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Université de Bourgogne – UFR Sciences humaines

Master Musicologie – Parcours Recherche

PRÉSENCE DE LA MUSIQUE AFRICAINE DANS LE


JAZZ
Etude d'un texte de Gerhard Kubik

Sens et signification
Dossier de Master II présenté par Christophe BAIRRAS et
Gabriel ROUET

7/12/2016

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Table des matières

Introduction.........................................................................................................................................3

I. Présentation et analyse de la forme..........................................................................3

1. Introduction................................................................................................................................4
2. Analogies entre l'Afrique et le Nouveau Monde...................................................................4
3. Les données formelles et stylistiques.....................................................................................5
4. Réinterprétations instrumentales.......................................................................................6
5. Modeles tonaux et harmoniques........................................................................................7
6. Systemes d'organisation du temps musical.......................................................................9
7. Résumé et perspectives...................................................................................................10

II. Une lecture critique de l'article...............................................................................11

1. Modele tonal et harmonique..................................................................................................11


2. Modele formel ........................................................................................................................13
3. Modele rythmique ..................................................................................................................14
4. Modele harmonique................................................................................................................17

Conclusion........................................................................................................................................19
Références bibliographiques et sitographiques..................................................................................22

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Tout au long de cet article, Gerhard Kubik souhaite décortiquer les liens généalogiques
qu'entretiennent le jazz et l'Afrique. Pour ce faire, l'auteur oriente son travail autour de trois
problématiques.

« Dans quels types de jazz trouve t-on des éléments africains ? »


« De quelles parties de l'Afrique viennent-ils? »
« Dans quelles mesures le jazz a t'il dépassé l'Afrique et l'Europe par son innovation ?»

Dans un premier temps, nous allons présenter cet article en adoptant le point de vue de l'auteur, puis
nous allons apporter un regard critique sur son travail.

I. Présentation et analyse de la forme

Présentation

L'article « la présence de la musique africaine dans le jazz » est inscrit au sein de la quatrieme
partie, nommée « intersection » du livre MUSIQUES Une encyclopédie pour le XXIe siècle de Jean-
Jacques NATTIEZ. Gerhard Kubik, né en 1934 en Autriche, a été professeur d'anthropologie
culturelle et d'ethno-musicologie à l'Université de Vienne et de Mainz ainsi que de psychothérapie à
l'université privée Sigmund Freud de Vienne. Il voyage en Afrique régulierement, où il a effectué
plus de 25 000 enregistrements, il a publié plus de 300 articles ou livres sur la culture africaine et
afro-américaine depuis 1959, et pratique la clarinette dans un groupe de kwela traditionnel de
Malawi. La macrostructure du texte est composée de sept parties :

1. Introduction

2. Analogies entre l'Afrique et le Nouveau Monde

3. Les données formelles et stylistiques

4. Réinterprétations instrumentales

5. Modèles tonaux et harmoniques

6. Systèmes d'organisation du temps musical

7. Résumé et perspectives

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Afin de présenter le positionnement idéologique de l'auteur, nous allons présenter chacune
de ses parties selon ses prises de positions.

1. introduction :

Tout d'abord, l'auteur invoque les problématiques de l'enregistrement musical. Lorsque l'on veut
étudier les musiques populaires avant le XXeme siecle, il faut garder en tête qu'il n'y a pas
d'enregistrement sonore, de partition ou même de moyen de mémorisation fiable et fidele. L'auteur
base ses theses sur des enregistrements qu'il a effectué depuis 1958. C'est un un travail fastidieux,
sans certitude :

“Les chercheurs qui travaillent sur le jazz se trouvent dans l'incapacité d'établir une généalogie
stylistique qui relie les antécédents du jazz du XIXème au XVIIIème siècle et, éventuellement, aux
culture régionales africaines”

Mais en précisant que :

“Pour l'historien africaniste, il ne saurait avoir de doute quant à la présence décisive de concepts
musicaux empruntés à l'Afrique”

Ensuite, l'auteur présente le jazz comme une musique mouvante :

“le mot jazz se mit à désigner plusieurs genres musicaux différents qui, souvent, évoluaient dans
des directions opposées.”

Gerhard Kubik souhaite reconstituer une “généalogie culturelle” du jazz :

“Comme toute histoire culturelle, l'histoire du jazz est essentiellement faite d'un ensemble de
traditions orales réinterprétées”

2. Analogies entre l'Afrique et le Nouveau Monde

L'auteur précise, sans citer ses sources, que l'on trouve des musiques analogues au jazz en Afrique
de l'ouest, caraïbe et Amérique du sud depuis 1890. Pour lui, c'est la naissance de ces musiques
dans un contexte d'adaptation similaire qui est la cause de leur ressemblance. Il parle également de

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la réinterprétation du jazz américain en Afrique. Il mentionne l'exemple de la musique Kwela, un
jazz tres spécial dont l'instrument principal est la flûte, en précisant que :

“Les musiciens de Buddy Bolden à la Nouvelle Orléans et les gosses de rues de Johannesburg et
de Durban qui créèrent le kwela aux environ de 1950 avaient une chose en commun. Ils étaient
'faux' du point de vue de la société dominante”

Kwela Bafana1 (1957) des Basements Boys est un bon exemple de musique Kwela.

3. Les données formelles et stylistiques

L'auteur précise que, contrairement à Cuba ou en Amérique Latine, les percussions furent interdites
en Amérique du nord. Cependant, les manieres d'envisager et de pratiquer la musique résisterent.
Pour lui, on retrouve des façons de jouer récurrentes. Par exemple l'auteur explique que :

“Ainsi, par exemple, dans le cas des trois tambours de taille différentes dans la danse Shirima :
[…] L'un des tambours dirige, les autres assurant différents rôles.”

Il fait un parallele entre l'Hétéro-phonie New Orleans et la structure en énoncé et réponse africaine.
Cela est une maniere de s'adapter malgré le filtrage instrumental. L'auteur recherche également les
principes d'organisation et de formes africaines dans le jazz. Pour lui, cela est principalement
incarné dans l'idée de cycle servant l’improvisation,

“la présentation à l'unisson du thème instrumental sert de cadre; celui-ci est entrecoupé d'une série
d'improvisations”

au sein de la forme AABA du jazz vu comme :

“une solution de compromis entre la notion africaine de cycles courts et les formes à parties
multiples (AABAACC par exemple), héritées de la musique de danse de l'Europe du XIXème
siècle.”

L'idée récurrente est que :


“L'héritage culturel du peuple est une force qui reprend en fin de compte les formes qui lui sont
étrangères et facilite leur réinterprétation en termes plus familiers”
1 https://www.discogs.com/fr/Basement-Boys-Kwela-Bafana-Upstairs-Jump/release/8829310, consulté le 27 décembre
2016

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4. Réinterprétations instrumentales

Le jazz reste une musique de tradition instrumentale. De cette façon, le jazz se différencie de la
musique africaine dans laquelle la voix devient centrale. L’auteur insiste sur le fait que le jazz est de
nature instrumentale parce qu’il vient du ragtime, des fanfares et de la musique de danse
instrumentale. Pourtant Gerhard s’évertue à comparer la nature instrumentale du jazz avec celles
des pratiques africaines. C’est pourquoi en Afrique, on considere la musique instrumentale comme
étant une prolongation symbolique de la musique vocale. En effet, les pratiques tendent à projeter
une sorte de verbalisation sur des phrases instrumentales. Mais l’inverse est également vrai, la voix
est instrumentalisée par des techniques de déguisement (texture de la voix). Il y a donc deux
concepts essentiels de l’utilisation de la voix ; la verbalisation et l’instrumentation. Deux aspects
que l’on retrouve entierement dans le jazz :

Video Mederic collignon - Des Mots de Jazz : SCAT


→ https://www.youtube.com/watch?v=IoiC-twgVoI
Chet baker, But not for me

L’instrumentation du jazz est tres largement influencée par les pratiques européennes, cuivres,
instruments à anches, piano, guitare, etc… C’est pourquoi il est intéressant de se demander ce qu’il
reste des pratiques et des instruments africains. La culture européenne et américaine étant symbole
de prestige social, il est normal que les instrumentations traditionnelles africaines aient été
négligées. Pourtant, il semblerait que des pratiques instrumentales ainsi qu’une certaine forme
d’instrumentation aient pu subsister. Pour retrouver cet héritage, il faut comprendre le mécanisme
sous deux aspects : la substitution et la réinterprétation. En effet, la tradition est alors transmise,
parfois inconsciemment, la perception des connaissances et des pratiques culturelles est aliénée par
la culture intrinseque de l’individu qui tente de s’approprier ces pratiques. Cette idée, cette image de
l’héritage donne lieu à ce que Gerhard Kubik appel une réplique structurelle. Il est possible de voir
un détournement de certains instruments ou objets de la culture européenne dans la musique afro-
américaine. C’est ainsi que la planche à laver est détournée en racleur, les bones en bâtons de
rythme, le violon comme gojé, etc. Kubik part de la these de Dauer pour affirmer que les orchestres
d’Etat ont eu une influence sur les fanfares de la Louisiane, du Mississippi, etc…

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En somme, une certaine part de ces techniques instrumentales africaines tend à apparaitre ou
disparaitre dans l’histoire du jazz. Elles sont l’objet d’une réinterprétation des musiciens qui les
utilisent en tant qu’héritage mais avec la perception de l’instrument qui est biaisée par le contexte
socio-historique et plus largement par la déformation de la transmission à travers l’histoire.

5. Les modeles tonaux et harmoniques

G. Kubik part du postulat que l’harmonie du jazz américain emprunte sa structure harmonique à la
musique classique européenne tandis que l’aspect rythmique est africain. Il explique l’origine de ce
postulat pour trois raisons :

a/ Dans la Grece antique, la musique était divisée en trois niveaux d’expression : rythmique,
mélodique et harmonique. Chacun de ces aspects symbolise un élément de la nature humaine :
- Le rythme représente la fonction physique, ce qui appartient au corps.
- L’harmonie et la mélodie représentent des fonctions plus élevées issues de l’âme et
l’esprit.

b/ D’un point de vue historique, avec l’esclavagisme au XIX°s, les racistes n’accordaient
aucune qualité de ce type à ce qu’ils voyaient comme étant la « race negre ». L’auteur pense qu’il
s’agit d’une vision qui est encore profondément ancrée dans l’esprit des gens encore aujourd’hui :
- Les africains, afro-américain sont de bons sportifs
- Super sens du rythme etc…

c/ Les analystes sont prisonniers de la théorie musicale européenne. Les musiciens de jazz
ont intériorisés le point de vue des critiques et analystes. Cette interprétation de l’harmonie jazz est
aujourd’hui enseignée comme étant la théorie du jazz. Cette façon de penser s’est imposée comme
étant une convention.

Des influences africaines harmoniques persistent dans le jazz. L’auteur distingue alors deux types
d’accords :
- Des accords clusters timbriques-harmoniques utilisés comme accents. Ils ne correspondent
à aucune progression. Ils apparaissent en tant qu’accents sur les temps faibles. Le but de ce type
d’accords est de mettre en valeur la mélodie, en la commentant, en l’illustrant par des réponses
rythmiques. Exemple : Bop

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- Des accords comme couches sonores (pas d’exemples précis dans le jazz à travers le texte).
Il est possible de les voir à l’intérieur même de certains schémas harmoniques homophoniques.
Tout comme ci-dessous dans l’une des harmonisations parkerienne du blues.
Good Dues Blues

Ce qui parait essentiel dans cet exemple, c’est la progression parallele dans laquelle les voix se
déplacent par petits intervalles. Il est possible de remarquer cette technique entre autre par le
passage de l’accord de E-7 à l’accord de E#7 :

En somme, il faut comprendre par « couche sonore » des progressions harmoniques embellies par
des accords de passage, souvent chromatiques, qui permettent des mouvements de voix tres
proches. Cette seconde conception harmonique est tres présente dans le swing et le bop. Elle fait
entendre des principes jusqu’alors proscrit dans l’harmonie savante occidentale comme l’utilisation
des quartes et des quintes paralleles. Cependant ce type de parallélisme est présent dans la musique
de l’Est de l’Angola, de la Côte d’Ivoire et de nombreux autres pays. Il s’agit d’une pratique
profondément ancrée dans les traditions africaines :
Exemple Chant narratif

On peut remarquer que la piece conserve la forme blues traditionnelle en 12 mesures avec un centre
tonal sur le D présent (caractéristique du blues du centre du Soudan sans exemple dans le texte).

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6. Systemes d’organisation du temps musical

Tous les principes rythmiques de la musique africaine ne sont pas présents dans le jazz :

a/ Principe d’imbrication des battues relatives


b/ Polymétrie
c/ Modele rythmique asymétrique

Il explique ensuite brievement les caractéristiques rythmiques que l’on retrouve dans le jazz,
notamment à travers la section rythmique qui marque la pulsation. Le jazz se distingue aussi par un
élément rythmique identitaire que l’on appelle plus volontiers swing.

Swing : Interprétation de la croche --->

Gerhard Kubik explore les différentes pratiques élémentaires du rythme dans différentes zones
d’Afrique afin de les rapprocher des caractéristiques essentielles du jazz. Les caractéristiques de la
musique de la Côte de Guinée sont décrites par le travail de Waterman :

a/ Sens métronomique
b/ Rôle central de la percussion
c/ Polymétrisme
d/ Phrasé dont les accents mélodiques tombent sur les temps faibles
e/ Schéma imbriqué d’appel et de réponse

Le jazz emprunte deux de ces aspects : le sens métronomique et le phrasé sur les temps faibles, bien
que l’on retrouve aussi la 5°caractéristique. Les recherches actuelles de la musique africaine
déterminent 4 niveaux d’organisation du rythme que l’on retrouve également dans la musique afro-
américaine :
a/ La pulsation élémentaire ce qui correspond au sens métronomique de Waterman
b/ Le rythme de base ce qui équivaux à regrouper un certain nombre de pulsation afin de
former des unités plus grandes.
c/ Le cycle

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d/ Les systemes rythmiques asymétriques : Il s’agit d’une appellation issue des années 50 de
Kwabena Nketia

On retrouve dans le jazz les trois premiers niveaux d’organisation du rythme. L’absence de la
derniere caractéristique évoquée peut trouver une explication à travers trois hypotheses :
a/ Selon Borneman, le jazz trouve sa forme originelle à travers l’influence de la musique
afro-caraibéenne. Les danses créoles ont nourri le jazz (bamboula, juba). Borneman nous explique
cependant que lorsque les jazzmen arrivent à Chicago, ils perdent ce qu’il appelle la couleur
espagnole et se restreignent à des rythmes simples fondés sur le 2/4, 4/4.
b/Une seconde explication prend en compte le ragtime comme point de départ à partir
duquel le musicien compose de la musique de danse sur des métriques européennes. Les accents
mélodiques se trouvent sur des temps faibles.
c/ La derniere explication consiste à dire que la connaissance des modeles rythmiques
asymétriques n'arrive pas jusqu'aux États-Unis.

En dernier lieu il évoque un ultime point : le phrasé non linéaire sur les temps faibles. On retrouve
cette situation lorsque le soliste s’émancipe de la pulsation de base, il semble alors flotter sur la
cohérence rythmique du morceau. Les phrases et leurs accents sont indépendants de la pulsation de
base jusqu’à ce que le soliste décide de revenir sur la pulsation commune. Il s’agit d’un phénomene
que l’on a dans la musique africaine que l’on peut notamment retrouver dans un exemple de Mose
Yotamu. L’enregistrement est réalisé en Côte d’Ivoire et permet d’entendre un solo de guitare
électrique. Le phrasé non linéaire est fondé sur les temps faibles (pas d’exemple publié). En jazz
cette notion est tres présente dans le Bop, le Hard bop ou encore le free jazz. La technique se
remarque sur des effets de retard vis-à-vis de ce que Kubik appel le rythme général.

7. Résumé et perspectives

L’auteur termine sur l’exemple d’Ornette Coleman et les premieres formes du free jazz, notamment
à travers l’appropriation du blues. En effet, ce dernier conserve sa carrure à 12 mesures et maintient
son schéma formel, il s’émancipe néanmoins de l’harmonie fonctionnelle. Pour Gerhard, l’histoire
du jazz ne se résume pas à une sophistication exponentielle à proprement parler. Il n’a pas évolué
non plus de sorte à se détacher progressivement de la musique africaine. Kubik affirme au contraire
que chaque mouvement du jazz permet une résurgence de caractéristiques qui sont remobilisées.

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II. Une lecture critique de l'article

Gerhard Kubik recherche des modeles musicaux de musiques africaines à appliquer au jazz. Pour ce
faire, il dégage trois terrains de travail principaux, l'étude du modele harmonique, formel et
rythmique. Nous allons maintenant présenter une lecture critique de l'analyse que nous propose
l'auteur. Tout d'abord, il est important de préciser que, en tant qu'ethnomusicologue se basant sur
des enquêtes et enregistrements de musiques africaines depuis 1958, Gerhard Kubik adopte une
position plutôt originale sur le jazz américains.

1. Modele tonal et harmonique

Un grand point positif est qu'il remet en cause certaines croyances populaires, notamment sur le fait
que le rythme du jazz provient d’Afrique, et l'harmonie de la musique savante occidentale. Pour
lui :

“Il s’agit de retrouver les significations inconscientes, d’identifier le revers caché de la médaille, de
retraduire ce qui a été rationalisé par la théorie musicale classique”

Il met en évidence que l'harmonie jazz est pensée et enseignée comme venant de la tradition
européenne, et propose une autre explication :

“De même, l'usage des accords do 11ème et do 13ème dans le be-bop ne fait que 'répéter' ce que
les joueurs de xylophone en rondins du nord du Mozambique ont fait pendant des générations ; ces
instruments sont accordés à l'oreille sur une sélection d'harmoniques allant ordinairement du 4ème
au 11ème partiel, parfois même jusqu'au 13ème”

Kubik fait un parallele entre tempérament, harmonie, et extensions d'accords, provenant tout droit
de la maniere d'envisager l'harmonie africaine.

“Ainsi, les cinq années cruciales de l'histoire du jazz, de 1920 à 1940, suggèrent que l'évolution est
allée dans le sens d'une 'ré-africanisation progressive du style harmonique'.”

Pour argumenter son propos, l'auteur propose d’examiner le cas du blues, en justifiant les blue notes
comme provenant “des harmoniques de la voix humaine parlée”. Pour lui,

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Sib = harmonique 7 de Do
Mib = harmonique 7 de Fa
Fa# = harmonique 11 de Do

1st-16th harmonics as played on brass instruments. The arrows and the number below indicate the difference from the equal
temperament in cent. Created by baba66, http://de.wikipedia.org, 2006-04-01 License: cc-by-sa/2.0/de and GFDL

Sa théorie est plausible, le probleme est que ces notes sont aussi représentatives de la gamme
Bartok, inspiré par des musiques populaires extra-africaines.

L'auteur utilise ensuite un autre exemple, celui du moreau Good Dues Blues, de Charlie Parker :

Il voit, dans ce morceau, un exemple de la mise en péril de l'harmonie fonctionnelle, selon lui les
accords de ré 9 et sol 9 sont une :

“extrapolation du système du blues, fondé sur l’utilisation des partiels. Celui-ci prend les sons des
séries des harmoniques naturelles jusqu’au 9ème partiel, contrairement à l’accord de piano en
Occident …”

Cela justifierait le fait que :

“l’accord de dominante est évité (…) parce qu’il est étranger aux anciens modèles d’échelle du
centre-ouest du Soudan qui est à l’origine du système tonal du blues. ”

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Mais l'accord de dominante est t'il vraiment évité ? En effet, dans son exemple, il est plutôt
substitué par son triton. Par exemple :

Eb #11 (sub V de A7) ---> D /


E#7 (sub V de B7) ---> Em7

La substitution tritonique est fondamentalement basée sur le triton tonal du V eme degrés. De plus,
Selon Gerhard Kubik, on distingue dans le jazz deux types généraux d’accords :

→ Les “clusters timbriques-harmoniques”


→ Les couches sonores de type “harmonique homophonique”

Il rapproche donc ces caractéristiques avec l'Afrique :

“Quand on passe en revue l'histoire du jazz, on voit que les progressions harmoniques évoluent de
plus en plus par degré, et avancent pas ton entiers ou demi-tons. C'est là un indice important parce
qu'en fait de tels 'chromatismes' semblable à celle des systèmes équiheptatoniques tels qu'on les
trouve dans les musiques pour xylophones et d'autres musiques en Guinée et dans la basse vallée
du Zambèze.”

à l'écoute d'un morceau Be-bop – Donna Lee (1947) de Charlie Parker2 par exemple -, puisqu'il
applique cela essentiellement au Be-bop, on se rend compte que cette vision essentialise
l'accompagnement du Be-bop à ses caractéristiques apparentes africaines. Sa vision est
envisageable et digne d’intérêt, mais l'auteur ne prend pas les distances nécessaires face à son
approche du jazz. On a l'impression qu'il nie l'héritage harmonique romantique et qu'il perçoit
l'accompagnement du jazz seulement comme des clusters destinés à marquer des accents
rythmiques.

2. Modele formel

Pour lui, c'est l'usage de formes cycliques courtes au lieu de formes strophiques qui justifient la
généalogie formelle africaine du jazz. Il prend l'exemple du riff, qu'il attribue essentiellement à

2 Les Triomphes Du Jazz Vol.10, https://www.discogs.com/fr/Various-Les-Triomphes-Du-Jazz/release/488906,


consulté le 27 décembre 2016

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l'Afrique. Mais est-ce vraiment d'origine strictement africaine ? Ne peut-on pas retrouver le concept
de riff dans la basse obstinée baroque, les méthodes de composition de la renaissance, ou les
chansons populaires occidentales (notamment pour mettre le texte en valeur). Pour lui l'utilisation
de cycle est réduite à l'improvisation :

« Dans le jazz, l'utilisation de cycles, qu'ils soient composés ou non, est tout aussi essentielle que
dans la musique africaine, en raison de l’improvisation »

De plus, rappelons qu'il voyait la forme AABA comme un compromis entre le concept de cycles
courts africain et les formes à parties multiples de la musique de danse européenne en donnant
comme exemple I got rythm de George Gershwin. Il faut comprendre que les jazz-men se sont
réappropriés cette forme provenant d'abord des comédies musicales de Broadway.

3. Modele rythmique

L’auteur évoque dans son texte une utilisation limitée de modeles rythmiques et métriques
atypiques dans le jazz :

“En dehors d’expériences comme celles de Dave Brubeck et d’autres dans le domaine du jazz cool,
le bimètre et polymètre, et les métriques impaires, sont absents du jazz.”

Pourtant de tres nombreux contre-exemples sont présents dans l’histoire du jazz de la seconde
moitié du XX° siecle. De plus il est possible d’évoquer une recherche rythmique similaire des le
second quintet de Miles Davis. Aujourd’hui plus que jamais, ce qu’Ari Hoenig appelle « polyrythm »
et « metric modulations » sont devenus des outils du langage commun des instrumentistes de jazz
tant dans la composition que dans l’improvisation. Il existe une multitude d’albums qui pourraient
servir cet aspect, mais l’effet est d’autant plus singulier lorsqu’il est utilisé sur des standards. C’est
pourquoi nous pouvons retenir l’exemple de I should care extrait de l’album live Split life de Gilad
Hekselman au Smalls. Tout au long de son improvisation, Hekselman et son trio (Joe Martin : Bass,
Ari Heonig : Batterie) explorent les polyrythmies improvisées afin de développer des idées, non
seulement par le soliste, mais également par la section rythmique qui réagit vivement à ce genre de
« modulation » (sous-entendu rythmique).

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I should Care min 2’46:

Certains autres interpretes arrangent ces standards sur des métriques atypiques. Là encore de
nombreux exemples peuvent être donnés, nous n’en donnerons qu’un seul : la version de Jonathan
Kreisberg de Summertime dans son album One. En dernier exemple nous citerons Arrow and loops
de Ari Hoenig issu de l’album Lines in oppression. Le theme est construit sur une métrique en 11/8,
le second alterne 6/4 et 5/4 comme la partition le montre ci-dessous :

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Bien entendu sur ces métriques particulieres la section rythmique et le soliste utilisent toute sorte
d’équivalences, de polyrythmies qui évoquent d’autres métriques. L’exemple le plus frappant est
des la minute 6’04. Deux mélodies se superposent l’une évoque le 6/4 tandis que l’autre évoque le
4/4 au même moment comme l’exemple suivant le montre :

Ces deux parties se superposent. Le batteur marque l’une ou l’autre de ces métriques afin de faire
apparaitre le theme sous un autre jour. Pour terminer avec ce point, il est possible de compléter cette
critique par les ouvrages pédagogiques de Ari Hoenig qui traitent largement de la question du
rythme à travers l’improvisation, le vocabulaire rythmique, etc… Il revient également sur l’origine
de ces pratiques dans le jazz. Pour obtenir encore plus de contre-exemples, la these de Jerad Nippi
Time Travels Modern Rhythm Section Techniques as Employed by Ari Hoenig. En somme, le
manque d’exemples postérieurs aux années 50 nous amene à considérer une histoire du jazz figée
aux années 50. Il s’agit donc d’un élément critiquable au regard des différents exemples qui ont pu
être évoqués précédemment et qui sont devenus des outils courants.

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4. Modele harmonique

Lors de son exemple sur le modele harmonique Gerhard Kubik détermine deux types d’accord, le
cluster timbrique-harmonique et l’accord couche sonore. Nous nous intéresserons de plus pres au
deuxieme type d’accord. Il sert en somme comme une sorte d’accord de passage qui permet aux
harmonies de se succéder avec des mouvements de voix restreints grâce à des intervalles de tons et
demi-tons. Gerhard Kubik explique ce procédé à travers l’exemple d’une harmonisation d’un blues
de Charlie Parker. Comme beaucoup de ses exemples, il essentialise l’histoire du jazz autour de la
population noire. Pourtant cet outil harmonique est tres présent dans de nombreux arrangements de
Gil Evans. Il suffira ainsi d’écouter ou de lire les arrangements dans l’une des œuvres majeures de
l’histoire du jazz, « Birth of the cool ». Le lecteur averti ou l’analyste remarquera aisément les
mouvements harmoniques chromatiques sur des formes standardisées telles que l’Anatole. En
analysant plus en détail d’autres harmonisations de blues de Charlie Parker, il est possible
d’apprécier les autres chemins que ce dernier prend pour élaborer un blues de plus en plus
sophistiqué. Pour bien saisir les différences qui se manifestent, il m’a semblé nécessaire de
présenter brievement une harmonisation typique du blues joué par les musiciens de jazz.

Une des versions simplifiées d’une interprétation jazz du blues

Seulement on ne peut pas regarder qu’une des nombreuses harmonisations que Parker propose du
blues. Il en est d’autres qui correspondent davantage à une volonté d’explorer le langage dans sa
complexité, à travers des chemins harmoniques plus étroits.

Blues for Alice composition de 1951 C. Parker. Fondé sur un blues suédois.

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En analysant attentivement le chemin harmonique, on observe que l’harmonie des mesures 2 à 5
descendent par ton, en réalité, le compositeur vise le Bb de la mesure 5. De la même façon le
compositeur vise le G-7 de la mesure 9. Pour arriver à cet accord il passe par des II-V qui se
succedent par demi-ton descendant. En somme, le concept de couche sonore, si l’on peut dire, est
reprit ou recyclé à travers l’enchainement harmonique II-V. Nous pouvons en dernier lieu ajouter
que les chromatismes sont une part du langage élémentaire du jazz. Les approches chromatiques
sont autant présentes dans l’harmonie que dans la mélodie pour souligner un « guide tone »(les
notes de l’harmonie). Dans le jazz manouche, ce geste/chromatique est déjà apprécié par les
guitaristes. Ils vont autant être présents dans des gestes harmoniques que dans les gestes
mélodiques. Il s’agit d’une approche pratique du savoir. A la guitare, les approches chromatiques
sont liées à des gestes intuitifs tout comme le bend pour les guitaristes actuels de rock.

Giant steps (1959) / L’analogie est également présente dans le travail de John Coltrane. En effet,
grâce au Coltrane changes, il explore le langage tonal jusqu’au bout sur un principe à priori simple.
Le principe musical consiste à moduler à partir de trois pôles en séparant l’octave en trois. Si l’on
considere que l’on part de la tonalité de C alors les modulations possibles seront en E ou en G#. Il y
a donc avant tout une volonté de complexifier le langage, peut-être de façon à apporter un poids
nouveau au jazz. Tous ces exemples montrent-ils un héritage de la musique africaine ou une volonté
de reconnaissance à travers l’élaboration d’un langage de plus en plus sophistiqué ? Sans doute les
deux aspects sont aussi importants l’un que l’autre, c’est pourquoi il est difficile de faire abstraction
de cette deuxieme conception du sujet qui n’en est qu’une parmi d’autres.

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Conclusion

Rechercher la généalogie précise d'un genre de musique est-il une utopie ou un objet de recherche ?
Lorsque que l'on s'attaque à un travail d'une aussi grande envergure, il faut apprendre à nuancer ces
propos et comprendre la caractéristique multi-factorielle d'un élément musical. De plus, il est
important de définir son objet de recherche, car le mot jazz ne résonne pas de la même maniere chez
tout le monde. Il évident que notre conception du mot jazz n'est pas la même que celle de Gerhard
Kubik. La premiere difficulté est que les origines africaines du jazz n'ont pas été enregistrées, même
si l'auteur se base sur des enregistrements, ces idées ne peuvent seulement rester théoriques.
L'auteur a tendance à réduire le jazz à une seule de ses dimensions. On peut même se demander si
les jazz men font vraiment référence à l’Afrique ou seulement à l'idée qu'ils s'en font.

« l’histoire du jazz n’est en aucun cas l’histoire d’une sophistication progressive au sens occidental du terme
[…] Au contraire, chaque révolution dans l’histoire du jazz […] est caractérisée par le fait que des traits
africains, longtemps en sommeil, refont surface ».

La critique principale est la maniere que l'auteur a d'essentialiser le jazz à la seule composante
africaine. Ses idées sont pertinentes au sein de sa sphere africaniste, mais comportent de nombreux
défauts lorsqu'on les confronte à d'autres univers. D'abord, les terminologies sont parfois floues, et
ne font pas vraiment référence à autre chose que son texte. L'exemple de l'utilisation du terme
‘harmonique homophonique', ou de son explication vague du systeme asymétrique explicite bien
mon propos. Avec le terme 'polymetre', je me suis même demandé si ces approximations n'étaient
pas dûes à une mauvaise traduction. De plus, certaines fautes décrédibilisent son propos, par
exemple quand il attribue Night In Tunisia, composé par Dizzy Gillespie, à Charlie Parker.

Le métissage / Dans les textes qui traitent de la question des origines du jazz, on trouve deux
positions classiques. L’une correspond à l’héritage des pratiques de la musique africaine et l’autre
défend des origines multiculturelles. Cette conception est présente dans le livre A trumpet around
the corner de Samuel Charters. Dans les premieres pages il expose justement les deux postulats
grâce aux deux citations ci-dessous :

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“. . . some of the bands—they call ’em Dixieland. They play little pieces, and
some of ’em have been listenin’ to the Negro musicians playin’ around—and
they put it together. And, it was just a little bit more organized. LaRocca.
He went up there (to the North). He wasn’t no great musician. He just played
a little straight horn, and I don’t think he could read much. But some of the
guys like Edwards, I think he was a fair musician. Larry Shields, he couldn’t
read much, but he had a nice tone. Ragas was one of them. They were a little
bit organized. They got their harmonizin’ voice—they got together. And they’re
the ones who put this stuff together, but it’s not the way we play it.

We will not attempt to establish finally who was the inventor of jazz. (Some
of our best friends have claimed this distinction.) Nor will we assert that we
know who were the first to play it. We feel it was not invented at all, but that it
came into being so gradually that any attempt to pin down a first time would
be based on the most specious type of reasoning. Credit for the creation of jazz
is due no individual man or race. If anything, it is a product, an inevitable
product we think, of the avenues and alleys of a unique city, polyglot, multiracial,
seething with love and conflict, a battleground of nations and cultures,
a landscape of mire and magnolias.”

Ce livre nous permet de comprendre la nature même du jazz qui a toujours été une musique de
métissage, dépendante des cultures dont elle se nourrit pour évoluer. En vérité, ce texte pose avec
précaution la question de l’identité du jazz, d’où vient-il et au regard de son passif où va-t-il ? Si
l’on considere que le jazz n’est pas mort, alors le jazz est beaucoup plus qu’une simple musique de
noir comme le texte de Gerhard Kubik le laisse entendre. En effet, d’autres critiques du texte de
Kubik fustigent la de discrimination de l’auteur envers les autres acteurs du jazz. Le jazz est un
genre qui se développe au XX°s durant une période marquée par la mondialisation. Le contexte est
tel qu’il permet l’ouverture des frontieres culturelles. Il y a bien sûr des phénomenes indésirables
avec des cultures écrasées par le poids de ce que l’on connait comme la culture de masse. Mais
l’histoire du jazz elle-même reflete l’accélération de cette mondialisation, et de ses effets dans son
évolution. Certaines esthétiques du jazz se développent par un métissage de plus en plus varié
facilité par ce phénomene social et technologique. En somme, le jazz a toujours été une musique de
métissage qui s’adapte à son temps et aux pratiques culturelles de celui qui se l’approprie. Laurent
Cugny également apporte quelques clefs permettant de cerner et définir ce qu’est le jazz dans son
livre Analyser le jazz. Parmi les premiers métissages du jazz, nous évoquerons la forme anatole

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(AABA) I got Rythm, qui est reprise de G. Gershwin. Mais nous pouvons remarquer à quel point le
jazz s’adapte encore aujourd’hui à travers l’appropriation et les arrangements des musiciens les plus
respectés actuellement dans le jazz. Ainsi, Brad Mehldau reprend les standards du rock comme
Smell like teen spirit de Nirvana, Paranoïd Androïd de Radiohead, Yaron Herman arrange Heart
Shaped Box de Nirvana dans son album « Follow the white rabbit ». Il existe de plus d’autres sortes
de métissage qui sont plus culturels et traversent les compositions de certains de ces artistes
respectés. Il sera préférable de n’en évoquer que deux, car là encore les exemples sont tres
nombreux. Nous pouvons commencer par évoquer Shadow Theater de Tigran Hamasyan qui est un
album presque conceptuel cathartique inspiré du théâtre d’ombre arménien. A travers ses
compositions le métissage est multiple, il mélange ainsi tant le langage du jazz dans les parties
improvisées que la tradition de la musique arménienne grâce à des mélodies traditionnelles et des
mesures impaires à souhait. Mais plus encore il s’approprie entierement toute une multitude de
possibilités sonores par l’utilisation de claviers numériques et de toutes sortes d’effets.

Le deuxieme exemple est celui de John Zorn et de son projet Masada à travers lequel il cherche à
redorer l’héritage culturel juif. Le Book of Angels représente une autre sorte de métissage
particulier. John Zorn se sert du fonctionnement élémentaire des standards du jazz pour développer
un répertoire des standards de la musique juive. Dans Book of Angels, il confie ses compositions
aux musiciens proches de son entourage, Marc Ribot, David Krakauer, Jamie Saft, etc… La forme
des arrangements présentés tout au long de ces albums est tres simple, exposition, chorus et
réexposition. Pour autant les albums ne se ressemblent pas les uns les autres car encore une fois, la
direction de chacun d’eux est confiée à un ensemble, un leader différent, et pour ainsi dire des
affinités musicales parfois radicalement éloignées. Dans ce projet, Zorn s’empare d’un
fonctionnement et d’une part du langage du jazz dans l’improvisation. Bien entendu, il est possible
de proposer une quantité d’exemples infinis pour démontrer que le jazz est l’objet de métissage
continu depuis son origine. Ceux qui sont proposés ici ouvrent la voie de ce que peut également être
le jazz et qui n’est pas du tout abordé dans l’article de Gerhard Kubik.

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Références

Références sitographiques :
- http://www.afropop.org/10312/scholar-gerhard-kubik/, consulté le 1 décembre 2016
- http://saoas.org/oldsite/bettermann/symposium00/index_sympos00.htm, consulté le 1 décembre
2016
- https://soundcloud.com/afropop-worldwide/africa-and-the-blues, consulté le 1 décembre 2016
- http://sp-ce.net/sual/2014/press_en.htm, consulté le 1 décembre 2016

Références bibliographiques :
- CHARTERS Samuel, A trumpet around the corner, Univ. Press of Mississippi, 2008
- KUBIK Gerhard, Africa and the Blues, Roundhouse Publishing, 2008
- NATTIEZ Jean-Jacques, dir. : Musiques - Une encyclopédie pour le XXIe siecle, Actes
Sud/Paris : Cité de la Musique, 2003

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