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LA REVUE Décembre 2018

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Édition Découverte
Une sélection de textes
pour des soins de qualité
Illustration José David
RAYON DES NOUVEAUTÉS

OFFICINE

“Bilans partagés de médication” par les pharmaciens


d’officine : un outil pour sécuriser les soins
●● Depuis 2018, en France, les pharmaciens d’of- quences parfois graves, est inappropriée chez 20 %
ficine sont autorisés à effectuer des “bilans par- à 25 % des patients âgés (2,4à6).
tagés de médication” chez des patients polymé-
dicamentés âgés de plus de 65 ans, dans l’objectif Proposé par le pharmacien, choisi par les patients.
de réduire le risque d’effets indésirables. Une Les “bilans partagés de médication” concernent les
mission qui met en valeur le métier de phar- patients exposés à au moins cinq substances mé-
macien-soignant. Et une incitation à instaurer, ou dicamenteuses pour une durée consécutive de
renforcer, une relation avec les autres soi-gnants, traitement de six mois minimum : âgés de 65 ans et
dans un esprit de complémentarité. plus, avec au moins une affection de longue durée ;
ou âgés d’au moins 75 ans (2).

S pécialistes du médicament, les pharmaciens sont


Ces bilans sont proposés par le pharmacien d’of-
ficine, et les patients choisissent ou non d’y parti-
logiquement amenés à jouer un rôle majeur en matière ciper, en choisissant aussi le pharmacien qui les
d’information sur les médicaments et leurs effets effectuera. En cas d’accord, la participation du
indésirables, d’analyse des inter actions patient est à formaliser par le biais d’une adhésion
médicamenteuses, de détection des erreurs médi- enre-gistrée par le pharmacien sur le site internet
camenteuses. En France, en 2013, dans un objectif de l’assurance maladie (2).
affiché de lutte contre la iatrogénie, les pharmaciens
d’officine ont été autorisés à organiser des entretiens
Bilans des traitements et propositions d’ajuste-
avec des patients traités par anti coagulant oral ou
corticoïde inhalé (1). Puis en 2018, les pouvoirs ments par le pharmacien d’officine. Les “bilans
publics ont mis en place les “bilans partagés de partagés de médication” sont effectués au moyen
médication”, une autre mission rémunérée que les d’entretiens entre le pharmacien et le patient (2).
pharmaciens d’officine sont autorisés à organiser. Ces Selon la réglementation et l’assurance maladie, lors du
bilans consistent à analyser le traitement d’un patient premier entretien, le pharmacien recense les informations
dans son ensemble, dans l’objectif de réduire le risque concernant le patient, son mode de vie, son état de
iatrogène. Ils font l’objet d’une convention signée entre santé : par exemple, l’état de sa fonction rénale, sa
l’assureur maladie obligatoire et les capacité de déglutition, des troubles visuels éventuels. Il
représentants des pharmaciens d’officine (2). Des recense les informations sur l’ensemble des
bilans de médication effectués par des phar- médicaments ou autres produits en lien avec la santé
maciens d’officine, en coopération avec des méde-cins, (compléments alimentaires, plantes, etc.) pris par le
ont été mis en place depuis plusieurs années, notamment patient, et l’interroge sur d’éventuels problèmes
en Australie, au Canada et dans plusieurs pays d’observance (2).
européens. Selon diverses études, ils per-mettent de Le pharmacien est aussi autorisé à prendre en compte
réduire le nombre de médicaments prescrits, d’aider les des résultats d’analyses biologiques, et les antécédents
patients à mieux comprendre leur traitement et ainsi médicaux du patient, à partir du dossier médical partagé
favoriser l’observance. Les résultats des études sont s’il existe, du dossier pharmaceu-tique, ou en recueillant
discordants concernant l’impact de ces bilans sur la des informations auprès du patient et du médecin traitant
réduction des hospita-lisations ou de la mortalité (3). (2).
Le pharmacien analyse ensuite ces données, re-
En France, quelles sont les modalités pratiques cherche d’éventuels effets indésirables ou inter-
des “bilans partagés de médication” ? actions médicamenteuses ou problèmes d’obser-
vance, et propose d’éventuels changements :
Des patients âgés souvent polymédicamentés. changement de forme pharmaceutique, ajustement
Beaucoup de personnes âgées prennent plusieurs de doses, déprescription d’un ou plusieurs médi-
médicaments à la fois, ce qui est source d’effets in- caments, ajout d’un médicament (2).
désirables et d’interactions médicamenteuses. Par Ses conclusions sont transmises, si possible par
exemple en France, près de 4 millions des patients âgés messagerie sécurisée, au médecin traitant pour
de 65 ans et plus prennent de manière chronique au avis. Le pharmacien restitue ensuite au patient, lors
moins cinq substances médicamenteuses diffé-rentes. En d’un entretien dit conseil, les résultats de son ana-
2013, il a été estimé que les effets indési-rables de ces lyse et de ses échanges avec le médecin traitant.
médicaments sont la cause d’environ 7 500 morts par an Le pharmacien planifie ensuite avec le patient une
et de 3,4 % des hospitalisations chez les patients âgés de évaluation de l’observance du traitement éventuel-
65 ans et plus (4). lement adapté (2,7).
L’utilisation de certains de ces médicaments n’est
pas toujours justifiée. Par exemple, des études ont Rémunération du pharmacien. La rémunération du
montré que la prescription d’une benzodiazépine, pharmacien qui a conduit les entretiens est fixée la
qui expose notamment à des chutes aux consé- première année à 60 € par patient quand toutes

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RAYON DES NOUVEAUTÉS

les étapes du bilan ont été effectuées. Ensuite, la 6- Prescrire Rédaction “Personnes âgées : moins de
rémunération annuelle est fixée à : 30 € « en cas de benzodiazépines grâce à une formation directe des patients” Rev
Prescrire 2017 ; 37 (406) : 633.
nouveau(x) traitement(s) », avec une actualisation 7- Assurance maladie “Le bilan de médication, centré sur le
de l’analyse effectuée précédemment, un entretien patient, coordonne les professionnels dans la durée”
“conseil” et une évaluation de l’observance ; 20 € « 22 décembre 2017 : 8 pages.
8- “Décret n° 2018-841 du 3 octobre 2018 relatif aux conseils et
en cas de continuité de traitement », avec deux prestations pouvant être proposés par les pharmaciens d’officine dans
évaluations de l’observance du traitement (2,7). La le but de favoriser l’amélioration ou le maintien de l’état de santé des
personnes” Journal Officiel du 5 octobre 2018 : 2 pages.
rémunération du pharmacien est versée par l’assu- 9- Prescrire Rédaction “Conciliation des traitements
rance maladie auprès de l’officine. médicamenteux : une démarche pour diminuer le nombre
Des documents (fiches de suivi et guide) destinés d’erreurs” Rev Prescrire 2017 ; 37 (399) : 63-65.
10- USPO “Les bilans partagés de médication sont une priorité
aux pharmaciens pour la conduite de ces entretiens pour le Directeur de la Cnamts et toute la profession” 19 octobre
sont disponibles sur le site de la Caisse nationale 2018 : 2 pages.
d’assurance maladie des travailleurs salariés (www.
ameli.fr). Ils énumèrent les différents points à abor-
der pendant l’entretien de recueil, et visent à four-
nir un support pour l’analyse du traitement (2,7).
SUR LE MARCHÉ
 En pratique  Des pharmaciens de plus en plus
attendus en matière de soins. Ces bilans Exacto Test HIV° en officine :
s’inscrivent dans un contexte d’évolution importante du
métier de pharmacien et de sa rémunération, avec
un autotest du HIV simple
aussi l’autorisation récente de proposer des “conseils à utiliser
et prestations” dans un objectif de santé publique (8).
Les effets indésirables liés à l’utilisation de médica-
ments sont une réalité quotidienne, particulièrement
chez les personnes âgées qui prennent de nombreux
E n France, mi-2018, Exacto Test HIV°, un autre autotest
de dépistage de l’infection par le virus de l’immunodéficience
médicaments. Des expériences dans d’autres pays de humaine (HIV) a été com-mercialisé en officine, et autorisé à
bilans de médication, et l’expérience française à la vente sur les
l’hôpital de “conciliation médicamenteuse” consistant à sites internet des officines (1à3).
effectuer un bilan médicamenteux à différentes étapes Comme Autotest VIH° et Insti°, deux autres auto-tests
du parcours de soins du patient, ont montré leur intérêt du HIV, Exacto Test HIV° est un dispositif médical de
pour repérer et corriger des erreurs et diminuer la diagnostic in vitro à usage unique, utilisable sans
consommation de médicaments (3,9). l’intermédiaire d’un soignant, et il peut être dispen-sé à
En France, il est bienvenu que pareils bilans soient toute personne, y compris mineure. Ces trois autotests du
rendus possibles en ville. Le dispositif choisi avec ces HIV ne sont pas remboursables par la Sécurité sociale fin
“bilans partagés de médication” a encore à faire ses 2018. Au 30 octobre 2018, le prix de vente conseillé par
preuves. Il nécessite de la part des pharmaciens de la firme commercialisant Exacto Test HIV° est d’environ
dépasser certaines difficultés, d’organisation du temps et 10 €, contre environ 25 € pour chacun des deux autres
de l’espace de travail, de lourdeur admi-nistrative, de (1à4).
relation avec les médecins prescripteurs. En octobre Ces trois autotests du HIV sont à effectuer sur du sang
2018, des représentants des pharmaciens notaient « un capillaire. Leur fiabilité est maximale lorsqu’ils sont
démarrage plus lent que prévu » pour ces bilans « mais utilisés au moins 3 mois après un risque d’ex-position au
des chiffres encourageants pour les premières semaines HIV, avec des performances voisines. Selon nos tests,
d’octobre » (10). Exacto Test HIV° est le plus simple des trois autotests à
Ces bilans sont une occasion pour les utiliser : prélèvement d’une goutte de sang, à déposer sur
pharmaciens d’officine de faire valoir leur métier de la plaquette fournie dans un premier “puits”, puis ajout de
pharmacien-soignant, et d’instaurer, ou renforcer, à deux gouttes de réactif dans un second “puits”. Il convient
partir des traitements des patients, une relation d’at-tendre 10 minutes avant de lire le résultat (1à3).
avec les autres soignants dans un esprit de
complémentarité et d’amélioration des soins. Le marché des autotests du HIV en officine
©Prescrire s’étoffe, avec des produits de maniements et de
prix diffé-rents. Quel que soit l’autotest du HIV
Extraits de la veille documentaire Prescrire
utilisé, il im-porte de rappeler leurs limites de
1- Prescrire Rédaction “Suivis pharmaceutiques rémunérés : les orga-
niser dans l’intérêt des patients” Rev Prescrire 2017 ; 37 (399) : 18-19.
fiabilité, notam-ment en cas d’exposition supposée
2- “Arrêté du 9 mars 2018 portant approbation de l’avenant 12 à au virus datant de moins de 3 mois (1à3).
la convention nationale du 4 mai 2012, organisant les rapports ©Prescrire
entre les pharmaciens titulaires d’officine et l’assurance maladie”
Journal Officiel du 16 mars 2018: 19 pages. Extraits de la veille documentaire Prescrire
3- Qassemi S “Le bilan de médication en soins primaires : formation des
pharmaciens à l’optimisation thérapeutique des patients âgés” Bordeaux, 1- Biosynex “Exacto Test HIV-Notice” août 2018.
Faculté des Sciences pharmaceutiques, année 2017 : 106 pages. 2- Prescrire Rédaction “Autotest de dépistage du HIV en officine :
4- Assurance maladie “Améliorer la qualité du système de santé informer et accompagner les utilisateurs” Rev Prescrire 2015 ; 35
et maîtriser les dépenses - Propositions de l’Assurance maladie (383) : 658-659.
pour 2018” 7 juillet 2017 : 206 pages. 3- Prescrire Rédaction “Insti° : deuxième autotest du HIV
5- Prescrire Rédaction “Ehpad : prescription et administration des commer-cialisé en officine” Rev Prescrire 2017 ; 37 (404) : 421.
médicaments, à améliorer” Rev Prescrire 2017 ; 37 (407) : 703-704. 4- Biosynex “Courriel à Prescrire” 12 septembre 2018 : 1 page.

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VIGILANCES
es
Les 39 journées françaises de pharmacovigilance se sont déroulées en juin 2018 à Toulouse. Chaque
année, les journées de pharmacovigilance donnent un aperçu de notifications d’effets indésirables
médicamenteux des professionnels de santé et des patients aux centres régionaux de pharmacovigilance
(CRPV) et du contenu de la base de données française de pharmacovigilance.
Voici, pages 909 à 914, une sélection de communications qui nous ont paru intéressantes pour améliorer
les pratiques de soins. Des retours d’informations utiles qui encouragent à notifier.

es
39 journées françaises
de pharmacovigilance
Les faits marquants
Antagonistes des récepteurs de l’angiotensine
II, alias sartans : psoriasis
●●89 notifications de psoriasis imputés à des En revanche, les RCP des spécialités à base d’un
sar-tans enregistrées dans la base de données sartan ne mentionnent pas la survenue de psoriasis
fran-çaise de pharmacovigilance sur une comme effet indésirable (6).
période de 20 ans.
 En pratique  La prise d’un IEC ou d’un sartan est un
facteur possible de survenue de psoriasis.

L e Centre régional de pharmacovigilance de Reims a


analysé les notifications de psoriasis imputés à des
©Prescrire

sartans enregistrées dans la base de données française


de pharmacovigilance jusqu’en février 2016 (1). Le
losartan a été le premier sartan commercialisé en
Noms commerciaux des médicaments en
France au milieu des années 1990 (2). France F, Belgique B et Suisse CH
89 notifications de psoriasis ont été analysées chez
des patients âgés de 29 ans à 90 ans (66 ans en losartan – F B COZAAR° ou autre ; CH COSAAR° ou autre
moyenne), avec un peu plus d’hommes que de
femmes (1). Le plus souvent, les troubles sont surve-
nus dans la première année d’exposition au sartan. Ils
ont régressé pour les deux tiers des patients après Extraits de la veille documentaire Prescrire
l’arrêt du sartan. Une analyse dite de disproportion- 1- Azzouz B et coll. “Psoriasis during angiotensin receptor blocker
exposure : a case/non case study using the French
nalité a mis en évidence une plus grande proportion es
Pharmacovigilance Database” 39 journées de pharmacovigilance,
de notifications de psoriasis avec plusieurs sartans Toulouse : 12-14 juin 2018. Fundam Clin Pharmacol 2018 ; 32 (suppl.
qu’avec les autres médicaments répertoriés dans la 1) : 45 (abstract PM2-018 : version complète).
2- Prescrire Rédaction “Losartan : Cozaar° comprimés” Rev
base (1). Prescrire 1996 ; 16 (160) : 196-199.
Le profil d’effets indésirables des sartans est globa- 3- Prescrire Rédaction “Inhibiteurs de l’enzyme de conversion
lement peu différent de celui des inhibiteurs de (IEC), et antagonistes de l’angiotensine II, alias sartans” Rev
Prescrire 2018 ; 38 (416 suppl. Interactions médicamenteuses).
l’enzyme de conversion (IEC), qui sont connus pour 4- “ACE inhibitors”. In : “Martindale The complete drug reference” The
exposer au psoriasis (3,4). Les résumés des Pharmaceutical Press, London. Site www.medicinescomplete.com
caractéristiques (RCP) français de la plupart des consulté le 8 octobre 2018 : 54 pages.
5- ANSM “RCP des substances captopril + cilazapril + énalapril + fosi-
spécialités à base d’un IEC mentionnent dans les nopril + lisinopril + périndopril + quinapril + ramipril + trandolapril +
effets indésirables le psoriasis, l’aggravation du zofénopril“. Site ansm.fr consulté le 18 octobre 2018.
psoriasis, ou la dermatite psoriasi-forme (5). 6- ANSM “RCP des substances candésartan + éprosartan +
irbésartan + losartan + olmésartan + telmisartan + valsartan“.
Site ansm.fr consulté le 18 octobre 2018.

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a revue rescrire écembre omeage
VIGILANCES

Atropiniques : dégénérescences maculaires liées à l’âge ?


●●Dans une étude cas/témoins menée dans plusieurs médicaments atropiniques (31 médicaments
des centres d’ophtalmologie en France, il est atropiniques différents au total, surtout des psychotropes)
apparu un lien entre dégénérescence maculaire versus 10 patients (5 %) du groupe témoin, soit un risque
liée à l’âge (DMLA) et prise de médicaments relatif (RR) estimé à 2,4 (intervalle de confiance à 95 %
atro-piniques. Ce risque a paru augmenter avec (IC95) : 1,1 à 5,3). Ce risque a paru d’autant plus impor-tant
l’inten-sité de l’activité atropinique des que l’intensité de l’activité atropinique des médi-caments
médicaments et la durée d’exposition. concernés était élevée et que la durée d’expo-sition à un
atropinique était longue. Pour une exposition cumulée de 15
ans ou plus, le risque relatif a été estimé à 5,9 (IC95 : 1,2 à

L a dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA)


est une dégradation progressive de l’épithélium pig-
28,3) (2).
Le mécanisme liant l’exposition aux atropiniques à
la DMLA n’est pas connu. Une des hypothèses
menté et des photorécepteurs de la rétine, avec une
présence de dépôts maculaires appelés drusen (1,2). avancées est une augmentation par effet atropinique
Dans les pays riches, c’est la première cause de perte des dépôts de bêta-amyloïde (constituant des drusen)
d’acuité visuelle chez les personnes âgées de plus de sur la rétine (1,2).
50 ans (2).
Des équipes du Centre hospitalo-universitaire et de
 En pratique  L’association statistique qui apparaît dans
l’Inserm de Montpellier ont mené une étude cas/témoins sur
cette étude entre la prise de médicaments atro-piniques
des données issues de quatre centres d’ophtalmo-logie en
et la DMLA incite à une évaluation rigoureuse de la
France entre juillet 2016 et juin 2017 (1,2). Cette étude a
balance bénéfices-risques de tout traitement atropinique,
comparé l’exposition aux médicaments atro-piniques durant afin d’éviter son utilisation quand ses bénéfices attendus
au moins 3 mois au cours de la vie de 200 personnes âgées ne sont pas majeurs.
de plus de 60 ans atteintes de DMLA, versus 200 témoins ©Prescrire
âgés de plus de 60 ans qui avaient consulté pour un bilan
ophtalmologique et indemnes de DMLA. Divers facteurs de
risque de DMLA (âge, sexe, fumeur ou non, antécédent
familial de DMLA, consommation d’alcool, usage Extraits de la veille documentaire Prescrire
d’anticoagulants et d’anti-inflammatoires) ont été pris en 1- Aldebert G et coll. “Anticholinergic drug use and risk for age-
es
compte dans les analyses (1,2). related macular degeneration : a case-control study” 39
journées de phar-macovigilance, Toulouse : 12-14 juin 2018.
Fundam Clin Pharmacol 2018 ; 32 (suppl. 1) : 44.
26 patients (13 %) du groupe de patients atteints de DMLA 2- Aldebert G et coll. “Association of anticholinergic drug use with
ont été exposés durant au moins 3 mois à un ou risk for late age-related macular degeneration” JAMA Ophthalmol
2018 ; 136 (7) : 770-778 et supplément : 2 pages.

Association inhibiteur de l’enzyme de conversion

+ gliptine : risque accru d’angiœdème


●●Une fréquence accrue d’angiœdème par deux 6,7 ; intervalle de confiance à 95 % (IC95) : 6,6 à 6,8).
mécanismes différents. Ce signal a été 28 fois plus fréquent avec l’association
IEC + gliptine que le signal de base. La prise de gliptine
seule n’a pas été associée à un signal particulier de
e Centre régional de pharmacovigilance de Grenoble surcroît d’angiœdème (1).
La analysé les observations d’angiœdèmes imputés Les IEC exposent à des angiœdèmes par un méca-
à des inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) ou nisme qui n’est pas immunoallergique (2). D’une part,
à des gliptines, rapportées dans la base de données ils s’opposent à la dégradation de la bradykinine dont
de pharmacovigilance de l’Organisation mondiale de l’accumulation entraîne des angiœdèmes. L’angiœdème
la santé (OMS), jusque fin 2017 (1). bradykinique n’entraîne ni urticaire, ni conjonctivite,
22 827 cas d’angiœdèmes imputés à des IEC, 688 cas ni bronchospasme (3). D’autre part, par ce même
à des gliptines et 269 cas à une association d’un IEC mécanisme non immunoallergique, les IEC aggravent
avec une gliptine ont été enregistrés dans cette base (1). des angiœdèmes d’autres origines, par exemple liés
Une analyse dite de disproportionnalité a mis en à des médicaments ou à des venins d’hyménoptères (4).
évidence une plus grande proportion de notifications Les angiœdèmes sont un effet indésirable connu des
d’angiœdèmes avec les IEC qu’avec les autres médi- gliptines mentionné dans les résumés des caractéris-
caments répertoriés dans la base (rapport de cotes de tiques (RCP). Les angiœdèmes liés aux gliptines sont

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VIGILANCES

surtout de mécanisme immunoallergique (3,5,6). Par Extraits de la veille documentaire Prescrire


1- Lepelley M et coll. “Bradykinin-mediated angioedema associated with
leur effet inhibiteur de la dipeptidyl peptidase 4 (DPP-
combination of angiotensin-converting enzyme and dipeptidyl peptidase IV
4), les gliptines causent aussi une accumulation de inhibitors: a disproportionality analysis from the WHO database” 39
es

bradykinine, ce qui augmente le risque d’angiœdème journées de pharmacovigilance, Toulouse : 12-14 juin 2018. Fundam Clin
Pharmacol 2018 ; 32 (suppl. 1) : 9 (abstract CO-016).
non immunoallergique (3,5).
2- Prescrire Rédaction “IEC : angioedème intestinal (suite)” Rev
Cette étude met en évidence un signal de Prescrire 2018 ; 38 (419) : 668-669.
pharmaco-vigilance suggérant que l’association d’un 3- Echos De Pharmacovigilance - Régions Bourgogne-Franche-
IEC avec une gliptine accroît le risque d’angiœdème Comté et Grand-Est. Bulletin n° 22. Site http://crpv.chu-nancy.fr/
consulté le 26 juin 2018 : 6 pages.
par deux mécanismes différents. 4- Prescrire Rédaction “Inhibiteurs de l’enzyme de conversion
(IEC), et antagonistes de l’angiotensine II, alias sartans” Rev
Prescrire 2018 ; 38 (416 suppl. Interactions médicamenteuses).
 En pratique  Ces résultats incitent à prendre en compte 5- Brown NJ et coll. “Dipeptidyl peptidase-IV inhibitor use
un risque accru d’angiœdème quand une association associated with increased risk of ACE inhibitor-associated
d’un IEC avec une gliptine est envisagée, comme avec angioedema” Hyper- tension 2009 ; 54 (3) : 516-523.
d’autres médicaments qui exposent aux angiœdèmes. 6- Prescrire Rédaction “Incrétinomimétiques anti DPP-4
(gliptines) : sitagliptine, etc.” Rev Prescrire 2018 ; 38 (416 suppl.
©Prescrire Interactions médicamenteuses).

Progestatifs : méningiomes (suite)


●●Des méningiomes 10 ans environ après un La cyprotérone à forte dose, prise par exemple dans
début de traitement par progestatif dans le cadre l’hirsutisme à la dose de 50 mg par jour 20 jours par
d’une contraception hormonale ou d’une hormono- mois, pendant 5 ans, expose les femmes à un risque
thérapie substitutive de la ménopause. de méningiome multiplié par plus de 20 (5).

 En pratique  Quand un méningiome est diagnostiqué

L e Centre régional de pharmacovigilance d’Amiens a


rapporté une série de 5 observations de ménin-giomes qui
chez une patiente prenant un progestatif, l’arrêt du
progestatif est une option à proposer à la patiente pour
tester l’hypothèse très plausible d’une stabilisation, voire
lui ont été notifiées entre 2012 et 2017 (1). Il s’agit de 5 d’une régression des troubles.
patientes qui prenaient une contraception hormonale ou ©Prescrire
une hormonothérapie substitutive de la ménopause à
base d’un progestatif tel que l’étonoges-trel, l’acétate de
cyprotérone, la progestérone, le nomé-gestrol ou la
médrogestone. Trois patientes avaient un traitement
estrogénique associé (en application cuta-
Noms commerciaux des médicaments en
née ou patch) (1). France F, Belgique B et Suisse CH
Le méningiome a été diagnostiqué après une durée
d’exposition moyenne au progestatif de 10 ans (1). acétate de cyprotérone – F B ANDROCUR° ou autre ;
Le méningiome a régressé après l’arrêt du progestatif chez CH ANDROCUR°
une patiente. Chez une autre patiente, le méningiome a été acétate de cyprotérone + éthinylestradiol
– F B CH DIANE 35° ou autre
opéré et la présence de récepteurs à la progestérone a été
mise en évidence sur la tumeur. Dans les trois autres cas, le étonogestrel implant sous-cutané – F NEXPLANON° ;
B CH IMPLANON NXT°
méningiome n’a pas régressé et une patiente a eu une perte
nomégestrol – F B LUTENYL° ou autre ;
d’odorat (anosmie) irréversible (1). CH (en association dans ZOELY°)
Les méningiomes sont des tumeurs de la méninge le plus médrogestone – F COLPRONE° ; B CH (––)
souvent bénignes (2à4). Leur gravité est liée à leur volume progestérone – F B UTROGESTAN° ou autre ;
dans la boîte crânienne, non extensible, avec compression CH UTROGESTAN°
des structures cérébrales adjacentes menant à des crises
d’épilepsie. Ils sont 2 à 3 fois plus fréquents chez les femmes
que chez les hommes, avec des poussées durant la
grossesse (1à4). Il semble qu’environ 70 % des Extraits de la veille documentaire Prescrire
es
méningiomes expriment des récepteurs à la progestérone, et 1- Féral A et coll. “Hormonal therapy-induced meningioma” 39
qu’environ 30 % ex-priment des récepteurs aux estrogènes jour-nées de pharmacovigilance, Toulouse : 12-14 juin 2018.
Fundam Clin Pharmacol 2018 ; 32 (suppl. 1) : 81.
(3). 2- Prescrire Rédaction “Progestatifs et méningiomes
Une étude de cohorte étatsunienne entre 1993 et intracrâniens” Rev Prescrire 2014 ; 34 (373) : 834.
3- Prescrire Rédaction “Traitement hormonal substitutif de la méno-
2003, portant sur plus de 350 000 femmes dont pause et méningiomes” Rev Prescrire 2010 ; 30 (316) : 118.
environ 1 400 atteintes d’un méningiome, a montré un 4- Park JK et coll. “Epidemiology, pathology, clinical features, and
risque de méningiome multiplié par 2 environ chez les diagnosis of meningioma” UpToDate. Site www.uptodate.com
consulté le 20 octobre 2018 : 23 pages.
utili-satrices d’un traitement hormonal substitutif de la 5- Prescrire Rédaction “Cyprotérone : méningiomes (suite)” Rev
ménopause (3). Prescrire 2018 ; 38 (421) : 829.

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a revue rescrire écembre omeage
VIGILANCES

Méthylphénidate : beaucoup d’adultes


parmi les nouveaux utilisateurs en France

●●Entre 2010 et 2013, en régions Provence-Alpes- 14 % des adultes à qui le méthylphénidate a été
Côte-d’Azur et Corse, un tiers des nouveaux utilisa- prescrit étaient âgés de plus de 50 ans, souvent avec
teurs de méthylphénidate ont été des adultes, sur-tout une benzodiazépine (62 %), un antidépresseur (58 %)
âgés de 25 ans à 49 ans. Les doses journalières ou un antiparkinsonien (26 %). Environ 12 % avaient
moyennes ont été supérieures aux doses préconi- eu une prescription de modafinil, avant celle de mé-
sées, avec une utilisation la plupart du temps hors de thylphénidate (4,5).
l’autorisation de mise sur le marché (AMM).
 En pratique  Les données de l’évaluation de la
consommation de méthylphénidate en région PACA et en

E n France, le méthylphénidate, une amphétamine,


est autorisé depuis les années 1990 dans les troubles
Corse de 2010 à 2013, probablement extrapolables à la
France, montrent une utilisation très fréquente hors AMM
et à des doses élevées chez des adultes. Les situations
déficitaires de l’attention avec hyperactivité chez les cliniques précises ne sont pas connues : expérimentales,
enfants et les adolescents voire quand les symptômes
persistent chez les adultes, ainsi que dans des détournement ou encadrement d’une dépendance suite à
narcolepsies chez les enfants et les adultes en cas un usage détourné ? Quoi qu’il en soit, ce nombre
d’inefficacité du modafinil (1à3). interroge sur la justification d’exposer ces patients aux
Depuis sa commercialisation, la forte augmentation des effets indésirables d’une amphétamine.
ventes de méthylphénidate en France et dans le monde a ©Prescrire
conduit les centres d’évaluation et d’infor-mation sur les
pharmacodépendances (CEIP) de Mar-seille et de Grenoble
à analyser en détail la consom-mation de cette substance.
L’étude a été réalisée à partir des données de Noms commerciaux des médicaments en
remboursement du système général d’Assurance maladie France F, Belgique B et Suisse CH
français des régions Provence-Alpes-Côte-d’Azur (PACA) et
Corse, qui cou-vrait plus de 4 millions de personnes en 2011 buprénorphine substitution – F CH SUBUTEX° ou autre ; B
SUBUTEX°
(4,5).
méthadone – F METHADONE AP-HP ° ; B MEPHENON° ;
Entre 2010 et 2013, 3 534 nouveaux utilisateurs de CH KETALGINE° ou autre
méthylphénidate ont été recensés (c’est-à-dire sans méthylphénidate – F RITALINE°, CONCERTA LP°,
remboursement de méthylphénidate pendant les 6 RITALINE LP° ou autre ; B CONCERTA°, RILATINE° ou
mois qui ont précédé la période de suivi). Environ un autre ; CH RITALINE°, RITALINE LA° ou autre
tiers étaient des adultes, soit 1 199 personnes, avec modafinil – F MODIODAL° ou autre ; B PROVIGIL° ;
CH MODASOMIL°
des proportions proches de femmes et d’hommes (5).
Chez les adultes, les prescriptions ont été réalisées
autant par des médecins généralistes que par des
médecins hospitaliers (5).
Extraits de la veille documentaire Prescrire
Parmi les adultes, 198 patients (16 %) étaient âgés
1- Prescrire Rédaction “Méthylphénidate : banalisé malgré les
de 18 ans à 24 ans. 42 % des consommateurs de dangers” Rev Prescrire 2017 ; 37 (406) : 616.
cette tranche d’âge étaient des étudiants (5). La durée 2- ANSM “RCP-Ritaline” 9 février 2018 : 14 pages.
mé-diane de consommation était de 5,5 mois, plus 3- ANSM “RCP-Concerta LP” 12 février 2018 : 13 pages.
4- Pauly V et coll. “Patterns and profiles of methylphenidate use in
courte que celle de la tranche d’âge 12 ans à 17 ans. adults : a cohort study from the regional French health insurance
Le groupe des 25 ans à 49 ans, soit 831 patients, re- es
database” 39 journées de pharmacovigilance, Toulouse : 12-14 juin
présentait 70 % des adultes. La moitié de ces patients 2018. Fundam Clin Pharmacol 2018 ; 32 (suppl. 1) : 10.
5- Pauly V et coll. “Patterns and profiles of methylphenidate use
prenaient une dose quotidienne d’au moins 90 mg, alors que
both in children and adults” Br J Clin Pharmacol 2018 : 13 pages.
la dose maximale préconisée par le résumé de
caractéristiques (RCP) est de 54 mg ou 60 mg selon les
spécialités pharmaceutiques (2à5). Plus de la moitié ont eu
au moins un renouvellement de leur prescription. La durée
médiane de consommation a été de 7,5 mois. Dans ce
groupe des 25 ans à 49 ans, les patients ont souvent reçu
des prescriptions d’autres médicaments psy-chotropes :
benzodiazépines (67 %) ; antidépresseurs (40 %) ;
antalgiques opioïdes (39 %) ; neuroleptiques (35 %) ;
médicaments utilisés pour la substitution d’une dépendance
aux opioïdes, buprénorphine (23 %) ou méthadone (13 %).
Seulement 2 % des patients avaient eu une prescription de
modafinil avant celle de méthyl-phénidate, tel que mentionné
dans l’AMM (2à5).

Page 912 • La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422


VIGILANCES

Insuffisance hépatique aiguë médicamenteuse :


surdose de paracétamol souvent en cause
●●En France, en 2015-2016, une surdose de para- est un antalgique de premier choix à dose modérée, à
cétamol a été la principale cause médicamenteuse condition de ne pas dépasser une dose maximale
d’insuffisance hépatique aiguë motivant une greffe. jour-nalière de 4 000 mg (soit 4 g) chez les adultes.
Sa toxicité hépatique est augmentée chez certains
patients, notamment en cas d’affection hépatique, de

L’ unité de pharmaco-épidémiologie de Bordeaux a


analysé 140 dossiers de patients inscrits sur liste de
consommation élevée d’alcool, de jeûne prolongé, de
prise concomitante d’un médicament inducteur enzy-
matique tel qu’un antiépileptique ou le millepertuis
greffe hépatique pour une insuffisance hépatique (Arkogelules millepertuis° ou autre).
aiguë. Les dossiers ont été recueillis auprès de 17
centres de greffe hépatique en 2015 et 2016 en Le paracétamol est présent dans de nombreuses
France (1). Chez 60 patients, une cause non médica- spécialités en association avec d’autres médica-ments
menteuse d’insuffisance hépatique aiguë a été identi- (3). Expliquer aux patients comment repérer les
fiée, notamment virale ou auto-immune (1). dénominations communes internationales (DCI) des
Chez 80 autres patients, il n’a pas été identifié de cause
médicaments leur permet d’éviter de prendre plusieurs
non médicamenteuse. Il s’est agi surtout de femmes (61 %). spécialités contenant du paracétamol, et de s’exposer
Leur âge moyen était de 40 ans. Une greffe hépa-tique a été ainsi à une surdose (4).
effectuée chez 51 % de ces 80 patients. La recherche d’une ©Prescrire
cause médicamenteuse a montré que 76 de ces 80 patients
avaient été exposés à des médica-ments dans les 30 jours
précédant la date des premiers symptômes hépatiques. Chez
61 de ces patients, une surdose médicamenteuse aiguë a Extraits de la veille documentaire Prescrire
été la cause retenue ; il s’agissait du paracétamol chez 58 1- Lignot-Maleyran S et coll. “Drug exposure and risk of acute
patients. Les 15 autres patients prenaient au moins un liver failure leading to registration for liver transplantation (ALFT) :
results of the SALT-III study in adults in France”
médicament dont 5 du paracétamol, aux posologies
recommandées. Quatre pa-tients ne prenaient pas de
médicament (1).

 En pratique  Les surdoses de paracétamol exposent à


des atteintes hépatiques aiguës graves, parfois mortelles
en l’absence de greffe hépatique (2). Le paracétamol

La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422 • Page 913


VIGILANCES

Une surveillance symptomatique, et parfois du bilan Extraits de la veille documentaire Prescrire


sanguin et de la parasitémie, est prudente. La 1- Joyau C et coll. “Hemolytic anemia and artemisinin derivatives:
es
a case series” 39 journées de pharmacovigilance, Toulouse,
survenue d’une fatigue intense dans le mois qui suit le 12-14 juin 2018. Fundam Clin Pharmacol 2018; 32 (suppl. 1) : 32
traitement d’un paludisme par dérivé de l’artémisinine (abstract PM1-039).
2- Aldámiz-Echevarría Lois T et coll. “Delayed haemolysis secondary
justifie d’envisager une anémie hémolytique, qui to treatment of severe malaria with intravenous artesunate: Report on
requiert parfois un traitement spécifique. the experience of a referral centre for tropical infections in Spain”
©Prescrire Travel Med Infect Dis 2017 ; 15 : 52-56.
3- Lebrun D et coll. “Severe post-artesunate delayed onset
anaemia responding to corticotherapy : a case report” J Travel
Med 2018 ; 25 (1) ; 1-2.
4- Prescrire Rédaction “artésunate (Malacef°). Traitement
intraveineux de référence des accès graves de paludisme” Rev
Noms commerciaux des médicaments en Prescrire 2014 ; 34 (369) : 497-498.
France F, Belgique B et Suisse CH 5- “Artemisinin derivatives”. In : “MartindaleThe complete drug
reference” The Pharmaceutical Press, London. Site
artéméther + luméfantrine – F B CH RIAMET° arténimol www.medicinescomplete.com consulté le 26 juillet 2018 : 15 pages.
6- FDA “Coartem - artemether 20 mg/lumefantrine 120 mg tablets
+ pipéraquine – F B EURARTESIM° ; CH (––) artésunate
supplement approval” janvier 2018. Site www.accessdata.fda.gov
– F MALACEF° ; B CH (––) : 27 pages.
7- Breman JG et coll. “ Clinical manifestations of malaria in
nonpregnant adults and children” UpToDate. Site
www.uptodate.com consulté le 21 octobre 2018 : 16 pages.

Fluorouracil : encéphalopathies hyperammoniémiques

●●Quelques dizaines d’observations  En pratique  L’encéphalopathie hyperammoniémique


d’encépha-lopathies hyperammoniémiques est un effet indésirable rare et le plus souvent réversible
imputées au fluorouracil. du fluorouracil. Devant une altération de la conscience ou
une somnolence au cours d’une chimiothérapie avec le
fluorouracil, il est utile d’évoquer une hyper-ammoniémie.

L e Centre régional de pharmacovigilance (CRPV)


de Montpellier a analysé 70 observations d’hyper-
Il est prévisible que la capécitabine et le tégafur, des
précurseurs du fluorouracil, exposent aussi à des
encéphalopathies hyperammoniémiques.
ammoniémies liées au fluorouracil, un antitumoral
cytotoxique, enregistrées dans les bases de données ©Prescrire
de pharmacovigilance française et de l’Organisation
mondiale de la santé (OMS), ou publiées (1).
61 patients ont eu une altération de la conscience et
une somnolence lors d’un traitement à base de fluoro-
Noms commerciaux des médicaments en
uracil. L’arrêt des perfusions a été suivi de la France F, Belgique B et Suisse CH
régression des troubles chez 57 d’entre eux.
L’hyperammoniémie est survenue pendant la pre- acide folinique injectable – F FOLINATE DE CALCIUM
AGUETTANT° ou autre ; B VORINA° ou autre ;
mière cure pour la moitié des patients, le plus souvent CH LEUCOVORIN CALCIUM FARMOS° ou autre
le deuxième jour. L’ammoniémie était comprise entre capécitabine – F B CH XELODA° ou autre
58 et 712 micromoles par litre, avec une moyenne de
cisplatine – F CISPLATINE MYLAN° ou autre ;
289 micromoles par litre, pour une valeur normale en B CISPLATINE HOSPIRA° ou autre ; CH CISPLATINE
général inférieure à 55 micromoles par litre (1). TEVA° ou autre
La majorité des patients avaient reçu une chimiothé- fluorouracil – F CH FLUOROURACIL TEVA° ou autre ;
rapie cytotoxique en traitement d’un cancer colorectal B FLURACEDYL° ou autre
avec un protocole Folfox (fluorouracil + oxaliplatine) ou oxaliplatine – F CH ELOXATINE° ou autre ; B ELOXATIN°
ou autre
avec un protocole fluorouracil + cisplatine (1).
Le mécanisme des hyperammoniémies observées sous tégafur – F CH (—) ; B (en association dans TEYSUNO°)
fluorouracil, et des symptômes d’encéphalopathies qui en
résultent, n’est pas connu précisément. Une inhi-bition du
cycle de l’urée par un métabolite du fluoroura-cil est évoquée,
Extraits de la veille documentaire Prescrire
avec accumulation d’ammoniaque non convertie en urée,
es
mais transformée en glutamine, à l’origine d’une 1- Coccini C et coll. “5-fluorouracil and hyperammonemia” 39 journées de
pharmacovigilance, Toulouse: 12-14 juin 2018. Fundam Clin Pharma- col
augmentation de la pression intracrânienne et d’un œdème 2018 ; 32 (suppl 1) : 33 (abstract PM1-046 : version compète 1 page).
cérébral (2,3). De plus, l’acide folinique injectable, souvent 2- Thomas SA et coll. “Fluorouracil-induced hyperammonemia in
a patient with colorectal cancer” Anticancer Res 2015 ; 35 (12) :
associé avec le fluorouracil, peut provoquer des
6761-6763.
hyperammoniémies (4). Compte tenu du mécanisme évoqué, 3- Aparicio T et coll. “5-fluorouracil : metabolism and current indications in
il est prévisible que la capécitabine et le tégafur, des digestive cancer treatment” Gastroenterol Clin Biol 2002 ; 26 (1) : 38-47.
4- ANSM “RCP-Folinate de calcium Aguettant” 3 août 2018 : 5 pages.
précurseurs du fluorouracil, exposent aussi à des
5- Prescrire Rédaction “Fluoropyrimidines orales : capécitabine, etc.”
encéphalopathies hyperammoniémiques (5). Rev Prescrire 2018 ; 38 (416 suppl. Interactions médicamenteuses).

Page 914 • La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422


STRATÉGIES

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???
Prévention des
récidives de diverticulite
D’intérêt très variable selon les situations

RÉSUMÉ ●●Le risque de cancer du côlon ne semble accru


que chez les patients qui ont eu une diverticulite
●●Comment évaluer le risque de récidive après compliquée ou avec une évolution inhabituelle-
guérison d’une diverticulite aiguë du côlon sig- ment longue sous antibiotique.
moïde ? Un traitement préventif des récidives est-
il justifié chez certains patients ? Pour répondre à ●●Une colectomie segmentaire est parfois envi-
ces questions, nous avons réalisé une synthèse sagée pour soulager des symptômes digestifs per-
de l’évaluation disponible. sistants ou pour prévenir les récidives. Cette inter-
vention chirurgicale expose à une mortalité qui
●●Après guérison d’un épisode de diverticulite varie de 0,04 % à 2,5 %, selon l’âge et la présence
aiguë, 60 % à 75 % des patients sont asymptoma- de comorbidités, et à des complications avec mise
tiques, mais certains souffrent de symptômes en place d’une colostomie chez environ 6 % des
digestifs chroniques. patients opérés. Des récidives de diverticulite
aiguë surviennent chez environ 10 % des patients
●●Dans les dix années qui suivent un épisode de opé-rés.
diverticulite aiguë traitée sans chirurgie, une réci-
dive survient chez un quart à un tiers des patients, ●●La plupart des guides de pratique
surtout dans l’année qui suit. La plupart des réci- recommandent que la décision de colectomie
dives sont traitées sans chirurgie. À chaque épi- préventive soit pesée au cas par cas, en prenant
sode, la mortalité est d’environ 0,3 % avant 50 ans en compte les facteurs exposant aux récidives
et augmente avec l’âge, jusqu’à près de 6 % après compliquées et les risques de la chirurgie.
80 ans.
●●L’effet préventif de l’arrêt du tabac, de la perte de
●●Le risque de récidive mortelle ou motivant une poids s’il existe un surpoids et de l’exercice phy-
chirurgie en urgence est accru chez les patients sique est incertain, mais ces interventions ont par
qui ont eu une diverticulite aiguë compliquée et ailleurs des effets bénéfiques sur la santé. Un régime
chez ceux qui ont une immunodépression ou une riche en fibres, sans interdit alimentaire, est sou-vent
insuffisance rénale. recommandé, sans preuve de son efficacité.

L P •D 2018 • T 38 N° 422 • P 915


a revue rescrire écembre omeage
STRATÉGIES

●● Chez les patients qui ont eu un épisode de aiguë, la mortalité à l’hôpital a été similaire au
diver-ticulite aiguë, mieux vaut éviter les anti- cours du premier, du deuxième et du troisième
inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les épisode de diverticulite aiguë, mais a augmenté
corticoïdes au long cours, car ils augmentent le avec l’âge : de l’ordre de 0,3 % avant 50 ans, et de
risque de diverticulite compliquée, sans que cela près de 6 % après 80 ans (7).
justifie l’arrêt de l’aspi- rine à dose antiagrégante.
Cetains patients exposés à un risque accru de
●●Aucun médicament n’a d’efficacité démontrée récidive grave. Le risque de récidive après un
en prévention des récidives de diverticulite.
épisode de diverticulite aiguë traité sans colectomie
Rev Prescrire 2018 ; 38 (422) : 915-919
est accru chez les patients âgés de moins de 50 ans.
Il diminue avec l’âge (4,7,8,11).
Le risque de récidive mortelle ou nécessitant une

C hez la plupart des patients qui ont un premier épisode


de diverticulite aiguë non compliquée du côlon
intervention chirurgicale en urgence est accru chez les
patients qui ont eu une diverticulite aiguë compli-quée,
par exemple par un abcès, traitée sans colec-tomie, ainsi
sigmoïde, alias sigmoïdite aiguë, un
que chez les patients qui ont une immuno-dépression ou
traitement médical permet d’obtenir la guérison en
une insuffisance rénale (4,7à9,12).
quelques jours à quelques semaines (lire dans le
numéro 421 p. 837-842) (1). Certains patients ont
Après diverticulite banale : pas d’augmen-tation
plusieurs épisodes de diverticulite.
du risque de cancer colorectal. Une coloscopie
Comment évaluer le risque de récidive après
est souvent proposée après la guérison d’un premier
guérison d’un épisode aigu de diverticulite du côlon
épisode de diverticulite aiguë, dans le but de
sigmoïde ? Un traitement préventif des récidives
rechercher un cancer colique. En effet, les symptômes
est-il justifié chez certains patients ? Pour répondre
de ces deux affections sont parfois proches et, au
à ces questions, nous avons réalisé une synthèse
scanner, les images d’un cancer colique ressemblent
de l’évaluation disponible, selon la méthode habi-
parfois à celles d’une diverti-culite avec abcès
tuelle de Prescrire, rappelée page 919.
(4,6,10,12).
Nous n’abordons pas dans ce texte le suivi des
Chez les patients qui ont eu une diverticulite
patients après colectomie* pour diverticulite colique.
aiguë non compliquée confirmée par scanner, les
cancers du côlon ne sont pas plus fréquents que
Suites simples dans le reste de la population (4,6,10). Le risque de
cancer du côlon associé à une diverticulite aiguë ne
chez plus de la moitié des patients
semble accru que chez les patients qui ont eu une
diverti-culite compliquée, et chez ceux dont
Dans les suites d’une diverticulite aiguë, 60 % à 75
l’évolution de la diverticulite a été inhabituellement
% des patients sont asymptomatiques. Chez
longue sous antibiotique (4,6,10,13).
certains patients, des symptômes digestifs chro-
Les guides de pratique clinique que nous avons
niques sont attribués à la diverticulose : douleurs
retenus font des recommandations divergentes en
abdominales, ballonnements, troubles du tran-sit
ce qui concerne la place de la coloscopie après un
(2,3). Dans de rares cas, des symptômes abdo-
épisode de diverticulite aiguë (4à6,9,10,12). La
minaux chroniques résultent de complications telles
Haute autorité de santé (HAS) française ne la
que des sténoses ou des fistules (1,4,5).
recommande que chez les patients qui ont eu une
Récidives chez un quart à un tiers des pa-tients, diverticulite compliquée (4). Cette recommandation
est conforme aux données de l’évaluation.
et en général bénignes. Dans les dix années qui
Pour limiter le risque de perforation lors de la
suivent un premier épisode de diverti-culite aiguë
coloscopie, il est habituel d’attendre 6 à 8 semaines
traitée sans chirurgie, une récidive survient chez un
après la guérison de l’épisode aigu avant de faire
quart à un tiers des patients (1,4,6,7). Le risque de
cet examen (6,12).
récidive est plus élevé après un deu-xième épisode de
diverticulite aiguë qu’après un premier épisode (8). Il
est plus élevé dans l’année qui suit un épisode de
Colectomie à distance pour éviter
diverticulite aiguë (8). La plupart des études n’ont pris
les récidives : seulement chez certains
en compte que les patients hospitalisés pour un
patients
épisode de diverticu-lite (6,9).
Après une diverticulite aiguë traitée médicalement,
Le risque de complication semble aussi faible lors
une chirurgie est parfois à envisager pour traiter
des récidives que lors du premier épisode de diver-
une séquelle, telle qu’une fistule ou une sténose
ticulite, à l’exception du risque de sténose ou de
colique (3à5,10,12). L’ablation d’un segment
fistule qui augmente lorsque les accès se ré-pètent
colique (colectomie segmentaire) est aussi parfois
(1,3,9). 90 % à 95 % des récidives sont traitées
proposée dans le but de soulager des symptômes
sans chirurgie (9à11).
digestifs chroniques en lien avec la diverticulose ou
Dans un suivi d’environ 210 000 patients hospi-
de pré-venir des récidives (a)(3à6,9,10,12,14).
talisés pour un premier épisode de diverticulite

Page 916 • La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422


STRATÉGIES

Risques chirurgicaux à prendre en compte. décider d’une colectomie préventive (4à6,9,10,12).


D’après une synthèse méthodique et l’analyse de La plupart des guides recommandent de prendre
grandes bases de données étatsuniennes et fran-çaises, en compte les facteurs exposant à un risque accru
la mortalité liée à la colectomie programmée pour de récidive compliquée, tels qu’un premier épisode
diverticulite est de l’ordre de 0,3 % à 0,7 % (4,7). Cette de diverticulite compliquée, une immunodépression
mortalité augmente avec la présence de co-morbidités et ou une insuffisance rénale chronique (4,5,9,10,12).
avec l’âge : elle est de l’ordre de 0,04 % chez les patients
âgés de moins de 50 ans et de 2,5 % chez les patients
âgés de 80 ans ou plus (7). Prévention médicale des récidives :
Les guides de pratique clinique et les synthèses adapter son mode de vie et éviter les AINS
méthodiques que nous avons retenus ne rapportent
pas d’essai randomisé ayant comparé colectomie Diverses mesures non chirurgicales visent à préve-
programmée versus absence de chirurgie en nir le risque de récidive de diverticulite.
termes de mortalité.
Des complications surviennent lors de 10 % à 20 Adapter son mode de vie sans interdit ali-
% des colectomies segmentaires programmées mentaire. La consommation de tabac, la séden-tarité,
après guérison d’un épisode de diverticulite, no- le surpoids, une alimentation riche en viandes et
tamment des infections de plaie opératoire, des pauvre en fibres sont associés à un risque accru de
hémorragies, des lâchages d’anastomose, des diverticulite aiguë (1). L’exercice physique, la perte de
abcès intra-abdominaux, des perforations poids et l’arrêt de la consommation de tabac n’ont pas
intestinales, des éventrations, des embolies fait l’objet d’une évaluation com-parative solide en
pulmonaires (3,5,6,9,15). Chez environ 6 % des termes de récidives (6,9). Ces mesures ont
patients, une complication conduit à la mise en néanmoins, par ailleurs, des effets bénéfiques sur la
place d’une colo-stomie*, parfois définitive (4). En santé, qui rendent leur balance bénéfices-risques
comparaison, en l’absence de chirurgie préventive, globalement favorable.
le risque de co-lostomie en urgence a été estimé L’effet préventif d’un régime riche en fibres n’est
être inférieur à 4 % dans les années qui suivent un pas démontré. Aucun argument solide n’établit un
épisode de di-verticulite aiguë (5,6,12). lien entre la consommation de fruits à coque, de
blé, de maïs (même sous forme de popcorn), et le
Après colectomie : récidives chez environ 10 % risque de récidive de diverticulite (4à6,9,16,17).
des patients. La colectomie segmentaire ne met pas
totalement à l’abri des récidives, pro-bablement du fait Éviter les AINS et les corticoïdes. Le risque de
de la formation de nouveaux diverticules ou de la récidive semble accru chez les patients traités au long
présence de diverticules sur une portion du côlon cours par anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) ou
laissée en place (5,6). Dans trois études, un nouvel corticoïde, et plusieurs études ont mis en évidence un
épisode de diverticulite aiguë est survenu chez 6 % à risque plus élevé de diverticulite compliquée et
13 % des patients ayant eu une colectomie d’hémorragie diverticulaire chez ces patients (1,5,6,8).
programmée (4,14). Mieux vaut éviter d’utiliser ces médicaments au long
cours chez les patients qui ont déjà eu un épisode de
Amélioration de certains symptômes diges-tifs diverticulite aiguë.
chroniques ? Après un épisode de diverticu-lite La survenue d’un ou plusieurs épisodes de diver-
aiguë traitée médicalement, 25 % à 40 % des patients ticulite aiguë ne justifie pas l’arrêt définitif d’un
souffrent de douleurs abdominales ou de troubles du traitement antiagrégant par aspirine (3,6).
transit (2,3). D’après une étude compa-rative non
randomisée et des comparaisons indi-rectes, de très Pas de probiotique ni de médicament en
faibles niveaux de preuves, la colec-tomie prévention. Des probiotiques*, ou la mésalazine, un
segmentaire programmée semble réduire la proportion dérivé de l’acide aminosalicylique, ou la rifaxi-mine, un
de patients souffrant de symptômes digestifs antibiotique, sont parfois proposés en prévention des
chroniques après un épisode de diverticu-lite aiguë et récidives de diverticulite. Leur évaluation est de faible
améliorer leur qualité de vie (2). Cepen-dant, 5 % à 25 niveau de preuves et leur efficacité préventive est
% des patients opérés conservent des symptômes incertaine (4à6,18à23). La rifaximine réduit peut-être
digestifs gênants après la chirurgie ; et des troubles les symptômes digestifs chroniques de certains
du transit pouvant aller jusqu’à l’incontinence fécale patients ayant eu un épisode de diverticulite aiguë
apparaissent parfois après une colectomie (5,22). Notre recherche do-cumentaire n’a pas
segmentaire (2,4,6,14). recensé d’évaluation du nifu-roxazide dans cette
situation.
Guides de pratique : chirurgie préventive à
discuter au cas par cas. Les guides de pratique
clinique que nous avons retenus recommandent que
la décision de colectomie préventive soit pesée au cas a- Certains patients atteints de diverticulose colique, avec ou
par cas. Ils sont concordants pour considérer que ni sans épisode de diverticulite aiguë, ont des saignements
un âge inférieur à 50 ans, ni des récidives récidivants dus à la diverticulose, qui conduisent à envisa-ger
nombreuses ne sont des critères suffisants pour une colectomie segmentaire (réf. 10).

L P •D 2018 • T 38 N° 422 • P 917


a revue rescrire écembre omeage
STRATÉGIES

Le profil d’effets indésirables de la mésalazine


Les Propositions Prescrire comporte notamment des maux de tête, des nau-sées,
des diarrhées, des douleurs abdominales, des réactions
d’hypersensibilité, des myocardites, des péricardites, des
Prévenir les récidives lupus (24,25). La rifaximine expose
de diverticulite aiguë à des colites pseudomembraneuses et à des réac-
tions d’hypersensibilité (26). Les probiotiques tels
que Saccharomyces boulardii exposent les patients
━━ Chez les patients qui ont eu une diverticulite aiguë non compliquée, et qui n’ont ni à des infections invasives graves, parfois mortelles,
immunodépression, ni insuffisance rénale, le risque de récidive grave est faible et ne en particulier ceux dont l’immunité est dimi-nuée
justifie généralement pas de recourir à une intervention chirurgicale préventive.
(27,28).
En France, ni la mésalazine ni la rifaximine ni le
nifuroxazide ni S. boulardii ne sont autorisés dans
━━ Chez les patients qui ont eu une diverticulite aiguë compliquée traitée sans le traitement des patients qui ont eu un épisode de
diverticulite aiguë. Les données d’évaluation ne
colectomie, ainsi que chez ceux qui ont une immunodépression ou une insuffi-sance
justifient pas leur utilisation hors AMM chez ces
rénale, la balance bénéfices-risques de la colec-tomie segmentaire en prévention des patients.
récidives est à évaluer au cas par cas. Un âge avancé et la présence de comorbidités

augmentent à la fois la mortalité liée à une récidive et la mortalité liée à la chirurgie En pratique Les conseils d’hygiène de vie
préven-tive. sont le plus souvent suffisants

━━ Aucun interdit alimentaire n’est justifié en préven-tion des récidives de diverticulite Après un épisode de diverticulite aiguë, les récidives
compliquées sont rares, mais certains patients sont
aiguë. Il est raison-nable de conseiller aux patients de pratiquer de l’exer-cice physique,
gênés par des symptômes digestifs chroniques. Un
éventuellement de perdre du poids en cas de surpoids et d’arrêter la consommation de
traitement visant à prévenir les récidives n’est jus-tifié que
tabac, malgré le peu de preuves d’efficacité sur le risque de récidives. chez certains patients. En se fondant sur les données
d’évaluation disponibles exposées dans ce texte, la
Rédaction a fait dans l’encadré “Les Propositions
━━ Il est prudent d’éviter les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les Prescrire” des propositions pour le suivi et le traitement
des patients après un épisode de diverticulite aiguë traité
corticoïdes au long cours, qui semblent augmenter le risque de récidive de diverti-culite
sans colectomie. Pour la plupart des patients, il paraît
aiguë et qui exposent à un risque accru de com-plication en cas de récidive. suffisant de conseil-ler de l’exercice physique, une perte
de poids et l’arrêt de la consommation de tabac le cas
━━ Aucun probiotique ou autre médicament n’est jus-tifié en prévention des récidives échéant, et d’éviter les AINS et les corticoïdes au long
de diverticulite aiguë. cours.
Synthèse élaborée collectivement par
©Prescrire la Rédaction sans aucun conflit
Rev Prescrire 2018 ; 38 (422) : 918 d’intérêts ©Prescrire

GLOSSAIRE
Noms commerciaux des médicaments en Les termes expliqués de façon concise dans ce glossaire
France F, Belgique B et Suisse CH sont signalés dans le texte par un astérisque (*)
mésalazine – F PENTASA° ou autre ; B CLAVERSAL° colectomie : intervention chirurgicale qui consiste à
ou autre ; CH ASACOL° ou autre retirer tout le côlon (colectomie totale) ou une partie
nifuroxazide – F ERCEFURYL° ou autre ; de celui-ci (colectomie partielle, alias colec-tomie
B CH PANFUREX° ou autre segmentaire).
rifaximine – F TIXTAR° ; B TARGAXAN°, TIXTELLER° ; colostomie, alias anus artificiel : abouchement à la
CH XIFAXAN°
peau d’un segment du côlon, de manière provisoire
Saccharomyces boulardii – F ULTRALEVURE° ; ou définitive.
B ENTEROL° ; CH PERENTEROL°
probiotique : micro-organismes vivants dont on
attend des effets bénéfiques chez la personne qui
les in-gère.

Page 918 • La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422


STRATÉGIES

Recherche documentaire et méthode d’élaboration 12- Feingold D et coll. “Practice parameters for the treatment of
Nous avons recherché les synthèses méthodiques, méta-analyses et sigmoid diverticulitis” Dis Colon Rectum 2014 ; 57 (3) : 284-294.
guides de pratique clinique, publiés depuis 2008, concernant la 13- Meyer J et coll. “Risk of colorectal cancer in patients with acute
diverticulite. Nous avons sélectionné les synthèses et les guides de diverticulitis : a systematic review and meta-analysis of observational
pratique clinique réunissant les critères de qualité suivants : méthode studies” Clin Gastroenterol Hepatol 2018 ; doi: 10.1016/j.cgh.2018.07.031.
de recherche bibliographique et critères de sélection des articles 14- Regenbogen SE et coll. “Surgery for diverticulitis in the 21st
retenus explicites, analyse critique des documents retenus, niveau de century. A systematic review” JAMA Surg 2014 ; 149 (3) : 292-302.
preuves des recommandations explicite. Cette recherche 15- Haas JM et coll. “Mortality and complications following
documentaire a reposé sur le suivi mis en œuvre au sein du Centre de surgery for diverticulitis : systematic review and meta-analysis”
documentation Prescrire. Par ailleurs, pour la dernière fois le 3 United European Gastroenterol J 2016 ; 4 (5) : 706-713.
septembre 2018, nous avons interrogé les bases de données BML, 16- Ünlü C et coll. “Systematic review of medical therapy to prevent
e
Embase (1980-semaine 36 de 2018), Medline (1950-4 semaine d’août recurrent diverticulitis” Int J Colorectal Dis 2012 ; 27 : 1131-1136.
2018, The Cochrane Library (CDSR : 2018, issue 9), NIHR-CRD, et 17- Dahl C et coll. “Evidence for dietary fibre modification in the reco-very
nous avons consulté les sites internet des organismes suivants : and prevention of reoccurrence of acute, uncomplicated diverti-culitis : a
AHRQ, HAS, KCE, NICE, SIGN. systematic literature review” Nutrients 2018 ; 10 (2) : 18 pages.
1- Prescrire Rédaction “Diverticulite aiguë du côlon sigmoïde. 18- Carter F et coll. “Mesalamine (5-ASA) for the prevention of
Une évolution souvent favorable sans hospitalisation, voire sans recur-rent diverticulitis” (Cochrane review) (dernière révision :
antibiotique” Rev Prescrire 2018 ; 38 (421) : 837-842. 2017). In : “The Cochrane Library” John Wiley and Sons,
2- Andeweg CS et coll. “Patient-reported outcomes after Chichester 2017 ; issue 10 : 51 pages.
conservative or surgical management of recurrent and chronic 19- Urushidani S et coll. “5-aminosalicylic acid agents for
complaints of diver-ticulitis : systematic review and meta- prevention of recurrent diverticulitis : A systematic review and
analysis” Clin Gastroenterol Hepatol 2016 ; 14 (2) : 183-190. meta-analysis” J Gastroenterol Hepatol 2018 ; 33 (1) : 12-19.
3- Swanson SM et Strate LL “Acute colonic diverticulitis” Ann 20- Khan RMA et coll. “Effect of mesalazine on recurrence of diverti-
Intern Med 2018 ; 168 (9) : ITC65-ITC80. culitis in patients with symptomatic uncomplicated diverticular disease
4- Haute autorité de santé “Prise en charge médicale et : a meta-analysis with trial sequential analysis of randomized
chirurgicale de la diverticulite colique. Argumentaire scientifique” controlled trials” Colorectal Dis 2018 ; 20 (6) : 469-478.
novembre 2017 : 166 pages. 21- Lahner E et coll. “Probiotics in the treatment of diverticular disease. A
5- Cuomo R et coll. “Italian consensus conference for colonic systematic review” J Gastrointestin Liver Dis 2016 ; 25 (1) : 79-86.
diverti-culosis and diverticular disease” United European 22- Cuomo R et coll. “Rifaximin and diverticular disease : Position
Gastroenterol J 2014 ; 2 (5) : 413-442. paper of the Italian Society of Gastroenterology (SIGE)” Dig Liver
6- Strate LL et coll. “American Gastroenterological Association Dis 2017 ; 49 (6) : 595-603.
Institute technical review on the management of acute 23- Ojetti V et coll. “The use of probiotics in different phases of diver-
diverticulitis” Gastroen- terology 2015 ; 149 : 1950-1976. ticular disease” Rev Recent Clin Trials 2018 ; 13 (2) : 89-96.
7- Rose J et coll. “Long-term outcomes after initial presentation of 24- Prescrire Rédaction “Mésalazine : myocardites et
diverticulitis” Ann Surg 2015 ; 262 (6) :1046-1053. péricardites” Rev Prescrire 2012 ; 32 (349) : 834.
8- Hupfeld L et coll. “Risk factors for recurrence after acute 25- Prescrire Rédaction “Maladies auto-immunes d’origine
colonic diverticulitis : a systematic review” Int J Colorectal Dis médica-menteuse” Rev Prescrire 2017 ; 37 (403) : 346-353.
2017 ; 32 (5) : 611-622. 26- Prescrire Rédaction “Rifaximine et encéphalopathies
9- Andeweg CS et coll. “Guidelines of diagnostics and treatment of hépatiques. Un recours en ajout au lactulose pour prévenir les
acute left-sided colonic diverticulitis” Dig Surg 2013 ; 30 : 278-292. rechutes” Rev Prescrire 2017 ; 37 (401) : 175-176.
10- Sartelli M et coll. “WSES guidelines for the management of 27- Prescrire Rédaction “Les probiotiques, en bref” Rev Prescrire
acute left sided colonic diverticulitis in the emergency setting” 2009 ; 29 (309) : 511.
World journal of Emergency Surgery 2016 ; 11 (37) : 15 pages. 28- Prescrire Rédaction “Infections invasives à Saccharomyces
11- El-Sayed C et coll. “Risk of recurrent disease and surgery bou-lardii (suite)” Rev Prescrire 2018 ; 38 (415) : 348.
following an admission for acute diverticulitis” Dis Colon Rectum
2018 ; 61 : 382-389.

Utiliser Prescrire

Dans l’actualité
Un nouveau service de l’Application Prescrire

À partir de la version 1-3 de l’Application Prescrire, le


service “Dans l’actualité” est fonctionnel (a). Il est
Certains faits d’actualité ont une répercussion immédiate accessible via le menu de gauche de l’Application
sur la pratique de soins, notamment quand les patients en Prescrire, et aussi par l’icône “clochette” en haut à droite de
prennent connaissance via les médias et interrogent les l’écran. La mise à disposition d’un nouveau texte “Dans
professionnels de santé. Il peut s’agir par exemple d’une l’actualité”, est si-gnalée par la cloche orange , qui perd
décision ou d’une information d’agence du médicament ; sa couleur une fois le service “Dans l’actualité” ouvert .
d’un sujet largement médiatisé sur un médicament, une Le lien “Sommaire” ouvre le menu des outils, à droite de
affection ou un risque sanitaire ; de nouvelles données de l’écran et permet de découvrir d’autres réactions à des
pharmacovigilance. actualités.
Dans ces circonstances, des textes Prescrire déjà ©Prescrire
publiés, en lien avec cette actualité, permettent de partager
avec les patients une information utile et fiable sur le sujet. a- La version de l’Application est indiquée en bas du menu de gauche.
“Dans l’actualité” vous aide dans cette démarche : un texte Sur un ordinateur, l’application vous propose spontané-ment les mises
court de quelques mots sur l’actualité concernée, et surtout à jour, et une fois téléchargée demande de relan-cer l’application. Sur
des liens vers les contenus Prescrire les plus pertinents et un mobile, les mises à jour se font en autorisant les mises à jour
pra-tiques. automatiques, ou à partir des magasins (store) d’applications du
système d’exploitation (Android ou iOS).

L P •D 2018 • T 38 N° 422 • P 919


a revue rescrire écembre omeage
Repères

Étude épidémiologique : risque cardio-


Antécédent cardiovasculaire vasculaire augmenté en dessous de 130/80 mm
Hg. Une étude épidémiologique chez environ 22 000
et pression artérielle patients coronariens inscrits depuis 2009-2010 dans
Viser un peu en dessous de 140/90 mm Hg un registre international de patients (registre dit
Clarify) a comparé la fréquence des événements
cardiovasculaires selon la pression artérielle (5).
●●Selon une méta-analyse d’essais randomisés,
chez les patients qui ont un antécédent cardio- Après prise en compte de divers facteurs de confusion,
vasculaire, se contenter de viser une pression y compris une éventuelle insuffisance cardiaque, une
arté-rielle inférieure à 140/90 mm Hg n’expose pas pression artérielle de l’ordre de 130-139/70-79 mm Hg a
à une mortalité globale ou cardiovasculaire plus été associée à un risque d’événements cardiovasculaires
élevée. Et selon une étude épidémiologique chez plus faible par rapport à des valeurs supérieures mais
environ 22 000 patients coronariens, une pression aussi infé-rieures à cet intervalle. Cette étude conforte les
artérielle inférieure à 130/80 mm Hg est associée à résultats des essais randomisés, en montrant aus-si
une augmentation du risque cardiovasculaire. qu’une pression artérielle trop basse est associée à une
augmentation du risque cardiovasculaire.

C hez les adultes qui ont une hypertension arté-


rielle, certains médicaments hypotenseurs ré-duisent
En pratique Les recommandations étatsuniennes
de prise en charge de l’hypertension artérielle pu-
la mortalité et le risque d’accident cardio-vasculaire bliées en 2018 s’éloignent trop des réalités des
quand la pression artérielle est de façon répétée
supérieure à 160/90 mm Hg, voire seulement données d’évaluation clinique. Dans les faits, ces
supérieure à 160/100 mm Hg (1). En général, la données montrent que chez les patients qui ont un
valeur-cible de pression artérielle est alors peu en
antécédent cardiovasculaire, comme chez la plupart
dessous de 140/90 mm Hg (2).
des patients qui ont une hypertension artérielle sans
Chez les patients qui ont eu un syndrome coro-narien
atteinte cardiovasculaire, viser une pression artérielle
aigu ou un accident vasculaire cérébral (AVC), et chez
peu en dessous de 140/90 mm Hg suffit. Une valeur-
ceux qui ont un angor stable ou une arté-riopathie des
cible plus basse augmente l’exposition aux
membres inférieurs symptomatique, des sociétés
médicaments hypotenseurs et à leurs effets
savantes étatsuniennes ont recom-mandé un contrôle
indésirables, sans avantage clinique démontré.
plus strict de la pression arté-rielle : en débutant un
©Prescrire
traitement hypotenseur quand la pression artérielle est de
façon répétée supérieure ou égale à 130/80 mm Hg, ou
140/90 mm Hg après un AVC ; et en visant une pression
artérielle infé-rieure à 130/80 mm Hg (3). Extraits de la veille documentaire Prescrire
1- Prescrire Rédaction “Traitement de l’hypertension artérielle
Cette recommandation correspond-elle à la réa- essen-tielle. Un diurétique thiazidique en premier choix, le plus
lité des données d’évaluation clinique ? souvent” Rev Prescrire 2014 ; 34 (366) : 275-281.
2- Prescrire Rédaction “Hypertension artérielle : traitement de
deu-xième ligne. D’autres monotherapies” Rev Prescrire 2008 ;
Essais randomisés : pas d’avantage à viser une 28 (293) : 196-199.
3- Whelton PK et coll. “2017 ACC/AHA/AAPA/ABC/ACPM/AGS/APhA/
valeur-cible inférieure ou égale à 135/85 mm ASH/ASPC/NMA/PCNA guideline for the prevention, detection, eva-luation,
Hg. Une synthèse méthodique mise à jour en 2017 and management of high blood pressure in adults : executive summary. A
par un groupe du Réseau Cochrane a recensé les report of the American College of Cardiology/American Heart Association
Task Force on Clinical Practice Guidelines” Hyper- tension 2018 ; 71 (6) :
essais randomisés qui ont comparé, chez des patients 1269-1324.
ayant un antécédent cardiovas-culaire, un contrôle 4- Saiz LC et coll. “Blood pressure targets for the treatment of
très strict de la pression artérielle visant une valeur- people with hypertension and cardiovascular disease” (Cochrane
Review) (dernière révision : 2017). In : “The Cochrane Library”
cible inférieure ou égale à 135/85 mm Hg, versus un John Wiley and Sons, Chichester 2017 ; issue 10 : 68 pages.
contrôle moins strict visant une valeur-cible inférieure 5- Vidal-Petiot E et coll. “Cardiovascular event rates and mortality
ou égale à 140/90 mm Hg, voire 160/100 mm Hg (4). according to achieved systolic and diastolic blood pressure in
patients with stable coronary artery disease : an international
cohort study” Lancet 2016 ; 388 : 2142-2152 + Correspondance
Six essais randomisés totalisant 9 795 patients 2017 ; 389 : 1296-1297.
suivis en moyenne pendant environ 4 ans ont été
retenus. Les méta-analyses de ces essais n’ont
pas mis en évidence de bénéfice avec un contrôle
très strict de la pression artérielle en termes de
morta-lité globale (risque relatif (RR) = 1,05 ;
intervalle de confiance à 95 % (IC95) : 0,90 à 1,22)
ou de morta-lité d’origine cardiovasculaire (RR =
0,96 ; IC95 : 0,77 à 1,21) (4).

L P •D 2018 • T 38 N° 422 • P 927


a revue rescrire écembre omeage
OUVERTURES

Sclérose en plaques : le gâchis

Une dizaine de médicaments ont été mis sur le marché (9 essais) versus interféron ou glatiramère. Parmi les
dans le traitement de la sclérose en plaques au cours des essais dont les résultats finaux étaient publiés, un
quinze dernières années (1). Leur évaluation a-t-elle aidé à seul a comparé deux médicaments entre eux :
déterminer une stratégie thérapeutique optimale selon les natalizumab versus fingolimod ; et un seul essai a eu
diverses situations cliniques des patients ? pour critère d’évaluation la progression de la maladie
(fingolimod), sans démontrer une efficacité (1).
Peu de données avant la mise sur le marché. Des En somme, on ne sait pas quels sont les médicaments de
auteurs ont analysé les essais cliniques randomisés premier choix, faute de comparaisons entre nouveaux
menés avant et après la mise sur le marché des médi- médicaments, et les essais post-AMM n’ont pas été l’oc-casion
caments de la sclérose en plaques, jusqu’en juillet 2017 de mieux évaluer leur efficacité sur la progression de la
(1). Depuis la mise sur le marché de l’interféron bêta maladie (1). Les auteurs appellent les pouvoirs publics à
(Avonex°, Betaferon° ou autre) et du glatiramère financer des essais qui répondent aux questions des patients
(Copaxone° ou autre), une autorisation de mise sur le et des soignants : quels médicaments choisir ? pour quelle
marché (AMM) européenne a été accordée pour huit efficacité ? et avec quels effets indésirables (1) ?
médicaments (a)(1).
Ces huit médicaments ont été autorisés sur la base de Gâchis humain et financier. Après le domaine de la
seize essais cliniques auxquels environ 16 000 patients au cancérologie, voici un nouvel exemple d’affection où, faute
total ont participé. Plus des deux tiers des essais (onze d’une évaluation adaptée, face aux nombreuses inconnues
essais) ont comparé le médicament versus place-bo, les en suspens, les soignants sont contraints de fonder leurs
autres étant versus interféron bêta-1a (Avonex°), le décisions de soins davantage sur l’expérience personnelle,
traitement de référence faute de mieux. Onze essais parfois influencée par des leaders d’opinion, que sur des
avaient pour critère principal d’évaluation le taux annuel de données probantes (2). Pour la collectivité, il s’agit d’un
poussées de sclérose en plaques. Les seuls essais ayant gaspillage de ressources et, pour les patients, d’une perte
évalué la progression du handicap comme critère principal de chance d’être mieux soigné.
concernaient l’alemtuzumab (Lemtrada°), sans démontrer ©Prescrire
d’efficacité (1).
Autrement dit, au moment de leur mise sur le marché, la a- Ce sont l’alemtuzumab, le daclizumab (Zynbrita°, retiré du
plupart des médicaments n’avaient pas été comparés au marché mondial en mars 2018), le diméthyl fumarate (Tecfidera°),
la fampridine (Fampyra°), le fingolimod (Gilenya°), le peginterféron
traitement de référence, et leur effet sur l’évolution de la
bêta-1a (Plegridy°), le natalizumab (Tysabri°) et le tériflunomide
maladie à long terme n’avait pas été évalué (1). (Aubagio°) (réf. 1). L’AMM de l’ocrélizumab (Ocrevus°) est plus
récente : lire dans ce numéro p. 890-892.
Trop d’inconnues. Les auteurs ont analysé les 52 essais
cliniques randomisés menés après obtention de l’AMM
Extraits de la veille documentaire Prescrire
pour ces huit médicaments. Sur ces 52 essais (dont 21
avec la seule fampridine), seulement 24 étaient alors 1- Gerardi C et coll. “Preapproval and postapproval evidence on drugs
for multiple sclerosis” Neurology 2018 ; 10.1212/WNL. 5561 : 10 pages.
terminés, avec des résultats publiés. Deux tiers des essais 2- Prescrire Rédaction “Nouveaux médicaments des cancers : mal
(34 essais) ont été menés versus placebo et 17 % évalués, peu efficaces et trop chers” Rev Prescrire 2018 ; 38 (412) : 134.

Page 932 • La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422


OUVERTURES

SANTÉ PUBLIQUE

Hésitation vaccinale : mieux


comprendre pour mieux accompagner
RÉSUMÉ ●● Fin 2018, il est illusoire de miser sur une adhé-
sion complète de tout le public. Mieux vaut en
●● En France, il existe une défiance au sein d’une tenir compte, chercher à rétablir la confiance en
partie de la population vis-à-vis des vaccins. Des renforçant le socle de connaissance, et étudier les
personnes hésitent, sans être dans un refus caté- blocages et les moyens de les lever.
gorique ni dans une acceptation systématique des Rev Prescrire 2018 ; 38 (422) : 933-938
vaccinations.

●● Le processus de décision vaccinale est multi-


factoriel, souvent plus influencé par des opinions
et expériences personnelles ou de proches que
par des données scientifiques.
E n France, depuis les années 2000, la défiance
vis-à-vis des vaccins, probablement aussi ancienne
que la vaccination elle-même, s’est accrue (1,2). Alors
●● Au sein de la population, les controverses que la France reste un pays en-démique pour la
vac-cinales et les “scandales” sanitaires ont rougeole, avec plus de 24 000 cas de rougeole entre
2008 et 2016, selon l’Organisation mondiale de la
contribué à l’hésitation vaccinale. santé (OMS), cette défiance serait en partie
responsable d’une couverture vaccinale relativement
faible pour certaines maladies (a)(3,4). Cette défiance
●● La gestion des crises impliquant des vaccins se manifeste parfois par une oppo-sition à toute
ou d’autres médicaments par les autorités vaccination, mais souvent par un ensemble de
sanitaires et la suspicion de liens avec des firmes comportements plus nuancés, regrou-pés sous la
notion d’”hésitation vaccinale”, selon
pharma-ceutiques ont aussi altéré l’adhésion aux
une terminologie internationale (5).
vaccina-tions d’une partie de la population.
Que recouvre la notion d’hésitation vaccinale ? Qui
sont les personnes concernées ? Quels en sont les
●● Les soignants sont la source privilégiée d’infor-
principaux déterminants ? Pour y répondre, notre
mations sur les vaccins. Ils jouent un rôle impor-tant
dans la confiance ou la défiance à l’égard des recherche documentaire a porté sur des sources étudiant
vaccins des personnes qui les consultent. notamment les ressorts psychosociologiques qui entrent
en jeu dans l’hésitation vaccinale.
●● Les autorités sanitaires ont aussi un rôle majeur,
à condition de développer une évaluation solide a- En France, de 2008 à 2017, au moins 1 500 patients
de la balance bénéfices-risques des atteints de rougeole ont eu une pneumonie grave, au
vaccinations, et de garantir un haut degré de moins 38 une complication neurologique, principalement
transparence dans les choix et les décisions des encéphalites, et 20 patients sont morts (réf. 40).
prises de politique vac-cinale.
L P •D 2018 • T 38 N° 422 • P 933
a revue rescrire écembre omeage
OUVERTURES

Un phénomène mondial : entre refus Prépondérance des opinions et expériences


catégorique et demande active personnelles. L’appréciation individuelle de l’uti-
lité des vaccins se construit au travers de la
En France, la proportion de personnes âgées de percep-tion des risques de la maladie que l’on
18 ans à 75 ans qui ne sont pas du tout favorables souhaite prévenir, des risques liés au vaccin, et de
à la vaccination a globalement augmenté, passant la vulné-rabilité perçue vis-à-vis de la maladie (2,5).
de 2,7 % en 2000 à 8,2 % en 2017, avec un pic de Cette perception est davantage influencée par les
19 % en 2010 lors du contexte épidémique de la expéri-ences personnelles ou de proches, par les
grippe A/H1N1. La part des personnes très croyances et attitudes concernant la santé et la
favorables aux vaccinations a diminué, passant de prévention, que par les données scientifiques et
44 % en 2000 à 27 % en 2017 (6). épidémio-logiques souvent méconnues, mal
L’hésitation vaccinale, constatée dans toutes les comprises, ou remises en cause (5,8).
catégories de la population, s’échelonne entre op- Grâce à l’efficacité de certains vaccins, quelques
position et acceptation globale de la vaccination maladies ont quasi disparu. Ces infections et leurs
(2,7,8). Elle se traduit par des comportements très conséquences ayant aujourd’hui une moindre visi-
hétérogènes (5,8). Les personnes hésitantes bilité auprès de la population et des professionnels
peuvent refuser certains vaccins et en accepter de santé, l’attention est alors davantage portée sur
d’autres, retarder certains vaccins ou respecter les risques des vaccins que sur leurs bénéfices, qui
scrupuleuse-ment leur calendrier d’injections, sans passent relativement inaperçus. Ces vaccins ne
pour autant être sûres de leur intérêt (8). Selon les sont plus perçus comme aussi utiles,
données du Baromètre santé 2016, ces personnes paradoxalement du fait de leur efficacité (5).
représentaient 46 % des parents interrogés sur la Les effets indésirables ou une erreur lors d’une
vaccination de leur enfant âgé de 1 an à 15 ans, et vaccination, vécue par un proche ou par soi-même,
près de 35 % des personnes âgées de 65 ans à peuvent entraîner une crainte ou une perte de
75 ans interrogées sur leur propre vaccination (9). confiance à l’égard de la vaccination (11).
Observée dans de nombreux pays, l’hésitation
vaccinale a notamment fait l’objet d’un travail de réflexion Craintes par principe des effets des vaccins.
et de définition de la part du groupe stra-tégique Administrer un élément extérieur, parfois vivant, à un
consultatif d’experts (SAGE) sur la vacci-nation, les individu généralement en bonne santé, et souvent en bas
vaccins et les produits biologiques de l’OMS. En 2015, le âge, est à l’origine d’inquiétudes. La stimu-lation du
groupe de travail chargé d’étudier l’hésitation vaccinale système immunitaire des enfants par les vaccins est
estimait que « l’hésitation vaccinale fait référence au perçue par certains parents comme une source de
retard dans l’acceptation de la vaccination ou à son refus perturbations, d’autant plus qu’il s’agit d’un nourrisson ou
malgré la disponi-bilité de services de vaccination. d’un très jeune enfant (5,12).
L’hésitation vacci-nale est complexe et propre au Même s’ils perçoivent positivement le principe
contexte, variant selon le moment, le lieu et les vaccins » d’immunisation collective par la vaccination infan-
(10). tile, certains parents ont tendance à privilégier ce
Selon l’OMS, trois catégories de déterminants qu’ils pensent être le plus bénéfique pour la santé
principaux interviennent dans l’hésitation vaccinale de leur enfant au moment de le faire vacciner, ce
et interagissent entre eux : des influences propres qui les conduit parfois à différer l’injection ou à ne
à l’individu et à ses différents groupes d’apparte- pas la réaliser du tout (5).
nance (par exemple, les expéri ences, croyances La peur des aiguilles et de la douleur post-
ou encore connaissances de la famille, des amis ou injection fait aussi partie des éléments susceptibles
des collègues), des influences contextuelles (mé- de retar-der certaines vaccinations, voire dans
diatiques, historiques, politiques, économiques, certaines situations d’y renoncer (2,5).
etc.), et des influences spécifiquement liées à la
vaccination (balance bénéfices-risques, mode d’ad- Responsabilité vaccinale et biais d’omission.
ministration, calendrier vaccinal, etc.) (10). La décision de faire vacciner son enfant dépend aussi,
Ces différentes influences permettent de mieux pour certains parents, de la responsabilité ressentie à
comprendre les diversités dans l’adhésion vaccinale. l’égard de l’acte de vaccination. L’anti-cipation de regrets
de la part de parents vis-à-vis des conséquences
négatives de la non-vaccination de leur enfant
Perception individuelle de l’utilité constituerait un levier dans l’adhésion vaccinale. Mais à
et des risques des vaccins l’inverse, des parents se sentiraient davantage
responsables des conséquences néga-tives d’une
La perception individuelle de l’utilité des vaccins est vaccination de leur enfant (liées à leur propre décision),
le résultat de diverses influences : opinions, que de celles liées à une maladie qui n’aurait pas été
connaissances et expériences personnelles ou prévenue en l’absence de vac-cination. Plusieurs études
transmises par des proches, liées à différents vac- ont ainsi mis en évidence que des personnes sont plus
cins ; représentations de l’acte de vaccination ; sensibles aux risques liés à une action qu’à ceux liés à
croyances et modes de vie (5,10). une inaction, un phénomène appelé “biais d’omission”
(13).

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OUVERTURES

Influences des croyances religieuses et dans la communication relative aux vaccins qu’elles
autres convictions. La décision de vacciner est produisent, a contribué aussi à la méfiance à
parfois influencée par certaines croyances reli-gieuses, l’égard des autorités sanitaires (12,18).
par exemple dans certains groupes religieux aux Pays- Depuis quelques années, les ruptures ou difficul-
Bas, menant parfois à un rejet global. tés d’approvisionnement récurrentes de certains
Certains groupes théorisent une vision particulière de vaccins ou médicaments cruciaux, « signe d’une
la santé, privilégiant l’immunité ou les traitements naturels défaillance industrielle devenue banale », n’ont pas
à la médecine qualifiée d’”artificielle” ou considérant, par été de nature à rassurer la population quant à
exemple, qu’une certaine hygiène de vie ou des l’importance placée par les autorités sanitaires
habitudes personnelles rendent la vaccination non dans les vaccins, comme moyens de protection
nécessaire (5). Sans besoin d’ad-hérer totalement à ces pour la santé publique (19,20).
théories, ces perceptions contribuent cependant à la Le fonctionnement du Haut conseil de la santé
construction d’une hé-sitation vaccinale y compris hors de publique (HCSP), chargé de conseiller le gouverne-
ces groupes. ment en matière de recommandations vaccinales
au cours des années 1990 à 2017, a contribué,
mal-gré des progrès, à entretenir des doutes sur
Controverses et surestimation l’indé-pendance des décisions. Au cours de cette
des risques liés aux vaccins ? période, les avis du Comité technique des
vaccinations (CTV) se sont étoffés et sont devenus
D’autres facteurs liés au contexte historique, éco- plus argumentés (21,22). Les données
no mique ou politique interfèrent avec le processus épidémiologiques ont été rendues publiques dans
individuel de décision vaccinale (2,5,10). Ces le guide des vaccinations jusqu’en 2012, puis en
divers facteurs sont susceptibles d’altérer la grande partie sur le site Santé publique France
confiance dans le système de soins et les (23,24). Des déclarations de liens d’intérêts ont été
professionnels de santé qui conseillent et exigées (25). Mais le public n’avait accès ni aux
administrent les vac-cins (2,8). ordres du jour, ni aux procès-ver-baux, ni à
d’éventuels enregistrements des discus-sions (21).
Effritement de la confiance dans les auto- Depuis mars 2017, le CTV, devenu “Commission
rités sanitaires. En France, depuis les années technique des vaccinations”, a été intégré à la Haute
1980, deux événements relatifs à la vaccination ont autorité de santé (HAS), devenant une commission avec
eu un impact fort vis-à-vis de l’adhésion vaccinale. un statut proche de celui des autres commis-sions de la
En 2009, la façon dont a été gérée la campagne HAS (26,27). Cette évolution visait no-tamment à
de vaccination contre le virus de la grippe A/H1N1 permettre une meilleure articulation avec les autres
a été source de confusion, et s’est traduite par une commissions de la HAS concernées par l’évaluation des
rupture dans la confiance de l’utilité de la vaccina- vaccins : Commission de la Transparence et Commission
tion par la population à partir de 2010 (b)(14à16). d’évaluation éco-nomique et de santé publique (Ceesp).
Une dizaine d’années plus tôt, la suspension de la La Commission technique des vaccinations a repris les
campagne de vaccination contre l’hépatite B en milieu anciennes missions du CTV du HCSP, notamment de
scolaire, notamment suite à la suspicion d’un lien entre le conseil sur la politique vaccinale en France. Au 5 octobre
vaccin et le risque de sclérose en plaques, avait déjà 2018, sur le site de la HAS, nous avons trouvé les
fragilisé durablement l’adhésion vaccinale (14,17). Cette déclarations d’intérêts des membres de cette commission
vaccination suscite encore aujourd’hui, avec celles contre technique, les ordres du jour des réunions (le dernier
les grippes saison-nières et le papillomavirus, le plus ordre du jour publié étant du 2 octobre 2018), et des
d’avis négatifs, mais de manière hétérogène selon que procès-verbaux (le dernier procès-verbal publié étant
les personnes ont été concernées ou ne l’ont pas été celui de la réunion du 17 avril 2018). La HAS dispose
(6,14). d’enregistrements qui ne sont pas rendus publics (27,28).
Ces deux exemples, vécus dans un climat de
confusion, se sont ajoutés aux mises en cause de
l’État français dans sa gestion de la santé
publique : commercialisation de sang contaminé Impact des controverses vaccinales. Des
par le HIV, minimisation des conséquences de la controverses sur les effets indésirables des vaccins
canicule en 2003, non prise en compte des alertes ont aussi nourri des attitudes de défiance à leur égard.
sur le lien entre valvulopathie et prise de benfluorex Plus particulièrement, l’évocation de liens entre
(ex-Mediator°) et compromissions visant à protéger l’apparition de maladies graves et d’adjuvants
la firme Servier. Ces différents événements ont vaccinaux a suscité le doute quant à leur innocuité
enta-mé la confiance de certaines personnes vis-à-
vis de la crédibilité et de l’objectivité des autorités
sani-taires (7).
b- Lors de la campagne de vaccination contre la grippe A/
H1N1 en 2009, le fait notamment que les médecins géné-
Suspicion de liens entre autorités sanitaires ralistes aient peu été associés et que la gravité de la
et firmes pharmaceutiques. Le rôle suspecté grippe ait été plus modérée qu’annoncé a dégradé la
des firmes pharmaceutiques sur les politiques de confiance accordée par la population aux autorités
vaccination, compte tenu notamment de leur place sanitaires françaises (réf. 41).

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OUVERTURES

et a contribué à amplifier la crainte vis-à-vis des population, des objectifs de la vaccination et du


risques liés aux vaccins (12,29). calendrier vaccinal (32,33). En effet, cette
Quelle que soit la qualification de ces risques distinction a créé une hiérarchie entre les vaccins,
(très faibles, nécessitant des études et aurait nourri de façon plus ou moins consciente
complémentaires, scientifiquement avérés ou non), une né-cessité de faire un tri entre eux, aussi bien
leur médiatisation importante a contribué à dans la population que chez les médecins (33à35).
augmenter le doute parmi la population, ainsi que Selon une autre enquête, réalisée dans le cadre
chez certains professionnels de santé (5). d’une concertation citoyenne avant l’obligation
vaccinale de 2018, les vaccins obligatoires, ou per-
Internet et réseaux sociaux : démultiplication çus comme tels, étaient considérés en général
des craintes vaccinales ? Internet et les réseaux comme les plus éprouvés, avec une efficacité et
sociaux, sources majeures d’information utilisées une sécurité non remises en question. Opposées à
par une grande partie de la population, offrent la la suppression des vaccins obligatoires, les
possibilité de s’exprimer plus facilement que sur les personnes interrogées n’étaient pas pour autant
autres médias. Les informations diffusées sont dif- favorables à l’élargissement de l’obligation à
ficilement vérifiables quel que soit le sujet traité, y d’autres vaccins qualifiés de “nouveaux vaccins” et
compris celui des vaccins (2,14,30). perçus comme « polémiques et anxiogènes » (14).
Ces moyens d’échanges constituent un mode En janvier 2018, l’obligation vaccinale a été éten-
privilégié de propagation de messages opposés à due à onze vaccins. Fin 2018, il est trop tôt pour
la vaccination. Selon une étude, les divers mouve- mesurer l’effet de cette décision sur l’adhésion des
ments antivaccinaux ont en général recours à des personnes réticentes, et sur la confiance globale
arguments et stratégies similaires pour diffuser dans ces vaccins (3,34).
leurs messages : recours à des témoignages, Les fréquentes modifications ou adaptations du
parfois accompagnés de photographies ou de calendrier vaccinal en fonction des difficultés et
vidéos, susceptibles de susciter ou renforcer le ruptures d’approvisionnements de certains vaccins,
doute vis-à-vis de la sécurité des vaccins (5). ainsi que la différence de calendrier vaccinal
existant entre les pays européens, semblent
Faire la part des choses : un exercice diffi- amener certaines personnes, et parfois des
cile. La sécurité et l’intérêt des vaccins sont ques- professionnels de santé, à s’interroger sur le bien-
tionnés par une partie de la population. La raréfac-tion fondé des recommanda-tions vaccinales (5,33,36).
oubliée de certaines maladies, la communication des
firmes ou des autorités, les controverses vac-cinales et la Rôle important des soignants, y compris des
pression médiatique contribuent entre autres à alimenter pharmaciens, dans l’adhésion vaccinale du
les doutes (c)(5). public. Plusieurs études ont montré que les
Les doutes sur l’innocuité des vaccins ont aussi été mis médecins généralistes sont, pour la population, la source
en avant par la médiatisation de plaintes judiciaires privilégiée d’informations sur les vaccins et qu’ils jouent
concernant leur rôle suspecté dans le développement de un rôle important dans la confiance à leur égard (14,34).
maladies graves (7,8). Certaines décisions judiciaires ont Ils ne sont pas les seuls. L’habi-litation des infirmiers à
octroyé des indemnisations aux plaignants (notamment pratiquer l’acte de vaccina-tion antigrippale dans
en situation d’obligation vaccinale professionnelle), certaines conditions, ainsi que leurs compétences
reconnaissant ainsi une responsabilité de l’État, malgré techniques et relationnelles, leur octroient un rôle notable
l’absence de certitude scientifique sur l’existence d’un lien auprès de la popula-tion concernant les vaccins
de causalité entre le vaccin et les dommages corporels (d)(33,37). S’appuyant sur leur expertise des produits, les
su-bis (7,12,31). Ces décisions sont difficiles à pharmaciens sont aussi des vecteurs incontournables
comprendre et sont parfois interprétées, en l’absence de dans la transmission au public des informations sur les
décryp-tage, comme une preuve d’un lien de causalité. vaccins (33). Leur rôle devrait s’élargir suite à
l’expérimentation de la vaccination antigrippale à

Politiques de vaccination et place


des soignants dans l’adhésion vaccinale
c- En 2015, le Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) a
porté plainte contre un médecin pour propos outranciers sur la
Les choix faits en termes de politique vaccinale et
vaccination et diffusion d’une pétition contre l’obligation faite aux
le positionnement des soignants vis-à-vis de ces parents d’avoir recours, pour leur enfant, au vaccin hexavalent
décisions ont aussi un impact sur le comportement d’une firme pharmaceutique. En juin 2018, cette plainte a été
de la population vis-à-vis de la vaccination. rejetée par la chambre disciplinaire du Cnom. Le Cnom a introduit
un pourvoi en cassation (réf. 42,43).
Obligatoire ou recommandé : un statut source d- Depuis fin septembre 2018, les infirmiers sont
d’ambiguïté. D’après une enquête réa- autorisés à vacciner sans prescription médicale toutes les
lisée en France avant l’extension à onze vaccins personnes majeures pour lesquelles la vaccination anti
grippale est recommandée dans le calendrier des
obligatoires édictée début 2018, le statut “obliga- vaccinations, à l’ex-ception des personnes présentant des
toire” pour certains vaccins et “recommandé” pour antécédents de réaction allergique sévère à l’ovalbumine
d’autres, n’a pas facilité la compréhension, par la ou à une vaccina-tion antérieure (réf. 44,45).

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OUVERTURES

l’officine (e)(37). Autorisées à pratiquer des vacci- Par leur relation de proximité, les soignants sont les
nations chez des femmes, des nouveau-nés ainsi mieux placés pour transmettre les informations
que dans leur entourage, les sages-femmes ont indispensables à la décision de vaccination. Comme pour
aussi un rôle notable à jouer (33,38). les autres traitements ou moyens de préven-tion, les
soignants ont à répondre aux interrogations et craintes
Doutes et difficultés des médecins à répondre sur exprimées à l’égard des effets indési-rables. Pour cette
les vaccins : impact sur le public. Confor- transmission, les soignants ont besoin d’une
tés par la relation de proximité qu’ils entretiennent avec connaissance précise de la probléma-tique vaccinale et
leur médecin, une large majorité de personnes s’en de la balance bénéfices-risques des différents vaccins,
remettent à son avis : ses recommandations sont donc sans occulter leur niveau d’efficacité variable et
déterminantes (5,34). Or, dans une étude menée en 2014 d’inconnues. Des outils existent pour échanger avec le
sur les attitudes des médecins généralistes face aux public sur les vacci-nations, notamment des sites internet,
hésitations vaccinales du public rencontré, un médecin mais il est parfois difficile de distinguer les intérêts à
sur quatre a émis des doutes quant aux risques et à l’œuvre derrière ceux-ci. En 2018, l’ouvrage “Immunisés ?
l’utilité de certains vaccins, près de trois sur cinq ont Un nouveau regard sur les vaccins” (éd. Premier
déclaré ne pas être à l’aise pour expliquer le rôle des Parallèle, 2017, 340 pages) est une source d’infor-
adjuvants, et un sur cinq pour donner des explications sur mations accessible à un public large, bien docu-mentée,
la sécurité des vaccins. De plus, en-viron un médecin sur qui ne défend pas d’intérêts particuliers (39).
cinq a déclaré être d’accord avec le fait que les enfants
étaient vaccinés contre trop de maladies (7). Les autorités sanitaires ont aussi un rôle majeur à jouer
afin de garantir un haut degré de transpa-rence dans les
Selon les résultats de diverses enquêtes réalisées choix et les décisions prises de po-litique vaccinale. Dans
dans plusieurs pays, les difficultés ressenties par les les situations vaccinales où les inconnues sont
médecins face au public ont semblé s’expliquer nombreuses, les hésitations sont prévisibles et sont à anti
notamment par la complexité des schémas vacci-naux, le ciper. Celles d’ordre scien-tifique sont à examiner et
manque de formation initiale sur le sujet, et l’évolution analyser avec solidité, parfois au prix du financement de
régulière des données concernant les vaccins nouvelles études visant à approfondir les connaissances.
commercialisés (5,14).
Parmi les médecins disant faire confiance aux Fin 2018, il est illusoire de miser sur une adhésion
sources officielles en 2014, environ 1 sur 3 a décla- complète de toute la population à une politique vaccinale
ré préférer se fier à son propre jugement plutôt décidée par des autorités sanitaires sou-vent
qu’aux recommandations du calendrier vaccinal, discréditées. Mieux vaut en tenir compte, chercher à
pour des raisons pratiques d’adaptation aux condi- rétablir la confiance en renforçant le socle de
tions réelles de la vaccination (7). connaissances, et étudier les blocages et les moyens de
Face aux interrogations et inquiétudes suscitées les lever, puis mettre en œuvre les moyens les plus
par les différentes controverses vaccinales, il a été adaptés (f). Quitte à, pendant ce temps, accepter un
constaté une hétérogénéité des comportements de degré de protection imparfait.
recommandations des médecins, variant selon le Synthèse élaborée collectivement par
type de vaccin et selon la population concernée la Rédaction sans aucun conflit
d’intérêts ©Prescrire
(5,7). Leurs doutes et difficultés se sont traduits par
des recommandations vaccinales moins fréquentes
et ont conduit des personnes à hésiter aussi, voire
à se détourner de certaines vaccinations. Ces
doutes et difficultés ont été davantage observés e- Pour la saison 2018-2019, la vaccination antigrippale par les
pharmaciens reste au stade d’expérimentation dans les régions
chez les médecins exerçant de façon occasionnelle
Nouvelle-Aquitaine et Auvergne-Rhône -Alpes comme en 2017-
une médecine non conventionnelle (homéopathie, 2018, et le devient dans les régions Hauts-de-France et
acu-puncture, etc.) (7). Occitanie. La généralisation de ce dispositif est annoncée pour la
saison 2019-2020 (réf. 37).
f- Par exemple, en juin 2016, lors d’une campagne de vac-
Décision partagée : les vaccinations aussi cination contre les infections invasives à méningocoques B dans
le Beaujolais, l’Agence régionale de santé (ARS) a réalisé une
Le processus individuel de décision vaccinale est étude psychosociale pour mieux comprendre les freins et leviers
à la vaccination (réf. 46).
complexe et multifactoriel. Il est notamment in-
fluencé par la perception et l’expérience
individuelles des risques liés à la vaccination, la
représentation des maladies à prévenir, le contexte
économique, politique et historique, ainsi que par
les politiques vaccinales et, parfois aussi, par les Extraits de la veille documentaire Prescrire
doutes des soignants. Dans ces conditions, il est 1- Bertrand A et Torny D “Libertés individuelles et santé collective.
inadapté de considérer les personnes hésitantes à Une étude socio-historique de l’obligation vaccinale” Centre de
recherche, médecine, sciences, santé et société, 2004 : 108 pages.
l’égard d’une ou plusieurs vaccinations comme des 2- Raude J “L’hésitation vaccinale : une perspective
personnes irresponsables justifiant des mesures psychosociologique” Bull Acad Natl Med 2016, 200 (2) : 199-209.
autoritaires ou paternalistes.

L P •D 2018 • T 38 N° 422 • P 937


a revue rescrire écembre omeage
OUVERTURES

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Page 938 • La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422


OUVERTURES

Santé au travail : le suivi


médical des travailleurs évolue

RÉSUMÉ

●● En France, la loi dite Travail de 2016 a de nou-


E n 2006, Prescrire a présenté les principales
modifications introduites par le décret du 28 juillet 2004
veau modifié en profondeur le cadre réglementant dans l’organisation de la méde-cine du travail en
l’organisation de la médecine du travail, et parti- France (1). Depuis, d’autres ré-formes se sont
succédé, jusqu’à la loi du 8 août 2016 dite loi Travail et
culièrement le suivi médical des travailleurs. son décret d’application
er
du 27 décembre 2016, entré
en vigueur le 1 janvier 2017, qui ont modifié les
●● Les travailleurs considérés comme non exposés modalités d’action des services de santé au travail
(2,3). Tout en rappelant l’objectif prioritaire de
à des risques professionnels particuliers “prévention primaire” des risques professionnels, la
bénéfi-cient, au moins tous les 5 ans, d’une réforme de 2016 a en particulier modifié le suivi
individuel de l’état de santé des salariés du régime
“visite d’in-formation et de prévention” réalisée général de la Sécurité
par le méde-cin du travail ou, sous son autorité, sociale (a)(3).
par un collaborateur médecin, un interne en Nous présentons dans ce texte un rappel des
médecine du travail ou un infirmier. Cette visite principales modifications intervenues depuis le
donne lieu à une “attestation de suivi” et non début des années 2000 dans l’organisation de la
plus à un avis d’ap-titude. médecine du travail des salariés relevant du régime

SANTÉ ET TRAVAIL
général de la Sécurité sociale, et un état des lieux,
●● Les travailleurs exposés à des “risques particu- fin 2018, des mesures prévues pour le suivi indivi-
liers” ont un “suivi individuel renforcé” de leur état duel de leur santé.
de santé, avec examen médical d’aptitude réalisé par
le médecin du travail, à l’embauche puis au moins
tous les 4 ans, et visite intermédiaire à 2 ans par un Des réformes successives
professionnel de la santé au travail.
Depuis le début des années 2000, l’organisation de
●● Pour les travailleurs en contrat à durée déter- la médecine du travail en France a été modifiée
minée et les travailleurs intérimaires, il est prévu
plusieurs fois, principalement par les textes régle-
qu’ils bénéficient des mêmes règles de suivi médi-
cal que ceux qui ont un contrat à durée indétermi-
mentaires suivants.
née. Un décret du 28 juillet 2004 a permis la mise en
œuvre de la pluridisciplinarité dans le domaine de
●● Les modalités sont inchangées pour les la prévention des risques professionnels et le ren-
visites médicales de préreprise du travail (pendant forcement de l’action préventive du médecin du
un arrêt de travail de plus de 3 mois), et les visites travail en milieu de travail. Le contrôle des services
de reprise du travail (après tous les congés de interentreprises de santé au travail par les parte-
mater-nité et les arrêts pour maladie naires sociaux a été renforcé, sans toutefois
professionnelle, après un arrêt d’au moins 30 remettre en cause le principe de la gouvernance
jours pour accident du travail et pour maladie ou patronale. Le décret de 2004 maintenait un examen
accident non profes-sionnel). médical : annuel en cas de “surveillance médicale
renforcée” pour les salariés exposés à certains
●● Le travailleur garde la possibilité de demander risques parti-culiers, ainsi que dans certaines
à tout moment une visite avec le médecin du situations person-nelles ; au moins tous les 2 ans
tra-vail. pour les autres salariés (1).
Rev Prescrire 2018 ; 38 (422) : 939-943 Une loi du 20 juillet 2011 a renforcé la pluridisci-
plinarité dans les services de santé au travail en
intégrant des infirmiers, des psychologues, des

a- Un décret d’août 2017 a mis en place des modalités de


surveillance médicale similaires dans le milieu agricole
(réf. 20).

L P •D 2018 • T 38 N° 422 • P 939


a revue rescrire écembre omeage
OUVERTURES

Manque de médecins du travail et besoin


Le collaborateur médecin, d’adaptation à l’évolution des risques
formé à la médecine du travail Ces réformes successives sont motivées par plu-
sieurs facteurs, principalement : un manque crois-
E n France, le statut de “collaborateur médecin” a été créé en
2012 pour faire face au manque de médecins du tra-vail (1). Ce
sant de médecins du travail, la transformation du
marché du travail, une volonté d’orienter vers da-
statut est à distinguer de celui du collaborateur de médecin vantage de prévention primaire.
libéral. Les conditions d’exercice des collabora-teurs médecins, La réglementation cherche à s’adapter à une baisse
modifiées par décret en 2016, sont définies
continue des effectifs de médecins du travail en
dans le Code du travail (2).
activité régulière, dont le nombre a diminué d’en-viron
Les services de santé au travail ont la possibilité de recru- er
ter en tant que collaborateur médecin un médecin non recon- 17 % entre 2007 et 2017 (6). En France, au 1 janvier
nu comme médecin du travail, qui s’engage à suivre une 2017, le nombre de médecins du travail était de 5 014
formation (un diplôme interuniversitaire) pour obtenir la (1 467 hommes et 3 547 femmes). La moyenne d’âge
qualification en médecine du travail auprès de l’Ordre des des hommes était de 56 ans et celle des femmes de
médecins. Fin 2018, cette formation dure 4 ans et est acces- 55 ans (7). La répartition de ces médecins sur le
sible aux médecins justifiant d’au moins 5 ans d’inscription territoire est inégale (6,8). Selon diverses projections
au Conseil de l’Ordre des médecins (3). sur les effectifs de médecins du travail, le nombre
Le collaborateur médecin est encadré par un médecin du attendu en 2030 serait d’en-viron 4 000 (6,9). Cette
travail qui élabore un protocole écrit définissant ses
baisse d’effectif est liée en particulier au manque
missions, en fonction des compétences et de l’expérience
d’attractivité de cette spécia-lité, peu connue des
qu’il a acquises. Les dispositions introduites en 2016 dans le
Code du travail permettent au collaborateur médecin de étudiants en médecine (6).
formuler des avis d’aptitude, alors qu’auparavant seul le La baisse du nombre de médecins du travail
médecin du travail pouvait le faire (2,4). s’inscrit dans un contexte de transformation du
Environ 135 collaborateurs médecins sont formés chaque marché du travail, marquée par une augmentation
année depuis 2013, et environ 540 (en équivalents temps importante des contrats précaires (intérim et
plein) travaillaient en 2016 dans les services de santé au tra- contrats à durée déterminée) qui multiplie le
vail (3). nombre de visites d’embauche par les médecins du
©Prescrire travail, au détriment de leurs autres missions (8).
Les réformes successives visent aussi à
1- “Décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 relatif à l’organisation de la
davantage développer la prévention primaire des
médecine du travail” Journal Officiel du 31 janvier 2012 : 15 pages. risques professionnels que les préventions
2- “Articles R. 4623-25 à R. 4623-25-2 du Code du travail”. Site secondaire ou tertiaire, basées sur le suivi médical
www.legifrance. gouv.fr consulté le 18 octobre 2018 : 1 page.
3- Chastel X et coll. “Attractivité et formation des professions de santé au
individuel. L’introduction de la pluridisciplinarité
travail” Rapport de l’Inspection générale des affaires sociales et de dans les ser-vices de santé au travail a surtout pour
l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la objectif de mieux appréhender les situations de
recherche, août 2017 : 176 pages.
4- “Circulaire DGT/ n° 13 du 9 novembre 2012 relative à la mise en
travail com-plexes, à l’origine en particulier d’une
œuvre de la réforme de la médecine du travail et des services de santé augmentation des affections ostéo-articulaires ou
au travail” : 90 pages. liées à des risques psychosociaux (8).

Un suivi de l’état de santé allégé selon


la situation professionnelle
ergonomes, des toxicologues, etc. (4,5). Le statut ou personnelle
de “collaborateur médecin” a été créé (lire l’encadré
er
“Le collaborateur médecin, formé à la médecine du Depuis le 1 janvier 2017, le suivi de l’état de santé
travail”)(5). Pour les salariés en “surveillance mé- des travailleurs considérés comme non exposés à des
dicale renforcée”, le délai entre les examens médi- “risques particuliers” est assuré non plus né-
caux a été porté à 2 ans. Pour les autres salariés, cessairement par le médecin du travail, mais aussi,
l’examen médical pouvait être plus espacé, sous sous son autorité, par un autre professionnel de santé
réserve d’entretiens infirmiers et d’actions pluri- du service de santé au travail : collaborateur médecin,
disciplinaires annuelles menées sur la prévention interne en médecine du travail ou infirmier. Ce suivi,
des risques professionnels (5). dont la périodicité peut aller jusqu’à 5 ans, ne donne
Une loi du 17 août 2015, complétée plus lieu à une fiche d’aptitude.
ultérieurement par la loi Travail du 8 août 2016, a Pour les personnes exposées à des “risques par-
étendu la mission du médecin du travail qui ne doit ticuliers”, le suivi médical est réalisé par le médecin
plus seulement éviter « toute altération de la santé du travail, et la détermination de l’aptitude au poste
des travailleurs du fait de leur travail », mais aussi « de travail est maintenue.
tout risque manifeste d’atteinte à la sécurité des
tiers évoluant dans l’environnement immédiat de Visite d’information et de prévention pour la
travail » (2, art. L. 4622-3 du Code du travail (CT)). majorité des travailleurs. Pour les personnes
considérées comme non exposées à des risques
professionnels particuliers, l’examen médical d’em-

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OUVERTURES

bauche et les examens ultérieurs sont remplacés par des « pour celles de ses collègues ou des tiers évoluant
“visites d’information et de prévention”, réalisées par un dans l’environnement immédiat de travail », notam-
professionnel de la santé au travail. ment en cas de poste dit “de sécurité”, exposant à
La visite d’information et de prévention à l’em- des dangers d’autres personnes que le travailleur
bauche a lieu au plus tard dans les 3 mois qui concerné, bénéficie d’un “suivi individuel renforcé”
suivent la prise de poste. Elle vise à interroger le de son état de santé, assuré par le médecin du tra-
travailleur sur son état de santé, l’informer sur les vail (b)(art. R. 4624-22 et 4624-24 du CT).
risques éventuels liés à son travail, les moyens de L’article R. 4624-23 du Code du travail définit la
préven-tion, les modalités de suivi de son état de liste des postes exposant à des risques pour le
santé, et la possibilité qu’il a de demander à tout travailleur ou pour des tiers : postes exposant à
moment une visite avec le médecin du travail (art. l’amiante, au plomb, aux agents cancérogènes,
R. 4624-10 et 4624-11 du CT). mutagènes ou toxiques pour la reproduction, aux
Quand l’état de santé du travailleur ou les risques rayonnements ionisants, etc. ; postes nécessitant
auxquels il est exposé le justifient, le professionnel un examen d’aptitude spécifique, tels que les
de santé réoriente le travailleur « sans délai » vers travaux sous tension ou la conduite de certains
le médecin du travail. Lors de cette visite, le méde- engins. Cette liste peut être complétée par
cin propose si besoin des adaptations du poste ou l’employeur, sous certaines conditions, en fonction
l’affectation à d’autres postes (art. R. 4624-13 du de son évaluation des risques.
CT). Mais en péri ode d’essai, cette réorientation Un examen médical d’aptitude est effectué avant
vers le médecin du travail à l’issue de la première l’affectation au poste de travail, et renouvelé selon
visite d’information et de prévention expose à ce une périodicité déterminée par le médecin du
que ce signal d’un éventuel problème de santé travail et qui ne peut excéder 4 ans (1 an pour
retentissant sur le travail soit utilisé à l’encontre du certains travailleurs exposés aux rayonnements
travailleur (10). ionisants) (12, art. R. 4624-24 et 4624-28 du CT).
La visite d’information et de prévention donne Ces visites donnent lieu à un avis d’aptitude ou
lieu, non plus à une fiche d’aptitude, mais à une d’inaptitude délivré au travailleur et à l’employeur.
“attestation de suivi” remise au travailleur et à Le médecin du travail peut aussi préconiser des
l’employeur (art. R. 4624-14 du CT). adaptations de poste ou l’affectation à d’autres
Selon l’âge, l’état de santé, les conditions de travail et postes (art. R. 4624-24 et 4624-25 du CT).
les risques auxquels le travailleur est ex-posé, la Une visite intermédiaire, donnant lieu à une
périodicité de la visite d’information et de prévention est “attestation de suivi”, est effectuée par un profes-
adaptée dans le cadre d’un protocole établi au préalable sionnel de la santé au travail au plus tard 2 ans
par le médecin du travail. Elle peut aller jusqu’à 5 ans après la visite avec le médecin du travail (art. R.
(art. R. 4624-16 du CT). 4624-28 du CT).

Des modalités particulières pour certaines Contrats à durée déterminée et travailleurs


catégories de travailleurs. La visite d’informa- intérimaires : mêmes règles de suivi médi-
tion et de prévention doit avoir lieu avant l’affecta- cal. Les travailleurs en contrat à durée déterminée
tion au poste pour certaines catégories de travail- bénéficient d’un suivi de leur état de santé d’une
leurs, notamment ceux qui travaillent de nuit ou périodicité équivalente à celle des salariés en contrat
ceux âgés de moins de 18 ans (art. R. 4624-18 du à durée indéterminée (art. R. 4625-1 du CT).
CT). Si leur visite d’information et de prévention Le suivi médical des personnes travaillant en
n’est pas effectuée par le médecin du travail, les intérim pose des difficultés particulières (13). Selon le
personnes handicapées ou titulaires d’une pension Code du travail, ils doivent bénéficier du même suivi que
d’invalidi-té, et les femmes enceintes, venant les autres salariés (visites d’information et de prévention,
d’accoucher ou allaitant, doivent être orientées « suivi individuel renforcé), avec des modalités adaptées
sans délai » par le professionnel de santé vers le aux spécificités du travail en intérim (2). Ce suivi est en
médecin du travail qui peut préconiser des général assuré par le service de santé au travail de
adaptations de poste ou l’affectation à d’autres l’entreprise de travail temporaire (art. R. 4625-3 à R.
postes (art. R. 4624-19 et 4624-20 du CT). 4625-14 du CT). Compte tenu de la diversité des
Pour les personnes handicapées ou bénéficiant missions d’intérim attribuées à une même personne, les
d’une pension d’invalidité et pour les travailleurs de visites d’in-formation et de prévention et les examens
nuit, le délai maximal entre deux visites d’infor- médicaux d’aptitude peuvent être effectués pour plusieurs
mation et de prévention est de 3 ans (art. R. 4624-
17 du CT). Le Code du travail prévoyait auparavant
pour les travailleurs de nuit une “surveillance
médicale renforcée” au moins tous les 6 mois (11).
b- En 2018, il n’existe pas de définition réglementaire des
Suivi individuel renforcé en cas de risques “postes de sécurité”. En 2015, il a été proposé de définir
ces postes comme comportant « une activité susceptible
particuliers pour le travailleur ou pour des
de mettre gravement et de façon immédiate en danger,
tiers. Le Code du travail précise que « tout travail- du fait de l’opérateur, la santé d’autres travailleurs ou de
leur affecté à un poste présentant des risques par- tiers ». Il s’agit par exemple des pilotes d’avion,
ticuliers pour sa santé ou sa sécurité », mais aussi conducteurs de train, grutiers (réf. 8).

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a revue rescrire écembre omeage
OUVERTURES

emplois, dans la limite de trois emplois (art. R. taines situations pourtant importantes. Les risques
4625-10 et 4625-12 du CT). psychosociaux en sont un exemple. Un travailleur dont le
poste n’est pas défini comme étant à risques particuliers
Visites médicales de préreprise, de reprise, ne bénéficie pas d’un suivi individuel renforcé, même
visites à la demande. Les modalités des visites quand, par exemple, à l’occasion de changements dans
de reprise et de préreprise du travail mises en place l’organisation du travail, il se retrouve exposé à des
en 2012 n’ont pas été modifiées (14). Ces visites risques psychosociaux. Les professionnels de santé n’en
sont réalisées par le médecin du travail (art. R. ayant pas connais-sance, ils ne peuvent jouer leur rôle
4624-29 à 4624-32 du CT). d’alerte.
La visite de préreprise est systématique pour les L’espacement du suivi médical individuel jusqu’à
personnes en arrêt de travail de plus de 3 mois (il 5 ans contribue à rendre difficile l’établissement
est aussi possible de l’organiser en cas d’arrêt de d’une relation de confiance entre les professionnels
moins de 3 mois) (15). Destinée à préparer la de santé et les travailleurs considérés comme non
reprise du travail, elle est organisée par le médecin exposés à des risques professionnels particuliers. Il
du travail pendant l’arrêt de travail, à l’initiative du les prive d’un temps nécessaire pour échanger sur
médecin traitant, du médecin-conseil de la Sécuri-té les conditions de travail réelles, repérer des
sociale ou du travailleur. Elle permet au médecin du situations à risque (notamment en termes de
travail de recommander si besoin diverses mesures risques liés à l’organisation du travail), et intervenir
d’aménagements de poste, de reclassement ou de pour la prévention de ces risques.
formation professionnelle afin de favoriser le La notion d’aptitude est débattue depuis de nom-
maintien dans l’emploi (14). breuses années. Que signifie, par exemple, qu’un
La visite de préreprise ne dispense pas de la visite de travailleur soit apte à un poste susceptible de l’ex-
reprise du travail. Celle-ci est obligatoire dans un délai de poser à l’amiante (8,16,17) ? Selon le groupe de
8 jours à partir de la reprise du travail, après tous les travail “Aptitude et médecine du travail”, mandaté
congés de maternité et les arrêts pour maladie en 2014 par les ministres de la santé et du travail,
professionnelle. En cas d’accident du travail, de maladie « la vérification systématique de l’aptitude, dont ni la
ou d’accident non professionnel, la visite de reprise n’est pertinence médicale, sauf pour les postes de sécurité, ni
systématique qu’après un arrêt d’au moins 30 jours (14). la pertinence juridique ne sont établies » est injustifiée
(c)(8). Ce groupe a proposé de « stric-tement limiter le
Une visite avec le médecin du travail peut être contrôle de l’aptitude aux salariés qui occupent un poste
demandée par l’employeur, par le travailleur, no- de sécurité » (8). Malgré ces préconisations, la
tamment lorsqu’il anticipe un risque d’inaptitude, ou, détermination de l’aptitude pour les travailleurs occupant
ce qui est nouveau, par le médecin du travail lui- des postes de travail dan-gereux pour eux-mêmes a été
même (art. R. 4624-34 du CT). maintenue. Et, pour des raisons de simplification, le
législateur n’a pas retenu la recommandation de confier
Maintien du temps consacré aux missions du le contrôle de l’aptitude des salariés occupant un “poste
médecin en milieu de travail. Le temps de sécu-rité” à un médecin distinct du médecin du travail,
légalement consacré par le médecin du travail à ce qui éviterait d’orienter la médecine du travail, qui est
ses missions en milieu de travail est maintenu : il une médecine de prévention, vers une mé-decine de
cor-respond au moins au tiers de son temps de contrôle sélectionnant les travailleurs aptes à occuper un
travail (art. R. 4624-4 du CT). poste (8, art. L. 4622-3 du CT).
Mais une partie de ce “tiers temps” doit aussi être
consacrée à sa mission d’animation et de coordi- Pour certains médecins du travail, ces dispositions
nation de l’équipe pluridisciplinaire en santé au posent un problème déontologique et éthique. Selon le
travail (art. R. 4624-4 du CT). Et, dans la pratique, Code de la santé publique, « un médecin exerçant la
c’est souvent le seul temps dont dispose le médecine de contrôle ne peut être à la fois médecin de
médecin du travail pour gérer des situations prévention ou, sauf urgence, mé-decin traitant d’une
d’aptitude com-plexes. même personne » (art. R. 4127-100 du Code de la santé
publique). Le Conseil national de l’Ordre des médecins
s’en est inquiété :
Une réforme qui suscite de nombreuses « La disparition du lien entre le salarié et le médecin du
interrogations travail à l’embauche et la réorientation des mis-sions du
médecin du travail vers l’évaluation de l’aptitude des
La réforme de 2016 suscite plusieurs interrogations salariés postulant à des postes à
qui concernent notamment : la segmentation a priori
des risques professionnels ; l’espacement du suivi
médical ; le maintien de la détermination de c- Le groupe de travail “Aptitude et médecine du travail”
l’aptitude pour les travailleurs exposés à certains était composé d’un député, d’un membre de la direction
risques professionnels, et la détermination de l’ap- des ressources humaines d’une grande entreprise, d’un
professeur de médecine du travail et de membres de
titude aux postes dits de sécurité dans le cadre de l’Ins-pection générale des affaires sociales (IGAS). Le
la médecine du travail (16). groupe a rencontré de nombreux acteurs de la santé au
Définir a priori des postes à “risques particuliers” travail : professionnels de santé, institutionnels, chefs
ne suffit pas à porter une attention adaptée à cer- d’entreprise, syndicalistes, etc. (réf. 8).

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OUVERTURES

risques et des postes mettant en cause la sécurité 9- Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statis-
tiques “Les médecins d’ici à 2040 : une population plus jeune, plus
des tiers dénaturent le métier de médecin du féminisée et plus souvent salariée - Projections par spécialité” 2017.
travail. Cette dérive vers une médecine de contrôle Site internet drees.solidarites-sante.gouv.fr consulté le 26 juillet 2018.
altère le lien indispensable à la confiance entre 10- “Débat : Où va la médecine du travail ?” Santé et travail
2017 ; (99) : 52-54.
chaque salarié et son médecin du travail » (18). 11- Prescrire Rédaction “Surveillance médicale renforcée des
travailleurs postés et/ou de nuit” Rev Prescrire 2016 ; 36 (391) : 379.
12- “Décret n° 2018-437 du 4 juin 2018 relatif à la protection des
Vers une nouvelle réforme ? tra-vailleurs contre les risques dus aux rayonnements ionisants”
Journal Officiel du 5 juin 2018 : 25 pages.
13- Maraschin J “Le suivi médical précaire des intérimaires”
En France, les réformes successives de la médecine du Santé et travail 2017 ; (100) : 38-39.
travail affichent une volonté de privilégier la prévention 14- Prescrire Rédaction “Visites de préreprise et de reprise du travail :
de nouvelles modalités” Rev Prescrire 2014; 34 (366) : 304.
primaire des risques professionnels. Mais les 15- Assemblée nationale “Réponse ministérielle à la question N°
changements mis en œuvre en 2017 en-voient un signal 19880 de M. Jean-Luc Warsmann” Journal Officiel du
contradictoire, notamment en éloignant les professionnels 3 septembre 2013 : 9331.
16- Le Saint R et Desriaux F “Médecine du Travail : l’inquiétude
de la santé au travail de la plupart des travailleurs, face au projet de décret” Santé et travail Article Web du
considérés a priori comme non exposés à des risques 5 décembre 2016 : 2 pages.
particuliers (d). 17- Prescrire Rédaction “”Aptitude médicale au travail” : une singula-rité
française remise en question” Rev Prescrire 2008 ; 28 (291) : 66-68.
En janvier 2018, un an seulement après l’entrée 18- Conseil national de l’Ordre des médecins “Le Conseil
en vigueur de la réforme de 2016, le gouvernement national de l’Ordre des médecins s’inquiète des conséquences
a demandé de nouvelles propositions sur le du projet de loi « El Khomri » sur le rôle de la médecine du
travail” Communiqué de presse du 27 avril 2016 : 1 page.
système de prévention des risques professionnels. 19- Lecocq C et coll. “Santé au travail : vers un système simplifié
Le rapport du groupe chargé de cette mission a pour une prévention renforcée” Rapport fait à la demande du
Premier ministre, août 2018 : 174 pages.
préconisé en août 2018 une refonte radicale de 20- “Décret n° 2017-1311 du 29 août 2017 relatif à la
l’organisation du « système de santé au travail modernisation de la médecine du travail en agriculture” Journal
français construit par strates successives » (19). Officiel du 31 août 2017 : 12 pages.
21- Ministère du travail “Réforme de la médecine du travail et des
Au fil des diverses réformes, l’accès des salariés services de santé au travail : questions les plus fréquentes” mis à
à un professionnel de la santé au travail est devenu jour le 7 décembre 2017. Site travail-emploi.gouv.fr consulté le
de plus en plus restreint. Les soignants du 25 juillet 2018.
quotidien ont un rôle à jouer en informant les
patients des missions et possibilités d’action des
services de santé au travail. Ils contribuent aussi à
protéger la santé des patients en échangeant avec
eux sur leur travail, mais souvent avec une faible
connaissance des conditions réelles dans
lesquelles ces travailleurs se trouvent.
Synthèse élaborée collectivement
par la Rédaction sans aucun conflit
d’intérêts ©Prescrire

d- Des réponses aux questions les plus fréquentes sur la réforme


de la médecine du travail mise en œuvre en 2017 sont en ligne
sur le site du Ministère du travail (réf. 21).

Extraits de la veille documentaire Prescrire


1- Prescrire Rédaction “Réforme de la médecine du travail : plus d’action
préventive en entreprise” Rev Prescrire 2006 ; 26 (271) : 301-303.
2- “Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la
modernisa-tion du dialogue social et à la sécurisation des parcours
professionnels” Journal Officiel du 9 août 2016 : 100 pages.
3- “Décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016 relatif à la
modernisa-tion de la médecine du travail” Journal Officiel du
29 décembre 2016 : 14 pages.
4- “Loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l’organisation de la
médecine du travail” Journal Officiel du 24 juillet 2011 : 6 pages.
5- “Décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 relatif à l’organisation de la
médecine du travail” Journal Officiel du 31 janvier 2012 : 15 pages.
6- Chastel X et coll. “Attractivité et formation des professions de
santé au travail” Rapport de l’Inspection générale des affaires
sociales et de l’Inspection générale de l’administration de
l’éducation nationale et de la recherche, août 2017 : 176 pages.
7- Conseil national de l’Ordre des médecins “Atlas de la démographie
er
médicale en France. Situation au 1 janvier 2017” : 323 pages.
8- Issindou M et coll. “Rapport du groupe de travail “Aptitude et
médecine du travail”” mai 2015 : 112 pages.

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a revue rescrire écembre omeage
OUVERTURES

Médicaments de la maladie
d’Alzheimer : diminution
des prescriptions trop lente

●● En France, une étude des données de viron 26 % en 5 ans (4). Autrement dit, en France,
l’assureur maladie obligatoire sur la péri ode 2012- le nombre de patients exposés est passé d’environ
2017, effec-tuée par Prescrire, a montré une 300 000 en 2011 et 260 000 en 2012 à 200 000 en
diminution d’en-viron 26 % du nombre de patients 2017.
exposés à au moins un médicament de la maladie Plus précisément, le nombre de patients dans
d’Alzheimer. La durée du traitement a dépassé l’EGB exposés à la mémantine est passé de 1 198
6 mois chez envi-ron 3 patients nouvellement à 841 (-30 %) ; à la rivastigmine, de 781 à 756 (-
exposés sur 4, malgré les risques avérés. 3 %) ; au donépézil, de 745 à 406 (-46 %) ; à la
galantamine, de 501 à 212 (-58 %) (4).

Nouvelles expositions : souvent prolongées


E n France, avant le 1
er
août 2018, les médica-ments
plus de 6 mois. Dans l’EGB, le nombre de patients
ANALYSE DE PRATIQUES

nouvellement exposés à au moins un de ces médi-


commercialisés dans la maladie d’Alz-heimer étaient caments a diminué entre 2012 et 2017, passant
remboursables par l’assureur maladie obligatoire : le
donépézil (Aricept° ou autre), la rivastigmine (Exelon° ou globalement de 521 à 408, soit -22 %. Parmi ces patients,
autre), la galantamine ceux dont l’exposition n’a pas dépassé 6 mois sont restés
(Reminyl° ou autre), des anticholinestérasiques ; et minoritaires : environ 26 % en 2012, 22 % en 2015, 30 %
la mémantine (Ebixa° ou autre), un antagoniste des en 2016 (données complètes 2017 inaccessibles au 5
récepteurs NMDA du glutamate (1). novembre 2018) (4).
En 2011, la Commission de la transparence de la Les expositions atteignant 2 ans ou plus sont
Haute autorité de santé (HAS) a fait passer la cota- restées nombreuses : environ 51 % des patients
tion de leur service médical rendu (SMR) d’“impor- exposés à partir de 2012, et 49 % pour ceux
tant” à “faible”. En mars 2012, leur taux de rem- exposés à partir de 2015 (4).
boursement est passé de 65 % à 15 %, mais, en
pratique, ces médicaments restaient pris en charge Mémantine associée avec un anti-
à 100 % dans la maladie d’Alzheimer, dans le cadre cholinestérasique : moins 66 %. Dans l’EGB,
des “affections de longue durée” (ALD) (2). Leur le nombre de patients exposés à la fois à la méman-tine
SMR n’a été coté “insuffisant” qu’en 2016 (1). et à au moins un anticholinestérasique a dimi-nué chaque
Une étude des données de l’assureur maladie année de 2012 à 2017. Il est passé de 387 à 131, soit
obligatoire en France sur les années 2003-2011 a environ -66 % (4). Début 2013, faute de données
montré que l’exposition à au moins un de ces médi- probantes, la Commission européenne a refusé la mise
caments dépassait 6 mois chez 3 patients sur 4, sur le marché d’une première as-sociation à doses fixes
alors que ces traitements prolongés exposent les mémantine + donépézil (5).
patients à des risques injustifiés (3).
Prescrire a examiné à nouveau les données de En somme : une amélioration des pratiques
l’“échantillon généraliste de bénéficiaires” (EGB), trop lente. En 2017, en France, on comptait encore
pour la période 2012-2017. environ 200 000 patients exposés à au moins un
médicament de la maladie d’Alzheimer. La publica-tion
Lente diminution du nombre de patients des baisses de cotations du SMR par la Com-mission de
exposés. L’EGB est construit et actualisé par la la transparence de la HAS n’a eu qu’un effet mineur sur
Caisse nationale d’assurance maladie des l’évolution de cette exposition. De même que
travailleurs salariés (Cnamts) pour représenter la l’abaissement du taux de remboursement
population couverte par l’assureur maladie à 15 %.
obligatoire à l’échelle 1 pour 97 (3,4). Dans l’EGB, Il est probable que l’exposition ait diminué plus
l’exposition aux médi-caments est approchée par franchement sous l’effet de l’arrêt du rembourse-
les prescriptions dis-pensées en officine puis ment, effectif depuis août 2018. Mais il est déjà
présentées au rembourse-ment. clair que la mesure réglementaire la plus efficace
Dans l’EGB, le nombre de patients exposés à au moins
pour protéger les patients de ces médicaments plus
un des médicaments de la maladie d’Alzhei-mer a dangereux qu’utiles, est le retrait du marché.
culminé à 2 954 en 2011. De 2012 à 2017, il a diminué de ©Prescrire
2 707 à 2 014, soit une diminution d’en-

Page 944 • La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422


OUVERTURES

Extraits de la veille documentaire Prescrire 3- Prescrire Rédaction “Maladie d’Alzheimer : des patients trop
expo-sés aux anticholinestérasiques et à la mémantine en
1- Prescrire Rédaction “Médicaments de la maladie d’Alzheimer : enfin non
France” Rev Prescrire 2014 ; 34 (363) : 23.
remboursables en France !” Rev Prescrire 2018 ; 38 (417) : 505.
4- Prescrire Rédaction “Médicaments de la maladie d’Alzheimer
2- Prescrire Rédaction “Médicaments de la maladie d’Alzheimer : et EGB - 2018” : 9 pages.
baisse du taux de remboursement” Rev Prescrire 2012 ; 32 5- Prescrire Rédaction “Association à doses fixes donépézil +
(343) : 344. méman- tine : non autorisée dans l’Union européenne” Rev
Prescrire 2013 ; 33 (357) : 508.

Lu pour vous
Influence Une partie est ensuite consacrée à l’encadrement lé-
gislatif des pratiques d’influence des firmes dans l’Union
Information ou influence. européenne, et ses lacunes, notamment en raison du
Ce que les professionnels de santé recours à l’autorégulation des firmes (1).
Le document se termine en encourageant étudiants et
doivent savoir du marketing professionnels de santé à se démarquer de l’influence
de l’industrie pharmaceutique des firmes, et donne une liste de sources d’informations
dans l’Union européenne indépendantes et d’organismes d’appui (1).
Cette traduction en français, bienvenue, élargit la palette des
“Information ou influence” est une outils pédagogiques à disposition des étudiants, enseignants
version plus synthétique, actualisée en et professionnels de santé (1). Elle complète utilement des
2016 et centrée sur la situation législa- documents plus condensés tels que le livret de la Troupe du
tive dans l’Union européenne, du ma- Rire “Pourquoi garder son indépendance face aux laboratoires
nuel de l’Organisation mondiale de la pharmaceutiques ?”, également primé par Prescrire, et offre un
santé (OMS) de 2009 “Comprendre la aperçu de la législation européenne, absente des autres
promotion pharmaceutique et y ré- documents (4).
pondre”, primé par Prescrire (1à3). Les enseignants et toute personne animant des ses-sions de
“Information ou influence” a été rédigé sensibilisation sur ce sujet pourront y puiser des éléments, tels
par Health Action International en 2016 et traduit en que des cas concrets de médicaments ou des modèles
français par la Troupe du Rire en 2017 (1). Il est destiné d’ateliers proposés, et s’appuyer sur les nombreuses
en premier lieu aux étudiants et enseignants des filières références citées. La licence non com-merciale sous laquelle
de santé, afin de leur fournir des informations qui font est publiée cette traduction, tout comme le document original,
encore souvent défaut dans la formation initiale. autorise librement sa diffusion ou sa réutilisation, y compris
Ses objectifs pédagogiques sont de permettre l’iden- sous une forme modifiée, tant que la source originale est
tification des stratégies d’influence des firmes pharma- indiquée (1).
ceutiques, et de leur impact sur la pratique clinique et la En 2018, connaître et prendre en compte les
santé publique ; de faire connaître le cadre législatif stratégies d’influence des firmes est toujours une
européen et ses lacunes ; et d’encourager étudiants et nécessité pour s’en protéger et soigner en plaçant
professionnels de santé à entreprendre des actions l’intérêt des patients en premier.
garantissant une plus grande indépendance face aux ©Prescrire
firmes (1).
Le document présente d’abord la promotion commer- Extraits de la veille documentaire Prescrire
ciale d’un produit pharmaceutique, qui débute dès les
1- La Troupe du Rire “Information ou influence. Ce que les professionnels de
premières phases des essais cliniques (1). Le cas de santé doivent savoir du marketing de l’industrie pharmaceutique dans
l’oséltamivir (Tamiflu°) est pris en exemple. Il développe l’Union européenne” 2017 : 60 pages. Téléchargeable gratuitement sur le
ensuite différentes stratégies parmi les plus influentes site intenet https://latroupedurire.fr.
2- Health Action International “Fact or fiction ? What healthcare
utilisées par les firmes pharmaceutiques : ventes basées professionals need to know about pharmaceutical marketing in the
sur le relationnel ; information et sensibilisation au European Union” 2016 : 72 pages. Téléchargeable gratuitement sur
produit ; utilisation des médias ; techniques d’expansion le site internet haiweb.org, onglet “Publications”.
3- Mintzes B et coll. “Comprendre la promotion pharmaceutique et y
du marché ; utilisation de leaders d’opinion. Différents répondre. Un manuel pratique” Organisation mondiale de la santé et
cas de médicaments, des analyses de publicités ou de Action internatio-nale pour la santé, traduction française 2013 : 181
pages. Présenté dans : Rev Prescrire 2013 ; 33 (359) : 705.
campagnes de santé publique détournées sont 4- La Troupe du Rire “Pourquoi garder son indépendance face aux
exposés, ainsi que les mécanismes qui permettent de laboratoires pharmaceutiques ? Livret pour étudiants stressés, pressés
comprendre comment ces stratégies s’avèrent efficaces comme des citrons, mais avides de comprendre” 2014 : 36 pages.
Présenté dans : Rev Prescrire 2015 ; 35 (383) : 704.
auprès des étudiants et des professionnels de santé.

L P •D 2018 • T 38 N° 422 • P 945


a revue rescrire écembre omeage
OUVERTURES

Des actions publiques pour faire


progresser les politiques de santé
Prescrire contribue régulièrement à diverses initiatives aux niveaux européen et français, souvent
conjointement avec d’autres organisations de la société civile. Ses propositions visent à faire
progresser les politiques de santé dans l’intérêt général. Elles sont accessibles à partir du site
www.prescrire.org, rubrique “Faire progresser les politiques de santé”. Nous en publions ici
quelques points-clés.

Ruptures de stocks : pas une raison pour rogner sur la qualité pharmaceutique

En mai 2018, dans le cadre de la mise à pays où les salaires et les coûts sont bas. Elles sont ainsi
jour de documents d’informations entre confrontées à des soucis d’approvisionnement quand
autorités nationales, l’Agence européenne elles dépendent d’une unique source mon-diale qui a des
du médicament (EMA) a mis en consul- difficultés de production (2).
tation un formulaire intitulé “Déclaration de non-
respect des bonnes pratiques de fabrication” (1). Responsabiliser les firmes. Pour Prescrire, les
ACTIONS PUBLIQUES

Ce document prévoit que, en cas de découverte de ruptures de stocks représentent une menace sanitaire
non-respect sérieux des bonnes pratiques de fabri- qui ne justifie pas d’accepter la circulation de mé-
cation d’un médicament lors d’une inspection sur un dicaments non conformes aux bonnes pratiques de
site de production pharmaceutique, les autorités fabrication. Le rôle des autorités sanitaires est de
sanitaires peuvent décider de « minimiser ou ac- rappeler aux firmes qu’elles n’ont pas seulement des
cepter le risque », si cela permet d’éviter des droits. Elles ont aussi des devoirs, à savoir permettre
ruptures de stocks en médicaments, et si un approvisionnement suffisant en mé-dicaments
notamment le producteur fournit une analyse de la utiles pour les soins, pour lesquels une AMM a été
balance béné-fices-risques du médicament accordée et dont la qualité pharmaceu-tique doit être
concerné par le pro-blème de qualité (a)(1). À garantie (2).
l’occasion de cette consul-tation, Prescrire a appelé ©Prescrire
l’EMA et les firmes à se ressaisir (2).

Les bonnes pratiques de fabrication : ga-


rantes de la qualité pharmaceutique. En vue a- Selon ces propositions, il suffit qu’une firme fournisse
de l’octroi d’une autorisation de mise sur le marché un “plan de minimisation des risques” aux autorités
(AMM), les firmes doivent documenter la balance sanitaires des pays concernés, et que les autorités
sanitaires ne s’op-posent pas à cette commercialisation,
bénéfices-risques et la qualité pharmaceutique du pour qu’un médica-ment dont la qualité pharmaceutique
médicament (3). Et le respect des bonnes pratiques de n’est pas aux normes puisse être commercialisé (réf. 1).
fabrication garantit la qualité pharmaceutique (b). b- En pratique, il s’agit d’être sûr que les médicaments
Alors que certaines firmes se sont fait rappeler à l’ordre contiennent bien la ou les substance(s) annoncée(s), à leur
à plusieurs reprises par l’Agence étatsunienne (FDA) pour dosage annoncé, avec les excipients prévus et seulement ceux-
non-respect des bonnes pratiques de fabrication, l’EMA là, fabriqués selon un procédé validé et avec les contrôles de
qualité nécessaires à chaque étape.
envoie un signal inquiétant en actant que de telles
insuffisances seraient somme toute acceptables selon les
circonstances (2,4).

Extraits de la veille documentaire Prescrire


Les ruptures de stocks ne sont pas une
fatalité. Dans sa réponse à l’EMA, Prescrire a 1- EMA “Public consultation concerning the EU template for GMP
rappelé la problématique grandissante des ruptures non-compliance statement (EMA/189939/2018)” 26 mars 2018.
Site www.ema.europa.eu consulté le 14 juin 2018 : 4 pages.
de stocks de médicaments et de vaccins, tant en 2- Prescrire Editorial Staff “Prescrire’s contribution to EMA’s
France que dans les autres pays européens (2). public consultation concerning the EU template for GMP non-
Ces ruptures ne sont pas une fatalité, mais sont la compliance statement” 14 mai 2018 : 2 pages.
3- “Directive 65/65/CEE du Conseil concernant le rapprochement
conséquence, entre autres, de la réorganisation par des dispositions législatives, réglementaires et administratives,
les firmes de leur production. En effet, pour limiter relatives aux spécialités pharmaceutiques” 26 janvier 1965. Site
les coûts et maximiser les profits, les firmes dé- https://eur-lex. europa.eu consulté le 15 juin 2018 : 5 pages.
4- “Bayer in FDA’s bad books over facilities failures” Scrip
localisent souvent la production des matières 23 février 2018 : 1 page.
premières pharmaceutiques dans une usine d’un

Page 946 • La revue Prescrire • Décembre 2018 • Tome 38 N° 422


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Attention aux tiques !

Les morsures de tiques, souvent indolores, Prévention des maladies transmises par les tiques
transmettent parfois des maladies potentiellement
graves. Mieux vaut savoir les prévenir. ●● De retour d’une zone à risque, il est prudent d’inspec-ter
soigneusement sa peau, de la tête aux pieds, car les tiques
passent parfois inaperçues.
Conséquences des morsures de tiques
●● Il est prudent d’ôter ces parasites dès leur découverte,
●● En France, les tiques sont particulièrement actives en car le risque de transmission de maladies est d’autant plus
période chaude, dans les lieux boisés et les prairies. grand que la durée de contact avec la peau se pro-longe. Le
risque de maladie de Lyme semble très faible quand la tique
●● Les morsures de tiques provoquent des réactions reste attachée pendant moins de 24 h. Pour ce faire, un tire-
locales (douleurs, démangeaisons, œdèmes). Les marques tique semble pratique et efficace. Il importe d’extraire la tique
de morsures de tiques disparaissent toutes seules en entièrement et de bien nettoyer la plaie.
quelques jours.

●● Les tiques transmettent parfois des bactéries à l’origine ●● Il n’est pas recommandé de prendre systématiquement
d’atteintes de la peau, des articulations, du cœur et du des antibiotiques après une morsure de tique.
cerveau décrites sous le nom de “maladie de Lyme”. Elles
transmettent aussi, rarement en France, le virus de la ●● Après extraction de la tique, il est important de sur-veiller
méningo-encéphalite à tiques, une maladie neurologique la zone de morsure. Un érythème migrant est souvent l’un
grave. des premiers signes d’une maladie de Lyme. Il est suspecté
quand une lésion apparaît en général 1 à 2 semaines après
la morsure et qu’elle forme un disque rouge (ou foncé sur
Privilégier des mesures simples peau noire) qui s’agrandit progres-sivement. Une
consultation médicale est alors nécessaire. Un traitement
●● Pour limiter le risque de morsure de tique, il est conseillé antibiotique est justifié dans ce cas pour éviter la
de porter des vêtements couvrants, serrés aux poignets et progression de l’infection.
aux chevilles et des chaussures fermées.
●● Il existe un vaccin contre la méningo-encéphalite à
●● Pour les personnes particulièrement exposées comme tiques. Son emploi peut être envisagé pour des personnes
les agriculteurs ou les forestiers, l’emploi d’un répulsif travaillant dans les bois ou les champs dans les régions où
permet de diminuer le risque de morsure et d’infection le virus est présent. Son efficacité est incomplète.
grave. Le DEET est le mieux évalué. Appliqué sur la peau ©Prescrire – septembre 2018
exposée à la concentration de 50 % chez les adultes, il
protège pendant quelques heures. Cependant, il provoque
 Sources  • “Érythème migrant après morsure de tique” Premiers Choix
parfois des irritations oculaires ou cutanées et détériore les Prescrire, actualisation octobre 2017 : 4 pages. • “Piqûres de
fibres synthétiques, le cuir et le plastique, notamment des moustiques et morsures de tiques : prévention individuelle” Premiers
lunettes et des montres. Choix Prescrire, actualisation mars 2018 : 4 pages.

●● Les pyréthrinoïdes (perméthrine ou autre) utilisés pour


imprégner les vêtements conservent un effet répulsif jusqu‘à
4 à 6 lavages.

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Choisir une plante pour mieux dormir

L’utilisation traditionnelle des vertus “calmantes” des Les plantes à éviter


plantes remonte à de nombreux siècles. En France, cer-
taines plantes entrent dans la composition de médica- ●● La ballote contient des éléments toxiques pour le foie.
ments utilisés en cas de troubles mineurs du sommeil.
●● L’anémone pulsatille contient une substance toxique sur
les nerfs et les reins. Utilisée par une femme enceinte, elle
Préférer les extraits aqueux de valériane pourrait provoquer des malformations chez l’enfant à naître.

●● Pour avoir un meilleur sommeil, il est logique de


commencer par prendre de bonnes habitudes et par utiliser ●● Le cimicifuga a été mis en cause dans des atteintes du
la méthode psychologique et comportementale du “contrôle foie. Il est présent dans diverses médications (médi-cament
par le stimulus”. Ces pratiques sont à la fois efficaces, de phytothérapie, médicaments homéopathiques,
satisfaisantes et sans danger. Une infusion de plante, peu compléments alimentaires, etc.).
avant le coucher, aide parfois, notamment pour ménager un
moment de détente ou instaurer un rituel favorable à ●● D’autres plantes sont parfois proposées sans argument
l’endormissement. solide d’efficacité dans l’insomnie, et avec un doute sur la
possibilité d’effets indésirables : aspérule odorante,
●● Des extraits de valériane semblent avoir une certaine coquelicot, eschscholtzia, gaillet, laitue vireuse. Il est
efficacité sur la qualité ressentie du sommeil : proche de prudent d’éviter aussi le gattilier, le mélilot et la lavande,
celle d’un somnifère à dose faible. Parmi les différents types pour lesquels on manque de données.
d’extraits de valériane, mieux vaut choisir les extraits ©Prescrire – septembre 2018
aqueux ou hydroalcooliques faiblement dosés. La poudre de
valériane et les extraits alcooliques concentrés sont à éviter
car ils contiennent des substances toxiques.  Sources  • “Mauvais sommeil chez un adulte” Premiers Choix Prescrire,
actualisation juin 2018 : 6 pages.

Les autres plantes utilisables

●● La mélisse, l’oranger, le tilleul, et la verveine odorante,


sont traditionnellement utilisés pour aider à l’endormis-
sement. Leur efficacité n’est pas démontrée, mais ils n’ont
pas d’effet indésirable connu.

●● L’aubépine, le houblon et la passiflore ne semblent


provoquer aucun effet indésirable grave, et peuvent être
utilisés sans inquiétude.

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Cystites récidivantes chez les femmes

En cas de cystites aiguës récidivantes, quelques ●● D’autres antibiotiques sont à réserver aux cas d’échecs
mesures simples et un traitement antibiotique court à de la fosfomycine trométamol ou sont moins certainement
chaque épisode suffisent dans la majorité des cas. efficaces. Ils exposent plus souvent à des effets indési-
rables parfois graves.

En prévention : boissons, cranberry ? ●● Quand les troubles persistent au-delà de 48 heures


malgré l’antibiotique, ou en présence de fièvre ou de douleur
●● Boire suffisamment et uriner régulièrement dans la au creux du dos, il est préférable de consulter un médecin
journée sont des mesures souvent préconisées, mais il n’est pour un examen physique et souvent des examens de
pas certain qu’elles diminuent vraiment le risque de laboratoire (analyses d’urines notamment).
récidives.
●● Toute cystite au cours d’une grossesse nécessite un avis
●● La consommation quotidienne d’environ 750 ml de jus médical systématique.
de cranberry (canneberge à gros fruits), ou l’équiva-lent
sous forme concentrée, est parfois aussi proposée. Le jus ●● C’est seulement dans de très rares cas de récidives qu’il
de cranberry semble diminuer un peu le nombre de est justifié de prendre régulièrement un antibiotique sur une
récidives, mais il ne permet pas la guérison d’une cystite. longue durée.
Chez les personnes prenant des anticoagulants antivitamine
K, le jus de cranberry peut favoriser les saignements.
Cystite et rapports sexuels

●● Les rapports sexuels déclenchent parfois des cystites.


Préférer un antibiotique en cure courte à Lorsque c’est le cas, il est conseillé d’uriner après les
chaque récidive rapports sexuels, et d’éviter les spermicides (crème ou ovule
contraceptif) qui semblent favoriser les récidives.
●● En cas de cystites récidivantes, prendre un antibiotique ©Prescrire – septembre 2018
dès l’apparition des symptômes à chaque nouvelle cystite
aiguë accélère la guérison, tout en évitant une utilisation
 Sources  • “Cystite aiguë simple chez une femme” Premiers Choix
d’antibiotique de manière continue. Le médecin peut Prescrire, actualisation mai 2018 : 4 pages.
prescrire ce traitement à l’avance.

●● Sauf exception, dans les cystites simples, la fosfomy-


cine trométamol, en une seule prise, est l’antibiotique de
premier choix. Cet antibiotique provoque parfois des
nausées, des diarrhées et des éruptions cutanées. La
fosfomycine trométamol expose à peu de résistances des
bactéries.

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Dermatite séborrhéique du cuir chevelu

La dermatite séborrhéique du cuir chevelu est gênante Un médicament parfois


et récidive souvent, mais elle est sans gravité. Pour
réduire la gêne, un shampoing antipelliculaire est sou- ●● Quand les shampoings antipelliculaires ne sont pas ou
vent suffisant. En cas d’inefficacité ou en cas de pous- pas assez efficaces ou quand la gêne est importante
sée, il est justifié de recourir à un médicament en appli- d’emblée, un médicament tel que le kétoconazole à 2 % en
cation sur le cuir chevelu : ciclopirox ou kétoconazole. gel moussant ou le ciclopirox à 1 % en shampoing, est alors
le meilleur choix. Ces médicaments causent parfois des
démangeaisons, une sensation de brûlure, une sécheresse
Rougeurs et pellicules de la peau.

●● La dermatite séborrhéique du cuir chevelu se manifeste ●● En général, le traitement dure 4 semaines. Quand les
par des rougeurs et des pellicules (aussi appelées rechutes sont fréquentes, une utilisation régulière mais
squames) qui causent parfois des démangeaisons. Elle espacée est parfois envisagée.
apparaît le plus souvent à la puberté, parfois après l’âge de
50 ans. La gêne est surtout esthétique et liée aux
démangeaisons. Les pellicules et les rougeurs évoluent par Des précautions
poussées qui semblent plus fréquentes lors de pé-riodes de
stress. L’origine est mal connue : un champignon ●● Les corticoïdes en application sur le cuir chevelu sou-
microscopique présent à la surface de la peau est peut-être lagent partiellement les démangeaisons. Mais ils sont à
en cause. La dermatite séborrhéique n’est pas conta-gieuse. utiliser sur de courtes périodes afin d’éviter leurs effets
indésirables cutanés (infection, boutons, allergies, etc.).

●● Dans certains cas, des squames et des rougeurs ●● Après un traitement par application d’un corticoïde, une
touchent aussi le visage, en particulier de chaque côté du recrudescence des pellicules est parfois observée. Il est
nez. Rarement, elles s’étendent à d’autres zones telles que possible de la prévenir en diminuant progressivement la
les sourcils, les paupières, les oreilles, le thorax ou entre les dose et la fréquence des applications.
épaules.
●● Chez les femmes enceintes, on connaît mal les effets
des substances contenues dans les shampoings ou les
D’abord un shampoing antipelliculaire médicaments de la dermatite séborrhéique sur l’enfant
qu’elles portent. Il est prudent d’éviter notamment le
●● Les traitements permettent souvent une amélioration kétoconazole, le sulfure de sélénium, l’acide salicylique, les
temporaire, aucun n’élimine définitivement les pellicules. Un anti-inflammatoires (tels que le kéluamide), les corticoïdes.
shampoing antipelliculaire, utilisé en alternance à un
shampoing doux, réduit souvent la gêne. ©Prescrire – septembre 2018

●● Les shampoings antipelliculaires contiennent diverses


 Sources  • “Dermatite séborrhéique” Premiers Choix Prescrire,
substances actives contre les champignons (ciclopirox,
actualisa-tion juin 2018 : 4 pages.
pyrithione de zinc, sulfure de sélénium, piroctone olamine,
etc.) ou pour décoller les pellicules (acide salicylique, huile
de cade, etc.). Ils causent parfois des irritations.

●● Quand un shampoing antipelliculaire n’est pas efficace


ou cause des effets indésirables, il est préférable de tes-ter
un autre shampoing de composition différente.

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Infections urinaires aiguës chez les femmes

Chez les femmes, les infections urinaires basses sont Un traitement court
fréquentes et souvent sans gravité. Un traitement anti-
biotique permet en général d’accélérer la guérison. ●● Les cystites aiguës simples guérissent environ 1 fois sur
2 sans traitement, mais parfois seulement au bout de
plusieurs semaines.
Les infections urinaires
●● Boire abondamment et uriner souvent apporte parfois un
●● Les infections urinaires “basses”, ou cystites, sont soulagement, mais ne remplace pas la prise d’un
limitées à la vessie. Les infections urinaires “hautes”, ou antibiotique pour la plupart des femmes.
pyélonéphrites, atteignent le rein. Ces infections sont
généralement causées par des bactéries. On dénomme ●● Un traitement antibiotique approprié pendant un à trois
“infections urinaires aiguës” les infections d’apparition rapide jours accélère en général la guérison.
et récente.
●● Les cystites récidivent chez certaines femmes. Dans ce
cas, il est conseillé de boire abondamment, d’uriner
Reconnaître une cystite aiguë simple régulièrement dans la journée et d’uriner après les rap-ports
sexuels.
●● On parle de cystite aiguë simple quand ces conditions
sont remplies : ●● Le jus de cranberry (canneberge à gros fruits) ne permet
––depuis moins de trois jours, les envies d’uriner sont pas la guérison d’une cystite.
pressantes et anormalement fréquentes, les urines sont
parfois colorées par du sang, et quand uriner est difficile ou
douloureux ; Attention à la pyélonéphrite
––chez une femme de plus de 15 ans (jamais un enfant ou
un homme), qui n’est pas enceinte, qui n’a pas eu d’autre ●● Une infection au niveau du rein (pyélonéphrite) est une
infection urinaire depuis 3 mois, et qui n’est pas atteinte infection urinaire plus grave, à évoquer quand certains
d’une autre maladie augmentant les risques d’infection symptômes s’ajoutent aux troubles urinaires : fièvre élevée
urinaire (diabète, insuffisance rénale, immu-nité réduite,
avec frissons, nausées et vomissements, mal au ventre ou
anomalie de l’appareil urinaire, etc.) ;
au creux du dos. Dans ce cas, consulter rapi-dement pour
––il n’y a pas de démangeaison au niveau de la vulve ou du mettre en route un traitement antibiotique, en général adapté
vagin, ni de pertes vaginales anormales, ni de signe faisant aux résultats d’une analyse des urines.
craindre une infection du rein (fièvre, frissons, nausées et
vomissements, mal au ventre ou au dos). ●● Une infection du rein non traitée peut évoluer vers un
abcès du rein, une infection grave généralisée ou laisser des
●● Lorsque tous ces critères sont réunis, le diagnostic de séquelles sur le fonctionnement du rein.
cystite aiguë simple est certain à 95 %, et aucun examen
corporel ou autre (analyse des urines, etc.) ne permet
d’avoir une meilleure certitude. Les femmes peuvent donc Un antibiotique pour un soulagement rapide
souvent faire le diagnostic elles-mêmes.
●● En somme, un antibiotique en courte durée permet en
général de soulager rapidement une infection urinaire aiguë
simple. Il est prudent de consulter sans délai si les troubles
persistent ou si d’autres troubles apparaissent, telle la fièvre.

©Prescrire – septembre 2018

 Sources  • “Cystite aiguë simple chez une femme” Premiers Choix


Prescrire, actualisation mai 2018 : 4 pages.

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La ménopause

La ménopause est la période de la vie des femmes Comment passer cette période ?
qui marque l’arrêt définitif des règles et de la
fécondité. Cette transition s’accompagne parfois ●● Il est préférable de poursuivre la contraception jusqu’à
d’une gêne plus ou moins marquée. l’arrêt définitif des règles. Chez les femmes qui portent un
stérilet, il est souvent possible de le laisser en place jusqu’à
●● La ménopause survient le plus souvent entre 45 ans et la ménopause.
55 ans. Dans les années qui précèdent, l’activité des ovaires
diminue progressivement avant de s’arrêter naturellement. ●● Pour prévoir ou affirmer la ménopause, les dosages
Cette diminution s’accompagne d’une baisse d’hormones d’hormones dans le sang ou dans les urines sont rarement
estrogènes. Les règles deviennent souvent moins utiles. L’espacement des règles et l’apparition de certains
abondantes, irrégulières. Elles s’espacent puis s’arrêtent. Au signes comme les bouffées de chaleur ou la sécheresse
bout d’une année entière sans règles, le processus est vaginale suffisent souvent pour savoir.
habituellement terminé : la femme est ménopausée.
●● À la ménopause, prendre systématiquement des
hormones dans le but de compenser la baisse en estro-
gènes présente plus de risques que de bénéfices. Quand les
Une gêne variable troubles sont pénibles, des traitements sont à envi-sager au
cas par cas.
©Prescrire – septembre 2018
●● Autour de la ménopause, il apparaît parfois des bouf-
fées de chaleur, des sueurs la nuit, une irritabilité, des
troubles du sommeil (parfois liés aux sueurs nocturnes). Ces  Sources  • “8-2. Patientes ménopausées” Rev Prescrire 2018 ; 38 (416
troubles ne touchent pas toutes les femmes ; ils sont parfois suppl. Interactions médicamenteuses). • “Durée des bouffées de
très gênants, ou parfois minimes. chaleur liées à la ménopause” Rev Prescrire 2016 ; 36 (389) : 215.
• “Transition ménopausique : un diagnostic clinique” Rev Prescrire 2004 ;
24 (249) : 292-293.
●● Les troubles disparaissent ou diminuent d’eux-mêmes
au cours du temps. D’après un suivi de 1 500 femmes ne
prenant pas de médicament à base d’hormone, la gêne a
disparu en moins de 5 ans après les dernières règles chez
la moitié des femmes. La gêne a été d’autant plus longue
que les troubles ont commencé avant les dernières règles.

●● Une sécheresse du vagin apparaît parfois et provoque


chez certaines femmes des démangeaisons ou des sen-
sations de brûlures, ou rend les rapports sexuels doulou-
reux en l’absence de gel lubrifiant.

●● D’autres troubles (baisse du désir sexuel, troubles


urinaires, etc.) sont parfois attribués à la ménopause, mais
le lien est incertain. La ménopause ne semble pas non plus
augmenter le risque de dépression.

●● Chez les femmes ménopausées, le risque de fracture en


cas de chute augmente progressivement avec l’âge. La
baisse en estrogènes n’est qu’un élément parmi d’autres
facteurs de risque.

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La rosacée, une affection courante de la peau du visage

La rosacée varie dans le temps mais reste le plus sou-vent ●● Quand les traitements locaux ne suffisent pas ou en cas
sans gravité. L’efficacité des traitements est limitée. d’atteintes oculaires, un antibiotique par voie orale est utilisé,
en général la doxycycline. Pour réduire le risque d’effets
indésirables digestifs, il est préférable de prendre la
Rarement grave doxycycline au moment des repas avec un grand verre
d’eau et de ne pas s’allonger dans l’heure qui suit.
●● La rosacée est une atteinte fréquente de la peau du
visage des adultes, dont les causes sont inconnues. Elle ●● Chez les femmes enceintes ou qui pourraient l’être, le
débute en général par des bouffées de chaleur au visage médicament de choix est le métronidazole en applica-tion
déclenchées par l’émotion, le froid, l’alcool, etc. Ces sur la peau ou à avaler. Ne pas utiliser d’acide azé-laïque
bouffées s’accompagnent parfois d’une rougeur de l’œil ou susceptible de causer des malformations chez l’enfant à
des paupières et d’un larmoiement. naître. La prise de doxycycline est à éviter dès le deuxième
trimestre de la grossesse et au cours de l’allaitement en
●● Par la suite, la rougeur du visage devient plus ou moins raison du risque de coloration des dents de l’enfant.
permanente et des petits vaisseaux se dilatent. Parfois
surviennent des boutons rouges ou surmontés d’un point
blanc, qui font penser à tort à de l’acné. ●● Beaucoup de ces médicaments (à appliquer sur le
visage ou l’antibiotique à avaler) augmentent fortement le
●● La rosacée est le plus souvent sans gravité, et pose risque de coups de soleil, parfois graves. Les crèmes
surtout des problèmes esthétiques. Sur 10 personnes solaires, même à fort indice, ne protègent qu’en partie :
atteintes, 4 guérissent avec ou sans traitement, souvent au penser à utiliser un chapeau, voire des vêtements cou-
bout de plusieurs années. L’évolution est fluctuante. La vrants. Les médicaments à avaler font en général courir plus
peau du visage est parfois épaissie et rouge, princi- de risques d’effets indésirables.
palement au niveau du nez.
●● Il est important de garder avec soi la liste des médi-
caments utilisés et de la montrer aux professionnels de
Des traitements aux effets limités santé en cas d’autres soins, pour éviter de combiner des
traitements incompatibles. Attention, les applications de
●● Pour soulager l’irritation de la peau, il est conseillé de cortisone (ou de ses dérivés) sur le visage risquent d’ag-
faire une toilette douce à l’eau tiède avec un nettoyant sans graver la rosacée.
savon. Certaines mesures sont parfois conseillées pour ©Prescrire – septembre 2018
atténuer la rosacée : éviter d’exposer le visage à des
températures extrêmes et à un fort ensoleillement, limi-ter la
consommation d’aliments épicés et d’alcool.  Sources  • “Rosacée” Premiers Choix Prescrire, actualisation mai 2018
: 5 pages.

●● On ne connaît pas de traitement permettant de faire


disparaître totalement la rosacée. Les traitements visent à
diminuer les troubles désagréables, à améliorer l’aspect de
la peau et à diminuer le risque d’aggravation.

●● Le traitement fait d’abord appel à des médicaments sous


forme de gel ou de crème, à appliquer sur le visage :
métronidazole ou éventuellement acide azélaïque. Ils
provoquent parfois des irritations et des sécheresses de la
peau.

●● D’autres médicaments (brimonidine, ivermectine) à


appliquer sur la peau ne font pas mieux, ni en termes
d’efficacité ni sur le risque d’effets indésirables.

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Les bronchites aiguës des adultes :


généralement sans gravité

Chez les adultes en bonne santé, la bronchite aiguë gué-rit Les médicaments de la toux : décevants
souvent en 7 à 10 jours, avec ou sans médicament.
●● La toux est utile. Elle contribue à évacuer les sécrétions
qui piègent les poussières et les microbes descendant vers
Un diagnostic souvent simple les poumons.

●● La bronchite aiguë se traduit par une toux, avec sou- ●● L’efficacité des médicaments “antitussifs”, parfois
vent des crachats, parfois de la fièvre (les premiers jours) et promus contre la toux “sèche”, n’est pas clairement dé-
une gêne ou des sifflements respiratoires. C’est une maladie montrée. Elle est au mieux faible. Les effets indésirables de
banale et généralement sans gravité. ces médicaments sont parfois graves (difficulté à respirer,
dépendance lors d’utilisation prolongée).
●● Une consultation est utile, notamment pour faire la
différence avec une pneumonie. Le médecin y parvient ●● Les médicaments “fluidifiants”, parfois promus contre les
souvent à l’aide de quelques questions et d’un examen toux “grasses” ou “productives”, n’ont pas d’efficaci-té
corporel comprenant l’auscultation (écoute) des poumons, démontrée sur la toux. Ils ont des effets indésirables
mais une radiographie pulmonaire est parfois utile. digestifs et provoquent parfois des réactions allergiques.

●● Avec ou sans médicament, la toux s’arrête générale- ●● Sauf cas particulier, les médicaments de l’asthme ne
ment en 7 jours à 10 jours, et la bronchite guérit sans soulagent pas les symptômes de la bronchite aiguë.
complication. Parfois, la toux persiste. Si du sang appa-raît
dans les crachats ou si la toux dure plus de 3 semaines,
mieux vaut consulter à nouveau. Quelques moyens simples pour se traiter

●● Pour éviter de contaminer l’entourage, il est préférable ●● En cas de fièvre ou de douleurs, le paracétamol est le
de se couvrir la bouche lors des accès de toux, de se laver médicament de choix. Un anti-inflammatoire (ibuprofène par
souvent les mains et de porter un masque au contact des exemple) peut aggraver l’infection, c’est pourquoi son
personnes fragiles ou des nourrissons. utilisation est à envisager seulement quand le para-cétamol
n‘est pas suffisamment efficace.

Les antibiotiques : peu efficaces ●● Chez les femmes enceintes et celles qui allaitent, le
paracétamol est le meilleur choix en cas de douleurs et de
●● La plupart des bronchites sont causées par des virus, fièvre. Les médicaments anti-inflammatoires (ibupro-fène,
sur lesquels les antibiotiques n’ont pas d’efficacité. aspirine ou autres) ne doivent JAMAIS être pris au cours de
la grossesse, même en traitement de courte durée. La prise
●● De nombreuses expérimentations ont comparé l’évo- d’"antitussif” opioïde (codéine, dextro-méthorphane ou
lution de la bronchite aiguë avec ou sans traitement autres) est à éviter en cas d’allaitement.
antibiotique chez des adultes en bonne santé. Les anti-
biotiques ont réduit la durée de la toux d’environ une demi- ●● Le tabac est connu pour irriter les bronches. Il est
journée en moyenne, et n’ont pas diminué les (faibles) préférable de ne pas fumer et d’éviter les atmosphères
risques de complications. enfumées ou irritantes.

●● Les antibiotiques causent notamment des troubles ●● L’eau, des sirops aux fruits, des boissons chaudes, du
digestifs (diarrhées, nausées, vomissements), des mycoses miel, du citron ou des confiseries semblent soulager un peu
et des allergies. Dans de rares cas, les effets indésirables la toux, et ils ont peu d’effets indésirables.
mettent la vie en jeu. Par ailleurs, l’utilisation d’anti-biotiques ©Prescrire – septembre 2018
contribue au développement de bactéries qui résistent aux
antibiotiques.
 Sources  • “Bronchite aiguë chez un adulte” Premiers Choix Prescrire,
actualisation mai 2018 : 6 pages.

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Mal de gorge et angine

Les maux de gorge et les angines guérissent le plus ●● Les médicaments anti-inflammatoires dérivés de la
sou-vent seuls en quelques jours. Un traitement cortisone font courir un risque d’aggravation de l’infection.
antibiotique est rarement justifié. Les pastilles ou les collutoires (sprays) contenant des
médicaments (anesthésiques, antiseptiques, etc.), ainsi que
●● Le mal de gorge est souvent lié à une infection telle la propolis (fabriquée par les abeilles) sont souvent moins
qu’une rhinopharyngite. Les autres causes sont : efforts de efficaces que le paracétamol, et certains provoquent parfois
voix, allergies, substances irritantes (tabac par exemple) ou des effets indésirables graves. Leur utilisation est
sécheresse de la bouche. déraisonnable pour soulager un trouble sans gravité tel
qu’un mal de gorge ou une angine.
●● L’angine se manifeste surtout par un mal de gorge
d’apparition rapide, avec difficultés à avaler, et parfois de la
fièvre. Les angines sont en général causées par des virus, Un antibiotique dans certains cas d’angine
plus rarement par des bactéries, et dans ce cas le plus
souvent par un streptocoque dit de type A. Elles sont très ●● Quelques questions et l’examen médical suffisent
souvent bénignes. En général, une angine ou un mal de souvent à établir la probabilité d’une angine liée à un
gorge lié à une rhinopharyngite disparaît sans traite-ment au streptocoque de type A, qui peut justifier un traitement
bout de 3 à 7 jours. antibiotique. En cas de doute, un test de détection rapide du
streptocoque au moyen d’un écouvillon au niveau des
●● Une consultation est justifiée si le mal de gorge est amygdales et de la gorge peut être réalisé.
important, s’il s’accompagne de difficultés à parler et à
respirer, de douleurs empêchant les mouvements de la tête ●● En cas d’angine à streptocoque, un antibiotique est
et du cou ; d’un gros ganglion dans le cou, d’une forte fièvre, justifié quand les symptômes font craindre une compli-
d’une éruption cutanée ; si la personne atteinte est un cation, ou que la situation ne s’est pas améliorée au bout de
nourrisson, une femme enceinte, une personne âgée ou 48 heures. Le premier choix est une pénicilline, du fait de
fragilisée par une maladie chronique ou un trai-tement qui son activité importante contre le streptocoque : péni-cilline V
réduit les défenses immunitaires (immuno-dépresseur). pendant 10 jours, ou amoxicilline en alternative. En cas
d’allergie aux pénicillines, la spiramycine ou l’azithromycine
sont d’autres options.

Soulager la douleur ●● En l’absence de risque particulier, il n’est pas justifié de


prendre systématiquement un antibiotique pour une angine à
●● Les confiseries à sucer (bonbons au miel, au citron, streptocoque. Retarder la décision de 2 jours et ne débuter
avec ou sans sucre, etc.) et les boissons chaudes ou le traitement antibiotique qu’en l’absence d’amélioration
glacées suffisent parfois à soulager un mal de gorge. prolonge un peu la durée des symptômes, mais diminue le
risque de récidive. Cela évite aussi d’être exposé inutilement
●● Quand un médicament contre la douleur ou la fièvre est aux effets indésirables du traitement antibiotique.
souhaitable, celui à utiliser en premier lieu est le
paracétamol, y compris chez les femmes enceintes ou les ©Prescrire – septembre 2018
femmes qui allaitent.

●● Les médicaments anti-inflammatoires tels que l’ibu-  Sources  • “Angine aiguë” Premiers Choix Prescrire, actualisation juin
2018 : 6 pages. • “Maux de gorge” Rev Prescrire 2011 ; 31 (334) : 614-
profène provoquent davantage d’effets indésirables que le 616.
paracétamol et aggravent parfois l’infection : il est préférable
de limiter leur utilisation aux cas où l’efficaci-té du
paracétamol est insuffisante. Les anti-inflammatoires ne
doivent JAMAIS être pris par les femmes enceintes ou qui
pourraient l’être. Attention certaines pastilles à sucer
contiennent un anti-inflammatoire : se renseigner auprès
d’un soignant en cas de doute.

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Mieux dormir

Pour mieux dormir, quelques conseils simples et une Comment lutter contre l’insomnie
méthode comportementale du “contrôle par le stimu-
lus” sont les meilleurs choix. ●● Une méthode efficace est la technique du “contrôle par
le stimulus”. Elle vise à renforcer le conditionnement qui
associe le lieu du coucher (habituellement la chambre) et
Pas de norme de bon sommeil l’endormissement, et à régulariser le cycle veille-sommeil.

●● L’âge, l’heure du coucher, les activités de la journée, la


tension psychique font varier la durée du sommeil, le délai ●● Cette méthode demande une certaine motivation. Mais
d’endormissement, les réveils nocturnes, etc. Chaque elle est en général aussi efficace que les somnifères
personne est différente : le sommeil qui convient est celui courants : elle diminue habituellement de moitié environ le
qui permet de réparer la fatigue et de se sentir bien dans la délai d’endormissement et la durée des réveils noc-turnes,
journée. et son effet se maintient à moyen et long termes. Les
personnes qui l’utilisent en sont souvent satisfaites.
●● L’insomnie correspond à un sommeil non satisfaisant,
mais pas toujours à une diminution de la durée du som-meil. ●● Le “contrôle par le stimulus” consiste à suivre rigou-
Elle est parfois liée à des soucis, à des contrariétés, à une reusement les consignes suivantes.
douleur ou à d’autres troubles perturbant le som-meil (toux, ––Utiliser son lit uniquement pour dormir et pour faire
envies fréquentes d’uriner, etc.). Un mauvais sommeil est l’amour (ne pas s’installer sur le lit pour lire, manger,
parfois dû à des médicaments, ou à une maladie psychique. travailler ou regarder la télévision).
Mais le plus souvent, aucune maladie n’est en cause. ––Une heure avant le coucher, cesser toutes les activités
exigeantes sur les plans physique et intellectuel.
––Se coucher seulement lorsqu’on est fatigué(e) et prêt(e) à
dormir.
Pour mieux dormir ––Si on ne s’endort pas après 20 minutes, se lever et aller
dans une autre pièce. Ne retourner dans la chambre que
●● Quelques conseils simples aident à mieux dormir. lorsque l’envie de dormir est revenue. Répéter cette étape
––Limiter la consommation de stimulants (par exemple café, aussi souvent que nécessaire.
thé, boissons à la caféine) en particulier dans les 4 à 6 ––Se lever tous les jours à la même heure, même si on a
heures qui précèdent le coucher. Limiter la consommation très peu dormi : cela aide à régulariser le rythme de
d’alcool : l’alcool peut aider à s’endormir, mais provoque des sommeil.
réveils en cours de nuit.
●● Sauf dans des cas particuliers (par exemple, certaines
––Certaines infusions, notamment de valériane, prises
avant le coucher, favorisent parfois l’endormissement. maladies psychiques), c’est seulement en cas d’échec de
––Éviter les gros repas avant le coucher. Les remplacer par cette méthode, qu’on peut envisager l’utilisation de som-
une légère collation peut aider à s’endormir. nifères pour une courte période.
©Prescrire – septembre 2018
––Avoir une activité physique, mais pas dans les heures qui
précèdent le coucher.
––Avoir une chambre favorable au sommeil : réduire la  Sources  • “Mauvais sommeil chez un adulte” Premiers Choix Prescrire,
lumière et les bruits (ou porter des bouchons d’oreille), actualisation juin 2018 : 6 pages.
régler le chauffage à un niveau agréable, vérifier la qua-lité
du matelas.
––Si possible, se coucher et se lever à heures régulières.

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Réussir l’arrêt d’une benzodiazépine


L’efficacité des benzodiazépines n’est que transitoire. Si on les Diminuer les doses progressivement
utilise trop longtemps, elles font courir des risques sérieux.
Pour les arrêter, réduire les doses progressivement. ●● Les troubles liés au sevrage sont moins importants
quand la benzodiazépine est arrêtée progressivement. Selon
plusieurs études, une diminution progressive des doses a
Benzodiazépines : accoutumance, permis l’arrêt des benzodiazépines chez environ 4
troubles de la mémoire et chutes personnes sur 10. Il est possible de diminuer progres-
sivement en baissant la dose, par exemple, d’un quart toutes
●● Les benzodiazépines et les médicaments proches sont les une à deux semaines.
souvent utilisés pour calmer l’anxiété ou favoriser le
sommeil, par exemple : oxazépam, alprazolam, lorazépam, ●● Des consultations régulières avec un soignant sont
ainsi que zopiclone, zolpidem. parfois utiles. La méthode du “contrôle par le stimulus”
(ensemble de recommandations simples visant à associer
●● En général, au bout de 2 à 4 semaines d’usage quo- chambre et sommeil, et à régulariser le cycle veille-sommeil)
tidien, l’efficacité des benzodiazépines diminue. Et si on et des conseils d’aide au sommeil améliorent les chances de
augmente les doses, on augmente aussi le risque d’effets réussite d’un arrêt durable des benzodiazépines.
indésirables. ©Prescrire – septembre 2018

●● Les effets indésirables des benzodiazépines sont


 Sources  • “Benzodiazépines ou apparentés” Rev Prescrire 2018 ; 38
nombreux et parfois graves : troubles de la mémoire et de la (416 suppl. Interactions médicamenteuses). • “Mauvais sommeil chez
concentration, somnolence avec des risques de chutes un adulte“ Premiers Choix Prescrire, actualisation juin 2018 : 6 pages.
(surtout chez les personnes âgées), et risque d’ac-cidents
de la circulation. La baisse de la vigilance se prolonge
plusieurs heures après la prise du médicament et parfois
même après le réveil en cas de prise au coucher.

Éviter un arrêt brusque des benzodiazépines

●● En cas de prise quotidienne, l’arrêt brusque d’une


benzodiazépine entraîne souvent des troubles passagers
liés au sevrage : anxiété, tremblements, aggravation des
troubles du sommeil, cauchemars, et parfois hallucina-tions,
confusion mentale, convulsions, etc. Ce qui peut faire croire
à tort que le médicament était efficace, et incite parfois à
continuer d’en prendre.

●● Ces troubles durent parfois plusieurs semaines. Ils


semblent plus sévères quand la benzodiazépine a été prise
longtemps et à dose élevée. Les personnes âgées y sont
particulièrement sensibles.

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Soulager les troubles liés à la ménopause

La ménopause s’accompagne parfois de troubles tels infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral,
qu’une sécheresse vaginale, des bouffées de chaleur, caillot veineux, etc. Il augmente le risque de certains
des sueurs nocturnes. Un gel lubrifiant à base d’eau est cancers, notamment le cancer du sein.
à privilégier pour soulager la sécheresse vaginale. Les
médicaments à base d’hormone exposent à des effets ●● Si un traitement hormonal est envisagé, il est préfé-rable
indésirables graves : il est préférable de bien peser le qu’il soit le plus court possible et à la dose la plus faible
pour et le contre avant de les choisir. efficace, puis arrêté progressivement pour éviter la
réapparition des troubles à l’arrêt du traitement.

Gel lubrifiant : soulage la sécheresse vaginale


Extraits de soja : une efficacité modeste
●● L’application d’un gel lubrifiant à base d’eau réduit la
gêne causée par la sécheresse du vagin, notamment en cas ●● Certaines plantes comme le soja, le trèfle ou le houblon
de relation sexuelle. Ces gels contiennent parfois des contiennent des phytoestrogènes, substances qui ont des
conservateurs ou des antiseptiques à l’origine d’irritation ou propriétés proches de celles des estrogènes. Des extraits de
d’allergie. soja réduisent modestement les bouffées de chaleur : 2
bouffées de chaleur en moins par semaine environ. Les
●● Quand un gel lubrifiant n’est pas suffisant, l’application effets indésirables des extraits de soja ne sont pas bien
d’une crème, d’un anneau ou d’un ovule contenant une connus. Un traitement court et à faible dose (40 mg à 80 mg
hormone estrogène à faible dose, est une option en cas de d’isoflavones de soja par jour) est probablement peu risqué.
sécheresse vaginale. Ces médicaments causent parfois des Cependant, chez les femmes à risque notam-ment de
mycoses, des démangeaisons. Bien qu’appliqués dans le cancer du sein ou de l’utérus, il est préférable d’éviter les
vagin, les estrogènes augmentent les risques de caillot phytoestrogènes. L’efficacité d’une alimenta-tion riche en
sanguin et de cancer du sein notamment. soja pour diminuer les bouffées de chaleur n’est pas
prouvée.
●● Il n’est pas prouvé qu’un estrogène par voie vaginale
soulage les fuites urinaires “à l’effort”. ●● Il n’est pas prouvé que des extraits de pollens et de pistil
soulagent les bouffées de chaleur, alors qu’ils peuvent
●● Il n’est pas prouvé que la prastérone (ou DHEA) soit causer des allergies. D’autres substances dites naturelles
plus efficace qu’un gel à base d’eau pour soulager la gêne sont parfois proposées pour soulager les troubles liés à la
liée à la sécheresse vaginale ni qu’elle améliore la libido, ménopause : extrait de ginseng, Cimicifuga, béta-ala-nine,
alors que des effets indésirables hormonaux sont à craindre. etc. Aucune n’a d’efficacité prouvée, mais certaines
provoquent des effets indésirables graves (tels qu’une
atteinte du foie) ou des interactions avec des médicaments.

Traitement hormonal de substitution : à éviter ●● La testostérone est sans effet démontré sur la dimi-
si possible nution du désir sexuel attribué à la ménopause, mais
provoque des effets indésirables parfois graves.
●● Après la ménopause, les bouffées de chaleur diminuent ©Prescrire – septembre 2018
naturellement avec le temps. Des mesures simples pour se
rafraîchir aident à passer ces moments désagréables.
 Sources  • “8-2. Patientes ménopausées” Rev Prescrire 2018 ; 38 (416
suppl. Interactions médicamenteuses). • “Traitements locaux de la séche-
●● Un estrogène par voie orale soulage les bouffées de resse vaginale liée à la ménopause” Rev Prescrire 2015 ; 35 (383) : 674-679.
chaleur et les troubles vaginaux. Il est associé avec un • "Extraits de pollens et de pistil - Fémilis°” Rev Prescrire 2018 ; 38 (418) :
progestatif pour limiter le risque de cancer de l’utérus liés 565-566. • "prastérone alias DHEA (Intrarosa°) et atrophie vulvovagi-nale”
Rev Prescrire 2018 ; 38 (419) : 648-651.
aux effets de l’estrogène. Mais ce traitement hormo-nal dit
de substitution fait aussi courir des risques parfois graves,
surtout quand il est pris longtemps, notamment :

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La rubrique Premiers Choix Prescrire présente dans un format synthétique les éléments de choix essentiels pour faire face
à diverses situations cliniques fréquentes. Ces textes proposent une aide concise pour identifier la situation, comparer les
balances bénéfices-risques des différents soins, retenir les premiers choix adaptés et écarter les options plus dangereuses
qu’utiles. En complément, les renvois et références cités dans ces synthèses permettent aussi de se reporter à des
données plus détaillées en matière d’évaluation, d’effets indésirables et d’interactions médicamenteuses. Les filets
verticaux en marge de certains paragraphes indiquent les principales modifications de cette version.

Crise convulsive fébrile


simple chez un enfant
L’essentiel sur les soins de premier choix Actualisation : août 2018

POINTS-CLÉS

●●Prévenir les traumatismes. ●●Quand la crise dure plus de 5 minutes : admi-


nistrer du diazépam par voie rectale ou du midazo-
●●Estimer la durée de la crise. lam par voie transmuqueuse buccale.

●●Faire baisser la température corporelle avec du ●●Rassurer l’entourage.


paracétamol.

ne crise convulsive fébrile simple est définie Une crise tonicoclonique généralisée débute par
comme un épisode de convulsions générali- une perte de connaissance brutale à laquelle suc-
Usées, durant moins de 15 minutes, survenant cèdent trois phases :
une seule fois en 24 heures chez un enfant, lors d’un –– une phase tonique, en général pendant quelques
épisode de fièvre, sans infection intra crânienne, ni dizaines de secondes, avec une contraction soute-
trouble métabolique, ni antécédent de convulsion nue de l’ensemble des muscles ;
non fébrile. Après une crise convulsive fébrile simple, –– puis une phase clonique en général pendant 1
l’état de santé de l’enfant n’est pas altéré (1,2). à 2 minutes, avec des secousses musculaires no-
Des crises convulsives fébriles surviennent chez tamment des membres ;
environ 3 % des enfants. Elles sont rares chez les –– puis une phase postcritique, avec respiration
enfants âgés de moins de 6 mois ou de plus bruyante et reprise progressive de la conscience (4,5).
de 5 ans (1). La moitié des crises convulsives fébriles durent
+ “Après des convulsions fébriles” Fiche Infos- moins de 4 minutes (3).
Patients Les crises convulsives fébriles prolongées, ou qui
récidivent dans les 24 heures, ou partielles (c’est-
à-dire avec des convulsions localisées à une partie
du corps, sans perte de connaissance) sont dites
Reconnaître complexes et nécessitent des soins spécifiques (1).
+ Lire dans ce texte “Signes d’alerte lors d’une crise
Crise tonicoclonique pendant quelques convulsive fébrile”
minutes lors d’un épisode de fièvre. En l’absence de situation à risque de méningite,
Le niveau de fièvre associé à une crise chez un enfant qui a eu une crise convulsive fébrile
convulsive fébrile simple est variable simple bien identifiée, il n’est pas nécessaire d’ef-
selon les enfants. Souvent, la température corporelle fectuer systématiquement un électroencéphalo-
est supérieure à 39 °C. Cependant, des crises convul- gramme, un examen biologique ou une imagerie
sives fébriles surviennent parfois dès 38 °C. Rare- cérébrale (1).
ment, les convulsions précèdent la fièvre (1,3). + Lire dans ce texte “Signes d’alerte lors d’une crise
Le plus souvent, une crise convulsive fébrile simple convulsive fébrile”
se manifeste par une crise tonicoclonique généra-
lisée (4,5).

P C P •C •a a 2018 • P 1/5
remiers hoix resCrire rise Convulsive fébrile simPle Chez un enfant Ctualisationoûtage
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Ne pas confondre avec des grands


frissons lors d’une fièvre. Les convul- Signes d’alerte lors d’une
sions fébriles sont parfois confondues crise convulsive fébrile
avec des grands frissons lors d’une
fièvre. Contrairement aux convulsions fébriles, les
frissons touchent rarement le visage et les muscles Crises complexes. 10 % à 20 % des crises convul-
respiratoires, et ils ne sont pas associés à une sives fébriles chez les enfants sont dites complexes et
nécessitent des soins spécifiques par une équipe
perte de connaissance (3).
mobile médicalisée et une hospitalisation pour en
Quand un enfant fait une crise convulsive au cours
rechercher la cause. Une crise convulsive complexe présente
d’une fièvre, il est notamment utile de rechercher s’il a été au moins une des caractéristiques suivantes (1).
exposé à des substances qui causent des convulsions, –– durée supérieure à 15 minutes ;
par exemple à des dérivés terpéniques tels que le –– récidive dans les 24 heures ;
camphre ou le menthol (6). –– crise partielle, c’est-à-dire avec des convulsions n’affectant
qu’une partie du corps, sans perte de connaissance ;
–– anomalies neurologiques suite à la crise (1à3,11,31).

Évolution Situations à risque de méningite. Suite à une crise convul-


sive fébrile chez un enfant, une hospitalisation en vue d’une
ponction lombaire est justifiée dans les situations suivantes :
Une évolution favorable, mais des –– entretien ou examen évocateur de méningite (dont crise
récidives fréquentes. Les crises convul- convulsive avant l’âge de 6 mois ou après l’âge de 6 ans, bom-
sives fébriles simples ne sont pas asso-ciées bement de la fontanelle, raideur de la nuque) ;
à une augmentation de la mortali- –– traitement antibiotique en cours, susceptible de masquer
té ou de séquelles neurologiques. Certaines crises les signes de méningite ;
convulsives simples durent plus de 5 minutes, ce –– nourrisson âgé de 6 mois à 12 mois, à immunité faible vis-
qui justifie un traitement spécifique pour prévenir à-vis de Haemophilus influenzae de type b ou du pneumo-
l’évolution vers un état de mal convulsif (1,7,8). coque, notamment en l’absence de vaccination contre ces
+ Lire dans ce texte “Signes d’alerte lors d’une crise bactéries (1,32,33).
convulsive fébrile”
Après une première crise convulsive fébrile simple, le
risque de récidive dépend surtout de l’âge de l’enfant : il
est d’environ 50 % chez les nourrissons âgés de moins de à administrer pour faire cesser la crise et prévenir
1 an, et d’environ 30 % chez les enfants plus âgés. Les l’évolution vers un état de mal convulsif. Il est parfois
récidives surviennent le plus souvent chez les enfants administré par l’entourage quand il s’agit d’une
âgés de moins de 3 ans, et dans l’année qui suit la récidive et qu’un traitement anticonvulsivant prescrit
première crise convulsive fébrile. Le risque de récidive est par anti-cipation est disponible. Une hospitalisation est
plus élevé après un deuxième épisode et en cas justifiée en cas de crise complexe ou de doute sur la
d’antécédent fami-lial de crises convulsives fébriles ou cause de la crise (1,8,10à12).
d’épilepsie. La plupart des épisodes ultérieurs de fièvre + Lire dans ce texte “Signes d’alerte lors d’une crise
ne sont pas associés à une récidive (1). convulsive fébrile”

Chez les enfants qui ont eu une ou plusieurs


crises convulsives fébriles simples, la fréquence
d’une épilepsie ultérieure semble à peine supéri
eure à celle observée dans la population générale. Éviter les traumatismes
Elle est toutefois augmentée chez les enfants qui
ont au moins deux des facteurs de risque suivants : Non médicamenteux
anté-cédent familial de convulsions non fébriles ; Des gestes de secourisme simples
ano-malie neurologique préexistante ; convulsions Des gestes de secourisme simples visent
fé-briles dites complexes (1,2,9). d’abord à protéger l’enfant contre les traumatismes,
puis à assurer une ventilation correcte de l’enfant
en maintenant l’ouverture de voies aériennes
supéri-eures et en l’allongeant sur le côté, en
Traitements position la-térale de sécurité (1,8).

Lors d’une crise convulsive fébrile simple chez un enfant,


la priorité est d’éviter les traumatismes, puis de faire
baisser la température corporelle quand les mouvements
convulsifs ont cessé. Il est utile de noter l’heure de début
de la crise afin d’estimer sa durée. Quand la crise se
prolonge au-delà de 5 minutes, un anti convulsivant est

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Faire baisser la température Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)


corporelle exposent à des réactions d’hypersensibilité parfois
graves. En dehors de ces effets indésirables surve-
Lors d’une crise convulsive fébrile simple chez nant parfois dès les premières prises, les AINS en
un enfant, quand les mouvements convulsifs ont traitement court et à doses faibles ou modérées
cessé, le traitement de la fièvre repose sur des exposent notamment à des inconforts digestifs, et
méthodes physiques d’appoint et un traite-ment parfois à des nausées ou des diarrhées sans gravi-
médicamenteux (13,14). té. À doses plus importantes, ou en usage
prolongé, ou chez des patients à risque accru, les
Non médicamenteux AINS ex-posent de plus à des ulcères et des
Rafraîchir avec de l’eau tiède hémorragies du tube digestif, des insuffisances
Lors d’une fièvre chez un enfant, le mouil- rénales et des troubles cardiovasculaires. Les AINS
lage à l’eau tiède avec une éponge est une mesure exposent aussi à de nombreuses interactions (15).
utile, à condition qu’elle ne soit pas inconfortable + “AINS, dont l’aspirine”, suppl. Interactions médi-
pour l’enfant. Dévêtir l’enfant semble une mesure camenteuses
de bon sens, malgré l’absence de preuve d’effica- Chez les enfants, les effets indésirables des AINS
cité. Les bains d’eau fraîche ne sont pas justifiés, sont moins bien connus que chez les adultes, mais
surtout quand ils sont source d’inconfort (13,14). des hémorragies digestives hautes surviennent
parfois, même à faible dose (22,23).
Médicamenteux Chez les enfants, l’ibuprofène est à prendre à la
Paracétamol en premier choix dose de 5 mg/kg à 10 mg/kg par prise, toutes les 6
Lors d’une fièvre, le paracétamol est le à 8 heures, en adaptant la posologie en fonction de
médicament symptomatique de premier choix. Il l’intensité des symptômes, sans dépasser 40 mg/
expose à moins d’effets indésirables que d’autres kg/jour (24,25).
antipyrétiques, notamment les anti-inflammatoires
non stéroïdiens (15).
Chez les enfants, le paracétamol est à prendre
par voie orale toutes les 4 à 6 heures à la dose de Anticonvulsivant quand la crise dure
10 mg/kg à 15 mg/kg par prise, sans dépasser plus de 5 minutes
60 mg/kg par jour (16).
Chez les enfants pesant plus de 5,5 kg, quand le Quand une crise convulsive fébrile simple dure
paracétamol est utilisé par voie orale, une spécia- plus de 5 minutes, le choix du traitement anti-
lité en sachet unidose adaptée au poids est à pré- convulsivant est à faire entre deux benzo-
férer à une spécialité en flacon, qui expose à des diazépines : le diazépam par voie rectale et le
erreurs lors de la mesure de la dose (17). midazolam par voie transmuqueuse buccale. Ces
Chez un enfant, quand la voie orale n’est pas médicaments font cesser 70 % des crises en
possible ou à éviter (nausées, vomissements, par moins de 10 minutes. La différence entre leurs
exemple), le paracétamol par voie rectale est une modalités d’utilisation est le principal critère de
option efficace contre la fièvre (18). choix entre ces deux options (8,26).
À posologie adaptée, les effets indésirables du Dès que l’administration d’un anticonvulsivant
paracétamol sont rares : surtout des réactions est décidée, il est prudent de faire appel à une
d’hypersensibilité. Le principal risque auquel équipe mobile médicalisée, en composant le 15
expose le paracétamol est lié aux surdoses, à (numéro français) ou le 112 (numéro européen),
l’origine d’atteintes hépatiques graves et parfois sans attendre son arrivée pour administrer le
d’atteintes rénales aiguës (15). médicament (8).
+ “Paracétamol” suppl. Interactions médicamen- + Lire dans ce texte “Signes d’alerte lors d’une crise
teuses convulsive fébrile”
+ “Douleurs ou fièvre de l’enfant : préférer le para- Les benzodiazépines en prise unique exposent
cétamol” Fiche Infos-Patients surtout à des somnolences, confusions, dépres-
sions respiratoires (27,28).
Médicamenteux + “Benzodiazépines ou apparentés” suppl. Inter-
Ibuprofène : alternative actions médicamenteuses
au paracétamol Après la survenue d’une crise convulsive
Lors d’une fièvre chez un enfant, le recours aux simple qui a duré plus de 5 minutes, il est parfois
anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) est à proposé aux parents de disposer au domicile
limiter compte tenu de leurs effets indésirables plus d’un anticonvulsivant à administrer lors d’une
fréquents que ceux du paracétamol et des compli- éventuelle récidive si celle-ci dure plus de 5 mi-
cations graves, notamment infectieuses, auxquels nutes (11).
ils exposent. Parmi les AINS, le choix se porte
d’abord sur l’ibuprofène (19à21).

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Anticonvulsivant utilisé par la famille : s’entraî- température de l’enfant, et que faire baisser la
ner avant utilisation. Quand un anticonvulsivant température corporelle permet d’améliorer le
est prescrit chez un enfant qui a eu une crise convul-sive confort de l’enfant, mais n’a qu’une efficacité limitée
fébrile simple, il est préférable que l’entourage s’entraîne en prévention des convulsions fébriles (1).
à manipuler ce médicament au moins une fois, en dehors ©Prescrire
d’une crise, pour pouvoir l’uti-liser correctement en cas de
récidive (29).

Médicamenteux
Noms commerciaux des médicaments en
Diazépam rectal, en utilisant la France F, Belgique B et Suisse CH
solution injectable
L’administration rectale de diazépam est réalisée à diazépam injectable ou rectal – F CH VALIUM° ou autre ; B
VALIUM°
l’aide d’une seringue (sans aiguille) ou d’une canule
midazolam transmuqueux buccal – F B CH BUCCOLAM°
en plastique. La dose à administrer au cours d’une
crise convulsive est de 0,5 mg/kg, sans dépas-ser
10 mg (8,30).
En France, le diazépam en solution pour adminis-
tration rectale n’est disponible que sous forme destinée à Recherche documentaire et méthode d’élaboration
la voie injectable en ampoules en verre, et nécessite une Cette synthèse a été élaborée à partir des données publiées dans
Prescrire jusqu’au n° 419 (septembre 2018) et dans son supplément
préparation de la dose à adminis-trer, d’où une perte de Interactions médicamenteuses 2018, confrontées aux données
temps et un risque d’erreur (8). publiées dans deux sources documentaires complémentaires :
l’ouvrage de pharmacologie clinique Martindale The complete drug
La voie rectale n’est pas toujours facile à utiliser : reference (site www.medicinescomplete.com) et l’ouvrage de
elle est parfois mal acceptée et elle nécessite de médecine interne UpToDate (site www.uptodate.com), consultés pour
déshabiller l’enfant (29). la dernière fois le 20 août 2018. La validité des données citées dans
cette synthèse est vérifiée grâce à la veille documentaire permanente
mise en place par Prescrire. Les procédures d’élabora-tion de cette
Médicamenteux synthèse ont suivi les méthodes habituelles de Prescrire : notamment
Midazolam par voie transmuqueuse vérification de la sélection des données et de leur analyse, contrôles
de qualité multiples.
buccale, seulement après l’âge
de 6 mois 1- Prescrire Rédaction “Convulsions fébriles simples de l’enfant.
En France, le midazolam par voie transmuqueuse Expliquer et rassurer les parents plutôt que prescrire” Rev
Prescrire 2001 ; 21 (219) : 534-537.
buccale a l’avantage d’être disponible sous une 2- Prescrire Rédaction “Convulsions fébriles” Rev Prescrire 1986 ;
forme prête à l’emploi (seringue préremplie) (29). 6 (52) : 35-37.
Chez les enfants âgés de moins de 6 mois, en raison 3- Millichap JJ et coll. “Clinical features and evaluation of febrile
sei-zures” UpToDate 2018.
d’un risque accru de surdose, l’administration de 4- Prescrire Rédaction “Épilepsies généralisées. Des classifications
midazolam par voie transmuqueuse buccale n’est utiles au choix du traitement” Rev Prescrire 2003 ; 23 (236) : 124-126.
autorisée qu’à l’hôpital (29). 5- Schachter SC et coll. “Evaluation and management of the first
seizure in adults” UpToDate 2018.
La dose de midazolam par voie transmuqueuse 6- Prescrire Rédaction “E12a. Baisses du seuil de convulsion médica-
buccale à administrer au cours d’une crise convul- menteuse en bref” suppl. Interactions médicamenteuses 2018.
sive est de 0,5 mg/kg sans dépasser 10 mg (26). 7- Prescrire Rédaction “Convulsions fébriles des enfants” Rev
Prescrire 2009 ; 29 (307) : 369.
Pour éviter les fausses routes, la solution de mi- 8- Prescrire Rédaction “Convulsions prolongées des enfants. Une
dazolam est à administrer lentement entre la joue et benzodiazépine dès que les convulsions durent plus de
la gencive, si nécessaire en 2 fois, d’un côté puis 5 minutes” Rev Prescrire 2013 ; 33 (354) : 278-282.
9- Prescrire Rédaction “Convulsions fébriles du nourrisson” Rev
de l’autre de la bouche (29). Prescrire 1992 ; 12 (123) : 569.
+ Lire “Midazolam buccal : autorisé en ville pour la 10- Prescrire Rédaction “Prévention des récidives de convulsions
trousse d’urgence des généralistes ?”, n° 422, page fébriles” Rev Prescrire 1994 ; 14 (142) : 431.
11- Millichap JJ et coll. “Treatment and prognosis of febrile
949 seizures” UpToDate 2018.
12- Prescrire Rédaction “Convulsions fébriles de l’enfant” Rev
Prescrire 1987 ;7 (69) : 432-433.
13- Prescrire Rédaction “Les méthodes physiques du traitement
de la fièvre sont peu évaluées chez l’enfant” Rev Prescrire 2004 ;
Rassurer l’entourage 24 (248) : 217 + (253) : II de couv.
14- Prescrire Rédaction “Situations courantes d’automédication (suite).
Fièvres aiguës chez les adultes” Rev Prescrire 2008 ; 28 (301) : 839-840.
Non médicamenteux
15- Prescrire Rédaction “5-1. Patients traités par antalgique non
Écouter et informer spé-cifique” suppl. Inter actions médicamenteuses 2018.
Les parents ou les témoins d’une première 16- “Paracétamol” Répertoire commenté des médicaments, CBIP
crise convulsive fébrile chez un enfant sont souvent 2018.
17- Prescrire Rédaction “Paracétamol buvable à 10 % - Dolstic°.
fortement impressionnés. Il est important de consa-crer Gare aux surdoses” Rev Prescrire 2013 ; 33 (359) : 648-649.
du temps à les écouter et à les informer de l’évolution le 18- Prescrire Rédaction “Paracétamol chez les enfants : voie
plus souvent favorable, afin de dédra-matiser cette rectale aussi efficace sur la fièvre, moins sur la douleur aiguë”
Rev Prescrire 2010 ; 30 (319) : 371-372.
expérience, en précisant par exemple qu’il n’est pas utile 19- Prescrire Rédaction “Gare aux AINS chez les enfants fébriles”
de surveiller régulièrement la Rev Prescrire 2004 ; 24 (255) : 748.

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20- Prescrire Rédaction “Fièvre des enfants : en rester au


paracétamol” Rev Prescrire 2009 ; 29 (309) : 526.
21- Prescrire Rédaction “AINS” suppl. Inter actions médicamen-
teuses 2018.
22- Prescrire Rédaction “L’otite moyenne aiguë chez l’enfant,
sixième partie : donner toute la place aux antalgiques non
spécifiques” Rev Prescrire 2003 ; 23 (238) : 278-281.
23- Prescrire Rédaction “Hémorragies digestives hautes sous
AINS chez des enfants” Rev Prescrire 2005 ; 25 (265) : 675.
24- Prescrire Rédaction “Mal aux dents chez les adultes et
grands enfants” Rev Prescrire 2008 ; 28 (299) : 680-681.
25- Prescrire Rédaction “Ibuprofène en pédiatrie : Advil° enfants et
nourrissons suspension buvable, Nurofen° enfants et nourrissons
suspension buvable” Rev Prescrire 1995 ; 15 (152) : 412-414.
26- Prescrire Rédaction “Convulsions prolongées. D’abord une
benzo-diazépine” Rev Prescrire 2017 ; 37 (410) : 936.
27- Prescrire Rédaction “Benzodiazépines ou apparentés” suppl.
Interactions médicamenteuses2018.
28- Prescrire Rédaction “Sialorrhée et encombrement salivaire
dus aux médicaments” Rev Prescrire 2009 ; 29 (303) : 23-25.
29- Prescrire Rédaction “Midazolam par voie transmuqueuse buc-
cale-Buccolam°. Une alternative au diazépam rectal pour certains
enfants” Rev Prescrire 2013 ; 33 (354) : 248-249 (version
complète sur le site www.prescrire.org : 6 pages) + (357) : 482.
30- Prescrire Rédaction “Valium° par voie rectale : ceci n’est pas
une nouvelle présentation !” Rev Prescrire 1984 ; 4 (35) : 10.
31- Prescrire Rédaction “lévétiracétam (Keppra°). Épilepsie myo-
clonique : utile en association” Rev Prescrire 2007 ; 27 (287) : 657.
32- Prescrire Rédaction “Ponction lombaire et convulsions
fébriles des jeunes enfants” Rev Prescrire 2012 ; 32 (342) : 286.
33- Prescrire Rédaction “Signes de méningite aiguë chez les
enfants. Connaître les signes d’irritation méningée” Rev Prescrire
2014 ; 34 (364) : 126-129.

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Premiers Choix Prescrire
La rubrique Premiers Choix Prescrire présente dans un format synthétique les éléments de choix essentiels pour faire face
à diverses situations cliniques fréquentes. Ces textes proposent une aide concise pour identifier la situation, comparer les
balances bénéfices-risques des différents soins, retenir les premiers choix adaptés et écarter les options plus dangereuses
qu’utiles. En complément, les renvois et références cités dans ces synthèses permettent aussi de se reporter à des
données plus détaillées en matière d’évaluation, d’effets indésirables et d’interactions médicamenteuses. Les filets
verticaux en marge de certains paragraphes indiquent les principales modifications de cette version.

Otite moyenne
avec épanchement
persistant chez un enfant
L’essentiel sur les soins de premier choix Actualisation : août 2018

POINTS-CLÉS

●● Chez les enfants, un épanchement persiste sou-vent ●● Chez un enfant qui a une otite moyenne avec
dans l’oreille moyenne dans les suites d’une infection épanchement persistant à l’origine d’une baisse
des voies respiratoires supérieures ou d’une otite d’audition, des aménagements dans la vie
moyenne aiguë. Cet épanchement est le plus souvent quoti-dienne sont à mettre en place pour
asymptomatique, mais provoque parfois une baisse compenser cette baisse.
d’audition qui est en général temporaire.
●● Quand l’épanchement dans l’oreille moyenne
●● La plupart des otites moyennes avec est bilatéral, perturbe l’audition de manière
épanche-ment persistant disparaissent notable et persiste depuis plus de 3 mois, la pose
spontanément au bout de quelques mois. d’aéra-teurs transtympaniques est une option. Elle
pro-cure une amélioration modeste de l’audition
●● Chez la majorité des enfants, attendre au durant quelques mois, délai nécessaire à une
moins 3 mois la résolution spontanée de l’épisode évolution spontanément favorable.
d’otite moyenne avec épanchement persistant est
l’option à préférer.

U n épanchement (uni- ou bilatéral) dans l’oreille


moyenne qui persiste pendant plusieurs se-maines voire
Reconnaître
plusieurs mois (alias otite séro-muqueuse ou otite séreuse)
est une affection très fréquente qui touche près de 9 enfants Parfois une baisse d’audition. Les otites
sur 10 au
moyennes avec épanchement persistant
moins une fois avant l’âge de 10 ans (1).
sont le plus souvent asymptomatiques. Elles
La fréquence des otites moyennes avec épanche-ment
provoquent parfois une baisse
persistant diminue avec l’âge de l’enfant (1).
d’audition temporaire, variable d’un moment à
N’est pas abordé ici : le traitement des complica-
l’autre. La baisse d’audition est souvent remarquée
tions liées à une otite moyenne avec épanchement
par l’entourage de l’enfant, mais passe parfois
persistant.
inaperçue. Les données disponibles sur le lien
entre une baisse d’audition, même bilatérale, et des
troubles du comportement, du langage ou des
apprentissages sont contradictoires et de faible
niveau de preuves (1,2).
Une otite moyenne avec épanchement persistant
se manifeste parfois par des douleurs
intermittentes de l’oreille qui exposent à des
troubles du sommeil, une sensation d’oreille pleine,
des acouphènes*, des troubles de l’équilibre (1,2).

P C P •o •a a 2018 • P 1/3
remiers hoix resCrire tite moyenne aveC éPanChement Persistant Chez un enfant Ctualisationoûtage
Premiers Choix Prescrire

Otoscopie et audiométrie. La présence


d’un épanchement dans l’oreille moyenne est Traitements à écarter lors d’une otite
le plus souvent confirmée par l’exa-men à
moyenne avec épanchement persistant
l’otoscope : le tympan, non bom-
bé le plus souvent, a un aspect mat, bleuté ou
ambré, voire translucide. Des bulles d’air ou du li- Traitements médicamenteux par voie locale ou
quide sont parfois visibles (1,2). générale. Divers médicaments par voie locale ou géné-
rale ont été évalués pour traiter les otites moyennes avec
L’examen à l’otoscope pneumatique* permet
épanchement persistant, notamment des corti coïdes par voie
d’évaluer la mobilité du tympan, qui est en général orale ou nasale, des antihistaminiques H1, des décongestion-
altérée (2). nants vasoconstricteurs rhinopharyngés, des antibiotiques,
Des examens audiométriques visent à mesurer la des mucolytiques. Compte tenu de leur efficacité au mieux
baisse d’audition. Les techniques diffèrent selon modeste et de courte durée pour certains, et non démontrée
l’âge de l’enfant (1). pour d’autres, il n’est pas justifié d’exposer les enfants aux
effets indésirables de ces médicaments (1,4).
Ne pas confondre avec une otite
moyenne aiguë. Un épanchement per- Adénoïdectomie. Chez un enfant qui a une otite moyenne
sistant dans l’oreille moyenne est à avec épanchement persistant, l’ablation chirurgicale des
distinguer d’un épanchement lié à une végétations adénoïdes (alias adénoïdectomie) en association
avec la pose d’aérateurs transtympaniques n’a pas d’intérêt
otite moyenne aiguë, qui se manifeste en général
démontré. Outre les risques liés à l’anesthésie générale, cette
par une fièvre, une douleur aiguë de l’oreille, avec intervention expose notamment à des douleurs postopératoires,
un tympan rouge et bombé (1). des hémorragies, des complications infectieuses et des rétré-
+ “Otite moyenne aiguë” Premiers Choix Prescrire cissements nasopharyngés (1).

Facteurs de survenue Rarement, les otites moyennes avec


épanchement persistant se compliquent de lésions
Souvent dans les suites d’une infection de l’oreille moyenne qui aggravent la baisse
ORL. Une otite moyenne avec épanche- d’audition, parfois de manière définitive. Ces
ment persistant survient souvent dans les complications surviennent en particulier chez les
suites d’une infection aiguë des voies enfants qui ont une anomalie crâniofaciale (1).
respiratoires supérieures ou d’une otite moyenne
aiguë (1).
Certaines situations semblent augmenter le risque
d’otite moyenne avec épanchement persistant, Traitements
notamment : un tabagisme passif, une allergie avec
obstruction nasale chronique, la vie en collectivité, une Chez la plupart des enfants qui ont une otite moyenne
hypertrophie des végétations adénoïdes (1,2). avec épanchement persistant, notamment ceux qui n’ont
Une otite moyenne avec épanchement persistant pas de baisse d’audition ou une baisse d’audition légère
survient parfois sans avoir été précédée d’une in- sans trouble du langage ou des apprentissages, l’option
fection aiguë, notamment chez les enfants atteints la plus raisonnable est d’attendre que l’épanchement se
d’une anomalie anatomique de la face, de la base résolve spontanément, souvent en moins de 3 mois (1).
du crâne ou du nasopharynx (1). Pendant cette période, des aménagements
sont à mettre en place pour pallier au mieux la
baisse éventuelle d’audition (1).
Quand un épanchement dans l’oreille moyenne
Évolution persiste plus de 3 mois et qu’il est associé à une
baisse notable d’audition, la pose d’aérateurs
Évolution spontanée lente, le plus souvent transtympaniques* vise à améliorer l’audition, en
favorable, mais des récidives fréquentes. La attendant la guérison sponta-née (1).
plupart des otites moyennes avec épanchement La technique dite d’auto-insufflation est parfois
persistant se résolvent spontanément en moins de pro-posée, malgré une efficacité incertaine (1).
3 mois. Quand des douleurs intermittentes accompagnent
Environ 5 % à 10 % persistent pendant 1 an ou plus une otite moyenne avec épanchement persistant, no-
(1). tamment quand elles perturbent le sommeil, le paracé-
Les récidives sont fréquentes et concernent près tamol est l’antalgique de premier choix (3).
d’un tiers des enfants. Les otites moyennes avec + “Douleur ou fièvre chez les enfants : préférer le
épanchement persistant et les otites moyennes paracétamol” Fiche Infos-Patients
aiguës récidivantes sont souvent associées (1).

P C P •o •a a 2018 • P 2/3
remiers hoix resCrire tite moyenne aveC éPanChement Persistant Chez un enfant Ctualisationoûtage
Premiers Choix Prescrire

Non médicamenteux L’auto-insufflation ne semble pas exposer à des


Aménagements dans la vie effets indésirables notables. Elle est à éviter chez
quotidienne pour pallier la baisse les enfants qui ont un écoulement nasal (4).
d’audition ©Prescrire
Pour un enfant qui a une otite moyenne avec épan-
chement persistant à l’origine d’une baisse d’audi-
tion, des aménagements sont à mettre en place
pour optimiser les apprentissages, par exemple : GLOSSAIRE
parler fort et distinctement en face de l’enfant, ré- Les termes expliqués de façon concise dans ce glossaire
péter si nécessaire ; en classe, le mettre au premier sont signalés dans le texte par un astérisque (*)
rang (1). acouphène : perception auditive souvent à type de
bourdonnement ou sifflement, non provoquée par un
Acte technique son extérieur.
Aérateurs transtympaniques :
aérateur transtympanique : alias diabolo ou yoyo,
amélioration modeste de l’audition tube creux placé au travers du tympan pour amé-
Chez un enfant qui a un épanchement persistant bilatéral liorer l’aération de l’oreille moyenne et l’évacuation
de l’oreille moyenne qui perturbe l’audition de manière de l’épanchement.
notable et qui persiste depuis plus de 3 mois, la pose
otorrhée : écoulement de sérosité, de mucus ou de
d’aérateurs transtympaniques (alias diabolos ou yoyos)
pus par l’oreille.
est une option. Elle procure une amélioration modeste de
l’audition pendant quelques mois, le temps nécessaire à otoscope pneumatique : otoscope équipé d’un dis-
positif qui permet d’augmenter la pression de l’air
une évolution spontanément favorable. Le bénéfice de
dans le conduit auditif externe, pour observer la
cette inter-vention sur le développement cognitif, les
mobilité du tympan.
appren-tissages ou le comportement n’est pas démontré
(1).
La pose d’aérateurs transtympaniques est en général
effectuée sous anesthésie générale de courte durée. Les Recherche documentaire et méthode d’élaboration
Cette synthèse a été élaborée à partir des données publiées dans
aérateurs transtympaniques sont expul-sés le plus
Prescrire jusqu’au n° 419 (septembre 2018) et dans son supplément
souvent spontanément au bout de 4 mois Interactions médicamenteuses 2018, confrontées aux données
à 18 mois selon les modèles (1). publiées dans deux sources documentaires complémentaires :
l’ouvrage de pharmacologie clinique Martindale The complete drug
La complication la plus fréquente à laquelle exposent reference (site www.medicinescomplete.com) et l’ouvrage de
les aérateurs transtympaniques est la survenue médecine interne UpToDate (site www.uptodate.com), consultés pour
d’otorrhées*, le plus souvent liées à une infection la dernière fois le 6 août 2018. La validité des données citées dans
cette synthèse est vérifiée grâce à la veille documentaire permanente
bactérienne de l’oreille moyenne, et d’évolution souvent mise en place par Prescrire. Les procédures d’élabora-tion de cette
spontanément favorable en quelques jours (1). synthèse ont suivi les méthodes habituelles de Prescrire : notamment
vérification de la sélection des données et de leur analyse, contrôles
Chez les enfants porteurs d’aérateurs transtym- de qualité multiples.
paniques, le plus souvent, il n’est pas utile de 1- Prescrire Rédaction “Otites moyennes avec épanchement
prendre des mesures particulières de protection chronique chez les enfants. Ne pas se précipiter sur la pose
d’aérateurs transtym-paniques, éviter l’adénoïdectomie” Rev
des oreilles lors de la toilette ou de la baignade. Prescrire 2015 ; 35 (381) : 515-520.
L’utilisation de bouchons d’oreille semble malgré 2- Klein JO et coll. “Otitis media with effusion (serous otitis media)
tout prudente en cas d’otorrhée persistante, lors de in children : clinical features and diagnosis” UpToDate 2018.
3- Prescrire Rédaction “5-1. Patients traités par antalgique non
baignades en eau non traitée ou d’immersion de la
spéci-fique” suppl. Inter actions médicamenteuses 2018.
tête dans de l’eau savonneuse (1). 4- Klein JO et coll. “Otitis media with effusion (serous otitis media)
Chez un enfant porteur d’aérateurs transtympa- in children : management” UpToDate 2018.
niques, une consultation médicale est justifiée,
notamment en cas de : détérioration de l’audition,
vertiges, douleur persistante dans l’oreille (1).

Non médicamenteux
Auto-insufflation : efficacité
incertaine pour améliorer l’audition
Chez les enfants âgés de plus de 3 ans et qui sont
capables d’effectuer cette technique, l’auto-insuf-
flation (alias manœuvre de Valsalva) a une efficaci-
té incertaine pour améliorer l’audition. Elle consiste
à expirer fortement en maintenant la bouche fermée
et le nez pincé afin d’ouvrir la trompe d’Eustache en
augmentant la pression dans le nez. Elle est en
général effectuée au moins 2 fois par jour pendant
plusieurs semaines (1,4).

P C P •o •a a 2018 • P 3/3
remiers hoix resCrire tite moyenne aveC éPanChement Persistant Chez un enfant Ctualisationoûtage

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