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Dialogues chrétiens, ou

Préservatif contre
l'Encyclopédie . Par M. V***

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France


Voltaire (1694-1778). Auteur du texte. Dialogues chrétiens, ou
Préservatif contre l'Encyclopédie . Par M. V***. 1760.

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DIALOGUES
CHRÉTIENS,
0 u
PRESERVATIF.1
CONTRE
L'ENCYCLOPÉDIE.

A GENEVE.

M. D. CC. LX,
PREMIER
DIALOGUE,
Entre un PRET R E & U1J
ENCYCLOPE'DISTE.
LE P R E T R E.

E H biendoncmalheureux la jusques
> 3
quand à
Religion, & décrier les
vOilla:";
vous outrager
Minières ?

-
L'ENeYCL0E' DIS TE.
Je n'outrage point la Religion que je professè ÔC
que je recpefte ; je me tais sur Ces Ministres , & je iic
comprens point ce qui peut allumer ainsi vo:rs
bile, &, m'attirer ces injures.
De quel droit d'ailleurs me faites-vous ces qur.IT»
lions ? Quelle est votre million ?

LJ! P R E T R E.

Quelle est ma mitrioi! ? La piété, le zele l'a cfiar-


rité chrétienne. Vous triompheriez bientôt, Mei-
,
lleurs les Athées, s'il ne se trouvoit pas encore dzs>
hommes Religieux qui ont le courage de stoppos;(
à vos pernicieux dépeins : je me suis ligué a:vec
deux Piètres comme moi pour soutenir les Autels
vouliez ,
renverser
que vous ; tous trois pleins de
l'amour de Dieu, & de l'avancement de l'on règne 5
nous avons déclaré une guerre éternelle à tous ceux
qui examinent, qui doutent., qui approfondirent,
qui rai raisonnentyqui écrivent, & surtout aux Ency-
clopédif!:es.
Nous faisons un journal chrétien dans lequel
après avoir prémierement critiqué leurs^ ,
ouvrages ,
nous examinons ensuite leur conduite, que nous
trouvons ordinairement vicieuse , & criminelle' ,
& lorsqu'elle nous paroit innocente nous disons
la chose est impossible, puisqu'ils , travaillé à
que ont
l'Encyclopédie.

L"ENey CL01!E,"DIS S TE,


Voilà un projet qui me paroit bien raisonnable, &
tien apurement ne sera plus chrétien que cet ouvrage.
Mais dites-moi > je vous en prie, ne craignez-vans
point la Police ? Croyez-vous qu'elle tolère une el1-
treprise de cette nature ? A quel titre osez * vous son-
der les cœurs & faire la confessîon de foi des Au-
teurs qui vous déplaisent ? Pensez-vous qu'abusants
dè votre caradtere, & sous le prétexte trivial & spé-
tieux de défendre la Religion, que personne ne songe
à attaquer,dont les fondements font inébranlables, Se
qui est sous la protection des loix & du gouverne-
ment, vous puissiez établir une Inquisition3 & que
l'on souffre une pareille témérité ?
LE P R E T R E.

UneInquisitian Ah ! S'il yen avoir une en France


1
3
vous seriez un peu plus contenus, vous autres im-
pies ! mais je n'en désespere pas : le Pape quj occupe
û ilorieusement la chaire de Saint Pierre, vient do
se brouiller avec la Cour de Portugal en protégeant
îes Jésuites auxquels elle vouloit con.teeer le droit
de corriger ,les Rois : il a envoyé un Visiteur Apos-
tolique en Corse, sans consulter la République de
Gènes, 8c depuis son arrivée dans ce pays-là, lezele
des mécontens s'est bien ranimé. Tout cela me
donne de grandes espérances & si Ton prédécelTeui:
avoir pente comme lui , nous aurions la consolation
de voir ce sage Tribunal établi parmi nous.
Vous parlez de la Police ? Ne s'efi: - elle pas décla-
rée assez hautement en proscrivant l'Encyclopédie
dépôt d'hérésies & de schisme, recueil ,
d'im-
çe ce
piétés 3c dp blasphêmes, qui respire à chaque page
la révolte contre la Religion & contre l'auto-
rite : Ne vient-elle pas en dernier lieu de per-
mettre qu'on expose sur le théâtre toutes les
horreurs de votre morale : Les conclusions du Procu-
reur Général contre I'F-ncyclopédie , n'ont-elles pas
été plus fortes que le Mandement de notre Arche-
vêque : les discours Académiquesqui sont lus du Roi
& de tout l'univers, ne sont-ils pas des déclama-
tions contre vous ? Et vous comptez encore sur la
Police. Tremblez que sa main ne s'arme contre les
Auteurs, après avoir sévi contre l'ouvrage; tremblez
qu'elle ne vous plonge dans des cachots, d'où vous
pe sortirez que pour erre trainé à la Grève, & préci-
pité delà dans le feu éternel qui est préparé au
Diable & à ses Anges,

L' ENCYCLOPEDISTE.
Voilà une terrible déclaration ; & je ne m'atten-
dois pas en travaillant innocemment à cet ouvrage,
pu j'ai intéré quelques amenés sur les arts, de tra-
vailler pour la Grève & pour l'enfer.
La Police en effet a t.1pprlmé' l'Encyclcpédie :
peut-être y avoit-il des ciiol.'-s qui n'étoient pas de
î'essence d'un dictionnaire &c qu'il auroit été plus
convenable de ne pas y mettra,
; mais je réponde que
If, estimables Auteurs de ccc ouvrage n'ont eu que
àcs intentions les plus pures 3c n'ont cherchés que
:ïi
ïa vérité quelques fois elle3 leur a échappée c'esi:
,
qu'il esi dans la nature humaine de se tromper :
la
vérité ne s'éfraye point des recherches, elle reste
rou jours debout, 8c triomphe toujours de l'erreur.
Voyez les Anglois : cette nation sage & éclairée a
livré les questions les plus délicates à la discussion
.& àl'examen. Monsieur Humes, ce fameux [cepriqlle,
est aussi honoré parmi eux que l'homme le plus
soumis à la foi : vous savez aussi bien que moi qu'elle
cst un don de Dieu & qu'il ne faut pas s'em-
3
porter contre ceux qui manquants de ce précieux
flimbeau, veulent y suppléer par la conviction qui
irésulte de l'examen. Nos Magistrats dont la Religion
jfurprise s'eil alLumée trop légèrement rendront
,
justice aux vues utiles de ces hommes éclairés, qui
travail!oient à la gloire de la nation, en instru"sàiit
l'univers. L'Europe entiere demande avec tant d'em-
y'icifement la continuation de cet ouvrage qu'ils
feront forcés de se rendre à ce cri général. ,

L E P R E T R t.
Vous nous citez sans celse les Anglois, & c'est
le mot de ralliement- des Philosophes : vous avez
pris à tâche de louer cette nation féroce, impie,
& hérétique : vous voudriez comme eux avoir le
privilège d'examiner , de penser par vous-même, &
arracher aux Ecclésiastiques le droit immémorial
th:" penser
*
pour vous & de vous diriger. Vous
voulez qu'on admire des gens qui sont nos enne-
fnis de toute éternité, qui désolent nos colonies,
Se qui ruinenr notre commerce. Vous ne vous
contentez donc pas d'être infideles à la Religion,
yous l'êtes encore à l'Etat Le ministere aura peut-
1

être la foiblesse de fermer les yeux sur votre tra<


]"û{bn mais nous trouverons les moyens de voiyj
5
ne profloncera plus de discours à PAcaaémi#
4jui ne soit une satyre des Philosophes Anglois ,
& l'on n'adoptera dans le Conseil de Verraillcs
.aucune des maximes de celui de Kensington.
L' E N C Y C L 0 P 1" DISTE.
Ce sera bien fait : mais c'est asïèz parler des
Anglois & pour abréger notre conversation ; dites-
moi je ; vous prie, d'où vient votre déchaînement
s
contre les Encyclopédies ? Avez - vous lu leur
ouvrage avec attention ?
La Prbtri
Non assurément. Je ne suis pas assez scélérat
pour avoir souillé mon esprit de la leé.ture d'un
ouvrage aussi profane. Je n'en ai pas lu un mot,
je n'en lirai jamais rien : je me contenterai de le
décrier dans mon Journal, & de faire imprimer
toutes les semaines que c'est le livre le plus daun
gereux qui ait jamais été compote.
V ENCYCLOPE' DISTE.
Votre projet est très-sensé, assurément; mais ne
fèroit-il pas plus équitable de le juger après l'avoir
lu, que de vous en fier à dès rapports peut-être
infideles, & peut-être intéressés.
A quel égard encore vous a-t-on dit qu'il suc
dangereux ?
LE PRETRE.
A tous égards. La Théologie nJefi: point celle
de la Sorbonne. La Morale n'ell: point celle des
Jésuites. La Médecine n'est point celle de la Faculté
de Paris. L'Art Militaire est compose sur des Mé-
moires Prussiens. La Marine & le Commerce sur
des Mémoires Anglois, En un mot, tout e!r
4&establç, A 1?
en
L' ÊNCYCLOPE1 DISTZ.
Voilà qui est raisonner à la fin ; & si vous
m'aviez dit tout cela d'abord > notre dispuze auroit
éié plutôt terminée..
LEPRETRE.
Je vois que si je disois encore un mot, VOl;!!
abjureriez la Philosophie pour afficher la dévotion ;
mais nous ne voulons plus de toutes ces palinodies
qui Iront rire les incréiules, & qui vous raccom-
modent avec les bonnes gens de notre parti qui
sont dupes de vos simagrées : Les ouvrages3 que
vous avez fait contre la Religion & ses Minières,
xefl- tiit, 8c la rétractation périt. Il faut que vous
soyez toute votre vie un objet de scandale3 que
vous mouriez dans l'impénitence , 6c que vous
ioyez damné éternellement, Je ne veux plus de
commerce avec vous, 5c je vous déclare que l'ou-
vrage est abominable d'un bout à l'autre , qu'il
;
falloit non-seulement le supprimer, mais encore
le brûler qu'il falloit faire le procès à tous ceux
qui y ont travaillé, à ceux qui l'ont imprimé > à
eeux qui l'ont acheté ; & que vous êtes tous des
^thées? des Déïfèes, des Sociniens, des Ariens, des
Sémipélagîens, des Manichéens &c. &c. &C.
j,
N'avez-vpus pas eu l'irré'tigieuse affectation de
louer les Anciens qui étoient dans les ténébres du Pa-
.gani(m.e, aux dépens des modernes qui sont éclairés
au flambeau de' la révélation? N'avez-vous pas
Roussé l'impiété juiqu'à comparer le siécle idolâtré
d'Auguste au siécle chrétien de Louis XIV.
L'ENCYCLOPE* DIST1.
Je me retire enchanté de votre érudition & de
yotre douceur ; en vous exhortant à ne pas laisser
riir le zele dont je vous vois animé j voici un
£e vos adverfaircs dont je vous recommande la
&'onyeisioiia puisque vous avez dédaigné la mienne.
SECOND
DIALOG E,
Entre un P!lETRE & un
MINISTRE Proteflant-,
-

J- S P R I T K 1.

J entrez
E bien
Ntrez
,
échauffé
Monteur vous me trouvez
;
: ne croyez -pas j je vous
ici prie.,
que ce ibit en parlant de cOntroverse que ma bile
s'dl allumée : je ne songe plus ni à Calvin, ni à
Luther; ce n'est plus contre les Réformateurs que
je veux écrire ce ne sera plus le mot d'hérétique
-,

que je ferai raisonner dans mes Ecrits & dans mes


Sermons. Je veux poursuivre les Philosophes, les
Encyclopédies, & voilà les vrais Schismaciques. Il
faut que nous oublions tous nos démêlés, que -.,ous
jious pasîioris mutuellement nos Dogmes & notre
po4rine) & que nous nous réunisiions contre cette
engeance pernicieuse qui a voulu nous détruire :
car ne vous y trompez pas, ils en veulent égale-
ment à tous les Ecclésiastiques, à toutes les Reli-
gions; ils prétendent établir l'empire de la raison ;
& nous relierions tranquilles dans ce danger !
L 1 MINISTHI.
Monteur, je loue infiniment le dessëin ou vous
cres de perdre ceux qui veulent nous décréditer,
mais je blâme la maniere : il faut s'y prendre plus
doucement, & par-là plus sûrement : Presque tou-
jours on se nuit à soi-même en poursuivant san
ennemi avec trop de pasrion,& d'acharnement. Je
sais bien aussi qu'il ne faut pas trop raisonner, &
que ces gens-là sont auez subtils pour en imposer
à ceux qui examinent ; mais il faut décrier les
Auteurs, & alors l'ouvrage perd certainement son
crédit. Il faut adroitement empoisonner leur con.
duite ; il faut les traduire devant le public comme
des gens vicieux, en feignant de pleurer sur leurs
vices : il faut présenter leurs actions sous un jour
odieux en feignant de les disculper : si les faits
x
nous manquent , il faut en supposer ; en feignant
de taire une partie de leurs fautes. C'est par ces
moyens-là que nous contribuerons à l'avancement
de la Religion, Se de la piété & que nous pré-
viendrons les maux & ,
scandales
les que les Philo-
sophes causeroient dans le monde s'ils y trouvaient
quelque créance.
LE P R Ï T R i.
Voilà qu'on vous surprend toujours dans ce
malheureux défaut de la tolérance qui vous a
^
séparé de nous, & qui s'oppose aux progrès de
votre Religion. Ah ! si comme nous, vous brûliez t
vous envoyiez à la potence , aux galeres , il y
auroit un peu plus de foi parmi vous autres &
l'on ne vous reprocheroit pas de tomber dans , le
relâchement.
Vous me direz peut-être que notre zéle s'esi: bien
rallenti, & que si nous n'avions pas les billets de
Confession, on ne distingueroit plus notre Religion
de la votre ; mais laissèz faire les Jansénistes Sç le%
3
Auteurs du Journal Chrétien^
La M i u i s T r. t.
il cst vrai que nos idées sont différentes sur les
moyens d'étendre la foi* mais nous avons eu quel-
ques-uns de ces momtens brillants que vous regrettez 9
& le supplice de Servet doit exciter votre admiration
& votre envie. La corruption des moeurs met des
entraves à notre zéle, mais je réponds de moi & de
mes Confreres ; & si l'autorité séculiere vouloit sé-
conder le zéle ecclésiastique nous offririons de
bon cœur sur le même bucher ,
un sacrifice à Dieu
Jont l'odeur lui serait certainement bien agréable.
LX P R E T R E.
Je suis enchanté de ce que vous me dites, & je
vois que nous ne différons que par la conduite* &
non point par les intentions. Puisque nous pensons
de même, exterminons donc les Philosophes? tout
est permis contre eux. Supposons-lcur des crimes,
des blasphèmes j déférons-les au Gouvernement
comme ennemis de la Religion & de l'autorité.
Excitons les Magistrats à les punir en y intéressant
leur salut ; & s'ils se refusent à nos* pieux desseins
flétrirons les Encyclopédistes dans nos écrits, ana-,
thcmarifons-les dans la chaire, & poursuivons-les
sans relâche.
LE MINISTRE.
Je le veux bien, & je crois même que notre
union secrette produira un très-bon effet : ce pieux
syncrétisme ne sera point soupçonné du public,
qui voyant les deux partis acharnés contre ces
gens-là, ne manquera pas de les croire très-cri-
minels. Mais cependant que gagnerons-nous à tout
cela Je vous avoue que j'aime bien décrier ceux
>
qui attaquent la Religion & ses Ministres ; mais si
l'on gagnoit davantage à les louer, cela deviendroit
embarraflanr. Nous autres Ministres Protestants,
nous sommes mariés, nos bénéfices sont des plus
minces, & nous nous devons à notre famille : on
ri-a point de CC>11lidération- dans le monde Tans
argent, & on doit procurer de la considération à
ses enfans. Si en disant du mal des Philosophes, 8c
du bien de leurs ouvrages, ou du bien de leurs
personnes., 8c du mal de leurs ouvrages; ou même
si en louant le tout, on vendoit mieux ses feuilles
il faudroit bien se soumettre à cette nécessité. ,
S'ils vouloient même acheter la paix cela dé-
pendrait des cu,- dirions : si par exemple, on , pouvait
les engager à n'attaquer que les Luthériens ce
seroit un moyen d'accommodement 8c ce seroit ,
3
les faire travailler pour nous ; mais s'ils veulent
absolument que cela soie plus général, ne pourroit-
on pa§, moyennant une petite redevance, leur
abandonner la Morale, qui dans le fond tient plus
à la Jurisprudence qu'à la Religion, (5c les Moines,
eue vous n'aimez pas mieux que nous ; Par ce léger
sacrifice, nous Car varions les Dogmes & les Prêtres,
ce qui est: pourtant l'essentiel ; 8c nous occuperions les
Philosophes, & nous aurions la gloire de les rendre
jios tributaires.
LE PRÊTRE.
Ah si donc I Quoi ! l'interêc peut trouver place
çlans votre coeur, quand il s'agit de celui de la Reli-
gion : Vous pouvez balancer entre Dieu 8c Mammon ;
il s'agit bien de vendre ses feuilles, il s'agit de les
faire lire: je vendrois plutôt mon manteau pour
acheter du papier & des pumes, 8ç écrire contr'eux :
D'ailleurs, que vouiez-vous qu'ils vous donnent ;
ce sont des gueux qui ne vivent que de ce qu'ils
volent. Je suis si fort indigné de vos vues sordides,
que je romprois pour jamais avec vous si j'avois
moins à cœur l'écrasement de cette canaille ; mais
vous m'êtes néccflaire pour l'exécution de mon
projet, 8c puisqu'il vous faut de l'argent, je vous
ferai avoir une pension de nlillc écus sur la cailIè
des nouveaux convertis. J'exigerai feulement une
petite condition, ee:1: qne vous me fassiez quelques
Sermons dont j'ai besoin contre les Encyclopédies â
pour les gens d'une certaine espece, oc vans m-et1
ferez bien aussi trois ou quatre sur la' controverse,
pour le peuple.
L1! Ministre.
Je le veux bien , je
ferai le tout en conscience i
je n'ai jama.s prêché contre les Encyclopédies ; il
faudra des Sermons rout neufs. Ma santé est foible ,
6c pourroit se retentir de ce travail ; ainsi je ne
vous en ferai pas sur la controverse, mais je pourrai
vous en retourner trois où quatre des miens sur
cette madère.
Vous vous êtes [candaliré de ce que ,je pensois à
l'intérêt, ma;s vous cesserez bientôt de l'être, lorsque
vous saurez que j'applique cet argent à de bonnes
œuvres,- & que je destine cette pension à l'entretien
d'un pauvre homme auquel je m'intéresse tres'parti-
culierement. Ne vous étonnez donc pas, si je vous
demande quelle soit payée régulièrement, & même;
d'avance si cela se pouvoir
y
L E P R E T R E.
J«*us le promets, & l'usage que vous faitiw
de cet argent vous rend toute mon estime : Mais
n'avez-vous jamais lu ce livre 1 dont je ne saurois
prononcer le nom sans frémir ? Je ne l'ai pas vu »
mais on dit qu'au mot vie , l'article de vie heureuse
fait dresser les cheveux. Tolere-t-on cet ouvrage de
Satan dans le pays où vous vivez >
LE MINISTRE.
J'en ai ln quelque chose ; & en effet, ce livre
est plein de blasphênies & d'impiétés. Le mot vie
que vous citez n'est pas encore fait ; mais sans
doute qu'il seroit affreux s'il éroit imprimé.
On a souffert cet ouvrage dans ma patrie, quoique
j'aie bien fait quelques tentatives pour en faire
saisir une cinquantaine d'exemplaires qui y sont
répandus, & que je voulois faire confisquer au
prosit des Ecclésiastiques, parce qu'ils sont à l'abri
dela contagion, & que l'ayant entre leurs mains,
ils l'auroient mieux réfuté» La chose a souffe1t
Quelque difficulté; Se pour diminuer au moins iï
grandeur du mal, j'en ai emprunté sous main quel-
ques exemplaires que je n'ai point rendus : j'ai ima-
giné pour les retrancher de la Société, de tes
,
envoyer en Espagne, où je les ai fait payer le double
de leur valeur aux libertins qui les ont achetés ; apicri
quoi j'en ai donné avis au grand Inquifireur, qui
a fait saiÍÎr & brûler les exemplaires, mettre a l'inqui-
iîtion les gens qui en écoient possesseurs, 8c qui m'a
envoyé cent pistoles d'or pour le service que j'ai
tendu à la Religion.
LE PAÎTRE;
Il y a bien quelque chose à dire contre la dé!i-
catefre dans ce que vous me racontez-là ; niais la
fin de l'action en sanétifie les moyens , & je vous
absous pour toutes celles de la même nature a
passées, présentes, & avenir.
LE MINISTRE.
Puisque vous approuvez mon zélé, & que vous
croyez qu'on peut se permettre quelques négligences
en morale, lorsqu'il s'agit des intérêts de Reli-
gion , je vais vous narrer un petit fait que vous
entendrez dans son vrai sens, 6c qui pourroit être
mal interprété par le vulgaire, qui ne juge jamais
que sur les apparences. J'avois vu dans une biblio-
theque qui m'étoit ouverte un.manuscric, dont la
publication pouvoit nuire à la Cour de Rome, &
qui inquiétoit fort Sa Sainteté. Un premier mouve-
ment de zélé me porta à m'en saisir pour le f lire
imprimer, & combattre nos ennemis, mais je pensai
qu'il seroit plus politique d'en faire un sacrifice au
Saint Pere, qui m'en sauroit gré, & respecteroit une
Religion dont les Ministres se conduisoient avec
cette modération & ce désintéressement ; car Je le
laissois absolument maître des conditions. Il fut en
effet très-sensible à ma démarche, me fit remercier,
& m'envoya mille écus en échange du manuserit,
dont j'ai gardé une copie à tout événement. Il ne
s'en tint pas là, il donna un bénéfice de cinq cent
3cus 1 un Prêtre de ma connoissance que je luI
recommandai, & qui en a partagé le revenu avec
moi jusqu'à sa mort.
LE PRETRE.
J'approuve infiniment votre conduite ; mais com-

pour démêler le mérite de cette aetion &. je ne ,


me vous le dites » il faut avoir une piéré bien éclairée,
serois pas surpris que les gens du monde s'y trom-
paient. Il y a cependant cette copie qui
LE MINISTRE.
Puisque nous sommes sur le ton de .la confiance
il faut que je vous faflè une confession enciere, &7
que je vous montre jusques où j'ai poussé le zéie 6c
, la charité. J'écrivois
contre les Philosophes, & vo-
yant que mes ouvrages n'étoient pas un préservatif
suffisant contre la malignité des leurs, je tentai une
autre voie : je m'adreŒai au plus dangereux & au plus
écouté d'entr'eux ; je cherchai à gagner sa confiance
& après y avoir réussi ; je lui proposai d'être l'Editeur,
de ses .'oeuviès : Je pensai que le public raclure en
voyant mon nom à côté de celui de l'auteur, & à
la tête de l'ouvrage ( dans une préface composee avec
cette pieùse adresse qu'inspire la vraie dévotion aux
gens de notre état,) le liroit non seulement sans
défiance mais même avec édification. Tant il faut
,
peu de chose pour se rendre maitre des opinions ,
par - là je parois le coup que l'on vouloit porter à
la Religion, je sandifiois les choses profanes, & je
changeois en un baume salutaire le poison. que nos
ennemis avoient préparé. La chose étoit prête à réussir,
l'Auteur alloit me faire présent d'un de ses manuscrits
le marché étoit fait avec un Libraire qui devoir3
m'en donner un Louis d'or par feuilles, & deux cent
exemplaires que j'aurois vendu tai-idis-que j'auroïs
fait faire quelques changements aux , siens
loi (qu'on
3
m'a traversé ; mais aussi j'ai bien dit du mal du li-
\'re,' & ce n'ess pas nia faute si je n'en ai pas fait à
l'Auteur»
L I PRETRE.
,Cela est très-bien encore mais je vois toujours
de l'argent dans tout ce que, vous faites 5 & j'aime*
rois mieux qu'il n'y en eflt pas.
LE MINISTRE.
Vous avez donc oublié ce que je vous ai dit tout!
l'heure l'usage que j'en fais: vous me forcez à vous
tépéter encore que je le consacre à de bonnes œuvres,
& je puis vous assurer avec vérité que les petites
sommes que j'ai reçues ont été remîtes fidélement
entre les mains de ce pauvre homme dont j-e vous
ai parlé ; j'aurois bien des choses à vous raconter
encore, si je vous disois tout ce que j'ai fait pous
lui, mais je craindrois d'abuser de votre complai-
sance ; & ce sera pour la premiere entrevue.
LE PRETRE*
J'approuve tout ce que vous avez fait i les motifs
fcn font louables, & je vous estimerois fort si vous
aviez un peu plus de chaleur contre nos ennemis.
Chacun a sa maniere : je vous avoue que je préféré
les voies abregées. J'aime mieux persécuter : travail-
lez tout doucement par la sape , tandisque j'irai
6c bruler tout
avec le fer & le feu renverser ce qui
m'opposera quelque relance.
LE MINISTRE.
Bonjour, Monsieur : J'avois oublié de vous dird
que tout ceci doit être fort secret entre nous , &
que tout-ce que j'écrirai doit être anonime : N'ou-
bliez pas non plus la pension , & souvenez-vous
qu'elle est destinée à un pauvre homme.
LE PRETRE.
Bonjour Monsieur : N'oubliez pas les sermons î<~
iouYenez-vous qu'ils ne sauroient être trop f-QX~~~

£ L A7<

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