèrent solidem ent
303
lxiii .371 Inna y a s Sebr a m em m i
R e b b iy e fk a -d asu lef
A tm aten ik ass ' a-tn m huy
s s s if akw a-ten nherref
Iguw b it id s w awal
m m is yellan d lâaref
l x i v .37 7 ln n a y a s X z u ccitan
nâal Iblis ad ak y a n e f
L qadaa d ssber i-t yernan
nekw ni d i Lleh ay n e tte /
R eb b ’ ar Im endad iwata
neyra tnacci daa n e tle f
233. N ey : S i jfirdus a d -d n x e r re f
L lan igad ikefTun ta q sit s tse d d a rt 60, i y e f ren n u n ta s e d d a rt agi ta n e g g a ru t :
A y a g ellid a Ihennan
a win Iferzen id y e f f a s
D â a y -k in s a t W asisban
d kra y e lla n d aassas
L g e n n e l a n n e zd e y rredw an
kra ihedren da aafu ya s.
304
l x i i i .37 1 Jacob dit Patience m on enfant
D ieu nous donne une bonne occasion
Tes frères j e vais aujourd’hui m êm e les anéantir
L es décapiter au sabre
I l reçut cette réponse
D e son sage fils
305
85. Sidna M usa
306
85. La m ort de M oïse
307
Inna ya s A hya lem luk
i Im ut îaxeddaat wim i
vu .3 7 N nan as L a jl ik y e b b w e d
a c ’ ara-k nexdem nekw ni
— gget i y ’a d rzu y s axxam
y e m m a d Iwageb a-s nini
N e k [Jrih ad ii-tefkem
ad m w adaay d Iwali
308
II dit A nges
Pourquoi la m ort félo n n e
309
XII. 67 Iruh s axxam
yer z z u g ' u k u d i[fili
Twala udm is ican
— A c u -k icuyben a aremli
M aday d ttla b ’ a y-k icqan
ssdaq i kesbey wim i
310
x ii .67 I l entra dans la m aison
O ù était la com pagne de sa vie
En voyant son visage décom posé
Q ui t ’afflige lion de sables dit-elle
S i des dettes l'inquiètent
Q u ’ai-je à fa ire de ma dot
238. Var.
S o n corps m a in ten a n t d e b o u t va to m b er
311
F aruq y u sa -d s tmara
ala ssber ay d lâali
M a tellid d ult lehlal
tarwa d arn-d ggiy suni
312
C elui de la séparation est venu en cette nécessité
Seule la constance sied
S i tu es une digne fe m m e
Prends soin de l ’enfant que j e te laisse
313
xxm.131 A taya Im elk isum a-t
s adqr l-lgid a-t inher
Inna y a s T ixxer syinna
ur din d-beddu tixxer
A y e n k k iy dgem a m m leyrur
y er L ka a b ’ i-guli ider
314
xxin.131 Un ange vint
L u i prendre le p ie d p o u r le couper
M oïse dit Écarte-toi
N e com m ence pas par là va
T out le tem ps que j ’ai p a ssé dans le m onde trompeur
C e p ie d m ontait à la K aaba et en descendait
x x v n .1 6 1 L a m ort s ’approcha
D es y e u x p o u r les ternir
M o ïse dit Écarte-toi
N e com m ence pas p a r là va
T o u t le tem ps que j ’ai p a ssé dans le traître m onde
Ils n ’ont cessé de regarder dans les livres
315
x x ix . 167 T m h lm u t
ar y i x f l-lgid a-t-tessyer
Inna ya s T ixxer syinna
ur din d-beddu tixxer
A y e n k k iy dgem a m m leyrur
seffin hizeb i-d iketrer
x x x n . 185 L m e lk y u y a l s igenwan
ar wanda wejden letmar
T-tadeffaht seg nnaayem
t-tazegzaw t bhal lexder
Y e ttf if M usa deg gw fus is
israh if idda laamer
x x x in . 19 1 S eb h a n k a W ahed Iw ahidu l
a win ifm zen ijebber
A R e b b ' a tg ed i Im ut iw
a m tin n S id n a M u sa
A /u s y e t t e f ta d effa h t
rruh id d a d i laadsa
D k r a ihedrn da aafu y a s
re zq a y a S id i rrehm a.
316
xxix. 167 L a m ort s ’approcha
D e la tête pour la dessécher
M oïse dit Écarte-toi
N e com m ence p a s p a r là va
T out le tem ps que j ’ai p a ssé dans le traître m onde
E lle n ’a cessé de répéter les soixante chapitres du
[.K oran240
2 4 0 . S ic.
242. V ar. :
317
Daay -k s sshab ’ akken llan
rniy ak nnbi ttaher
Ternhud ddnub i ssam âin
helley R e b b ’ ad ii yesser.
Q ui ne prélude p o in t p a r Toi
E st p lo n g é dans les ténèbres de l ’ignorance
Q ui ne suit p o in t la voie de D ieu
Vit dans l ’égarement
E t la ruine
11 Un jo u r de grand m atin
N otre P rophète bienheureux
Tenait séance
Il parlait distinguait
D o u ce était sa parole
319
Isla i laayad ifretâid
indeh A Selm an Ifares
Y u y a l y e f udem i-wbrid
ifru yeëéeh h id
— F uket-iy ' i-lgiha l-lxales
M ti d rrsul qesdey-t-id
tw egb-iyi îgennet J f tm es
320
I l entendit un bruit
E t appela Selm an le Persan2AS
321
B e n h u f d udem n Ihem
tin i-d -iy’ ixdem
m i lliy yures neffaaser
51 — M eh n im ed i tm ezliw t n Ihem
am bunadem
gw aad ay ibaayr la cer
In n a y a s nnbi L hacem
— D dem t-e} ad ikcem
y e r  ic a tu zy in t n nnder
tw essim nezzeh al-t-ekrem
yurw at at-t-teksem
am er at-t-tegg a d y e n s i ccer
60 B e n h u f udem n Ihem
m i d-iqeddem
yer sshaba laasaker
322
B e n h o u f face de m alheur
En est l ’auteur
C h ez lui j'éta is écrasé
323
Iruh d webrid yendem
y u g i ddrahem
sella tem sal i d-idker
Iles n  a tm a n a-t-negzem
d uyeffus n A ali H ider
Lalla F atjm ’ a-f-neddem
lehrir is a-t-nwedder
R n u L m a d ir i a t-nehdem
m i d -ig a deg leqm ayer
81 L a langue d ’O tm an coupée
A insi que la m ain droite d ’A l i 249
Je veux m ’emparer de F atim a250
Déchirer ses habits de soie
E t enfin détruire M édine
L a belle
E t les com pagnons de sourire
A u m ilieu d ’eux le Prophète resplendissait
C o m m e la lumière du plein été
E t éclipsait le soleil m êm e
251. Sic.
325
Iruh d webrid yen d em
y u g i ddrahem
seffa tem sal i d-idker
— M a tm d a m tig ’ a tent nexdem
m ulac adriz d Im enkw er
Tit n B ub ker a f-n a a d em
irna anqeddem
s adar n Sidna À umer
Iles n  a tm a n a-t-negzem
d uyeffus n A ali H ider
Lalla F atim ’ a-(-neddem
lehrir is a-t-nwedder
R n u L m a d in ’ a f-nehdem
m i d-zga deg leqm ayer
81 L a langue d ’O tm an coupée
A insi que la m ain droite d ’A l i 249
Je veux m ’emparer de F atim a2,0
D échirer ses habits de soie
E t enfin détruire M édine
L a belle
Et les com pagnons de sourire
A u m ilieu d ’eux le Prophète resplendissait
C o m m e la lumière du plein été
E t éclipsait le soleil m êm e
251. S ic.
32 5
W al' ibaayr a-t-ensellem
im i yurney i d-ihujer
326
N o u s ne pouvons p a s abandonner le chameau
I l s ’est réfugié près de nous
N o u s ne p o u vo n s p as abandonner le chameau
P u isq u ’il croit en le Prophète im peccable
N o u s ne p o u vo n s p a s abandonner le chameau
N o u s serions sujets à la réprobation
252. Ali était fils d ’A bo u -T aleb, frère d ’A b d allah , lui-m êm e père du Prophète.
Voir no te 48.
327
R n u L m adin ' af-f-ihdem
m i d-zga di leqm ayer
S id ’A a li m i yetbessem
seg-gir lexsem
ur t-yaagib lehdit inetqer
Iggul s R e b b i ddayem
ar ten nedhem
yas nek sshaba ulayyer
Izra imanis d i Z e m ze m
di Igennet irw ’ amenter
129 A l i sourit
Ces propositions insensées
E t incongrues le piquaient
I l ju ra Par l'Éternel D ieu
N o u s les enfoncerons
N o n m o i seul sans les com pagnons
Vous verrez ce q u ’ils subiront
Entre les deux prières de l ’après-midi253
253. D o h o r : p rière d ’une heure de l’après-m idi. A ser : prière de tro is heures et
dem ie environ.
254. Z em zem (p u its de), dit aussi « puits d ’Ism aël » : puits sa c ré de L a M ecque
au sud -est de la K a a b a . L o rs du pèlerinage annuel, les hadjis boivent de son eau
p réserv atrice. A la su ite d ’une rév élation, A b ra h a m co n d u isit sa fem m e A gar et son
fils Ism aël au d ésert où il les ab an d o n n a. Ils allaien t m o u rir de so if q u a n d jaillit
dev an t eux m ira cu leu sem en t une so u rce qui d ev ait fo u rn ir plus tard l’eau du puits
de Z em zem , a u to u r d u q u el vinrent s’installer plus ta rd les trib u s A m alékites.
329
— M a tw alam ay neffeyleb
yelqet Ibab htilt as
y e f ibaayr m i y-d-inuseb
Im ut attagw arfellas
S id i A ali m ti d-yeqleb
isla-d i llqayeb
izzi-d s w udem am yilas
S i tw enz ’ i-t id igerreb
inefd it tebda ssura-s
330
S i vous voyez que nous som m es battus
Prenez soin de barricader la porte
Car le chameau en choisissant notre alliance
Va causer bien des m orts
Puis A li attaqua
M ais le trait alla s ’enfoncer en vain
D e sept em pans dans la terre
En revenant A li
E ntendit le reproche
Il f i t volte-face et tel un lion
Prit son ennem i p a r le toupet
E t l’abattit le dém em bra
331
Ik k e r laayad terrebreb
m e k k u l wa ijuneb
ja r iy y a twennaa di llbas
Tenna y a s A bnu Taleb
ayen teb yid a-k id y a s
Inna y a s Welleh m a neskaddeb
nebya anteyyeb
tarbaat im ejhal atas
Ik k e s-d s s if is si Iqelb
iwet ben Ikelb
m n a se f i-gebda ssura-s
l - l 256
M ais quant à prononcer la fo rm u le ja m a is 257
A l i dégaina
F rappa le fils de chien
E t le fe n d it en deux
333
Ik k e r laayad kulw a yerkeb
yer A a li H ider zzin as
Ib d a ten irkwe! si rrqayeb...
334
A u milieu des cris ils m ontèrent à cheval
E t entourèrent A li
Il leur coupa les jarrets à tous258...
2 58. Le poèm e est év idem m ent inachevé. II a été pris à deux so u rces : une orale
(Salem A it M a am m er : vers 1 à 137 et 2 0 7 à 212 et une écrite (m an u scrit de G an a
Ait M aam m er). D ’au cu n s l’a ttrib u e n t (san s d o u te à to rt) à M o h an d Saïd des Ait
M elikech (v o ir n° 101).
335
A m ur w is sem m us
Limon
Cinquième partie
D ans les légendes précédentes, le merveilleux a sans doute autant
d’im portance que le dessein avoué d ’édification. Simplement, les
héros de la légende sém itique, à caractère presque exclusivement
religieux, occupent tout le cham p qui en d ’autres cultures revient à
des types différents : le guerrier, le sage, le saint, etc. Il s’agit là en
quelque sorte d ’une m ythologie classique, qui puise ses sources en
deux dom aines qui dans l’im agination populaire ont fini par se
fondre en un : la légende biblique (en particulier les trois
« prophètes » : A braham , Joseph et Moïse), la légende islam ique (en
particulier groupée autour de deux personnages : d ’une part le
Prophète et ses com pagnons, d’autre part Ali et ses im parables
prouesses).
L’ensem ble avait fini par constituer un corps de légendes codifié,
que l’éloignem ent géographique et chronologique, les miracles
conventionnels, le caractère hors pair des héros (à la limite entre
l’héroïque et le divin) reléguaient dans une zone relativem ent étroite
et ludique ; pour beaucoup, c’était de la littérature.
M ais, quelles qu’en soient par ailleurs les raisons (fonctionnelles,
historiques ou les deux), la religion constituait aussi une part
im portante de la vie quotidienne du groupe. Les K abyles ont
consacré à la façon dont ils la vivaient une notable partie de leur
production poétique.
C ontrairem ent aux légendes évoquées dans la partie précédente,
les thèmes ici traités ne sont pas ceux d ’un islam classique, mais la
foi telle qu’elle est réellement vécue par l’im agination populaire,
celle où les saints et miraculeux intercesseurs entre A llah et ses
339
créatures tiennent une grande place, celle où les pratiques et les
valeurs m ystiques ou thaum aturgiques tendent de plus en plus à
envahir la nudité rationaliste de la tradition coranique.
M algré la brève (et prestigieuse) exception de « tjuhid »
(n° 87), l’aspect le plus rem arquable du genre est que la vie pèse ici
de tout son poids de chair sur les élém ents d ’une vérité im person
nelle parce que révélée. A u vrai, la pratique quotidienne et la
production qui la rend ou la sublim e donnent vie à un corps de
doctrine qui sans elles ne serait justem ent que cela. D e là, contraire
m ent au prosaïsm e didactique de quelques-unes des tiqsidin
précédentes (celle d ’A braham par exemple), la valeur littéraire
ém inente de quelques-unes de celles qui suivent.
H istoriquem ent, ce type semble être la résurgence de plus en plus
envahissante de croyances et d ’attitudes anciennes face à l’ortho
doxie d ’une religion im portée, avec toutes les form es de com prom is,
d’osm oses, voire d’équivoques, que le contact pouvait provoquer
dans la réalité. Les m arabouts les plus renom m és ont presque tous
com m encé clercs et fini thaum aturges ou prophètes. Ainsi en est-il
ici même de Sidi M hem m ed-ou-Saadoun (cf. n os 92 et 97). Mais
l’exemple le plus probant et en même tem ps le plus prestigieux est
celui du fondateur de la confrérie R ahm ania, dont on ne sait plus
très bien lequel est chez lui le plus essentiel, du charism e et de la
science.
Sidi M hemm ed ben A bderrahm an ben A hm ed Bou K obrin est né
entre 1715 et 1728 dans la tribu des Ait Smaïl. Il suivit d ’abord les
cours de la zaouia de Cheikh G o u arab (A it Iraten), puis alla à Al
ger parfaire son instruction. En 1740, il va faire le pèlerinage de La
M ecque, au retour s’arrête au C aire, où il suit pendant de longues
années les cours de M oham m ed Ben Salem A lhafnaoui, grand
m aître de l’ordre des K helouatia, auquel il se fait lui-même initier.
Le m aître le charge de m issions de propagande aux ïndes et
surtout au Soudan, avant de lui donner l’o rdre de rentrer en Algérie.
Il vient s’installer aux Ait Smaïl (1770) et y prêche avec grand
succès. Il fonde l’ordre des R ahm ania qui bientôt s’étend à toute la
Kabylie et au-delà. Il va ensuite enseigner à la mosquée du H am m a
près d’Alger. A ccusé de schisme, il com paraît devant un conseil
d ’oulém as présidé p ar le mufti malékite H adj Ali Ben A m iné pour y
justifier ses prétentions et pratiques extatiques (révélations,
songes...). Les populations du D jurdjura m anifestant leur soutien à
Sidi M hem m ed, le gouvernem ent turc, peu soucieux de susciter une
situation aux conséquences imprévisibles, fit rendre un arrêt
favorable au cheikh.
340
Sidi M hem m ed revint aux A it Smaïl ; six mois plus tard, il réunit
ses adeptes et leur désigna pour son successeur Sidi Ali Ben Aissa
Almaghribi. Il m ourait le lendemain de cette investiture (1793).
Pour éviter de créer un pôle de rassem blem ents dans une zone
largement irrédente, le gouvernem ent turc résolut de récupérer à
Alger les restes du saint. U n groupe de khouans algérois se rendit
aux A it Smaïl à cet effet. Il se heurta à l’opposition déterminée de la
population, m ais prétendit néanm oins avoir rapporté le corps du
saint qui fut inhum é au H am m a, où on lui construisit une koubba et
une m osquée. Les Ait Smaïl soutinrent quant à eux que les restes de
Sidi M hem med se trouvaient encore dans la tom be quand ils
l’ouvrirent, ce qui valut au saint son surnom de Bou Kobrin
(l’hom m e aux deux tombes).
341
8 7 . T a q sit n tfuhid
342
87. Méditation sur l’unité de Dieu
262. D ieu.
263. O n peut reg re tter que le ra p p o rte u r (Salem A it M aam m er) ne co n n aisse que
ces q u in ze vers d ’un poèm e q u ’il d it lui-m êm e être b eau co u p plus long et q u ’il tenait
de son père. T a n t la lan g u e que le ry th m e (7-7-3) et l’in sp iratio n sont ici orig in au x .
343
W in ibyan ur ifmerrit
abrid n [fu b a yen jer
L e fw a y e d yu r R e b b i ggw tit1(A
yas win ur n e b y ’ ad ittjer
iv .2 1 A q l i f f Ibab d ssa si
w i-k iqesden ad iâam m er
K fu y i-d m aday uiansi
ay axezngi l-lm edm er
y n u y i ddheb leflusi
leyna ur itbaa lefqer
345
vi.33 L aka yen z za d ixuss-i
waaren fe lli tnqc n cher
Tanefsit tefâakkis-i
tetfaru y i deg ddrayer
Teqqar A wlidi sinf-i
tura m azal-k d ssy e y y e r268
346
vi. 33 M ais j e n ’ai ni les m oyens
N i la fo r c e de marcher douze m ois
M on cœ ur devant m o i dresse les obstacles
E t dénom bre les épreuves qui m 'attendent
I l dit Laisse donc
Tu es je u n e encore
347
Jebden-d tfu b d asusi
serredn iyi deg Imehcer
U ysey w ’aâzizen y a y s-i
ar y u m lehsab annem zer
272. Sousi : a u te u r d ’un tra ité d ’astro n o m ie et d ’un a u tre de m ath ém atiq u es, qui
étaien t enseignés d an s les éco les coraniques.
349
Hmed Aarab Ggiyil h-Hemmad
89. Lm ursel
350
Ahmed Arab d'Ighil Hemmad
89. L’Envoyé
Ahmed A rab était déjà très vieux et n ’avait pas d ’enfant quand il
vit en songe un ange lui prom ettre que, s’il faisait un poème à la
gloire de D ieu, un fils lui naîtrait. Le poète com posa sur le sujet un
poème qui ne nous est point parvenu. U eut bientôt un fils auquel,
convaincu que lui-même allait m ourir bientôt, il d onna son propre
nom 273, Ahmed.
L’enfant grandit et, quand il fut adolescent, s’engagea dans une
troupe de pèlerins qui devaient se rendre à La M ecque dans l’année.
Le m om ent venu, il p artit avec ses com pagnons.
Q uand les pèlerins revinrent, Ahm ed n’était pas avec eux. Ils
racontèrent q u ’arrivé à La M ecque il avait été tellem ent ébloui par la
pom pe de la m ilice turque qui assurait la garde des lieux saints qu’il
s’y était engagé.
D ouze années passèrent. La treizième, quand les pèlerins se
préparèrent à p artir pour La M ecque, le poète leur dem anda de
s’enquérir d’Ahm ed. U com posa à cette occasion ce poème,
chronologiquem ent le second, m ais qui passe aujourd’hui pour la
prem ière partie d’« Elmoursel ».
273. C o u tu m e co u ran te : à l’en fan t posth u m e (aw daa), on don n e le nom de son
père.
351
A arab, nnan as : — M mik igguga d aaskriw yur Tterkw ; Teffy-ed
lemhella s ttbul d lbuq d lemlef, idhec, iruh igguga yursen. Di lweqt
nni d Tterkw i gettkellfen f lehkwem n tm ura Gginselmen m erra. D
laasker nnsen i gej:,tâassan f Iheggag di Lkaaba.
Iqqim Hm ed A arab t-tm ettut is deg w yilif d am eqqw ran. Ar
tragun, aseggwas ittabaa wayed, arm i bbwden tnac. Wis tlettac,
mi-y u'/alen Iheggag, iwessa ten um edyaz, inna yasen : — Z ret m’ at-
tafem lexbar n Hmed. Imiren ibbwi-d taqsit-a :
2 74. N ey :
isajfen nnig lehwari
(et les rivières par-dessus les m aisons)
2 7 5 . N ey :
geddac n alef d Iqari
(avec des m illiers d ’étu d ian ts)
N ey :
tneyya u xemsin d Iqari
(où so n t ce n t cin q u an te étu d ian ts)
352
I
m. 13 A lexandrie t'apparaîtra
M aison par m aison
Puis va vers L e Caire
A ux beaux remparts
J u s q u ’à E l A zh a r
O ù tu trouveras une fo u le d ’étudiants
353
iv. 19 A brid yer C cam yeh jer
ddu deyw ri
Lfèamaa h-Hsen im zeyyen
awi-d lenwari
S ellem -i y e f sshaba lehrar
S id i A abdellq M ya w ri
2 7 6 . N ey :
(33) ata y iz ri-w la i{ru
la ism idri
tit-iw am ennda n te/su t
n ey leh w a deg tebrari
279. u rd a : a k k a !
354
iv. 19 D e là le chem in f u it vers D am as
Tout droit
D e la m osquée du beau H assan211
R apporte des fleu rs
P orte m on salut aux saints im peccables
A S id i A bdallah M e g h a w r f 78
355
ix .4 9 Y aam ' u sekku d iss nzerr
indel y iz r i
I x f iw icab ikesser
seg twesri
M e y y a u xem sin cher
ikm el laadad ur t-nezri
356
ix .49 A veugles sont mes y e u x qui voyaient
É teint m on regard
M a tête est chenue battue
D e vieillesse
C ar voici cent cinquante m ois
Bien com ptés que je ne l'ai vu
282. C e tte stro p h e est p ro b ab lem en t am putée des deux h ep tasy lla b es finals.
283. L a d ern ière stro p h e provient d ’un cah ier m an u scrit, m ais ne se trouve dans
aucun e des d eu x versio n s o rales qui o n t servi à é ta b lir le texte d ’« E lm oursel ».
357
Mi-d uyalen lheggag rran-d axbir. N nan as : H m ed im m ut. Iffey
lâasker n Tterkw ad atraren tarb aat Ibedwiyen la yesqittaayen i
lheggag, m lalen, m yuttafen, wten-d Ibedwiyen, leqfen H m ed, immut.
Ar ijru H m ed A arab t-tm ettut is arm i ddreylen i sin.
D ag’ a-d nales tahkayt, am m akken J-id jâaw aden. Yibbwas di
tnafa dayen ibedd-ed lmelk wis m ertayen yer Hm ed A arab, inna
yas : « Lemmer atm eddhed nnb’ ar m eyya (m ehsub m eyya tsed-
darin) a-k-d awiy H m ed a-t-tezred. Ikker um edyaz, ihka yas i-t-
m ettut is. T enna yas : — Yalleh, bdu !. Ibdu H m ed A arab ar-d
iftawi am ur agi wissin n teqsit 1-Lmursel. T aseddart tettabaa
tayed, arm i yebbwed y e r tis tlatin (afir 180), ikecm-ed lmelk, isself
asen i-wudem nnsen i sin, llint wallen nnsen. M uqlen, w alan zdatsen
nnâac, izzel degs lmegget, mi qerrben yers ufan d Hmed. A r ssik-
kiden degs, arm i t-rw an s tm uyli, ixfa lexyal zdat wailen nnsen,
qqimen.
Imiren ikemmel Hmed A arab taqsit is arm i tfuk.
Lemdeh wissin
n .7 F ellak ay neffkel
attinid A q li aya
Tem naad-i seg lehwel
u zekka isaab m raya
A s m ’ ara nfasel
ar k-afey a nnbi d laanaya
358
Les pèlerins à leur retour rapportèrent la nouvelle : un groupe de
l’arm ée turque, chargé de la garde des lieux saints, s’était porté
contre une bande de Bédouins qui détroussaient les pèlerins dans le
désert. Pendant l’engagem ent, Ahmed avait trouvé la mort.
Les deux vieillards pleurèrent leur fils m ort ju sq u ’à en devenir
aveugles tous les deux. Puis une nuit, de nouveau, le poète vit en rêve
le même ange se présenter à lui et lui prom ettre que s’il com posait un
poème de cent strophes à la louange du Prophète, il allait lui
rapporter Ahm ed et il le verrait.
Ahmed A rab se leva et com posa le poème suivant, chronologique
ment le troisièm e, m ais qui passe pour la deuxième partie
d ’« Elm oursel ». Il avait fini la trentièm e strophe au milieu de la nuit
quand l’ange à nouveau se présenta. Il leur passa la main sur les
yeux, qui s’ouvrirent. Ils virent devant eux une civière avec le corps
d’A hm ed. Q uand ils se furent repus de la vision, elle disparut.
Ahmed A rab continua son poème, dont nous n’avons probablem ent
gardé q u ’une partie.
II
359
iv .19 Sseltan Ikam el
m u l zzeh w a Im aweyya
A a z z a waâjel
am weqran deg laalya
K u lc i s lem fasel
ila-{ i lazaliyya
vi.31 M u h em m ed lefdel
ssahib ddehraw iyya
W iyes ara njem m el
andakwen a hel nniyya
Ized yen lejbel
iâamren Ixaliyya ?
360
rv.19 II est le Parfait Souverain
L e M aître de la jo ie
L ’A im é l ’E xalté
L e Suprêm e l ’A ltier
L e grand ordonnateur de tout
J u sq u ’à l ’éternité
v i.3 1 M o h a m m ed l ’Excellent
L e M aître de la vérité évidente
Q ui évoquer encore
Où êtes-vous hom m es de naïve fo i
Q ui habitez les montagnes
E t peuplez les déserts
361
H e d m ’ad ak izgel
m i wtert adrar teddu ccedya
362
Infaillibles tireurs
Q ui fo n t voler en éclats la roche visée
x. 55 M es y e u x aveugles
C oulent com m e auges pleines
J e suis oppressé
A in s i le veut m on cœ ur
A ja m a is éteint
A beau parler qui n ’a p o in t d ’enfant
363
x ih .73 y e r lyerb ay nehm el
abrid inu L em d iyya
A r d dduy s errjel
y ur lecyax at leqraya
yu r a yt Ijedwel
a t lurad dm itiyya
x iv . 79 S id i A a y s a a fd e l
bu qwebrin tniniyya
yers i-gteddu jjm e ï
ddu ke ë d zza w iy y a
A c h a l yers n jjm e l
bu qwebrin ssehriyya
xv.85 S id i A am er u-A ar
dderya-s d Ifatya
W annuy a nnw ayel
d Laarban d i kulliyya
D rrijal nnxel
iteffen ttem riyya
364
xiii .73 P uis vers l ’O ccident j e m ’élance
Su r le chem in de M édéa
Je m e rendrai à p ie d 193
C hez les doctes clercs
M aîtres des talismans
E t de la m ystique D am iettaine 296
x v i.9 1 C heikh Sm a ïl
Ben A bderrahm an 301
J ’en appelle à toi
Très vénéré qui veilles sur la parole révélée
365
yer W egw ni qibel
A t B ubhir akw d qidya
x v i i .9 7 A m c e d d a l lewwel
ay at tm urt y e f zza w liyya
A y t W a d Ssahel
d a yt H n if Iwaliyya
A r tekksem lebxel
yitt-i : d asehlan uya
366
P uis j e passe à A g o u n i K ibeP 02
C hez les hom m es de B oubhir et d ’E lkid ia 303
367
L a kka ten y e f ttbel
d Iqedra Iw ehdaniyya
y u r R e b b i yew sel
izerr nnbi di rrewya
x x i. 121 Tfrey A tA a y d e l
d S id i H m ed-u-Yehya
R n iy L eqbayel
d kra b b w ’ iluzem lehya
D ddheb lehnayel
m ’atnaared a Sid i Yehya
x x i v .13 9 A t W a y lisya a d el
la ceôëan m eb yir rrya
A d rnuy A t Y em m el
A y t M z a l Im aatniyya
368
Q u i battent tam bour
E t d o n t la puissance est sans pair
I l se tient près de D ieu
I l voit de ses y e u x le P rophète
369
D A y t Lgelgel
A t Q ulu at B jaya
318. Y usa-d : ak k a.
370
L es hom m es de D jidjelli
D e Collo de Bougie
371
N n a b a t d i rrmel
yessen ay tetfebbwa (fakya
372
G erm er les plantes dans le sable
E t m ûrir les fr u its
373
W ’ issarden ye y se l
im ha la ddnub la ssiyya
374
Q ui s ’y lave et s ’y purifie
E fface tous ses péchés toutes ses peines
x x x iv . 199 A im é et glorieux333
T o i qui n'as p o in t d'égal
Je T ’im plore p a r l ’E n v o y é
A la fa c e rayonnante
A nous tous qui som m es ici pardonne
E t sauve-nous de la géhenne334.
375
y e f Lm ursl ggan-d im ezwur’ aw al, a-t id nales akken t-id #al-
sen. Q qaren : m a yella lbâad deg gw em kan 1-lxuf, yili yessen taqsit
1-Lmursel, m i-| id inna ad im naa ur-t i$ay ur-t ibellu. D Imitai,
m a la y e ||a fa r w erbaa, ilaq, mi-d ihder ad ttsen, win J-issnen
degsen a -4 id yini, m ulac ddnub fellas d am eqqw ran.
Q qaren ilia yiwen um eksa ikess tajlibt is di Ssehra. M kul tam ed-
dit, qbel ad ittes, a-d yini Lm ursel. N e g ’ ad-d i£tawi taqsit, ssur ad
itezzi i-tejlibt ; mi tfuk teqsit, ssur idewwer, yemdel. Yiwen yid
am eksa yebbw i-t yides qbel af-t ifuk. Iqqim ssur illi s w annect akken
ixussen i teqsit attekm el. Iruh-ed wuccen, yufa tabburt nni di ssur,
ikcem, ar ixenneq deg gulli. A m eksa yendekwal-ed si tnafa, immek-
ti-d t-teqsit ur-jt ifuk ara, ikemmel ayen d-iqqim en degs. Skud isawal
ssur ye,tkemmil, idewwir arm i yemdel. U ccen irza deg gulli ayen
ibya ; iruh ad-d ifïey ; inuda tabburt, ur-J: y u fa ra . A m eksa yuki yi
des, y ettf it.
376
Le poèm e d ’Elm oursel a été introduit aux Ait Yenni sous forme
m anuscrite par un m arabout de T aourirt M im oun. Le m anuscrit a
disparu et la tradition orale qui a conservé vingt-trois strophes de la
2 e partie est probablem ent incom plète333.
La nature du sujet a contraint le poète à introduire un nom bre de
termes arabes relativem ent grand : Ahmed A rab, s’il n’était pas
lettré lui-même, devait à tout le m oins fréquenter des lettrés.
L a traditio n fait un devoir à tout homm e qui voyage en groupe de
dire « Elm oursel » avant de dorm ir s’il le connaît, la récitation ayant
pour vertu de préserver de to u t danger. On rapporte à ce propos
l’histoire du berger qui, conduisant son troupeau à travers le désert,
chaque soir avant de dorm ir récitait « Elmoursel ». Au fur et à
m esure que le poème se déroulait, un rem part s’élevait en cercle
autour du troupeau. Au dernier vers, le rem part se ferm ait, le berger
pouvait dorm ir tranquille. Un soir, vaincu par la fatigue, il s’était
endorm i avant d ’avoir achevé la récitation : le rem part resta béant
de la partie m anquante du poème. Le chacal en profita pour entrer
par la brèche. M ais le berger, s’éveillant brusquem ent, se rappela
qu’il n’avait pas achevé la récitation. Il se mit à dire les vers
m anquants... Le rem part se ferm ait à mesure. Le chacal repu
chercha en vain une issue et fût pris336.
A ssista n ts écoutez-m oi
E t vieux ou jeu n es p o rtez témoignage
33 5 . Si p a r « cen t » l’on en tend cent d istiq u es, la 2 ' p artie se rait com plète (elle en
a ici 102). S’il s’a g it de cent stro p h es (meyya iseddarin), il lui m an q u erait
q u aran te-six stro p h e s (2 7 6 vers). D e to u te faço n , les vers isolés qui nous sont
p arv en u s so n t la p reu v e que la version ici rap p o rté e est incom plète.
33 6 . U n e pièce d e th é â tre tirée d ’« E lm oursel » a été jo u ée avec succès p a r une
tro u p e de sc o u ts alg érien s en 1945.
377
Ur tenfaa Ihedra s rrya
di Ictxert ulac lehbab
M a ya a d el W ewdaa
d wefsih M uh en d A arab.
C ar de quoi servent les vaines paroles
E t après la m ort y-a-t-il encore des parents
A o u d a a dites-m oi est-il l ’égal
D u p oète M ohand A r a b 337.
380
Yemma Khedidja
3 3 8 . Z o u a o u a : v oir no te 63.
3 3 9 . T a m g o u t des Z o u a o u a : voir n o te 286.
3 4 0 . Y em m a K h ed id ja é ta it une derwich (inspirée de Dieu).
381
J x ilw a t a sya d i lâulam
taw im abrid m i-t-ssnem
ô g e t R e b b i deg c c y w e l is
ad y e g s id ’ i-gestehsen
N e ffa d ahnin d irahim
Ihila y e x ze n yessen
A Y em m a X lig a T ukrift
aqlay nusa-d akw yurem
yas hesb ay seg gwarraw im
akniw en attezlu d yiw en
T erra yas :
A R e b b i jk - e d am eëëim
deg g e n n ’ a d y e g aalawen
A tterg el T izi k-K w ilal
d ttilin Igaw aw en
T am u ssn i nnsen d a y ilif
lem hibba nnsen d asawen
M a tebbw im -d azal n sin
aaddit attezlum yiw en.
382
eux. U n des tolbas lui en faisant la rem arque, Yemma K hedidja,
to u rn an t toujours sa m eule341, lui répondit :
383
Sidi Mhend-u-Saadun
o
384
Sidi Mhemmed-ou-Saadoun
385
Z id it leklam
y e f R m l M uhem m ed
I-y-iggan aahdey R eb b i
m a ittef-i w a zz' annebded
A r ifmeddih Sidi M hem m ed arm i yelha was, izzi yer weqcic inna
yas : — A mmi, ssuq tu ra qrib ad ifru, ad ruhey ad zrey m ’ an-n
ssiwdey kra. Ikcem ssuq, yaadda yer rrehba n ennaam a.
Y aaddi s aaric :
Gedha s-'errsul
d sahebna M u h em m ed
386
D e la halle aux blés on appelait
— S id i M hem m ed-ou-Saadoun
D e grâce libère-nous
L e soir tom be nous som m es pressés
Q uant à l ’argent
T u nous en as donné en trop
I l dit Gloire au Prophète
M o h a m m ed notre am i
La même scène se répète à peu près à tous les étals. Les derniers à
appeler Sidi M hemmed furent les m aquignons. Le poète prit un
m ulet sur lequel il chargea toutes ses emplettes. C ar le jeune homme
à qui il avait tout le jo u r chanté les louanges du Prophète était en
réalité un ange qui, ayant pris ses traits, l’avait précédé au m arché et
avait acheté to u t ce dont il avait besoin.
L a belle-sœur de Sidi M hemmed, le voyant de loin venir, alla
trouver la femme du poète : « Ton m ari revient avec un mulet
chargé. Il a sûrem ent em prunté pour faire toutes ces emplettes. Vous
allez être contraints de vendre ju sq u ’à votre m aison. » La femme de
Sidi Mhemmed se leva aussitôt et vint à la rencontre du poète :
387
alam m a tezzenzem axxam atruhem atzedyem aacciw . T am ettut
tem m ugr argaz is ar tebburt :
A W saadun bu ddyun
tebbw id-d irden d uksutn
i-wserdun m aday t-nedm aa346
Id d em tabuqalt
yer Ixelwa nni deg ifrekkaa
Yufa-n rrsut
izwar it id yer Imudaa
Inna y a s :
— A W saadun zzw a g ik
yer tm es aa teddu qadaa
Inna y a s :
— B aadek a rrsul
ur ii xeddaa
Z zw a g Usaadun
anseg i k k ’ ard at-t-etbaa
Tigi d Ixalat
d sut laadad nnaqes
D ccitan i-f-id isuman
izw ar if id ar yiles
Inna y a s :
— R u h i w udm ik aafiy as
aafiy i-lwaldin ines.
346. Ney :
/ weksum maday t-nedmaa
kec ternid iyi-d aserdun.
388
O u-Saadoun toujours endetté
Tu as acheté blé et viande
M a is le m ulet qui s ’y serait attendu
L e poète p rit sa gargoulette
E t se rendit au lieu isolé de ses prières
I l y trouva le Prophète
Q ui l'y avait précédé
— O u-Saadoun ta fe m m e
Ira droit en enfer
L e p o ète dit
— P rophète fo in de ce dessein
N e m ’abandonne p a s
L a fe m m e d ’O u-Saadoun
O ù q u ’il aille sera avec lui
A in s i sont les fe m m e s
Elles ont la raison courte
Car c ’est Satan
Q ui d ’abord vient sur leur langue
389
i.l D sslaf y efk a ssi nazel
d k r ' ay y e fk in z e l
igenwan sebâa tm ura
A rrasul win aazizen
m m ley y efk a n n b ’ im ira 347
M ’ a d fe lli tertfud lehzen
laanaya-k ilezm if kra
390
i.l G loire à Toi messager
E t d ton message
Par les d e u x p a r les sept terres
P rophète aim é
D e qui cette fo is je suis hanté
Banniras-tu de m oi le deuil
Tu le dois d tes fidèles
A y at w ul icba Ifetta
d netfa y e tfa y aggur
A y at zzn a d f Imecta
at lheq gerrzen lum ur
392
v i.34 Q ui revoit le Prophète q u ’il a d ’abord p erd u 351
D evient du tout possédé et fo u
I l vit p a rm i les visions les transes
I l est malade de l ’E nvoyé
Il renonce à tous les liens
I l trouve fro id es toutes les am itiés
93. P artialités
351. C e vers fait allu sio n à l’épisode rap p o rté d a n s les deux poèm es suivants :
Sidi M h em m ed , a y a n t inju stem ent favorisé un de ses p aren ts, s’est vu ab an d o n n é
par le P ro p h è te, qui ju sq u e -là venait ch aq u e fois prier avec lui d an s son erm itage
(Ixelwa).
353. V ers o b sc u r. Il fau t lire sans d o u te : nef/a yetfay am maggur.
393
94. Lfaeq anida t-walan
Y uyal arm i sen yenna Sidi M hem m ed i-w atm aten is d wid
s-ittilin : win aa taw dem d nek ay d nnayeb nnwen, win aa
kwen id yaw den d nek aa t-iqablen.
Y a k m i sfiy y id e k a lyani
icqa y i lâabd amenhus.
D lxir ays d a m e x ta f
itekkes seg-gul Ixiq
394
94. Im partialités
395
Itegg abrid i w xew w a f
igren di lebher leym iq
Targa n ssâad ziy tella
seddu tm urt la d-fxerriq
B bw in-f a t hel nniyya
igad ikesben laatiq.
I l fra ie la voie à l'hom m e épouvanté
P longé dans la m er sans fo n d
Tant il est vrai que la source du bonheur
Sou rd de dessous terre
E t va à ceux q u ’habitent la f o i naïve
E t la miséricorde.
Lemdeh n nnbi
39 8
Éloge m ystique du Prophète
35 4 . Cf. n° 88, vers 33. Le pèlerinage à L a M ecque était une en trep rise à la fois
longue et coûteuse.
355. Le p oèm e est p ro b ab lem en t inachevé.
399
Lhag Muhend Aacur
seg  azziizen, At yiraten.
400
Hadj Mohand Ouachour351
401
1 .1 Sslaf yefk a nnbi nhem m l it
s lâad n zzit
ifettel L leh lyeffar 356
m. 19 A s n [flata tasebhit
usan-d at-trihit
bbw den-d adrar azayar363
A x u n i la d-iflehtit
am tm eddelw it
izri-s s le b k ’ am -m anzar
402
1. 1 P réludons p a r toi Prophète aim é
A u nom de l ’huile
D istinguée p a r le D ieu de p ardon 360
403
C cix nefhibbi nuys it
teqqw l as tm en zit
ruhet besslam ’ a zziy y a r
S i Tensaw t ar Taxabit
bu lxir ihubb it
bu ccer iw t as am esm ar
W ’îbyan lurad is y uy it
bu n n iyya ikubr it
y aam er ttelba s lenwar
M a iqqim d i tm sellit
lehdur is zid it
di Ibasir’ i-gefnadar ...
404
L e cheikh que nous aim ions nous ne le verrons plus
Une dalle le recouvre
A lle z repartez en p a ix pèlerins
405
W inna t-ihubben iduâ it
Igennet tdem n it
ccix M uhend-u-Lm exfar
Ih k e m laabad s Iqanun
ula di Igunun
idleb teggn as ccfiâa
A nda y e ll’ ad y ers Ihun
d eddnub ad m hun
yaâna ffuba s ssfa
406
Q uiconque aim e et suit
L e cheikh M ohand-ou-E lm okhtar
E st assuré du paradis
407
L a f y a b e n law liyya Ibennun
yellin am cilm um
h u d fella y a Imustafa
D a w i leqlub ad hlun
a ccix B en Sehnun
n ehlek tlezm ik ccfaa.
L es saints bâtisseurs s ’en vont
Ils choient com m e fleu rs d ’orme
Prophète élu viens à notre secours
Soigne nos cœ urs q u ’ils guérissent
C heikh B en Sahnoun31>
N o u s som m es malades intercède p o u r nous.
409
A mur wis sdis
Arumi
Sixièm e ^partie
La résistance
à la conquête coloniale
yef At Qasi
A y a sm i ggugen A t Q asi
nnejlan ddan s Iqis
I ten isgugen d A rum i
isrej itn id lâabd is
IW a-kw en isebber R e b b i
iktal u m u d ur inyis.
D A t Q asi ay d imawlan
d ihernak cban lehnac
A t ibeckad d ituyan
kulw a s llebsa n wultac
D im ehbas zedyen K a ya n
w ' icedhan Tam da ulac.
412
Déploration sur les A it Kaci
99. Exil I
100. Exil II
101. Tamda I
413
102. Ixaq wul iw
Ixaq w ul iw
iby ' a d isub yer Tem da
yer A i Q asi
ar at rrekba l-laya
Llqhlhed
amzurt ur âaddan ara.
414
102. Tam da II
M on cœ ur nostalgique
Veut aller à Tam da
C hez les A it K a ci
D e princière équipée
M a is las
T o u t est co m m e s ’ils n ’avaient ja m a is été.
S a ïd j e te p rie écoute-m oi
R egarde les A it K a c i
Jadis sans pairs
D u co l au col™
N u l ne leur fa is a it fr o n t
L a poudre fo n d a it leur p o u vo ir
Q uand l ’heure est venue de leur chute
Il a suffi d ’une fê lu re
Et... rien il ne reste d ’eux que leurs serviteurs.
415
Muhend Ssaâid Amlikc
1 .1 S si al y e fk a nnb ’ ay ucbih
s lâad n ttesbih
s lâad n s s e f g Imehreb
Ssla( n ttrab deg w zerzih
m i yefm errih
di tekw sart ilm ecfali
416
Mohand Saïd des A it Melikech
417
S lâad u yelm i y e ffih
iksa deg ccih
s lâad izerzer di Z ab
n. 10 R nu ttaleb m i yeccerrih
ul is d unsih
m i y e r ba zdates lektab
A y ul iw ilik d unsih
d sslaf y efk a zzin letyab
Irwala s ix fif lemdih
m h as d nnsih
am m in iheggan lektab
418
Par les m outons errants
Q ui p aissent l ’armoise
P ar les gazelles du Z a b 3Sl
419
R za n Iqum n Sutih
iy li w ezrem f-fu m u la b
A x x i wennâan as leqdih
ass l-lexm is ibda rrhab
420
N o u s avons brisé la race de S o u tih 390
C o m m e des serpents fo n d a n t sur des lézards
N o u s l ’avons repu de fe u
Jeu d i l'épouvante l ’a gagné
421
B y iy i W ru m ’ ad itih
ad fe lla s sudden leklab
422
Faites que les chrétiens tom bent
D évorés p a r les chiens
423
Lhag Rabeh
Qbel ad-d ikcem U rum i tam urt nney s yiyil, isem m a Ssi Lgudi
(seg A t Budrar) d b acay a Igawawen, iwakken as ten id issexdem.
Seggwakken lyaci fïeyn as-d d ixsimen, iruh s Iw adiyen, ibna din yi
wen lberg qqaren as Lberg Ggeslan.
Ilia Sidi Lhag A am er d lem qeddem n Sidi A abderrehm an n At
Sm aâil. Seggwakken t-hersen Irum yen, iruh ad izdey di tad d art n
Bwaderrehm an deg A t W asif. A r d-ijtas yers lyaci. Sseg A rum i sim-
mal la d-i#az, dduklen akw a-t rren, ideg im debbren d Sidi Lhag
A am er, Ccix G gw aarab (z. zl. 405), L alla F ad m a n Summer. Zed-
424
Hadj Rabah
Les événem ents qui ont donné lieu au poèm e des Islan ont eu lieu
en 1856.
Après la m ort de Belkacem O ukaci (1854), les autorités
coloniales tentent de réduire le bastion kabyle, demeuré seul
indépendant, en intervenant dans les querelles intestines, en
resserrant le blocus, au besoin par des actions armées. Ainsi
nom m ent-elles bachagha des Z ouaoua Si Eldjoudi, adversaire rallié.
L’autorité du bachagha est pratiquem ent nulle et bientôt l’hostilité
contre lui est si poussée qu’il est contraint de quitter son village et
425
men f lberg G geslan, hewsen-t. Mmis n Belqasem A t Q asi, Muhend
A m w eqran, i^tekk’ akken dinna.
Yuzzl-ed Iqebtan Difu si D draa 1-Lmizan s yem nayen 1-lgum
iw akk’ ad im naa Ssi Lgudi. Yers di Tizi n J|lata. Dehm en feîlas
Leqbayel. îrwel ar Buyni, yaared a-d yerr din f yim anis. Tebâan-t,
hubben fellas. lâaw ed irwel abrid n D draa 1-Lmizan. D dan akken di
laaqab is. Tbbwed Difu yer lberg, ikcem, irra-d f yim anis tiburra.
Zzin as Leqbayel i lberg.
Irum yen ceggaan si L e ffa y e r lejninar Y usuf s yiwet ddifizyu
l-lâasker d leslah s Ikwetra. N nuyen legwahi bbwaggur.
Mi hewsen lberg G geslan, ikker Ccix G gw aarab, inna yas : — Ma
yella da w albâad ggefsihen ad ay-d yawi y ef ak ka yedran. Ikker
Lhag R abeh (yella din) inna yas :
426
d ’aller se faire construire près des O uadia le bordj dit des Islan.
C ontre lui se constitue un réseau actif de résistance, autour en
particulier de Sidi Hadj A m ar (voir note 406), Cheikh G ouarab
(voir note 405), Lalla Fadm a de Soum eur402, Sidi M oham m ed Ben
A bderrahm an des Ait M ansour. Sidi H adj A m ar com m ence par
réconcilier les deux sofs rivaux des O uadias (A it A m ar et Ait
Y akoub), puis attaque et prend le bordj de Si Eldjoudi (24 août
1856). M ohand A m okrane O ukaci, fils de Belkacem, est parm i les
assaillants.
Cette action, ainsi que le signalent les officiers coloniaux,
m arque un tournant décisif dans l’histoire de la résistance : « La
guerre, écrit l’un d ’eux, prend un caractère particulier ; elle n ’a plus
lieu de so f à sof, mais bien de soumis à insoumis » (lettre du
capitaine D evaux, com m andant l’annexe de D ra-el-M izan, au
colonel com m andant le cercle de Tizi-O uzou, 24 août 1856).
Le capitaine D evaux, accouru de Dra-el-M izan avec un goum de
secours, est repoussé. Il s ’installe à Tizi-n-Tléta où il est de nouveau
attaqué. Toutes les tribus jusque-là contraintes à la soumission font
défection. D evaux recule ju sq u ’à Boghni où il tente de livrer bataille.
Il est contraint de battre en retraite ju sq u ’à Dra-el-M izan où il
s’enferme. « Chez les K abyles, écrit le com m andant Robin, ce fut
une ivresse générale. »
Il fallut appeler d ’Alger le général Y usuf com m andant une
division et un matériel considérable pour dégager la place après un
mois de com bats.
Après la prise du bordj des Islan, le cheikh G ouarab dem anda s’il
n ’y avait pas dans l’assistance un poète qui pourrait chanter cette
journée. H adj R abah se leva :
427
7 L a fgallan deg tin u m it
a d y a g w a r w a d if leqcer
B en A a ra b m echur y is m is
lem qam xedm en zzeyya r
S i z ik âalay rrateb is
netfa d S id i L h a g A a m e r
13 A y a n n iw iketîr-ed Igis
bu tm ekw helt tezga t aamer
A m eh m u d iban lasel is
yer lberg m i-d ikkerker
W ’ ihedren d i L b erg Ggeslan
yura-t R e b b i d imherrer.
428
7 N o u s avions fa it serm ent qu 'il y aurait chez les roum is
P lus de m oelle que d ’os
D e Ben A ra b le nom est illustre 403
E t la zaouia toujours em plie de pèlerins
So n prestige de toujours f u t grand
C o m m e celui de S id i E lhadj A m a rAM
429
Muhend m-Musa A wagennun
Irum yen kecmen-d tam urt 1-Le^fayer tikkelt tainezw arut di 1830.
Ar ttayen tim ura t-temdinin yiwet yiwet. Teqqim tm urt I-Leqbayel
t-taneggarut, ur-f id kcimen ara armi d 1857. M aca qbel 1857 bdan
tqerriben-d cwit cwit deg w zayar, ideg ilia Belqasem At Qasi di
tazzw ara inufq iten, yuyal, asmi iwala A abdelqader-u-M hidin iyli
di M aasker (di 1847), ula d n e^a istaaref s lehkwem ur izmir ar’
ad yerz. ô g a n -t Irum yen d b acaya n A am raw a. U r yaattel a ra ir-
ra-d s lexbar belli, akken rkaan idarren nnsen, la kkaten ad as
kksen lehkwem n tidej, a-s ggen kan lexyal.
Yibbwas iruh um edyaz M uhend m -M usa A w agennun yer At
Qasi. Inteq yers Belqasem inna yas : — Awi yay-d kra yef lihala
yagi deg nella. Inna yas M uhend m -M usa :
A R e b b i rr a y-d tiyallin
sut ssbib ye d d a l tuyat
430
Mohand Mousa des A it Ouaguennoun
431
Yessent i gecbeh lekm in
fxelli/ent d i Iwedyat (ney : i neccerrig)
A s m ’ ara y a ben at tism in
a-y wten w idak nekkat.
432
E lles servaient aux belles em buscades
O u p o u r couper à travers la plaine
4 10. Il s ’agit des O u kaci et. d ’une fa çon générale, de tous les résistants à
la co nq uête étrangère.
4 1 1 . Un certain n o m b re de K ab y les, p o u r ne pas su b ir la loi des c o n q u é ra n ts,
ont préféré aller s’é ta b lir en te rre d ’islam , en p articu lie r en Syrie.
433
Tura izedy if lekw m anda
s Igur d zzya d a
iqdaa d i medden akw tism in
434
M aintenant elle est occupée p a r des officiers
Oppresseurs injustes
E t qui ont nivelé tout le m onde
4 12. L a c o lo n isa tio n av ait attiré des M éd iterran éen s d ’origine diverse.
4 13. El K h e c h n a : g ro u p e de p o p u latio n s en tre l’Isser et l’H a rra c h .
41 4 . S ebao u : riv ière qui prend sa so u rce d a n s la p artie o rien tale d u D ju rd ju ra,
trav erse d ’est en o u est la plaine de T iz i-O u zo u et se je tte d a n s la M éd iterran ée à
l’o u est d e D ellys.
T a o u rg a : v illage o ù résid aien t les d jo u ad A it M a h id in e .
A m ra o u a : terre m ak h zen d ’environ vingt m ille h ectares d an s la plain e qui entoure
T iz i-O u zo u . C o m p re n a it seize sm a la s (environ 50 0 chevaux), parm i lesquelles
T a m d a , T ik o b a ïn , T a o u rg a , C h a m lal.
4 1 5 . V oir n o te 411.
435
108. Lehkw em -a yeq w a s ddraa
L ehkw em -a y e q w a s ddraa
w ' izem ren a-t im naa
s y iy il is hed m a iqerrâ it
N etfa ku ly u m di Imehna
d im etti dim a
tarwa-s gw ran-d i tw ayit416.
436
108. Le règne de l’arbitraire
4 1 7 . Le p o u v o ir co lo n ial.
41 8 . N o m d ’u n e p riso n tristem en t célèbre.
437
D ’ay guqa Iwerd a R e b b i
alam m a delbey taafert
438
L es roses m on D ieu sont-elles m ortes
Q ue j'e n sois réduit aux jle u rs d'églantier
L e vase s ’em plit se vide
M ais ja m a is ne connaît le rassasiement419
S i j e dis le Prophète au Chrétien
Q u ’il m ’abandonne dans l’au-delà.
440
La révolte de 1871
4 21. A d n an : voir n o te 2 0 5 .
4 2 3 . T a m g o u t : voir no te 286.
441
L h a g M u h em m ed A t M w eqran
d aggur ger yetran
tya b ed a ssbaa aremli
442
H a d j M o h a m m ed M okrani
L u n e p a rm i les étoiles
L io n des sables tu n ’es p lu s
443
Tam da teqqw el d ixerban
thud d iyerban
hezn a lhara 1-lqaydA ali
Iffy -e d jn in a r Siris
ifu k laabd is
heddrey a m edden teslam
A tas iw im i igzem i x f is
ur ixdim unkis
tasa in ’ af fa tennehzam
Curâan a kw d i Ikurdasis
kulw a s Iheq is
yaden i y ’ ixxam en n ttâam
I x f i w icab a m y ilis
u l iw ifnexsis
tugid a ttezzfed a ttïam
N u y asawen negg ubdis
Iqum-a d udnis
aaziz ubrid yer lehram
Tam da n ’est p lu s que ruines 427
M urs éboulés
T u p eu x prendre le deuil dem eure du caïd ,4/z'428
4 2 7 . T a m d a : v oir no te I I.
4 2 8 . A li O u k aci : caïd d e la fam ille des O ukaci.
42 9 . L a S y rie était co n sidérée, de façon un peu m y th iq u e, co m m e un h a u t lieu de
l’islam .
430. C e rez : un des g én éraux qui o n t co n d u it la lu tte c o n tre les c o m b a tta n ts
k ab y les en 1871.
445
D ssbaa issader i wallen is
iyelb it y ifis
deg m i yaagez as leklam
x .8 2 D nnfaq i y l i - d f Ixelq is
ur nefhim îamer is
tam urt akw m i d-m hakam
S i B udw aw arm i d W edris
d ill-e d A t W aylis
S i B waârarig ar L hem m a m
Isers a y-d akw d i ssikis
yern a lexm us is
iqdaa ta xb izt i L islam
K u lw a ikteb Im elk is
yerna Iwacul is
itte f ay c c ifk u l axxam
W i âarqen ad iza d s i x f is
ibeddel lâaqel is
di tejm aayt i-d-innehcam
446
L e lion baisse les y e u x
D evant l ’hyène triom phante
L e s m ots dans sa bouche se fig en t
447
Tura izedy if Ufransis
bdan lem seyris
thezned a Ihemra l-ledyam
L m ed fa a y e b d ’ aham q
72 an at Iguq
lm a l iruh di tnem dar
Igellil ggan-t m ehquq
leblad is m esruq
tam urt is te n z ’ ar am nar
448
A u jo u r d ’hui les Français l'habitent
A p rè s l ’avoir alloti
A u grand deuil du blé qui y p o u ssa it de saison en saison
449
S id i L m eh d i-u -Z en u q
law liya luhuq 439
atnaared a S id i A am m ar
A adaw g ze m t as laaruq
w ett-ef s Imecquq
iUa R ebb ' a-d-yerr [far
K fa n legwad m sa kit
tarwa n tneslit
Ihem iyli-d d aqentar
xvm.154 L m e lk n Jebla y e k k e s it
U-M weqran yeb b w i-t
tezram -t ijebbed am esm ar
450
S id i M ahdi-ou-Z erouk 443
Justes saints
E t toi S id i A m m a f444 secourez-nous
451
T -T a m d ’ ay t-tajaddit
M eqlaa iqerb it
akken i debxen lecwar
K fa n legwad m sa kit
tarwa n tneslit
yaden iy at llebsa l-leyyar
452
T am da était le haut lieu
Près de lui M ekla 449
Partageait avec lui le conseil
Passés sont les nobles pauvres d ’eux
L es enfants de pure race
Vêtus de brocard m e peinent
453
Tura yezg a -d iderref
m i d-nusa n ed a a f
ddenya te[neqlaba
D a a y -k in s L hacim i
B ubker d A a li
d k r a y e y ra n izem m em
L a nek la kra da yuri
tekfu d lem hani
Igennet a d degs nnaam.
4 54
M aintenant on l ’a m is à l ’écart
Car nous som m es sans fo r c e
E t changeants sont les jo u rs
455
Amawal
Lexique
457
Amatar
Index
459
A w rir A t W a y lis 84 Igaw aw en 94, 114, 170, 206, 380, 382,
A zefïu n 69 418, 424
A zw aw G gezw aw en 90 Igufaf 146
ly il-h -H em m ad 205, 350
ly il-n -tse d d a 205
B areddu 86 Ihesnaw en 263
Behlul 366 Illulen U m alu 133
B elqasem 106 Illulen U sam m er 205, 368, 42 0
B elqasem -u-Q asi 42 5 , 430, 436 Ilm ayen 70
B en-A al’A c rif 204 Im ceddalen 350, 366, 380
B en-A ali A t Q asi 20, 65, 76 Isehnunen 409
B erber 74 Iw adiyen 187, 424
B gayet 3 70 Ixligen 188
B u â ab d erreh m an 4 24 Izarazen 83
B u âam ran 199 Izerru q en 151
B ubhir 126, 357, 366, 406 Izerxfaw en 74
B u b ker 32 5 , 4 54 Izw aw en 20, 4 0, 9 0 , 92, 144
B udaw ed 4 54
Budw aw 44 6 , 448
B uhinun 406
B ujlii 2 0 5 , 268 Je b la 450
B w aararig 365, 44 6 , 452 Jeddi M an g eliat 176
C cam 3 54, 37 0 , 444 L aarb i at B jaaw d 17, 18, 31, 48, 174
C cix A h ed d ad 34 1 , 4 4 9 L aarb i-u -M u sa 148
C cix G g w a a ra b 3 4 0 , 4 2 4 , 428 L aarc U belqasem 94
C cix M u h e n d -u -L h u sin 9, 12, 30, 42, L b acir A m eilah 10
43, 4 8 ,'5 6 , 210; 4 0 0 , 404 Ibarud 96, 102, 4 1 4 , 4 2 0
C cix M u h ed -u -L m ex far 4 0 0 L berg G geslan 42 4
C cix U b elq asem 204 L edyur 226
lehm am 92, 120, 122, 264
L em diyya 364
F a d m a n S u m m er 189, 424 L eqser 356, 366
F a tim a 324, 3 30 L e ^ a y e r 62, 76, 120, 206, 266,
362, 4 2 6 , 432
Lgelgel 370
L hag A a m e r A t Q asi 51, 185
G e ld a m a n 368
L hag A t U m y a r 176
L hag B u jm aa A t Y a a q u b 187
L hag L m ex jar A t S âid 31, 48, 51,
H em za 24 5 7, 184
H end Af-.fi-Sâid 82 L hag M uhend A a c u r 9, 18, 40 0
H en du 80 L hag M uhem m ed À t M w eq ran 341,
H en d -u -S saad i 156 442, 450
H m e d -A a ra b G g iy il-h -H em m ad 18, L hag R a b eh 31, 4 2 4
350 L hem m am 147, 44 6
H m ed A t B acir 174 lhenni 36
H m ed b u -ccn ay aa 92 L h errac 128
H n if 182, 206, 25 8 , 366 L husin A t B acir 48
L liusin A t L hag A a ra b 48, 187
L husin U zen n u c 51, 185
Iâag gacen 4 16 L m isu ra 174
Iâazzu zen 400 L m ursei 12, 350
Icerâiw en 43 L qalus 166
Iflisen 74, 88 L xecna 434
460
M a am m er A h esn aw 18, 126, 262 Sidi H m ed -u -L m u h u b 66, 116
M a am m er n S aay d i 401 Sidi H m ed-u-Y ehya 368
M a d a g a sc a r 18 Sidi Lgudi 185, 424
M aser 29 4 , 300, 344, 352 Sidi L hag A am er 424, 428
M eq laa 452 Sidi L m ehdi-u-Z erruq 45 0
M h e n d -S aay d A t L h ag 48, 204 Sidi L w ennas A t Sidi A ali-u-Y ehya
M ira 74 50, 221
M uh A t L em saaw d 48, 50, 66, 116, Sidi M e n su r 68, 362
132, 152 Sidi M hem m ed Ben A ab d erreh m an
M u h e d -A a ra b A t C a a la l 48, 50, 348 340, 364, 424, 448
M u h e d -A m w eq ran -u -Q asi 426 Sidi M hen d -u -S aad u n 18, 31, 1 4 0 ,3 8 4
M u fie d u -R e m d a n A t N ab et 17, 48, Sidi M uhed-W aal’A e rif 4 8, 20 8
50, 202' Sidi Q ala 18, 30, 199, 214
M u h em m ed 360, 386 Sidi R ra b a a 48, 66, 116
M u h en d A zw aw 74 Sidi R ra b iâ A t Sidi A am er 140, 206
M uhend B bw ezw aw 92 Sidi Xlil 342
M u h e n d -m -M u sa A w ag en n u n 18, 430 Sidi Y ehya At A aydel 24
M u h en d S saa y d A m lik c 18, 4 1 6 , 424 Si M uhend-u-M hend 9 17, 30, 42,
M u h e n d -S saay d -u -Q asi 68 48, 52, 56
M z ita 366 S idna M usa 306 ...
S idna Sm aâil 272
S idna Y aaq u b 280 ...
S idna Y ebrahim Lxalil 272 ...
S idna Y usef 280 ..., 452
nnbi 110, 140, 148, 154, 278, 280, S saay d U zennuc 48
29 0 , 304, 308, 31 8 , 344, 352, 356, S sk en d riy a 352, 370
35 8 , 3 68, 390, 4 0 2 , 4 1 6 , 436, 44 0 Stem bul 110, 370
(lem deh n) n n b i 398 S um m er 188
n n if 94, 206, 218
Q alu n 4 06 T a b la z t 418
Q u lu 3 7 0 T a b u d u c t 82
T ab u farest 206
T ab u rg a 434
ta d d a rt 88, 102, 106, 108, 116, 122,
rrasu l 110, 352, 386, 390, 398, 402, 154, 156, 220
" 4 2 6 , 4 3 2 , 43 6 , 4 4 0 T a fu y a lt 68, 74
rra y 4 4 , 94, 110, 116, 154, 212 T ag em m u n t A azz u z 384
T a ia -n -T a z a rt 205
T am d a-l-L eb lad 62, 75, 76, 4 1 2 , 414,
444, 452
S ab aw 127, 4 1 5 , 4 34 T am ejju t 174
S aalem A t M a a m m e r 48, 50, 83, 105, T am g u t Ibehriyen 69
2 2 1 , 34 3 , 34 8 , 4 0 0 T a m g u t Igaw aw en 360, 380, 44 0
S ed d u q 448 tam u sn i 47, 51, 57, 59, 62
Sidi A a b d e lla M y a w ri 354 T a n in a 9 2, 226 ...
Sidi A ali (n T ew rirt-I-L h eg g ag) 118 T an saw t 400, 404
Sidi A ali-u -M u sa 362 ta q b a y lit 46, 104, 118, 152, 324
Sidi A ali-u -Y eh y a 66, 117 T aq q a n A t Y ehya 146
Sidi A am er-u -A ar 364 T ase k k u rt 222
Sidi A a m m a r 4 5 0 T asga-m -M etlul 178, 188
Sidi A a y sa Ben M hem m ed 364 T a x u x t 152
Sidi âu m e r Ben X e tta b 242, 42 0 T aw d iât 72
Sidi B aaziz 148 T a w rirt A t M angellat 384
461
T aw rirt-l-L h eg g ag 37, 94, 100, 108, ul 92, 108, 110, 138, 148, 168, 170,
118, 4 0 5 ' 174, 188, 206, 216, 234, 292, 310,
T aw rirt-m -M im u n 6 6 , 107, 112, 114, 354, 362, 370, 3 9 2 , 394, 4 0 4 , 414,
122, 348 418, 444
T a w rirt-m -M u sa-u -A a m e r 424 U te n n a h 176
T ig z irt 4 0 , 122
T ik lat 264
T ililit 221
T im esg id a 1-Lqalus 167
W ad D h u s 128
T im ez rit 4 5 0
W ad Ssahel 129, 149, 265, 357, 366
T iq ic c u rt 187
W ahed-u-S ebâin 4 4 0
T iq u b â in 67, 75, 88, 9 0 , 451
W asisb an 24
T irw al 184
W edris 132, 362, 4 2 2 , 44 6
tiw izi 35
tizi 96, 148, 38 2 , 4 14
T izi-h -H ib el
T izi-U zzu 40, 263
T terk w 20, 37, 4 1 , 68, 86, 112, 122, Y ebrahim -u-H m ed A t Ib ra h im 51, 185
128, 352, 358, 37 0 , 432 Y em m a X liga T u k rift 172, 380
ttir 86, 90, 9 4 , 102, 106, 108, 110, Y esm aay l A zikiw 9
118, 122, 146, 1 4 8 ,2 2 2 ,2 2 6 312, Y esser 120, 266
3 5 2 , 372 Y usef-u-Lefqi 10, 18
T u h rict 144 Y usef-u-Q asi 17 ..., 30 ..., 36, 38,
T unes 200, 438 4 0 ..., 56, 6 2, 146
462
Agbur
Tai
7 In tro d u ctio n
48 T ab leau de la tam o u sn i
59 T azw art
I - Y U S E F -U -Q A S I 61 Y O U S E F -O U -K A C I
8 L u k an se g -W b iza r m eq q ar 80 D ilem m e
9 Bu u zeg za 80 A u m an teau bleu
1 0 A seq q if n n i deg jy im in 82 « C e tem ps ne se retro u v era plus
14 A zw aw G g ezw aw en 90 P lu tô t m o u rir A zo u ao u
15 A m tn in a di zzerzu r 92 É pervier parm i les éto u rn eau x
16 W in y a a ra n w ay ed a-t-idel 92 Q ue le frère h ab ille son frère
17 S sb a a di tezg ’ u m e y ru s 94 P a rtisa n
18 T u feg JJn efx a d i j j n a s i f 94 U ne gu erre fratricid e
19 G e d h a s Ib aru d lexzin 96 G lo ire à la vieille poudre
20 M m is n ta g g a lt a ra s 98 Im pavide sous les balles
21 N ey ije y la f 98 Sur deux fro n ts
22 A ss n j j l a t a 100 M ard i
23 A ss l-lexm is 102 Jeudi
24 T a q sit tam ezw aru t 104 Peu après
25 T a q sit tis-sn a t 114 A près
26 T aq sit tis-k rad 120 L ongtem ps après
II - Z Z M A N G G I y lL 161 L E T E M P S D E S C IT É S
464
50 N essen ssw ab n e q q ar it 186 D éfinitions
51 L â a y a r ad-d id h er s ttul 188 La vérité éclatera
52 T tb iâ a inu am m ugertil 188 Telle la n a tte
53 L m âallem inegger ifqis 190 Tel le m a ître artisa n
54 S sbeh i nezzw er aaggu 190 P âtu rag es
55 T ia ta d d u â a t 192 T ro is vœ ux
A ali A a m ru c 258 A li A m ro u ch e
465
M a a m m e r A h esn aw 262 M a m m a r d es Ih esn aw en
IV - T IQ S ID IN 271 L É G E N D E S R E L IG IE U S E S
V - L IM A N 337 LA FO I
H m ed A a r a b G g iy il h -H em m ad 350 A h m ed A ra b d ’Ig h il H em m ad
L h ag M u h en d A a c u r 40 0 Had(j M o h a n d O u a c h o u r
466
VI - A R U M I 411 LA R É S IS T A N C E À LA
C O N Q U Ê T E C O L O N IA L E
467
Achevé d ’im p rim é s u r les presses
de l’im p rim e rie Brise - M arine
B ordj El B ahri-A Iger
T él.: 071.11.10.18
Poèmes Kabyles Anciens