Sunteți pe pagina 1din 15

FATIGUE D'ÊTRE SOI ET SOUFFRANCES DE SUBJECTIVATION

Jacques Arènes

L’Esprit du temps | « Imaginaire & Inconscient »

2010/1 n° 25 | pages 61 à 74
ISSN 1628-9676

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
ISBN 9782847951837
Article disponible en ligne à l'adresse :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
https://www.cairn.info/revue-imaginaire-et-inconscient-2010-1-page-61.htm
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour L’Esprit du temps.


© L’Esprit du temps. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les
limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la
licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,
sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de
l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage
dans une base de données est également interdit.

Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)


Fatigue d’être soi et souffrances
de subjectivation

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
Jacques Arènes
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

Etat des lieux de la Fatigue d’être soi


La fatigue d’être soi renvoie au titre éponyme du livre d’Alain
Ehrenberg 1. Ce livre réfère au sujet contemporain et à ses difficultés de
subjectivation. Cette souffrance de subjectivation se manifeste souvent sur
le versant dépressif, mais renvoie plus généralement à une souffrance de
ne pouvoir porter soi-même sa propre vie comme une vie bien réelle, au
sens où l’évoquait Winnicott 2 quand il relatait la souffrance adolescente.
Essayons d’établir la genèse de cette fatigue d’être soi. Charles Taylor
désigne la marque de la postmodernité comme celle de la diffusion du soi :
le virage vers l’intérieur, vers l’expérience de la subjectivité, pris par la
modernité, puis par la postmodernité, est corrélatif d’une fragmentation,
mettant en danger la notion même d’identité, comme dans l’œuvre de Robert
Musil par exemple. Le moi n’est plus assuré de détenir une unité a priori.
La tendance profonde de la culture est un accroissement de la diffusion du
soi, dans « une conscience de vivre à deux ou plusieurs niveaux, qui ne
sont pas totalement compatibles mais qui ne peuvent se réduire à
l’unité 3 ». Ulrich, L’homme sans qualités, se perd dans le doute, dans la
Vienne de la veille de la première guerre mondiale. Après avoir lu Maître
Eckhart avec enthousiasme, Musil s’en est inspiré pour son titre : L’homme
sans qualités. Cependant, pour Musil un homme sans qualités est perdu.
Tandis que chez Eckhart, le fait d’être « sans qualités » signifie au contraire
s’être trouvé soi-même. Ulrich exprime ses doutes dans l’Autriche qui tombe,
vivant sans le savoir ses dernières années impériales. La vie y est un jeu,
où chacun s’efforce d’y mettre sa pièce de puzzle. Réussir le puzzle c’est

Imaginaire & Inconscient, 2010/25, 61-74.


62 IMAGINAIRE & INCONSCIENT

mettre la bonne pièce, là où le monde social l’attend. Toutes ces qualités


attendues sont banales, communes. Mais comment être alors libre ? Se risquer
hors des qualités triviales, c’est, peut-être, se condamner à la stérilité. Et le
doute demeure lancinant. La pensée se meut dans la diffraction et dans l’arbi-
traire. L’aménagement, par Ulrich de sa maison, est alors à l’image de l’état
de son espace intérieur. « C’était là […] cette fameuse incohérence des idées,
cette prolifération privée de centre qui caractérisent le temps présent et en
constituent l’arithmétique particulière, ce coupage de cheveux en quatre à
la poursuite d’une unité toujours fuyante. Ulrich [l’homme sans qualités]

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
finit par ne plus imaginer que des pièces irréalisables, des chambres
tournantes, des installations kaléidoscopiques, des changements à vue pour
l’âme, et ses idées perdaient de leur consistance à mesure. Il en arriva enfin
au point vers lequel il avait été secrètement attiré. Son père eût dit à peu
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

près : « Si on le laissait faire à sa tête, il finirait par se la taper contre les murs
à force de perplexité », ou bien : « Quand on peut faire tout ce qu’on veut,
on a bientôt fait de ne plus savoir quoi désirer ». Ulrich se répétait ces
sentences avec ravissement. Cette sagesse ancestrale lui semblait d’une extra-
ordinaire nouveauté. Il faut que l’homme se sente d’abord limité dans ses
possibilités, ses sentiments et ses projets par toutes sortes de préjugés, de
traditions, d’entraves et de bornes, comme un fou par la camisole de force,
pour que ce qu’il réalise puisse avoir valeur, durée et maturité... » 4
Le centre de ce type de souffrance de subjectivation est le sentiment de
passivité et de déprise par rapport à son propre destin. Beaucoup de clini-
ciens reconnaissent ainsi le fait que le clivage devient un mécanisme de
défense prépondérant. Même si le clivage se révèle souvent plus fonctionnel
que structurel. Le noyau d’hystérie primaire permet ainsi une certaine
souplesse de fonctionnement, même si ce noyau amène parfois des sympto-
matologies graves. 5 La souffrance psychique de nombre d’occidentaux se
situe bien dans le multiple et dans la perte de contrôle, et les adolescents,
les jeunes adultes, ne souffrent plus de pathologies de « l’écrasement »
(pathologies de l’interdit où les référents surmoïques sont parfois persécu-
teurs), mais de pathologies de la diffluence. Le moi apparaît peu unifié, le
sujet est sans cesse à la recherche d’une confirmation narcissique, et semble
épuisé par l’idée d’atteindre les buts qu’il s’est lui seul donnés. Plus que
l’éloignement par rapport à la norme du moi unitaire, le rapport même à la
temporalité semble se modifier.
Nous revenons à une conception kierkegaardienne de l’angoisse, qui
correspond à la difficulté d’asseoir sa propre subjectivité. Selon Kierkegaard,
l’angoisse est la seule expérience que nous avons vraiment de notre liberté.
La liberté est le pouvoir de choisir. Quand tout est possible et que la décision
tarde, le sujet sent peser le poids de la décision, sans pouvoir se déterminer.
L’angoisse est l’épreuve du pouvoir de choisir. Le sujet prend peur de sa
JACQUES ARÈNES • FATIGUE D’ÊTRE SOI ET SOUFFRANCES 63
DE SUBJECTIVATION

propre puissance de choix, et s’angoisse de l’expérience du possible.


L’angoisse est le vertige des possibles. La liberté est alors un fardeau à
assumer. Il est plus facile de n’être pas libre, de se complaire dans un présent
sans lendemain. Tous les possibles sont devant le sujet, et sa propre existence
est en jeu, comme en une expérience première de soi. La « mélancolie »
signifie l’existence dans sa pesanteur, car c’est à moi d’être. Le possible
est la plus lourde des catégories. Le possible est plus lourd que le réel. Il
peut même devenir immensément pesant 6.
Le réel est unique. La vie n’est pas vécue deux fois. Clément Rosset postule

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
l’unicité du réel comme sa caractéristique principale : elle constitue son aspect
inestimable, et, en même temps, est à l’origine d’une angoisse inépuisable.
« Car la mort de l’unique est sans recours : il n’y en avait pas deux comme lui ;
mais une fois fini, il n’y en a plus ». 7 Le désir de l’unicité pousse beaucoup
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

à chercher fiévreusement l’équation de leur singulière trajectoire. L’angoisse


vis-à-vis de l’unicité du réel aiguillonne, au contraire, certains dans le refus
de s’engager dans une existence qui ne pourra être vécue par personne d’autre.
Ceux qui n’habitent pas leur histoire ne fuient-ils pas l’unicité de leur destinée,
expression de leur finitude ? Ne pas être acteur de son existence, c’est se
regarder vivre les événements comme si on était extérieur, en s’auto-observant
comme un double familier. Le sujet a ainsi l’impression qu’il n’est pas entré
en scène, que son temps n’est pas commencé, et que, du moins l’espère-t-il
secrètement, ce temps n’aura pas de fin.
J’entends cette complainte immobiliste d’un jeune homme : « Je donne
l’impression de quelqu’un de très cool par rapport à ce qui m’arrive. Les
événements arrivent et je m’adapte. Je suis acteur et spectateur en même
temps. Et d’ailleurs, les autres sont-ils vraiment acteurs ? J’aime bien les
films fantastiques où le temps boucle sur lui-même. A la fin le héros se
retrouve comme au début, il recommence l’histoire à l’identique. Parfois, sa
mémoire a été effacée, et il ne s’en rend même pas compte. En fait, les gens
ne le savent pas, mais ils ne bougent pas. »

Et la pratique analytique?
Au niveau de la praxis, les psychanalystes constatent aujourd’hui que les
analysants ont changé, et que les difficultés de subjectivation sont intenses.
Elles concernent ces patients qui quêtent sans fin une adéquation du sens
et de l’être, et qui se pensent plus comme des survivants que comme des
vivants. La méthode analytique se trouve mise à l’épreuve, car elle bute
sur une éternisation de son processus, avec des sujets qui ne semblent pas
avancer, sont soumis à des orages pulsionnels récurrents, ou même
s’enfoncent progressivement dans une souffrance qu’aucune interprétation
ne pourra modifier, en même temps que dans une sorte de toxicomanie
64 IMAGINAIRE & INCONSCIENT

relationnelle indéfinie. La « valeur » de l’autre n’est pas alors liée à


l’expression du désir et de ses aléas, mais à la possibilité d’utiliser le proche
comme « garant narcissique » d’une estime de soi défaillante. « La peur de
ne pas être à la hauteur prend le pas sur la culpabilité œdipienne » avec
l’accroissement concomitant des pathologies dépressives. Comme, de plus
en plus souvent, la psychopathologie s’éloigne des névroses dites « de
transfert », qui sont le champ naturel de la psychanalyse, celle-ci étend son
opérationnalité « aux difficultés relationnelles, aux névroses de caractère,
aux limitations du champ d’action des sujets dans l’infinie multiplicité de

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
leurs registres, aux états dépressifs et anxieux les plus variés » 8. D’où la part
de plus en plus fréquente des personnalités dites « limites », où les tourments
du sujet ne sont plus liés à l’affrontement de la pulsion avec l’interdit, mais
à la difficulté, à l’impossibilité de pouvoir « digérer », symboliser sa propre
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

histoire.
Il se pose alors la question de l’adaptation de la scène analytique à la
nouvelle donne. Ces « nouveaux » analysants sont fascinés par l’abîme de
leur existence, par un mal-être diffus et constant. Parfois, derrière une
apparence très affirmée, se cache un manque d’estime de soi, un déficit
profond de certitude. En dehors de la mouvance lacanienne, la probléma-
tique est abordée par les théoriciens de la subjectivation, influencés par
l’école anglaise et par Winnicott en particulier. L’enjeu est de ne pas
abandonner la théorie pulsionnelle, sans pour autant renoncer à explorer
l’élaboration subjectivante.
Pour citer René Roussillon, « En 1895 [au début de l’œuvre de Freud],
on souffre de réminiscences et on guérit en se souvenant, à partir de 1937-
38 [la fin de l’œuvre de Freud] on souffre toujours de réminiscences, on
guérit toujours en se souvenant ou en reconstruisant l’histoire, mais l’on
découvre aussi que l’on souffre, à travers l’histoire, de l’inapproprié de celle-
ci, de l’inappropriation de celle-ci : on « guérit » alors en symbolisant ou
en resymbolisant les enjeux qu’elle recelait. 9 »

La « fatigue d’être soi » 10 guette donc notre « individu incertain » 11, las
d’avoir à se construire et à justifier sa propre place, pour une revanche
posthume de Janet sur Freud : la fatigue psychique paraît avoir vaincu le
conflit œdipien ! Ehrenberg évoque, d’une manière trop rapide sans doute,
la disparition de la culpabilité au profit de cet épuisement dépressif
généralisé. La figure du mal-être contemporain est alors, par excellence, la
dépression. « Si le conflit est le miel dont se nourrit la psychanalyse, il
apparaît nettement que de nouvelles demandes lui sont continuellement
adressées : elles n’ont pas le visage limpide du conflit, mais celui plus insai-
sissable du vide. […] Les courants psychosomaticiens de la psychanalyse et
les spécialistes des toxicomanies réfléchissent particulièrement sur les patho-
JACQUES ARÈNES • FATIGUE D’ÊTRE SOI ET SOUFFRANCES 65
DE SUBJECTIVATION

logies de la béance du vide, et du manque. Mais une telle réflexion se


développe également au sein du noyau dur, c’est-à-dire dans les sociétés
d’analyse 12. »

Illustration clinique
Tentons de donner un exemple clinique de ce type de « fatigue ».
Théophile semble déployer sa vie dans une forme d’aboulie, d’impossibilité
de choix, dans le sentiment que c’est impossible à porter. Ce jeune homme

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
de 22 ans, d’allure sportive, a un phrasé assertif, dont on peut difficilement
deviner par sa présence et son style, la détresse intérieure. Et pourtant, il
affirme :
« Je suis retenu par quelque chose qui m’empêche d’entrer dans la vie.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

Je suis comme un spectateur permanent. Je passe d’ami en ami. Je suis


complètement à part au niveau des cousins […] Je suis un extraterrestre ;
j’ai impression d’un poids énorme. » Il évoque longuement cette angoisse
difficile à nommer qui l’habite, et qui se manifeste par le sentiment d’une
boule au niveau du diaphragme. Boule dont il n’arrive pas à se débarrasser,
sauf peut être un peu quand il s’adonne aux sports de combats sans retenue,
dans des entrainements jusqu’à épuisement. Ce type de sport lui permet
d’exorciser ce nœud d’angoisse qui est lové dans son ventre. « Ça me soula-
geais. J’avais besoin de combat. Mais cela ne m’a pas aidé à me libérer. Je
ne suis pas entré dans le réel. Je n’avais personne pour me cadrer. J’étais très
bon mais je ne progressais pas. »
Théophile n’aime pas être « cadré » tout en cherchant constamment à
l’être. Ce côté pulsionnel, cette addiction à l’acte permettant la décharge
ne l’empêche pas d’avoir une vie intellectuelle intense. Cultivé, bon
connaisseur de l’histoire, se passionnant pour la philosophie, Théophile ne
fait jamais rien à moitié. Il se plonge dans la lecture comme il s’enivre, prati-
quant le binge drinking, en buvant verre sur verre jusqu’à tomber ivre mort.
Il évoque des parents très occupés, très pris dans leurs différentes activités
associatives, mais peu consistants et abandonnants.
« Mon père on a l’impression que je ne suis pas son fils comme s’il était
le beau père ; on est des autres ».
Quand je lui demande de laisser venir des images autour de ce se
sentiment d’abandon, Théophile associe assez longuement autour de Fight
Club, ce film de David Fincher où des jeunes gens se battent à perdre haleine
dans une carence identificatoire, notamment masculine tout à fait prégnante.
Il laisse défiler le kaléidoscope de ses souvenirs :
« Je me replonge dans ces moments au collège je m’enfuyais à la récré.
Les autres allaient jours entre eux, et je me promenais dans les couloirs,
j’étais tranquille » Je lui demande son sentiment : « un mélange de tristesse.
66 IMAGINAIRE & INCONSCIENT

Je me dis je n’ai jamais réussi à avoir une jeunesse, alors que les autres
s’amusaient gentiment… J’étais tout le temps en recul et culpabilité. Je me
réfugiais souvent dans une salle isolée, et me sentais protégé. Ça me rassurait.
Au lycée, j’éprouvais une sorte d’insatisfaction profonde, de ressentiment.
Je n’ai jamais réussi à exprimer une agressivité saine de mâle assumé… J’ai
un rapport au réel cassé. Je vis dans une bulle, une mécanique à vide. Je n’en
ai pas fini des fonctions de croissance. »
L’agressivité masculine, considérée comme une échappatoire, exprime
cette revendication phallique, signe d’une hystérie masculine recouvrant

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
un noyau abandonnique assez profond et une nécessité de construire un
espace à soi en un monde menaçant et intrusif.
Nous en venons à la place que peut prendre l’analyste face à ceux qui
semblent ne pas pouvoir se déterminer au cœur d’un conflit interne et de
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

sa résolution. Quelle place aussi donner, au sein de la cure, à l’imaginaire


du choix ?
La diversité des écoles de la psychanalyse contemporaine permet d’uti-
liser une boîte à outils de concepts et d’objets analytiques qui aident à penser
et à accompagner les souffrances narcissiques. Ainsi Melanie Klein et ses
disciples déplacent-ils le centre de gravité de la psychanalyse vers son
registre le plus archaïque pour analyser le transfert selon les modalités parti-
culières de cet espace, et faire de la position dépressive le socle et la condition
de l’œdipe.
Les tenants de la relation d’objet, quelle que soit par ailleurs l’hétéro-
généité de leurs points de vue et de leurs choix techniques, portent leur intérêt
sur la relation de la psyché avec l’objet, ses modalités, son origine, son destin.
« La centration opérée par Kohut sur la psychopathologie du soi réduit les
conflits œdipiens et les pulsions qui les sous-tendent aux épiphénomènes
d’une problématique essentiellement narcissique dont l’affect constitue
l’outil essentiel de son abord et de sa résolution, au détriment de la
dimension représentative. 13 » Pour lui, deux sortes de libido se distinguent
nettement, la libido narcissique et la libido d’objet. Si la libido d’objet est
investie sur des personnes ou des choses séparées du soi, la libido narcis-
sique se porte sur des objets qui sont des extensions du soi, les « self-
objects ». Selon Heinz Kohut, l’autonomie du sujet est un mythe. L’essentiel
est qu’il arrive à une estime de soi suffisante, et l’analyse tentera alors
d’apporter au sujet ce qui dans l’objet a fait défaut. Il importera autant
d’apporter de la sympathie que de la compréhension et des interprétations.
Mais n’est-ce pas la voie, et le danger d’un fonctionnement où le procédé
réparateur semble prendre la place d’un accompagnement où le sujet de la
psychanalyse puisse émerger ?
D’autres voies s’ouvrent, tracées par certains disciples de Freud plus
ou moins dissidents, qui ont d’eux-mêmes réaménagé la théorie ou la pratique
JACQUES ARÈNES • FATIGUE D’ÊTRE SOI ET SOUFFRANCES 67
DE SUBJECTIVATION

analytique. Ferenczi n’a pas hésité à modifier les consignes du cadre de la


cure. Il s’intéresse de près à la résistance au changement, et à la destructivité
rencontrées chez nombre de ses patients. Il interroge l’effet de traumatismes
ou d’attaques venus de l’objet, expliquant les affects de détresse qu’il voit
surgir dans ses cures, invariablement accompagnés de la reviviscence de
scènes traumatiques liées à une agression ancienne, le plus souvent sexuelle,
de la part de l’adulte.
Il s’agit là d’une question très aiguë de l’épistémologie analytique
actuelle. Nous nous intéressons de nouveau à Ferenczi, car beaucoup ont

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
le sentiment que le « réel » des traumatismes a été en partie méconnu par la
psychanalyse. Les psychanalystes se penchent ainsi de plus en plus sur la
conséquence de situations traumatiques archaïques œuvrant particulièrement
dans les problématiques narcissiques. L’analyste se prête même, au cœur du
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

transfert, à une opération de « réparation » en temps réel de la personne. Il


se laisse utiliser par l’analysant pour reconstruire ce qui a été déconstruit.
L’ici et maintenant est, dans l’atmosphère de bienveillance et d’accueil,
autant lieu de guidance et de soin que d’une interprétation que le patient
ne saurait, pour l’instant, digérer psychiquement.
La notion de « pulsion de mort », permet de faire œuvre descriptive, en
rendant compte des aspects autodestructeurs des problématiques narcissiques ;
elle rend compte de l’essence même de l’inconscient « dans ce qu’il offre
d’indestructible et de déréel, jusqu’à imprimer sa marque sur la compulsion
de répétition, et notamment par le retour indéfini, diabolique, du déplaisant,
du douloureux, qui précisément fait obstacle à nombre de cures. 14 »
Pour Théophile, l’aspect destructeur se présente le plus souvent, dans le
transfert sous la forme de l’autocritique et de la destruction de soi. Il s’agit
d’analyser cette autodestrucivité et de la lui présenter d’abord comme un
problème à résoudre. En entrant d’abord un peu dans le réel-là. En lui
soumettant par exemple l’idée du décalage entre son discours sur lui-même
et ce qu’il donne à voir (discours très calme, affirmatif, voir profond, efficacité
dans la parole d’un côté, et sentiment d’être un petit garçon, d’un autre côté).
Ce jeune homme qui dit être un petit garçon parle comme un homme. Ce
clivage fonctionnel du moi (petit garçon/homme) doit être dit. Comme doit
être énoncée le côté performatif du discours d’autodérision. Comme doit être
affirmé aussi par le psychanalyste le projet de la cure, qui est de créer un
espace subjectal qui permettra le déploiement de la transformation de soi. Il
s’agit, en quelque sorte, de terminer le processus de croissance dans lequel
la rencontre est importante. Et le transfert est aussi rencontre, dans la mesure
où l’objet se prête quelque peu à la construction du sujet.
Le maelström de l’archaïque se présente ainsi de plus en plus souvent
dans des transferts de type idéalisant ou en miroir, ou bien dans des attaques
violentes de la personne du « psychanalyste ». La question n’est pas celle du
68 IMAGINAIRE & INCONSCIENT

désir ou de la rivalité avec l’objet, mais plus encore de sa constitution même,


avec des analysants continuant à « fonctionner » néanmoins dans le monde
social. Le plus essentiel est, pour l’homme contemporain, de pouvoir se
reconnaître soi-même dans une continuité d’être, et d’être aussi reconnu
comme sujet. L’analyste accepte alors non seulement d’être « instrument
de connaissance du transfert, mais pièce même de la construction 15 ».
Il privilégiera la position « subjectalisante » qui permettra à l’analysant
de retrouver, basiquement le goût de la continuité du soi, d’une forme de
permanence interne.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
Inventer un espace de déploiement subjectal
La scène analytique devient alors un lieu où se déploie l’illusion et sa
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

performativité pour lutter contre la fatigue d’être soi. Il s’agit d’aider le sujet
à inventer un espace de déploiement subjectal, de créativité, pour dépasser
cette fatigue d’être soi.
J’ai déjà évoqué la notion de portance qui est un des ressorts de la
dynamique de subjectivation.
En physique, on définit la portance comme une force qui s’exerce perpen-
diculairement à la direction de la vitesse et permet à une masse d’être
soutenue. C’est ce qui permet à un avion de « se » porter sur l’air. La notion
de portance peut être élargie à la portance psychique 16. Le sentiment de
portance donne à l’individu le moyen de composer avec la durée afin de
créer un équilibre dynamique dans les relations objectales, et dans la capacité
du moi de faire face à l’angoisse. La situation traumatique – la plainte
abandonnique, par exemple - se transforme en situation moins menaçante,
parce que le moi devient capable d’anticiper. Le sentiment de portance résulte
d’un processus d’intégration de nature « fondamentalement différente de
l’espace où règne l’angoisse de séparation 17 ».
La question posée à l’analyste face à ces vies qui ont du mal à se porter
elles-mêmes est de savoir comment la cure peut favoriser une forme « d’auto-
portance » du sujet et l’aider à décoller des creux du sentiment d’abandon ?
Avec Théophile je tente de travailler sur ce thème de se sentir un petit
garçon qui ne peut porter sa vie. La capacité de l’analyse, Quinodoz le
souligne, consiste à aider le sujet à acquérir un « sentiment d’autonomie et
de liberté psychique, force et continuité intérieure et, confiance en soi et
envers autrui, capacité d’aimer et d’être aimé, bref un ensemble de senti-
ments qui caractérisent ce qu’on appelle maturité psychique 18. » Un des
aspects importants de ce travail est l’acquisition d’un bon objet à l’inté-
rieur du moi, permettant en quelque sorte de lutter contre le clivage parfois
sidérant chez ce type de personne. Théophile se jette sur le divan pour
énoncer son désir de libération vis-à-vis de son angoisse. « J’ai des carences
JACQUES ARÈNES • FATIGUE D’ÊTRE SOI ET SOUFFRANCES 69
DE SUBJECTIVATION

violentes. Je mange comme quatre ; j’ai besoin de jouer ; je n’arrive pas à


être sérieux ; ce n’est pas un comportement d’homme de 22 ans. Mais je suis
aussi sérieux. C’est bizarre deux comportements. Un Théophile social et
un qui vit à côté, qui profite, qui se promène la nuit. Il me manquait une
assise pour être révolté : j’avais une manque d’affection… je n’arrive pas
prendre le dessus dans ma vie. Je suis sans cesse saisi par une angoisse sécuri-
taire. »
L’intégration suffisante du bon objet lutte contre la désintégration et
s’effectue dans la rencontre. Elle nécessite en quelque sorte la portance du

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
psychanalyste. Celle-ci se déploie d’ailleurs particulièrement dans l’aide
concernant la capacité à penser, qui dans le modèle bionien et la vraie lutte
contre la frustration. Filtrer, avec l’analysant, le discours de disqualification
est élément essentiel.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

Il est aussi essentiel de faire confiance à la dynamique même de la cure


qui tend à achever ce qui est jusqu’ici reste en suspens.
La processualité de la subjectivation 19 rend compte d’un devenir
sujet dont le modèle est l’adolescence. C’est l’adolescence en tant que
« processus », et non pas seulement en tant que « crise », qui devient un
modèle opérant de la subjectivation. La notion de « processus » insiste sur
la dimension interne de travail psychique du devenir sujet, par opposition
à la « crise » qui donne ampleur à l’événement, ne serait-ce qu’à l’événement
du pubertaire faisant irruption dans l’équilibre du sujet. Les organisations
narcissiques ne sont pas nécessairement déficitaires, et l’alternative Œdipe-
Narcisse demande à être réélaborée, l’adolescence constituant un modèle du
psychisme en travail de devenir, concernant la structure fragile et évolutive
du sujet contemporain, fût-il adulte 20.
La fonction-sujet est plus temporelle que spatiale ; elle ne remet pas en
cause les structures, mais leur devenir. Cette introduction principielle d’une
« fonction changement » cherche à donner existence théorique au
changement. Elle est essentielle dans une culture où, justement, les attentes
d’autocréation sont pressantes. Le sujet, habité par la multiplicité vit une
tension - hétérogénéité des discours pour rendre compte de lui-même, multi-
plicité des biens souhaitables, manque de contenance culturelle – rendant
problématique le rôle arbitral du moi dans la conflictualité psychique. Le
sens, sans cesse menacé par l’effondrement, se trouve sans cesse réélaboré
dans un travail de limite qui l’ouvre à une perspective surmoïque hantée par
le devenir. Nous pouvons même imaginer – Théophile nous le suggère par
sa tension entre appel surmoïque et désir de se lâcher – une « évolution socio-
culturelle vers une subjectivité plus adolescente et narcissique tout en conti-
nuant à penser que l’accès au surmoi post-œdipien est l’organisateur central
de la subjectivité. » 21
70 IMAGINAIRE & INCONSCIENT

Faut-il favoriser à tout prix la régression ?


L’hypothèse de Ferenczi, concernant l’accompagnement psychanalytique
des sujets ayant subis des traumas précoces est de favoriser la régression
réparatrice. De cette façon, l’aspect maternel d’une régression à l’infra verbal
permet d’entrer directement en contact avec l’infantile. Le danger est
évidemment, pour le psychanalyste, d’être pris dans des identités maternelles
archaïque, et dans un transfert où il n’est plus que le représentant de l’objet
maternel déficient.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
Au contraire de favoriser la régression, nous pouvons imaginer, face à
des patients en carence abandonnique, une « utilisation » thérapeutique de
l’épreuve de réalité. Une hypothèse clinique d’accompagnement de ceux qui
ont du mal à saisir les possibles est celle d’un travail sur les épreuves de vie.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

Le psychanalyste sera particulièrement attentif aux événements à potentialité


traumatique. L’épreuve de réalité peut alors s’avérer thérapeutique, et le
travail du négatif lié à la perte de l’objet peut, dans certaines conditions,
rendre possible la sortie de la fatigue d’être soi.
J’évoquerai, à cet effet, un autre exemple clinique, celui de Simon,
homme enseveli sous des responsabilités professionnelles, et dans des
problèmes conjugaux, face à une épouse qui semble, dans le discours qu’il
rapporte, développer une accusation sans fin. Simon, malgré ses responsa-
bilités professionnelles, ne semble pas décider de sa vie. Il répond à l’évé-
nement plus qu’il ne l’anticipe. Il n’arrive pas à imaginer sa retraite tant
l’idée de vacances n’a aucun sens. Il arrive aux séances épuisé, et avoue
ne se reposer réellement qu’en voyage professionnel : là il n’y a enfin plus
de personne proche pour lui demander quoi que ce soit. Défini par les attentes
de l’autre, surtout dans le cadre familial, hanté par l’idée de son incapacité
à agir pour ceux qui l’entourent, Simon n’habite pas sa vie. Il n’est pas à
proprement parler dépressif, mais il est dans l’impossibilité d’investir une
espace personnel de choix, en une vie qui s’avère à la fois très réussie et très
frustrante.
Comme il a du mal mentaliser les conflits qui l’entourent, à les traduire
en termes personnels, je l’aide à reprendre le verbatim de certains scènes
de la vie conjugale, où il est « coincé » dans des conflits de loyauté entre
enfants et épouse. La seule solution, puisque il se trouve perpétuellement
pris dans des choix qui le mettent à distance de la situation, et dans lesquels
il s’échine à suivre ou non l’avis de tel ou tel, est de se créer un espace
subjectif de choix et de pensée. Je l’invite à imaginer en ce sens, à cerner
son désir puisqu’il est contraint à ne pas « s’aligner » sur le désir des autres.
Je l’incite à subjectiver en posant des choix qui soit les siens. Mais, je tente,
en même temps de l’aider à repérer en quoi s’origine sa faim d’être aimé
au point qu’il semble dire « oui » à toutes les demandes. Origine encore
vivante où une angoisse d’abandon fut très tôt compensée par un activisme.
JACQUES ARÈNES • FATIGUE D’ÊTRE SOI ET SOUFFRANCES 71
DE SUBJECTIVATION

La réussite scolaire, la vie professionnelle ont constitué une marche en avant


permettant de mettre en place une dynamique compensant l’angoisse
d’abandon. Le réel d’aujourd’hui se déploie dans une plus grande vacance,
voire un vide : le métier devient légèrement moins prenant, les enfants s’en
vont progressivement. Ce qui pourrait être vide appelle un positionnement
subjectif.
Pourquoi l’événement est-il ainsi subjectivant ? Parce qu’il fait appel à
une nécessité externe brisant le côté inertiel de la compulsion de répétition.
Quand l’adhésion, voire l’adhésivité à l’autre a mené jusqu’à l’épuisement

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
la fatigue d’être soi, l’événement, qui s’inaugure ici dans le registre de la
perte, crée un appel d’air. Un vide régénérant. Le réel est alors thérapeu-
tique. Se tourner vers le Réel, assumer le Réel, c’est aussi creuser son
intérieur. Du côté interne, une forme intérieure croît progressivement. Il
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

affirme : « Je vis des sentiments curieux. J’ai l’impression d’être plus sûr
de moi... Je suis plus serein vis a vis de moi même.... Je suis un peu moins
dépendant de l’état de mes relations avec Isabelle... Je m’en veux presque
un peu parfois d’être moins dépendant. Dire que je ne suis pas d’accord,
ce n’est pas très aimant quand l’autre s’est énervé sans raison […] J’essaie
d’exister un peu plus... »
Freud évoque l’expression grecque de daîmon kai tuchê, qui constitue
en fait la part de nécessité interne de la souffrance psychique – le daîmon
interne lié à l’histoire du sujet – et la part de ce qui arrive – tuchê étant le
sort la chance, le hasard ayant entraîné les événements qui ont changé le
cours de la vie 22. L’événement n’est pas ce qui encontre le psychisme d’une
manière purement formelle. L’événement, inscrit sur fond de finitude
provoque une rencontre avec la psyché « qu’il précipite, au sens chimique
du terme 23 ». Vivre, c’est en effet expérimenter de manière continue ce qui
résulte d’une situation de rencontre, car la psyché, comme le souligne Piera
Aulagnier, se trouve « d’emblée plongée dans un espace à elle hétérogène,
dont elle subit de manière tout aussi continue et tout aussi immédiate les
effets 24 ».
La tuchê est aussi ce qu’il faut saisir pour sortir de la fatigue d’être soi.
Celle-ci, dans sa donne inertielle, pourrait se déployer dans l’infini du temps
si celui-ci l’était vraiment. La percée de l’événement – les enfants qui partent,
le départ de chez les parents, la nouveauté du métier ou de la rencontre analy-
tique – crée ce trou et cet appel d’air qui peut alimenter la portance
psychique. Le sujet est alors condamné à avancer ou à tomber.

Jacques ARÈNES
Membre titulaire du GIREP
10, rue St Lazare
75009 Paris
72 IMAGINAIRE & INCONSCIENT

NOTES BIBLIOGRAPHIQUES

1. EHRENBERG A. (1998) La fatigue d’être soi, Paris, Odile Jacob.


2. WINNICOTT. D. (1984) L’adolescence, in Déprivation et délinquance, trad. M.
Michelin et L. Rosaz, Paris, Payot, (1994).
3. TAYLOR C. (1989) Les sources du moi. La formation de l’identité moderne, trad.
C. Melançon, Paris, Seuil, (1998), p. 599.
4. MUSIL R. (1932) L’homme sans qualités I, trad. P. Jaccottet, Paris, Seuil, (1995),

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
p. 25.
5. RICHARD F. (2001) Le processus de subjectivation à l’adolescence,Paris, Dunod,
p. 97.
6. KIERKEGAARD S. (1977) Le concept de l’angoisse, Paris, Gallimard, (1844).
7. ROSSET C. (1994) Le réel et son double, Paris, Folio Essais, p. 86.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

8. CAHN R. (2002) La fin du divan, Paris, Odile Jacob, p. 30.


9. ROUSSILLON R. (2001) Le plaisir et la répétition, , Dunod, p. 114.
10. A. op. cit.
11. EHRENBERG A (1995) L’individu incertain, Paris, Calmann-Lévy.
12. EHRENBERG A., La fatigue d’être soi, op. cit.
13. CAHN R, op. cit., p. 88.
14. CAHN R, op. cit., p. 32.
15. CAHN R. op. cit., p. 57.
16. QUINODOZ J.M. (2002) La Solitude apprivoisée, Paris, Puf.
17. Ibid., p. 205.
18. Ibid., p. 189
19. BIRRAUX A. (2003) De la crise au processus, in L’adolescence dans la psycha-
nalyse sous la dir. de François Marty, Paris, In Press, pp. 223-242.
20. CAHN R. (1998) L’adolescent dans la psychanalyse : L’aventure de la subjec-
tivation, Paris, Puf.
21. RICHARD F. Les processus de subjectivation à l’adolescence, op. cit., p. 95
22. FREUD S. (1972) La dynamique du transfert, in La technique psychanalytique,
trad. A. Berman, Paris, Puf, (1912), p. 50.
23.KAMIENIAK J.P. Accident, hasard et destin chez Freud, Le coq Héron, n° 195,
2008/4, p. 68.
24.AULAGNIER P. (1975) La violence de l’interprétation. Paris, PUF, p. 33.
JACQUES ARÈNES • FATIGUE D’ÊTRE SOI ET SOUFFRANCES 73
DE SUBJECTIVATION

Jacques Arènes – Fatigue d’être soi et souffrances


de subjectivation

Résumé : « La fatigue d’être soi », renvoie au livre éponyme


d’Alain Ehrenberg. Cette locution décrit les difficultés de sub-
jectivation de l’individu contemporain. Le centre de ce type
de souffrance de subjectivation est le sentiment de passivité et
de déprise par rapport à son propre destin. La méthode analy-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
tique se trouve ainsi mise à l’épreuve, car elle bute sur une
éternisation de son processus, avec des sujets qui ne semblent
pas avancer, s’enfoncent progressivement dans une souffran-
ce qu’aucune interprétation ne modifie. Une hypothèse cli-
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

nique d’accompagnement de ceux qui ont du mal à saisir les


possibles, et à incarner une dynamique de subjectivation, est
celle d’un travail sur les épreuves de vie. Plutôt que d’adopter
une posture « ferenczienne », favorisant la régression et la
réparation psychique dans le lieu de la cure, le psychanalyste
sera, en ce cas, particulièrement attentif aux événements à
potentialité traumatique. L’épreuve de réalité peut alors s’avé-
rer « thérapeutique », et le travail du négatif lié à la perte de
l’objet peut, dans certaines conditions, rendre possible la sor-
tie de la fatigue d’être soi.
Mots-clés : Epreuve de réalité – Fatigue d’être soi –
Subjectivation.

Jacques Arènes – Tired of being me and subjecti-


vation pains

Summary : To be « Tired of Being Me » sends us to Alain


Ehrenberg’s book with this title. This phrase describes the
subjectivation difficulties of today’s individual. The center of
this type of subjectivation pain is a feeling of passivity and
disengagement toward one’s own destiny. The analytic
method is tested here, as it is up against an eternisation of its
process, with patients who do not seem to be progressing, and
instead progressively sink into a pain that will not be modified
by any interpretation. For those who have trouble grabbing
onto possibles and representing a subjectivation dynamic, one
possible clinical approach is one that works on life’s tribula-
tions. Rather than adopting a ferenczian position which would
favor regression and psychic repair in the treatment place, the
psychoanalyst, in this case, will be especially attentive to any
event with traumatic potential. Confronting reality might
74 IMAGINAIRE & INCONSCIENT

reveal itself as therapeutic and working on negativity linked


to the loss of the object might, under some conditions, facili-
tate the process of leaving this fatigue behind.
Key-words : Confronting reality – Tired of Being Me –
Subjectivation.

Jacques Arènes – Stanchezza di essere se stessi e

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps
sofferenze di soggettivazione.

Riassunto : « La stanchezza di essere se stessi » rimanda


all’eponimo libro di Alain Ehrenberg. Questa locuzione des-
crive le difficoltà di soggettivazione dell’individuo contempo-
raneo. Al centro di questo tipo di sofferenza di soggettivazio-
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - chelarescu irina - 188.25.209.249 - 18/05/2019 19h43. © L?Esprit du temps

ne c’è il sentimento di passività e di disimpegno nei confron-


ti del proprio destino. Il metodo analitico si trova quindi
messa alla prova poiché inciampa su una eternizzazione del
processo, con soggetti che sembrano non andare avanti, spro-
fondano in una sofferenza che nessuna interpretazione modi-
fica. Una ipotesi clinica di accompagnamento di chi fatica a
cogliere i possibili e a incarnare una dinamica di soggettiva-
zione, è quella di un lavoro sulle prove della vita. Invece di
adottare un’attitudine « ferencziana » che favorisce la regres-
sione e la riparazione psichica sul posto della cura, lo psica-
nalista sarà, in questo caso, particolarmente attento agli even-
ti dalla potenzialità traumatica. La prova della realtà può allo-
ra rivelarsi « terapeutica », e il lavoro del negativo legato alla
perdita dell’oggetto può, in certe condizioni, permettere di
uscire dalla stanchezza di essere se stessi.
Parole chiavi : Prova della realtà – Stanchezza di essere se
stessi – Soggettivazione.

S-ar putea să vă placă și