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CO N S T R U C T I O N E T T R AVAU X P U B L I C S

Ti253 - Les superstructures du bâtiment

Méthodes de calcul
et conception

Réf. Internet : 42825 | 2nde édition

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Les superstructures du bâtiment
(Réf. Internet ti253)
composé de  :

Méthodes de calcul et conception Réf. Internet : 42825

Les matériaux de construction Réf. Internet : 42224

Les bétons dans la construction Réf. Internet : 42221

Béton armé et béton précontraint Réf. Internet : 42223

Construction métallique Réf. Internet : 42230

Constructions mixtes - Constructions souples Réf. Internet : 42231

Construction bois Réf. Internet : 42824

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Les superstructures du bâtiment
(Réf. Internet ti253)

dont les exper ts scientifiques sont  :

Jean-Pierre MUZEAU
Ancien enseignant à Polytech' Clermont-Ferrand, Président de l'APK, Directeur
scientifique du CHEC

Frédéric RAGUENEAU
Directeur du Laboratoire de Mécanique et Technologie de l'ENS Cachan

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Jean-Armand CALGARO Stéphane GRANGE


Pour l’article : C60 Pour l’article : C6002

Alaa CHATEAUNEUF Panagiotis KOTRONIS


Pour les articles : C6003 – C6004 Pour l’article : C6002

Danielle CLAVAUD Maurice LEMAIRE


Pour les articles : C3305 – C3306 Pour les articles : BM5003 – BM5004

Irénée CORNATON Yves MORTUREUX


Pour l’article : AF1681 Pour l’article : BM5008

Denis DAVI André PLUMIER


Pour l’article : C249 Pour les articles : C3290 – C3291 –
C2559 – C2569
Alain GIRARD
Pour l’article : B5150 Benjamin RICHARD
Pour les articles : C6001 – C6005
Cédric GIRY
Pour les articles : C6001 – C6005

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VI
Méthodes de calcul et conception
(Réf. Internet 42825)

SOMMAIRE

1– Méthodes iabilistes en construction Réf. Internet page

Normes du bâtiment et des travaux publics. Base iabiliste des Eurocodes C60 11

Approche probabiliste du dimensionnement. Modélisation de l'incertain et méthode BM5003 17


de Monte-Carlo
Approche probabiliste du dimensionnement. Modélisation de l'incertain et méthodes BM5004 21
d'approximation
La sûreté de fonctionnement : méthodes pour maîtriser les risques BM5008 25

2– Eurocode 1 Réf. Internet page

Charges de neige sur les constructions selon l'Eurocode 1- Partie 1-3 C3305 31

Actions du vent sur les bâtiments selon l'Eurocode 1 - Partie 1-4 C3306 35

3– Règles antisismiques Réf. Internet page

Conception et dimensionnement parasismiques des ponts selon l'EC8-2 C249 47

Seismes et bâtiments. Analyse des constructions C3290 53

Séismes et bâtiments. Conception et normes parasismiques C3291 59

Constructions parasismiques en acier. Contexte de l'Eurocode 8 C2559 69

Constructions parasismiques mixtes acier-béton. Contexte de l'Eurocode 8 C2569 75

4– Méthode de calcul non linéaire Réf. Internet page

Dynamique des structures. Techniques d'analyse et d'essai B5150 83

Ampliication dynamique dans le calcul de structures AF1681 89

La méthode des éléments inis - Calcul non-linéaire géométrique C6003 95

La méthode des éléments inis - Calcul non-linéaire matériel C6004 101

Méthodes simpliiées pour le calcul non-linéaire de structures de génie civil C6002 107

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VII
Apports des lois constitutives non-linéaires en génie civil. Problématiques et enjeux C6001 111

Lois de comportement en calcul de structures. Identiication et utilisation C6005 117

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Méthodes de calcul et conception
(Réf. Internet 42825)


1– Méthodes iabilistes en construction Réf. Internet page

Normes du bâtiment et des travaux publics. Base iabiliste des Eurocodes C60 11

Approche probabiliste du dimensionnement. Modélisation de l'incertain et méthode BM5003 17


de Monte-Carlo
Approche probabiliste du dimensionnement. Modélisation de l'incertain et méthodes BM5004 21
d'approximation
La sûreté de fonctionnement : méthodes pour maîtriser les risques BM5008 25

2– Eurocode 1

3– Règles antisismiques

4– Méthode de calcul non linéaire

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Normes du bâtiment
et des travaux publics
Base fiabiliste des Eurocodes

par Jean-Armand CALGARO
Ingénieur Général des Ponts, des Eaux et des Forêts
Professeur au Centre des Hautes Études de la Construction (CHEC)
Membre permanent du Conseil général de l’Environnement et du Développement Durable

Note de l’éditeur
Cet article est la réédition actualisée de l’article [C 60] intitulé « Eurocodes – Codes
européens de conception des constructions » paru en 2004 et rédigé par Philippe BISCH et
Jean-Armand CALGARO

1. Eurocodes : ce qu’il faut retenir .................................................. C 60v2 – 4


1.1 Genèse et élaboration des Eurocodes ............................................... — 4
1.2 Textes européens relatifs aux produits de construction ................... — 4
1.3 Application des Eurocodes au niveau national ................................. — 5
1.4 Eurocodes et annexes nationales ...................................................... — 6
1.4.1 Objectifs de la normalisation .................................................. — 6
1.4.2 Annexes nationales ................................................................. — 6
1.5 Eurocodes et réglementation nationale ............................................ — 7
1.5.1 Risque sismique ...................................................................... — 7
1.5.2 Risque lié aux incendies .......................................................... — 7
1.6 Mandats de la CE et développements futurs .................................... — 7
1.7 Exigences expresses en conception et calcul des constructions ..... — 9
2. Bases fiabilistes des Eurocodes ................................................... — 10
2.1 Fiabilité des constructions ................................................................. — 10
2.1.1 Contexte ................................................................................... — 10
2.1.2 États limites ............................................................................. — 13
2.1.3 Quantification de la fiabilité des constructions ...................... — 14
2.1.4 Optimisation et critères socio-économiques en fiabilité ....... — 17
2.1.5 Format des Eurocodes du point de vue de la fiabilité ........... — 19
2.1.6 Valeurs numériques codifiées ................................................. — 25
2.1.7 Méthodes de calibration des coefficients partiels .................. — 25
2.1.8 Contenu des principales valeurs numériques codifiées ........ — 26
2.2 Conclusion .......................................................................................... — 28
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 60v2

n 1950, la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) enga-


E gea un processus d’unification des pays européens, à la fois politiquement
et économiquement, pour assurer une paix durable. Les six pays fondateurs
étaient : la Belgique, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Luxembourg et les
Pays-Bas. En 1957, le traité de Rome donna naissance à la Communauté écono-
mique européenne (CEE), dont les fondateurs étaient une poignée d’idéalistes.
Le développement d’un ensemble complet de normes européennes pour
l’industrie de la construction, et plus particulièrement les Eurocodes, est égale-
ment le résultat d’idées exprimées par des experts « visionnaires ». Les Euroco-
des sont, en premier lieu :
p。イオエゥッョ@Z@ョッカ・ュ「イ・@RPQS

– un vocabulaire ;
– un lexique ;

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NORMES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

– des formules ;
– des phrases ;
– des modèles de pensée ;
– des unités de mesure ;
– des symboles ;
– des valeurs sociales communes.
Pourquoi tous les acteurs de l’industrie de la construction sont-ils si intéres-


sés par les Eurocodes ? Pourquoi la rédaction de nouvelles normes a-t-elle été
si fortement encouragée ? De nombreuses raisons peuvent être citées : la nor-
malisation est le meilleur outil pour assurer aux constructions le respect des
exigences traditionnelles fondamentales que sont la sécurité, la sûreté et une
durée de service satisfaisante. Mais également, pour obtenir des ouvrages
répondant aux exigences de la société actuelle, sensible aux questions de déve-
loppement durable.
L’architecte romain Vitruve écrivit un traité (« De architectura »), probable-
ment vers 25 av. J.C., couvrant, en dix chapitres (ou livres), pratiquement tous
les aspects de l’architecture et de l’ingénierie romaines. Il était dédié à l’empe-
reur romain César Auguste comme un guide pour les projets de constructions.
Cette œuvre est l’une des plus importantes sources de la connaissance
moderne des méthodes de conception et de calcul des petites et grandes cons-
tructions romaines.
Le livre « De architectura » est-il le premier code de conception et de calcul
pour les constructions ? Probablement pas, car un code de conception et de
calcul n’est pas un cours : il doit être complété par des cours, des guides, des
traités, etc. Néanmoins, il fut considéré pendant de nombreux siècles comme le
document de référence des architectes et des ingénieurs. Les normes moder-
nes, et les Eurocodes en particulier, sont aujourd’hui les documents de réfé-
rence pour l’activité de construction. Le but du présent article est de fournir
quelques clés afin de mieux comprendre la nature des exigences sur lesquelles
ils sont fondés.

Abréviations utilisées pour les Eurocodes


Abréviations Désignation

Anglais Transcription en français Anglais Français

CPD DPC Construction Products Directive Directive produits de construction

PPD DMP Public Procurement Directive Directive marchés publics

Standing Committee on Construction Comité permanent de la construction


SCC CPC
(articles 19 and 20 of the CPD) (articles 19 et 20 de la DPC)

EC CE European Commission or Eurocode Commission européenne

EU UE European Union Union européenne

ENV ENV European pre-standard Norme européenne provisoire

Version of Eurocode published by CEN as a Version d’Eurocode publiée par le CEN


ENV Eurocode ENV Eurocode pre-standard ENV (for subsequent comme norme provisoire (destinée à
conversion into EN) devenir une norme EN)

National Application Document for the use Document d’application nationale d’une
NAD DAN
of an ENV Eurocode at the National level norme ENV au niveau national

EN EN European standard Norme européenne

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– NORMES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS

Abréviations utilisées pour les Eurocodes (suite)

Abréviations Désignation

Anglais Transcription en français Anglais Français

Version of Eurocode approved by CEN as a Version d’un Eurocode approuvée par le


EN Eurocode EN Eurocode


European standard CEN en tant que norme européenne

Harmonised European standard for a Norme européenne harmonisée pour un


hEN hEN construction product (to enable CE produit de construction (permettant le
Marking) marquage CE)

NDP PDN Nationally Determined Parameter Paramètre déterminé au niveau national

DAV Date of availability of the EN standard Date de mise à disposition de la norme EN

Date of withdrawal of a conflicting national Date de retrait d’une norme nationale


DoW
standard contradictoire

CEN CEN European Standardisation Organisation Comité européen de normalisation

CEB Euro-International Committee for Concrete Comité euro-international du béton

CIB International Committee for buildings Comité international du bâtiment

European Convention for constructional Convention européenne de la construction


ECCS CECM
steel work métallique

CEN/TC CEN Technical Committee Comité technique du CEN

CCMC CEN-CENELEC Management Centre Centre de gestion du CEN-CENELEC

Organisme national de normalisation


NSB National Standards Body (CEN Member)
(membre du CEN)

AFNOR French standardization body Association française de normalisation

European Organisation for Technical Organisme européen d’agrément technique


EOTA OEAT
Approval (article 9.2 of the CPD) (article 9.2 de la DPC)

ETA ATE European Technical Approval Agrément technique européen

ETAG GATE European Technical Approval Guideline Guide d’agrément technique européen

fib International federation for concrete Fédération internationale du béton

Organisation internationale de
ISO ISO International standard organisation
normalisation

Joint Research Centre (Ispra, Italy) Centre commun de recherche (Ispra, Italie)
JRC CCR
http://eurocodes.jrc.ec.europa.eu http://eurocodes.jrc.ec.europa.eu

JCSS Joint Committee on Structural Safety

EEA EEE European Economic Area Espace économique européen

EFTA AELE European Free Trade Association Association européenne de libre-échange

SC (Eurocodes) SC Sub-Committee (Eurocodes) Sous-comité (Eurocodes)

WG GT Working Group Groupe de travail

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NORMES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

1. Eurocodes : ce qu’il faut  L’importance du projet « Eurocodes » confère au comité tech-


nique « Eurocodes structuraux CEN/TC 250 » une place particu-
retenir lière dans la normalisation européenne. Ainsi, les comités techni-
ques « produits » doivent se mettre en relation avec le CEN/TC 250
pour tout projet relatif au calcul structural (résolution du BTS 1 –
Bureau technique sectoriel n 1 du CEN – novembre 1992).
1.1 Genèse et élaboration des Eurocodes
 Les outils du CEN ont été adaptés à la spécificité du projet.


La première directive européenne sur les marchés publics de tra- L’examen systématique des Eurocodes a été lancé en fin 2013.
vaux fut publiée en 1971. Mais sa mise en application, en ce qui Le CEN/TC 250 est mobilisé depuis 2010 pour préparer cet exa-
concerne les règles de calcul, se révéla pratiquement impossible men, ainsi que pour fournir les éléments de la réponse du CEN
du fait d’une disposition interdisant, lors d’un appel d’offres, au Mandat de programmation M/515 (daté du 12 décembre
d’écarter une proposition pour le simple motif qu’elle aurait été 2012), émis par la Commission européenne en vue d’accompa-
basée sur une méthode de calcul admise dans un pays différent gner l’élaboration des Eurocodes de seconde génération.
de celui dans lequel se déroulait l’appel d’offres. Il fut donc décidé,  La publication des Eurocodes de nouvelle génération est
dès 1976, d’entreprendre la rédaction de codes de conception et de prévue au-delà de 2015 ; elle ne devrait être effective qu’à partir
calcul européens. Constituant un ensemble cohérent et harmonisé de 2020.
de codes de conception et de calcul des ouvrages de bâtiment et de
génie civil, ils étaient fondés sur les travaux des associations scien-
tifiques et techniques internationales, et constituaient une base D’autres travaux relatifs au « Calcul des structures » sont conduits
reconnue pour le jugement d’appels d’offres. Ils étaient destinés à au plan international, essentiellement dans le comité technique
devenir des normes européennes (EN). « Bases du calcul des constructions » ISO/TC 98. Même sans partici-
pation française directe aux réunions ISO, le suivi de ces travaux
& Au début des années 1980, les premiers textes furent publiés, à
ISO reste important, eu regard, à la fois à la nécessité de conserver
titre provisoire, sous l’égide de la Commission des communautés une cohérence d’ensemble, et au positionnement des Eurocodes
européennes. On les appela, dès cette époque : « Eurocodes ». parmi les règles de calcul des structures au plan international.
Ils furent ensuite l’objet d’enquêtes internationales approfondies
L’AFNOR assure la coordination au plan national de la participa-
qui arrivèrent à leur terme, pratiquement au moment où fut signé
tion française et du suivi de ces structures CEN et ISO. La commis-
l’Acte unique européen (1986), dont l’objet était de modifier et com-
sion française « Coordination Eurocodes structuraux – Miroir du
pléter le traité de Rome, en particulier, en affinant les procédures de
CEN/TC 250 » est la commission AFNOR/P06E.
décision (vote à la majorité qualifiée). Les directives communautai-
res, dites directives « nouvelle approche », ne s’attachèrent alors Les présidents du CEN/TC 250 ont été successivement : le Dr.
qu’à définir des exigences essentielles, en laissant le soin à des Günther Breitschaft (D – 1989-1993), le Dr. David Lazenby (UK –
organismes reconnus d’établir des normes en conformité avec ces 1993-2000), le Prof. Horst Bossenmayer (D – 2000-2007), le Dr.
exigences. Jean-Armand Calgaro (F – 2007-2013), le Dr. Steve Denton (UK)
depuis le 01/07/2013.
C’est à la Directive 89/106/CEE (dite « Directive produits de
construction » – DPC), adoptée le 21 décembre 1988 et transpo-
sée en droit français par le décret 92-647 du 8 juillet 1992, que 1.2 Textes européens relatifs aux produits
les Eurocodes furent rattachés (voir « Réglementation » dans le
Pour en savoir plus).
de construction
& Le Comité européen de normalisation (CEN) fut chargé, en 1990, La Directive produits de construction (DPC) définit, dans son
de transformer les Eurocodes de première génération en normes Annexe 1, les six exigences essentielles suivantes :
européennes, et de les publier progressivement. D’abord en tant Les produits de construction doivent permettre d’ériger des
que normes européennes provisoires (ENV), puis en tant que nor- ouvrages qui, compte tenu des aspects économiques, soient (dans
mes européennes définitives (EN). leur ensemble et dans leurs parties) aptes à l’usage et qui, à cet
égard, remplissent les exigences essentielles indiquées ci-dessous
& L’adoption par le CEN de la première génération complète lorsqu’elles existent. Sous réserve d’un entretien normal des ouvra-
d’Eurocodes fut réalisée en mai 2007. ges, ces exigences doivent être respectées pendant une durée de
Le succès de ces normes dans de nombreux pays hors de l’UE vie raisonnable du point de vue économique. En règle générale,
témoigne de leur qualité technique. De plus, le coût de leur déve- elles supposent que les actions qui s’exercent sur l’ouvrage aient
loppement (sans parler du coût de la formation et du coût de la un caractère prévisible.
transformation des logiciels de calcul de structures) fut tel qu’au- 1. Résistance mécanique et stabilité
cun pays n’a pu, à lui seul, se lancer dans la rédaction d’un
ensemble équivalent de normes, complet et moderne (5 320 pages 2. Sécurité en cas d’incendie
environ, en version originale de langue anglaise, indépendamment 3. Hygiène, santé et environnement
des Annexes nationales et autres normes d’accompagnement).
4. Sécurité d’utilisation
& Dans tous les pays de l’UE, les Eurocodes ont remplacé les nor-
5. Protection contre le bruit
mes nationales contradictoires le 1er avril 2010. De plus, en France
et sur le plan réglementaire, les Eurocodes ont été (après un délai 6. Économie d’énergie et isolation thermique
de recouvrement avec les normes nationales existantes), imposés La Directive produits de construction fut abrogée par la posi-
par des textes (voir § 1.2). tion du Parlement européen arrêtée le 18 janvier 2011 en vue de
Une des conséquences de la mise en application des Eurocodes l’adoption du règlement (UE) du Parlement européen et du
fut, et est toujours, le montage de programmes de formation, tant Conseil, établissant des conditions harmonisées de commerciali-
au niveau national qu’au niveau international. Avec, dans ce der- sation pour les produits de construction (RPC). Entre autres cho-
nier cas, le concours de la Commission européenne (en particulier ses, ce règlement clarifie la portée juridique du marquage CE des
du CCR – Centre commun de recherches d’Ispra). produits de construction.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– NORMES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS

Dans l’article 3 de ce texte, on peut lire : Les normes « Eurocodes » ont donc été élaborées dans le but :
Exigences fondamentales applicables aux ouvrages de construc- – de favoriser le développement du marché unique pour les pro-
tion et caractéristiques essentielles des produits de construction. duits et les services d’ingénierie ;
1. Les exigences fondamentales applicables aux ouvrages de – de supprimer les obstacles dus à des pratiques nationales codi-
construction énoncées à l’annexe I constituent la base pour l’élabo- fiées différentes pour l’évaluation de la fiabilité structurale ;
ration des mandats de normalisation et des spécifications techni- – d’améliorer la compétitivité de l’industrie européenne de la
ques harmonisées. construction, ainsi que des professions et industries connexes
dans les pays situés en dehors de l’Union européenne.
2. Les caractéristiques essentielles des produits de construction
sont établies dans les spécifications techniques harmonisées en
fonction des exigences fondamentales applicables aux ouvrages
de construction.
Les Eurocodes, comme les autres normes, sont, a priori, d’appli-
cation volontaire. Toutefois, ils constituent un référentiel profession-
nel reconnu et participent à la clarification des règles du marché. Ils

et dans l’Annexe I : forment dix groupes de textes (58 parties en tout) couvrant les
aspects techniques du calcul des structures et du calcul au feu des
Exigences fondamentales applicables aux ouvrages de construction.
bâtiments. Ils constituent un ensemble cohérent de textes fondés
Les ouvrages de construction dans leur ensemble, de même que sur les concepts semi-probabilistes de sécurité des constructions,
leurs parties, doivent être aptes à leur usage prévu, compte tenu et adoptent un format de justification unifié pour toutes les cons-
notamment de la santé et de la sécurité des personnes concernées tructions (cf. § 1.7). Ils ne sont pas censés couvrir complètement la
tout au long du cycle de vie des dits ouvrages. Sous réserve d’un conception et le calcul d’ouvrages de taille, ou de forme, exception-
entretien normal, les ouvrages de construction doivent satisfaire aux nelles (voir Nota) (barrages, centrales nucléaires, etc.) ou de cons-
exigences fondamentales applicables aux ouvrages de construction tructions utilisant des matériaux nouveaux. Ils n’ont pas été rédigés
pendant une durée de vie raisonnable du point de vue économique. dans le but d’évaluer des ouvrages existants et ne fournissent pas
1. Résistance mécanique et stabilité de règles de justification spécifiques pour les renforcements, les
2. Sécurité en cas d’incendie réparations (sauf dans le cas des bâtiments en zone sismique), ou
en cas de modification des conditions d’exploitation d’un ouvrage.
3. Hygiène, santé et environnement Cependant, le champ d’application de la norme NF EN 1990 couvre
4. Sécurité d’utilisation et accessibilité le calcul des structures non traitées dans les autres Eurocodes, dans
lesquelles interviennent des matériaux ou des actions non pris en
5. Protection contre le bruit
compte par ceux-ci, et s’étend à l’évaluation structurale de construc-
6. Économie d’énergie et isolation thermique tions existantes. Le tout en vue de projeter des réparations et des
7. Utilisation durable des ressources naturelles modifications ou d’étudier des changements d’utilisation, même si
des dispositions additionnelles ou modifiées pourront se révéler
Le RPC fixe donc, en particulier, une septième exigence fonda- nécessaires selon le cas (article 1.1 de la norme).
mentale par rapport à la DPC, concernant l’utilisation durable des
ressources naturelles. Cette exigence est développée de la façon Nota L’expression « forme exceptionnelle » n’est pas parfaitement précise. En réalité, il
s’agit de mentionner que certains ouvrages nécessitent des spécifications de projet com-
suivante : plémentaires par rapport aux spécifications indiquées dans les Eurocodes.
Les ouvrages de construction doivent être conçus, construits et Les Eurocodes NF EN de première génération (version 2007) sont
démolis de manière à assurer une utilisation durable des ressour- indiqués au tableau 1 (normes EN ou normes transposées en
ces naturelles et, en particulier, à permettre : France avec le symbole NF EN).
a) la réutilisation ou la « recyclabilité » des ouvrages de construc- Les liens entre eux sont représentés sur la figure 1.
tion, de leurs matériaux et de leurs parties après démolition ;
b) la durabilité des ouvrages de construction ;
Tableau 1 – Eurocodes NF EN de 1re génération (version
c) l’utilisation, dans les ouvrages de construction, de matières
premières primaires et secondaires respectueuses de 2007)
l’environnement.
Normes Correspondances
Cette réglementation est entrée pleinement en application au
1er juillet 2013.
NF EN 1990 Eurocode : Bases de calcul des stuctures

1.3 Application des Eurocodes au niveau NF EN 1991 Eurocode 1 : Actions sur les structures
national NF EN 1992 Eurocode 2 : Calcul des structures en béton
Dans la préface de la version de première génération de chaque
partie d’Eurocode, il est rappelé que les États Membres de l’UE NF EN 1993 Eurocode 3 : Calcul des structures en acier
(Union européenne) et de l’AELE (Association européenne de libre-
échange) les reconnaissent en tant que documents de référence Eurocode 4 : Calcul des structures mixtes
NF EN 1994
pour les usages suivants : acier-béton
– moyen de prouver la conformité des bâtiments et des ouvrages NF EN 1995 Eurocode 5 : Calcul des structures en bois
de génie civil aux exigences essentielles de la directive 89/106/CEE,
en particulier à l’exigence essentielle n 1 – Stabilité et résistance NF EN 1996 Eurocode 6 : Calcul des structures en maçonnerie
mécanique – et à l’exigence essentielle n 2 – Sécurité en cas
d’incendie ; certains Eurocodes stipulent des exigences qui peuvent NF EN 1997 Eurocode 7 : Calcul géotechnique
être rattachées à l’exigence essentielle n 4 ;
– base de spécification des contrats pour les travaux de construc- Eurocode 8 : Calcul des structures pour leur
tion et les services techniques associés ; NF EN 1998
résistance au séisme
– cadre d’établissement de spécifications techniques harmoni-
sées pour les produits de construction (EN et ATE – Normes euro- NF EN 1999 Eurocode 9 : Calcul des structures en aluminium.
péennes et Agréments techniques européens).

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NORMES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Sécurité structurale,
Aptitude au service,
EN 1990 Durabilité et robustesse –
Combinaisons d’actions

EN 1991 Actions sur les structures


EN 1992 EN 1993 EN 1994 Conception, calcul et
EN 1995 EN 1996 EN 1999 dispositions constructives

EN 1997 EN 1998 Calcul géotechnique et


conception parasismique
Actions géotechniques et
sismiques

Figure 1 – Les Eurocodes (version globale 2007) et leurs liens réciproques

1.4 Eurocodes et annexes nationales


1.4.1 Objectifs de la normalisation
Selon l’article 1 du décret français n 2009-697 du 16 juin 2009
relatif à la normalisation :
« La normalisation est une activité d’intérêt général qui a pour
objet de fournir des documents de référence élaborés de manière
consensuelle par toutes les parties intéressées, portant sur des
règles, des caractéristiques, des recommandations ou des exem-
ples de bonnes pratiques, relatives à des produits, à des services,
à des méthodes, à des processus ou à des organisations. Elle vise
à encourager le développement économique et l’innovation tout en
prenant en compte des objectifs de développement durable. »
En bref, une norme :
– est un outil de spécification, utilisant un langage connu et
reconnu, assurant donc les exigences d’ouverture et de transparence ;
– codifie l’état de la technique et permet ainsi un achat public
plus rationnel.
Toutefois, une norme ne se substitue pas au prescripteur qui
analyse et formule ses besoins.
De façon à pouvoir prendre en compte certaines particularités Régions : A1 A2 B1 B2 C1 C2 D E
nationales (par exemple, particularités géographiques et/ou climati- Valeur caractéristique (Sk) de la charge de neige sur le sol
à une altitude inférieure à 200 m : 0,45 0,45 0,55 0,55 0,65 0,65 0,90 1,40
ques), une certaine souplesse a été introduite dans les Eurocodes Valeur de calcul (SAd) de la charge exceptionnelle de neige
en laissant aux États-membres du CEN la possibilité d’effectuer cer- sur le sol : — 1,00 1,00 1,35 — 1,35 1,80 —
tains choix nationaux, dans le cadre d’une liste précise de paramè- Loi de variation de la charge caractéristique pour une altitude Ds1 Ds2
supérieure à 200 :
tres appelés « Paramètres à détermination nationale » (NDP abré-
(charges en KN/m2)
viation en langue anglaise). Les choix nationaux sont précisés
Altitude A Ds1 Ds2
dans une norme nationale, appelée annexe nationale, accompa-
gnant chaque partie d’Eurocode (figure 2). de 200 à 500 m A/1000 - 0,20 1,5 A/1000 - 0,30
de 500 à 1000 m 1,5 A/1000 - 0,45 3,5 A/1000 - 1,30
de 1000 à 2000 m 3,5 A/1000 - 2,45 7 A/1000 - 4,90
1.4.2 Annexes nationales
Les annexes nationales sont des normes nationales. La figure 3 Figure 2 – Exemple de carte des hauteurs de neige dans l’Annexe
illustre la transposition des normes européennes en normes nationale française de la norme NF EN 1991-1-3
nationales.
Dans la préface de chaque Partie d’Eurocode, il est rappelé que : National, à utiliser pour les projets de bâtiments et ouvrages de
génie civil à construire dans le pays concerné ; il s’agit :
L’Annexe Nationale peut seulement contenir des informations
sur les paramètres laissés en attente dans l’Eurocode pour choix – de valeurs et/ou des classes là où des alternatives figurent dans
national, sous la désignation de Paramètres Déterminés au niveau l’Eurocode ;

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Approche probabiliste
du dimensionnement
Modélisation de l’incertain Q
et méthode de Monte-Carlo
par Maurice LEMAIRE
Professeur émérite à l’Institut français de mécanique avancée
Conseiller scientifique de Phimeca Engineering

1. Approche probabiliste de l’incertain ................................................. BM 5 003v2 - 2


1.1 Introduction ................................................................................................. — 2
1.2 Principes de rédaction ................................................................................ — 2
1.3 Vaincre une inertie culturelle ..................................................................... — 3
1.4 Modélisation de l’incertain......................................................................... — 4
1.5 Principe de dimensionnement ................................................................... — 5
1.6 Conclusion ................................................................................................... — 6
2. Modèle stochastique des variables de conception........................ — 6
2.1 Modèle stochastique................................................................................... — 6
2.2 Quelques lois de probabilité ...................................................................... — 8
2.3 Analyses de sensibilité et de fiabilité ........................................................ — 10
2.4 Conclusion ................................................................................................... — 11
3. Méthode de Monte-Carlo....................................................................... — 12
3.1 Échantillon d’une variable aléatoire de loi donnée.................................. — 12
3.2 Simulation de Monte-Carlo ........................................................................ — 13
3.3 Illustration : système de deux barres ........................................................ — 14
3.4 Conclusion ................................................................................................... — 15
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. BM 5 003v2

’art du concepteur consiste à proposer une solution technique qui satisfait


L aux exigences fonctionnelles et qui garantit la sécurité vis-à-vis des biens,
des personnes et de l’environnement. Les exigences fonctionnelles doivent
s’assurer du bon fonctionnement des systèmes considérés, et parmi celles-ci
de la fiabilité, c’est-à-dire de l’aptitude d’un dispositif à accomplir une fonction
requise dans des conditions données, pendant une durée donnée. Le rôle du
concepteur est alors de dimensionner de manière optimale en justifiant une
fiabilité suffisante en fonction des risques, c’est-à-dire des conséquences
redoutées par l’occurrence d’un événement indésirable : une fiabilité absolue
ne peut pas exister et il subsiste toujours une possibilité d’échec. On peut dire
aujourd’hui que le principe de précaution ne consiste qu’en la démonstration
que toutes les connaissances actuelles ont été mises en œuvre pour que le
gain obtenu par le succès du dispositif soit suffisant pour accepter le coût de
l’échec éventuel dû à son dysfonctionnement.
Ces quelques lignes situent le cadre de la démarche : elle propose une
approche de la fiabilité théorique des systèmes mécaniques mais il faut noter
qu’elle est susceptible d’applications dans bien d’autres domaines. Par fiabilité
p。イオエゥッョ@Z@。カイゥャ@RPQT

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie


est strictement interdite. – © Editions T.I. BM 5 003v2 – 1

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APPROCHE PROBABILISTE DU DIMENSIONNEMENT _______________________________________________________________________________________

théorique, il faut comprendre tout ce que la modélisation permet de simuler


pour prévoir les comportements possibles. Elle complète la fiabilité pratique
qui est assimilée à la démarche qualité : la fiabilité théorique est conditionnée
par la fiabilité pratique, par l’assurance qualité. Concevoir un système mécanique
et calculer ses paramètres constituent une recherche d’un dimensionnement
dont il faut justifier la fiabilité.
Ce dossier est divisé en deux articles. Le premier [BM 5 003] traite de la
Q modélisation de l’incertain à travers les notions nécessaires de probabilités et
de la statistique. Il vise à convaincre de la nécessité d’une approche probabi-
liste en conception mécanique et il est illustré par la méthode de Monte-Carlo.
Le deuxième [BM 5 004] s’intéresse aux méthodes d’approximation résistance
– contrainte, dont le schéma élémentaire est généralisé, et aux méthodes par
indices de fiabilité. Il montre comment utiliser les résultats d’analyses mécano-
fiabilistes comme aide à une conception fiable. Un exemple simple est mis en
œuvre pour illustrer les concepts. Il ouvre enfin sur quelques perspectives.

1. Approche probabiliste cette raison qu’elle est qualifiée de probabilité notionnelle. De


plus, il ne s’agit pas du seul résultat recherché et d’autres produits
de l’incertain de l’analyse – les facteurs d’importance – ont un rôle essentiel
pour la conception par et pour la fiabilité.
L’approche probabiliste de l’incertain n’est cependant pas la
1.1 Introduction seule possible car elle exige un niveau d’information suffisant pour
construire le modèle. Le lecteur intéressé pourra consulter
Au cours de l’histoire, les essais et les erreurs ont apporté une l’ouvrage [5] qui examine le lien entre connaissance, modèle et
première réponse au dimensionnement dans l’incertain, au prix décision. Il ouvre sur de nombreuses autres méthodologies.
parfois de catastrophes. Puis la modélisation des comportements a
construit des outils de prévision introduisant tout à la fois des
écarts entre le modèle et la physique et des incertitudes sur les En résumé :
données. Pour en tenir compte, les concepteurs ont capitalisé – chaque fonction d’un système mécanique est représentée
l’expérience des constructeurs transcrite dans des codes, des nor- par un modèle déterministe prévisionnel théorique et numéri-
mes ou des règlements ; l’application de formules contenant des que du comportement ;
coefficients dits de sécurité laissant croire alors que leur respect – les données des modèles sont des variables aléatoires et en
garantissait la fiabilité. Il est vrai que celle qui en résulte est très conséquence les sorties le sont aussi ;
généralement satisfaisante mais elle n’est ni mesurée, ni quanti- – des combinaisons des données et des sorties traduisent
fiée. des performances. La probabilité de ne pas satisfaire à une per-
Une première approche consiste à poser des barrières : prévoir formance est appelée probabilité de défaillance et notée Pf .
que jamais un besoin (généralement une sollicitation) ne sera La mécanique, comme plus généralement la physique mais
supérieur à une ressource (généralement une résistance), mais aussi notre vie quotidienne, est plongée dans l’incertain modé-
c’est admettre la certitude des bornes ainsi introduites et, même lisé ici par une approche probabiliste. L’objectif de ce dossier
ainsi, le coût peut se révéler très élevé. Si chaque paramètre ne est de montrer comment maîtriser cet incertain.
peut pas être caractérisé par une borne inférieure ou supérieure
selon son rôle, l’étape suivante consiste à le caractériser sur un
intervalle : une valeur inférieure, une valeur supérieure et une
valeur modale intermédiaire. Ce pourrait être un nombre flou
1.2 Principes de rédaction
mais le choix retenu ici est celui d’une variable aléatoire qui
■ Les principes évoqués dans le paragraphe 1.1 conduisent à des
s’appuie sur la théorie des probabilités maintenant bien établie.
approches pouvant être très complexes en fonction des hypothè-
La difficulté est alors de représenter chaque paramètre de
conception par une variable aléatoire et le gain est d’obtenir une ses retenues. Les deux articles sont nécessairement limités en ce
description probabiliste des variables de sortie du modèle méca- qui concerne :
nique. Ainsi, il apparaît naturel de définir la fiabilité comme une – le facteur temps qui intervient soit à travers l’évolution des
probabilité de succès. Toutefois, la quantité retenue par la suite paramètres soit par les effets dynamiques. Il est ignoré ici et cha-
est la probabilité de défaillance, celle de l’événement : {le sys- que situation est considérée à un instant donné. C’est l’approche
tème mécanique ne fonctionne pas}, notée Pf où l’indice f rap- time invariant de la littérature ;
pelle le mot anglais failure. – le traitement simultané de plusieurs performances dans une
Mais attention, si la notion de probabilité de défaillance est composition série ou parallèle ;
essentielle du point de vue conceptuel, il faut bien noter qu’il s’agit – la modélisation numérique. Des méthodes d’éléments finis sto-
d’une probabilité conditionnée par le modèle stochastique des chastiques sont proposées dans la littérature et sont présentées
données et en aucun cas d’une probabilité absolue : c’est pour dans l’article [BM 5 005].

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_______________________________________________________________________________________ APPROCHE PROBABILISTE DU DIMENSIONNEMENT

Les méthodes de fiabilité, fondées sur les probabilités, possè-


La rédaction du dossier « Approche probabiliste du dimension- dent en effet quelques atouts :
nement» est décomposée en deux articles et sept paragraphes :
– elles proposent un traitement réaliste des incertitudes et une
• Article [BM 5 003] : Modélisation de l’incertain et méthode méthode d’évaluation de facteurs de sécurité trop souvent
de Monte-Carlo. arbitraires ;
1. Approche probabiliste de l’incertain : cette section intro- – elles apportent une aide à la décision conduisant à une
duit le contexte. Elle est poursuivie par la mise en place des conception plus économique et mieux équilibrée ;


concepts probabiliste et mécanique. – elles analysent les modes de défaillance et mesurent la fiabilité
2. Modèle stochastique des variables de conception : les apportée par l’application des règlements ;
données d’un modèle étant aléatoires, deux points sont exa- – elles permettent une répartition optimale des matériaux entre
minés. Le premier concerne le modèle stochastique des don- les différents composants d’une structure ;
nées et le second la transmission du caractère aléatoire des – elles peuvent incorporer l’expérience acquise dans la concep-
données sur les variables de sortie. tion par l’actualisation en fonction du retour d’expérience ;
– elles aident aux décisions de maintenance et de réparation
3. Méthode de Monte-Carlo : il s’agit d’une méthode de dans un double objectif de sécurité et d’économie ;
simulation simple dans son principe mais pas toujours effi- – elles élargissent la maîtrise de la connaissance des incertitudes
cace qui permet de construire des réponses stochastiques. sur la réponse des structures.
• Article [BM 5 004] : Modélisation de l’incertain et métho- Présentées sous un éclairage aussi séduisant il faut s’interroger
des d’approximation. sur les raisons qui peuvent entraver leur développement. Elles
1. Méthode résistance – contrainte : le cas élémentaire dans sont de plusieurs ordres :
lequel la performance dépend de la comparaison entre une – inertiels : parce qu’elles demandent une attitude nouvelle, une
résistance (plus généralement une ressource) et une remise en cause des habitudes de pensée et de travail. En effet,
contrainte (plus généralement une sollicitation ou même un pourquoi changer alors que l’expertise actuelle est souvent
besoin) est mis en œuvre. suffisante ? Parce que la demande sociale vis-à-vis des risques est
2. Méthodes d’approximation et couplage mécano-fiabiliste : de plus en plus pressante ; parce que la demande économique
les limitations opérationnelles de la méthode de Monte-Carlo recherche le moindre coût tout en garantissant une durée de vie ;
ainsi que les limitations de la représentation résistance – parce que la concurrence est susceptible de progresser. Il faut tou-
contrainte conduisent à développer des méthodes d’approxima- tefois noter que les progrès de la fiabilité permettent plus de
tion d’ordre un et deux. Le couplage mécano-fiabiliste assure réduire la dispersion des durées de vie que d’en allonger la
ensuite le dialogue entre elles et les modélisations mécaniques. moyenne, calculée en fonction de la demande ;
3. Produits de l’analyse de fiabilité : au-delà de la notion de – culturels : parce que les probabilités (principalement) et la sta-
probabilité de défaillance, les produits de l’analyse de fiabilité tistique (dans une moindre mesure) font plus partie du bagage du
apportent des indications aux concepteurs. Ils sont à la base de mathématicien que de l’ingénieur. Le premier a fait des probabili-
la calibration des coefficients partiels dans les règles de dimen- tés une très belle construction intellectuelle, oubliant la démarche
sionnement. historique expérimentale de leur genèse. Le second est formé aux
certitudes et à la décision et se réfugie trop derrière des règles
4. Perspectives : pour introduire des approches probabilis- dont il n’a qu’une faible perception du contenu. La statistique par
tes plus avancées. contre est un outil plus familier de l’ingénieur ;
– philosophiques : parce qu’elles soulignent explicitement
l’acceptation d’un risque qui n’est qu’implicite derrière la rassu-
■ Cet article sollicite des notions de probabilités et statistique rante notion de coefficient « de sécurité » ; parce qu’elles exigent
appliquées dans un contexte de mécanique. Les paragraphes 1.4 du jugement et de la décision. Sans entrer dans un débat sur
et 2.1 donnent un rapide rappel de notions essentielles de proba- l’existence ou non du hasard, il suffit de rappeler que de petites
bilité et de statistique. Elles sont introduites à chaque fois que causes peuvent avoir de grands effets ;
c’est nécessaire lors de l’avancement de l’article. Le lecteur est – et ceux dus à un manque de conviction en raison du caractère
invité à se reporter à des textes spécialisés le cas échéant novateur des développements et de la jeunesse des outils. Le
[AF 165] [AF 166]. développement des modèles numériques depuis un demi-siècle a
Un exemple structural simple (système de deux barres) sert de vu successivement les méthodes linéaires puis non linéaires par
fil conducteur pour illustration des concepts et des méthodes. éléments finis, les outils de conception, les méthodes d’optimisa-
tion. L’introduction des outils de fiabilité mécanique constitue le
Si les premiers paragraphes visent une présentation assez com- prochain développement des codes comme le montre l’article de
plète, le lecteur est par contre invité à se reporter à l’ouvrage de synthèse de la revue Structural Safety [2] et la présentation de dix
l’auteur [1] s’il souhaite approfondir sa réflexion sur les derniers logiciels disponibles dans le monde.
paragraphes de ce dossier et découvrir de nombreuses références
bibliographiques.
Si vous êtes :
– celui qui sait que le risque est toujours présent ;
1.3 Vaincre une inertie culturelle – celui qui sait identifier les modes de défaillance ;
– celui qui sait que l’assurance qualité est la première condi-
Introduire une approche probabiliste pour modéliser l’incertain tion de la fiabilité ;
résulte tout simplement du fait qu’il est inhérent à toute physique. – celui qui a su dépasser une inertie culturelle ;
Il faudrait s’interroger pour comprendre pourquoi une telle attitude – celui qui sait ne pas se réfugier toujours derrière des
n’apparaît que récemment dans l’histoire. La raison profonde règles ;
réside sans doute dans la difficulté d’accepter que tout dysfonc- – celui qui sait que « trop fort n’a jamais manqué » peut
tionnement ne résulte pas seulement de la fatalité, mais qu’il est s’avérer coûteux ;
intrinsèquement contenu dans tout dimensionnement. L’art de – celui qui veut innover pour une conception fiable,
l’ingénieur est alors de montrer comment il peut repousser l’occur-
alors vous pouvez poursuivre cet article en acceptant un pre-
rence des situations désastreuses à un niveau suffisamment faible
mier effort pour mettre à jour des connaissances minimales
mais non nul. Encore faut-il un outil pour mesurer l’impact de
en probabilités.
l’incertain et cet outil est la théorie des probabilités.

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APPROCHE PROBABILISTE DU DIMENSIONNEMENT _______________________________________________________________________________________

Il n’a jamais été constaté que des outils mis à disposition des S’il paraît utile de rappeler ces concepts fondamentaux, ils ne
concepteurs ne soient pas utilisés. Les méthodes fiabilistes appor- doivent pas arrêter le lecteur.
tent une précision supplémentaire mise à profit pour une meilleure
conception. De nombreux exemples d’applications dans le Leur interprétation à partir de l’exemple du dé est immédiate :
domaine de l’industrie témoignent de leur pénétration progressive. – : la probabilité de ne pas faire apparaître une face du dé
est nulle ;
– P (Ω) = 1 : la probabilité de faire apparaître une des faces est 1
1.4 Modélisation de l’incertain

(certitude) ;
– P (Ai) = 1/6 ;
La modélisation de l’incertain relève de la théorie des probabili-
tés. La notion de probabilité traduit le fait que le hasard possède – .
une géométrie. Géométrie du hasard est d’ailleurs le titre de
l’ouvrage fondateur de Blaise Pascal. Il signifie que ce que nous
appelons le hasard possède une structure et peut être représenté à 1.4.3 Quelques propriétés
partir de concepts mathématiques. Des définitions précédentes on déduit les relations suivantes :

1.4.1 Algèbre des événements


Considérons l’exemple simple du jet d’un dé non pipé à 6 faces
numérotées de 1 à 6. Jeter le dé constitue une expérience aléatoire
dont l’issue (ou la réalisation) est de faire apparaître une des faces.
L’ensemble des issues possibles est Ω = {1, 2, 3, 4, 5, 6}. D’autres La formule de Poincaré généralise l’union de n événements :
expériences aléatoires peuvent être imaginées : par exemple faire
apparaître un nombre pair, faire apparaître un 6 puis à nouveau un 6...
Ces exemples illustrent la construction d’une algèbre
d’événements :
– événement simple : {tirer un 6} ;
– événement composé OU : {tirer un nombre pair} = {tirer un 2} OU 1.4.4 Probabilité conditionnelle et indépendance
{tirer un 4} OU {tirer un 6} ;
– événement composé ET : {tirer un 6 puis tirer à nouveau un Reprenons l’exemple du dé : l’événement {tirer un 6 puis tirer à
6} = {tirer un 6} ET {tirer un 6}. nouveau un 6} fait intervenir deux événements successifs qui sont
Tout événement est représenté par des combinaisons algébriques disjoints : c’est-à-dire que la réalisation du second ne dépend pas de
constituant des parties de Ω. Soit Ai l’événement {tirer i }. L’événe- la réalisation du premier. Ainsi, on a P (A6) = 1/6 et de même au lan-
ment {tirer un nombre pair} est Apair = A2 ∪ A4 ∪ A6 où ∪ est l’opéra- cer suivant. Il vient P (A6,6) = 1/36.
teur d’union OU. L’événement {tirer un 6 puis tirer à nouveau un 6}
est A6,6 = A6 ∩ A6 où ∩ est l’opérateur d’intersection ET. Lorsque deux événements ne sont pas disjoints, ils peuvent être
indépendants ou non. La formule des probabilités conditionnelles
De manière générale, soit les deux événements A et B : s’écrit :

– A ∩ B est l’événement réalisé si et seulement si A et B sont (1)


réalisés tous les deux ;
où A|B se lit « A sachant B » et signifie que l’événement B condi-
– A ∪ B est l’événement réalisé si et seulement si l’un au moins
tionne l’événement A. Si l’événement B ne conditionne pas l’évé-
des deux événements A ou B est réalisé ;
nement A, ils sont dits indépendants et :
– est le contraire de A ;
– A + B désigne A ∪ B avec la condition A ∩ B incompatibles. A (2)
et B sont dits disjoints. La dépendance stochastique est une notion délicate et le
paragraphe 2.1.2 précise le lien avec la corrélation.
1.4.2 Définition axiomatique
1.4.5 Variable aléatoire
La famille des événements construits sur l’espace de probabilité
Ω est notée . La définition axiomatique de Kolmogorov postule Une variable aléatoire X est définie lorsqu’il est possible d’asso-
alors : cier un comptage ou une mesure numérique à une expérience
1. (ensemble vide) et Ω appartiennent à . est l’événement aléatoire. C’est une fonction définie de l’espace de probabilité
impossible et Ω est l’événement certain. .
2. si est une suite dans appartien- ■ Loi d’une variable aléatoire
nent à . • Si X est à valeurs isolées , la loi de X est caractérisée
3. si . par la famille .
• Si X est à valeurs dans , la loi de X est caractérisée par la
Soit une famille d’événements sur Ω. Une probabilité sur
donnée de P (a < X < b ) pour tout couple (a, b ), a < b.
est définie comme une application telle que :
1. , P (Ω) = 1 ; ■ Fonction de répartition
La fonction de répartition de la variable aléatoire X est :
( )
2. P ∑n∈ An = ∑n∈ P (An ) pour toute suite An formée d’événe-
ments disjoints.
Le triplet constitue l’espace de probabilité. Elle définit entièrement la loi de la variable aléatoire.

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Approche probabiliste
du dimensionnement
Modélisation de l’incertain Q
et méthodes d’approximation
Maurice LEMAIRE
Professeur émérite à l’Institut français de mécanique avancée
Conseiller scientifique de Phimeca Engineering

1. Méthode résistance-contrainte ........................................................... BM 5 004v2 - 2


1.1 Expressions de la probabilité de défaillance ............................................ — 2
1.2 Notion d’indice de fiabilité ......................................................................... — 3
1.3 Illustration : système de deux barres ........................................................ — 5
1.4 Conclusion ................................................................................................... — 5
2. Méthodes d’approximation et couplage mécano-fiabiliste ...... — 5
2.1 Transformations isoprobabilistes.............................................................. — 5
2.2 Indice de fiabilité et probabilité de défaillance......................................... — 6
2.3 Bilan ............................................................................................................. — 8
2.4 Illustration.................................................................................................... — 8
2.5 Couplage mécano-fiabiliste........................................................................ — 9
2.6 Conclusion ................................................................................................... — 9
3. Produits de l’analyse de fiabilité ........................................................ — 9
3.1 Facteurs d’importance ................................................................................ — 9
3.2 Coefficients partiels (« de sécurité ») ........................................................ — 11
4. Conclusion et perspectives .................................................................. — 13
4.1 Élargir les hypothèses ................................................................................ — 13
4.2 Rechercher des méthodes numériques plus efficaces ............................ — 14
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. BM 5 004v2

’art du concepteur consiste à proposer une solution technique qui satisfait


L aux exigences fonctionnelles et qui garantit la sécurité vis-à-vis des biens,
des personnes et de l’environnement. Les exigences fonctionnelles doivent
s’assurer du bon fonctionnement des systèmes considérés, et parmi celles-ci
de la fiabilité, c’est-à-dire de l’aptitude d’un dispositif à accomplir une fonction
requise dans des conditions données, pendant une durée donnée. Le rôle du
concepteur est alors de dimensionner de manière optimale en justifiant une fia-
bilité suffisante en fonction des risques, c’est-à-dire des conséquences
redoutées par l’occurrence d’un événement indésirable : une fiabilité absolue
ne peut pas exister et il subsiste toujours une possibilité d’échec. On peut dire
aujourd’hui que le principe de précaution ne consiste qu’en la démonstration
que toutes les connaissances actuelles ont été mises en œuvre pour que le
gain obtenu par le succès du dispositif soit suffisant pour accepter le coût de
l’échec éventuel dû à son dysfonctionnement. Ces quelques lignes situent le
cadre de la démarche : elle propose une approche de la fiabilité théorique des
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APPROCHE PROBABILISTE DU DIMENSIONNEMENT _______________________________________________________________________________________

systèmes mécaniques mais il faut noter qu’elle est susceptible d’applications


dans bien d’autres domaines. Par fiabilité théorique, il faut comprendre tout ce
que la modélisation permet de simuler pour prévoir les comportements possi-
bles. Elle complète la fiabilité pratique qui est assimilée à la démarche qualité :
la fiabilité théorique est conditionnée par la fiabilité pratique, par l’assurance
qualité. Concevoir un système mécanique et calculer ses paramètres consti-
tuent une recherche d’un dimensionnement dont il faut justifier la fiabilité.

Q L’article [BM 5 003] a introduit le concept de fiabilité théorique et mis en œuvre


la solution par simulation de Monte-Carlo. Cet article s’intéresse à des solu-
tions par approximation qui permettent une implémentation plus économique
des calculs. Il introduit successivement la méthode résistance – contrainte, puis
les méthodes d’approximation et de couplage mécano-fiabiliste et enfin les
produits de l’analyse : c’est-à-dire les quantités d’intérêt mises à disposition du
concepteur pour aider ses décisions. Enfin, il ouvre sur des perspectives. Le
même exemple conducteur étant repris, il est donc indispensable de procéder
tout d’abord à la lecture de l’article [BM 5 003].

1. Méthode
résistance-contrainte
Ce paragraphe traite du cas élémentaire dans lequel l’état-limite
est défini comme la différence entre la résistance et la
contrainte [BM 5 003, éq. 25].

1.1 Expressions de la probabilité


de défaillance

1.1.1 Définition de la probabilité de défaillance Figure 1 – Représentation tridimensionnelle de Pf (volume situé


sous la partie bleutée de la bulle de Gauss) pour deux variables
gaussiennes
R et S sont deux variables aléatoires indépendantes caracté-
risées par une densité conjointe de probabilité notée fR,S (r, s )
égale au produit des densités marginales fR (r ) fS (s ).
La probabilité de défaillance Pf , associée à la marge Z ≥ R – S,
est le poids probabiliste de la partie de l’espace constituée par le
domaine (figure 1) :

(1)

Le calcul n’est donc que celui d’une intégrale dont la valeur est
une probabilité souvent très petite devant 1.

Figure 2 – Densités de R et S ; première expression de Pf


1.1.2 Formules intégrales
■ Première expression de Pf
Soit A l’événement {la sollicitation S ∈ [x, x + dx [ } et B l’événe- Pour toutes les sollicitations possibles, les événements {A ∩ B }
ment {la résistance R < x }. étant disjoints sur chaque intervalle [x, x + dx [ :
La probabilité de défaillance, pour des sollicitations comprises
entre x et x + dx (figure 2), est la probabilité de l’événement (2)
{A ∩ B } :
■ Deuxième expression de Pf
Une autre expression de Pf est obtenue à partir des
et événements :

Comme les événements sont indépendants [BM 5003, éq. 2] :

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BM 5 004v2 – 2 est strictement interdite. – © Editions T.I.

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_______________________________________________________________________________________ APPROCHE PROBABILISTE DU DIMENSIONNEMENT

La défaillance est l’intersection des événements {A } et , com-


plémentaire de {B } :

(3)

■ Expression de la fiabilité
Le calcul de la fiabilité Ps ≥ 1 – Pf est déduit de (3) :





∞ Q

Figure 3 – Représentation d’une densité gaussienne Z et indice de
fiabilité

1.1.3 Calcul de la probabilité de défaillance


bien tous le même état-limite, mais les indices associés ne sont
Les expressions (2) ou (3) peuvent être calculées par : pas identiques.
– intégration directe formelle, dans des cas particuliers L’indice de Rjanitzyne-Cornell ne s’applique qu’à un état-limite
favorables : deux lois uniformes par exemple ; formé d’une combinaison linéaire de variables gaussiennes.
– intégration numérique à l’aide de la plupart des logiciels de
calcul ;
– simulation numérique de Monte-Carlo. 1.2.2 Indice de Hasofer-Lind
Illustration : reprenons l’exemple du système de deux ■ Changement de repère
barres [BM 5 003, § 2.3.2, le résultat suivant est retrouvé par intégra-
tion numérique sur des lois log-normales [BM 5 003, éq. 15 et 16] : La définition d’un indice invariant dans toute représentation de
l’état-limite est due à Hasofer et Lind en 1974. Ces auteurs ont pro-
posé de se placer dans un espace de variables gaussiennes statis-
tiquement indépendantes, de moyennes nulles et d’écarts-types
unitaires :

La transformation de l’espace physique vers l’espace normé (ou


Remarque : cette intégrale donne un résultat de valeur faible et il espace standard) est immédiate dans le cas de variables gaussien-
faut prendre la précaution de régler la précision de l’intégration numé- nes indépendantes :
rique à un seuil largement inférieur à la valeur attendue.
(4)
1.2 Notion d’indice de fiabilité
et elle conserve la linéarité de l’état-limite. Pour des variables
indépendantes de lois quelconques, le principe de la transforma-
1.2.1 Indice de Rjanitzyne-Cornell tion consiste à écrire l’égalité des fonctions de répartition :
Si R et S sont deux variables gaussiennes indépendantes, alors (5)
Z = R – S est une variable gaussienne de moyenne mR – mS et
(6)
d’écart-type et il vient d’après [BM 5 003, éq. 14] :
La transformation résultant des relations (5) et (6) est appelée
transformation isoprobabiliste, elle est notée T dans la suite. Elle
est appliquée ici pour une variable et elle suppose que FX (x ) soit
continue et strictement croissante. Si les variables ne sont pas
indépendantes, une forme générale de la transformation est don-
La quantité , inverse du coefficient de variation de Z, a été née par Rosenblatt, elle est présentée dans le paragraphe 2.
appelée indice de fiabilité par Rjanitzyne en 1949. C’est une quan- Dans l’espace physique, aucune notion de distance ne peut être
tité sans dimension qui traduit le nombre d’écarts-types séparant donnée si les variables ne sont pas des quantités physiques
la moyenne du domaine de défaillance (figure 3). Cette définition, dimensionnellement homogènes. L’intérêt de l’espace normé est
reprise par Cornell en 1969 et généralisée à tort, est souvent appe- de travailler dans un espace adimensionnel dans lequel une
lée indice de Cornell : mesure de distance est possible. De plus, le choix des variables
Indice de Rjanitzyne-Cornell : gaussiennes normées centrées donne une forme simple à la den-
sité conjointe de probabilité. La figure 4 illustre l’exemple R – S de
variables gaussiennes.
Dans l’espace physique, les isodensités sont des ellipses. Dans
l’espace normé, les isodensités sont des cercles centrés sur l’ori-
En effet, la généralisation à des variables quelconques et à des gine, image de la médiane des distributions physiques, confondue
états-limites quelconques peut définir un indice mais celui-ci : dans ce cas avec la moyenne. Les relations (4) donnent l’expres-
– n’est pas relié à Pf par Φ (– β ) ; sion de l’état-limite en variables u, v :
– n’est pas invariant dans toute représentation équivalente de
l’état-limite. R – S ≥ 0 ou ln R – ln S ≥ 0 ou R 2 – S 2 ≥ 0 représentent

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est strictement interdite. – © Editions T.I. BM 5 004v2 – 3

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La sûreté de fonctionnement :
méthodes pour maîtriser les risques

par Yves MORTUREUX
Ingénieur civil des Ponts et Chaussées
Expert Sûreté de Fonctionnement
à la Direction déléguée Système d’exploitation et sécurité à la SNCF
Vice-Président de l’Institut de Sûreté de Fonctionnement

1. Caractérisation de la sûreté de fonctionnement ............................ BM 5 008 — 3


1.1 Considérer avec réalisme les entités auxquelles on a affaire.................. — 3
1.2 Exploiter toutes les connaissances disponibles, rechercher le juste
nécessaire..................................................................................................... — 3
1.3 Produire de la confiance partageable grâce à la sûreté
de fonctionnement ...................................................................................... — 4
2. Notions fondamentales .......................................................................... — 4
2.1 Sûreté de fonctionnement .......................................................................... — 4
2.2 Risque ........................................................................................................... — 4
2.3 Fiabilité ......................................................................................................... — 6
2.4 Maintenabilité .............................................................................................. — 7
2.5 Disponibilité ................................................................................................. — 7
2.6 Sécurité......................................................................................................... — 7
3. Taux de défaillance, MTBF, MTTF, MUT .............................................. — 8
4. Données de fiabilité (ou de maintenabilité) ..................................... — 10
4.1 Généralités ................................................................................................... — 10
4.2 Bases de données........................................................................................ — 10
4.3 Retour d’expérience .................................................................................... — 11
5. Démarches et méthodes fondamentales d’une approche SdF .... — 12
5.1 Présentation des caractéristiques .............................................................. — 12
5.2 Analyse préliminaire de risques (APR) ...................................................... — 12
5.3 Analyse des modes de défaillance, de leurs effets et de leurs criticités
(AMDEC) ....................................................................................................... — 13
5.4 Arbres de causes, d’événement, de défaillances...................................... — 13
5.5 Graphes d’états. Réseaux de Petri ............................................................. — 15
5.6 Complémentarités entre ces méthodes..................................................... — 16
6. Fiabilités électronique, mécanique, logicielle, humaine... ........... — 16
Références bibliographiques ......................................................................... — 17

ans l’industrie, on parle de plus en plus de sûreté de fonctionnement. Cette


D discipline, qui a acquis ce nom et sa forme actuelle principalement au cours
du dernier demi-siècle et dans les secteurs de la défense, de l’aéronautique, de
l’espace, du nucléaire, puis des télécommunications et des transports, serait
désormais utile, voire indispensable, à tous les secteurs de l’industrie et même
d’autres activités.
De quoi s’agit il ? La sûreté de fonctionnement est une riche palette de métho-
des et de concepts au service de la maîtrise des risques.
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPPU

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© Techniques de l’Ingénieur BM 5 008 − 1

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LA SÛRETÉ DE FONCTIONNEMENT : MÉTHODES POUR MAÎTRISER LES RISQUES ____________________________________________________________________

La sûreté de fonctionnement n’est pas un but en soi, mais un moyen ou un


ensemble de moyens : des démarches, des méthodes, des outils et un vocabu-
laire. Le but qui impose le recours à la sûreté de fonctionnement est plus recon-
naissable sous le terme de « maîtrise des risques ».
■ Comme il est habituel avec ce type de mots ou d’expressions, « sûreté de
fonctionnement » désigne à la fois un ensemble de moyens et un ensemble de


résultats produits par ces moyens :
— une forme d’esprit particulière dans la considération portée aux systèmes
(en particulier industriels, mais rien ne justifie de se limiter à l’industrie) ; des
démarches, méthodes et outils propres à connaître, caractériser et maîtriser les
effets des aléas, des pannes, des erreurs... ;
— des caractéristiques des systèmes (produits, services, systèmes de produc-
tion, installations, etc.), exprimant la conformité dans le temps (constance, fré-
quence de la conformité) de leurs comportements et actions avec des attentes
plus ou moins explicites (on note la proximité de ces notions avec la qualité) :
sécurité, fiabilité, disponibilité, maintenabilité, voire invulnérabilité, capabilité,
coût global de possession, survivabilité...
Par extension, on parle de la « sûreté de fonctionnement d’un système »
comme la caractéristique de ce système qui permet de placer en lui une
confiance justifiée. C’est d’une simplicité séduisante et trompeuse. La con-
fiance dépend de ce à quoi on accorde de l’importance (innocuité, productivité,
qualité... ?) et des valeurs relatives de ces caractéristiques ; elle repose sur un
ensemble de démarches et s’exprime par un ensemble de caractéristiques, en
particulier des disponibilités et de la sécurité. C’est un atout majeur du concept
de sûreté de fonctionnement de réunir des approches motivées par la fiabilité, la
disponibilité, la maintenabilité et la sécurité, mais c’est un piège de vouloir
réduire à une valeur (qui s’appellerait la sûreté de fonctionnement du système)
le résultat de ces démarches.
■ Les caractéristiques pertinentes pour exprimer les fondements de la
confiance que l’on place et que l’on veut transmettre dans son système pren-
nent des formes (des noms et des définitions) propres au système dont il s’agit,
aux cultures des acteurs concernés et à leurs vocabulaires. Fondamentalement,
il s’agit toujours de disponibilité et de sécurité fondées sur des fiabilités et des
maintenabilités élémentaires, mais le foisonnement des vocabulaires en usage
dans les différentes branches de l’industrie (et encore plus si on élargit au-delà
du monde industriel) prouve que chacun a besoin de notions propres adaptées
à son contexte.
Par contre, les démarches et méthodes, même cachées sous des noms
divers et variés, s’avèrent universelles. Plutôt que les caractéristiques, ce sont
les méthodes qui seront au cœur de ce premier article. En matière de sûreté de
fonctionnement (et pas seulement là), il nous paraît infiniment plus important de
comprendre une démarche et un raisonnement, quitte à réinventer le vocabu-
laire en l’appliquant, que d’apprendre des définitions et des règles, d’utiliser des
outils en se laissant guider par eux. Cette dernière pratique, très répandue,
conduit malheureusement assez souvent à des conclusions gravement erronées.
La sûreté de fonctionnement n’est que du bon sens organisé et systématisé.
S’en éloigner en se laissant conduire par une recette ou une méthode à l’encon-
tre du bon sens est, à coup sûr, s’exposer aux pires dangers d’erreurs graves.
■ Maîtriser les risques est une attitude naturelle que chacun pratique ; mettre en
œuvre la sûreté de fonctionnement, c’est professionnaliser cette attitude, la sys-
tématiser, l’optimiser, l’expliciter. Concrètement, cela peut se limiter à un état
d’esprit spécifique, à quelques questions que l’on se pose systématiquement ;
cela peut aussi, à l’inverse, mobiliser des équipes hautement spécialisées en cal-
cul de probabilités, essais, modélisations, analyses, recueil et traitement de don-
nées... À chacun son activité, son besoin, ses enjeux, à chacun sa sûreté de
fonctionnement, mais le principe en est toujours le même.

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___________________________________________________________________ LA SÛRETÉ DE FONCTIONNEMENT : MÉTHODES POUR MAÎTRISER LES RISQUES

1. Caractérisation Une première caractéristique d’une approche sûreté de fonc-


de la sûreté tionnement, c’est le principe de considérer un système pour
tout ce qu’il peut être et non seulement pour ce qu’on veut qu’il
de fonctionnement soit.

La sûreté de fonctionnement (SdF) est peut-être d’abord un état


d’esprit avant d’être un ensemble de méthodes. Qu’est-ce qui carac-
térise cet esprit ?
1.2 Exploiter toutes les connaissances
disponibles, rechercher le juste Q
nécessaire
1.1 Considérer avec réalisme les entités
auxquelles on a affaire L’application du principe évoqué au paragraphe 1.1 met donc en
présence de nombreuses éventualités d’échecs ou d’accidents. Il y a
l’attitude qui consiste à les ignorer et celle qui consiste à les éliminer
Un composant, un sous-système peut tomber en panne. Un totalement. La SdF consiste à remplacer le choix binaire entre ces
homme peut avoir une activité différente de ce qu’on a voulu lui deux extrêmes par le choix continu entre toutes les positions inter-
prescrire. Les conditions d’environnement peuvent être défavora- médiaires. Entre excès de précautions (coûteux, contraignant) et jeu
bles, etc. avec le feu (tout va bien jusqu’à la catastrophe), il y a un juste milieu
La sûreté de fonctionnement consiste à ne pas considérer un sys- en harmonie avec les grands principes, la politique de son entité
tème uniquement à travers son cahier des charges comme s’il ne (entreprise, association...).
devait jamais avoir comme comportements et comme effets que
ceux pour lesquels il a été conçu. Entre la connaissance déterministe que la panne va toucher tel
Exemple : un frein de bicyclette est conçu, fabriqué, installé pour composant à tel moment et l’ignorance totale (on ne sait pas quelle
ralentir et arrêter la bicyclette. panne va survenir, ni où, ni quand), il y a des connaissances incom-
Premièrement, la SdF considère qu’il n’est pas acquis, parce qu’il plètes ou incertaines. La sûreté de fonctionnement, loin de les écar-
peut le faire, qu’il va le faire. Il peut ne pas remplir totalement, instan- ter (comme si on ne pouvait rien faire d’une incertitude) les exploite.
tanément, à chaque sollicitation sa fonction.
Le cas des composants électroniques après la Seconde Guerre
Deuxièmement, la SdF considère que, à partir du moment où il
existe, il va avoir des effets, peut-être sans rapport avec sa fonction. mondiale est caractéristique, puisqu’il est à l’origine de l’essor évo-
Normalement, un frein de bicyclette produit de la chaleur, peut faire du qué dans l’« historique » : en présence d’un lot de composants
bruit, occupe de la place, ajoute du poids à certains endroits. Un frein « identiques » (fabriqués ensemble), il n’était pas possible (techni-
de bicyclette, ce sont des pièces qui pourraient, accidentellement, tom- quement ou économiquement) de déterminer lesquels allaient tom-
ber dans les rayons, des câbles tendus qui pourraient, accidentelle- ber en panne et quand. Par contre, le retour d’expérience montrait
ment, casser, cingler, blesser, etc. Il y a lieu d’en examiner les une très grande régularité dans le nombre de pannes rapporté au
conséquences pour faire des choix appropriés. nombre de composants par unité de temps.

Historique
Selon A. Leroy et J.P. Signoret [1], l’entre-deux-guerres voit émerger les Ces activités, dès leur prime jeunesse, ont dû maîtriser les risques d’acci-
concepts de fiabilité et de taux de défaillance dans l’aéronautique suite à la dents. Elles ont développé des approches déterministes très poussées et se
comparaison des fréquences des pannes des avions bimoteurs et quadrimo- sont essentiellement appuyées sur le surdimensionnement, la redondance et
teurs et au calcul de ratios, nombre de pannes/nombre d’heures de vol. l’analyse logique pour assurer la sécurité. L’apport des approches probabilis-
tes permet de chercher à ajuster les mesures de prévention des événements
■ À partir de la deuxième guerre mondiale, une discipline se développe sous aléatoires au lieu de rester abrité derrière des normes de dimensionnement
le nom de « théorie de la fiabilité ». Les décennies 1940 et 1950 sont caractéri- larges et coûteuses.
sées par la découverte de l’efficacité d’une approche probabiliste appliquée à ■ À partir de la décennie 1980, les efforts entrepris dans tant de directions
l’électronique dans l’aéronautique, la défense et le nucléaire. La formulation s’approfondissent, mais aussi tendent à se rejoindre pour constituer cette dis-
de ce qui nous paraît évident aujourd’hui – la probabilité de succès d’une cipline d’application très étendue qu’est aujourd’hui la sûreté de fonctionne-
chaîne de composants est le produit des probabilités de succès de chacun des ment. On note les développements suivants :
composants – fut l’origine d’un développement très rapide dans les domaines — constitution de bases de données de fiabilité ;
cités. — début de normalisation en matière de sûreté de fonctionnement ;
Cette période fut aussi celle d’un développement rapide de l’électronique — développement des méthodes d’analyse, de modélisation, de représen-
qui introduit des composants nombreux dont les défaillances individuelles tation des systèmes complexes ;
sont imprévisibles à ce stade des connaissances, mais dont les défaillances — développement de logiciels de calculs ;
collectives présentent des régularités statistiques ; sur un lot de composants — développement de logiciels de modélisation ;
homogène, on sait prédire avec une bonne confiance le nombre de défaillan- — campagnes d’essais pour recueillir des données de fiabilité ;
ces par unité de temps qui vont se produire alors qu’on reste totalement inca- — utilisation large ou ciblée de la sûreté de fonctionnement dans la plupart
pable de prédire quel composant va tomber en panne et quand. des industries ;
— utilisation de la sûreté de fonctionnement pour maîtriser tout type de
risque industriel (et peu à peu des risques juridiques, individuels, financiers,
■ Les décennies 1960 et 1970 sont marquées par les tentatives de généraliser etc.) et non seulement la sécurité ;
cette approche probabiliste si réussie à d’autres « composants » : mécani- — apparition et développement des clauses contractuelles de sûreté de
ques, hydrauliques, électriques, puis aux hommes, aux logiciels... et l’exten- fonctionnement et des exigences légales et réglementaires de sûreté de
sion de l’approche au retour à la normale (à la fiabilité vient s’ajouter la fonctionnement ;
maintenabilité). En même temps se développent des méthodes permettant de — besoin croissant de connaissances pointues dans les domaines scienti-
maîtriser les risques de systèmes complexes (centrale nucléaire, supersoni- fiques concernés dans les systèmes complexes : systèmes programmés,
que...) et non plus simplement de chaînes de composants (même complexes). sciences humaines et sociales.
Ces démarches sont conduites par les équipes constituées autour de la Aujourd’hui, le terme « sûreté de fonctionnement » recouvre l’ensemble
« théorie de la fiabilité ». Cependant elles rejoignent la prise en compte des des moyens qui permettent de se donner et de transmettre une confiance jus-
risques qui a toujours accompagné les activités à risque comme le transport. tifiée dans le succès d’un projet, d’une activité et son innocuité.

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LA SÛRETÉ DE FONCTIONNEMENT : MÉTHODES POUR MAÎTRISER LES RISQUES ____________________________________________________________________

Entre une position très prudente consistant à ne pas utiliser ces La sûreté de fonctionnement est souvent définie comme :
composants faute de pouvoir éviter les pannes, en les remplaçant à
temps par exemple, et une position très risquée consistant à espérer — fiabilité, disponibilité, maintenabilité et sécurité ;
ne pas subir trop de pannes aux mauvais moments, la SdF permet — science des défaillances ;
d’évaluer statistiquement le risque pris en fonction des choix — maintien de la qualité dans le temps.
d’architecture, de politique de maintenance, etc., mais elle ne le per-
met que parce qu’il y a une information utile qui est, ici, la loi de pro- Toutes ces définitions sont reconnues à divers titres par l’Institut
babilité de défaillance des composants en fonction du temps ! de Sûreté de Fonctionnement (ISDF). Chacune de ces définitions est


porteuse de beaucoup du contenu de la SdF, mais chacune est
cependant réductrice, trop étroite.
1.3 Produire de la confiance partageable ■ La définition « fiabilité, maintenabilité, disponibilité et
grâce à la sûreté de fonctionnement sécurité » fait donc référence aux définitions de ces termes (§ 2.3 à
§ 2.6) et met en avant la cohérence de ces approches. Par contre, si
En vertu du principe évoqué en premier dans le paragraphe 1.1, la la fiabilité (ou la maintenabilité, la disponibilité et la sécurité) est
sûreté de fonctionnement tend à « tout prévoir » (à ne pas confon- aussi une performance d’un système, la SdF ne se réduit pas facile-
dre avec « empêcher tout accident »). En vertu du deuxième prin- ment à une performance.
cipe (§ 1.2), elle tend à prendre en compte toute information
accessible. Elle offre donc les meilleures garanties possibles que ■ La définition « science des défaillances » met l’accent sur la
choix et décisions ont pu être faits et pris en toute connaissance de prise en compte des défaillances, de leurs causes, de leurs effets et
cause. souligne, en parlant de science, l’importance de la connaissance sur
les défaillances (causes, effets, mécanismes...) sans laquelle il n’y a
Il n’y a pas à proprement parler de décisions de SdF. Il y a des pas d’approche SdF. Mais elle est réductrice en ce sens que la SdF
décisions techniques, politiques, des choix de conception, d’organi- prend en compte et traite plus que des défaillances.
sation, d’exploitation, etc., toutes les décisions qui peuvent se pren-
dre dans la vie professionnelle, associative, publique, privée... La En ce qui concerne les événements finaux (les conséquences), la
SdF permet de prendre en compte de façon explicite les SdF ne prend pas en compte que les défaillances dans l’accomplis-
défaillances, les incertitudes, les aléas... dans toute la mesure, mais sement des fonctions requises (ce qui serait seulement une appro-
seulement dans la mesure, des connaissances qu’on détient à leur che fiabilité, maintenabilité, disponibilité ou « dependability »), mais
propos. Ce caractère explicite permet de justifier, de montrer, de dis- aussi des événements sans rapport avec le cahier des charges fonc-
cuter, de faire partager la représentation des conséquences (souhai- tionnel du système (approche orientée sécurité).
tées et non souhaitées, mais maîtrisées) des décisions que l’on En ce qui concerne les événements initiateurs (les causes), la SdF
prend ou que l’on veut faire prendre. ne se limite pas aux défaillances, mais peut permettre de prendre en
compte aussi bien des agressions de l’environnement, des actions
Utiliser la sûreté de fonctionnement, c’est rechercher et inattendues ou interdites des utilisateurs ou des tiers, des phénomè-
exploiter les informations relatives aux événements non nes aléatoires...
voulus : pannes, agressions, aléas..., les prendre en compte
pour des décisions plus fines, plus justes, inspirant plus ■ La définition « maintien de la qualité dans le temps » souli-
confiance. gne l’importance de la durée et l’importance de la référence à des
exigences (explicites ou non). Elle a le défaut de laisser supposer
Cela souligne aussi le fait qu’il n’y a pas de démarche sûreté de qu’une activité SdF se conduit nécessairement dans le cadre d’une
fonctionnement possible s’il n’y a pas de connaissances. La SdF est démarche qualité, ce qui est faux. C’est le choix – explicable histori-
toujours totalement dépendante de la connaissance du système étu- quement – de certains secteurs industriels où la sûreté de fonction-
dié et de l’état des sciences concernées. La recherche de ces infor- nement est très développée à l’intérieur de l’organisation Qualité,
mations, en particulier par le retour d’expérience et les essais, est mais n’est pas une nécessité ; d’autres secteurs ont une forte expé-
donc indissociable de la SdF. rience de la sûreté de fonctionnement antérieure à la Qualité au
sens moderne incarné par les normes ISO 9 000 et bien d’autres, en
particulier une expérience de la sûreté de fonctionnement orientée
vers la sécurité.
2. Notions fondamentales Nota : la recherche de termes équivalents dans d’autres langues pose de sérieux problè-
mes.

La démarche, le raisonnement « sûreté de fonctionnement »


s’appuient sur quelques notions de base qui se sont précisées au
cours de l’évolution (cf. Historique) et qui continuent à s’affiner. Par- 2.2 Risque
courir ce vocabulaire de base est donc une introduction classique à
la sûreté de fonctionnement. Le lecteur trouvera d’autres définitions
importantes dans un glossaire.
Événement redouté évalué en terme de fréquence et de gra-
vité. En sûreté de fonctionnement, il s’agit d’identifier les événe-
ments indésirables, d’évaluer la fréquence de leurs survenues et
2.1 Sûreté de fonctionnement de quoi elle dépend, d’évaluer la gravité de leurs survenues et
de quoi elle dépend ; de prendre ses décisions en fonction de
leurs impacts sur le triplet « événement, fréquence, gravité »
Aptitude d’une entité à satisfaire une ou plusieurs fonctions qu’on appelle risque.
requises dans des conditions données.
On notera que ce concept peut englober la fiabilité, la disponi-
bilité, la maintenabilité, la sécurité, la durabilité... ou des combi-
naisons de ces aptitudes. Reformuler en terme de risque les éléments de décision qui relè-
vent de la prise en compte des dysfonctionnements, des aléas, des
Au sens large, la SdF est considérée comme la science des erreurs, des agressions de l’extérieur... c’est déjà intégrer l’esprit de
défaillances et des pannes [2]. la sûreté de fonctionnement.

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BM 5 008 − 4 © Techniques de l’Ingénieur

RX
Méthodes de calcul et conception
(Réf. Internet 42825)

1– Méthodes iabilistes en construction R


2– Eurocode 1 Réf. Internet page

Charges de neige sur les constructions selon l'Eurocode 1- Partie 1-3 C3305 31

Actions du vent sur les bâtiments selon l'Eurocode 1 - Partie 1-4 C3306 35

3– Règles antisismiques

4– Méthode de calcul non linéaire

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RY

SP
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cSSPU

Charges de neige
sur les constructions
selon l’Eurocode 1 – Partie 1-3
par Danielle CLAVAUD
Chef de projet Recherche


Centre technique industriel de la construction métallique

1. Domaine d’application ................................................................... C 3 305v2 – 2


2. Classification des actions de la neige ........................................ — 2
3. Charges de neige sur le sol ........................................................... — 2
3.1 Charges de neige en fonction des régions........................................ — 2
3.2 Charges de neige au sol suivant l’altitude ........................................ — 2
4. Charges de neige sur les toitures ................................................ — 3
4.1 Dispositions de charge ....................................................................... — 3
4.2 Coefficients de forme des toitures .................................................... — 3
4.2.1 Toitures à versant unique ........................................................ — 3
4.2.2 Toitures à deux versants ......................................................... — 3
4.2.3 Toitures à versants multiples .................................................. — 3
4.2.4 Toitures cylindriques ............................................................... — 3
4.2.5 Toitures à plusieurs niveaux ................................................... — 8
5. Effets locaux .................................................................................... — 9
5.1 Accumulation au droit des saillies et des obstacles locaux ............. — 9
5.2 Cas de deux acrotères ........................................................................ — 9
5.3 Neige en débord de toiture ................................................................ — 9
5.4 Charges sur les barres à neige et autres obstacles .......................... — 9
6. Situations de projet et dispositions de charges ....................... — 10
7. Exemples d’application.................................................................. — 10
7.1 Toitures à plusieurs niveaux .............................................................. — 10
7.1.1 Charge de neige sur le sol ...................................................... — 10
7.1.2 Situation de projet durable et transitoire ............................... — 10
7.1.3 Situation de projet accidentelle .............................................. — 11
7.2 Cas de deux acrotères ........................................................................ — 11
7.2.1 Charge de neige sur le sol ...................................................... — 11
7.2.2 Situation de projet durable et transitoire ............................... — 11
7.2.3 Situation de projet accidentelle .............................................. — 12
8. Conclusion........................................................................................ — 12
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 3 305v2

’ensemble des règles techniques harmonisées pour le dimensionnement


L des ouvrages de bâtiment et de Génie Civil au niveau européen a été publié.
Ces normes européennes, appelées Eurocodes, remplacent les règles nationa-
les en vigueur.
Dans ce cadre, l’Eurocode 1 définit les actions sur les structures. Il est com-
posé de plusieurs parties rattachées à diverses actions ; la partie 1-3 fournit des
indications pour la conception structurale des ouvrages de construction en ce
qui concerne les actions de la neige. Une Annexe Nationale apporte un
ensemble de précisions et de compléments permettant l’application de cette
norme pour la conception des ouvrages de construction à réaliser sur le terri-
p。イオエゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQT

toire national français.

Copyright © - Techniques de l’Ingénieur - Tous droits réservés C 3 305v2 – 1

SQ
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cSSPU

CHARGES DE NEIGE SUR LES CONSTRUCTIONS SELON L’EUROCODE 1 – PARTIE 1-3 –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

La norme NF EN 1991-1-3 d’avril 2004 et son Annexe Nationale NF EN 1991-1-


3/NA de mai 2007 – avec son Amendement NF EN 1991-1-3/NA/A1 de juillet
2011 – destinées aux calculateurs, concepteurs, constructeurs et Autorités publi-
ques. Elles fixent les valeurs des charges de neige et permettent d’évaluer les
efforts correspondants agissant sur la structure d’une construction.
Pour la cohérence des calculs, elles sont destinées à être utilisées avec les
autres parties de l’Eurocode 1, ainsi qu’avec les autres Eurocodes, en particu-
lier, ceux qui traitent spécifiquement des matériaux.
Pour établir la carte des charges de neige sur notre territoire, les dernières
mesures des hauteurs et des charges de neige ont été exploitées ; pour contri-
buer à une harmonisation européenne maximale, les valeurs relevées aux fron-


tières par les autres états membres ont aussi été utilisées. La norme prend en
compte les recherches, et autres essais les plus récents, pour déterminer les
schémas de répartition de la neige sur les toitures courantes et traditionnelles ;
les formes de construction, ou les conceptions inhabituelles, ne sont pas spéci-
fiquement couvertes.

1. Domaine d’application 3. Charges de neige sur le sol


La norme indique comment déterminer les valeurs des charges 3.1 Charges de neige en fonction
dues à la neige pour le calcul des constructions.
des régions
Elle ne s’applique pas aux sites d’une altitude supérieure à
2 000 m. Les données – hauteur de neige et/ou charges de neige – ont été
fournies par les instances nationales, puis traitées par des métho-
Elle ne traite pas :
des statistiques, déterminant ainsi des zones d’enneigement diffé-
– des chocs dus aux charges de neige glissant, ou tombant, d’une rentes selon les régions.
autre toiture ;
– de l’amplification de l’action du vent (modification de la forme Pour des raisons pratiques et simples d’application, le territoire
ou de la dimension du bâtiment ou de la formation de glace) ; national français a été découpé en « régions » par départements
– des charges de neige dans les zones où elle est présente toute et, pour les départements appartenant à plusieurs régions, par can-
l’année ; tons. Ce découpage est représenté par la carte de zonage de la
figure 1 qui en donne une image rapide et globale.
– des charges dues à la glace ;
– de la poussée latérale de la neige (congères) ; Pour plus de précisions, les tableaux 1 et 2 fournissent, respecti-
– des charges de neige sur les ponts. vement, les listes du découpage en « Régions » par départements et,
pour les départements appartenant à plusieurs régions, par cantons.
Les valeurs caractéristiques sk,0 sur le sol sont données pour une
altitude inférieure à 200 m. Ces valeurs caractéristiques, et celles
2. Classification des actions des charges accidentelles sAd, ont été déterminées pour un poids
volumique g moyen de la neige en plaine de 150 kg/m3. Elles font
de la neige l’objet du tableau 3, en fonction des régions pour une période de
retour de 50 ans (probabilité de dépassement sur une période de
1 an = 0,02).
& Les charges de neige doivent être classées comme des actions
variables fixes et statiques. Attention
Dans certaines zones protégées, ces valeurs peuvent être fournies
& Les charges exceptionnelles de neige doivent être classées par l’autorité nationale (arrêtés préfectoraux ou municipaux).
comme des actions accidentelles.
& Dans les conditions normales, la neige est considérée en situa- 3.2 Charges de neige au sol suivant
tion de projet durable et transitoire, avec ou sans accumulation. l’altitude
& Dans les conditions exceptionnelles, la neige est considérée en
Les lois de variation de la valeur caractéristique sk en fonction de
situation de projet accidentelle, sans accumulation.
l’altitude A (en m) dépend de la Région (tableau 4), alors :

sk = sk,0 + ∆si
Les situations de projet durables (exploitation), transitoires
(exécution) et accidentelles (exceptionnelle) sont définies dans
l’Eurocode EN 1990 [2]. La valeur de la charge accidentelle sAd est constante et indépen-
dante de l’altitude.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– CHARGES DE NEIGE SUR LES CONSTRUCTIONS SELON L’EUROCODE 1 – PARTIE 1-3

de la toiture (pas de déplacement possible de


la neige par le vent), ou = 1 dans tous les
autres cas,
Ct coefficient thermique (sans dimension) = 1 sauf
dans des spécifications particulières du marché
(bâtiments non isolés),
mi coefficient de forme (sans dimension).

Dans le cas où la pente nominale au fil de l’eau est faible (< 3 %),
il convient de majorer la charge de neige de 0,2 kN/m2. La figure 2
donne l’exemple de majoration dans le cas des noues.

Remarque
Il convient de majorer la charge de neige de 0,2 kN/m2 sur la
totalité de la toiture si la pente de celle-ci est inférieure à 3 %

(cas des constructions modulaires).

4.2 Coefficients de forme des toitures


Les valeurs des coefficients de forme m1 et m2 sont données en
fonction de l’angle a du toit avec l’horizontale, dans le tableau 5
et par la figure 3.
Les autres coefficients de forme (m3, ms, mw) apparaissent sur les
figures des toitures spécifiques auxquelles elles sont attachées
(figures 7, 8, 9 et 10).
Les coefficients de forme mi dépendent de la forme de la toiture
et permettent de déterminer les dispositions de charge de neige
sans accumulation et avec accumulation (redistribution de la
Régions : A1 A2 B1 B2 C1 C2 D E neige) comme indiqué sur les figures des § 4.2.1, § 4.2.2, § 4.2.3,
§ 4.2.4, et § 4.2.5.

Figure 1 – Carte de zonage


4.2.1 Toitures à versant unique

4. Charges de neige La figure 4 définit le cas de charge en prendre en compte avec un


coefficient de forme m1 et pour les toitures à versant unique.
sur les toitures
4.2.2 Toitures à deux versants
4.1 Dispositions de charge La figure 5 définit les cas de charges à prendre en compte avec
un coefficient de forme m1 pour les toitures à deux versants.
La charge de neige s’exerce verticalement et doit être rapportée à
Dans le cas où la toiture possède des barres à neige, ou des acro-
une projection horizontale de la surface de la toiture.
tères, le coefficient de forme ne sera pas inférieur à 0,8.
& Certains facteurs peuvent influencer des distributions diverses
de la neige dont :
4.2.3 Toitures à versants multiples
– la forme ;
– la pente de la toiture ; La figure 6 définit les cas de charge à prendre en compte avec
– les conditions météorologiques (vent, pluie, température…). des coefficients de forme m1 et m2 pour les toitures à versants
multiples.
& Deux dispositions de charge sont à prendre en compte :
– sans accumulation ; Si α1 > 60° et α2 < 45°, alors la règle ci - après s'applique
– accumulée (redistribuée). Si α1 > 60° et α2 > 45°, une étude particulière est nécessaire
& Il convient de vérifier la structure en :
4.2.4 Toitures cylindriques
– situations de projets durables et transitoires :
Le coefficient de forme m3 pour une toiture cylindrique est donné
s = µi ⋅ C e ⋅ C t ⋅ sk en fonction du rapport h/b, comme indiqué à la figure 7. Les sché-
mas des cas de charges à prendre en compte sont définis à la
– situations de projets accidentelles figure 8.

s = µi ⋅ C e ⋅ C t ⋅ sAd Si b est l’angle de la tangente avec la toiture cylindrique, alors :


Pour β > 60°, µ3 = 0
avec Ce coefficient d’exposition (sans dimension) = 1,25
dans des conditions d’abri quasi-permanentes Pour β ≤ 60°, µ3 = 0, 2 + 10 h / b

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Actions du vent sur les bâtiments


selon l’Eurocode 1 – Partie 1-4
par Danielle CLAVAUD
Chef de projet Recherche
Centre technique industriel de la construction métallique

1.
2.
Domaine d’application – Classification......................................
Vitesse et pression dynamique du vent .....................................
C 3 306 – 2
— 2

2.1 Vitesse de référence ........................................................................... — 2
2.2 Vent moyen ........................................................................................ — 3
2.2.1 Catégories de terrain ............................................................... — 3
2.2.2 Augmentation de la vitesse moyenne .................................... — 3
2.3 Turbulence du vent ............................................................................ — 10
2.4 Pression dynamique de pointe .......................................................... — 11
3. Actions du vent ............................................................................... — 12
3.1 Pressions aérodynamiques sur les surfaces ..................................... — 12
3.2 Forces exercées par le vent ............................................................... — 13
4. Coefficients de pression et de frottement ................................ — 13
4.1 Coefficients de pression pour les bâtiments ..................................... — 13
4.1.1 Coefficients de pression extérieure ........................................ — 13
4.1.2 Coefficients de pression intérieure ......................................... — 20
4.1.3 Coefficients de pression résultante ......................................... — 20
4.2 Coefficients de frottement ................................................................. — 24
5. Coefficient structural .................................................................... — 24
5.1 Définition de zs ................................................................................... — 25
5.2 Turbulence du vent ............................................................................ — 25
5.3 Fonction de densité spectrale SL(z, n) ............................................... — 25
5.4 Coefficient de réponse quasi-statique B2 .......................................... — 26
5.5 Facteur de pointe kp ........................................................................... — 26
5.6 Coefficient de réponse résonante R2 ................................................. — 27
5.7 Caractéristiques dynamiques des structures .................................... — 28
5.7.1 Fréquence fondamentale ......................................................... — 28
5.7.2 Déformée du mode fondamental ............................................ — 28
5.7.3 Masse équivalente me ............................................................. — 29
5.7.4 Décrément logarithmique d’amortissement d ........................ — 29
5.7.5 Décrément logarithmique d’amortissement structural ds ...... — 30
5.7.6 Valeurs du coefficient structural ............................................. — 30
6. Exemple d’application.................................................................... — 32
6.1 Détermination de la pression dynamique de pointe ........................ — 33
6.1.1 Vitesse de référence vb ............................................................ — 33
6.1.2 Pression dynamique de base .................................................. — 34
6.1.3 Coefficient d’exposition ........................................................... — 34
6.1.4 Pression dynamique de pointe ............................................... — 35
6.2 Forces exercées par le vent ............................................................... — 35
6.2.1 Coefficient structural cscd ........................................................ — 35
6.2.2 Coefficients de pression extérieure cpe ................................... — 35
7. Conclusion........................................................................................ — 40
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 3 306

’ensemble des règles techniques, harmonisées pour le dimensionnement


L des ouvrages de bâtiment et de génie civil au niveau européen, a été publié.
Ces normes européennes, appelées Eurocodes, remplacent les règles nationa-
les en vigueur.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。ゥ@RPQT

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ACTIONS DU VENT SUR LES BÂTIMENTS SELON L’EUROCODE 1 – PARTIE 1-4 ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Dans ce cadre, l’Eurocode 1 définit les actions sur les structures. Il est com-
posé de plusieurs parties rattachées à diverses actions. La partie 1-4 fournit des
indications pour la conception structurale des ouvrages de construction en ce
qui concerne les actions du vent. Une Annexe nationale apporte un ensemble
de précisions et de compléments, permettant l’application de cette norme, pour
la conception des ouvrages de construction à réaliser sur le territoire national
français.
La norme NF EN 1991-1-4 de novembre 2005 et son Annexe nationale
NF EN 1991-1-4/NA de mars 2008 – avec ses Amendements NF EN 1991-1-4/
NA/A1 d’octobre 2010 [1] [2]et NF EN 1991-1-4/NA/A2 de juin 2012 – sont desti-
nées aux calculateurs, aux concepteurs, aux constructeurs et aux autorités
publiques. Elles fixent les valeurs des vitesses du vent et permettent d’évaluer
R les efforts correspondants, agissant sur la structure d’une construction.
Pour la cohérence des calculs, elles sont destinées à être utilisées avec les
autres parties de l’Eurocode 1, ainsi qu’avec les autres Eurocodes. En particu-
lier, ceux qui traitent spécifiquement des structures (EN 1992 à 1999).
Les bâtiments doivent être conçus et dimensionnés pour résister aux vents les
plus forts qui sont susceptibles de se produire au cours de leur vie sur leur lieu
d’implantation. La carte des vitesses du vent sur notre territoire métropolitain
est basée sur une série de mesures de vitesses maximales effectuée par Météo
France. Pour les départements d’outre-mer, en particulier, les départements
soumis aux cyclones tropicaux, les vitesses des vents extrêmes ont été détermi-
nées à partir des relevés météorologiques et d’estimations basées sur la carto-
graphie du vent maximum historiquement vraisemblable [3] [4].

1. Domaine d’application – 2. Vitesse et pression


Classification dynamique du vent
Ce document se limite aux actions du vent sur les bâtiments cou- La vitesse du vent peut être considérée comme l’addition vecto-
rants dont la hauteur peut atteindre 200 m. rielle d’une composante représentant la vitesse moyenne et d’une
composante représentant la vitesse turbulente et instantanée.
L’EN 1991-1-4 traite plus largement des actions du vent sur :
– les ouvrages de génie civil ;
– les toitures isolées ; 2.1 Vitesse de référence
– les cylindres ;
– les structures en treillis ; Les valeurs caractéristiques sont déterminées à partir de la
– les ponts. vitesse de référence vb,0 (ou de la pression dynamique de référence
qb,0), dont la période moyenne de retour est de 50 ans (probabilité
Ces sujets pourront faire l’objet d’un document complémentaire. de dépassement p sur une période de 1 an = 0,02) et sont attachées
à la carte de zonage (figure 1). C’est une vitesse moyenne sur
Les actions du vent doivent être classées comme des actions 10 min, à une hauteur de 10 m, en rase campagne.
variables fixes.
Le découpage en « régions » par départements et, pour les
départements appartenant à plusieurs zones par cantons font res-
Elles sont considérées comme un ensemble simplifié de forces, pectivement l’objet des tableaux 1 et 2.
ou de pressions, d’effets équivalents aux effets extrêmes du vent
turbulent. Les pressions qui s’exercent sur les parois engendrent & Calcul de la pression dynamique q
des forces perpendiculaires à la surface de la construction. La pression dynamique q (en N/m2) est établie par application du
Elles doivent être déterminées pour chaque situation de projet. Les théorème de Bernoulli à partir de la vitesse du vent v (en m/s) :
évolutions au cours des phases d’exécution doivent être examinées.
1
La fatigue doit être prise en compte pour les structures sensibles. q= . ρ .v 2
2
L’ouverture d’une porte ou d’une fenêtre, fermée en situation de
projet durable, est considérée comme une situation de projet
avec r masse volumique de l’air = 1,225 kg/m3
accidentelle.
& Coefficients de direction (cdir) et de Saison (cseason)
Les situations de projet durables (exploitation), transitoires Cette valeur de base de référence peut, éventuellement, être cor-
(exécution) et accidentelles (exceptionnelle) sont définies dans rigée par :
l’Eurocode EN 1990.
– un coefficient de direction cdir (cdir max = 1) ;

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2.2 Vent moyen


La vitesse de vent moyen vm (z) est nécessaire pour calculer le
coefficient structural cscd.
La vitesse du vent est modifiée par :
– la hauteur z (en m) au-dessus du sol ;
– la rugosité du terrain attachée à la catégorie de terrain, définie
dans le tableau 5 ;
– l’orographie.

v m ( z ) = cr ( z ) . c 0 ( z ) . v b


avec vm (z) vitesse moyenne du vent à la hauteur z,
c0 (z) coefficient orographique,
cr (z) coefficient de rugosité :

= kr . ln (z / z 0 ) pour zmin ≤ z ≤ zmax


= cr (zmin ) pour z ≤ zmin

avec z0 longueur de rugosité de la catégorie de terrain


considérée,
kr facteur de terrain :

0, 07
⎛ z ⎞
= 0,19 . ⎜ 0 ⎟
⎝ z 0,II ⎠

Régions : 1
z 0,II = 0,05 m (catégorie de terrain II)
2 3 4
Valeurs de base de la vitesse de 22 zmax = 200 m
24 26 28
référence du vent vb,o [en m/s]
2.2.1 Catégories de terrain
Figure 1 – Carte de zonage La catégorie de terrain est à spécifier dans les documents du
marché. Les catégories de terrain et les différents paramètres atta-
– un coefficient de saison cseason (cseason max = 1) ; alors : chés à chacune de ces catégories sont définis dans le tableau 5.

Vb = Cdir . C season . Vb,0 Les figures 4, 5, 6, 7 et 8 donnent des illustrations des différen-
tes catégories de terrain.
À défaut de spécification dans les documents du marché, la rugo-
 Le coefficient de direction cdir ne s’applique à une valeur vb,0
sité du terrain peut être prise en compte en fonction de la distance
que si les directions de vent correspondantes (normales à une
sur laquelle s’étend cette rugosité et du secteur angulaire de 30 ,
face ± 45 ) sont entièrement contenues dans l’intervalle défini sur soit ± 15 par rapport à la direction du vent (indiquée par la
la figure 2. Les valeurs de ce coefficient de direction sont attachées figure 9).
à la carte de la figure 2.
Le rayon R du secteur angulaire dépend de la hauteur h de la
Le secteur angulaire nominal de ± 45 peut être ramené à ± 15 si
construction :
la construction a fait l’objet d’une étude par simulation (étude en
soufflerie ou simulation numérique).
R = 23 . h1,2
 Le coefficient de saison cseason, représenté à la figure 3, s’ap-
avec R > 300 m et h en m.
plique aux constructions provisoires ou en phase d’exécution.
Ce coefficient cseason peut être associé au coefficient de probabi- 2.2.2 Augmentation de la vitesse moyenne
lité cprob, dont les valeurs sont données dans le tableau 3.
La vitesse moyenne du vent peut augmenter du fait de l’orogra-
n phie (voir § 2.2.2.1) ou de la proximité d’une construction de
⎛ 1 − K . ℓn ⎡⎣ − ℓn (1 − p )⎤⎦ ⎞ grande hauteur (voir § 2.2.2.2).
cprob = ⎜ ⎟
⎝ 1 − K . ℓn ⎡⎣ − ℓn (0,98)⎤⎦ ⎠
2.2.2.1 Effets de l’orographie
avec K paramètre de forme = 0,15, Les effets de l’orographie peuvent être négligés si la pente
n exposant = 0,5 pour des probabilités p > 0,02. moyenne du terrain au vent est inférieure à 3 , alors, c0 (z) = 1.

 Le coefficient de saison pour les DOM exposés aux cyclones Le coefficient d’orographie c0 (z) est toujours ≥ 1 .
fait l’objet du tableau 4.

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ACTIONS DU VENT SUR LES BÂTIMENTS SELON L’EUROCODE 1 – PARTIE 1-4 ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Tableau 1 – Classement par département


Départements Région(s) Départements Région(s) Départements Région(s)

01 Ain 1;2 32 Gers 1 64 Pyrénées-Atlantiques 2

02 Aisne 2 33 Gironde 1;2 65 Hautes-Pyrénées 1

03 Allier 2 34 Hérault 3 66 Pyrénées-Orientales 3

04 Alpes-de-Haute-Provence 1;2 35 Ille-et-Vilaine 2 67 Bas-Rhin 2


05 Hautes-Alpes 1;2 36 Indre 2 68 Haut-Rhin 2

06 Alpes-Maritimes 1;2 37 Indre-et-Loire 2 69 Rhône 2

07 Ardèche 2 38 Isère 1;2 70 Haute-Saône 1;2

08 Ardennes 2 39 Jura 1 71 Saône-et-Loire 2

09 Ariège 2 40 Landes 1;2 72 Sarthe 2

10 Aube 2 41 Loir-et-Cher 2 73 Savoie 1

11 Aude 2;3 42 Loire 2 74 Haute-Savoie 1

12 Aveyron 2 43 Haute-Loire 2 75 Paris 2

13 Bouches-du-Rhône 3 44 Loire-Atlantique 2;3 76 Seine-Maritime 2;3

14 Calvados 2 45 Loiret 2 77 Seine-et-Marne 2

15 Cantal 1;2 46 Lot 1 78 Yvelines 2

16 Charente 1 47 Lot-et-Garonne 1 79 Deux-Sèvres 2

17 Charente-Maritime 1;2;3 48 Lozère 2 80 Somme 2;3

18 Cher 2 49 Maine-et-Loire 2 81 Tarn 1;2

19 Corrèze 1 50 Manche 2 82 Tarn-et-Garonne 1

2B Haute-Corse 3;4 51 Marne 2 83 Var 2

2A Corse-du-Sud 3;4 52 Haute-Marne 2 84 Vaucluse 2

21 Côte-d’Or 1;2 53 Mayenne 2 85 Vendée 3

22 Côtes-d’Armor 3 54 Meurthe-et-Moselle 2 86 Vienne 1

23 Creuse 1 55 Meuse 2 87 Haute-Vienne 1

24 Dordogne 1 56 Morbihan 3 88 Vosges 2

25 Doubs 1;2 57 Moselle 2 89 Yonne 2

26 Drôme 2 58 Nièvre 2 90 Territoire de Belfort 2

27 Eure 2 59 Nord 2;3 91 Essonne 2

28 Eure-et-Loir 2 60 Oise 2 92 Hauts-de-Seine 2

29 Finistère 3 61 Orne 2 93 Seine-Saint-Denis 2

30 Gard 2;3 62 Pas-de-Calais 2;3 94 Val-de-Marne 2

31 Haute-Garonne 1;2 63 Puy-de-Dôme 2 95 Val-d’Oise 2

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Tableau 2 – Départements appartenant à plusieurs régions – découpage selon les cantons à partir
du découpage administratif de la France publié par IGN – Paris 1997 (Édition 2)

Départements Région(s) Cantons

Bâgé-le-Châtel, Chalamont, Châtillon-sur-Chalaronne, Coligny, Meximieux, Miribel, Montluel,


2 Montrevel-en-Bresse, Pont-de-Vaux, Pont-de-Veyle, Reyrieux, Saint-Triviers-de-Courtes, Saint-
01 – Ain Triviers-sur-Moignans, Thoissey, Trévoux, Villars-les-Dombes

1 Tous les autres cantons

Annot, Barcelonnette, Colmars, Entrevaux, Javie (la), Lauzet-Ubaye (le), Saint-André-les-Alpes,


1


Seyne
04 – Alpes-de-Haute-Provence
2 Tous les autres cantons

Aspres-sur-Buëch, Barcillonnette, Laragne-Montéglin, Orpierre, Ribiers, Rosans, Serres, Tallard,


2
Veynes
05 – Hautes-Alpes
1 Tous les autres cantons

Guillaumes, Puget-Théniers, Saint-Étienne-de-Tinée, Saint-Martin-Vésubie, Saint-Sauveur-sur-


1
Tinée, Villars-sur-Var
06 – Alpes-Maritimes
2 Tous les autres cantons

Alaigne, Alzonne, Belpech, Carcassonne (tous cantons), Castelnaudary (tous cantons), Chala-
2
bre, Conques-sur-Orbiel, Fanjeaux, Limoux, Mas-Cabardès, Montréal, Saissac, Salles-sur-l’Hers
11 – Aude
3 Tous les autres cantons

Allanche, Chaudes-Aigues, Condat, Massiac, Murat, Pierrefort, Ruynes-en-Margeride, Saint-


2
Flour (tous cantons)
15 – Cantal
1 Tous les autres cantons

1 Montendre, Montguyon, Montlieu-la-Garde

Archiac, Aulnay, Burie, Cozes, Gémozac, Jonzac, Loulay, Matha, Mirambeau, Pons, Saintes
17 – Charente-Maritime 2 (tous cantons), Saint-Genis-de-Saintonge, Saint-Hilaire-de-Villefranche, Saint-Jean-d’Angély,
Saint-Porchaire, Saint-Savinien, Saujon, Tonnay-Boutonne,

3 Tous les autres cantons

4 Bonifacio, Figari, Levie, Porto-Vecchio, Serra-di-Scopamène


2A – Corse-du-Sud
3 Tous les autres cantons

3 Belgodère, Calenzana, Calvi, Île-Rousse (l’)


2B – Haute-Corse
4 Tous les autres cantons

Auxonne, Chenôve, Dijon (tous cantons), Fontaine-Française, Fontaine-les-Dijon, Genlis, Gran-


1 cey-le-Château-Neuvelle, Is-sur-Tille, Mirebeau-sur-Bèze, Pontailler-sur-Saône, Saint-Jean-de-
21 – Côte-d’Or Losne, Saint-Seine-l’Abbaye, Selongey

2 Tous les autres cantons

Audincourt, Clerval, Etupes, Hérimoncourt, Isle-sur-le-Doubs (l’), Maı̂che, Montbéliard (tous


2
cantons), Pont-de-Roide, Saint-Hippolyte, Sochaux, Valentigney
25 – Doubs
1 Tous les autres cantons

Aigues-Mortes, Aimargues, Aramon, Beaucaire, Bouillargues, Saint-Gilles, Marguerittes, Nı̂mes


3
(tous cantons), Quissac, Saint-Mamert-du-Gard, Sommières, Vauvert
30 – Gard
2 Tous les autres cantons

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ACTIONS DU VENT SUR LES BÂTIMENTS SELON L’EUROCODE 1 – PARTIE 1-4 ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Tableau 2 – Départements appartenant à plusieurs régions – découpage selon les cantons à partir
du découpage administratif de la France publié par IGN – Paris 1997 (Édition 2) (suite)

Départements Région(s) Cantons

2 Auterive, Caraman, Cintegabelle, Lanta, Montgiscard, Nailloux, Revel, Villefranche-de-Lauragais


31 – Haute-Garonne
1 Tous les autres cantons

2 Castelnau-de-Médoc, Lesparre-Médoc, Pauillac, Saint-Laurent-Médoc, Saint-Vivien-de-Médoc


33 – Gironde
1 Tous les autres cantons

R 38 – Isère
2

1
Beaurepaire, Heyrieux, Roussillon, Saint-Jean-de-Bournay, Vienne (tous cantons)

Tous les autres cantons

Amou, Castets, Dax (tous cantons), Montfort-en-Chalosse, Mugron, Peyrehorade, Pouillon,


2
Saint-Martin-de-Seignanx, Saint-Vincent-de-Tyrosse, Soustons, Tartas (tous cantons)
40 – Landes
1 Tous les autres cantons

Ancenis, Blain, Châteaubriant, Derval, Guémené-Penfao, Ligné, Moisdon-la-Rivière, Nort-sur-


2 Erdre, Nozay, Riaillé, Rougé, Saint-Julien-de-Vouvantes, Saint-Marc-la-Jaille, Saint-Nicolas-de-
44 – Loire-Atlantique Redon, Varades

3 Tous les autres cantons

Arleux, Anzin, Avesnes-sur-Helpe (tous cantons), Bavay, Berlaimont, Bouchain, Cambrai (tous
cantons), Carnières, Cateau-Cambrésis (le), Clary, Condé-sur-l’Escaut, Denain, Douai (tous can-
2 tons), Hautmont, Landrecies, Marchiennes, Marcoing, Maubeuge (tous cantons), Solre-le-Châ-
59 – Nord teau, Orchies, Quesnoy (le) (tous cantons), Saint-Amand-les-Eaux (tous cantons), Solesmes,
Trélon, Valenciennes (tous cantons)

3 Tous les autres cantons

2 Bapaume, Bertincourt, Croisilles, Marquion, Vitry-en-Artois


62 – Pas-de-Calais
3 Tous les autres cantons

Autrey-lès-Gray, Champlitte, Dampierre-sur-Salon, Fresne-Saint-Mamès, Gray, Gy, Marnay,


1
Montbozon, Pesmes, Rioz, Scey-sur-Saône-et-Saint-Albin
70 – Haute-Saône
2 Tous les autres cantons

Bacqueville-en-Caux, Blangy-sur-Bresle, Cany-Barville, Eu, Dieppe (tous cantons), Envermeu,


3
Fontaine-le-Dun, Offranville, Saint-Valery-en-Caux
76 – Seine-Maritime
2 Tous les autres cantons

Ailly-sur-Noye, Albert, Bray-sur-Somme, Chaulnes, Combles, Ham, Montdidier, Moreil, Nesle,


2
Péronne, Roisel, Rosières-en-Santerre, Roye
80 – Somme
3 Tous les autres cantons

Cadalen, Castelnau-de-Montmiral, Cordes-sur-Ciel, Gaillac, Graulhet, Lavaur, Lisle-sur-Tarn,


1
Rabastens, Saint-Paul-Cap-de-Joux, Salvagnac, Vaour
81 – Tarn
2 Tous les autres cantons

& Obstacles de hauteurs et de formes variées avec : DAc = Ac - Am


Si l’orographie est constituée d’obstacles de hauteurs et de for- avec Ac altitude du lieu de construction,
mes variées (cas le plus fréquent de terrain complexe), alors, C 0 ≥ 1 Am altitude moyenne locale du terrain
−0, 014 (z −10)
Pour z ≥ 10 m c 0 = 1 + 0,004 . ΔAc . e
Pour z < 10 m c 0 = c 0 (10) (
Am = 1/10 2 ⋅ Ac + AN1 + AN2 + AE1 + AE2 + AS2 + AO1 + AO2 )

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––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– ACTIONS DU VENT SUR LES BÂTIMENTS SELON L’EUROCODE 1 – PARTIE 1-4

(Nord)

3600
00

vent Cdir = 1 sauf dans les cas suivants

2700 900 Secteur angulaire nominal


Zone Cdir
inclus dans l’intervalle :
(Ouest) (Est)

1 [10° - 150°] 0,70


1800
(Sud) 2 [70° - 150°] 0,70

Conventions de repérage 3 [50° - 250°] 0,85


de la direction du vent

Figure 2 – Valeurs et secteurs angulaires du coefficient de direction

avec AN1 , AE1 , AS1 , AO1 & Orographie constituée d’obstacles individualisés
altitude aux points situés dans les 4 directions cardinales (nord, est,
sud, ouest) à 500 m du lieu de construction,  Sur les collines isolées (ou en chaı̂ne), ou les falaises et les
escarpements, la vitesse du vent varie en fonction de la pente
AN2 , AE2 , AS2 , AO2 F = H/Lu du versant amont, dans la direction du vent, comme défini
altitude aux points situés dans les 4 directions cardinales à 1 000 m à la figure 10. Les collines en chaı̂ne et les falaises ou escarpe-
du lieu de construction. ments ont une grande longueur perpendiculairement au vent,

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ACTIONS DU VENT SUR LES BÂTIMENTS SELON L’EUROCODE 1 – PARTIE 1-4 ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

égale au moins à 10 fois la hauteur H de l’obstacle. Les collines iso-


lées ont une longueur limitée par comparaison à leur hauteur, de
sorte que le vent peut les contourner latéralement.
Le coefficient d’orographie est :

c 0 = v m (z ) /v mf (z )

avec vm (z) vitesse moyenne du vent à la hauteur z au-des-


sus du terrain,
vmf (z) vitesse moyenne du vent à la hauteur z au-des-
sus d’un terrain plat.


 Au voisinage du sommet, à une distance du sommet IXI < kredL,
défini comme suit :

c0 = 1 pour Φ < 0,05


⎛ X ⎞ − αz /L
c 0 = 1 + Smax ⎜⎝ 1 − k L ⎟⎠ . e pour Φ ≥ 0,05
red

avec Smax coefficient fonction de la forme de l’obstacle et


du rapport H/L et donné dans le tableau 6,
Lu longueur du versant au vent, en suivant la
direction du vent,
L longueur caractérisant le versant au vent :

= Lu / 2 pour Φ < 0,25


= 2H pour Φ > 0,25

Avril à septembre : 0,8 0,9 X distance horizontale entre le lieu de construc-


Octobre à mars : 1,0 1,0 tion considéré et le sommet de l’obstacle,
z distance verticale mesurée à partir du niveau
Figure 3 – Valeurs du coefficient de saison pour la métropole
du sol au lieu considéré,
a et kred coefficients définis dans le tableau 6.
Tableau 3 – Valeurs du coefficient de probabilité cprob Toutes ces définitions sont données sur la figure 11, concernant
les collines isolées ou en chaı̂ne et sur la figure 12, concernant les
Probabilité p de dépassement 0,02 0,04 0,10 0,20 0,50 falaises et escarpements.

Période de retour (en années) 50 25 10 5 2 2.2.2.2 Effets de la proximité d’une construction de grande
hauteur
cprob 1,00 0,97 0,92 0,88 0,82
Les vitesses de vent peuvent être augmentées par la proximité
d’une construction (C) de grande hauteur H (H > 30 m).
Il convient de tenir compte de l’aggravation des effets du vent
Tableau 4 – Valeurs du coefficient de saison pour les DOM sur les constructions avoisinantes de hauteur h < H/2 et situées à
exposés aux cyclones une distance x de (C).
avec x distance minimale entre une façade de la cons-
Départements Saisons cseason truction étudiée et une façade ou un angle de
(C) :
Décembre à mai 0,55
Guadeloupe
Juin à novembre 1 x < 2r avec r = min (H , 2L )

Décembre à mai 0,60 avec L plus grande dimension en plan de (C),


Martinique
Juin à novembre 1
Si x < r hauteur de référence : z e = r / 2
Juin à septembre 0,65 Si r ≤ x < 2r hauteur de référence :
Mayotte
Octobre à mai 1
1 ⎡ ⎛ 2 h⎞ ⎤
ze = r − ⎜1− ⎟ . ( x − r )⎥
2 ⎢⎣ ⎝
Juin à septembre 0,60
r ⎠ ⎦
Réunion
Octobre à mai 1
Ces dimensions font l’objet de la figure 13.

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––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– ACTIONS DU VENT SUR LES BÂTIMENTS SELON L’EUROCODE 1 – PARTIE 1-4

Tableau 5 – Catégories et paramètres de terrain


z0 zmin kl
Catégories de terrain kr
(en m) (en m) (c0 = 1)

0 – Mer, ou zone côtière, exposée aux vents de mer ; lacs et plans d’eau parcourus par le vent
0,005 1 0,162 1
sur une distance d’au moins 5 km

II – Rase campagne, avec, ou non, quelques obstacles isolés (arbres, bâtiments,…) séparés les
0,05 2 0,190 0,995
uns des autres de plus de 40 fois leur hauteur

IIIa – Campagne avec des haies ; vignobles ; bocage ; habitat dispersé 0,20 5 0,209 0,970

IIIb – Zones urbanisées ou industrielles ; bocage dense ; vergers 0,5 9 0,223 0,923 R
IV – Zones urbaines, dont au moins 15 % de la surface est recouvert de bâtiments dont la
1,0 15 0,234 0,854
hauteur moyenne est supérieure à 15 m

Figure 4 – Catégorie de terrain 0 (mer) et IV (ville) Figure 6 – Catégorie de terrain IIIa (campagne avec haies, bocage)

Figure 5 – Catégorie de terrain II (rase campagne, aéroport)

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Méthodes de calcul et conception
(Réf. Internet 42825)

1– Méthodes iabilistes en construction

2– Eurocode 1

3– Règles antisismiques Réf. Internet page

Conception et dimensionnement parasismiques des ponts selon l'EC8-2 C249 47

Seismes et bâtiments. Analyse des constructions C3290 53

Séismes et bâtiments. Conception et normes parasismiques C3291 59

Constructions parasismiques en acier. Contexte de l'Eurocode 8 C2559 69

Constructions parasismiques mixtes acier-béton. Contexte de l'Eurocode 8 C2569 75

4– Méthode de calcul non linéaire

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Conception et dimensionnement
parasismiques des ponts
selon l’EC8-2
par Denis DAVI
Ingénieur divisionnaire des travaux publics de l’État – Référent risque sismique et
infrastructures
Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et
l’aménagement (Cerema) – Direction territoriale Méditerranée (Aix-en-Provence, France)

1. Nouvelle législation sismique nationale – Normes


et références .................................................................................... C 249 – 3

1.1 Arrêté du 26 octobre 2011 .................................................................. — 3
1.2 Références normatives ....................................................................... — 3
1.2.1 Normes de calcul : Eurocodes et annexes nationales ............ — 3
1.2.2 Normes produits ...................................................................... — 3
1.3 Références et guides méthodologiques ............................................ — 3
2. Différentes stratégies de conception parasismique
des ponts selon l’Eurocode 8-2 .................................................... — 4
2.1 Principes de conception parasismique des ponts neufs .................. — 4
2.1.1 Nature des sollicitations sismiques et comportements
des ouvrages d’art ................................................................... — 4
2.1.2 Objectifs de performance réglementaires et États-limites
de référence ............................................................................. — 6
2.2 Différentes stratégies de conception parasismique des ponts ......... — 6
2.2.1 Conception quasi-élastique (ou en ductilité limitée) .............. — 6
2.2.2 Conception ductile ................................................................... — 6
2.2.3 Conception basée sur les principes d’isolation sismique et/
ou d’amortissement ................................................................. — 7
2.3 Méthodes d’analyse sismique ........................................................... — 8
2.3.1 Méthodes en force ................................................................... — 8
2.3.2 Méthodes en déplacement (analyses « en poussée
progressive » ou « push-over ») ............................................. — 10
2.3.3 Méthodes dynamiques temporelles non-linéaires ................. — 15
2.3.4 Éléments de comparaison des différentes méthodes ............ — 16
2.4 Dispositions constructives parasismiques ........................................ — 16
2.4.1 Importance des dispositions constructives ............................ — 16
2.4.2 Étendue des zones concernées et prescriptions générales ... — 17
2.5 Tableau récapitulatif ........................................................................... — 18
3. Principales évolutions par rapport aux pratiques
antérieures issues des règles AFPS92 ........................................ — 18
3.1 Caractérisation de l’aléa sismique, qualification des sols et effets
de site ................................................................................................. — 18
3.2 Principe de « ductilité limitée » et introduction des raideurs
fissurées ............................................................................................. — 19
3.3 Dimensionnement en capacité .......................................................... — 20
3.4 Dispositions constructives ................................................................. — 20
3.5 Introduction des méthodes de calcul non-linéaires
et des dispositifs spéciaux de type « amortisseurs » ....................... — 20
4. Conséquences sur la performance et le dimensionnement
des ouvrages .................................................................................... — 21
5. Conclusion et perspectives........................................................... — 21
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 249
p。イオエゥッョ@Z@ョッカ・ュ「イ・@RPQT

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CONCEPTION ET DIMENSIONNEMENT PARASISMIQUES DES PONTS SELON L’EC8-2 –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

ne fois le long processus d’écriture et de validation terminé, les Eurocodes


U sont aujourd’hui entrés dans leur phase opérationnelle. La conception et le
dimensionnement des ouvrages d’art, sont déterminés par les Eurocodes :
– EC0 pour les bases de calcul ;
– EC1 pour les charges ;
– EC2, EC3, EC4 et EC5 pour les matériaux utilisés habituellement en ouvrages
d’art ;
– EC7 pour les aspects géotechniques.
Une des grandes nouveautés des Eurocodes réside dans l’Eurocode 8. Entiè-
rement consacré à la conception parasismique, et placé au même niveau que
les principaux autres Eurocodes, il permet d’intégrer les dernières avancées,
scientifique et technologique, relatives à la connaissance et à la prise en compte
du risque sismique dans la conception et le dimensionnement des ouvrages
d’art (définition et représentation de l’aléa sismique, méthodes d’analyse du


comportement dynamique des structures, dispositifs spéciaux de protection
parasismique…).
Les anciennes règles PS 92 et, notamment, le guide AFPS 92 pour la protec-
tion parasismique des ponts, sont rendus obsolètes par ces normes. Les diffé-
rents textes réglementaires (décret de 1991 et Arrêté « pont » du 15 septembre
1995) ont été révisés de façon à faire référence à l’Eurocode 8.
Si les grands principes de conception sont globalement conformes aux prati-
ques héritées de l’application des anciennes règles PS92, plusieurs évolutions
significatives sont toutefois à noter. Par rapport à ces précédentes règles de
calcul, elles modifient sensiblement les habitudes et pratiques des ingénieurs
en charge du dimensionnement des ouvrages, vis-à-vis des actions liées à la
prise en compte du séisme. En particulier, le zonage sismique de la France a
été revu : d’une part, pour intégrer les nouvelles connaissances scientifiques
relatives à la sismicité nationale ; d’autre part, pour prendre en compte la phi-
losophie probabiliste des Eurocodes et de l’Eurocode 8 en particulier.
Le présent article s’appuie largement sur le guide « Ponts en zones sismiques
– Conception et dimensionnement selon l’Eurocode 8 », rédigé par le Service
d’études sur les transports, les routes et leur aménagement (Sétra), et le Centre
d’études techniques de l’équipement (CETE) Méditerranée, services techniques
du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie, notam-
ment en charge des infrastructures de transport. Il présente les principales évo-
lutions apportées par la nouvelle législation dans les pratiques du dimension-
nement et de l’analyse du comportement sismique des ouvrages d’art. Il tente
d’en évaluer les conséquences en termes de difficulté de mise en œuvre, niveau
de performance ou de sécurité des ouvrages et coûts associés.
Nota : Depuis le 1er janvier 2014, les 8 CETE, le Certu, le Cetmef et le Sétra ont fusionné pour donner naissance au Cerema :
Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (http://www.cerema.fr/).
– CETE : Centre d’études techniques de l’équipement ;
– Certu : Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme, et les constructions publiques ;
– Cetmef : Centre d’études techniques maritimes et fluviales ;
– Sétra : Service d’études sur les transports, les routes et leurs aménagements.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– CONCEPTION ET DIMENSIONNEMENT PARASISMIQUES DES PONTS SELON L’EC8-2

1. Nouvelle législation tous les Eurocodes matériaux et de charges avec lesquels il est
totalement compatible. Contrairement à la plupart des autres Euro-
sismique nationale – codes, qui sont d’application volontaire (selon le décret n 2006 du
1er août 2006 abrogeant l’article 13 du décret n 84-74), l’Eurocode 8
Normes et références qui touche à la sécurité publique au sens de l’article 12 du décret de
1984 modifié, est d’application obligatoire, y compris pour les
ouvrages non-calculés avec les Eurocodes « matériaux ».
1.1 Arrêté du 26 octobre 2011 L’Eurocode 8 n’est pas un texte unique, mais est composé de
er
5 textes européens, ayant chacun une annexe nationale. Pour les
Depuis le 1 janvier 2012, les maı̂tres d’ouvrage d’infrastructures ponts, seules les parties 1 (chapitres relatifs aux règles générales
de transport sont soumis à l’application de l’Arrêté du 26 octobre et actions sismiques), 2 (ponts), et 5 (fondations, ouvrages de sou-
2011, relatif à la classification et aux règles de construction parasis- tènement et aspects géotechniques) s’imposent. Ces parties ne
mique applicables aux ponts de la classe dite « à risque normal »,
concernent que les ouvrages neufs et ont été exclusivement rédi-
qui remplace et abroge l’ancien Arrêté du 15 septembre 1995.
gées dans ce sens.
Sont visés par cet Arrêté les ponts neufs définitifs, incluant les
passerelles, publics ou privés, ainsi que les murs de soutènement
qui en sont solidaires.
Ce nouveau corpus normatif permet d’intégrer les dernières


Cet Arrêté s’intègre dans la nouvelle législation sismique natio- avancées scientifiques et technologiques relatives à la connais-
nale publiée fin 2010 et, notamment, les deux décrets plus sance et à la prise en compte du risque sismique (définition et
généraux : représentation de l’aléa sismique, comportement dynamique
– le décret n 2010-1254 du 22 octobre 2010 relatif à la prévention des structures sous sollicitations sismiques, dispositifs spéciaux
du risque sismique, qui fixe le cadre général pour l’application des de protection parasismique…), dans la conception et le dimen-
règles de construction parasismiques en France ; sionnement des ouvrages d’art.
– le décret n 2010-1255 du 22 octobre 2010 portant délimitation
des zones de sismicité du territoire français, qui définit le nouveau
zonage sismique national.
1.2.2 Normes produits
L’Arrêté précise, en la déclinant au cas des ponts, la définition des
quatre catégories d’importance des ouvrages de la classe dite « à En complément des Eurocodes, d’autres normes sont utiles pour
risque normal », telles que définies par le décret n 2010-1254 du la conception parasismique des ouvrages. Il s’agit, notamment, des
22 octobre 2010. Il impose l’application de l’Eurocode 8 pour la normes pour les appareils d’appui et les dispositifs parasismiques :
construction des ponts neufs définitifs, et précise les compléments
nécessaires apportés par l’administration française à cette norme et – NF EN 15129 « Dispositifs antisismiques » ;
à son annexe nationale (accélérations de référence et de calcul, – NF EN 1337 « Appareils d’appui structuraux » pour la justifica-
coefficients d’importance associés aux différentes catégories, para- tion des appareils d’appui avec les sollicitations dites « de service »,
mètres des spectres de réponse…). et leur compatibilité vis-à-vis des situations « non-sismiques ».

L’Arrêté exclut explicitement les ponts de catégorie d’impor-


tance I, ainsi que ceux situés en zone de sismicité très faible
(zone 1), du champ d’application obligatoire des règles para-
1.3 Références et guides
sismiques qui y sont définies. méthodologiques

À noter que les définitions des catégories d’importances I, II, III et Afin d’assister les maı̂tres d’ouvrage, maı̂tres d’œuvre et concep-
IV sont strictement conformes à celles des classes A, B, C, D de teurs, dans la prise en compte du risque sismique sur les ouvrages
l’ancien Arrêté. À ceci près que l’alignement de la catégorie d’art, et dans l’application de la nouvelle législation sismique natio-
d’importance d’un ouvrage, dont l’endommagement pourrait pro- nale et de l’Eurocode 8-2, le Sétra et le CETE Méditerranée (qui ont
voquer des dommages à un bâtiment, un équipement ou une ins- fusionné au sein du Cerema, depuis le 1er janvier 2014) ont diffusé
tallation de catégorie d’importance supérieure, sur celle de l’instal- en version provisoire, dès février 2012, un guide méthodologique
lation menacée, est limité aux seules installations de catégorie IV. d’application de ces textes [1]. Ce document sera prochainement
diffusé en version définitive, et complété par un deuxième guide
spécifique aux ouvrages existants [C 7 406].
Remarque
Contrairement aux cas des bâtiments et installations classés, Parallèlement à ces deux guides, l’Association française du génie
le champ d’application de l’Arrêté sismique « ponts » se limite parasismique (AFPS) a édité un cahier technique AFPS/Cerema [3],
strictement aux ouvrages nouveaux définitifs [C 7 406]. plus spécifiquement dédié à la fourniture, à la qualification et à
l’emploi des dispositifs parasismiques spéciaux sur les ponts (iso-
En outre, la clause de l’ancien Arrêté du 15 sept. 1995 « Les lateurs, amortisseurs, fusibles, butées, connecteurs dynamiques…)
ponts construits en utilisant tout ou partie des fondations d’un
et conforme aux prescriptions de la norme NF EN 15129 « Disposi-
ouvrage antérieur sont considérés, pour l’application du présent
tifs antisismiques ».
Arrêté, comme ponts nouveaux. », jugée trop pénalisante, a été
supprimée dans le nouvel Arrêté. Parmi les autres documents méthodologiques français de réfé-
rence traitant de la prise en compte du risque sismique sur les
ponts, on pourra citer :
1.2 Références normatives – le guide AFPS [2], spécifiquement dédié aux dispositions cons-
tructives, pour différents types de structures (ponts et bâtiments) et
1.2.1 Normes de calcul : Eurocodes et annexes différents matériaux, qui en explique les objectifs et principes et
nationales présente divers schémas de détails ;
Les normes de calcul à utiliser sont les Eurocodes et leurs anne- – le guide AFPS/CFMS [6] qui traite notamment de la réduction
xes nationales. L’Eurocode 8 (NF EN 1998) fait, en effet, référence à du risque liquéfaction au droit des constructions.

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CONCEPTION ET DIMENSIONNEMENT PARASISMIQUES DES PONTS SELON L’EC8-2 –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

2. Différentes stratégies Pour représenter ce phénomène d’amplification, les ingénieurs


utilisent généralement la notion de spectre de réponse. Cette repré-
de conception sentation permet de déterminer pour un séisme donné (réel ou
réglementaire) et en fonction des conditions de sol, la sollicitation
parasismique des ponts – maximale obtenue dans un oscillateur simple à un degré de liberté,
en fonction de sa période propre de vibration, et de son degré
selon l’Eurocode 8-2 d’amortissement structural (figure 2).

Remarques
2.1 Principes de conception Par rapport aux sollicitations usuelles que doit supporter un
pont en zone non-sismique (trafic routier ou ferroviaire, varia-
parasismique des ponts neufs tion de température…), les efforts et déplacements imposés
par les séismes, se distinguent :
2.1.1 Nature des sollicitations sismiques – par une forte composante horizontale ;
et comportement des ouvrages d’art – par le fait que ces sollicitations sont directement propor-
& Nature des sollicitations sismiques tionnelles à la masse de la structure, qui se trouve générale-
ment concentrée au niveau du tablier (figure 3).
Au cours d’un séisme, la libération brutale de l’énergie de défor- Les sollicitations verticales sous séisme sont, en général, plus


mation, accumulée dans les roches par le jeu des mouvements faibles que les sollicitations horizontales. Elles sont, dans la
relatifs des différentes parties de l’écorce terrestre (les plaques plupart des cas, couvertes par le dimensionnement sous les
lithosphériques), donne naissance aux ondes sismiques qui se pro- charges d’exploitation des ponts (trafic).
pagent et atteignent la surface du sol, mettant ce dernier en En outre, comparativement au cas des bâtiments, l’action sis-
vibration. mique peut ici varier sur la longueur de l’ouvrage, en fonction
Ces mouvements du sol excitent les ouvrages par déplacement de la nature, ou de la qualité des sols supports, et de la rigidité
de leurs fondations, entraı̂nant ainsi la mise en mouvement des relative des différents appuis (figure 4).
masses de la structure, et induisant des forces inertielles (produits
des masses par les accélérations d’entraı̂nement) auxquelles elle
doit être capable de résister.
La vibration enregistrée au niveau du sol est généralement repré-
sentée par des accélérogrammes (enregistrements réels ou accélé- S0/a0
rogrammes artificiels construits sur des méthodes statistiques), qui
définissent l’accélération du mouvement sismique en fonction du
temps (figure 1). Elle est définie par des courbes qui fluctuent de 2,5 S0
manière irrégulière autour de la valeur nulle, dont la durée est très
variable, de l’ordre de quelques secondes, à quelques dizaines de
secondes, et dont les principales caractéristiques sont :
– sa durée totale (ou plutôt, la durée de la plage des mouvements
significatifs) ;
– ses maxima d’accélération, de vitesse et de déplacement (Amax,
Vmax, Dmax).
S
Ces mouvements sont plus ou moins amplifiés dans la structure.
Le niveau d’amplification (qui se rapproche du phénomène bien
connu de résonance) dépend essentiellement :
– des masses et des raideurs des différentes parties de la struc-
ture (et donc, des périodes propres de vibration de la structure) ;
– de la nature du sol. TB TC T0 T

Figure 2 – Allure générale des spectres de réponse (source EC8-1,


figure 3.1)
0,10
0,08
0,06
Accélération (en g)

0,04
0,02
Force
0,00 d’inertie Force
0,00 0,20 0,40 60,00 80,00 d’inertie
-0,02
-0,04
-0,06
-0,08
-0,10 Action horizontale Action horizontale
Temps (en s) du séisme du séisme

Figure 1 – Exemple d’accélérogramme (séisme de Nice 2001 issu


de la station NALS du Réseau accélérométrique permanent) Figure 3 – Action sismique sur les ponts

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– CONCEPTION ET DIMENSIONNEMENT PARASISMIQUES DES PONTS SELON L’EC8-2

& Comportements des ouvrages d’art – Observations et retours adoptant, si possible, une variation progressive et symétrique des
d’expériences hauteurs de pile (figure 6).
L’observation et l’interprétation des dégâts causés par les séis-
mes anciens ou récents sur les ponts ont permis d’identifier un cer- Exemple
tain nombre de causes de fragilité classiques et récurrentes liées à Une conception classique pourra consister à bloquer transversale-
ment le tablier au droit des culées par l’emploi de butées parasismi-
des défauts de conception et directement liées à la nature des sol-
ques et à reprendre les efforts longitudinaux sur les trois ou quatre
licitations telles que décrites ci-dessus. Il s’agit plus particulière-
piles centrales au moyen d’appareils d’appui élastiques (élastomère
ment (figure 5) des risques suivants :
fretté) ou de connexions rigides (encastrement, butées longitudina-
– échappement du tablier de ses appuis (figure 5a) qui se produit les, connecteurs dynamiques…).
généralement dans le cas d’une connexion souple entre le tablier et Le dimensionnement consistera alors à garantir une robustesse
les appuis (appareils d’appui en élastomère fretté ou glissants) et suffisante des différents éléments de structures (appuis en particu-
lorsque les surfaces d’appui sont insuffisantes ; lier) vis-à-vis des sollicitations engendrées, et à s’assurer que les
– rupture des piles (ou culées) (figure 5b) dans le cas de conne- déplacements induits au niveau du tablier sont correctement évalués
xions rigides entre tablier et appuis (encastrement ou butées), et et maı̂trisés, afin d’éviter tout risque d’échappement d’appui.
lorsque ceux-ci sont insuffisamment dimensionnés pour résister
aux efforts sismiques induits par la mise en mouvement du tablier Les calculs et méthodes d’analyse sismiques développés dans la
(ou la poussée dynamique des terres, à l’arrière des culées). Cette suite de l’article (cf. § 2.3) ont pour objectif de déterminer la


insuffisance peut notamment se traduire par : réponse de l’ouvrage au mouvement tellurique transmis par le sol
– des arrachements d’ancrages ou de recouvrements des aciers au niveau de ses fondations ; le terme « réponse » signifiant les
longitudinaux ; sollicitations : déplacements, accélérations et forces d’inertie résul-
– un phénomène de flambement de ces mêmes aciers ; tantes subis par l’ouvrage. Ces calculs, qui relèvent du domaine de
la dynamique des structures, peuvent en pratique se révéler déli-
– des ruptures par manque de confinement, par flexion ou par
cats du fait, d’une part, de l’aspect aléatoire de l’excitation et, d’au-
effort tranchant de certaines sections, notamment à proximité des
tre part, des notions théoriques auxquelles ils font appel et relati-
zones d’encastrement les plus sollicitées.
ves à la fois au caractère dynamique du phénomène et à la prise
L’approche de conception parasismique des ponts est générale- en compte des incursions dans le domaine non-linéaire des struc-
ment menée en distinguant les directions longitudinale et transver- tures et des matériaux constitutifs.
sale de l’ouvrage. Elle consiste :
– à rechercher une répartition optimale des efforts inertiels prove- Remarque
nant du tablier entre les différents appuis ; Au-delà des sollicitations directement liées au phénomène
– à faire en sorte que le comportement dynamique de l’ouvrage vibratoire (forces inertielles résultant de la mise en vibration
soit le plus régulier possible, en limitant le biais et la courbure et en des masses de la structure), un certain nombre de phénomènes
« indirects », induits par le séisme, peuvent menacer l’intégrité
structurale de l’ouvrage : liquéfaction des sols, glissements de
terrain, chutes de blocs, décrochements de failles en surface,
tsunamis…. Il convient, le cas échéant, de bien les appréhender
au stade des premières études de conception.

a favorable b défavorable

Figure 6 – Exemples de distributions, favorable et défavorable,


Figure 4 – Variabilité spatiale de l’action sismique sur les ponts des hauteurs de piles

a effondrement par échappement d’appui b effondrement par rupture de piles par excès
(source NISEE e-Library) de cisaillement (source Priestley et al. [4])

Figure 5 – Exemples d’effondrements d’ouvrages lors du séisme de Kobe (Japon, 1995)

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Séismes et bâtiments
Analyse des constructions
par André PLUMIER
Professeur honoraire de l’université de Liège, membre du comité de rédaction de
l’Eurocode 8
Président de la Commission belge de Normalisation des règles de construction
parasismique
Consultant, Plumiecs sprl, Tilff (Belgique)

Note de l’éditeur
Cet article est la réédition actualisée de la première partie de l’article [C 3 290] intitulé


« Constructions parasismiques » paru en 1997 et qui avait été rédigé par Jacques
BETBEDER-MATIBET et Jean-Louis DOURY

1. Éléments de sismologie de l’ingénieur ....................................... C 3 290v2 –2


1.1 Causes des séismes ........................................................................... — 2
1.1.1 Tectonique des plaques ........................................................... — 2
1.1.2 Autres causes de séismes ....................................................... — 3
1.2 Données sur les mouvements sismiques .......................................... — 3
1.2.1 Données d’observation : échelles d’intensité ......................... — 3
1.2.2 Données d’enregistrement : magnitudes ............................... — 4
1.3 Théorie élémentaire du mouvement sismique ................................. — 5
1.3.1 Modèle élémentaire de faille ................................................... — 5
1.3.2 Lois d’atténuation .................................................................... — 8
1.4 Action sismique de calcul sur un site donné .................................... — 11
1.4.1 Évaluation de l’aléa sismique ................................................. — 11
1.4.2 Caractérisation par spectres de réponse ................................ — 12
1.4.3 Autres représentations de l’action sismique .......................... — 13
1.5 Effets induits par les séismes ............................................................ — 14
1.5.1 Liquéfaction des sols ............................................................... — 14
1.5.2 Tsunami ................................................................................... — 15
2. Bases du calcul sismique............................................................... — 15
2.1 Analyse modale avec spectres de réponse en accélération ............. — 15
2.1.1 Hypothèses du calcul .............................................................. — 15
2.1.2 Modélisation ............................................................................ — 16
2.1.3 Modes propres non amortis .................................................... — 16
2.1.4 Résolution sur la base des modes propres ............................ — 17
2.1.5 Combinaison des réponses modales ...................................... — 18
2.1.6 Évaluation des effets non linéaires par coefficient
de comportement .................................................................... — 19
2.2 Analyse par forces latérales ............................................................... — 20
2.2.1 Principe .................................................................................... — 20
2.2.2 Estimation de la période fondamentale T1 ............................. — 21
2.2.3 Méthode de calcul statique par coefficient sismique ............. — 21
2.2.4 Actualité des méthodes simplifiées ........................................ — 21
2.3 Analyse statique non linéaire en poussée progressive .................... — 21
2.3.1 Généralités ............................................................................... — 21
2.3.2 Déplacement cible ................................................................... — 21
2.3.3 Distributions verticales des charges latérales ........................ — 22
2.4 Analyse chronologique non linéaire .................................................. — 23
2.5 Commentaires sur les calculs non linéaires ..................................... — 23
2.6 Indications sur d’autres modes de calcul .......................................... — 23
3. Conclusion........................................................................................ — 23
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 3 290v2
p。イオエゥッョ@Z@ュ。ゥ@RPQT

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SÉISMES ET BÂTIMENTS ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

l’origine purement empirique, la construction parasismique s’est progres-


À sivement développée et a pris place parmi les techniques de l’ingénieur.
Elle est pluridisciplinaire par nature, puisqu’elle fait appel aux géologues, sis-
mologues, architectes, mécaniciens des sols, ingénieurs de structures et calcu-
lateurs, dont la collaboration est nécessaire pour tout projet important. Même si
l’on reste dans le domaine du bâtiment courant, la bonne utilisation d’un code
parasismique par un ingénieur de structures suppose, de sa part, des bases
suffisantes en sismologie et la compréhension des particularités de l’action
sismique :
– aspects dynamiques, notamment aléatoires ;
– raisonnement en termes de déformation, plutôt qu’en termes de force.
Le présent article aborde d’abord les éléments indispensables de sismolo-
gie. Il présente ensuite les méthodes d’analyse des structures soumises à une
action sismique. Les éléments relatifs, tant à l’action sismique, qu’à l’analyse


des structures sont présentés en faisant référence à l’Eurocode 8, la norme
pour les projets de construction en zone sismique en vigueur dans l’ensemble
de l’Union européenne depuis Janvier 2013. Des explications relatives à la
conception parasismique des bâtiments font l’objet d’un autre article qui traite
aussi de l’Annexe nationale à l’Eurocode 8.

– la compression, c’est-à-dire la collision frontale sans subduc-


1. Éléments de sismologie tion qui se traduit par la formation de chaı̂nes de montagnes,
comme l’Himalaya, résultat de la collision des plaques Inde et
de l’ingénieur Eurasie.
 Ces mouvements relatifs entre plaques ne se font pas, en
général, de manière progressive, mais par à-coups. Chacun de ces
1.1 Causes des séismes à-coups constitue un séisme, plus ou moins intense suivant
l’amplitude et la rapidité du mouvement, ainsi que l’étendue de la
1.1.1 Tectonique des plaques zone concernée.

La compréhension du mécanisme responsable de l’activité sis- & Découverte de la sismicité intraplaque


mique du globe terrestre est récente. Ce n’est qu’en 1968 que J. Cette théorie de la tectonique des plaques est maintenant bien
Morgan, D. McKenzie et X. Le Pichon ont formulé la théorie de la établie et fournit une explication immédiate des séismes qui se
tectonique des plaques qui fournit un modèle cinématique cohé- produisent au voisinage des limites des plaques (séismes interpla-
rent des déformations de l’écorce terrestre [1]. ques). Si ce type de séisme représente effectivement la plus grande
partie de l’activité sismique, concentrée dans certaines zones bien
& Principe de la tectonique des plaques définies, on observe aussi des séismes, moins nombreux mais
Le moteur de ces déformations est l’expansion des fonds océa- pouvant être violents, à l’intérieur de certaines plaques (séismes
niques, cause proposée en 1960 par H. Hess après l’échec d’autres intraplaques).
tentatives d’explication de la « dérive des continents » imaginée Cette sismicité intraplaque, plus diffuse et plus difficile à prévoir
en 1915 par Wegener, par création continue de croûte océanique que la sismicité interplaque, résulte de l’état de contrainte qui
le long des dorsales médio-océaniques (figure 1). Cette expan- règne à l’intérieur des plaques du fait de leurs interactions
sion, qui peut atteindre 170 mm/ an pour les dorsales les plus acti- mutuelles.
ves, pousse les unes contre les autres les différentes plaques rigi-
des (une douzaine au total, figure 1) qui constituent l’écorce L’hypothèse des plaques parfaitement rigides ne constitue en
terrestre. effet qu’une première approximation.
Celles-ci sont en réalité susceptibles de subir des ruptures loca-
 Plusieurs types de mouvements peuvent résulter de ces les sous l’effet des champs de contraintes qui agissent sur
affrontements entre plaques : elles.
– la subduction, c’est-à-dire la plongée d’une plaque sous une
 Les ruptures brutales qui sont la cause des séismes tectoni-
autre (ce qui permet de compenser l’augmentation de surface
ques (interplaques ou intraplaques) se produisent, le plus souvent,
résultant de l’expansion des fonds océaniques), comme celle de la
dans la partie supérieure de l’écorce terrestre (séismes superficiels,
plaque Nazca sous l’Amérique du Sud, ou de la plaque Philippines
suivant la terminologie des sismologues, c’est-à-dire survenant à
sous l’Eurasie au niveau du Japon ;
moins de 60 km de profondeur).
– le décrochement, c’est-à-dire le coulissage horizontal d’une
plaque contre une autre (failles transformantes), dont l’exemple le  On connaı̂t aussi, particulièrement dans les zones de subduc-
plus connu est la célèbre faille de San Andreas en Californie tion, des séismes intermédiaires (profondeur de 60 à 300 km) et
(contact entre les plaques Pacifique et Amérique du Nord) ; des séismes profonds (profondeur supérieure à 300 km).

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– SÉISMES ET BÂTIMENTS

EURASIE

AMÉRIQUE
ARABIE PACIFIQUE
AFRIQUE
CARAIBE
AFRIQUE
PHIIPPINES
INDE COCOS
SOMALIE


AMÉRIQUE
NAZCA
AUSTRALIE

ANTARCTIQUE

Dorsales et faibles transformantes océaniques Faibles transformantes continentales


Zones de convergence (subduction et collision) Direction du mouvement des plaques

Figure 1 – Carte simplifiée des grandes plaques lithosphériques actuelles et de leurs limites – Modèle de J. Morgan

1.1.2 Autres causes de séismes – déplacements résultant de la rupture qui débouche en surface
(cas rare) ou de ruptures secondaires affectant les terrains superfi-
La quasi-totalité de l’activité sismique correspond aux séismes ciels (figure 3) ; ce type d’effet est localisé au voisinage des failles.
tectoniques. Il existe cependant d’autres types de séismes, d’ori-
gine naturelle ou artificielle : & Principe des échelles d’intensité
– séismes volcaniques, associés à la montée du magma ou au Avant l’obtention d’enregistrements de ces mouvements au
dégazage avant et pendant les éruptions. Ces séismes sont généra- moyen de sismographes, de nombreuses échelles d’intensité ont
lement faibles et localisés au voisinage des volcans actifs ; été proposées pour apprécier la force des mouvements sismiques.
– séismes artificiels résultant des explosions souterraines (tirs de Le tableau 1 présente la description abrégée de l’échelle EMS98
carrières et de mines, essais nucléaires) ou de l’exploitation des actuellement utilisée en Europe.
mines (« coups de toit ») ; Le principe de ces échelles d’intensité est de classer par degrés
– séismes dits « induits », souvent associés à un apport massif (12 degrés dans l’échelle EMS98) les effets observés en termes de :
d’eau dans les terrains (mise en eau d’un grand barrage ou injec- – dégâts aux constructions ;
tion à grande échelle dans le sol). Ces séismes induits, dont on – impressions ressenties par les témoins ;
connaı̂t quelques exemples, paraissent devoir être attribués à la – comportements des sites naturels (sols, pentes, lacs et rivières,
diminution de résistance à la rupture des roches lors de l’infiltration etc.).
d’eau dans leur réseau de microfractures.
Une telle appréciation des effets nécessite un travail minutieux
(visites détaillées sur le terrain, dépouillement des questionnaires
remplis par les témoins).
1.2 Données sur les mouvements
sismiques Il en découle que l’intensité, à la différence de la magnitude
(définie au § 1.2.2, n’est jamais connue immédiatement après
1.2.1 Données d’observation : échelles d’intensité le séisme, mais seulement après un délai de l’ordre de plu-
sieurs semaines.
& Typologie des mouvements sismiques & Avantages et inconvénients de l’intensité
Les mouvements sismiques qui intéressent l’ingénieur sont ceux
qui se produisent à la surface du sol ou à son voisinage immédiat  L’intérêt de l’intensité est surtout d’estimer l’importance des
séismes anciens et de pouvoir les comparer aux séismes récents
(usines souterraines, tunnels, canalisations enterrées). Ils peuvent
pour lesquels on dispose d’informations instrumentales.
se manifester par des :
– ondes vibratoires se propageant dans les terrains (ondes sismi-  En dehors de ce cas, la caractérisation des mouvements sismi-
ques, figure 2) ; c’est la sollicitation la plus fréquente. Pour de ques par leur niveau d’intensité, encore largement utilisée pour cer-
grands séismes, elle peut être fortement ressentie sur des surfaces tains projets, présente de sérieux inconvénients, en raison :
considérables (plusieurs centaines de milliers de km2), à des dis- – du fait que, par nature, l’intensité n’est pas une mesure d’un
tances considérables de l’épicentre (plusieurs centaines de kms) ; paramètre physique caractéristique du séisme. Ce qui a pour

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SÉISMES ET BÂTIMENTS ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

rapidement permis de comprendre la nature des ondes sismiques


Compressions et d’en déduire un modèle de la structure interne de la Terre. La
détection des séismes et la localisation rapide des épicentres furent
Milieu non perturbé rendues possibles dans la plupart des régions sismiques dès le
début du 20e siècle.

& En 1935, C. Richter eut l’idée de déduire de l’enregistrement


obtenu sur un sismographe, une mesure de l’énergie Ec libérée
par le séisme sous forme d’énergie cinétique des ondes sismiques.
Dilatations Il définit un nombre, appelé magnitude locale ML, par la relation :

a onde longitudinale P ML = Ig A / A0 (1)

avec A amplitude maximale de la réponse d’un sismo-


graphe étalon (du type Wood-Anderson, pen-
dule de torsion de période propre 0,8 s, muni
d’un dispositif amplificateur de coefficient
2 800) supposé placé à 100 km de l’épicentre,


A0 amplitude de référence prise égale à 1 mm.
Longueur Double amplitude
d’onde La relation entre ce paramètre ML et l’énergie Ec des ondes sismi-
b onde transversale S ques (exprimée en joules) s’écrit :

lg Ec = 15
, ML + 4,8 (2)

La magnitude ML de Richter correspond donc à un paramètre


global du séisme (énergie totale libérée sous forme d’ondes
sismiques). Ce paramètre ne suffit pas, à lui seul, pour caracté-
riser l’amplitude des mouvements sismiques sur un site
donné, puisque cette amplitude dépend évidemment aussi de
la distance R qui sépare ce site de la source sismique (zone de
rupture).
c onde de surface de Love L’utilisation pratique de la définition (1) suppose d’ailleurs que
soient effectuées des corrections appropriées sur la distance,
car l’épicentre n’a aucune raison de se trouver précisément à
100 km du sismographe.

La définition initiale de la magnitude par Richter est empirique et


demande de fixer des constantes d’ajustement. De plus, la réponse
du sismographe Wood-Anderson, sur laquelle la mesure de ML est
fondée, subit des modifications pour les ondes de période supé-
rieure à sa période propre (0,8 s). Il en résulte que ML sous-estime
d onde de surface de Rayleigh
l’énergie émise pour les séismes de forte magnitude.

Figure 2 – Ondes sismiques & D’autres définitions ont donc été successivement proposées, qui
cernent mieux la physique du problème et sont de plus en plus pré-
conséquence qu’un même niveau d’intensité en un site donné cises et générales.
peut correspondre à des séismes de caractéristiques très différen-
tes, et donc, à des mouvements sismiques très différents par leur  La magnitude Ms des ondes de surface, correspondant à une
durée, leurs périodes dominantes d’oscillation et leur amplitude période de 20 s, permet d’aller plus loin dans la gamme des magni-
en vitesse ou en accélération, qui sont des paramètres essentiels tudes, mais présente aussi un phénomène de saturation aux
pour l’ingénieur ; niveaux très élevés.
– de la dispersion considérable qui en résulte pour les corréla-  La magnitude-moment Mw (définie au § 1.3.1), est la seule qui
tions que l’on a cherché à établir entre l’intensité et certaines carac- soit, dans tous les cas, représentative de l’énergie émise, car elle
téristiques du mouvement sismique (accélération maximale ou est directement liée aux paramètres physiques de la source. On la
vitesse maximale du sol), comme le montre la figure 4 [2]. trouve par une inversion des sismogrammes qui permet de trouver
& Autres échelles d’intensité en usage dans le monde conjointement la localisation de l’épicentre, le mécanisme au foyer
et la magnitude-moment Mw.
Notamment les 2 échelles suivantes :
 L’énergie Ec des ondes sismiques varie très vite en fonction de
– l’échelle MM (Mercalli modifiée) utilisée aux États-Unis, qui
la magnitude, puisqu’un écart de 2 sur la magnitude correspond à
comporte aussi 12 degrés et ne diffère guère de l’échelle EMS98 ;
un rapport de 1000 sur l’énergie. L’échelle étant le logarithme d’une
– l’échelle japonaise JMA (Japan Meteorological Agency), qui n’a
amplitude, elle est ouverte et sans limite supérieure.
que 8 degrés.
Remarque
1.2.2 Données d’enregistrement : magnitudes On note que l’expression « échelle de Richter » est incorrecte,
& Les premiers sismographes ont été mis au point à la fin du puisque la magnitude est une mesure qui peut prendre des
valeurs numériques quelconques, alors qu’une échelle sert à
19e siècle (R. Milne). Leur perfectionnement et leur implantation
repérer un effet par des nombres entiers.
dans des observatoires répartis sur la surface du globe ont

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– SÉISMES ET BÂTIMENTS

Faille à coulissage horizontal

Faille inverse

Faille normale

a différents types de mouvements des failles


b séisme de Spitak (Arménie, le 7.12.1988) : rupture en surface
par une faille inverse

Figure 3 – Rupture en surface

 L’intensité EMS98 (définie au § 1.2.1) est une véritable échelle évoquant un signal aléatoire, d’un accélérogramme (courbe de
et l’on convient généralement de marquer ce caractère en écrivant variation de l’accélération en fonction du temps) obtenu en zone
les niveaux d’intensité en chiffres romains ; les magnitudes s’écri- épicentrale d’un fort séisme.
vant par contre en chiffres arabes avec une décimale. Néanmoins, Les enregistrements de mouvements forts, ou strong-motion,
la caractérisation des séismes par un nombre représentatif de la sont actuellement au nombre de plusieurs milliers et chaque nou-
magnitude est utile, car ce nombre donne de façon simple une veau séisme se produisant dans une zone bien instrumentée
idée des effets possibles : dimension de la zone géographique accroı̂t cette collection. En France, le réseau de mesure de mouve-
affectée, niveaux d’accélération et de dégâts possibles. On donne ments forts compte quelques dizaines de stations.
au tableau 2 ces ordres de grandeurs.

Remarque 1.3 Théorie élémentaire du mouvement


On voit que les séismes de magnitude 9,0 sont exceptionnels.
Ce fut le cas du séisme de Tohoku (Japon, 2011).
sismique
Le séisme le plus puissant jamais mesuré a atteint la valeur de
9,5 (Chili, 1960). 1.3.1 Modèle élémentaire de faille
& Matériels de mesure On considère (figure 6) un bloc parallélépipédique de croûte ter-
restre de longueur L, de largeur B et de hauteur H. Ce bloc est sou-
 Les sismographes, classiquement utilisés en sismologie, sont mis à une déformation tectonique de cisaillement qui, lorsqu’elle
des appareils très sensibles capables de détecter des séismes très atteint un certain niveau, provoque une rupture suivant le plan
lointains (épicentre à plusieurs milliers de km) pourvu qu’ils dépas- médian du bloc (plan de faille). Après la rupture, un nouvel état
sent un certain niveau de magnitude. En contrepartie, ils ne per- d’équilibre est atteint, dans lequel le bloc est divisé en deux com-
mettent pas, en général, l’enregistrement des signaux au voisinage partiments décalés d’une longueur Du.
de l’épicentre, car ils « saturent » lorsqu’ils sont soumis à de fortes
secousses. Remarque
Ce mécanisme de déclenchement d’un séisme par accumula-
 Des accéléromètres spéciaux (dits « strong-motion ») ont été
tion progressive de contrainte, et libération brutale par glisse-
développés pour enregistrer ces signaux de fort niveau, qui sont
ment d’un demi-bloc sur l’autre, a été proposé par H. Reid à la
d’une importance capitale pour l’ingénieur de génie parasismique.
suite du grand séisme de San Francisco (1906).
On peut observer (figure 5) l’allure extrêmement irrégulière,

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Séismes et bâtiments
Conception et normes parasismiques
par André PLUMIER
Professeur Honoraire de l’Université de Liège, membre du comité de rédaction de
l’Eurocode 8,
Président de la Commission Belge de Normalisation des règles de construction
parasismique.
Consultant, Plumiecs sprl, Tilff, Belgique

Note de l’éditeur
Cet article est la réédition actualisée de la deuxième partie de l’article [C 3 290] intitulé


« Constructions parasismiques » paru en 1997 et qui avait été rédigé par Jacques
BETBEDER-MATIBET et Jean-Louis DOURY

1. Normes parasismiques................................................................... C 3 291 – 2


1.1 Évolution des normes parasismiques ............................................... — 2
2. Conception parasismique des bâtiments ................................... — 3
2.1 Objectif et concepts de base .............................................................. — 3
2.2 Réponse inélastique saine des structures sous séisme .................... — 4
2.3 Dispositions d’architecture ................................................................ — 12
2.4 Sols et fondations .............................................................................. — 20
2.5 Dispositions de construction et d’installation ................................... — 20
2.6 Dispositions parasismiques spéciales ............................................... — 22
3. Enseignements de séismes récents............................................. — 24
3.1 Intérêt d’observer leurs effets ............................................................ — 24
3.2 Séismes de Northridge et de Kobé .................................................... — 24
3.3 Observations lors d’autres séismes récents ..................................... — 31
3.4 Conclusions des observations post-sismiques récentes .................. — 33
4. Législation et réglementation préventives du risque
sismique en France ......................................................................... — 36
4.1 Références des textes légaux ............................................................ — 36
4.2 Catégories de risque et d’importance ............................................... — 37
4.3 Zonage sismique de la France ........................................................... — 37
4.4 Accélération de calcul et règles générales de projet parasismique . — 38
4.5 Règles simplifiées .............................................................................. — 38
4.6 Règles applicables aux bâtiments neufs ........................................... — 38
4.7 Règles applicables aux bâtiments existants ..................................... — 38
4.8 Contrôles de l’application de la réglementation parasismique ........ — 40
4.9 Réglementation parasismique pour autres ouvrages à risque
normal ................................................................................................ — 41
4.10 Réglementation parasismique pour ouvrages à risque spécial ....... — 41
5. Conclusion........................................................................................ — 42
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 3 291

D ans la plupart des régions sismiques, l’adoption de techniques de cons-


truction visant à réduire les risques liés aux tremblements de terre apparaı̂t
comme très ancienne. Ainsi, les fouilles conduites sur le site de Taxila (Pakistan)
ont mis en évidence les mesures de renforcement des fondations, lors de la
reconstruction de la ville, après le séisme de l’an 25. De même, à l’époque
byzantine, on a pu constater des changements radicaux dans les modes de
construction, dans plusieurs villes de Syrie et d’Anatolie (réduction de la hau-
teur des maisons, renforcement par des charpentes en bois, suppression des
murs de briques non renforcés). On trouve aussi en Chine, au Japon et dans
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SÉISMES ET BÂTIMENTS ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

les monuments incas, des exemples de constructions anciennes, dont la


conception tient compte du risque sismique. Ces exemples anciens témoignent
du fait que des concepts architecturaux et de statique des constructions étaient
maı̂trisés par l’Homme, il y a longtemps déjà.
Mais ce n’est qu’à une époque très récente que cette maı̂trise comporte :
– d’une part, le développement d’outils de calcul permettant de quantifier les
sollicitations induites dans les constructions par les séismes ;
– d’autre part, une formalisation des règles à suivre dans les projets de cons-
truction.
Le présent article vise à présenter l’évolution de ces règles, en exposant en
détail les concepts des codes actuellement en vigueur. En particulier, le pour-
quoi et le comment de l’objectif « mécanisme plastique global » qui sous tend
les règles favorisant la ductilité locale et globale des structures. On définit ceux-
ci et on en montre des exemples d’implication pratiques. On décrit aussi les
dispositions architecturales souhaitables. On rassemble les observations faites

S après des tremblements de terre récents qui sont susceptibles d’améliorer


encore la conception des bâtiments.
Enfin, on pose le cadre législatif et réglementaire de la prévention sismique
en vigueur en Europe, et ses aspects spécifiques en France.

& En 1971, le séisme de San Fernando, également en Californie,


1. Normes parasismiques fournit un très grand nombre d’enregistrements dont un, celui de
Pacoima Dam, dépassait 1 g, l’accélération de la pesanteur. Les
ingénieurs de génie parasismique, dont certains avaient déjà pres-
senti que les spéculations alors en vigueur sur la limitation des
1.1 Évolution des normes parasismiques mouvements sismiques n’étaient guère fondées, durent reconnaı̂-
tre que ces mouvements pouvaient être beaucoup plus intenses
1.1.1 Premières tentatives que ce que l’on croyait.
C’est au début du 20e siècle, après les séismes de San Francisco & Corrélativement, la compréhension du comportement des struc-
(18 avril 1906) et de Messine (28 décembre 1908), que les premières tures sous charges dynamiques progressait rapidement, suite au
règles de calcul parasismique furent proposées. Elles visaient sim- développement des études expérimentales. Notamment, celles sur
plement à imposer une certaine résistance des structures vis-à-vis table vibrante et à l’apparition du calcul numérique. Le rôle fonda-
des efforts horizontaux, au moyen d’un coefficient sismique forfai- mental de la dissipation d’énergie lors des cycles de déformation
taire (de l’ordre de 0,1), éventuellement modulé en fonction de la inélastique fut mis en évidence et permit de comprendre :
cote (coefficient sismique plus élevé pour les étages supérieurs).
– le bon comportement de certaines structures non calculées au
On ne disposait à cette époque d’aucune donnée d’enregistre- séisme, ou calculées avec des coefficients sismiques modérés ;
ment de mouvements forts, et les valeurs d’accélération du sol – la ruine d’autres structures dont les capacités de dissipation
étaient l’objet de conjectures (fondées, par exemple, sur le renver- d’énergie étaient insuffisantes.
sement ou le maintien en place de statues) qui s’accordaient en
général pour prédire des valeurs assez faibles (de l’ordre de 1 à & Ces progrès dans les connaissances ont été concrétisés dans les
2 m/s2) et justifiaient les coefficients sismiques choisis. codes dits « de deuxième génération », tels les Règles PS 69 qui
ont pris, en France, la suite des Recommandations AS 55 édictées
En parallèle avec ces premières tentatives de calcul, l’importance pour l’Algérie après le séisme de 1954 à Orléansville. Le séisme de
des dispositions de construction, et particulièrement des « choses à 1980 dans la même région, appelée actuellement Chlef, a conduit
ne pas faire », a été rapidement reconnue. Les premiers codes para- en 1982 à une révision concrétisée dans les Règles PS69/82.
sismiques ont introduit des recommandations sur la nature des
contreventements et la mise en œuvre des matériaux.  Le coefficient sismique horizontal s x y est calculé comme un
produit de coefficients :
1.1.2 Codes parasismiques de 2e génération σx = α β γ δ
Le premier enregistrement de mouvement fort fut obtenu à Long
Beach en 1933. avec a aléa sismique,
& Jusqu’en 1970, le nombre de tels enregistrements est resté très b coefficient de réponse fonction de la période
fondamentale T et du niveau d’amortissement.
limité. Le plus célèbre, qui a été utilisé par des générations de calcula-
Il correspond à un spectre de dimensionnement
teurs, est celui d’El Centro en Californie (18 mai 1940) dont une com-
posante horizontale a atteint l’accélération de 3,4 m/s2. Cette valeur dont les ordonnées seraient divisées par un
paraissait très élevée d’après l’opinion la plus répandue à l’époque, coefficient de comportement de l’ordre de 4,
et beaucoup d’experts pensaient qu’elle était proche du maximum g coefficient de distribution suivant les étages,
concevable, qui était considéré comme étant de l’ordre de 5 m/s2. d tient compte des conditions de sol.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– SÉISMES ET BÂTIMENTS

 Le défaut principal des codes de deuxième génération est que spécifiquement consacrés au dimensionnement des bâtiments. La
la prise en compte de la ductilité n’est pas explicite. Il n’est donc partie 1 de l’Eurocode 8 définit successivement :
pas possible de représenter les différences de comportement entre – les exigences de performance de base et les critères de confor-
les structures véritablement ductiles, et celles qui le sont peu. Il en mité applicables aux bâtiments et aux ouvrages de génie civil en
résulte une disparité dans la sécurité effectivement obtenue avec zone sismique ;
ces codes. – les modes de représentation de l’action sismique : spectre de
réponse, accélérogrammes, déplacement cible ;
En France, la nécessité d’une refonte des règles parasismiques, – les méthodes d’analyse des structures qui sont autorisées et les
en vue de passer des PS 69/82 à un code de troisième généra- conditions de leur application ;
tion, a été perçue dès 1982 (voir § 1.1.3). – les règles de combinaison de l’action sismique à d’autres
Après plusieurs années de travail, les recommandations actions ;
AFPS 1990 ont été éditées (AFPS : Association française du – les règles générales applicables aux bâtiments quels que soient
génie parasismique). Elles ont servi de base à la rédaction des leurs matériaux constitutifs ;
Règles PS 92 (voir le Pour en savoir plus). – les règles spécifiques aux bâtiments en béton, en acier, mixtes
acier-béton, bois et maçonnerie ;
1.1.3 Codes parasismiques de 3e génération – les exigences et aspects de dimensionnement relatifs à l’isola-
tion à la base des structures.
Tous les codes parasismiques modernes, dits « de troisième


génération », explicitent ce qu’on appelle le « coefficient de com- L’Eurocode 8 traite dans ses parties suivantes, soit dans les
portement des structures » (voir § 2.1.6 dans l’article [C 3 290]). documents EN 1998-2 à EN 1998-6 :
& Différentes appellations et notations sont utilisées, en particulier – des ponts ;
(voir aussi le Pour en savoir plus) : – de l’évaluation et la mise à niveau parasismiques des bâti-
ments ;
– coefficient de comportement coefficient q de l’Eurocode 8 ; – des silos, réservoirs et réseaux de tuyauteries ;
– facteur de réduction des forces Rw des codes américains ASCE, – des fondations ;
UBC et NEHRP ; – des ouvrages de soutènement et aspects géotechniques ;
– facteur de comportement B et facteur de qualité Q du règle- – des tours, mâts et cheminées.
ment parasismique algérien RPA [1].

& D’autres nouveautés sont présentes dans les codes parasismi- 1.1.5 Codes parasismiques de 4e génération
ques de troisième génération :
Dans le futur, les codes parasismiques mettront plus en évidence
– définition du mouvement sismique par des spectres de l’exigence du tremblement de terre, comme étant une capacité de
réponse élastique différents suivant la nature du sol, et modulés déplacement relatif entre un point de la structure et sa base. Ce
en sévérité par une accélération de calcul fonction de la zone de concept est déjà présent et son application ouverte, dans les règles
sismicité et du niveau de sécurité visé ; de l’Eurocode 8 mises en application en 2011 (voir § 1.4.3 et § 2.3
– élargissement de l’éventail des méthodes de calcul : possibilité dans l’article [C 3 290]). Mais, les documents futurs cerneront
de faire des calculs temporels ou stochastiques et des calculs en mieux l’application pratique des méthodes en déplacement en pro-
poussée progressive ; posant des règles normatives.
– extension du champ d’application en traitant des appuis para-
L’intérêt des approches en déplacement en projet nouveau est de
sismiques et des équipements industriels ;
définir de façon réaliste les demandes de ductilité. En effet, les
– harmonisation des critères de vérification de la sécurité avec
règles visant à des comportements plastiques globaux, définies
l’approche semi-probabiliste aux états-limites.
dans les codes de troisième génération, ne différencient pas les exi-
gences de projets suivant le degré de sismicité. On applique, par
1.1.4 Eurocode 8 exemple, le concept « poutres faibles-poteaux forts » (voir § 2.2.6)
sur toute la hauteur d’une structure, alors que le mécanisme plas-
L’Eurocode 8 ou EN 1998 fait partie des codes parasismiques de tique réellement activé en cas de séisme peut être très inférieur à
troisième génération (voir le Pour en savoir plus). Finalisée en cette exigence.
2004, c’est la norme actuellement en vigueur dans tous les pays
de l’Union européenne.

& Certains paramètres ou aspects restent du ressort national et


sont présentés dans une AN ou Annexe nationale. C’est évidem-
ment le cas du zonage sismique, mais aussi de certaines valeurs
2. Conception parasismique
comme des densités minimale d’armatures, etc… L’Annexe natio- des bâtiments
nale contient aussi des informations ou règles plus particulières,
car portant sur des modes de construction qui sont assez différents
de pays à pays ; c’est le cas de la maçonnerie. L’Annexe nationale
peut définir des règles spécifiques, mais celles-ci doivent toujours 2.1 Objectif et concepts de base
être additionnelles et non contradictoires avec le texte de base.

& L’Eurocode 8 s’intègre dans le système des Eurocodes, c’est-à- 2.1.1 Objectif général et classes de ductilité
dire qu’il vient compléter les autres Eurocodes spécifiquement
pour les projets parasismiques. Les autres Eurocodes, portant sur L’objectif global du projet d’une ossature parasismique est de
le béton armé, la charpente métallique, etc… restent donc d’appli- définir une structure capable de subir, sans s’effondrer, les défor-
cation. Les règles de l’Eurocode 8 venant compléter ou renforcer mations engendrées par l’action sismique.
ces documents, sans les répéter. & Principe
& La partie 1 de l’Eurocode 8 ou EN 1998-1 s’applique au dimen- Fondamentalement, un tremblement de terre impose un déplace-
sionnement des bâtiments et des ouvrages de génie civil en zone ment relatif du centre de gravité de la structure par rapport à sa
sismique. Elle est divisée en 10 articles, dont certains sont base (voir 2.3.2 de l’article [C 3 290]). Ce déplacement relatif est

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SÉISMES ET BÂTIMENTS ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

pratiquement indépendant du mode de travail de la structure, qu’il  Ainsi, les projets de classe DCL se caractérisent par une
soit élastique ou élasto-plastique. Le « déplacement cible », SDe(T) absence d’imposition parasismique spécifique, sauf la prise en
en Eurocode 8, peut être atteint avec succès par des projets d’ossa- compte des sollicitations sismiques. Le dimensionnement des élé-
tures de divers degrés de capacité de dissipation d’énergie par ments de structure se fait donc en ignorant les règles de l’Euro-
déformations plastiques, en particulier (figure 1) : code 8, et en se référant seulement aux normes habituelles par
– des ossatures où les déformations sont essentiellement élasti- matériaux : les Eurocodes 2, 3, 4. Par contre, les projets de classes
ques, projet de faible ductilité, dit « de classe DCL » (Ductility DCM et DCH sont l’objet de règles particulières définies dans
Class Low) en Eurocode 8 ; l’Eurocode 8.
– des ossatures où des déformations plastiques se développent,
projet de ductilité moyenne (DCM) ou haute (DCH) ; Remarque
On traduit le fait qu’à niveau égal de séisme, les sollicitations
& Détails sur les classes de ductilité locales sont plus élevées dans une structure qui ne respecte
pas des critères de régularité en réduisant par un facteur
 Les projets de classe DCM et DCH sont dit « dissipatifs » : une 1,2 le coefficient de comportement q standard d’un type
partie de l’énergie induite dans la structure par le tremblement de donné de structure.
terre est dissipée dans des déformations plastiques locales
alternées.
2.1.2 Structures primaire et secondaire
 Les niveaux de dissipativité des projets sont distingués dans
Traditionnellement, les principes de conception parasismiques


l’Eurocode 8 par les valeurs du coefficient de comportement q,
consistaient en des recommandations sur des dispositions en
associées à ces classes pour les divers types d’ossatures et de
plan, en élévation, etc., portant sur l’aspect général des bâtiments
matériaux – (voir le tableau 1). Les sollicitations de calcul sont de
plutôt que sur leur structure. Ces recommandations restent utiles et
l’ordre de q fois plus faibles si q est plus élevé (voir les niveaux
on les rappellera au § 4.3.
de VEd pour les différentes classes à la figure 1), mais des exigen-
ces de dimensionnement sont définies, qui sont par contre d’autant
plus élevées que la classe de ductilité choisie est aussi élevée.
Mais l’Eurocode 8 introduit une notion importante, en distin-
guant la structure primaire d’un bâtiment de sa structure
secondaire :
VEd
– la structure primaire reprend l’essentiel de l’action
sismique ;
DCL
– la structure secondaire doit seulement être capable de sui-
a projet à réponse purement élastique DCL
vre les déformations d’ensemble, tout en assurant la reprise
des charges gravitaires dans la situation déformée.

DCM
Cette façon d’exprimer les problèmes présente des avantages :
b projet modérément dissipatif DCM – la structure secondaire est dispensée de vérifier certains critè-
res contraignants, tel que « poutres faibles-poteaux forts » (voir
DCH § 2.2.2) ;
– la liberté de l’architecte est bien plus grande que ne semblaient
c projet très dissipatif DCH l’indiquer les silhouettes de bâtiments des principes de conception
classiques ;
SDe(T) – le projeteur applique les principes de conception à la structure
réelle, pas à l’apparence du bâtiment.

Figure 1 – Courbe de poussée progressive d’ossatures de même La résistance et la rigidité des éléments secondaires vis-à-vis des
période T jusqu’au déplacement de projet SDe(T) actions sismiques doivent être faibles devant la résistance et la rigi-
dité des éléments de la structure primaire. On limite, dans l’Euro-
code 8, la contribution de la structure secondaire à la raideur laté-
Tableau 1 – Principes de dimensionnement, classes rale à 15 % de la raideur latérale de la structure primaire :
de ductilité des structures et limites supérieures K secondaire ≤ 15 % K primaire
des valeurs de référence des coefficients de comporte-
ment Exemple
Dans la construction de la figure 2, la structure primaire est un
noyau raide qui répond à cette condition, alors que la structure péri-
Intervalles des phérique (en construction) est assez flexible. Sa participation au
Principes de Classes de ductilité valeurs de référence contreventement est faible et on la vérifie pour sa capacité à porter
dimensionnement de la structure du coefficient de les charges gravitaires dans la situation de déformation imposée par
comportement q le séisme. Le rôle des diaphragmes (planchers) est important, car
c’est eux qui reportent les forces d’inertie vers le noyau.
Comportement q ≤ 1,5 − 2
DCL (Limitée)
faiblement dissipatif

q≤4 2.2 Réponse inélastique saine


DCM (Moyenne) Également limité par des structures sous séisme
type d’ossature
Comportement
dissipatif
2.2.1 Utilité d’un comportement inélastique sain
q>4
DCH (Haute) Uniquement limité Les cartes de zonage sismique définissent l’aléa sismique d’une
par type d’ossature région, c’est-à-dire le niveau de l’action sismique. En l’occurrence,
l’accélération de pointe au niveau du rocher.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– SÉISMES ET BÂTIMENTS

& Motifs d’incertitude relatifs à l’aléa sismique & Contre-mesures possibles


Mais, il faut être conscient qu’il existe une incertitude sur le Les contre-mesures possibles à l’incertitude sur le niveau de
niveau exact de cet aléa sismique, pour plusieurs raisons : l’aléa sismique sont :
– la base de donnée est faible, car on ne mesure les mouvements – une réserve de résistance ;
forts que depuis 1950, au mieux. Alors qu’on parle pour l’action de – une réserve de capacité de déformation plastique.
calcul de périodes de retour de 475 ans ou plus ;
– les séismes majeurs sont peu fréquents et la connaissance Dans l’Eurocode 8, on recommande de réserver la première pos-
qu’on en a est approximative ; sibilité aux zones faiblement sismiques. Mais on considère que la
– l’action de calcul est basée sur l’hypothèse que l’histoire, et deuxième approche est préférable au-delà (c’est une recommanda-
donc le niveau maximum d’accélération, se répètera à l’identique ; tion, pas une obligation). Ceci signifie bien que concevoir une
est-ce vrai ? structure comportant une réserve de ductilité est la façon la plus
– la connaissance de la géologie des sites, qui pourrait aider à sûre d’assurer sa sécurité sous séisme. Ceci s’explique par le carac-
une meilleure évaluation, est souvent limitée, et on constate que tère « dissipateur d’énergie » des structures ductiles. Caractère
souvent un séisme fait découvrir des failles inconnues (Northridge,
qu’on peut démontrer, en effectuant une intégration de l’équation
1994, Kobe, 1995, Kocaeli, 1999).
du mouvement d’un oscillateur sur la durée d’un tremblement de
Donc, après pratiquement chaque séisme, on assiste à un relève- terre, mettant en évidence les différents termes d’énergie E (ou tra-
ment du niveau de l’aléa ; ainsi, à Istanbul, le niveau de l’aléa est vail de déformation) :


passé de ag = 0,2 g à ag = 0,4 g après le séisme de Kocaeli (1999).
m ∫ u ′′ (t )u ′ (t ) + c ∫ ⎡⎣u ′ (t )⎤⎦ 2dt + ∫ F (u )u ′ (t )dt = ∫ − m dg ′′ (t )u ′ (t )dt
Ecinétique + E visqueux + Edéformation = E totale entrée
Edéformatiion = Edéformation élastique + EDéformation élastoPlastique = EEL + EEp

& Retours d’expérience


L’étude de cas particuliers complexes à l’aide de logiciels de cal-
cul dynamique non linéaire montre que, dans une structure conçue
pour accepter des déformations dans le domaine plastique, le
terme d’énergie de déformation plastique est largement supérieur
à celui de déformation élastique. Cette supériorité s’accroı̂t lorsque
le tremblement de terre dure.

Exemple
On peut comprendre ce fait en comparant le comportement de
deux consoles auxquelles est imposé un déplacement alterné de
+ dmax à - dmax, comme indiqué à la figure 3.
 La première console travaille dans le domaine élastique EL et
sous dmax le moment de flexion à sa base A vaut MA = MEL. L’énergie
de déformation élastique EEL est représentée par le triangle hachuré
verticalement sous la courbe M - q et on a : EEL = 0,5 MEL qmax.
Figure 2 – La structure primaire est un noyau en béton – La structure Cette énergie n’est jamais accumulée dans le système ; au retour
secondaire est constituée des portiques périphériques flexibles à d = 0, l’énergie de déformation élastique du système est égale à 0.

dmax
MA

EL

MEL

θy
MEP H θmax

− θmax θ
+ θmax

EP

Figure 3 – Intérêt des structures dissipatives

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SÉISMES ET BÂTIMENTS ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

 La deuxième console est caractérisée par un moment plastique Le projet se fera donc en référence à un mécanisme de ruine
MEP = 0,5 MEL. Ce moment plastique MEP est atteint à la base A de plastique globale où les zones plastiques se trouvent en des points
la console pour q = qy = qmax/2 et une rotule plastique apparaı̂t. Le prémédités par le projeteur. On veillera, en particulier, à éviter un
déplacement dmax est réalisé au terme de déformations successive- mécanisme de ruine partiel.
ment élastiques, puis plastiques. Si un séisme déplace cette console
cycliquement de + dmax à - dmax, sollicitation représentée par la L’exemple de la figure 4 montre pourquoi. On a vu que l’exigence
courbe EP de la figure 3, l’énergie EEP dissipée de façon permanente du tremblement de terre est de déplacer le centre de gravité de la
par le système dans un cycle (+ dmax, - dmax) est représentée par structure d’une quantité « déplacement cible dc » par rapport à sa
l’aire hachurée horizontalement à la figure 3, qui vaut EEP = 2 EEL. base.
Un séisme peut induire plusieurs grands cycles. Pour, par exemple,  Si h est la hauteur d’un étage et que la structure se déforme sui-
4 cycles de + dmax à - dmax, on a : EEP = 8 EEL. vant la conception figure 4a, la rotation dans les zones de rotule
plastique est égale à :
Cette énergie absorbée en des déformations plastiques est consi-
θconcept a = d c /h
dérablement plus élevée que le travail de déformation élastique.
On voit ainsi que concevoir une structure capable de déformations
plastiques augmente sa sécurité. Cela réduit aussi son coût, puis-  Si la structure se déforme suivant la conception figure 4b, la
qu’on la dimensionne pour une sollicitation de calcul moindre. rotation dans les zones de rotule plastique est égale à :

θconcept b = d c / 4 h


Exemple
MEP = 0,5 MEL < MEL dans l’exemple de la figure 3 où la ductilité
globale utilisée est égale à : On voit que l’exigence de rotation plastique est 4 fois plus élevée
avec le concept a :
µ = θmax / θy = 2
θconcept a = 4 × θconcept b

2.2.2 Conditions d’un comportement inélastique


sain Mais, quel que soit le matériau, la capacité de rotation plastique
locale sans perte de résistance est toujours limitée : son ordre de
Les conditions nécessaires pour qu’une structure ait un compor- grandeur est de 0,0035 radian (3,5 %), en béton armé ou avec un
tement global très dissipatif sont que : profil acier de classe 1.
– les zones dissipatives offrent de manière fiable une capacité de La structure correspondant au concept de la figure 4a atteindra la
déformation adéquate ; « de manière fiable » signifie que les zones
ruine pour un déplacement Du2 quatre fois plus petit que la struc-
sièges des déformations plastiques locales offrent une résistance
ture correspondant au concept de la figure 4b. On visualise ce fait
plastique quasi constante lors des cycles de chargement imposés
à la figure 5 : les déplacements ultimes sont :
à la structure par le tremblement de terre ; le caractère « adéquat »
de la capacité de déformation plastique est lié à l’exigence totale de Δu1 = 4 Δu2
déformation imposée par le tremblement de terre et au coefficient
de comportement q choisi.
Conclusion
– le comportement global soit très dissipatif. Il faut dissiper beau-
De ce qui précède, il résulte que la démarche du projeteur per-
coup d’énergie dans des déformations plastiques locales
mettant de définir une structure capable d’un mécanisme plas-
alternées ;
tique global comporte les étapes suivantes :
– la localisation des zones dissipatives corresponde à un schéma
– définition d’un objectif « mécanisme global » ;
décidé par le projeteur, schéma choisi pour réaliser des zones dissi-
– respect de critères de ductilité locale aux endroits prévus
patives nombreuses ou des zones dissipatives peu nombreuses,
pour être dissipatifs ;
mais grosses. On évitera en particulier des déformations plastiques
– respect de critères de formation d’un mécanisme global
locales élevées qui résulteraient de la concentration des déforma-
plastique.
tions en peu de points.

dc dc

a mécanisme de ruine local b mécanisme de ruine global

Figure 4 – Mécanismes de ruine local ou global

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– SÉISMES ET BÂTIMENTS

Étage « mou »

∆u1
∆u2 =
4
∆u1
Hu Hu
H


∆y ∆u1 ∆y ∆u2
Structure dissipative Structure peu dissipative

Figure 5 – Comportement en poussée progressive d’un mécanisme local et global

2.2.3 Définition de l’objectif « mécanisme & Murs ou voiles en béton armé ou mixtes acier béton
global » Une grosse rotule plastique en flexion est développée en pied de
mur sur une hauteur égale, approximativement, à la longueur du
Il existe un certain nombre de mécanismes plastiques globaux de
mur.
référence. C’est pour ceux-là que des règles spécifiques sont défi-
nies dans les codes parasismiques. Ces règles permettent de faire & Solutions hybrides
le projet à l’aide de méthodes d’analyse élastique (réponse modale,
force équivalente) sous spectre de réponse de calcul, spectre où il Celles où on associe deux des types de contreventement précé-
est tenu compte de la capacité dissipative par le biais d’un coeffi- dents : mur plus portique, etc.
cient de comportement q. & Grand mur en béton armé
On peut définir des structures qui ne correspondent pas à ces L’énergie est dissipée par le soulèvement d’une partie d’un
mécanismes plastiques globaux de référence, et qui sont cepen- « grand mur faiblement armé ». Il ne s’agit pas, à proprement par-
dant dissipatives, mais elles devront être validées par une méthode ler, d’un mécanisme de déformation plastique, car ce système dis-
d’analyse élasto-plastique, en poussée progressive par exemple. sipe de l’énergie par le relèvement du centre de gravité de la struc-
Dans l’Eurocode 8, les mécanismes plastiques globaux de réfé- ture dans un mouvement de balancement autour de ses points bas.
rence concernent les structures verticales de contreventement et
on les réalise selon les 6 topologies suivantes (figure 6). 2.2.4 Réalisation de ductilité locale
& Ossatures en portique Il existe 2 niveaux de ductilité locale : le matériau et l’élément de
structure.
Les zones plastiques sont des rotules plastiques en flexion, locali-
sées dans les extrémités des poutres ; ce type est réalisable en béton La ductilité recherchée est celle de l’élément de structure sous
armé, en acier, en mixte acier-béton. Le dimensionnement doit être des sollicitations cycliques. La figure 7 montre un diagramme
tel qu’on évite d’atteindre l’état limite ultime en cisaillement dans force déformation correspondant à une ductilité locale élevée : on
les poutres et dans les poteaux et l’état limite ultime en flexion dans y voit de nombreux cycles plastiques à résistance constante, ou
les poteaux, sauf à leur pied à l’encastrement au soubassement croissante, avec capacité de rotation plastique élevée.
rigide, et à leur tête au niveau des poutres de toiture. Il existe des matériaux plus ductiles que d’autres. L’allongement
& Ossatures métalliques à triangulation centrée à rupture de l’acier des armatures de classe B utilisées en béton
armé est :
Il peut s’agir de triangulations en X avec des diagonales dans la
même maille, en X avec diagonales découplées, en V ou en V εu,k > 50. 10−3
inversé ; dans tous ces types, on dissipe l’énergie par la traction
plastique des diagonales. Comme l’allongement à la limite élastique est égal à ey = 500/
200 000 = 2,5.10-3, la ductilité m de cette armature est égale à :
& Ossatures métalliques à triangulation excentrée
Ces ossatures ont une topologie et des sections de barres telles µ = εs,max / εy = 20
que les déformations plastiques, ont lieu dans des zones spécifi-
ques appelées « tronçons d’excentrement ». Les mécanismes plas- Le raccourcissement à la ruine du béton est ecu2 = 3,5. 10-3, soit
tiques locaux sont des rotules plastiques en flexion ou des pan- 15 fois moins que eu,k de l’acier ; la ductilité du béton est de l’ordre
neaux travaillant en cisaillement. de 2. La conclusion est immédiate : on obtient des éléments en

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SÉISMES ET BÂTIMENTS ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Portique Triangulation centrée en X Triangulation centrée en V

S F2 lw

θp

F1
hw
θpst
e

Type de triangulation excentrée Mur élancé Grand mur

Figure 6 – 6 types fondamentaux de contreventement

mais qu’il existe beaucoup d’autres types de ruine qui ne sont pas
P ductiles. Comme par exemple :
150 – la « ruine » par flexion avec écrasement du béton ;
– la ruine par cisaillement ;
+P0 +∆ 120
– la ruine par rupture d’adhérence ou ruine d’ancrages ;
90 – la ruine par flambement d’armature (figure 8).
-P0 -∆
Tous ces types de ruine devront être évités par un surdimension-
60 nement adéquat ; on explique comment au § 2.2.5.
30  En charpente métallique, les phénomènes ductiles sont :
∆ – la traction ;
-45 -40 -30 -25 -20 -15 -10 -10 05 05 10 15 20 – la compression (dans des éléments de faible élancement) ;
-30 – le cisaillement ;
– la flexion (dans des éléments de faible élancement de paroi) ;
-60
– le frottement dans les assemblages ;
-90 – l’ovalisation des trous de boulons.
Les phénomènes non ductiles apparaissent en cas de concentra-
-120
tion des déformations plastiques dans des zones étroites (mauvaise
-150 conception d’assemblage) ou d’instabilité : déversement, flambe-
ment, voilement. On se prémunit des phénomènes d’instabilité
par des élancements faibles. Ainsi, contre le voilement, on utilisera
Figure 7 – Cycles de déformation locale d’un élément dissipatif
des sections de classe 1 si q est supérieur à 4.
béton armé ductile en créant les conditions de section telles que  Comme on le voit, il existe, avec chaque matériau de construc-
l’acier soit étiré plastiquement avant que le béton ne soit écrasé. tion, des phénomènes ductiles et des phénomènes non ductiles. Il
importe d’abord de les identifier, comme on vient de le faire avec le
& Principe et types de « ruine » béton armé ou l’acier. Ensuite, créer la ductilité consiste à faire
fonctionner les phénomènes ductiles et pas les autres. Ce qu’on
 L’étude du béton armé montre que le seul mécanisme local fait par un « dimensionnement capacitif » de tout élément autre
ductile est la « ruine » par flexion plastique et étirement de l’acier, que celui où on veut la déformation plastique. L’objectif est de

C 3 291 – 8 Copyright © - Techniques de l’Ingénieur - Tous droits réservés

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– SÉISMES ET BÂTIMENTS

Armatures
longitudinales

a b

c d

a État initial

b Fissuration du béton

c Chute du béton fissuré par insuffisance d'armatures transversales


d Ruine du poteau par flambement des armatures longitudinales

Figure 8 – Effets de l’insuffisance d’armatures transversales

surdimensionner les zones adjacentes à la zone plastique choisie,  On identifie les J mécanismes de ruine possibles adjacents au
de sorte qu’elles restent élastiques et stables pendant les déforma- mécanisme dissipatif : rupture de boulons en traction, voilement de
tions plastiques de la zone dissipative ou « fusible ». barre, écrasement de béton, flambement d’une barre…
& Principe du « dimensionnement capacitif »  On fixe les dimensions des sections, moyens d’assemblage,
On procède de la façon suivante, en 4 étapes. barres,… adjacents, de telle sorte que la résistance plastique du
mécanisme local que l’on veut dissipatif soit la plus faible des
 On effectue l’analyse de la structure sous action sismique et on résistances de la zone considérée : il devient ainsi le « fusible »
trouve les sollicitations de calcul Ed dans toutes les sections. souhaité.
 Dans chaque zone dissipative potentielle i, on dimensionne Ceci est réalisé si les résistances RdJ des J éléments non dissipa-
l’élément dissipatif de telle sorte que sa résistance Rdi de calcul tifs de la zone dissipative i sont calculées sous des sollicitations EdJ
soit supérieure ou égale à la sollicitation de calcul : majorées pour tenir compte du fait que la sollicitation réelle de
l’élément dissipatif est égale à sa résistance plastique Rdi et non à
Edi : Rdi ≥ Edi la sollicitation Edi établie par l’analyse élastique.

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Constructions parasismiques en acier


Contexte de l’Eurocode 8
par André PLUMIER
Professeur à l’université de Liège

1. Ossatures dissipatives et non dissipatives................................ C 2 559 – 2


2. Dimensionnement en capacité..................................................... — 7


3. Ossatures en portique .................................................................... — 9
4. Ossatures avec triangulations à barres centrées ..................... — 15
5. Ossatures à triangulation à barres excentrées ......................... — 20
6. Conception générale des bâtiments parasismiques
à ossature acier ............................................................................... — 24
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 2 559

L es aciers de construction répondant aux normes sont ductiles et cette carac-


téristique fait a priori des profilés, plats et tôles, d’excellents produits pour
réaliser des constructions stables en zone sismique, car ces produits en acier
permettent de réaliser une dissipation d’énergie élevée et, ce, dans plusieurs
schémas de déformation.
Les observations effectuées après des tremblements de terre majeurs confir-
ment généralement le caractère parasismique efficace des constructions métal-
liques, mais des exceptions existent. Ainsi, le séisme de Northridge (USA), en
1994, et celui de Kobe (Japon), en 1995, ont conduit à des fissurations locales
nombreuses dans certains bâtiments. Le caractère métallique d’une construc-
tion n’est donc pas nécessairement synonyme de qualité parasismique et, seu-
les, des options réfléchies permettent d’assurer le comportement global ductile
recherché.
Le projet de construction devra favoriser la formation de zones dissipatives
saines où se développent des déformations locales ductiles, lesquelles devront
se produire à des endroits choisis. Ceci sera réalisé par le respect de règles
particulières relatives aux matériaux, aux éléments et aux assemblages, ainsi
que par l’application de critères de hiérarchie découlant tous du concept géné-
p。イオエゥッョ@Z@ョッカ・ュ「イ・@RPPY@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@。カイゥャ@RPQU

ral de « dimensionnement en capacité » spécifiques à chaque type d’ossature.


Ces règles et critères, dont le développement est récent, n’étaient pas inscrits
dans la première version des règles PS92. On les présente ici dans le contexte
de la formulation retenue dans l’Eurocode 8, code parasismique en vigueur
dans toute l’Europe en 2011. Le choix a été fait de garder dans le texte qui suit
les symboles utilisés dans la version française de l’Eurocode 8, qui compren-
nent parfois des indices en terminologie anglaise.
L’aspect des charpentes mixtes acier-béton est abordé dans le [C 2 569].

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est strictement interdite. – © Editions T.I. C 2 559 – 1

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CONSTRUCTIONS PARASISMIQUES EN ACIER ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

1. Ossatures dissipatives & La figure 2 permet de comprendre la signification du coefficient


de comportement q utilisé dans l’Eurocode 8 EN 1998-1:2004
et non dissipatives (cf. [2]) pour différencier les 3 types de projet définis plus haut.
Dans ce code, qui sera applicable dans toute l’Europe en 2011, ce
coefficient intervient comme diviseur de l’action sismique de calcul
de référence et est d’autant plus élevé que la structure est plus dis-
1.1 Options de principe en projet sipative et q est égal à :
parasismique
q = Vréponse elastique / Vréduit
1.1.1 Concept général
Il existe deux approches dans le dimensionnement d’ossatures
On trouve dans [3] et [4] une explication détaillée de la définition
devant résister aux tremblements de terre. Il s’agit de concevoir
de q et le tableau 1 indique la gamme des valeurs de q retenue
des structures soit :
dans l’Eurocode 8 pour les 3 classes de ductilité DCL, DCM et DCH.
– dont les sections sont très grosses et où ne se développent que
des contraintes élastiques ;
– dont les sections des barres sont plus petites, de sorte qu’elles
permettent de former des zones plastiques nombreuses. du du

S & Une structure correspondant à la première option est plus


lourde. Il se peut qu’elle n’offre pas la marge de sécurité permettant
de subir avec succès une action sismique plus élevée que prévu.
Dans ce cas, son comportement global apparaı̂t « fragile ». Il corres-
pond, par exemple, à la figure 1a.
& Dans une structure conçue selon la seconde option, des parties
volontairement choisies de la structure sont conçues pour leur a concept b concept
capacité de déformation plastique cyclique et l’ossature entière est non dissipatif dissipatif
proportionnée de manière telle que, seules, les zones locales pré-
vues se déforment plastiquement. Le comportement est alors duc- V
tile et correspond à la figure 1b. La structure dissipe ainsi de façon
Vréponse élastique - Structure Structure non
permanente une énergie représentée par l’aire sous la courbe V-d.
dimensionnée pour rester dissipative
Pour cette raison, on distingue ces deux concepts de projet par les
élastique sous séisme
termes « dissipatif » et « non-dissipatif ».
& Un comportement ductile, qui implique des capacités de défor- Vréduit - Structure Structure
mation plastique, est intéressant pour résister aux séismes, car en dimensionnée pour dissipative
plastifier sous séisme
raison des incertitudes sur la connaissance du niveau réel de
l’action sismique future, d’une part, et de l’imprécision des analy-
ses de la réponse des ossatures sous séismes, d’autre part, il arrive du d
que l’action sismique et/ou ses effets soient plus grands que pré- Déplacement ultime
vus. Cette sur-sollicitation est facilement absorbée par un peu plus
de dissipation d’énergie dans des mécanismes plastiques, alors
que les éléments de la structure seraient incapables de fournir un Figure 1 – Exemple de comportements globaux de structure
supplément de résistance élastique. dissipative et non dissipative. La structure non dissipative s’effondre
dans un mécanisme n’impliquant qu’un seul étage (d’après [9])
De plus, la réduction du cisaillement en base (Vréduit < Vélastique)
entraı̂ne la même réduction des sollicitations appliquées à la fonda-
tion, ce qui conduit à une réduction du coût des infrastructures (cf.
figure 1).
En raison de la ductilité du matériau acier et des nombreux
mécanismes plastiques possibles dans les éléments de structure VEd DCL a projet à réponse purement élastique
ou les assemblages faits de ce matériau, les constructions métalli- DCL
ques permettent la dissipation d’énergie dans des mécanismes de
déformation plastique.
DCM
1.1.2 Classes de ductilité b projet modérément dissipatif DCM

Pour obtenir une structure capable de subir sans s’effondrer les


déformations engendrées par l’action sismique, le concepteur a le DCH
choix entre des ossatures où :
– les déformations sont élastiques ; c projet très dissipatif DCH
– des déformations plastiques limitées ont lieu dans des zones
plastiques peu nombreuses ; SDe(T) d
– des déformations plastiques plus importantes ont lieu dans des DCL - classe de ductilité limitée
zones plastiques nombreuses. DCM - classe de ductilité moyenne
& On montre à la figure 2 ce qui différencie ces choix, en termes DCH - classe de ductilité haute
de comportement global d’ossature exprimé par leur résistance
au cisaillement horizontal global VEd en fonction du déplacement Figure 2 – Comportement d’ossatures de même période T soumises
horizontal d en tête du bâtiment (les études montrent que, en pre- à poussée progressive jusqu’au déplacement de projet SDe(T )
mière approche, d est indépendant du choix effectué). (d’après [3])

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Tableau 1 – Principes de dimensionnement, classes


P P P
de ductilité des structures et limites supérieures
F F F
des valeurs des coefficients de comportement q

Intervalle des valeurs


Principe de Classe de ductilité de référence du
dimensionnement de la structure coefficient de a 4 rotules b 1 diagonale c pas de mécanisme
comportement q plastiques q = 6 plastique q = 4 plastique q = 1,5

Comportement de Figure 3 – Coefficient de comportement q. Reflète le potentiel


structure faiblement DCL (limitée) q ł 1,5 - 2 de dissipation d’énergie de chaque type structural (d’après [9])
dissipatif

q ł 4 au au
= 1,2 = 1,3
DCM (moyenne) a1 a1
Également limité par
type d’ossature


Comportement de au
= 1,1
structure dissipatif a1
q>4
DCH (haute)
Uniquement limité
par type d’ossature
a ossature en portique
Pour un type d’ossature donné, une classe de ductilité se distin-
gue par la valeur du coefficient de comportement q qui lui est asso-
cié et par des exigences fonction de cette classe, d’autant plus éle- au au
vées que q est grand. a1
=1
a1
= 1,1

& Pour réaliser des valeurs élevées de q, il faut créer les conditions
de formation de zones dissipatives nombreuses et fiables, car la
stabilité de la structure demande que : b ossature en « pendule inversé »
– les déformations plastiques locales restent limitées, car il y a
une limite à la capacité de déformation qu’un élément structural Figure 4 – Ossatures en portique et en « pendule inversé » (d’après
peut offrir tout en gardant une résistance quasi constante. Ainsi, la NF EN 1998-1:2005)
rotation plastique qp, offerte par un profil acier de classe A, est de
l’ordre de 50 mrad (qp est défini au § 3.1.1) ;
– les zones dissipatives soient nombreuses, pour éviter les exi- αu / α1
gences de déformation plastiques locales trop élevées résultant de
la concentration des déformations de la structure en peu de points ; avec a1 multiplicateur de l’action sismique horizontale
– le travail de déformation plastique ait lieu dans des zones de la de calcul pour lequel on atteint la résistance
structure prévues à cette fin, en position et en capacité, car il n’est plastique d’un élément structural,
pas possible de donner à toutes les zones de la structure des carac-
téristiques idéales de déformation plastique ; au multiplicateur pour lequel un mécanisme glo-
– ces zones dissipatives correspondent à un mécanisme de ruine bal plastique est formé.
globale et non à un mécanisme de ruine partiel.
On peut établir au/a1 par une analyse en poussée progressive,
mais des valeurs par défaut sont données dans l’Eurocode 8. On
1.2 Mécanismes plastiques globaux les mentionne aux figures 4, 7 et 8.
et coefficients de comportement
1.2.2 Valeurs de q
1.2.1 Relation entre type d’ossature et coefficient
de comportement q Les valeurs maximales de q à utiliser dans des projets se référant
à l’Eurocode 8 sont présentées au tableau 2. Elles dépendent du
Les valeurs de q associées à un type donné d’ossature reflètent type structural, de la classe de ductilité DC choisie et de au/a1, et
sa capacité à former des zones dissipatives nombreuses. Ainsi, on correspondent aux mécanismes plastiques globaux présentés aux
voit à la figure 3 que : figures 3, 4, 5, 6 et 7. Il importe d’être conscient de ces mécanis-
– une maille d’ossature en portique peut former 4 rotules plasti- mes, qui sont les objectifs du projet, car les 3 conditions pour
ques : q ø 4 (cf. figure 3a) ; concevoir correctement une structure dissipative sont :
– une maille triangulée ne comporte qu’une diagonale en traction – définir le mécanisme global plastique visé comme objectif et
plastique : q ł 4 (cf. figure 3b) ;
ses zones dissipatives ;
– la stabilité d’un contreventement en K est liée à celle d’une dia-
gonale comprimée, dont le comportement ne peut être ductile : – assurer que les zones dissipatives seront fiables ;
q = qmin = 1,5 (cf. figure 3c). – éviter les déformations plastiques, les ruines fragiles, les insta-
bilités ailleurs dans la structure.
Pour un type structural donné, le nombre de zones plastiques
potentielles est fonction de la redondance ou degré d’hyperstaticité Il est donc possible de concevoir des structures parasismiques
du type structural. La valeur de q est fonction de cette redondance de chacun des types structuraux indiqués au tableau 2. Chacun
par le biais du paramètre de redistribution plastique. possède des spécificités qu’il faut aussi connaı̂tre et considérer.

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CONSTRUCTIONS PARASISMIQUES EN ACIER ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Tableau 2 – Coefficients de comportement q (valeurs


maximales)

Classe de ductilité
Type d’ossature
DCL DCM DCH

Figure 5 – Ossatures à triangulation diagonale en X et en X Portique autostable 1,5* 4 5au/a1


découplée (d’après NF EN 1998-1:2005)
Ossature à triangulation centrée 1,5* 4 4
en X

Ossature à triangulation centrée 1,5* 2 2,5


en V

Ossature à triangulation excen- 1,5* 4 5au/a1


trée

a en V b en V inversé c variante de V inversé Pendule inversé 1,5* 2 2au/a1

Figure 6 – Ossatures à triangulation en V (d’après NF EN 1998-1:2005)


Portique autostable avec trian- 1,5* 4 4au/a1
gulation centrée en X

au Portique autostable avec rem- 1,5* 2 2


= 1,2 plissages en béton, ou maçon-
a1
nerie en contact avec l’ossature,
mais non connectés

Portique autostable avec rem- 4 5au/a1


plissages isolés de l’ossature

* l’annexe nationale peut autoriser q = 2 en classe DCL.


En France, q = 2 est accepté si des justifications appropriées sont
a proche du V inversé b proche du V
fournies (d’après la norme NF EN 1998-1/NA).

Figure 7 – Ossatures avec triangulation à barres excentrées


(d’après NF EN 1998-1:2005) Des ossatures en portique dans lesquelles 50 %, ou plus, de la
masse est située dans le tiers supérieur de la hauteur de la struc-
ture ou dans lesquelles l’essentiel de la dissipation de l’énergie a
lieu à la base d’un élément unique du bâtiment sont dénommées
« ossatures en pendule inversé ». Elles sont peu dissipatives et on
au leur attribue q ł 2,2. Pour leur usage en zone sismique, les ossa-
= 1,2 tures en pendule inversé font l’objet de restrictions relatives à
a1
l’élancement relatif λ des poteaux et au coefficient q de sensibilité
, et q ł 0,20).
au déplacement entre étages ( λ ⭐ 15
Ces ossatures en « pendule inversé » peuvent toutefois être
considérées comme des ossatures en portique et caractérisées par
un facteur q élevé, si la structure primaire possède plus d’un
Figure 8 – Ossatures en portique, combinées avec des triangulations poteau dans chaque plan de résistance et si l’effort normal est
centrées (d’après [3]) limité à NEd < 0,3 Npl,Rd dans chaque poteau.

1.2.4 Ossatures avec triangulation à barres


1.2.3 Ossatures en portique centrées
Les ossatures en portique sont des structures dans lesquelles la Les ossatures avec triangulation à barres centrées sont des struc-
résistance aux forces horizontales est assurée principalement par la tures dont les barres forment des mailles en triangle (cf. figures 5
flexion des barres (cf. figure 4). Comme des rotules plastiques sont et 6). Les axes des barres sont concourants aux sommets des trian-
des mécanismes locaux très dissipatifs et stables, en particulier gles, en des points appelés « nœuds ».
dans les poutres parce que l’effort axial y est faible, des ossatures
en portique bien proportionnées pour développer un nombre élevé Les efforts développés dans les barres sont essentiellement des
de rotules plastiques dans les poutres ou dans les assemblages efforts normaux, l’existence de flexion ne résultant que d’imperfec-
peuvent être très dissipatives. Leur coefficient de comportement q tions ou de non alignement des forces dans les assemblages. Ces
est alors de l’ordre de 5 à 6. ossatures sont stables, même si chaque nœud est une articulation
ou rotule. Il existe de nombreuses topologies possibles, qui ne sont
Les structures en portique sont, par nature, assez souples, de pas égales par la dissipation d’énergie globale qu’elles permettent.
sorte que les limitations de déformation sous séisme « de service »
et la prise en compte de l’effet P-D à l’ELU font souvent la décision & Une bonne topologie est telle que la stabilité de l’ossature sou-
dans le dimensionnement des barres. mise à l’application de forces horizontales d’une orientation

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donnée est assurée même si on enlève de l’ossature toutes les dia- 1.2.6 Ossatures en portique, combinées
gonales comprimées par l’application de ces forces. Une telle topo- avec des triangulations centrées
logie peut être dissipative, car les barres en traction plastiques
constituent un mécanisme dissipatif stable. Ces structures couplent des portiques et des triangulations cen-
trées agissant dans la même direction (cf. figure 8). Les forces hori-
Si des diagonales de contreventement comprimées sont néces-
zontales sont réparties en proportion des raideurs relatives de ces
saires à la stabilité de l’ossature, le coefficient de comportement q
contreventements.
est moins élevé. Si le mécanisme de ruine implique la plastification
ou le flambement des poteaux de l’ossature, aucune dissipation Ces ossatures hybrides combinent la raideur des ossatures à
stable d’énergie n’est possible et on limite q à 1,5. triangulation et la capacité de dissipation d’énergie des portiques,
Les ossatures avec triangulation à barres centrées sont, par évitant la pénalisation habituelle des ossatures en pur portique
nature, des structures plus raides que les ossatures en portique. par les critères sur la limitation des effets du 2e ordre et la déforma-
En effet, la distance entre les poteaux, qui constituent les membru- bilité horizontale.
res d’un contreventement en triangulation, est de plusieurs mètres,
alors que la hauteur de la section constituant un poteau de por- 1.2.7 Ossatures métalliques comportant
tique est large de moins d’un mètre, en général. Les ossatures des noyaux ou murs en béton
avec triangulation à barres centrées permettent d’atteindre une
Les noyaux ou murs en béton font partie de la structure primaire
grande raideur et de bénéficier pleinement du coefficient q maxi-
de contreventement et sont vérifiés comme des structures en béton
mum défini au tableau 2.
armé (cf. figure 9). Ils sont les seuls vérifiés sous séisme si les
& On distingue 3
centrées :
– à triangulation
types d’ossatures avec triangulation à barres

diagonale ;
structures métalliques peuvent être considérées comme secondai-
res, c’est-à-dire reprenant moins de 15 % de l’action sismique. Si
les structures métalliques participent significativement au contre-

– à triangulation en V ; ventement, les éléments en acier, ou mixtes acier-béton, doivent
– à triangulation en K. aussi être vérifiés pour la reprise de l’action sismique.
 Dans les ossatures à triangulation diagonale, la résistance aux
1.2.8 Ossatures en portique combinées
forces horizontales peut être assurée par les seules diagonales ten-
dues et en négligeant dans le calcul l’existence des diagonales en
avec des remplissages
compression. Ce type de triangulation atteint un coefficient de Les ossatures en portique, dans lesquelles des remplissages en
comportement q = 4. Il peut s’agir de triangulations en X ou béton sont connectés efficacement à la structure en acier, relèvent
« croix de St André », ou d’autres géométries (cf. figure 5). du projet de structures mixtes.
 Dans les ossatures à triangulation en V, la résistance aux for- Si les remplissages sont structurellement déconnectés de l’ossa-
ces horizontales demande de considérer, à la fois, les diagonales ture en acier sur leurs bords latéraux et supérieurs, les ossatures en
tendues et comprimées (cf. figure 6). Ces triangulations sont portique sont dimensionnées comme des structures en acier, mais
moins dissipatives (q ł 2,5) que les précédentes, car les barres il faut se préoccuper de l’interaction ossature/remplissage. Si les
comprimées flambent, mais elles possèdent une certaine ductilité remplissages sont en contact avec l’ossature acier, il faut évaluer
si les poutres ont une inertie suffisante. Par exemple, elles sont les efforts internes dans les poutres et poteaux correspondant à
dimensionnées pour l’action gravifique sans considérer leur appui un travail des remplissages en bielles diagonales.
sur le V.
 Dans les ossatures à triangulation en K, l’intersection des dia- 1.3 Mécanismes locaux dissipatifs et non
gonales se trouve sur le poteau (cf. figure 3). On a vu que la stabi- dissipatifs
lité des ossatures à triangulation en K est liée au comportement
non linéaire des diagonales comprimées et qu’en conséquence, il
ne peut être question de ductilité, d’où q = qmin = 1,5. 1.3.1 Dissipatifs
Les zones dissipatives doivent être réalisées dans un matériau
1.2.5 Ossatures avec triangulation à barres ductile. Si des aciers de construction corrects sont fournis, l’allon-
excentrées gement du matériau à rupture dépasse 17 % et la ductilité du maté-
riau est caractérisée par un rapport eu/ey entre l’allongement relatif
Les ossatures avec triangulation à barres excentrées sont des
sous charge maximale eu et l’allongement relatif à la limite élas-
structures dont les barres forment, à la fois, des mailles en triangle
tique ey supérieur à 10.
et des mailles en quadrilatère (cf. figure 7). On retrouve des typolo-
gies proches de triangulations centrées, mais où l’axe de certaines & Le caractère adéquat d’un acier se réfère aux propriétés requises
barres a volontairement été rendu non concourant au nœud, créant pour la ductilité des éléments structuraux :
des tronçons soumis à des sollicitations de flexion et de cisaille-
– allongement élevé ;
ment. Ainsi, l’ossature de la figure 7a correspond à une ossature à
– rapport entre la contrainte de rupture fu et la limite élastique fy,
triangulation centrée en V inversé dont on aurait écarté les barres
tel que fu/fy > 1,1 ;
du V au point d’intersection avec la poutre. La raideur et la résis-
– ténacité suffisante à la température de service (27 J minimum
tance aux forces horizontales d’une ossature avec triangulation à
dans un essai Charpy à entaille en V) ;
barres excentrées est assurée principalement par des éléments
– soudabilité.
soumis à des efforts normaux, mais on utilise l’excentricité de la
configuration pour développer les déformations plastiques dans
les « tronçons sismiques » sous des forces extérieures appliquées
inférieures à celles requises pour atteindre la charge limite des
autres barres.
L’énergie est dissipée dans ces tronçons par flexion cyclique ou
par cisaillement cyclique, deux mécanismes locaux très dissipatifs.
Si on utilise des configurations permettant de garantir que tous les
tronçons d’excentrement seront actifs, ces structures sont caracté-
risées par des coefficients de comportement similaires aux porti- Figure 9 – Ossatures métalliques comportant des noyaux ou murs
ques (q = 6) et combinent ainsi raideur et capacité de dissipation. en béton (d’après NF EN 1998-1:2005)

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Constructions parasismiques mixtes


acier-béton
Contexte de l’Eurocode 8
par André PLUMIER
Professeur à l’université de Liège

1. Ossatures dissipatives en charpente mixte acier/béton ......... C 2 569 – 2


1.1 Remarque préliminaire....................................................................... — 2
1.2 Mécanisme locaux dissipatifs et non dissipatifs............................... — 2
1.3 Mécanismes plastiques globaux et coefficients de comportement.. — 3
1.4 Caractéristiques des matériaux.......................................................... — 4
1.5 Caractérisation des sections pour l’analyse élastique ...................... — 4
1.6 Apport de l’enrobage de béton à la ductilité .................................... — 5
1.7 Conception spécifique des éléments structuraux ............................. — 5
1.8 Poutre avec dalle ................................................................................ — 7
1.9 Largeur participante de dalle ............................................................. — 8
2. Ossatures mixtes en portique ...................................................... — 10
2.1 Objectifs et critères du projet dissipatif ............................................ — 10
2.2 Nœuds poutre/poteau ........................................................................ — 11
2.3 Transfert des moments de flexion aux nœuds poutres/poteaux ...... — 13
3. Ossatures mixtes avec triangulations ........................................ — 18
3.1 Ossatures mixtes avec triangulations à barres centrées .................. — 18
3.2 Ossatures mixtes avec triangulations à barres excentrées............... — 18
4. Ossatures et systèmes à murs mixtes ........................................ — 19
4.1 Types de murs mixtes et critères de dimensionnement ................... — 19
4.2 Linteaux .............................................................................................. — 19
4.3 Murs mixtes de contreventement avec âme en acier ....................... — 20
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 2 569

urant les dernières années, la construction mixte acier/béton a connu un


D essor important. Cette tendance peut s’expliquer par l’association des qua-
lités respectives des deux matériaux.
L’ossature acier offre sa rapidité d’exécution, ainsi qu’une résistance et une
ductilité élevées pour un encombrement limité.
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Le béton, irremplaçable matériau des planchers, offre un complément de


résistance en compression à ces armatures particulières que sont les profils
en acier constituant l’ossature. En outre, le béton donne aussi sa flexibilité géo-
métrique lors de la mise en place ainsi que son inertie thermique.
Mais, chercher à utiliser le béton pour sa collaboration structurale dans des
structures mixtes primaires, c’est-à-dire soumises à des actions autres que gra-
vitaires, pose des problèmes nouveaux, qui ne sont pas traités par l’Eurocode 4.
Certains d’entre eux ont été résolus lors de l’élaboration de l’Eurocode 8,
norme parasismique qui sera en vigueur en 2011. On peut notamment citer :
– la définition des conditions assurant la ductilité des sections enrobées de
béton, partiellement ou complètement ;
– la définition d’armatures « sismiques » de dalles, et autres conditions aux
nœuds garantissant le développement de pleins moments plastiques mixtes
aux nœuds des ossatures en portique autostable ;
– l’expression de conditions pour les assemblages mixtes ;
– la définition d’éléments de projet pour les « systèmes mixtes ».

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CONSTRUCTIONS PARASISMIQUES MIXTES ACIER-BÉTON ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Tous ces aspects nouveaux de la construction mixte sont décrits et expliqués,


au sein d’un texte qui définit et motive, avec les formulations et les symboles de
l’Eurocode 8, l’état actuel des éléments de projet de construction parasismique
mixte acier/béton.
On y mentionne aussi les limites des connaissances, car des problèmes res-
tent à étudier, comme le comportement cyclique de diagonales mixtes ou les
conditions pour bénéficier en pied de poteau de portique d’un plein moment
résistant plastique mixte, couplé à une pleine résistance mixte au cisaillement.
Les questions relatives aux structures acier exclusives sont traitées dans le
dossier [C 2 559].

S 1. Ossatures-dissipatives en
& On obtient la ductilité requise des éléments structuraux ou
assemblages mixtes de la même manière qu’en béton armé, c’est-
charpente mixte acier/béton à-dire en proportionnant les sections mixtes de manière telle que
l’acier plastifie, alors que le béton reste dans le domaine élastique,
et en confinant le béton par des armatures transversales. De cette
façon, on maintient l’intégrité du béton pendant le séisme et le
1.1 Remarque préliminaire caractère dissipatif est réalisé par la plastification de l’acier des pro-
filés et/ou des armatures.
Les constructions mixtes acier/béton sont constituées de deux
matériaux qu’on peut utiliser séparément pour réaliser des projets & Le principe suivi pour définir les conditions assurant la ductilité
parasismiques. des sections mixtes est le même qu’en béton armé. Le diagramme
Avant de lire ce qui suit, il est utile de prendre connaissance des des e doit être tel que les allongements dans l’acier atteignent ey, ce
données relatives au projet parasismique, en général, et aux cons- qui correspond à la limite élastique fy, alors que les accourcisse-
tructions parasismiques en acier et en béton. Ceux-ci font l’objet de ments du béton sont inférieurs à ecu2, valeur correspondant à la
dossiers antérieurs (cf. [1] [2] [3]). On y trouve des éléments techni- rupture du béton en compression. Ce principe se traduit dans une
ques et des notions nécessaires pour la compréhension du présent condition relative à la position de l’axe neutre.
dossier, tels que :
Le rapport x/d de la distance x entre la fibre la plus comprimée
– mécanisme plastique global ; du béton, où l’accourcissement du béton est égal à ec,mixte, et l’axe
– coefficient de comportement ; neutre plastique de la hauteur d de la section mixte est égal à (cf.
– dimensionnement en capacité ; figure 1) :
– capacité de rotation plastique ;
– structures primaire et secondaire ; (
x /d = εc,mixte / εc,mixte + εs,mixte )
– classes de ductilité, etc.
Ces éléments ne sont pas redéfinis ici. & Pour éviter la ruine par écrasement du béton, il faut :

x /d < εcu2 / ( εcu2 + εa )


1.2 Mécanismes locaux dissipatifs et non
dissipatifs avec ecu2 déformation ultime en compression du béton,

1.2.1 Condition dissipative d’un élément mixte ea déformation totale de l’acier à l’état limite
acier/béton ultime.

Les sections ou assemblages mixtes sont faits de deux maté-


riaux : l’acier et le béton.
ec,mixte
& L’acier est un matériau ductile. Si on utilise des nuances conve-
x
nables, l’allongement à rupture est supérieur à 15 % = 150.10-3 et la
ductilité eu /ey supérieure à 15.
d
q
& Le béton est caractérisé par une capacité de déformation ecu2 à
q
rupture très limitée, de l’ordre de 3,5.10-3. La déformation ecu2 vaut es,acier
seulement 2 fois l’accourcissement maximum élastique, de sorte
que la ductilité du matériau béton n’est que de 2, à comparer à 15 es,mixte
pour l’acier.
On peut relever ecu2 par un facteur de 2 à 4 si on confine le béton
par des armatures transversales, mais ceci ne vaut que pour la par- Figure 1 – Allongements observés à rotations q égales dans,
tie de béton intérieure à ces armatures, et ce confinement est diffi- respectivement, une section symétrique en acier et une section
mixte acier/béton utilisant le même profil acier (d’après [4])
cile à réaliser dans la dalle d’un profil en T (poutre acier + dalle).

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––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– CONSTRUCTIONS PARASISMIQUES MIXTES ACIER-BÉTON

est effectué sur une base erronée, ce qui conduit à des sous-dimen-
Tableau 1 – Valeurs limites de x/d pour assurer la ductilité sionnements et au risque de favoriser des modes de ruine locaux
de section en lieu et place du mécanisme plastique global souhaité.

x/d 1.2.3 Problème de la garantie ductile, ou non,


Classe de fy
ductilité
q
(en N/mm2)
Borne supérieure des armatures de dalle
(en mrad)
Dans les ossatures en portique mixte, la réalisation d’un moment
1,5 < q ł 4 355 27 résistant fiable en zone de moment négatif exige la présence d’ar-
DCM matures de dalle qui soient ductiles.
1,5 < q ł 4 235 36 Des treillis soudés non conformes aux exigences de ductilité
peuvent, toutefois, être utilisés, à condition que, dans les zones dis-
q>4 355 20 sipatives, des armatures ductiles dupliquant ces treillis y soient
DCH aussi placées.
q>4 235 27
& Mais ceci pose un problème, car pour calculer le moment résis-
tant qui sert de référence au dimensionnement capacitif des élé-
Le tableau 1 indique les limites du rapport x/d de sections satis- ments structuraux adjacents à cette zone dissipative, on doit, par


faisant cette condition en fonction d’une exigence en capacité de sécurité, considérer toutes les armatures présentes, ductiles ou
rotation plastique correspondant aux classes de ductilité DCM et non.
DCH, soit respectivent 25 mrad et 35 mrad [3].
Lorsque la duplication d’armatures non ductiles par des armatu-
& Il faut noter qu’une section comportant un profil acier avec dalle res ductiles est réalisée, le dimensionnement capacitif conduit à
possède une ductilité inférieure à celle d’un profil acier seul, car des sections de poteaux très importantes.
l’axe neutre de la section mixte en T est situé plus haut que celui
du profil symétrique en acier seul, couramment dans l’aile supé- & Deux résistances plastiques des zones dissipatives sont donc
rieure du profil acier, et ceci, tant sous moment de flexion positif, considérées, lors du dimensionnement des structures mixtes
que négatif. acier/béton :
Il en résulte que les accourcissements es,mixte, dans l’aile infé- – une résistance plastique limite inférieure ;
rieure du profil, sont accrus par rapport à ceux es,acier du profil – une résistance plastique limite supérieure.
seul. Ces accourcissements plus élevés entraı̂nent une dégradation
plus rapide par voilement, ce qui réduit la ductilité.  La résistance plastique limite « inférieure » des zones dissipati-
ves est utilisée dans les vérifications de dimensionnement concer-
Cet effet est pris en compte en imposant des limites plus basses nant les sections des éléments dissipatifs, par exemple, MEd < Mpl,
à l’élancement c/t de l’âme, lorsqu’elle est en compression (cas des
Rd. On la calcule en prenant en compte le béton de la section et,
poutres avec dalles), que lorsqu’elle est en flexion (profil acier
uniquement, les composants en acier de la section classés comme
symétrique). Les limites de c/tf des ailes ne sont, par contre, pas
ductiles.
affectées.
 La résistance plastique limite « supérieure » est calculée en
1.2.2 Choix de départ : caractère plus ou moins prenant en compte le béton de la section et tous les composants
mixte des éléments dissipatifs en acier présents dans la section, y compris ceux qui ne sont pas
classés comme ductiles, par exemple certains treillis soudés. Elle
Pour qu’une ossature forme un mécanisme global plastique, il est utilisée dans le dimensionnement en capacité des éléments
faut que les zones dissipatives soient fiables. adjacents à la zone dissipative.
En construction mixte acier/béton, il existe un choix possible
entre deux concepts : & En pratique, une solution économique consiste à utiliser des
– réaliser des sections et assemblages mixtes assurant la treillis ductiles ou à éviter la continuité de treillis non ductiles
ductilité ; dans les zones dissipatives en plaçant à ces endroits des armatures
– compter seulement sur l’ossature acier pour la ductilité, et ductiles, le recouvrement entre armatures ductiles et non ductiles
négliger l’apport du béton à la résistance des zones dissipatives. étant situé en dehors des zones dissipatives.

Dans cette dernière option, on évite le travail en mixte des zones


dissipatives, ce qui facilite l’analyse et élimine les détails parasismi- 1.3 Mécanismes plastiques globaux
ques du béton. et coefficients de comportement
Il existe des solutions mixtes acier/béton très diverses dans le
Mais, il faut être certain d’assurer une réelle indépendance du domaine du bâtiment.
béton par rapport à l’ossature acier dans les zones dissipatives
potentielles. Ceci est une nécessité absolue si on veut que le & À côté des classiques ossatures auto-stables en portique et des
modèle de l’ossature, utilisé pour l’analyse globale, soit suffi- ossatures contreventées par des triangulations à barres centrées ou
samment représentatif du comportement réel de l’ossature. excentrées, rencontrées en construction métallique pure, on peut
aussi concevoir des solutions mixtes appartenant aux types sui-
En effet, en projet parasismique, une sous-estimation de la résis- vants (cf. figure 2) :
tance et de la raideur ne place pas nécessairement en sécurité, car : – ossatures à murs mixtes acier/béton – type 1 et 2 aux figures 2a
– sous estimer la raideur signifie qu’on effectue l’analyse globale et 2b ;
d’une structure plus flexible, ce qui correspond à des forces sismi- – systèmes mixtes avec murs ou poteaux en béton armé et pou-
ques et des sollicitations moindres, car les ordonnées du spectre tres de couplage métalliques ou mixtes – type 3 à la figure 2c ;
de réponse en accélération décroissent avec des périodes – murs mixtes comportant une âme d’acier travaillant en cisaille-
croissantes ; ment, continue sur la hauteur du bâtiment, et des membrures en
– sous estimer la résistance des poutres signifie que le dimen- acier ou mixtes pour la reprise de la flexion : ce type de murs
sionnement en capacité (cf. [1] [2] [3]) des poteaux et assemblages peut-être, ou non, enrobé de béton sur une (ou deux) face(s).

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TYPE 1 TYPE 2 TYPE 3 Tableau 2 – Principe de dimensionnement, classes


de ductilité et bornes supérieures des valeurs
du coefficient de comportement q

Intervalles des valeurs


Principe de Classes de
du coefficient de
dimensionnement ductilité
comportement q
a ossature en b murs mixtes c murs mixte, ou en béton, Comportement de
portique acier, renforcés par couplés à des poutres
structure faiblement DCL q ł 1,5 - 2
ou mixte, connectée des profilés acier en acier, ou mixtes
à des remplissages enrobés verticaux
dissipatif
en béton q ł 4
Comportement de DCM
+ limites du tableau 3
Figure 2 – Murs mixtes des types 1, 2 et 3 (d’après la norme structure dissipatif
EN 1998-1:2005) DCH Limite du tableau 3

Dans le projet de construction mixte, l’Eurocode 4, qui traite des

S constructions mixtes pour les situations non sismiques, reste


d’application.
Tableau 3 – Bornes supérieures des valeurs du coefficient
de comportement q des ossatures mixtes régulières
& L’Eurocode 8, relatif au projet parasismique, est utilisé de façon en élévation
différente, suivant le principe de fonctionnement de la structure à
l’état limite ultime : q
– comportement faiblement dissipatif : l’Eurocode 8 intervient Types de structure Classe de Classe de
seulement pour définir l’action sismique ; ductilité DCM ductilité DCH
– comportement dissipatif avec des zones dissipatives mixtes :
les Eurocodes 4 et 8 sont considérés dans l’analyse et dans la véri- • Ossatures en portique
fication des éléments structuraux ; • Ossatures avec triangulations à Comme pour les ossatures
– comportement dissipatif avec des zones dissipatives en acier barres centrées ou excentrées acier. Voir [3]
seul ; les Eurocodes 3, 4 et 8 interviennent dans l’analyse globale • Pendule inversé
et la vérification des éléments structuraux. • Système structural mixte
• Valeur par défaut : au/a1 = 1,1 3 au /a1 4 au /a1
& À ces principes de dimensionnement ainsi définis correspondent • Murs mixtes (type 1 et type 2)
des Classes de ductilité et des domaines du coefficient de compor-
tement q indiqués au tableau 2. On précise ces données au • Murs mixtes, ou en béton armé,
tableau 3 pour divers types d’ossature. couplés par des poutres acier, ou 3 au /a1 4,5 au /a1
mixtes (type 3)
On rappelle que, pour un type structural donné, le nombre de
zones plastiques potentielles est fonction de la redondance, ou • Murs de cisaillement mixtes avec
degré d’hyperstaticité, du type structural, et que la valeur de q est plaques d’acier. 3 au /a1 4 au /a1
fonction de cette redondance par le biais du paramètre de redistri- • Valeur par défaut : au/a1 = 1,2
bution plastique :

αu / α1 1.4 Caractéristiques des matériaux


Les armatures de béton armé, barres ou treillis, considérées dans
avec a1 multiplicateur de l’action sismique horizontale la résistance plastique des zones dissipatives, doivent satisfaire des
de calcul pour lequel on atteint la résistance exigences relatives à fu/fy et à l’allongement. Ces exigences sont
plastique d’un élément structural, celles des aciers de classe B ou C de l’Eurocode 2 [3] en classe de
au multiplicateur pour lequel un mécanisme glo- ductilité DCM, et des aciers de classe C en classe de ductilité DCH.
bal plastique est formé. On les rappelle au tableau 4.

On peut établir au/a1 par une analyse en poussée progressive. À l’exception des étriers fermés ou des épingles, toutes les bar-
res situées dans les zones de contraintes élevées doivent être
Les tableaux 2 et 3 proposent des valeurs par défaut.
des armatures à haute adhérence.
& On note que les structures de type similaire aux ossatures en
acier ou en béton armé ont les mêmes coefficients de comporte- 1.5 Caractérisation des sections
ment que celles-ci (cf. [2] [3]). La distinction entre classes de ducti-
lité moyenne DCM, ou élevée DCH, correspond à des critères diffé-
pour l’analyse élastique
rents quant aux sections des profils acier, aux assemblages et aux Pour calculer les sollicitations sous un séisme, qui est une action
détails de conception admis. dynamique de courte durée, on calcule la rigidité des sections mix-
Le concepteur est libre d’adopter des valeurs de au/a1 et de q tes dans lesquelles le béton est comprimé en utilisant un coefficient
inférieures à celles proposées dans les tableaux. Le choix de d’équivalence :
valeurs plus faibles peut aider à converger plus rapidement vers
une conception satisfaisant tous les critères, en particulier ceux n = Ea / Ecm = 7
qui limitent la déformabilité des structures, car des valeurs élevées
de q conduisent à des structures plus légères et, parfois, trop avec Ea et Ecm respectivement, modules d’élasticité de l’acier
flexibles. et du béton.

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Tableau 4 – Propriétés des armatures

tf

tf
Barres et fils redressés.
Forme du produit
Treillis soudés

h = hc
tw

h = hc
tw
Classes B C

Limite caractéristique
d’élasticité fyk ou f0,2k (en 400 à 600 c c
MPa) b = bc b = bc

Valeur minimale de k = (ft/fy) a barres de liaison b étriers soudés à l'âme


ø 1,15 additionnelles du profil acier
k* ø 1,08
< 1,35 soudées aux ailes
Annexe C, Tableau C1

Valeur caractéristique de la
déformation relative sous ø 5 ø 7,5 s s s s s s s
charge maximale (en %)

* d’après la norme EN 1992-1-1:2004 (cf. [2]) S


c pas « s » des étriers ou des barres
On calcule le moment d’inertie des poutres mixtes avec dalle,
désigné par I1 (dalle en compression) ou par I2 (dalle en traction),
en prenant en compte une largeur participante de dalle définie au Figure 3 – Armature des sections partiellement enrobées
§ 1.9. On calcule la rigidité des sections mixtes dans lesquelles le
béton est tendu, en supposant que le béton est fissuré et que seu- Ces limites peuvent encore être relevées de 50 % si on dispose
les les parties en acier de la section sont actives. des :
Dans l’analyse globale des poutres mixtes, on distingue deux – armatures de confinement (cas des profils complètement
rigidités distinctes en flexion : enrobés) ;
– EI1 pour la partie de la portée soumise au moment de flexion – barres droites de liaisons soudées à l’intérieur des ailes (cas
positif (section non fissurée) ; des profils partiellement enrobés) (cf. figure 3a) à condition que
– EI2 pour la partie de la portée soumise au moment négatif (sec- ces barres soient placées avec un espacement longitudinal s infé-
tion fissurée). rieur au débordement d’aile c :

s /c < 1
Toutefois, une approche plus simple est admise dans l’Euro-
code 8, où l’analyse est effectuée en attribuant, à l’ensemble
On présente au tableau 5 les limites d’élancement d’aile et d’âme
de la poutre, un moment d’inertie équivalent Ieq constant sur
des éléments structuraux de section H ou I dans différentes hypo-
toute la portée et donné par :
thèses. Dans ce tableau, l’indication « avec liaison du béton à
Ieq = 0,6 I1 + 0,4 I2 l’âme » se réfère aux prescriptions de l’Eurocode 4 (cf. [Doc. C 2 569]
norme EN 1994-1-1:2005). Ces liaisons peuvent être des étriers sou-
dés à l’âme, comme à la figure 3b, ou des barres de diamètre
Cette relation est approchée, car Ieq dépend, en fait, du dia- 6 mm, au moins, passant au travers de trous pratiqués dans l’âme
gramme des moments sollicitants. et/ou par des connecteurs de diamètre 10 mm, au moins, soudés à
l’âme. Les « liaisons des ailes par des barres droites » sont repré-
La rigidité à la flexion des poteaux mixtes se calcule par : sentées à la figure 3a.
On précise plus loin les conditions à respecter pour bénéficier
(EI )c = 0,9 (EIa + r Ecm Ic + E I s ) des relèvements des limites d’élancement de parois dans les
poteaux partiellement et complètement enrobés.
avec r coefficient de réduction dépendant du type de
section du poteau et dont la valeur recomman-
dée est r = 0,5, 1.7 Conception spécifique des éléments
Ia, Ic et Is respectivement, moment d’inertie de la section structuraux
en acier, de la section en béton, et des armatu-
res, tous ces moments d’inertie étant calculés 1.7.1 Dimensionnement des éléments structuraux
par rapport à l’axe neutre de la section mixte. mixtes dissipatifs et non dissipatifs
La structure résistante aux séismes est dimensionnée en se réfé-
1.6 Apport de l’enrobage de béton rant à un mécanisme plastique global impliquant des zones dissi-
patives locales. Ce mécanisme global identifie les éléments dans
à la ductilité lesquels se situent des zones dissipatives et, indirectement, les élé-
ments sans zone dissipative.
Le béton d’enrobage placé autour d’un profil en acier, ou entre
les ailes de ce dernier, empêche la formation d’ondes de voilement Les poteaux peuvent être dimensionnés pour que des zones dis-
vers l’intérieur de la section, ce qui réduit la dégradation de la résis- sipatives se forment aux endroits indiqués par le mécanisme global
tance par voilement sous sollicitation cyclique. Pour cette raison, plastique, en particulier au pied des poteaux et au sommet des
certaines limites d’élancement de parois sont moins contraignantes poteaux du dernier niveau dans les ossatures en portique auto-
pour les sections mixtes, que pour les profils en acier seul. stable (cf. [1] [2] [3]).

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Méthodes de calcul et conception
(Réf. Internet 42825)

1– Méthodes iabilistes en construction

2– Eurocode 1

3– Règles antisismiques

4– Méthode de calcul non linéaire Réf. Internet page

Dynamique des structures. Techniques d'analyse et d'essai B5150 83

Ampliication dynamique dans le calcul de structures AF1681 89

La méthode des éléments inis - Calcul non-linéaire géométrique C6003 95

La méthode des éléments inis - Calcul non-linéaire matériel C6004 101

Méthodes simpliiées pour le calcul non-linéaire de structures de génie civil C6002 107

Apports des lois constitutives non-linéaires en génie civil. Problématiques et enjeux C6001 111

Lois de comportement en calcul de structures. Identiication et utilisation C6005 117

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Dynamique des structures


Techniques d’analyse et d’essai
par Alain GIRARD
Expert technique de la division Études et Recherche d’INTESPACE
Professeur vacataire à l’École nationale supérieure de l’aéronautique et de l’espace
et à l’École nationale supérieure d’ingénieurs de constructions aéronautiques

1. Généralités sur les techniques d’analyse.......................................... B 5 150 - 2


1.1 Problème et solutions ................................................................................. — 2
1.2 Techniques d’analyse .................................................................................. — 4
2. Analyse dynamique des systèmes ...................................................... — 6
2.1 Système à un degré de liberté.................................................................... — 6


2.2 Systèmes à N degrés de liberté.................................................................. — 8
2.3 Approche modale ........................................................................................ — 11
2.4 Systèmes continus ...................................................................................... — 16
2.5 Sous-structuration ....................................................................................... — 17
2.6 Conclusions sur l’analyse ........................................................................... — 18
3. Techniques expérimentales................................................................... — 18
3.1 Généralités ................................................................................................... — 18
3.2 Identification par essai modal .................................................................... — 19
3.3 Simulation par générateurs de vibrations................................................. — 20
4. Conclusion ................................................................................................. — 21
Références bibliographiques ......................................................................... — 21

es structures se rencontrent dans tous les domaines : ce sont elles qui


L assurent une fonction de support pour des objets de toutes natures. Ainsi,
un mât, un pont, un bâtiment, une caisse de voiture, un fuselage d’avion..., sont
des structures plus ou moins complexes, dont la première mission est de résister
à l’environnement.
Si l’environnement est statique, c’est-à-dire ne dépendant pas du temps,
comme la gravité ou une pression constante, il s’agit de vérifier que les
contraintes restent dans les limites admissibles par les matériaux.
Si l’environnement dépend du temps, il faut d’abord étudier le mouvement
qui en résulte. Ce comportement dynamique peut, par amplification, donner
lieu à des niveaux bien supérieurs à ceux du comportement statique. Il importe
donc de maîtriser la prévision de ces phénomènes pour comprendre, remédier,
optimiser : c’est l’objet de la dynamique des structures.
La prévision peut reposer sur deux types d’activités : l’analyse et l’expérimen-
tation. Négliger l’un au profit de l’autre est dangereux : l’analyse seule n’est pas
suffisamment fiable, l’expérimentation seule ne donne pas une vue complète
de la situation. Aussi, ces deux mondes doivent-ils être parfaitement imbriqués
dans le développement d’une structure.
Cet article est une introduction aux techniques d’analyse et d’essai en dyna-
mique des structures. Des généralités sur les techniques d’analyse seront d’abord
présentées pour poser le problème et parler de sa résolution. La formulation
est ensuite développée, tout en restant limitée au profit des résultats pratiques
et en insistant sur la compréhension physique des phénomènes. Enfin, les tech-
niques expérimentales sont abordées, en relation avec l’analyse.
Pour plus de détails, on se reportera aux références bibliographiques donnant quelques
ouvrages ou publications de base et, notamment, à la référence [19] qui donne une vue
p。イオエゥッョ@Z@。カイゥャ@QYYW

d’ensemble sur le sujet.

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DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________

Notations et symboles 1. Généralités sur les techniques


Symbole Désignation
d’analyse
Scalaires, 1.1 Problème et solutions
matrices
C, c amortissement visqueux, combinaison linéaire 1.1.1 Structure et conditions aux limites
E module d’Young
F force On considère une structure soumise à un environnement dyna-
f fréquence mique donné. Des forces de diverses natures (volumiques, sur-
G flexibilité (déplacement/force) faciques, ponctuelles) s’appliquent sur elle et provoquent un
mouvement que l’on peut décrire par des déplacements, des vitesses
H fonction de transfert, facteur d’amplification
dynamique ou des accélérations en tous ses points. La notion d’appui, ou de
condition aux limites, est souvent réservée aux parties de la structure
h réponse impulsionnelle
où le mouvement est bloqué (déplacements correspondants impo-
Ι identité, inertie sés nuls). Elle peut être généralisée à un mouvement imposé
i –1 quelconque. Ainsi, toute structure peut être décomposée en deux
K, k raideur (force/déplacement) parties exclusives, comme schématisé figure 1 :
L facteur de participation modale, longueur — une partie où des forces sont imposées (éventuellement
M, m masse (force/accélération) nulles) : ce sont les forces d’excitation. Le mouvement de cette partie
Q amplification à résonance : Q = 1/(2 ζ ) est alors une réponse. On qualifiera par la suite cette partie d’interne


q déplacement modal et on lui affectera l’indice mnémotechnique i ;
S densité spectrale de puissance (DSP), section — une partie où le mouvement est imposé (éventuellement nul) :
T transmissibilité (déplacement/déplacement, ...) ce sont les conditions aux limites (éventuellement absentes). Les
t temps forces de réaction correspondantes sont alors des réponses. On qua-
lifiera par la suite cette partie de jonction (ou liaison, ou interface)
u, v, w déplacement physique
pour lui affecter l’indice mnémotechnique j.
x coordonnée (position)
ζ amortissement visqueux réduit Cette décomposition naturelle, d’une grande généralité, va
influer sur les développements qui suivent de manière fondamen-
η amortissement structural
tale.
λ valeur propre
θ rotation Exemple d’un pylône
Φ mode propre La jonction j sera constituée de tous les points d’ancrage au sol, la
φ coefficient de cisaillement partie interne i de tout le reste. Des forces, par exemple dues au vent,
Ψ mode de jonction éventuellement nulles par endroits, pourront être imposées sur la partie
pulsation : ω = 2 π f interne. Un mouvement, par exemple dû à un tremblement de terre,
ω
pourra être imposé sur la jonction. Sous l’action, éventuellement simul-
tanée, de ces deux sollicitations, la partie interne répondra par un mou-
Abréviations
vement et la jonction par des forces de réaction.
ddl degré de liberté
DSP densité spectrale de puissance

1.1.2 Structure et discrétisation


Indices Toute structure réelle est continue au départ. Quelle que soit la
nature de l’excitation et de la réponse, les équations qui régissent
d dynamique le mouvement sont des équations aux dérivées partielles. La diffi-
e élément culté de les résoudre analytiquement dans le cas de structures
i interne complexes incite à discrétiser ces dernières, par exemple par la
j jonction (appui) méthode des éléments finis. Dans ce cas, les équations deviennent
k mode propre matricielles, la taille des matrices dépendant directement de la dis-
crétisation considérée.
m relation linéaire (multi-ddl)
r rigide (jonction isostatique) Un cas intermédiaire est celui d’une structure continue avec des
res résiduel excitations (en force ou en mouvement) discrètes. Les équations
restent aux dérivées partielles, mais les résultats peuvent se mettre
s sélection, secondaire
sous forme matricielle.
x, y excitation, réponse
x, y, z repère cartésien

Exposants

T transposé
* conjugué
• ∂ ⁄ ∂t Figure 1 – Structure et conditions aux limites

X paramètre effectif

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Par la suite, on se place toujours dans le cas d’excitations matrice de fonctions de transferts entre le vecteur des excitations
discrètes ou discrétisées. De plus, sauf avis contraire, on considère X et le vecteur des réponses Y. Ce formalisme nécessite l’emploi
des structures discrétisées. L’état de la structure est alors défini par de notations appropriées pour développer efficacement la
un nombre fini de paramètres que l’on appelle degrés de liberté formulation : elles sont introduites au paragraphe 1.2.1.
(en abrégé ddl) et sur lesquels on rapporte les excitations comme
les réponses. Une approche continue peut être faite sur les mêmes
bases, mais n’est pas développée ici, son application pratique 1.1.4 Basses fréquences et hautes fréquences
restant limitée : seuls des cas particuliers simples sont abordés au
paragraphe 2.4 pour servir de référence. Plus les fréquences d’excitation sont élevées, plus les longueurs
d’onde sont faibles et plus les formes engendrées par les réponses
sont complexes. Les méthodes de discrétisation habituelles
1.1.3 Domaine temporel et domaine fréquentiel s’essoufflent, soit par le volume de calcul engendré, soit par les
erreurs dues à une perte d’information. Le seuil au-delà duquel leur
L’analyse du comportement dynamique d’une structure soumise efficacité devient médiocre délimite le domaine des basses fré-
à une excitation quelconque peut, d’une manière générale, être effec- quences : c’est celui où l’on sait caractériser économiquement le
tuée en restant dans le domaine temporel. Ainsi, si l’on considère comportement dynamique des structures et calculer ainsi de
une excitation fonction du temps x (t ), la réponse structurale y (t ) manière convenable leurs réponses à une excitation de nature
sera, sous réserve de linéarité, donnée par la relation (intégrale dite quelconque.
de Duhamel) : On verra plus loin que la caractérisation dynamique d’une struc-
ture peut être faite en introduisant la notion de mode propre, qui
est une forme associée à une fréquence. La basse fréquence est
(1) alors le domaine qui n’implique qu’un nombre limité de modes


propres. Ce domaine dépend donc essentiellement de la structure
considérée.
où hyx (t ) est la réponse y à une excitation x sous forme d’impul- En haute fréquence, le mode propre devient une caractéristique
sion unité. trop volumineuse, et l’on doit faire appel à des notions plus globales
Cette relation (1) s’interprète en disant que le résultat est la super- comme la densité modale. En fait, ces méthodes sont surtout uti-
position des réponses à l’excitation décomposée en impulsions. lisées pour des sollicitations acoustiques, domaine où la formulation
est difficile [13]. La plus connue est celle de l’analyse énergétique
Cette approche nécessite donc le calcul d’une intégrale. statistique (Statistical Energy Analysis : SEA). Ces problèmes ne sont
Une autre solution consiste à passer dans le domaine des fré- pas abordés ici.
quences f (ou des pulsations ω = 2 πf ), ce qui conduit à des opéra-
tions différentes et permet des interprétations complémentaires.
Cela peut être fait grâce à la transformée de Fourier qui, par sa réver- 1.1.5 Différents types de mouvements
sibilité, permet une bonne communication entre les deux domaines,
à certaines réserves près (cf. ouvrages de base sur le traitement du Dans le domaine fréquentiel, l’excitation la plus simple est
signal) : l’excitation sinusoïdale de fréquence f = ω /2 π, de type
+∞ +∞ x (t ) = X max sin (ωt + ϕ ). En utilisant le formalisme complexe, elle se
X (ω) = 
–∞
x ( t )e
–i ω t 1
dt ⇔ x ( t ) = -------


–∞
X (ω )e
iωt
dω (2) note x (t ) = X eiω t, X pouvant être complexe, son amplitude étant
l’amplitude du mouvement et sa phase étant le déphasage à t = 0.
La première relation exprime la décomposition de la fonction du La réponse d’une structure linéaire est une fonction sinusoïdale
temps en fonctions sinusoïdales et la deuxième reconstitue cette de même fréquence y (t ) = Y eiω t, Y étant donnée par :
même fonction à partir de ces fonctions sinusoïdales. X (ω ) est une
fonction complexe, avec partie réelle et partie imaginaire, ou ampli- Y = Hyx (ω ) X (4)
tude et phase. conséquence directe de la relation (3).
Dans le domaine des fréquences, l’équivalent de la relation (1) Dans le cas d’une excitation périodique, donc décomposable en
s’écrit : un nombre fini de fonctions sinusoïdales, on peut appliquer la
relation (4) à chaque harmonique et reconstituer ensuite le signal
temporel.
(3) Une excitation x (t ) qui ne dure qu’un temps limité sera qualifiée
de transitoire. Dans ce cas, suivant la stratégie préconisée au
paragraphe 1.1.3, on peut encore utiliser la relation (3) grâce à la
où H yx (ω ) est la réponse y à une excitation x sous forme de transformée de Fourier (TF) :
sinusoïde de pulsation ω.
TF Y (ω) = H y x (ω) X (ω) TF –1
C’est une fonction complexe de la fréquence, dite fonction de x (t ) X (ω) Y (ω) y ( t ) (5)
transfert, dont l’amplitude traduit l’amplification du mouvement et
la phase le déphasage entre excitation et réponse à la fréquence Exemple
considérée. C’est en fait la transformée de Fourier de h yx (t ), ce qui Si l’excitation est une superposition de deux fonctions sinusoïdales :
justifie sa notation.
x (t ) = x 1 sin (ω 1 t + ϕ x 1) + x 2 sin (ω 2 t + ϕx 2)
La relation (3) fait intervenir un simple produit, au lieu d’une inté-
grale dans (1), la liaison avec le domaine temporel étant assurée par la transformée de Fourier va extraire ces deux fonctions ( ω 1 , x 1 ,
transformée de Fourier. C’est cette approche qui sera adoptée par ϕ x 1) et (ω 2 , x 2 , ϕ x 2), la relation (3) va calculer les deux réponses
la suite, avec une présentation centrée sur l’utilisation des fonctions sinusoïdales correspondantes avec les amplitudes y 1 = |H (ω1)| x 1 et
de transfert. y 2 = |H (ω 2)| x 2 et les phases ϕ y1 = ϕ x 1 + ϕ [H (ω1)] et
Dans le cas de plusieurs excitations et/ou de plusieurs réponses, ϕ y 2 = ϕ x 2 + ϕ [ H ( ω 2 )], et la transformée inverse restituera
la relation (3) peut se généraliser, toujours sous réserve de linéarité, y (t ) = y 1 sin(ω1 t + ϕ y 1) + y 2 sin(ω 2 t + ϕ y 2).
avec l’emploi du formalisme matriciel. H yx représente alors une

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DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________

En fait, toute excitation réelle a un début et une fin et est donc 1.2 Techniques d’analyse
transitoire. Si sa durée est brève, on parle plutôt de choc, mais cette
stratégie reste applicable. Si, au contraire, sa durée est longue, sans
être périodique, on parle d’excitation aléatoire [4] [7]. Dans le cas 1.2.1 Généralités
d’un mouvement quasi stationnaire (ne dépendant pas du temps)
Afin de développer efficacement la formulation impliquant un cer-
et ergodique (non répétitif dans ses réalisations), l’excitation se
tain formalisme matriciel, on utilise par la suite des notations où les
caractérise dans le domaine fréquentiel par sa DSP (densité spectrale
indices vont jouer un grand rôle : mnémotechnique d’abord (dans
de puissance), ou autospectre, Sxx (ω ), que l’on peut définir comme
la mesure du possible), évitant ensuite la multiplicité des notations
la moyenne quadratique de x (t ) en fonction de la fréquence. Plu-
pour les matrices, et enfin garants de la cohérence des produits
sieurs excitations simultanées seront caractérisées par leur matrice
matriciels par enchaînement des indices.
d’auto et interspectres Sxx [moyenne des produits x i (t ) x j (t )] et les
réponses y seront données par :
S yy ( ω ) = H * Par convention, X ij désigne une matrice de dimension (n, p )
yx ( ω ) S xx ( ω ) H xy ( ω ) (6)
dont les lignes sont relatives aux n ddl i et les colonnes aux p ddl j
avec H*yx = H yx conjugué,
(sauf indication contraire). Cela implique la relation X ji = X Tij , et
H xy = H yx transposé. le fait que X ii soit symétrique, ce qui est licite dans le présent
contexte grâce au principe de réciprocité valable en mécanique
Ces notations matricielles sont explicitées plus loin.
(en excluant les structures en rotation).
On retiendra que, quelle que soit la nature du mouvement, les
réponses dans le domaine des fréquences se déduisent des excita- Toujours par convention, un indice souligné a une valeur
tions par de simples produits matriciels faisant intervenir les fonc- fixée : ainsi, X i j désigne la ligne i de X ij .
tions de transfert.


Les relations entre :
— les excitations en forces F i et en déplacements u j d’une part ;
1.1.6 Fonctions de transfert — les réponses en déplacements u i et en forces de réaction F j
d’autre part ;
Introduite au paragraphe 1.1.3, la fonction de transfert est donc peuvent alors s’écrire dans le domaine fréquentiel :
le rapport dans le domaine fréquentiel entre une excitation et une
réponse. À noter que ce n’est pas, comme on pourrait l’envisager
dans certaines circonstances, un rapport entre deux réponses, ce qui
engendrerait des erreurs dans l’utilisation des développements qui
suivent. (8)
Suite aux considérations du paragraphe 1.1.1, les excitations,
comme les réponses, sont de type force ou de type mouvement. Ce
dernier peut être défini en termes de déplacements u, vitesses u̇
ou accélérations ü, et la forme u (ω ) eiω t dans le domaine fréquentiel Cette relation fait ainsi apparaître les matrices de flexibilité G ii et
implique les relations :
de raideur K jj (symétriques par réciprocité), ainsi que les matrices
2 de transmissibilité en déplacements T i j et en forces T j i (avec
ü = i ω u̇ = – ω u (7)
T ji = T Tij par réciprocité), le signe (–) pour les forces venant du fait
leur utilisation étant strictement équivalente.
que l’on considère ici les réactions, opposées aux forces transmises.
Par la suite, on considère principalement les déplacements. On voit ici la pertinence de la convention sur les indices.
Suivant le type d’excitation et de réponse considérées, on obtient
les fonctions de transfert du tableau 1, les dénominations indiquées Avec l’exemple du pylône cité au (§ 1.1.1), les forces F i seront celles
étant les plus courantes (éventuellement suivies du qualificatif créées par le vent sur les ddl i, certaines composantes pouvant être
dynamique ). (0) nulles, les déplacements u j seront ceux engendrés par le tremblement
de terre aux points d’ancrage, certains pouvant être nuls. Les réponses
en déplacements internes u i et réactions F j seront obtenues par super-
position des effets des deux sollicitations, comme indiqué par la
Tableau 1 – Fonctions de transfert relation (8), à partir des fonctions de transfert caractéristiques du
pylône.
Réponse
Excitation On va maintenant déterminer ces fonctions de transfert en fonction
F u u̇ ü des propriétés physiques de la structure considérée, pour en déduire
ses réponses à des excitations de nature quelconque (cf. § 1.1.5).
Souplesse Mobilité
Transmissibilité Accélérance Les principales notations utilisées par la suite sont récapitulées
F Flexibilité (1) G Admittance
T – ω2 G dans le tableau Notations et symboles placé en tête de cet article.
Compliance iω G
Rigidité Transmissibilité
u Raideur (1) (1) iω T – ω2 T 1.2.2 Système à un degré de liberté et modes propres
K T
Transmissibilité Le système le plus simple à analyser est le système à un degré
u̇ Impédance de liberté (1 ddl) c’est-à-dire un système dont l’état est défini par un
T/i ω (1) iω T
K/i ω seul paramètre. Sa représentation classique est celle de la figure 2,
T
le paramètre en question étant la position de la masse par rapport
Masse (1) Transmissibilité à la position de repos. Il est composé de :
ü apparente T/(– ω 2) T/i ω (1)
— une masse de valeur m, conférant au système une énergie
M = K/(– ω 2) T
cinétique ;
(1) Terme utilisé dans cet article.

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__________________________________________________________________________________________________________ DYNAMIQUE DES STRUCTURES

— un ressort de raideur k, conférant au système une énergie À chaque étape, correspond une technique de sous-structura-
élastique ; tion, c’est-à-dire de calcul d’une structure à partir de ses sous-
— un amortisseur de constante c, permettant au système de dis- structures :
siper de l’énergie. — à partir des matrices des sous-structures, on obtient les
Ce ddl est de type i (interne). Suite aux considérations du matrices de la structure par assemblage matriciel ;
paragraphe 1.1.1, on peut lui adjoindre un ddl de type j (jonction) — à partir des modes des sous-structures, on obtient les modes
représentant le mouvement imposé à la base. On a alors, comme de la structure par manipulation adéquate : c’est ce qui est appelé
indiqué sur la figure 2, toutes les excitations et réponses possibles la synthèse modale ;
de l’équation (8) où chaque terme est ici un scalaire (i et j de — à partir des fonctions de transfert des sous-structures, on
taille 1). La résolution des équations du mouvement, exposée plus obtient les fonctions de transfert de la structure par manipulation
loin, permet de déterminer sans difficulté les 3 fonctions de trans- adéquate : c’est ce qui est parfois appelé le couplage impédanciel.
fert impliquées : flexibilité, raideur et transmissibilité.
Non seulement le système à 1 ddl est le système le plus simple,
mais on verra par la suite que tout système, aussi complexe soit-il,
peut se ramener à une collection de systèmes à 1 ddl mis en parallèle,
comme schématisé sur la figure 3. Chacun de ces systèmes repré-
sente en fait un mode propre de la structure considérée, dont la
notion a déjà été évoquée au paragraphe 1.1.4. Les fonctions de
transfert de l’équation (8) sont alors obtenues en sommant les contri-
butions de chaque mode k (indice k fixé) : c’est la technique dite de
superposition modale :

u i (ω )
F j (ω )
=

modes k
G ii, k (ω ) ∑
modes k
T ij, k (ω )
F i (ω )
(9) Figure 2 – Système à un degré de liberté

∑ – T ji, k (ω ) ∑ K jj, k (ω ) u j (ω )
modes k modes k

Le système à 1 ddl est donc la clé de voûte de l’analyse : la


connaissance de son comportement permet de déterminer celui de
toute structure, continue ou discrétisée. Une structure discrétisée à
N ddl comportera N modes, une structure continue une infinité.
Cependant, en basse fréquence, seuls les premiers seront contri-
butifs, en gros ceux dont la fréquence associée se situe dans la
bande d’excitation : la somme de l’équation (9) ne concernera que
ceux-ci, les autres pouvant être globalement représentés par un
terme résiduel (opération de troncature modale).
Figure 3 – Système complexe
Ces modes propres s’obtiennent en résolvant les équations du
mouvement sans excitation, ce qui revient à un problème aux valeurs
propres : les valeurs propres fournissent les fréquences propres, et
les vecteurs propres les formes associées. Dans la mesure où les
modes contributifs sont peu nombreux, l’effort à consentir pour les
calculer sera largement compensé par le gain relatif au calcul des
réponses par l’équation (9) : là réside l’efficacité de cette technique
par rapport à une intégration directe des équations, toujours
possible.
Signalons enfin une autre utilisation du système à 1 ddl : il
constitue un système de référence pour une caractérisation des
excitations par spectres de réponse.
Un spectre de réponse se définit comme une certaine réponse
d’un système à 1 ddl à l’excitation considérée en fonction de sa
fréquence propre, d’où la notion de spectre de choc ou de réponse
aléatoire que l’on introduira plus loin.
La même démarche est utilisée pour définir le dommage par
fatigue d’une excitation.

1.2.3 Analyse et essais

L’analyse par superposition modale se fait schématiquement en


trois étapes, comme indiqué sur la figure 4 :
— constitution de matrices représentant les propriétés de masse,
raideur et amortissement de la structure discrétisée ;
— recherche des modes propres par résolution d’un problème
aux valeurs propres ;
— détermination des fonctions de transfert par superposition Figure 4 – Analyse et essais
modale.

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Amplification dynamique
dans le calcul des structures

par Irénée CORNATON


Ingénieur mécanicien
Chargé de développement des logiciels PIPESTRESS et BEAMSTRESS
DST Computer Services SA, Genève, Suisse

1. Définition ................................................................................................. AF 1 681 - 3


2. Résolution d’un problème dynamique linéaire.............................. — 4
2.1 Équation différentielle............................................................................... — 4
2.2 Résolution théorique linéaire sur la base modale .................................. — 4
2.3 Amortissement .......................................................................................... — 6
2.4 Classification des modes .......................................................................... — 7
2.5 Utilisation de la résolution temporelle .................................................... — 8
3. Analyse spectrale .................................................................................. — 10
3.1 Présentation ............................................................................................... — 10
3.2 Spectres...................................................................................................... — 10
3.3 Réponse par mode .................................................................................... — 14
3.4 Superposition modale............................................................................... — 15
3.5 Prise en compte des modes rigides......................................................... — 15
3.6 Analyse multispectrale.............................................................................. — 16
4. Analyse pseudo-statique ..................................................................... — 17
4.1 Objectif ....................................................................................................... — 17
4.2 Conversion depuis une charge temporelle ............................................. — 17
4.3 Conversion depuis un spectre.................................................................. — 17
5. Exemples d’application ........................................................................ — 18
5.1 Analyse multispectrale avec amortissement variable............................ — 18
5.2 Force fonction du temps (excitation harmonique) ................................. — 20
5.3 Accélération fonction du temps (accélérogramme) ............................... — 23
5.4 Explosion sur une charpente.................................................................... — 26
6. Conclusion ............................................................................................... — 28
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. AF 1 681

’amplification dynamique est un phénomène à la fois physiquement intuitif


L et mathématiquement mal compris. Par exemple, les effets du séisme, en
termes d’amplification dynamique, peuvent ainsi facilement se comprendre en
raisonnant sur un simple ressort. Quiconque secoue un ressort souple sur
lequel est fixée une masse comprend de suite que celle-ci peut se balancer
d’autant plus fortement que la secousse sera violente. À l’inverse, si le ressort
est remplacé par un tube rigide, la masse ne se balancera plus et suivra la
secousse imposée, aussi explosive soit-elle.
Il s’agit là d’une illustration triviale de l’amplification dynamique : le premier
cas de figure correspond à un oscillateur souple, et le second à un oscillateur
rigide sans amplification dynamique (la masse tend à suivre intégralement le
mouvement imposé de la base). Nous verrons en particulier que cette caracté-
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥャャ・エ@RPQU

ristique des oscillateurs rigides se traduit par un comportement asymptotique

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AMPLIFICATION DYNAMIQUE DANS LE CALCUL DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________

des spectres sismiques, ces derniers étant une représentation graphique de


l’amplification dynamique. Cette asymptote coïncide avec l’accélération maxi-
male du mouvement imposé.
Cet exemple simple est la clé de compréhension des calculs dynamiques
linéaires. En effet, toute structure peut s’interpréter comme la superposition
d’une infinité d’oscillateurs, parmi lesquels seuls quelques-uns jouent un rôle
majeur dans le comportement global. Ces oscillateurs correspondent en fait
aux modes propres, états de vibration naturelle de la structure, et la littérature
parle ainsi d’oscillateurs modaux.
Après une première partie décrivant les objectifs généraux du document, et
les notations associées, nous présenterons dans la deuxième partie les rappels
théoriques relatifs à la résolution classique d’un problème dynamique linéaire,
à travers l’écriture de la solution sur la base orthogonale des modes propres.
Ces bases théoriques permettront de quantifier l’amplification dynamique
(que ce soit pour une force fonction du temps ou une accélération fonction du
temps), et donc de définir un critère numérique différenciant modes souples et
modes rigides. Ce critère sera par la suite utilisé dans la phase d’extraction
modale, car seuls les modes souples sont recherchés. En effet, la plupart des
logiciels de calculs intègrent une fonctionnalité de correction statique garantis-

T sant la prise en compte des modes rigides dans la détermination de la solution.


La résolution temporelle est la seule technique de calcul fournissant la
réponse théorique exacte du système analysé. Néanmoins, ce type d’analyse
implique le calcul d’une solution complète pour chaque pas de temps (il peut y
en avoir plusieurs dizaines de milliers) et la connaissance de données de char-
gements précises. Pour cette raison, de nombreux ingénieurs préfèrent
déployer des techniques moins « coûteuses » comme l’analyse spectrale
(monospectrale ou multispectrale), ou pseudo-statique, respectivement objets
de la troisième et quatrième partie du document.
L’analyse spectrale, offrant un bon compromis entre coût calculs et précision
des résultats, est probablement la technique de calculs la plus répandue,
notamment pour les calculs sismiques. Il s’agit là d’une approche statistique
consistant à combiner de façon plus ou moins conservative des réponses
modales maximales a priori non simultanées. Nous analyserons dans ce docu-
ment la méthodologie de création des spectres à partir des charges
temporelles, donnant ainsi un sens aux opérations mathématiques pratiquées
dans l’analyse spectrale (sommes quadratiques améliorées).
L’analyse pseudo-statique consiste quant à elle à convertir le problème dyna-
mique en problème statique. Ce type d’approche présente l’avantage de la
simplicité et de la rapidité de calculs, mais l’évaluation des efforts statiques
équivalents doit se faire avec précaution. Une attention particulière doit être
portée quand cette conversion se fait à partir de charges temporelles, sous
peine de sous-estimer l’amplification dynamique. L’application éventuelle de
coefficients de sécurité réglementaires ne garantit pas l’aspect conservatif des
calculs, ces coefficients étant avant tout d’ordre statistique dans l’objectif de
produire des calculs industriellement exploitables. À l’inverse, une conversion
basée sur des spectres garantit la maîtrise de l’amplification dynamique,
compte tenu de leur méthode d’élaboration.
Enfin, dans la dernière partie, nous résoudrons analytiquement plusieurs
problèmes dynamiques. Il s’agira d’appliquer une variété représentative de
chargements (analyse multispectrale, charge temporelle rapide, charge tempo-
relle lente, accélérogrammes, souffle d’une explosion) sur des structures
simples, et, en particulier, de mettre en évidence l’importance de l’ampli-
fication dynamique. Cette amplification peut atteindre des valeurs très
importantes, nettement plus élevées que les coefficients de sécurité usuels.

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___________________________________________________________________________ AMPLIFICATION DYNAMIQUE DANS LE CALCUL DES STRUCTURES

Notation Unité Signification


x (t) m (ou mm) Déplacement relatif fonction du temps
F (t) N Force fonction du temps
A (t) g Accélération fonction du temps (accélérogramme du séisme)
f Hz Fréquence
ω = 2πf rad · s–1 Pulsation
fR Hz Fréquence de coupure, séparant les modes souples des modes rigides
–1
ωR = 2πfR rad · s Pulsation de coupure, séparant les modes souples des modes rigides
γ g Pseudo-accélération absolue (utilisée pour les spectres sismiques)
γR = |A (t)|max g Pseudo-accélération absolue à partir de la fréquence de coupure
Cette accélération correspond à l’asymptote des spectres, et également au maximum
temporel de l’accélérogramme (accélération maximale sans amplification dynamique)
ζ Amortissement réduit
Dans la pratique, sa valeur est souvent directement spécifiée plutôt que calculée pour chaque
mode, et prise constante pour tous les modes (en général 5 % soit 0,05 pour les structures


acier)
RF (ω, t) (1) N Réponse à la force F (t) pour un oscillateur de pulsation ω à l’instant de temps t (formule dans
§ 2.4.1)
RA (ω, t) (1) g Réponse à l’accélération A (t) pour un oscillateur de pulsation ω à l’instant de temps t
(formule dans § 2.4.1)
ADF ou ADA (1) Amplification dynamique maximale en temps et en rigidité, relative à une force F (t)
ou une accélération A (t) :

max ( RF (ω , t ) , t , ω ) max ( RA (ω , t ) , t , ω )
ADF = ou ADA =
max ( F (t ) , t ) max ( A (t ) , t )

ADF (ω) ou ADA (ω) (1) (2) Amplification dynamique maximale en temps sur un oscillateur de pulsation ω, relative
à une force F (t) ou une accélération A (t) :

max ( RF (ω , t ) , t ) max ( RA (ω , t ) , t )
ADF (ω ) = ou ADA (ω ) =
max ( F (t ) , t ) max ( A (t ) , t )

(1) Pour un amortissement réduit ζ donné.


(2) Idem pour une expression en fonction de la fréquence f [ADF (f ) ou ADA (f )].

1. Définition Plusieurs approches sont possibles concernant cette amplifi-


cation : nous nous intéresserons notamment à sa valeur maximale
AD pour tout instant de temps et tout oscillateur (pour une charge
L’objectif principal de ce document est de quantifier l’amplifica- dynamique et un amortissement donnés), applicable ainsi sur
tion dynamique d’une force fonction du temps F (t) ou d’une accé- toute structure quelle que soit sa rigidité.
lération fonction du temps A (t) (accélérogramme), type de L’application de AD sur une structure signifie donc que l’on consi-
sollicitation que l’on retrouve dans de nombreuses études (séisme, dère la résonance maximale sur la totalité de la structure étudiée.
coup de bélier, choc, explosion, etc.). Cette méthode, simple à appliquer, est par conséquent conservative.
L’amplification dynamique traduit les effets amplificateurs d’une Nous nous intéresserons également à la valeur maximale de
structure sur une force ou une accélération appliquée. Elle se définit l’amplification dynamique AD (f ) ou AD (ω) pour tout instant de
comme le ratio du maximum de la réponse sur le maximum de la temps et pour un oscillateur donné de fréquence f ou de pulsation
sollicitation, cette dernière étant une force F (t) ou une accélération ω = 2πf.
A (t).
Cette approche correspond en particulier à l’analyse spectrale
Si le maximum de la sollicitation ne dépend que du temps t, le qui combine les réponses des différents oscillateurs de la structure
maximum de la réponse à cette sollicitation dépend du temps t, de (modes propres fi) sur chacun desquels est appliquée l’amplifica-
la pulsation propre de l’oscillateur considéré ω et de l’amortis- tion dynamique AD (fi ).
sement réduit ζ.
Nous verrons également qu’au-delà d’une certaine rigidité,
L’amortissement réduit ζ étant souvent fixé (ζ = 0,05 en général caractérisée par une fréquence ou une pulsation nommée fré-
pour les structures acier), nous allégerons les écritures en n’expli- quence de coupure ou pulsation de coupure, les oscillateurs n’ont
citant pas le paramètre ζ dans les formules de réponses et d’ampli- pas d’effet amplificateur. Nous parlerons alors de modes rigides,
fications [voir le tableau des notations et sa note (1)]. et par opposition de modes souples (figure 1).

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AMPLIFICATION DYNAMIQUE DANS LE CALCUL DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________

Modes souples Modes rigides c


(! ! !R) (! > !R)

m
F (t) F (t)
F (t)

k
Représentation ω ω

Figure 2 – Étude dynamique de structure sur un seul degré


de liberté (translation)
RF (ω,t) > F(t) RF (ω,t) ≈ F(t)

Le nombre de degrés de liberté (nombre de translations et


rotations libres, soit 6 par nœud libre dans un problème 3D)
Critère (1 %) ∀ ω > ωR, 1 ! ADF (ω) ! 1,01 correspond aux dimensions des matrices.
Les conditions initiales de position et de vitesse sont
Figure 1 – Différence entre modes souples et modes rigides, considérées nulles (système au repos à l’instant initial) :
illustrée avec une force dynamique F (t) x (0) = x: (0) = 0 .

T Les notations, moins centrales, telles que la matrice de masse, la


Dans le cas d’un problème statique, cas particulier de la dyna-
mique, les termes x: (t ) et x:: (t ) s’annulent et l’écriture devient :
matrice de raideur, la matrice d’amortissement, etc., sont introduites K x (t) = F (t).
progressivement dans l’article.
Dans la figure 1, le mode souple est considéré comme ayant un
effet amplificateur sur la force subie. 2.2 Résolution théorique linéaire
sur la base modale
Remarque : dans le cadre d’un critère de précision de 1 %, la
pulsation de coupure ωR caractérise la rigidité d’une structure à 2.2.1 Base des modes propres non amortis
partir de laquelle l’amplification dynamique est inférieure ou
égale à 1 %. La force appliquée et la réponse à cette force sont Le comportement de la structure étudiée est considéré linéaire.
pratiquement confondues. Les modes propres ej , caractérisant les vibrations naturelles de la
structure, sans force excitatrice ni amortissement, satisfont la
relation :

2. Résolution d’un problème K e j = ω 2j Me j

dynamique linéaire La détermination mathématique de ces modes découle donc de la


diagonalisation de la matrice M –1K, et les valeurs propres corres-
pondent aux carrés des pulsations.
2.1 Équation différentielle Les logiciels résolvent en général ce problème par une méthode
dite de puissances itérées, permettant d’isoler par puissances suc-
L’équation différentielle régissant un problème dynamique cessives la plus grande des valeurs propres. Une fois cette valeur
(figure 2) s’écrit : propre extraite, un procédé de purification permet de traiter la
M x:: (t ) + C x: (t ) + K x (t ) = F (t ) (1) valeur propre suivante par le même principe. Les pulsations signi-
ficatives pour un problème d’ingénierie étant les pulsations
avec M matrice de masse de la structure, basses, il s’avère en fait plus intéressant de diagonaliser la matrice
K matrice de raideur de la structure, K –1M en lieu et place de la matrice M –1K, afin d’isoler la plus
petite des pulsations propres.
C matrice d’amortissement de la structure, dans une
hypothèse d’amortissement visqueux (§ 2.3), D’après la théorie des matrices, K et M étant symétriques et défi-
nies non négatives, les modes propres ej et les pulsations (ωj ) sont
x (t) vecteur des déplacements et rotations relatifs de la
réels, et les modes propres vérifient le principe d’orthogonalité :
structure, fonction du temps,
x: (t ) vecteur vitesse, fonction du temps,
∀ j ≠ k eTj Mek = 0 et eTj K ek = 0
x:: (t ) vecteur accélération, fonction du temps,
F (t) vecteur chargement (forces et moments appliqués), Par ailleurs, ces modes sont normalisés par rapport à la masse :
fonction du temps. Le vecteur de chargement peut
eTj Me j = 1 .
également s’écrire sous forme d’accélérations A (t) :
F (t) = – M A (t) V avec V vecteur unitaire de L’exemple ci-dessous illustre l’importance du maillage de la
chargement directionnel (1 sur les degrés de liberté structure pour l’extraction modale. La densité du maillage doit être
correspondant à la direction de chargement, 0 sinon). proportionnelle au nombre de modes extraits par le logiciel. Les
Nota : les matrices M, K et C sont considérées comme dépendant uniquement des modes à fréquence élevée nécessitent un maillage fin pour la
caractéristiques de la structure, et non des chargements potentiels. représentation correcte des oscillations.

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___________________________________________________________________________ AMPLIFICATION DYNAMIQUE DANS LE CALCUL DES STRUCTURES

Exemple d’extraction modale sur une poutre encastrée/libre


On considère une poutre encastrée/libre de masse totale m, et
maillée en 2 éléments de longueur L chacun (figure 3). Le nœud 1
étant encastré, les degrés de liberté associés ne sont pas des
Mode 1
inconnus.
Seul le mouvement flexionnel dans le plan (yz ) est étudié. Les
quatre degrés de liberté d’écriture des matrices sont donc les transla-
tions Z et rotations X des nœuds 2 et 3 (DZ2 , θX2 , DZ3 , θX3 ).
z
Les déformations dues aux efforts tranchants sont négligées
(Euler-Bernoulli), hypothèse conventionnelle pour les éléments
élancés. Nœud 3
y
Nœud 2 (m/4)
La matrice masse est considérée diagonale avec termes unique- Nœud 1
ment sur les degrés de translation (un modèle de matrice masse (m/4) (m/2)
consistante, avec termes de couplage, donne des résultats plus pré-
cis).
Le nœud central porte la moitié de la masse de la poutre, et le
nœud extrémité un quart de cette masse. La masse reportée sur
l’encastrement n’a pas d’impact sur le calcul. Mode 2

La matrice raideur élémentaire d’une barre, dans son repère local,


s’écrit : Figure 3 – Premier et second modes d’une poutre encastrée maillée
en 2 éléments

K elem =
12 6L

E I
L3 
4L2
− 12 6L 
− 6L 2L2 
12 − 6L 
 masse : C = αK + βM. Cette hypothèse est connue sous le nom
d’amortissement de Rayleigh. En guise de simplification supplé-

  mentaire, l’amortissement peut être considéré proportionnel uni-
 4L2  quement aux effets inertiels de masse (α = 0), ou à la rigidité de la
structure (β = 0).
L’assemblage des matrices des deux barres donne une matrice raideur
totale : La condition de Caughey garantit que la matrice C est diagonali-
sable par les modes propres non amortis, c’est-à-dire que la
 24 0 − 12 6L  matrice ET C E est diagonale (∀ j ≠ k eTj C ek = 0) , E étant la matrice
  des modes propres.
E I 8L2 − 6L 2L2 
K = ,
L 
3 12 − 6L  La solution temporelle x (t) de l’équation différentielle précé-
  dente s’écrit sur la base des modes propres ej :
 4L2 
1/ 3 1/ ( 2L) 5/ 6 1/ ( 2L) 
x (t ) = ∑y j (t ) e j (2)
L 3  1/ L2 3 / ( 2L) 1/ L2 

ou φ = K −1 =  j
EI  8/ 3 2/L 
  avec yj (t) amplitude scalaire fonction du temps relative au mode j.
 2 / L2 
De la même façon qu’un vecteur se décompose en composantes
La matrice masse totale s’écrit : ¥ ¥ ¥
i , j et k dans l’espace cartésien 3D, le mouvement d’une structure
 2 0 0 0 se décompose en superposition de modes propres, la contribution
  de chaque mode étant quantifiée par l’amplitude yj (t), fonction du
m  0 0 0 temps. Nous verrons par la suite que la contribution des premiers
M=
4  1 0 modes est largement dominante.
 0
 Il reste à déterminer les valeurs de ces amplitudes yj (t), en
exploitant les propriétés des modes propres et la condition de
En supprimant les degrés de liberté associés aux rotations, la diago- Caughey.
nalisation de la matrice ΦM revient au final à diagonaliser la matrice
En reprenant l’équation (1) et en la multipliant par eTj , il vient :
 4 5
T =  , au facteur multiplicatif près, ce qui donne des vecteurs
10 16
 5   5 
eTj M ∑y:: j (t ) e j + eTj C ∑y: j (t ) e j + eTj K ∑y j (t ) e j = eTj F (t )
j j j
propres sur la base (DZ2 , DZ3) e1 =  86 + 6  et e 2 =  86 − 6  .
Les trois matrices M, C et K étant diagonalisables par les modes
 1   − 1 
propres, cette expression se simplifie en :
Si le mode 1 peut être considéré comme correctement extrait,
l’ingénieur devra en revanche raffiner son maillage pour extraire
correctement le mode 2. eTj M y:: j (t ) e j + eTj C y: j (t ) e j + eTj K y j (t ) e j = eTj F (t )

2.2.2 Écriture de la solution temporelle Sachant que les modes vérifient K e j = ω 2j Me j , l’équation précé-
dente devient :
Nous supposons que la matrice d’amortissement vérifie la
condition d’amortissement proportionnel, dite condition de eTj C e j eTj F (t )
Caughey (CM –1K = KM –1C ). C’est en particulier le cas lorsqu’elle y:: j (t ) + y: j (t ) + ω 2j y j (t ) =
eTj Me j eTj M e j
se définit comme une combinaison linéaire des matrices raideur et

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AMPLIFICATION DYNAMIQUE DANS LE CALCUL DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________

ou finalement l’expression suivante :


Tableau 1 – Valeurs d’amortissement en fonction
des structures étudiées
eTj F (t ) eTj C e j
y:: j (t ) + 2ξ j ω j y: j (t ) + ω 2j y j (t ) = en posant ξ j =
eTj Me j 2ω j eTj Me j Système Amortissement "

Ce paramètre est nommé amortissement réduit du mode j, et est Métal (domaine élastique) < 0,01
supposé inférieur à 1. Il est analysé en détails dans le
paragraphe 2.3. Structures métalliques continues 0,02 → 0,04
Si les modes sont normalisés par rapport à la masse Structures métalliques avec assemblages 0,03 → 0,07
( eTj Me j = 1), on obtient :
Tuyauteries de faible diamètre 0,01 → 0,02
eTj C e j
y:: j (t ) + 2ξ j ω j y: j (t ) + ω 2j y j (t ) = eTj F (t ) avec ξ j = Tuyauteries de grand diamètre 0,02 → 0,03
2ω j

La condition de Caughey permet donc de découpler l’équation (1) Dispositifs autobloquants 0,30
en un système d’équations indépendantes à un degré de liberté,
chacune permettant de déterminer l’amplitude scalaire d’un unique Caoutchouc 0,05
mode (oscillateur simple).
Grands immeubles durant un séisme 0,01 → 0,05
La résolution s’en trouve donc grandement simplifiée. À
l’inverse, un amortissement non proportionnel induit une résolu-


tion numérique complexe, très rarement effectuée.
Dans ce cas, les valeurs forfaitaires introduites dépendent de
L’amplitude yj (t) se calcule à l’aide d’une intégrale de convolution nombreux paramètres, dont le matériau, l’amplitude des contrain-
(ou intégrale de Duhamel) : tes subies, les forces internes, le nombre de cycles de charge-
ments, la taille de la géométrie, la qualité de la surface et la
t température.
1
y j (t ) = ∫ e−ξ j ω j (t −τ ) sin [ω j 1− ξ 2j (t − τ )] eTj F (τ ) dτ (3)
ω j 1− ξ 2j Le tableau 1, issu de [1], présente un ordre de grandeur des
τ =0
amortissements retenus pour les calculs de structures.
Il s’agit bien ici d’une expression scalaire, le produit eTj F (τ ) , pro- Deux méthodes de calcul des amortissements sont à distinguer,
jection du chargement sur le j ième vecteur propre, étant celui d’un selon que la structure est homogène ou hétérogène.
vecteur ligne par un vecteur colonne.
§ Pour les structures homogènes
Le terme en exponentiel représente l’amortissement et est donc
égal à 1 en l’absence d’amortissement (ζj = 0). L’expression (3) se L’amortissement est considéré constant sur l’ensemble de la
simplifie alors en : structure et conserve la même valeur quel que soit le mode.
Pour tout mode j, nous retenons ainsi ζj = ζ.
t
1
y j (t ) =
ωj ∫ sin [ω j (t − τ )] eTj F (τ ) dτ § Pour les structures hétérogènes
τ =0 Des calculs plus fins peuvent être déployés, en différenciant les
valeurs d’amortissement à travers la structure hétérogène
Nota : une solution complète est déterminée à chaque pas de temps du chargement.
Une discrétisation exagérément fine mènerait donc à des temps calculs éventuellement (figure 4).
rédhibitoires. À l’inverse, une discrétisation grossière induit le risque de ne pas calculer La construction directe de la matrice d’amortissement associée
la réponse maximale de la structure.
constituant un problème trop complexe, une méthode indirecte de
calcul de moyenne (tableau 2) est employée. Cette méthode
consiste à déterminer un amortissement équivalent pour chaque
2.3 Amortissement mode propre, considéré constant sur l’ensemble de la structure.
Tout mouvement dans une structure s’accompagne d’une dissi-
pation d’énergie, dont les causes sont multiples (frottements inter-
nes dans le matériau, frottements au niveau des liaisons avec
l’extérieur, etc.), caractérisée par l’amortissement.
On distingue trois représentations principales de l’amortis-
sement : l’amortissement visqueux (force d’amortissement propor-
tionnelle à la vitesse), l’amortissement hystérétique ou amortisse-
ment structural (force d’amortissement proportionnelle au Mode 1 (ζ1 = 2,48 %)
déplacement et dans la direction opposée à la vitesse), et l’amor-
tissement de Coulomb (force d’amortissement, due au frottement,
proportionnelle à la force de réaction normale et dans la direction
opposée à la vitesse).
La résolution présentée dans le paragraphe précédent aboutit
aux calculs des amortissements réduits ζj , à partir de la matrice Matériau A Matériau B
d’amortissement C, supposée conforme à la condition de Caughey (β1 = 5 %) (β2 = 2 %)
pour la découplabilité du système. Mode 2 (ζ2 = 3,38 %)
Dans la pratique, la matrice C est difficilement évaluable, compte
tenu des nombreuses incertitudes sur les causes de la dissipation
Figure 4 – Calcul des amortissements équivalents des deux premiers
d’énergie, et les paramètres ζj sont en fait directement spécifiés et modes d’une structure hétérogène constituée de deux matériaux
non calculés. différents

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La méthode des éléments finis –


Calcul non-linéaire géométrique
par Alaa CHATEAUNEUF
Professeur des universités
Polytech Clermont-Ferrand, Institut Pascal, Université Blaise Pascal (Clermont-Ferrand,
France)

1. Définition de la non-linéarité géométrique ............................... C 6 003 – 2


1.1 Histoire non-linéaire du chargement ................................................. — 2
1.2 Non-linéarité géométrique ................................................................. — 3
2. Grande déformation d’un milieu continu................................... — 4
2.1 Tenseur de déformation ..................................................................... — 5
2.2 Contraintes ......................................................................................... — 6
3. Formulations Lagrangiennes totale et actualisée .................... — 9
3.1
3.2
Formulation Lagrangienne totale ......................................................
Formulation Lagrangienne actualisée ...............................................


10
11 T
4. Discrétisation par éléments finis ................................................ — 12
4.1 Variation virtuelle de la déformation ................................................. — 12
4.2 Matrices de rigidité et vecteur des forces nodales ........................... — 12
4.3 Cas de l’élasticité plane ..................................................................... — 13
4.4 Calcul des charges critiques .............................................................. — 15
5. Techniques de résolution............................................................... — 15
5.1 Principe de la résolution .................................................................... — 16
5.2 Méthode de Newton-Raphson ........................................................... — 16
5.3 Contrôle en longueur d’arc ................................................................ — 18
5.4 Critères de convergence .................................................................... — 19
5.5 Analyse de la bifurcation ................................................................... — 19
6. Conclusion........................................................................................ — 22
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 6 003

es grands déplacements du solide, accompagnés ou non de grandes défor-


L mations, rendent impossible le calcul des grandeurs mécaniques en se
basant simplement sur la configuration initiale. Il est par conséquent nécessaire
de prendre en compte le changement de géométrie tout au long de l’histoire du
chargement. La difficulté principale réside dans l’impossibilité d’exprimer les
tenseurs de déformation et de contrainte sur la configuration déformée, étant
donné que cette dernière est inconnue. En effet, la configuration déformée est
elle-même la solution recherchée du problème non-linéaire. Pour cette raison,
nous devons considérer le mouvement du solide au cours du chargement, et
non seulement à l’état final.
Le suivi du mouvement du solide peut être effectué à l’aide de la description
lagrangienne, selon deux approches principales :
– la description lagrangienne totale, où la configuration initiale est considérée
comme référence pour les grandeurs mécaniques (i.e. déplacements, déforma-
tions et contraintes) ;
– la description lagrangienne actualisée, où la configuration déformée est
considérée comme référence.
Dans le cadre du calcul par éléments finis, la description lagrangienne, totale
ou actualisée, permet d’exprimer l’équilibre incrémental de la structure, et par
conséquent d’évaluer la matrice de rigidité tangente et les forces nodales pour
chaque élément. La résolution du système d’équilibre à l’échelle de la structure
p。イオエゥッョ@Z@。ッエ@RPQV

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LA MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS – CALCUL NON-LINÉAIRE GÉOMÉTRIQUE ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

est effectuée à l’aide de méthodes incrémentales et itératives, telles que la


méthode de Newton-Raphson et celle de la longueur d’arc. Cette description
incrémentale constitue un outil numérique indispensable pour l’analyse d’une
large gamme de comportements non-linéaires, tels que les grands déplace-
ments, les grandes déformations et l’instabilité des structures. L’implémenta-
tion de ces formulations non-linéaires dans les logiciels de calcul par éléments
finis permet l’analyse de nombreuses applications dans les domaines de la
mécanique des structures et du génie civil.

la configuration déformée, puisque l’état courant de la structure


1. Définition de la non- ne correspond plus à son état initial.
linéarité géométrique Ce phénomène est plutôt observé pour les structures minces, en
particulier les coques minces, les câbles, les structures souples et
gonflables, pendant le formage des métaux et plastiques, et lors
de l’analyse de stabilité.


L’analyse linéaire des structures admet implicitement trois
hypothèses :
– le comportement du matériau est élastique quel que soit le
niveau de déformation ;
1.1 Histoire non-linéaire du chargement
– les déformations sont infinitésimales ;
– la résistance du matériau est infinie. La figure 2 illustre trois types de comportement :
– linéaire ;
Ces hypothèses, qui justifient le calcul linéaire, sont acceptables
– rigidifiant ;
tant que l’effet du chargement reste faible en termes de contrainte,
de déformation et de déplacement. En réalité, la mécanique des – assouplissant.
structures comprend quatre types de non-linéarités qui sont asso-
ciées respectivement au matériau, à la géométrie, aux forces appli-
quées et aux conditions aux limites.
La non-linéarité géométrique s’exprime par une déviation impor-
tante de la configuration déformée de la structure par rapport à sa P
configuration initiale (i.e. configuration non chargée), comme
l’illustrent les schémas de la figure 1. Dans ce cas, les propriétés
physiques et mécaniques de la structure sont sensiblement diffé-
rentes pour les deux configurations (initiale et déformée).
La réponse non-linéaire de la structure est engendrée, d’une part,
par l’évolution notable de la géométrie au cours du chargement et,
d’autre part, par la déformation significative du solide. Il est donc
nécessaire de réécrire le système d’équilibre en tenant compte de Figure 1 – Illustrations de la non-linéarité géométrique

F F Rupture F Point limite


Rupture A

Linéaire Rigidifiant

Rupture

Rigidifiant Assouplissant

u u u
0 0 0

a comportement linéaire b comportement rigidifiant c comportement avec point limite

Figure 2 – Types de réponses structurales

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––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– LA MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS – CALCUL NON-LINÉAIRE GÉOMÉTRIQUE

& La réponse linéaire jusqu’à la rupture (figure 2a) est souvent  Non-linéarité des conditions aux limites de déplacement, où
observée pour les matériaux fragiles, tels que le verre. les déplacements aux appuis dépendent de la déformation de la
structure. C’est le cas des problèmes de contact et des appuis non
& Le comportement rigidifiant (figure 2b) est typiquement observé élastiques.
pour les câbles et les structures gonflables (i.e. pneumatiques).

& Le comportement avec point limite (figure 2c) est observé pour & Trajectoires complexes du déplacement
la majorité des structures ; ce comportement est caractérisé par Un comportement non-linéaire géométrique donne lieu à des tra-
une phase linéaire, suivie d’une phase rigidifiante, qui se poursuit, jectoires complexes du déplacement (figure 3).
avec une diminution de la raideur, jusqu’à l’inversion de la pente
au-delà du point limite.  Le phénomène de claquement (voir Nota) (snap-through en
Dans la phase assouplissante, la charge appliquée diminue, alors anglais) présente une phase instable après un premier point limite,
que le déplacement et la déformation continuent à augmenter. Pour suivie par une nouvelle phase stable après un deuxième point
détecter correctement l’assouplissement, il est donc nécessaire de limite (figure 3a).
contrôler le déplacement de la structure, étant donné que le main- NotaLe terme claquement est utilisé dans la littérature pour désigner ce type d’instabi-
tien de la force ne peut se poursuivre au-delà du point limite, du lité d’une manière générale, alors que le terme cloquage est spécifiquement utilisé lors-
fait de l’instabilité du système. La résolution numérique doit suivre qu’il s’agit de l’instabilité des coques.
cette logique, comme nous le verrons au § 5 de cet article.
 Le claquement en arrière (i.e. snap-back en anglais) correspond
à une instabilité avec une diminution du déplacement lors de la
1.2 Non-linéarité géométrique phase instable (figure 3b).

& Catégories
On notera que l’équilibre entre les deux points limites peut être


D’une façon générale, les non-linéarités géométriques peuvent stable, et donc physiquement réalisable, sous réserve de
être classées en trois catégories. contrôler les déplacements ou la décharge selon la position
du point sur la courbe (la résolution numérique de ce pro-
 Grands déplacements avec déformations infinitésimales. Ce blème est donnée au § 5.3).
cas est souvent rencontré pour les structures minces ou élancées,
les câbles et les membranes gonflables, et pendant le formage des  Le phénomène de bifurcation résulte du fait que plusieurs tra-
métaux, ainsi que pour les différents types d’instabilité. jectoires sont possibles (figure 3c), parmi lesquelles la structure
suit la trajectoire cinématiquement préférentielle (i.e. celle qui pré-
 Grandes déformations, engendrées par de grands déplace-
sente la plus faible énergie). Cette situation est typiquement ren-
ments. Ce cas est souvent rencontré pour les structures souples à
contrée dans les problèmes de flambement.
faible module d’élasticité, tels que les caoutchoucs, les structures
élancées, les câbles et les membranes gonflables, ainsi que pour Il est aussi possible d’observer d’autres courbes de comporte-
les problèmes d’instabilité et pendant le formage des métaux ; ce ment combinant la bifurcation, le point limite et le claquement en
cas est souvent accompagné d’une non-linéarité matérielle (i.e. arrière.
élastoplasticité).
 Non-linéarité des conditions aux limites de chargement, où les
 La phase stable du comportement représente le cas où le
forces appliquées dépendent de la déformation de la structure. Il
contrôle de la charge suffirait pour maintenir la structure en
s’agit typiquement du cas :
position d’équilibre statique stable.
– de la pression hydrostatique appliquée sur des membranes
souples ;  La phase instable du comportement correspond à la situa-
– des efforts aérodynamiques engendrés par le mouvement de la tion où la structure se déplacement dynamiquement sans pou-
structure (vent, vagues, force de trainée, etc.) voir contrôler le mouvement, alors que la charge appliquée est
maintenue constante.
Ce cas est connu sous le nom de « forces suiveuses ».

Cloquage Cloquage en arrière Bifurcation


F F F

Points limites

Points de bifurcation
In

In
st

st
ab

ab
l

Points de le
e

le

retour
ab
st
In

Points limites

0 u 0 u 0 u
a claquement b claquement en arrière c bifurcation

Figure 3 – Réponses non-linéaires géométriques

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LA MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS – CALCUL NON-LINÉAIRE GÉOMÉTRIQUE ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

2. Grande déformation d’un À titre d’information, il existe par ailleurs une formulation corota-
tionnelle qui fait référence au repère cartésien local de l’élément et
milieu continu suit la déformation de l’élément. Cette formulation permet ainsi de
séparer le mouvement de corps rigide de celui associé à la défor-
mation de l’élément.
D’une manière générale, le solide peut être représenté par un milieu
continu composé d’une infinité de points matériels. La configuration & Convention de notations
de référence est celle à laquelle les variables d’état (i.e. déplacement, Pour clarifier les formulations, nous adoptons, dans ce qui suit,
déformation, contrainte, volume, etc.) sont évaluées. Pour pouvoir les notations suivantes :
décrire le mouvement du solide, nous devons définir un temps fictif,
– les notations indicielles Ai et Aij, et matricielles {A} et [A], sont
appelé aussi « pseudo-temps », qui fait simplement référence au stade
utilisées pour désigner les vecteurs et les matrices (ou tenseurs),
de déformation ou à une condition particulière de l’état.
respectivement ;
& Trois considérations fondamentales – l’indice à gauche du symbole indique le temps de référence ;
par exemple, tA indique la variable A évaluée en faisant référence
La formulation du problème non-linéaire est fondée sur trois
au temps t ;
considérations :
– l’exposant à gauche du symbole indique le temps de considéra-
– la description cinématique permettant de décrire le mouvement tion de la grandeur ; par exemple, tA indique la valeur de la
et la déformation du solide ; variable A au temps t (i.e. tA  A (t) en notations habituelles) ;
– les équations d’équilibre permettant de vérifier l’équilibre des – une virgule dans l’indice de droite indique une dérivation par
torseurs d’efforts internes et externes ; rapport à la variable géométrique ; par exemple, Ai,j indique la déri-
– les lois constitutives du matériau, permettant de vérifier le com- vée partielle de la variable Ai par rapport à la coordonnée xj
portement du matériau reliant les contraintes aux déformations. (i.e. Ai,j = ∂Ai / ∂xj) ;
& Deux types de description – la sommation d’Einstein est appliquée (i.e. sommation implicite

T La description cinématique du mouvement nécessite la connais-


sance des positions que les points matériels occupent à chaque ins-
tant. D’une manière générale, deux types de description peuvent
des indices répétés sur tout leur domaine de définition) ; par exem-
ple, AijBkj indique la sommation selon l’indice répété j (appelé
« indice muet ») : A ijBkj ≡ ∑ A ijBkj .
être utilisés : j
– la description lagrangienne, exprimée par les coordonnées & Mouvement du solide
matérielles ; dans cette description, les grandeurs physiques, ou
variables d’état, sont exprimées en fonction du temps et de la À l’état initial t = 0, le solide occupe le volume 0V de surface exté-
configuration de référence ; rieure 0S ; la position d’un point matériel est notée 0xi (figure 4),
– la description eulérienne, exprimée en termes de coordonnées avec i = 1, 2, 3. À l’instant t > 0, ce point matériel se trouve à la
spatiales ; dans cette description, les grandeurs physiques sont position :
données en fonction du temps et de la configuration courante. tx
i = 0 x i + t ui (1)
Alors que les deux descriptions sont envisageables, la descrip-
t
tion lagrangienne est mieux adaptée à la mécanique du solide, avec ui vecteur de déplacement par rapport à la confi-
compte tenu du mouvement limité des points matériels. Cette guration de référence (initiale dans notre cas ;
description est donc celle retenue dans la suite de ce document. i.e. t u i = t0u i ).

Configuration actuelle
(instant t)

t
V
Nouvelle configuration
t
S (instant t + dt)
t
xi
t + dt
Configuration initiale S t + dt
V
(instant 0) ds t Incré
men
t
t
ui dt ui
0 t + dt
V xi
0
S t + dt
ui
0
xi

d0s t
xi
z
0
xi t + dt
xi

Figure 4 – Configurations initiale et courante du solide

C 6 003 – 4 Copyright © - Techniques de l’Ingénieur - Tous droits réservés

YX
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––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– LA MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS – CALCUL NON-LINÉAIRE GÉOMÉTRIQUE

Ce vecteur doit satisfaire la condition initiale : & Tenseur de déformation de Green-Lagrange


0u
i =0 Le tenseur de déformation de Green-Lagrange 0t εij définit la rela-
tion entre la variation des carrés de la distance infinitésimale sépa-
Le volume et la surface à l’instant t sont notés respectivement tV rant deux points matériels voisins (figure 4) :
et tS.
d ts 2 − d 0s 2 = d t x i d t x i − d 0 x j d 0 x j = 2 d 0 x i 0t εij d 0 x j (4)
2.1 Tenseur de déformation
En tenant compte de la relation (2), ce tenseur prend la forme :
Considérons le mouvement de deux points matériels voisins,
dont la position relative au temps initial t = 0 est notée d 0xi. La dis-
tance entre les deux points est obtenue par :
t
0 εij =
1
2
( 0t X ki 0t X kj − δij ) (5)

d 0s = d 0 x i d 0 x i Ce tenseur s’écrit en notations matricielles sous la forme :

Au temps t, la position relative des deux points devient d txi. Le


∂t x
1
(T
⎡⎣ 0t ε ⎤⎦ = ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ − [ I ]
2 )
gradient de la transformation 0t X ij = t0 x i, j = 0 i permet de décrire
∂ xj D’une façon générale, le mouvement peut être décomposé en
la projection de la distance infinitésimale courante sur la configura- translation, en rotation et en déformation, comme l’illustre la
tion initiale ; en notations matricielles, la matrice de transformation figure 5.
s’écrit : ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ , dont les termes sont 0t X ij. Son inverse correspond à Le gradient de la transformation ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ peut s’écrire en fonction
la transformation de la configuration déformée par rapport à la
−1 du tenseur de rotation ⎡⎣ 0tR ⎤⎦ par :


configuration initiale : ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ = ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ .
Le gradient de la transformation peut être exprimé en fonction de ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ = ⎡⎣ 0t R ⎤⎦ ⎡⎣ 0t U ⎤⎦ = ⎡⎣ 0t V ⎤⎦ ⎡⎣ 0t R ⎤⎦
∂ tu
celui du déplacement 0t Uij = 0t ui, j = 0 i par : avec ⎡⎣ 0tU ⎤⎦
et ⎡⎣ 0tV ⎤⎦ tenseurs de déformation pure droit et gauche,
∂ xj
respectivement.

t =
∂txi ∂
=
( 0 xi + tu i ) = δ +
∂ tu i
= δij + 0t Uij (2)
Cette relation nous permet d’exprimer le tenseur de Green-
0 X ij ij Lagrange sous la forme :
∂0 x j ∂0 x j ∂0 x j

⎡⎣ 0t ε ⎤⎦ = ⎡ 0t X ⎤ ⎛⎜ ⎡⎣ t Λ 2 ⎤⎦ − [ I ]⎞⎟ ⎡ 0t X ⎤
1 T
avec dij delta de Kronecker, égal à 1 pour i = j et 0 pour ⎣ ⎦⎝ 2 ⎠⎣ ⎦
i π j.
avec ⎡ 0t X ⎤ matrice des vecteurs propres,
En notations matricielles, cette expression prend la forme : ⎣ ⎦
= [ I ] + ⎡⎣ 0t U ⎤⎦, avec [I] la matrice identité.
⎡⎣ 0t X ⎤⎦ [tL2] matrice dont les diagonales sont les carrés des
valeurs propres de la déformation pure, défi-
En conséquence, l’élément de volume dans la configuration cou- nies par :
rante d tV peut être exprimé en fonction de celui de la configuration
initiale d 0V par la relation :
T
⎡⎣ 0t U ⎤⎦ = ⎡ 0t X ⎤ ⎡⎣ t Λ ⎤⎦ ⎡ 0t X ⎤
(
d tV = det ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ d 0V ) (3) ⎣ ⎦ ⎣ ⎦

avec (
det ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ ) déterminant de la matrice de transformation.
Les mouvements de translation ou de rotation n’engendrent
aucune déformation du solide, il s’agit de mouvements du corps
La conservation de la masse implique que : rigide.
Le tenseur de déformation de Green-Lagrange s’écrit en fonction
∫ t ρ d tV = ∫ 0 ρ d 0V du champ de déplacement par :
tV 0V

avec 0
r et r t
masses volumiques à l’instant 0 et t, respecti-
t
0 εij =
1 t
2 0
(
ui, j + 0t u j,i + 0t uk ,i 0t uk , j ) (6)
vement.
Dans cette relation, la notation suivante est utilisée :
Il en résulte :
∂ tur
t
0ur , s =
( )

det ⎡⎣ 0t X ⎤⎦ = t ∂0 x s
ρ
À titre d’exemple, lorsqu’une barre de longueur 0L et de section Ce tenseur peut ainsi être décomposé en deux parties, linéaire et
0
S subit une variation de volume, la nouvelle section s’exprime par : non-linéaire, comme suit :
t
0 εij = 0t e ij + 0t ηij (7)
( )
0L0S
tS = det  0t X 
( )
tL 1 t
0 e ij = ui,j + 0t u j,i
avec t
termes linéaires,
2 0
Si maintenant l’hypothèse de conservation du volume est admise,
( )
i.e. det  0t X  = 1, cette section prend la forme :
1
et 0t ηij = 0t uk ,i 0t uk , j
2
termes non-linéaires du tenseur de
déformation.
0L0S
tS = tL
L’hypothèse de petite déformation peut être justifiée lorsque les
termes 0t ηij deviennent négligeables par rapport aux termes 0t e ij.

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La méthode des éléments finis –


Calcul non-linéaire matériel
Par Alaa CHATEAUNEUF
Professeur des universités
Polytech Clermont-Ferrand, Institut Pascal, université Clermont Auvergne, France

1. Élasticité non-linéaire ................................................................................. C 6 004 - 2


2. Élastoplasticité uniaxiale ........................................................................... — 3
2.1 Formulation du comportement élastoplastique uniaxial ........................ — 4
2.2 Effet Bauschinger ........................................................................................ — 6
3.
3.1
3.2
Comportement élastoplastique.................................................................
Critère de plasticité .....................................................................................
Critères usuels.............................................................................................



7
8
8

3.3 Critères en variables généralisées............................................................. — 9
3.4 Loi d’écoulement......................................................................................... — 10
3.5 Loi d’écrouissage ........................................................................................ — 11
4. Formulation des matrices élastoplastiques ............................................. — 12
4.1 Matrice de comportement élastoplastique ............................................... — 13
4.2 Formulation de la matrice de rigidité ........................................................ — 13
5. Résolution du système non-linéaire ......................................................... — 15
5.1 Résolution structurale : méthode de Newton-Raphson........................... — 15
5.2 Résolution locale : intégration de l’écoulement plastique ...................... — 16
5.3 Combinaison des non-linéarités géométrique et matérielle ................... — 20
5.4 Procédure de calcul non-linéaire ............................................................... — 20
6. Applications................................................................................................. — 20
6.1 Arc encastré sous charge ponctuelle ........................................................ — 20
6.2 Support en console..................................................................................... — 22
7. Conclusion ................................................................................................... — 24
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. C 6 004

omme la plupart des phénomènes physiques, le comportement des maté-


C riaux est principalement non-linéaire et l’hypothèse de linéarité n’est
qu’un cas particulier qui est tout à fait valable dans un intervalle et à une
échelle d’observation bien définis. Lorsque l’hypothèse de linéarité induit des
déviations significatives par rapport au comportement réel, il devient indispen-
sable de prendre en compte les phénomènes non-linéaires dans la
méthodologie d’analyse.
Dès le XVIIIe siècle, la notion d’irréversibilité du comportement et de capacité
ultime des matériaux a suscité l’intérêt de la communauté scientifique. Au
XIXe siècle, de nombreuses expériences sur le fer ont permis de mettre en évi-
dence le seuil de plasticité, ainsi que sa variabilité en fonction du processus de
fabrication. La théorie de l’élastoplasticité a été mise en place à partir de la deu-
xième moitié du XIXe siècle. Grâce au progrès des méthodes numériques,
notamment la méthode des éléments finis, l’application pratique de cette théorie
sur des structures complexes n’est devenue possible que dans les années 1980.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。ゥ@RPQX

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C 6 004 – 1

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LA MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS – CALCUL NON-LINÉAIRE MATÉRIEL ______________________________________________________________________

D’une manière générale, la non-linéarité matérielle peut être décomposée en


deux catégories principales :
– l’élasticité non-linéaire, qui résulte de la non proportionnalité de la relation
entre les contraintes et les déformations, tout en assurant la réversibilité
lorsque la structure est déchargée ;
– la plasticité, qui traduit la dissipation de l’énergie au cours de la déforma-
tion : l’énergie mécanique est transformée en énergie thermique, conduisant à
l’irréversibilité du comportement du matériau ; ce mécanisme traduit égale-
ment la ductilité du matériau qui permet aux métaux de subir des
allongements significatifs avant de rompre.
Les difficultés de l’analyse par éléments finis du comportement non-linéaire
matériel résultent du fait que la réponse du système structural (i.e. déplacements,
déformations et contraintes) dépend fortement de l’histoire des chargements-
déchargements, ce qui doit être intrinsèquement pris en compte dans la procé-
dure d’analyse, en termes de formulation et de résolution numérique.
Cette procédure ne peut qu’être incrémentale et itérative. Elle doit impérati-
vement satisfaire les trois principes suivants :
– respect de la loi de comportement du matériau, tout au long de l’histoire


du chargement ;
– satisfaction de l’équilibre statique des forces internes et externes ;
– contrôle de la précision de l’approximation locale à l’échelle des points
matériels et globale à l’échelle de la structure.
Dans cet article, les fondements de l’analyse par éléments finis du comporte-
ment non-linéaire matériel sont développés et illustrés sur des applications
simples. Nous nous intéressons essentiellement à l’élastoplasticité dans les maté-
riaux homogènes. L’extension aux cas de l’élasticité non-linéaire et aux matériaux
hétérogènes est directement obtenue en tenant compte de la spécificité de la loi
de comportement au moyen d’une procédure d’homogénéisation à l’échelle
macroscopique.
L’article se termine par la procédure de résolution couplée permettant l’ana-
lyse non-linéaire géométrique et matérielle des structures.

1. Élasticité non-linéaire L’énergie de déformation volumique est donnée par :

(3)
L’élasticité non-linéaire représente le comportement réversible du
matériau lorsque la proportionnalité entre les contraintes et les défor-
mations ne peut plus être respectée ; cette non-linéarité est typique- avec Ks et Gs rigidités correspondant aux invariants de
ment accompagnée de grandes déformations du matériau (figure 1). déformation.
■ Dans le modèle de Cauchy ■ Dans le modèle de Green (matériaux hyper-élastiques)
La loi de comportement non-linéaire s’écrit dans le cas isotrope Les contraintes et les déformations sont obtenues par les déri-
par la relation : vées des potentiels respectifs :

(1) (4)

ou :
conduisant à la relation :
(2) (5)

avec et respectivement les avec :


premiers invariants des
tenseurs de contrainte et
de déformation,

, , La structure macromoléculaire de certains matériaux, comme


les élastomères par exemple, leur permet de subir des déforma-
tions élastiques non-linéaires de grandes amplitudes. Pour ces
et respectivement les 2e et matériaux, dits « hyper-élastiques », le modèle de Mooney-Rivlin
3e invariants des tenseurs décrit le comportement par l’expression :
de déviateurs de contrainte
et de déformation. (6)

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C 6 004 – 2

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_______________________________________________________________________ LA MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS – CALCUL NON-LINÉAIRE MATÉRIEL

nt
n t eme
σ e me σ arg
arg Ch
Ch t
en
m
ge
h ar
D éc
Contrainte

Contrainte

t
en
m
ge
ar
ch

Déformation ε Déformation ε

Figure 1 – Lois de comportement élastique non-linéaire

avec C10 et C01 paramètres du matériau. Lorsque le matériau ne présente pas de limite d’élasticité fy clai-
Dans sa forme incrémentale, la loi de comportement peut s’écrire : rement identifiable sur la courbe de comportement (ce qui est


typiquement le cas des matériaux à haute résistance), il est
(7) conventionnellement admis de prendre pour cette valeur f0,2%,
c’est-à-dire la contrainte correspondant à 0,2 % de déformation
résiduelle (courbe de la figure 2b). Cette contrainte est appelée
« limite d’élasticité conventionnelle à 0,2 % ».
2. Élastoplasticité uniaxiale Si, sur la courbe de comportement, un point a dépassé fy et
qu’ensuite un déchargement est opéré, celui-ci suit un trajet paral-
La non-linéarité de la loi de comportement peut facilement être lèle à la pente initiale. Après le déchargement total, on observe
observée sur un essai de traction simple mené sur des éprou- une déformation permanente εp.
vettes métalliques. Si, maintenant, on recharge à nouveau l’éprouvette, le compor-
À l’échelle macroscopique, deux types de comportement sont tement suit la pente élastique et ensuite rejoint la courbe non-
souvent observés (figure 2) : comportement avec rupture de pente linéaire initiale. Le point d’intersection de la courbe de recharge-
à un certain seuil et comportement continu. ment, avec celle du chargement initial, apparaît comme le nou-
Lorsque le niveau de contrainte σ est en dessous d’un certain veau seuil de plasticité.
seuil σo (i.e. ), la contrainte reste proportionnelle à la défor-
mation ; ce seuil σo est appelée « seuil de proportionnalité ».
Seuil de proportionnalité : niveau de contrainte en dessous
Il existe ensuite un niveau de contrainte, noté fy, au-delà duquel
duquel la contrainte appliquée sur le matériau est proportion-
le comportement n’est plus réversible ; fy est appelée « limite
nelle à la déformation.
d’élasticité ».
Limite d’élasticité : niveau de contrainte en dessous
Pour la plupart des métaux, les niveaux de σo et fy sont suffi-
duquel la déformation est totalement réversible après enlè-
samment proches pour que l’on puisse les confondre. Dans ce
vement de la charge ; pour les matériaux ne présentant pas
cas, le déchargement de l’éprouvette en dessous de fy ramène le
de discontinuité de comportement, la convention de réversi-
comportement à l’origine du repère (i.e. sans engendrer des
bilité est spécifiée à un niveau de déformation résiduelle
déformations résiduelles) ; c’est typiquement le cas de l’acier
inférieure à 0,2 %.
doux illustré sur la courbe de la figure 2a.

fu fu

f0,2 %
Contrainte

fy
σ0
σ0

E
E

ε ε

Déformation Déformation
ε p = 0,2 %
a cas de l’acier doux b cas des matériaux à haute résistance

Figure 2 – Lois de comportement avec et sans rupture de pente

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C 6 004 – 3

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LA MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS – CALCUL NON-LINÉAIRE MATÉRIEL ______________________________________________________________________

σ σ
dε = dε e +dε p dε = dε e +dε p

dε = dε e 2
Contrainte

Contrainte
fy fy

dε = dε e
3
1 1 3

ε ε

0 dε p dε e Déformation 0 dε p dε e Déformation

a cas général b cas du comportement plastique parfait

Figure 3 – Lois de comportement élastoplastique

T 2.1 Formulation du comportement


élastoplastique uniaxial
■ Dans le cas du comportement plastique parfait (diagramme de
la figure 3b)
Le module d’élasticité reste constant jusqu’à l’atteinte de la
L’observation de la courbe de traction (figure 3) met en évi- limite d’élasticité fy, où le matériau ne présente plus aucune
dence trois comportements possibles. résistance à la déformation et où son module tangent est égal à
zéro :
■ Trois formes du comportement uniaxial
• Dans la phase élastique de la courbe, la déformation est (15)
réversible. La déformation totale ε est égale à la déformation
élastique εe.
avec :
En termes d’incréments de charge, ceci s’écrit :
(8)
(16)
• Lorsque la contrainte σ est égale au seuil de plasticité,
l’accroissement de la contrainte dσ conduit à l’augmentation
de la déformation totale dε.
On admet l’hypothèse que cette dernière peut être décomposée
en une partie élastique dεe et une partie plastique dεp : Module d’élasticité (ou module de Young) : coefficient de
proportionnalité entre la déformation et la contrainte lors des
(9) évolutions élastiques de l’état du matériau, soit lors du charge-
ment initial, soit lors du déchargement.
• Si maintenant σ est égale au seuil de plasticité actuel, et que
la charge diminue, on observe une diminution de la déforma- Module tangent : coefficient de proportionnalité entre
tion totale, mais seulement la partie élastique est réversible ; l’accroissement infinitésimal de la déformation et celui de la
il vient alors : contrainte ; ce coefficient correspond à la pente de la tangente
à la courbe de comportement au point considéré.
(10)
Module sécant : rapport entre la contrainte et la déformation
■ Dans toutes ces situations à un point donné de la courbe de chargement ; ce rapport cor-
respond à la pente de la droite reliant un point sur la courbe de
Le module d’élasticité est défini en fonction de la partie élas- comportement à l’origine du repère.
tique de la déformation :

(11)

Le module tangent est défini par la pente de la courbe :

(12) S
P

et le module d’écrouissage par : A B


L
(13)

Il vient :

(14)
Figure 4 – Barre sous chargement axial de traction

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C 6 004 – 4

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_______________________________________________________________________ LA MÉTHODE DES ÉLÉMENTS FINIS – CALCUL NON-LINÉAIRE MATÉRIEL

Exemple 1 – Considérons une barre sous un chargement axial Exemple 2 – Considérons une structure composée de trois barres
de traction, de longueur L et d’aire de section S, encastrée à une bi-articulées à leurs extrémités et supportant une charge P appliquée
extrémité A et soumise à une force P à l’autre extrémité B (figure 4). au nœud A reliant les trois barres (figure 7).
Le déplacement de l’extrémité libre, sous l’effet de cette force, est Les barres 1 et 3 sont inclinées d’un angle α par rapport à la barre
noté q. verticale. La section de la barre 2 est notée S et celle des barres 1 et
Le comportement du matériau est supposé suivre la loi de Ram- 3 est notée ηS.
berg-Osgood qui est définie par l’expression (figure 5) : Compte tenu des articulations, les barres sont seulement soumises
à un effort normal. Le matériau a une limite d’élasticité fy et un
module d’élasticité E.
La loi de comportement est du type « élastique parfaitement plas-
avec ε déformation axiale, tique » (i.e. le module tangent devient nul lorsque la limite d’élasticité
σ contrainte normale, est atteinte).
E module d’élasticité du matériau, La résolution du système d’équilibre conduit au résultat suivant :
et K et n paramètres du modèle de comportement.

En introduisant , avec fy la contrainte de référence du


avec vA déplacement vertical.
matériau (souvent prise égale à la contrainte à 0,2 % de déformation
La rigidité du système est donnée par :
résiduelle, i.e. f0,2%), cette loi de comportement prend la forme :

Le module tangent est alors obtenu en dérivant l’expression précé- Les forces normales dans les trois barres, FAB, FAD et FAC, sont T
dente, soit : données par :

Dans un premier temps, nous nous intéressons à la détermination


Pour un matériau élastoplastique habituel , ce module tangent de la charge P1 correspondant à la première plastification (i.e. lorsque
est toujours plus faible que le module sécant obtenu par la relation : la contrainte fy est atteinte dans la barre la plus chargée, AC).

Au point de plastification de la barre AC, les efforts dans les barres


Pour une barre en traction de longueur L et de section S, le dépla- correspondent aux expressions suivantes :
cement du nœud B sous l’application de la charge P est égal à :

Dans la phase post-élastique, la rigidité de la barre AC est nulle et


Cette valeur est à comparer au déplacement supposé purement la rigidité tangente est alors :
élastique :

Le comportement suit alors la relation :


Après le déchargement complet, la barre garde une déformation
résiduelle de

avec ΔP et ΔvA respectivement incréments de la charge et du


La figure 6 représente le comportement de la barre pour les don- déplacement vertical en A, mesurés à partir du
nées numériques suivantes : L = 1 m, S = 25 cm2 (i.e. section carrée point de plastification.
de 5 cm de côté), E = 200 GPa, fy = 460 MPa (i.e. acier S460), Les incréments des efforts normaux sont :
α = 0,002 et n = 5.
La limite d’élasticité est atteinte pour un effort de traction de 1,15 MN.
Si la force continue à croître au-delà de cette valeur, la déformation
plastique augmente de plus en plus rapidement. La charge ultime est atteinte lorsque la contrainte dans les deux
À titre d’exemple, pour une force de 3,5 MN, les déplacements élas- barres restantes atteint la limite d’élasticité du matériau, c’est-à-dire :
tique et plastique sont respectivement de 7 mm et 3,7 mm (i.e. l’allonge-
ment total est de 10,7 mm) ; autrement dit, la déformation élastique est
de 0,7 %, tandis que la déformation totale atteint 1,07 %.
À ce niveau de chargement, le module sécant est égal à 131,4 GPa Il vient :
et le module tangent n’est plus que de 48,4 GPa, soit 24,2 % du
module d’élasticité.

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C 6 004 – 5

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Méthodes simplifiées pour le calcul


non-linéaire de structures de génie
civil
par Panagiotis KOTRONIS
Professeur – École Centrale de Nantes, Laboratoire GEM

et Stéphane GRANGE
Maı̂tre de conférences – Université Grenoble-Alpes, Laboratoire 3SR

1. Le béton armé équivalent.............................................................. C 6 002 – 2


1.1 Introduction ........................................................................................ — 2
1.2 Concept ............................................................................................... — 2
2.
2.1
2.2
Poutre multifibre.............................................................................
Introduction ........................................................................................
Concept ...............................................................................................



4
4
4

3. Modèles globaux ............................................................................. — 6
3.1 Introduction ........................................................................................ — 6
3.2 Concept ............................................................................................... — 6
4. Macro-élément d’interactions sol/structure .............................. — 7
4.1 Introduction ........................................................................................ — 7
4.2 Concept – Recommandations de l’EC8-5 ........................................... — 7
4.2.1 Définition du domaine linéaire ............................................... — 8
4.2.2 Domaine de plasticité non-linéaire non-réversible ................ — 10
5. Cas d’études..................................................................................... — 11
5.1 Modélisation des poteaux en béton armé......................................... — 11
5.1.1 Description des tests ............................................................... — 11
5.1.2 Résultats numériques au moyen des poutres multifibres ..... — 12
5.2 Modélisation d’un voile en béton armé ............................................ — 12
5.2.1 Description des tests ............................................................... — 12
5.2.2 Résultats numériques au moyen de la technique ERC .......... — 13
5.2.3 Résultats numériques au moyen du modèle GLRC_HEGIS ... — 14
5.3 Modélisation des interactions sol/structure d’un viaduc en béton
armé .................................................................................................... — 15
5.3.1 Description des tests ............................................................... — 15
5.3.2 Résultats numériques au moyen du macro-élément
et des éléments poutres multifibres ....................................... — 15
6. Conclusion........................................................................................ — 17
7. Glossaire ........................................................................................... — 17
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 6 002

’ingénierie dispose de réglementations qui permettent de traiter les structu-


L res de génie civil ordinaires. Cependant, pour les structures irrégulières et/
ou nécessitant une connaissance précise de leur fonctionnement (zones criti-
ques locales, spectres de plancher, marges de sécurité…), l’accès aux calculs
non linéaires devient une nécessité.
L’analyse non linéaire des structures nécessite de relever plusieurs défis
comme : l’analyse de la structure et de ses interactions avec le sol, l’analyse
du comportement du matériau, mais aussi du caractère éventuellement aléa-
toire stochastique de l’action de chargement et des propriétés des matériaux.
p。イオエゥッョ@Z@。ッエ@RPQV

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MÉTHODES SIMPLIFIÉES POUR LE CALCUL NON-LINÉAIRE DE STRUCTURES DE GÉNIE CIVIL ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Dans le but d’intégrer les incertitudes à tous les niveaux et d’aider à la décision
lorsque la structure est soumise à des chargements sévères, des phénomènes
complexes sont à étudier, et un nombre de calcul élevé est à réaliser.
L’ingénierie doit donc disposer de modèles rapides, efficaces et robustes per-
mettant de reproduire les phénomènes complexes tout en réduisant les
incertitudes.
L’analyse des structures en dynamique non linéaire, basée uniquement sur
des modèles éléments finis détaillés, requiert des ressources informatiques
importantes et des techniques de résolutions délicates et lourdes. La nécessité
de réaliser des études paramétriques impose néanmoins d’utiliser des techni-
ques simplifiées, le plus souvent basées sur des formulations multi-échelles,
qui permettent de réduire les coûts de calculs. Du sol à la structure, des straté-
gies de modélisation simplifiées ont été développées ces dernières années.
Elles permettent, avec un nombre limité de paramètres d’entrée, géométriques
ou pouvant être déterminés grâce à des expériences simples (sur les matériaux
par exemple), de modéliser de manière fine, robuste et rapide les phénomènes
pilotant le comportement d’une structure en béton armé.
Afin de couvrir un éventail assez large de techniques et d’applications simpli-
fiées, les familles suivantes de modèles seront développées :

T – le modèle de béton armé équivalent (Equivalent Reinforced Concrete model


– ERC), qui permet de reproduire le comportement global (force/déplacement)
d’un voile en béton armé ;
– la poutre multifibre Timoshenko, capable de simuler le comportement de
poutres ou de voiles en béton armé dont les sections sont sollicitées par un
torseur des efforts internes (moment, effort tranchant, effort normal et tor-
sion) ;
– des modèles globaux, basés sur la théorie d’homogénéisation, qui donnent
accès à l’endommagement et/ou à la fissuration des voiles en béton armé ;
– le macro-élément qui, couplé aux poutres multifibres, est capable de repro-
duire les phénomènes d’interactions sol-structure et les effets sur la structure.
Ces modèles simplifiés ont des cinématiques imposées qui restreignent
l’espace d’utilisation des lois de comportement. Ainsi, des lois unidirectionnel-
les non-linéaires sont, par exemple, souvent utilisées dans le cas des poutres
multifibres pour représenter le béton et l’acier. Le grand avantage de ces outils
réside dans la simplicité de calibrer les paramètres matériaux et de décrire les
phénomènes non-linéaires (ouverture et refermeture des fissures, développe-
ment de déformations permanentes, prise en compte des effets de vitesse, de
l’amortissement hystérétique dans le béton, etc.).
Tous les modèles ci-dessus peuvent être introduits dans n’importe quel code
élément finis et peuvent faciliter le dimensionnement, la mise en œuvre et le
post-traitement de calcul numérique.

Ce modèle permet de simplifier significativement la modélisation


1. Le béton armé équivalent d’un voile en béton armé par l’utilisation de lois de comportement
unidirectionnelles.

1.1 Introduction 1.2 Concept


Un modèle basé sur la théorie des poutres (Bernoulli ou Timo- Le modèle utilise un maillage de barres et est inspiré des métho-
shenko) est inefficace pour reproduire les déformations de cisaillement des de treillis (Framework Method) développées dans [17] et des
et les contraintes dans les structures très faiblement élancées [33]. treillis de Ritter-Mörsch ([50] [51]). L’idée de base consiste à adapter
Une alternative simplifiée pour représenter le comportement des et à étendre la Framework Method dans un contexte non-linéaire et
voiles en béton armé est l’utilisation de la technique du béton armé pour des matériaux à comportement plastique (acier) et endomma-
équivalent (Equivalent Reinforced Concrete – ERC) ([20] [25] [33]). geable (béton).

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––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– MÉTHODES SIMPLIFIÉES POUR LE CALCUL NON-LINÉAIRE DE STRUCTURES DE GÉNIE CIVIL

Les principales hypothèses adoptées sont énumérées dans la  Point 4


figure 1. Les sections (Ah, Av et Ad) des barres simulant le comportement
 Point 1 du béton peuvent être calculées en utilisant la relation (1) et selon
le schéma de la figure 1.
Un volume élémentaire de béton armé peut être décomposé en
un élément de béton et un élément d’acier ⎧
⎪A = 3 3k − 1 αt
2
 Point 2 ⎪ v 8 k
Béton et acier sont modélisés séparément au moyen de 2 treillis ⎪⎪
distincts et superposés
3
8
(
⎨A h = 3 − k αt
2
) (1)

 Point 3 ⎪
⎪A = 3 1 + k (
2 3/2
αt
)
Le treillis simulant l’acier est composé de barres horizontales de ⎪⎩ d 16 k
section Sh et verticales de section Sv. La valeur de ces sections et la
position coı̈ncident avec les valeurs réelles dans le voile

SV
Acier

C SH
Béton

VE

Volume élémentaire (VE) Modèle équivalent Béton Acier

Acier Béton

θ θ

Milieu continu Modèle de treillis équivalent Modèles macroscopiques

a principe

Ah

Ad

AV

α θ


b définition des sections et position des barres de béton

Figure 1 – Principe, sections et positions des barres dans le modèle de béton armé équivalent

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MÉTHODES SIMPLIFIÉES POUR LE CALCUL NON-LINÉAIRE DE STRUCTURES DE GÉNIE CIVIL ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

 Point 5 De nombreux modèles poutres basés sur la cinématique de


L’hypothèse d’adhérence parfaite est adoptée (entre le béton et Timoshenko ont été développés ces dernières années. Nous pré-
l’acier). senterons ici le concept de manière générale.
Néanmoins, pour approfondir, le lecteur intéressé pourra se
Le point 3 indique que les barres d’aciers ont une position qui
reporter aux travaux de [20], [21], [23], [24], [34]. Le nouvel élément
coı̈ncide avec la position réelle dans le voile. Ceci implique que les
présenté dans [3] possède des fonctions d’interpolation permettant
treillis de béton et d’aciers ne coı̈ncident pas géométriquement, ce
d’obtenir les déplacements exacts aux extrémités d’un seul élé-
qui peut conduire à des difficultés pour la réalisation du maillage.
ment fini en élasticité linéaire pour n’importe type de chargement.
Pour simplifier le maillage, une distribution proportionnelle des
sections d’aciers correspondant à une surface de voile donnée Pour des éléments poutres formulées en forces, le lecteur peut se
peut être utilisée (voir figure 16). Plus d’informations et de cas référer aux travaux de l’équipe de UC Berkeley [29].
d’études peuvent être trouvés dans [20] [25] [33]. Par ailleurs, on montre que la prise en compte des déformations de
Quand le champ de contrainte est relativement homogène, le cisaillement à l’échelle de la section est un point crucial pour espérer
nombre d’éléments simulant le béton et l’acier n’a pas de grande améliorer la modélisation des éléments structuraux en béton armé
influence [20]. Ainsi, un modèle macroscopique peut aussi être uti- peu élancés ou soumis à des forces de torsion [4], [29] et [34].
lisé à la place du réseau dense de barres équivalents (« Equivalent
lattice » (modèle de treillis équivalent), voir également la figure 1).
2.2 Concept
Remarques
L’élément poutre multifibre peut être vu comme un élément
 Le motif de treillis adopté pour le béton est basé sur un cri- multi-échelle à 3 niveaux (élément, section, matériau).
tère d’égalité en énergie de ce treillis par rapport à un voile Un élément poutre [55] est généralement constitué de 2 nœuds
homogène élastique (en d’autres termes, ce modèle donne la (1 et 2) aux extrémités et d’une ligne moyenne. Sur cette ligne
solution exacte pour un voile homogène continu élastique) [17]. moyenne est définie la section (en général de caractéristiques cons-

T  Le motif de treillis proposé ici est valide pour un coeffi-


cient de Poisson v = 1/3, mais reste acceptable dans la plupart
tantes le long de l’élément). À partir des déplacements connus aux
nœuds u1 et u2 (fournis par le solveur éléments finis [56]), on peut
définir le vecteur des déplacements nodaux :
des cas. C’est aussi le maillage le plus simple, permettant ainsi
de réduire le temps de calcul. Des motifs de treillis plus com- U = t [u1 u2 ] = t [u1 v 1 θ1, u2 v 2 θ2 ] (2)
pliqués peuvent être adoptés en fonction de la valeur du coef-
ficient de Poisson ou indépendant de celui-ci [17].
Les déplacements U s ( x ) de la section en x sont déterminés au
 Le choix du paramètre q est crucial pour obtenir de bons moyen de fonctions d’interpolations N tels que U s ( x ) = N ( x )U .
résultats dans le domaine non linéaire. Cet angle représente
Grâce à une hypothèse cinématique d’Euler Bernoulli (la section
l’orientation des barres obliques avec les barres horizontales.
reste plane et perpendiculaire à l’axe moyen) ou de Timoshenko
Il est donc lié au paramètre k (ratio entre la longueur et la hau-
(la section reste plane), le déplacement de la section est considéré
teur de la maille). Le calcul de cet angle dépend du ratio
comme un mouvement de corps rigide. Ainsi, la cinématique de la
d’armatures entre les directions horizontales et verticales, le
section peut être paramétrée au moyen de 3 paramètres (pour une
chargement (contraintes normales verticales et contraintes de
poutre définie dans le plan) appelées les « déformations générali-
cisaillement), et les conditions aux limites. En réalité, il est lié
sées » e (x) :
à la direction des fissures dans la structure (les barres repro-
duisent le treillis de Ritter-Mörsch). Le calibrage de cet angle ⎡∈ ( x ) ⎤
peut s’opérer au moyen d’un calcul élastique pour définir les ⎢ ⎥
orientations principales des contraintes à l’initiation de la fissu- e ( x ) = ⎢ β ( x ) ⎥ = B ( x )U (3)
⎢χ x ⎥
⎣ ( )⎦
ration. Cette technique permet souvent de donner de bons
résultats. Toutefois, la sensibilité de ce paramètre augmente
pour les voiles faiblement armés où la question de la définition avec B (x ) matrice des dérivées de fonction de forme,
de cet angle reste encore ouverte (voir [25]).
2 (x) déformation selon x de la ligne moyenne,
b(x) angle de distorsion (nul dans le cas de l’hypo-
thèse d’Euler Bernoulli),
2. Poutre multifibre c(x) courbure.

Les expressions de N et B sont rappelées ci-après pour la théorie


2.1 Introduction d’Euler Bernoulli (avec la fonction de transformation géométrique
2x
Dans le but de modéliser des éléments de structures élancés (ciné- ξ= − 1) et les fonctions d’interpolations suivantes.
matique Euler-Bernoulli ou Timoshenko) ou peu élancés (cinéma- l
tique Timoshenko), et afin de caractériser la vulnérabilité des structu- ⎧ 1− ξ
res en béton armé de manière efficace, des outils numériques de ⎪ Ni ( x ) =
2
type « poutre » peuvent être utilisés. Ces outils sont basés sur la ⎪ 1+ ξ
Résistance des matériaux (RdM) en faisant des hypothèses sur la ⎪ N j (x ) =
⎪ 2
cinématique permettant d’utiliser des lois de comportements généra-
lement 1D ou, éventuellement, 1D avec prise en compte de l’effet du ⎪H ( x ) = 1 (1 − ξ)2 (2 + ξ)
⎪ 1
4
cisaillement (pour les modèles poutres de cinématique Timoshenko). ⎨ (4)
En vue de calculs dynamiques non linéaires, l’analyse par élé-
L
( )
⎪ H2 ( x ) = 1 − ξ2 (1 − ξ)
⎪ 8
ments finis de type « poutre » présente un bon compromis entre ⎪H ( x ) = 1 (1 + ξ)2 (2 − ξ)
temps de calcul et précision des résultats. Il possède également ⎪ 3 4

une certaine ergonomie pour le modélisateur, autant en préparation
du modèle, que dans la phase de post-traitement où des informa- (
L 2
)
⎪ H 4 ( x ) = ξ − 1 (1 + ξ)
⎩ 8
tions sur le comportement local de l’élément peuvent être extraites.

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Apports des lois constitutives non-


linéaires en génie civil
Problématiques et enjeux
par Cédric GIRY
Maı̂tre de conférences
LMT-Cachan, ENS Cachan, CNRS, Université Paris Saclay

et Benjamin RICHARD
Ingénieur/chercheur
CEA, DEN, DANS, DM2S, SEMT, Laboratoire d’études de mécanique sismique (Gif-sur-
Yvette, France)


1. Lois de comportement non-linéaires : principes
fondamentaux et exemples ........................................................... C 6 001 – 2
1.1 Hypothèses et cadre de formulation ................................................. — 2
1.2 Loi élastoplastique : cas des aciers ................................................... — 4
1.3 Loi de comportement endommageable : cas du béton .................... — 7
2. Apports de la modélisation non-linéaire en génie civil : cas
d’un bâtiment à risque spécial ..................................................... — 10
2.1 Contexte ............................................................................................. — 10
2.2 Présentation de la structure ............................................................... — 11
2.3 Modélisation ....................................................................................... — 12
2.4 Résultats ............................................................................................. — 12
2.5 Apports liés à l’utilisation de lois constitutives non-linéaires.......... — 13
3. Écueils à éviter lors de l’utilisation de lois
de comportement non-linéaires ................................................... — 14
3.1 Principe de résolution ........................................................................ — 14
3.2 Effets de maillage ............................................................................... — 19
4. Conclusion........................................................................................ — 22
5. Glossaire ........................................................................................... — 23
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. C 6 001

e génie civil est certainement l’un des domaines où les progrès peuvent être
L constatés par la majorité de la population. En effet, des structures de plus
en plus complexes sont imaginées et érigées pour reprendre des efforts de
manière de plus en plus complexe afin d’allier durabilité, aptitude au service
et sécurité structurale. Autrement dit, c’est bel et bien la recherche d’une cer-
taine performance structurale qui est visée de nos jours. Que ce soit à des fins
d’habitation, de production agricole, d’utilité publique ou encore industrielles,
le dimensionnement de telles structures reste fondé sur l’application de métho-
des linéaires, entraı̂nant ainsi un conservatisme important. La présence de mar-
ges de sécurité est indéniable et est entièrement justifiée.
Toutefois, démontrer que les ouvrages existants respectent les exigences de
sécurité toujours plus fortes nécessite une évaluation structurale. La quantifica-
tion des marges de sécurité devient alors une question clef à laquelle des élé-
ments de réponse doivent être apportés. Pour cela, l’hypothèse de linéarité du
comportement des matériaux constitutifs n’est plus justifiable, et ces derniers
doivent être représentés plus fidèlement.
L’objectif principal de cet article est de donner un aperçu des principaux
apports et difficultés rencontrées lors de l’utilisation de lois de comportement
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥャャ・エ@RPQV

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APPORTS DES LOIS CONSTITUTIVES NON-LINÉAIRES EN GÉNIE CIVIL –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

non-linéaires pour représenter la dégradation des matériaux. Pour atteindre cet


objectif, l’exposé sera présenté en trois parties.
En premier lieu, un aperçu des principaux phénomènes non-linéaires exhibés
par le béton et l’acier est donné. L’identification de ces phénomènes permettra
de comprendre les principales hypothèses de formulation de lois de comporte-
ment classiquement utilisées pour représenter ces matériaux. Seules les clefs
principales permettant de comprendre les cadres de formulation des lois non-
linéaires sont présentées.
En second lieu, quelques apports de l’utilisation des lois non-linéaires sont
exposés à travers plusieurs exemples d’éléments de structure ou de structures
tirés du domaine du nucléaire. Le cas d’une structure à murs porteurs est dis-
cuté afin d’illustrer les apports des lois de comportement non-linéaires pour
quantifier les marges de sismiques.
En dernier lieu, sont présentés quelques écueils à éviter lors de l’utilisation de
lois de comportement non-linéaires en calcul de structures. Pour cela, plusieurs
exemples sont traités et mettent clairement en évidence les difficultés auxquel-
les l’ingénieur est confronté. Des recommandations pour les résoudre sont éga-
lement proposées.


1. Lois de comportement non- & La seconde hypothèse classiquement faite consiste à supposer
que chaque VER composant la structure étudiée se comporte de
linéaires : principes manière indépendante. Il s’agit de l’hypothèse de localité. Autre-
ment dit, l’état d’un VER donné situé en un point donné de la struc-
fondamentaux et exemples ture n’est pas fonction des états des VER voisins. Le comportement
d’une structure sera donc déduit des comportements élémentaires
de l’ensemble des VER qui la composent.
1.1 Hypothèses et cadre de formulation 1.1.2 Potentiel thermodynamique et dissipation
1.1.1 Continuité et localité Formuler une loi de comportement revient à établir une relation
entre les « efforts internes », qui sollicitent un VER de matériau, et
La problématique de la description du comportement mécanique
les grandeurs caractéristiques de sa cinématique. Un VER étant en
des matériaux qui a débuté au milieu de XXe siècle a connu une
quelque sorte une cellule de base de matériau, ces différentes gran-
véritable expansion dans le monde de la recherche et de l’industrie
deurs sont exprimées par unité de surface ou de longueur. Ainsi,
avec le développement des méthodes de calcul telle que la célèbre
méthode des éléments finis. une loi de comportement relie les efforts internes par unité de sur-
face, encore appelée « contraintes », à des déplacements par unité
& L’hypothèse fondamentale, faite lors de la formulation d’une loi de longueur, encore appelé « déformations ».
de comportement non-linéaire, consiste à supposer que le matériau La construction de la loi de comportement peut être réalisée par
dont on souhaite décrire le comportement est continu et qu’il le deux approches :
reste après avoir subi un chargement extérieur. Ce postulat a été
introduit essentiellement pour des raisons mathématiques afin de – une approche empirique fondée essentiellement sur des résul-
garantir l’existence de certaines quantités comme des dérivées de tats d’essais ;
fonction. Nous reviendrons sur ce point un peu plus loin dans – une approche phénoménologique fondée sur l’identification
l’exposé. Cette hypothèse pose la question de la validité des lois des mécanismes de dégradation locaux qui entraı̂nent l’apparition
non-linéaires pour des matériaux fortement hétérogènes. des non-linéarités.

Par exemple, le béton est un assemblage de ciment, d’eau, de Dans cet article, seule la seconde approche sera abordée étant
sable et de granulats. Les dimensions caractéristiques de ses diffé- donné qu’elle reste très utilisée de nos jours. L’idée fondamentale
rents constituants étant très différentes, le béton est donc un maté- consiste à adopter une vision énergétique du comportement. Un
riau hétérogène. VER est supposé pouvoir emmagasiner une certaine quantité
d’énergie dite « élastique ». Si le VER se comporte de manière
entièrement élastique, la totalité de l’énergie élastique emmagasi-
Afin de respecter l’hypothèse de continuité mentionnée précé-
demment, la notion de volume élémentaire représentatif (VER) a née est restituée lors d’un cycle de charge/décharge. Le comporte-
été introduite. ment du VER est alors qualifié de « réversible ».
Lors de l’apparition de non-linéarités, la quantité d’énergie élas-
tique restituée est progressivement diminuée. Autrement dit, le
Un VER peut être défini comme le volume de matériau le plus VER peut de moins en moins emmagasiner de l’énergie élastique.
petit, mais dont les dimensions caractéristiques restent supé- Une partie de l’énergie élastique est donc dissipée au cours du
rieures à celles des constituants du matériau afin que l’hypo- chargement, souvent sous la forme de chaleur ou encore de frotte-
thèse de continuité soit respectée. ments internes.

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Bien que paraissant peut être un peu abstraite, la vision énergé- En supposant que la contrainte est reliée à la déformation par
tique du comportement s’est montrée particulièrement adaptée à la l’intermédiaire du potentiel thermodynamique par la relation
formulation de lois de comportement complexes, prenant en suivante :
compte une grande variété de mécanismes de dégradation. Ce
cadre de formulation offre souplesse et rigueur et permet ainsi de ∂ρΨ
σ= (4)
traiter un grand nombre de cas de matériaux. ∂ε
De manière plus précise, cette méthode de construction d’une loi la condition de positivité de la dissipation devient :
de comportement consiste tout d’abord à identifier les différents
mécanismes entraı̂nant une dissipation d’énergie. Ces mécanismes ∂ρΨ
dépendent clairement du matériau étudié. φ=− αɺ k ≥ 0 (5)
∂αk
À titre d’exemple, on s’intéressera au mouvement des disloca-
tions dans le cas des aciers, ou encore au développement de la fis- De manière analogue à la relation (4), qui définit la contrainte
suration dans le cas des matériaux quasi-fragiles comme le béton. comme étant la variable associée à la déformation, on introduit
les variables associées aux variables internes ak de la manière
suivante :
Chaque mécanisme dissipatif est représenté par une unique
variable, appelée « variable interne », pouvant avoir une nature ∂ρΨ
mathématique plus ou moins complexe en fonction du phénomène Ak = − (6)
∂αk
que l’on souhaite décrire. Ces variables sont ensuite rassemblées
dans une expression commune, appelée « potentiel thermodyna-
avec Ak forces thermodynamiques.
mique » qui n’est autre que l’énergie élastique pouvant être emma-
gasinée par un VER de matériau.
Les relations (4) (5) et (6) sont appelées lois d’état et permettent
Ainsi, le potentiel thermodynamique peut être exprimé classi- de définir entièrement la partie élastique de la loi de


quement comme suit : comportement.
ρΨ = f ( ε, αk ) (1)
1.1.4 Surface seuil et lois d’évolution
avec r masse volumique du matériau, Les variables internes ak auront pour rôle de représenter les non-
Y potentiel thermodynamique, linéarités. Quand et comment évoluent ces variables internes sont
deux questions qui restent à être traitées. Répondre à ces questions
e déformation, dans le respect de l’inégalité de Clausius-Duhem-Truesdell permet-
ak variable interne associée au mécanisme dissi- tra de compléter le cadre de formulation d’une loi de comporte-
patif k, ment. Pour cela, il convient d’introduire des équations complémen-
taires. Elles sont de deux types :
f fonction devant exhiber des propriétés de
régularité suffisantes, être convexe et positive. – les surfaces seuils, qui visent à définir les conditions d’évolu-
tion d’une variable interne (c’est-à-dire répondre à la question
Pour un matériau donné, la définition de la fonction f n’est pas quand évolue une variable interne) ;
unique et dépend du nombre et de la complexité des phénomènes – les lois d’évolution, qui permettent de définir les variations
que l’on souhaite intégrer à la loi de comportement. Il peut être d’une variable interne lorsque celle-ci est activée (c’est-à-dire
montré que l’énergie dissipée peut s’exprimer, en l’absence de répondre à la question comment évolue une variable interne).
variations de température, comme suit :
& Surface seuil
φ = σεɺ − ρΨɺ (2) Une surface seuil est une fonction dont le signe renseigne sur
l’activation ou non d’une variable interne. Elle permet de définir le
avec f énergie dissipée, domaine d’élasticité du matériau dont on souhaite modéliser le
s contrainte comportement. Par convention, si la surface seuil associée à une
variable interne donnée est négative, alors cette dernière ne sera
Aɺ variation (ou encore la dérivée) par rapport au pas activée et, par conséquent, elle n’évoluera pas. En revanche, si
temps de la quantité A. l’équation de la surface seuil est vérifiée (c’est-à-dire f (s, s e) = 0),
alors la variable interne sera activée et donc, elle évoluera.
En combinant les relations (1) et (2), et après quelques dévelop-
pements analytiques, on aboutit à l’expression suivante : À titre d’exemple, une surface seuil classiquement utilisée pour
des lois décrivant le comportement des aciers s’exprime comme
⎛ ∂ρΨ ⎞ ∂ρΨ suit :
φ = ⎜σ − ⎟ εɺ − αɺ k (3)
⎝ ∂ε ⎠ ∂αk
f (σ , σ e ) = σ − σ e ≤ 0 (7)
1.1.3 Lois d’état
avec f surface seuil,
Les deux grands principes de la thermodynamique (conservation
de l’énergie totale et augmentation de l’entropie) conduisent à une s contrainte,
condition portant sur l’énergie dissipée f. Cette dernière est connue se seuil initial souvent assimilé à la contrainte
sous le nom d’inégalité de Clausius-Duhem-Truesdell. Elle traduit le d’élasticité.
fait que l’énergie dissipée ne peut être négative, ce qui revient à
dire qu’il ne peut y avoir de production d’énergie élastique dans On notera que, si f (s, s e) < 0, alors σ < σe et, donc, l’acier consi-
un VER. déré reste élastique. En revanche, si f (s, s e) = 0, alors σ = σe et,
donc, des déformations plastiques apparaı̂tront.
Cette condition est fondamentale et permet de distinguer des
lois de comportement admissibles et non admissibles au sens
Dans un cas tridimensionnel, une formulation quasi-identique
de la thermodynamique. Ne pas respecter cette condition
peut être obtenue à partir des invariants des contraintes. Ce point
revient à violer les grands principes de la physique.
sera commenté plus loin dans l’exposé.

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& Lois d’évolution


σ (en daN/mm2)
La nécessité de recourir à une loi d’évolution apparaı̂t lorsque la
surface seuil est positive et que la variable interne considérée doit
évoluer. Il existe a priori une multitude de lois d’évolution qui peu- Zone Zone Zone
élastique plastique d’écrouissage
vent s’appliquer. Cependant, il est d’usage de considérer la loi
d’évolution qui entraı̂nera une dissipation maximale : c’est le prin- B
cipe du maximum de la dissipation. σR

En se plaçant dans le cas où la loi de comportement est indépen-


C
dante de la vitesse de chargement, la loi d’évolution qui entraı̂ne
une dissipation maximale s’exprime de manière générique A M A'
comme suit : σe

∂f
αɺ k = λɺ (8)
∂A k

avec λɺ multiplicateur plastique associé à la variable


interne ak. ΔL
A% =
σ L
0
En supposant le multiplicateur plastique connu, la loi d’évolution
devient alors entièrement déterminée. On notera donc qu’une loi
d’évolution traduit une relation linéaire entre les variations de la Figure 1 – Essai de traction simple sur une éprouvette d’acier
variable interne ak et le gradient à la surface seuil. Toutefois, cette
formulation ne convient pas pour décrire l’ensemble des phénomè- éprouvette d’acier est représentée de manière schématique sur la


nes possibles. En effet, certains matériaux, lorsqu’ils sont sollicités figure 1, dans le plan force/allongement. On peut distinguer trois
en compressions, peuvent voir leur volume augmenter : c’est le phases de comportement.
phénomène de dilatance classiquement rencontré dans le cas du
& Phase 1 du comportement
béton ou encore des sols. Dans ce cas, la surface seuil est rempla-
cée dans la loi d’évolution par un potentiel de substitution, appelé Lors de la première phase du comportement, la force et l’allonge-
« pseudo-potentiel de dissipation ». ment sont proportionnels. L’acier fonctionne à l’identique d’un res-
sort ; il reste dans son domaine d’élasticité. Si l’on réalise un cycle
En reprenant l’exemple précédent et en considérant le cas particu- de charge/décharge, l’acier retrouvera son état initial. Pour expli-
lier de la surface seuil exprimée par l’équation (7), la loi d’évolution quer cette réponse, il faut regarder l’acier à l’échelle microscopique.
s’exprime comme suit : En effet, sa structure polycristalline peut être assimilée à un assem-
blage ordonné d’atomes reliés entre eux par des ressorts. Si
σ
εɺp = λɺ (9) l’assemblage est chargé, alors les ressorts vont s’allonger et, s’il
σ est déchargé, alors les ressorts vont revenir dans leur position ini-
tiale. Autrement dit, les atomes de l’assemblage se déplacent légè-
avec ep déformation plastique. rement autour de leur position initiale.
& Phase 2 du comportement
La détermination du multiplicateur plastique repose sur les La deuxième phase du comportement est non-linéaire et est
conditions dites de « cohérence ». Ces dernières découlent de appelée « phase de plastification ». La contrainte a dépassé la limite
l’application du principe du maximum de la dissipation et s’expri- d’élasticité ; l’acier travaille dans son domaine plastique. Si l’on
ment comme suit : réalise une charge au-delà de la limite d’élasticité, suivie d’une
décharge jusqu’à une force nulle, on observera l’apparition d’une
fɺ = f = 0 et λɺ > 0 (10) déformation résiduelle, appelée déformation plastique. Ce phéno-
mène s’explique également en observant l’acier à l’échelle micros-
Ces conditions permettent le calcul du multiplicateur plastique copique. Bien que sa structure soit ordonnée, il existe des défauts.
et, par conséquent, fournissent les dernières équations nécessaires Les défauts les plus répandus sont les dislocations. Ce sont des
à la formulation d’une loi de comportement. défauts d’alignement des atomes qui créent des zones singulières,
Dans la suite de cet article, le cadre de formulation présenté dans ne respectant plus l’ordre de la structure. Le phénomène de plasti-
ce paragraphe est particularisé à différents cas de lois de comporte- fication s’explique par le mouvement irréversible des dislocations
ment classiques. au cours du chargement.
& Phase 3 du comportement
1.2 Loi élastoplastique : cas des aciers La dernière phase du comportement montre que, lorsque l’acier
a plastifié et que l’on réalise une recharge, il est nécessaire d’attein-
Dans cette partie, est présentée la formulation d’une loi non- dre un niveau d’effort identique à celui de la dernière décharge afin
linéaire classique permettant de décrire le comportement d’un de réactiver la plastification. Autrement dit, le domaine d’élasticité
acier. Le cadre de travail exposé précédemment est progressive- a été élargi : ce phénomène est appelé « écrouissage ». Il définit la
ment particularisé pour obtenir la formulation visée. Un exemple forme de la réponse de l’acier au-delà de sa limite d’élasticité. À
unidimensionnel d’application, permettant d’illustrer les équations l’échelle microscopique, l’écrouissage correspond au mouvement
de la loi de comportement, est finalement exposé. des atomes lorsque les dislocations se sont déplacées une pre-
mière fois.
1.2.1 Identification des mécanismes dissipatifs L’exposé fait donc apparaı̂tre trois mécanismes qu’il conviendra
Les aciers sont des alliages de différents métaux. À l’échelle de prendre en compte dans la formulation de la loi de comporte-
microscopique, on peut observer que leur structure est ordonnée ment pour bien décrire la réponse mécanique :
et forme des polycristaux. Lorsqu’un acier est soumis à un charge- – l’élasticité ;
ment extérieur, généralement par l’intermédiaire d’un essai de trac- – la plasticité ;
tion simple, ce dernier tend à s’allonger. La réponse d’une – l’écrouissage.

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––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– APPORTS DES LOIS CONSTITUTIVES NON-LINÉAIRES EN GÉNIE CIVIL

À chacun de ces mécanismes, on associe une unique variable. et (14), nous aboutissons après quelques développements analyti-
Un ensemble de trois variables est donc nécessaire pour formuler ques à l’expression suivante :
une loi de comportement, capable de décrire la réponse d’un acier,
telle que celle présentée sur la figure 1. ⎛ ∂ρΨ ⎞ ∂ρΨ p ∂ρΨ
φ = ⎜σ − ⎟ εɺ − p εɺ − pɺ ≥ 0 (15)
⎝ ∂ε ⎠ ∂ε ∂p
1.2.2 Potentiel thermodynamique et dissipation Les lois d’état sont définies à partir de la condition de positivité
de la dissipation. En considérant l’inégalité (15), ainsi que l’expres-
Afin de mettre en musique les différentes variables identifiées au
sion du potentiel thermodynamique, on aboutit aux expressions
§ 1.2.1, il convient d’exprimer l’énergie élastique emmagasinable
suivantes :
par un VER d’acier, généralement de quelques centimètres. Deux
contributions à l’énergie élastique totale sont alors identifiées : la ∂ρΨ
partie élastique linéaire et la partie bloquée par écrouissage. Ainsi, σ=
∂ε
(
= E ε − εp ) (16)
le potentiel thermodynamique peut s’écrire de la manière suivante :

ρΨ = ρΨ e + ρΨ ec (11) ∂ρΨ
σ=−
∂ε p
(
= E ε − εp ) (17)
avec Ye partie élastique,
Y ec partie bloquée par écrouissage. ∂ρΨ
Q= = R ′ (p ) (18)
∂p
En introduisant les variables associées à l’élasticité et à l’écrouis-
sage, on aboutit à l’expression suivante : avec Q la force associée à la variable d’écrouissage.

( )

1 2
ρΨ = E εe + R (p ) (12) On notera que la contrainte est définie à travers deux relations, la
2
première faisant intervenir la déformation totale et la seconde, la
avec E module d’Young, déformation plastique. Ce résultat est lié à l’hypothèse de partition
de la déformation totale. En reportant les équations (16), (17) et (18)
ee déformation élastique, dans l’expression de la dissipation, on aboutit à la condition
R fonction dite de « consolidation » permettant suivante :
de spécifier la forme de l’écrouissage, (19)
φ = σεɺ p − Qpɺ ≥ 0
p variable interne représentant l’écrouissage.
La condition exprimée par l’inégalité (19), si elle est respectée,
Dans ce cas, l’écrouissage est supposé être isotrope : il provo- assure le respect des deux premiers principes thermodynamiques.
quera un élargissement de la surface de charge.
D’autres types d’écrouissages existent, comme l’écrouissage 1.2.4 Surface seuil et lois d’évolution
cinématique, qui provoque, quant à lui, une translation de la sur-
face de charge. Le choix de tel ou tel type d’écrouissage est dicté Pour terminer la formulation de la loi de comportement recher-
par la physique du mécanisme que l’on souhaite décrire. À ce chée, il convient d’introduire les surfaces seuils et les lois d’évolu-
stade, une hypothèse supplémentaire intervenant dans le cas des tion qui vont permettre de gérer la manière dont les variables inter-
aciers est introduite. La déformation totale, c’est-à-dire la déforma- nes liées, d’une part à la plasticité et, d’autre part à l’écrouissage
tion pour laquelle on accède à la valeur par la mesure, est décom- vont évoluer.
posée en une partie élastique et une partie plastique. Cette hypo- Une surface seuil exprimée en fonction de la contrainte est choi-
thèse est connue sous le nom de partition de la déformation totale sie. Cette dernière s’exprime par l’équation suivante :
et se formalise par l’équation :
f (σ , Q ) = σ − (σ e + Q ) ≤ 0 (20)
ε = ε e + εp (13)
On note que l’inégalité (20) traduit simplement le fait que, si la
avec e déformation totale, contrainte est inférieure à la limite d’élasticité initiale (éventuelle-
ee déformation élastique, ment augmentée de la contribution de l’écrouissage), alors l’acier
restera dans son domaine de linéarité. En revanche, si la contrainte
ep déformation plastique. devient égale à la limite d’élasticité initiale, alors des déformations
plastiques apparaı̂tront.
En combinant les équations (12) et (13), on obtient la forme finale
du potentiel thermodynamique : Le terme σ représente la valeur absolue de la contrainte. Ceci
est valable lorsque l’on considère un état de contrainte purement
1
(
ρΨ = E ε − εp
2
)2 + R (p ) (14) uniaxial, c’est-à-dire représenté par un scalaire. Ce cas est très
répandu en génie civil dans le cadre des structures en béton armé.
En effet, l’acier intervient essentiellement au niveau des armatures
On notera que l’expression (14) fait intervenir trois variables, qui peuvent être vues comme des éléments linéiques au regard des
caractéristiques des trois mécanismes considérés. dimensions du massif de béton et dont l’état de contrainte peut
être assimilé à un état uniaxial. Si un état de contrainte multiaxial
1.2.3 Lois d’état doit être pris en compte, il est nécessaire d’introduire un indicateur,
appelé « contrainte équivalente », permettant de se ramener au cas
Il convient de définir les lois d’état. Pour cela, la condition de uniaxial. Il existe plusieurs définitions de la contrainte équivalente,
positivité de la dissipation, exprimée par l’équation (2), est considé- les plus connues sont les contraintes de Von Mises s VM et Tresca s T
rée, et est particularisée, en fonction du potentiel thermodyna- dont les expressions sont données par les équations (21) et (22)
mique qui vient d’être construit. En combinant les équations (2) respectivement.

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APPORTS DES LOIS CONSTITUTIVES NON-LINÉAIRES EN GÉNIE CIVIL –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

2 simple sont généralement suffisants pour identifier les paramètres


σ VM =
2
(σI − σII )2 + (σII − σIII )2 + (σI − σIII )2 (21) nécessaires.
Le module d’Young sera identifié comme la pente au voisinage
de l’origine de la relation contrainte/déformation. Du fait de la diffi-
σ T = sup ( σI − σII , σII − σIII , σI − σIII ) (22) culté à identifier précisément le passage entre le régime élastique
et plastique, la limite d’élasticité est généralement remplacée par
avec s I, s II et s III contraintes principales. une limite d’élasticité conventionnelle dont la valeur correspond à
une déformation de 0,002. Enfin, la fonction de consolidation est le
La prise en compte d’un état de contrainte multiaxial devient plus souvent identifiée en réalisant une régression linéaire de la
alors naturelle. Il suffit de remplacer dans l’expression (20) le terme partie plastique de la courbe contrainte/déformation.
σ par la contrainte équivalente de notre choix. Une forme très utilisée de la fonction d’écrouissage est la
suivante :
En supposant que l’écoulement se produise de manière associée,
les lois d’évolution s’expriment de manière identique à l’équa- R (p ) = Hp (28)
tion (8) pour chacune des variables internes considérées :

∂f σ avec H module d’écrouissage.


εɺp = λɺ = λɺ (23)
∂σ σ
Sa valeur est définie comme un pourcentage du module d’Young
(entre 5 et 10 %). Cette forme de fonction de consolidation ne
∂f nécessite qu’un unique paramètre, ce qui est apprécié des ingé-
pɺ = λɺ = − λɺ (24)
nieurs. Si des fonctions de formes plus complexes sont souhaitées
∂Q
pour les besoins de la description, cela sera souvent au prix de la
On remarque qu’un unique multiplicateur plastique a été intro- prise en compte d’un nombre plus important de paramètres maté-

T duit pour gérer l’évolution des deux variables internes. Cela signifie
qu’il existe un couplage entre les évolutions des déformations plas-
tiques et celles de la variable d’écrouissage. Physiquement, cela ne
riaux qu’il faudra identifier.
Afin d’illustrer la loi de comportement formulée ici un essai de
traction simple avec un cycle de charge/décharge a été simulé.
semble pas surprenant puisque l’on a vu que, s’il y avait apparition Des paramètres classiques ont été supposés, ils sont présentés
de la plasticité, alors l’écrouissage était également mobilisé. dans le tableau 1.
Le calcul du multiplicateur plastique se fait en écrivant la condi- Le résultat de la simulation est présenté sur la figure 2. On peut
tion de cohérence exprimée par l’équation (10). En développant noter que la réponse de la loi de comportement formulée repré-
cette équation, il vient : sente bien les différentes phases de comportement identifié.
∂f ∂f ɺ σ D’abord, une phase élastique dont la pente est égale au module
fɺ = σɺ + Q= σɺ − Qɺ = 0 (25) d’Young jusqu’à une déformation voisine de 0,0025. À ce stade, la
∂σ ∂Q σ contrainte dépasse la limite d’élasticité ; la phase de plasticité com-
En combinant les lois d’état exprimées par les équations (16), (17) mence. On pourra remarquer que la pente de la partie plastique est
et (18) à l’équation (25), il vient :
Tableau 1 – Paramètres matériaux identifiés pour la loi
fɺ =
σ
σ
( )
E εɺ − εɺp + R ′ (p ) pɺ = 0 (26)
de comportement d’acier

Finalement, en introduisant les équations (23) et (24) dans la rela- Module Limite Module
tion (26) et après quelques développements analytiques, nous Coefficient de
d’Young d’élasticité d’écrouissage
Poisson (-)
obtenons l’expression du multiplicateur plastique : (en MPa) (en MPa) (en MPa)

E σ 210 000 0,3 500 21 000


λɺ = εɺ (27)
E + R ′ (p ) σ

On peut noter que le terme R’(p) joue le rôle d’un module, pou-
vant ou non être fonction de la variable interne p. Ce terme est
appelé « module d’écrouissage ». Le choix de R’(p) est fait d’après × 108
8
des résultats expérimentaux de manière à ce que la forme de la
courbe contrainte/déformation soit la plus approchée possible. 7

6
1.2.5 Identification et exemple
5
La pertinence et le caractère prédictif d’une loi de comportement,
Contrainte (en Pa)
aussi complexe soit-elle, sont étroitement liés à la manière dont on 4
identifie ses paramètres.
3
Dans le cas de la loi formulée précédemment, cette dernière fait
apparaı̂tre trois paramètres matériaux qu’il convient d’identifier : 2
– un paramètre élastique (le module d’Young) ;
1 εp εe
– un paramètre de seuil (la limite d’élasticité initiale) ;
– une fonction caractérisant l’écrouissage (la fonction de
0 0,005 0,01 0,015
consolidation).
Déformation
La détermination des valeurs de ces paramètres nécessite des
résultats d’essais expérimentaux réalisés à l’échelle du VER. Dans Figure 2 – Réponse uniaxiale à un chargement de traction cyclique
le cas d’un acier, les résultats fournis par un essai de traction non alterné – résultat en contrainte/déformation

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Lois de comportement en calcul


de structures
Identification et utilisation
par Benjamin RICHARD
Chef du Laboratoire de Modélisation et d’Analyse de la Performance des Structures
Service d’Expertise des Équipements et des Structures – Pôle Sûreté Nucléaire
IRSN (Fontenay-aux-Roses, France)
et Cédric GIRY
Maître de Conférences. Agrégé de Génie Civil
LMT, ENS, CNRS, Université Paris-Saclay France

1. Lois de comportement pour les matériaux du Génie Civil ..................... C 6 005 - 2



1.1 Paramètres d’élasticité ............................................................................... — 2
1.2 Paramètres de seuil .................................................................................... — 3
1.3 Paramètres d’évolution .............................................................................. — 4
2. Méthodes d’identification .......................................................................... — 7
2.1 Méthodes d’identification classiques et limites associées ...................... — 7
3. Applications structurales ........................................................................... — 18
3.1 Contexte....................................................................................................... — 18
3.2 Poutre en béton armé ................................................................................. — 19
3.3 Voile en béton armé.................................................................................... — 22
4. Conclusion ................................................................................................... — 28
5. Glossaire ...................................................................................................... — 29
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. C 6 005

’utilisation d’outils de calcul est devenue tout à fait courante dans le


L domaine du génie civil dès lors qu’il s’agit de dimensionner un ouvrage
neuf, quelle que soit la fonction pour laquelle ce dernier a été prévu. Cela peut
s’expliquer par le fait que de nombreuses contraintes de natures différentes
ont été imposées à l’ingénieur.
À titre d’exemples, on peut citer :
– des contraintes d’ordre écologique visant à rendre les ouvrages neufs plus
efficaces du point de vue énergétique ;
– ou encore des contraintes de robustesse en cas de chargement accidentel,
comme les tremblements de terre.
Ces différentes contraintes ont conduit à modifier les pratiques d’ingénierie
classiques, comme par exemple en utilisant des matériaux nouveaux plus iso-
lants ou encore en introduisant un système structural redondant. La complexité
induite par ces contraintes a contribué à augmenter l’utilisation d’outils de calcul
de structure conventionnels dans le milieu des bureaux d’études.
Toutefois, dès qu’il s’agit de conception ou encore de dimensionnement, ces
outils reposent sur l’hypothèse de linéarité du comportement des différents
matériaux constitutifs de l’ouvrage. En revanche, si l’on s’intéresse au cas des
ouvrages existants, le problème posé consiste généralement à évaluer leur
niveau de conformité au regard des exigences imposées par les Pouvoirs
Publics.
p。イオエゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQY

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LOIS DE COMPORTEMENT EN CALCUL DE STRUCTURES ____________________________________________________________________________________

En cas de non-conformité, et selon la fonction de l’ouvrage, ce dernier se


doit d’être remis aux normes. Cela est particulièrement vrai dès qu’il s’agit de
la tenue structurale d’un ouvrage au séisme. Il convient donc d’évaluer les
marges de sécurité par rapport à un ou plusieurs états limites : on parle
d’« évaluation structurale ».
Pour cela, il est nécessaire d’étudier le comportement des ouvrages dans un
domaine de fonctionnement où l’hypothèse de linéarité des matériaux n’est
plus vérifiée. L’ingénieur doit alors utiliser des méthodes de calcul dites « non
linéaires ». Cela entraîne un certain nombre de problématiques auxquelles il
est essentiel d’être sensibilisé.
Tout d’abord, la littérature technique et scientifique peut aisément témoigner
du nombre très important de travaux réalisés dans le but de représenter le
plus fidèlement possible le comportement à rupture des matériaux de génie
civil. De nos jours, il est admis que les lois décrivant le comportement de
l’acier sont relativement fiables et robustes. En revanche, une telle maturité n’a
pas encore été atteinte lorsque le comportement du béton sous chargement
complexe doit être décrit.
Comment choisir des lois de comportement fiables dont on maîtrise le cadre
d’application est une des premières questions à laquelle les ingénieurs doivent

T répondre. Ensuite, parce que chaque matériau est différent, il est nécessaire de
particulariser les lois de comportement sélectionnées. Cette étape de particula-
risation passe généralement par la détermination d’un certain nombre de
paramètres : il s’agit de « l’identification ».
Cette étape d’identification nécessite des données d’entrée, le plus souvent
issues d’essais mécaniques bien codifiés. Toutefois, dans certains cas, ces
données peuvent ne pas être disponibles ou encore être complexes à obtenir
du fait du comportement des matériaux en présence.
Comment réaliser l’identification des paramètres de lois de comportement
non linéaires et quelles stratégies adopter en cas de manque de données est
une seconde question à laquelle les ingénieurs doivent faire face.
Cet article a pour objectif d’apporter des éléments de réponse aux deux pro-
blématiques présentées précédemment.
Pour cela, quelques lois de comportement classiques sont tout d’abord expo-
sées. Le choix de ne retenir que les lois de comportement les plus connues et
répandues dans les codes de calcul a été fait. Une attention particulière est
attachée à la présentation des cadres d’application.
Puis, dans un second temps, une présentation de quelques méthodes d’iden-
tification est réalisée. En particulier, les pratiques d’identification les plus
courantes sont d’abord rappelées.
Puis, une brève présentation du concept d’expérimentation numérique est
proposée afin de sensibiliser le lecteur à ce type de technique.
Enfin, l’ensemble des concepts présentés est illustré par une étude de cas
structuraux.

1. Lois de comportement caractéristiques matériaux dont l’identification est discutée dans


la seconde partie.
pour les matériaux
du Génie Civil 1.1 Paramètres d’élasticité
Tout matériau présente une phase de comportement élastique.
La description complète d’un modèle de comportement non
linéaire de matériaux nécessite la définition de diverses lois d’évo- Dans le cas de l’élasticité linéaire, le tenseur de déformation ε
lution, ainsi que des seuils associés permettant de définir le est lié au tenseur de contrainte σ par la relation de l’équation (1).
domaine de linéarité [1]. Chacun de ces éléments est exprimé (1)
sous la forme de fonction mathématique mettant en œuvre un
ensemble de paramètres. avec C tenseur d’élasticité d’ordre 4.
Dans cette première partie, différents modèles de comporte- Pour des matériaux au comportement élastique isotrope, cette
ment classiques sont présentés en introduisant le lien avec des relation nécessite seulement deux paramètres. Suivant la forme

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____________________________________________________________________________________ LOIS DE COMPORTEMENT EN CALCUL DE STRUCTURES

considérée pour cette relation, différents couples de paramètres 1.2.2 Critère de Von Mises
d’élasticité peuvent être pris en compte.
Le critère de Von Mises permet de retranscrire la sensibilité au
Ces paramètres sont reliés entre eux par des équations que le
cisaillement d’un matériau. Il permet de représenter simplement
lecteur retrouve par exemple dans [1]. Les différentes formes de
la limite d’élasticité de nombreux matériaux métalliques.
l’équation d’état de l’élasticité linéaire sont présentées dans le
Tableau 1 où représente le tenseur d’identité d’ordre 2. Ce seuil, exprimant une énergie élastique de cisaillement limite
pour le matériau, peut s’écrire également en fonction d’un état de
Pour des modèles de comportement élastique plus complexes
(ex. isotrope transverse, orthotrope, …), un nombre de para- contrainte associé au tenseur des contraintes déviatoriques σD
mètres plus important est nécessaire. (avec ) :
Le lecteur pourra trouver des informations à ce sujet dans [1].
(4)
avec J2 second invariant du tenseur des contraintes
1.2 Paramètres de seuil déviatoriques, encore appelé « contrainte
équivalente de Von Mises »,
Un modèle linéaire représentant le comportement d’un maté- σe limite d’élasticité.
riau est valable jusqu’à un certain niveau de sollicitation défini par
un état (σ, ε).
(5)
De manière classique, on définit une norme de cet état de solli-
citation que l’on compare à des paramètres de limite d’élasticité Ce critère convient bien pour représenter des matériaux insen-
du matériau. sibles aux effets du confinement, tel que l’acier.


L’équation (2) donne la forme générale d’une fonction seuil
pour un critère en contrainte et pour un critère en déformation. 1.2.3 Critère de Drücker-Prager
(2) Le critère de Drücker-Prager est très largement utilisé pour repré-
Afin d’avoir une indépendance de ces critères vis-à-vis du senter le seuil d’élasticité de matériaux quasi-fragiles (ex. béton) pour
repère d’expression de la contrainte, on peut avoir recours à des lesquels la pression hydrostatique influe sur la résistance.
quantités dites « invariantes ». (6)
avec premier invariant du tenseur des contraintes. Ce
Un invariant tensoriel est une quantité calculée à partir d’un terme permet de retranscrire l’effet de la pression
tenseur. Il est indépendant du repère dans lequel il est écrit. hydrostatique,
α et β paramètres liés au comportement du matériau.
Ces invariants sont définis au fur et à mesure de leur utilisation
dans les critères classiques utilisés pour le béton et l’acier propo- (7)
sés dans ce chapitre.
À partir de la résistance en compression fc et de la résistance en
bi-compression fbc du matériau, on peut identifier les paramètres
1.2.1 Critère de Rankine α et β avec les équations (8) et (9).
Le critère de Rankine permet de représenter simplement le seuil
en traction de matériaux quasi-fragiles (ex. béton, maçonnerie, …). (8)
Il s’exprime en fonction des contraintes principales.
(3)
(9)
avec ft limite en traction du matériau.
On peut également, avec ce critère, considérer des limites
d’élasticité différentes suivant les directions en comparant chaque 1.2.4 Critère de Coulomb
contrainte indépendamment. Le critère fonctionne alors de
manière indépendante suivant chaque direction principale du ten- Le critère de Coulomb permet de représenter le seuil d’élasticité
seur des contraintes. de matériaux quasi-fragiles (ex. béton) pour lesquels la pression

Tableau 1 – Paramètres et forme de relation d’élasticité linéaire isotrope


Paramètres (Unité) Principe Relation
Module d’Young E (Pa), Paramètres issus d’une sollicitation
Coefficient de Poisson ν (-) uniaxiale
Modules de Lamé :
λ (Pa), μ (Pa)

Module compressibilité K (Pa), Décomposition déviatorique /


Module de cisaillement G (Pa) hydrostatique

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hydrostatique influe sur la résistance. Il est également utilisé très


largement pour les milieux granulaires. Tableau 2 – Bilan du nombre de paramètres
pour les critères proposés
(10)
avec c cohésion du matériau, Nombre Nom
Critères
angle de frottement. de paramètres des paramètres
Les contraintes principales sont classées en (σ1 ≤ σ2 ≤ σ3). Les Rankine 1 ft
paramètres matériaux c et sont facilement accessibles avec des
tests standards pour les milieux granulaires, mais sont plus com- Von Mises 1 fc
plexes à obtenir pour des matériaux quasi-fragiles comme le béton.
Ce critère présente une forme relativement simple qui peut Drücker-Prager 2 α, β
expliquer son succès. On attire néanmoins l’attention du lecteur
sur le fait que la forme irrégulière du critère peut induire des diffi- Coulomb 2
cultés de traitement numérique.
Ottosen 4 a, b, k1, k2
1.2.5 Critère d’Ottosen
Mazars 1
Le critère d’Ottosen définit un seuil sur l’espace complet des
contraintes et permet une bonne représentation du seuil d’élasti-
cité de matériaux quasi-fragiles comme le béton. riau, sur une gamme de sollicitations limitées. On peut alors associer
différents seuils en une surface seuil multi-critères afin de couvrir un

T (11) grand panel de sollicitations limites (ex. Drücker-Prager pour la partie


en compression et Rankine pour la partie en traction).

Une surface seuil multi-critères est une surface seuil combi-


(12) nant différents critères limites.

avec θ invariant des contraintes. Le tableau 2 liste le nombre de paramètres et les noms associés
pour les différents critères présentés.

(13)
1.3 Paramètres d’évolution
Afin de définir le comportement d’un matériau dans un charge-
avec J3 troisième invariant du tenseur des contraintes ment au-delà de son seuil d’élasticité, il est nécessaire de définir
déviatoriques σD et correspondant au des lois d’évolution du seuil, ainsi que des mécanismes dissipatifs
déterminant du tenseur, associés.
a, b, k1, k2 paramètres du critère. Le comportement non linéaire d’un matériau se caractérise par le
On retrouve, pour des jeux de paramètres particuliers, certains développement de phénomènes irréversibles au sein du matériau.
critères présentés précédemment : Les non linéarités les plus classiques sont le développement de
– Von Mises (a = b = 0 et λ = cste) ; déformation permanente (déformation plastique – Équation (15))
– Drücker-Prager (a = 0 et λ = cste). ou bien encore la dégradation de la rigidité (endommagement –
Équation (16), endommagement isotrope).
1.2.6 Critère de Mazars (15)
Le critère de Mazars [2] définit un seuil à partir des déforma- (16)
tions.
Le développement de ces non linéarités, pour assurer un res-
■ Sensibilité du matériau pect de la physique des évolutions, peut se formuler dans un
Développé pour représenter la limite d’élasticité des matériaux cadre thermodynamique [C 6 001]. On définit alors l’évolution
quasi-fragiles comme le béton, il exprime la sensibilité du maté- incrémentale de ces variables internes (εp, D) par l’intermédiaire
riau vis-à-vis des déformations d’extension. d’un pseudo-potentiel de dissipation φ. Ce dernier peut avoir une
forme similaire à celle de la surface seuil f (modèle associé) ou
(14) différente suivant les quantités pilotant la dissipation (modèle non
associé).
avec déformation équivalente de Mazars, La forme incrémentale de l’évolution de ces variables internes
déformation équivalente seuil, au-delà de s’écrit alors :
laquelle le comportement n’est plus élastique.
(17)
■ Commentaires généraux
Les critères présentés dans ce paragraphe sont très largement utili-
sés pour représenter le comportement de matériaux quasi-fragiles, (18)
tels que le béton, ainsi que le comportement d’armatures métalliques.
On attire l’attention du lecteur sur le fait que ces critères peuvent avec Y taux de restitution d’énergie élastique (variable
avoir une représentativité du seuil de non linéarité propre à un maté- associée à l’endommagement).

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Comme cela est expliqué dans [C 6 001] la cohérence entre Dans la suite de l’article, les deux types d’écrouissage sont pré-
l’évolution du seuil et des dissipations permet de s’assurer de la sentés séparément en proposant des formes de lois classique-
consistance physique du modèle développé. ment utilisées pour les matériaux du Génie Civil.
On définit l’évolution du seuil comme étant l’écrouissage.
1.3.1.1 Écrouissage cinématique
L’état du matériau et l’expression du seuil étant décrits complè-
• Un écrouissage cinématique de la surface seuil est un tement par des quantités tensorielles (σ, ε) l’histoire du déplace-
déplacement de la surface seuil dans l’espace d’état du ment de la surface seuil est caractérisée par :
matériau sans modification de sa forme ou de sa taille.
– un tenseur d’écrouissage cinématique α ;
• Un écrouissage isotrope de la surface seuil est un change-
ment de taille et/ou de forme de la surface seuil dans – un tenseur de contrainte de rappel associé X.
l’espace d’état du matériau sans déplacement global. Une forme linéaire de loi d’état entre ces deux quantités est
classiquement prise.

La figure 1 illustre les deux types d’écrouissage dans le cadre (19)


d’une réponse uniaxiale pour un comportement élasto-plastique.
Ces écrouissages peuvent se combiner pour exprimer un compor- Le tenseur X permet de définir la position actuelle de la surface
tement complexe. seuil et s’écrit, par exemple, pour le critère de Von-Mises, en
considérant une évolution linéaire de l’écrouissage, sous la
Le type d’écrouissage peut s’identifier expérimentalement en forme :
considérant des chargements cycliques complets.
(20)
Afin de définir ces évolutions, un jeu de paramètres plus ou
moins important et des fonctions non linéaires peuvent être
nécessaires en lien avec la complexité des phénomènes à décrire.
Une évolution non linéaire pour l’écrouissage cinématique, plus
représentative de la réponse observée pour les aciers, par
exemple, peut être définie par l’introduction d’un terme complé-

De plus, pour pouvoir suivre l’histoire de l’évolution de la sur- mentaire dans l’expression du pseudo-potentiel de dissipation,
face, des variables supplémentaires sont introduites. induisant ainsi un comportement non-associé [C 6 001].
Cette expression du pseudo-potentiel de dissipation s’appuie
1.3.1 Comportement élasto-plastique sur la proposition de [3] :

Un comportement élasto-plastique se caractérise par le déve- (21)


loppement de déformations permanentes (ou déformations plas- Cette forme non linéaire permet notamment de mieux représen-
tiques) au cours de la dégradation du matériau. ter les courbures des boucles d’hystérésis observées pour un
Ce type de comportement s’observe notamment dans les maté- chargement cyclique.
riaux métalliques tels que ceux composant les armatures dans le
béton armé. Ce même type de comportement peut également 1.3.1.2 Écrouissage isotrope
s’observer dans les géomatériaux sous des chargements de cisail-
lement ou bien encore de compression. La taille initiale de la surface seuil est décrite par un scalaire,
fonction d’une résistance identifiée expérimentalement. De façon
Ces non linéarités sont associées à une modification du seuil analogue, l’histoire de l’évolution de la taille de la surface seuil est
qui peut-être de type écrouissage isotrope, cinématique ou bien définie en fonction de l’état du matériau par une variable d’his-
une composition des deux. toire scalaire et sa variable associée (r, R).

σ
σ

fy
fy fy

ε
fy
ε

a écrouissage cinétique b écrouissage isotrope

Figure 1 – Réponse cyclique uniaxiale d’un modèle élasto-plastique

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La variable R permet de définir la modification de la taille de la


surface seuil et s’écrit, par exemple, pour le critère de Von-Mises, Tableau 3 – Bilan des paramètres du modèle
sous la forme : d’endommagement
(22)
Nom
Signification
Une évolution linéaire de l’écrouissage est définie par une loi des paramètres
d’état linéaire.
Déformation équivalente seuil de première
(23)
fissuration
Afin d’exprimer un comportement non linéaire, diverses lois
peuvent être considérées comme, par exemple, une loi puis- Paramètres d’évolution en compression Ac, Bc
sance :
Paramètres d’évolution en traction Bt, (At)
(24)

Les modèles avec un simple écrouissage isotrope peuvent être


moins représentatifs du comportement multiaxial réel du maté- De plus, la stabilité numérique des analyses réalisées avec une
riau, mais ils présentent l’avantage d’être plus simples à program- telle loi d’évolution est améliorée en introduisant une contrainte
mer et à manipuler. résiduelle en traction égale à : .
Le tableau 3 liste les paramètres et leur signification.
1.3.2 Comportement élastique endommageable
1.3.2.2 Détermination des paramètres du modèle

T Un comportement élastique endommageable se caractérise par


une diminution de la rigidité du matériau. Ce type de comportement
s’observe dans les matériaux quasi-fragiles, tels que le béton.
Les différents paramètres du modèle d’endommagement pré-
senté peuvent être identifiés à partir de caractéristiques classiques
d’un béton :
Dans cet article, on se limite à la dégradation du matériau sous
la forme d’une variable d’endommagement scalaire (i.e. dégrada- – module d’Young (E) ;
tion similaire dans toutes les directions de l’espace), autrement – coefficient de Poisson (ν) ;
appelée « endommagement isotrope ». – résistance à la traction (ft) ;
Le modèle présenté dans ce paragraphe a l’avantage d’être relative- – contrainte limite en compression (fc) ;
ment simple avec un nombre de paramètres limités qui peuvent se
– déformation à cette limite en compression (εc) ;
lier avec des quantités identifiables expérimentalement (voir § 2.1).
– énergie de fissuration (Gf).
1.3.2.1 Équations constitutives du modèle Les paramètres du module d’Young et du coefficient de Poisson
La variable d’endommagement évolue en fonction d’une défor- permettent de définir le comportement initial élastique isotrope
mation équivalente εeq exprimée en fonction des déformations du matériau.
d’extension. La déformation équivalente seuil de première fissuration s’iden-
(25) tifie à partir de la résistance en traction.

Le seuil utilisé correspond à celui de Mazars [2] (Équation (14)). (30)


L’historique de dégradation est piloté par la variable définie
comme le maximum au cours du temps entre la déformation équi-
valente et la déformation seuil : Les paramètres Ac et Bc s’identifient à partir des caractéristiques
à la limite en compression. À cette limite, la tangente de la loi
d’évolution uniaxiale en compression (σ[ε]) s’annule :
(26)
Afin d’exprimer l’évolution de l’endommagement pour divers (31)
trajets de chargement (ex. traction, compression, cisaillement), la
variable d’endommagement D s’exprime comme une combinai-
son de deux variables Dc et Dt, fonctions de la variable . (32)
(27)

(28) Le paramètre Bt est identifié à partir de l’énergie de fissuration.


Cette identification est un peu particulière dans la mesure où elle
(29) est liée à la taille du maillage utilisé pour la calculer dans un code
de calcul aux éléments finis.
Les variables αc et αt se calculent en fonction de l’état de
contrainte élastique du matériau. En effet, comme discuté dans [C 6 001], un modèle de compor-
tement adoucissant présente une dépendance du résultat à la
Pour un chargement de traction, l’endommagement est égal à
taille du maillage. Pour éviter ce problème, une solution simple
D = Dt (αc = 0 et αt = 1) et, pour un chargement de compression,
consiste à assurer une dissipation complète de l’énergie issue du
l’endommagement est égal à D = Dc (αc = 1 et αt = 0).
processus de fissuration sur une bande d’élément de largeur h
Il est à noter que, pour tenir compte d’une interaction entre les (i.e. taille caractéristique d’un élément dans la direction normale à
armatures et le béton et la présence d’une contrainte résiduelle la fissure).
(i.e. effet de tension stiffening), une forme de loi d’évolution pour
Dt, similaire à celle de Dc, peut être utilisée.
Ce choix introduit un paramètre supplémentaire pour introduire (33)
la contrainte résiduelle : At.

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2. Méthodes d’identification tité très restreinte d’informations. En effet, seule la résistance en


compression du béton (moyenne ou caractéristique) doit être
connue ou estimée.
Dans cette partie, un bilan des méthodes d’identification les Les relations (34) et (35) permettent donc d’aboutir aux valeurs
plus couramment employées est tout d’abord dressé. Une atten- de paramètres caractérisant la réponse élastique du béton et sa
tion particulière est accordée à la mise en exergue des limites de résistance. L’EC2 ne propose pas d’autres modèles simplifiés de
ces méthodes. ce type pour caractériser les autres familles de paramètres, en
Enfin, le concept d’expérimentation numérique est introduit afin particulier ceux intervenant dans le comportement du béton post-
de sensibiliser le lecteur aux techniques d’identification récentes. rupture.

2.1 Méthodes d’identification classiques Les paramètres post-rupture sont ceux qui permettent de
caractériser le comportement d’un matériau quasi-fragile pour
et limites associées des niveaux de déformation entraînant le dépassement du pic
de résistance, que ce soit en traction ou en compression.
L’identification des paramètres caractérisant une loi de compor-
tement non linéaire est une étape cruciale. En effet, la pertinence
des paramètres utilisés va influencer directement les résultats Ces modèles simplifiés restent très utilisés au sein de la com-
obtenus. munauté d’ingénierie pour plusieurs raisons.
Le processus d’identification peut être défini comme suit.
En premier lieu, ils sont généralement proposés dans le cadre
normatif, ce qui légitime donc leur utilisation sur le plan légal. En
L’identification des paramètres caractérisant une loi de com- effet, recourir à une valeur des paramètres estimée par ces


portement, qu’elle soit linéaire ou non linéaire, consiste à affec- modèles simplifiés peut ainsi être justifié.
ter des valeurs numériques à ces paramètres de manière à ce En second lieu, on peut noter la très faible quantité d’informa-
que la réponse en effort/déplacement (ou contrainte/déforma- tions nécessaires à l’application de ces relations. Et, dans le cas
tion), du matériau considéré, puisse être estimée au plus près du matériau béton, seule la résistance en compression est néces-
de la réalité. saire. Cette donnée peut généralement être connue sans difficulté.
Si l’on se réfère aux modèles proposés par l’EC2, on peut noter
La pratique d’identification actuelle consiste à choisir la qu’ils portent essentiellement sur le matériau béton. En effet, le
méthode en fonction de la nature et de la quantité d’informations comportement de l’acier quant à lui est caractérisé par deux para-
disponibles a priori, ou dans certains cas, après la réalisation d’un mètres qui sont :
calcul de structures non linéaire. Dans ce dernier cas, on parle – le module d’Young ;
d’identification par ajustement des paramètres. – la limite d’élasticité.
Ces deux paramètres peuvent être estimés aisément en réali-
2.1.1 Recours aux modèles simplifiés – sant des essais mécaniques simples. C’est pourquoi aucun
Proposition de l’Eurocode 2 modèle simplifié n’est proposé pour estimer les paramètres carac-
téristiques de l’acier.
En l’absence d’informations, une première approche consiste à
recourir aux modèles simplifiés permettant d’évaluer les para-
mètres des matériaux les plus courants, généralement ceux utili- 2.1.2 Fiabilité et robustesse des modèles
sés pour caractériser la réponse élastique linéaire du matériau. simplifiés en contexte d’évaluation
structurale
À titre d’exemple, on peut citer la relation approchée que l’Euro-
code 2 (EC2) propose en vue de déterminer le module d’Young d’un Au § 2.1.1, quelques modèles simplifiés ont été présentés en
béton en fonction de la résistance à la compression moyenne : vue d’estimer certains paramètres caractérisant le comportement
du béton.
(34)
On peut noter que ces modèles simplifiés ne s’appliquent
avec E module d’Young du béton considéré, pas à l’ensemble des classes de paramètres.
fcm résistance en compression moyenne mesurée à Cela est particulièrement vrai pour des paramètres caractéri-
28 jours. sant le comportement post-rupture du béton.
Par ailleurs, on peut également citer la relation permettant de calcu-
ler la résistance à la traction moyenne en fonction de la résistance à la
compression caractéristique : On distingue donc, à ce stade, une première limitation dès lors
que l’on cherche à recourir uniquement à des modèles simplifiés
(35) similaires à ceux qui ont été présentés au § 2.1.1.
Cette stratégie doit donc être complétée, ou encore corrélée,
avec fctm résistance moyenne à la traction du béton avec une batterie de méthodes complémentaires. Une seconde
considéré limitation que l’on peut mentionner est plutôt d’ordre conceptuel.
fck résistance à la compression caractéristique
Si l’on se réfère au fondement et à la forme analytique de ces
relations, on peut noter certains manques. D’abord, ces relations
Les relations (34) et (35) sont des exemples bien connus de sont généralement fondées sur de très nombreux résultats
modèles simplifiés permettant d’estimer certains paramètres. d’essais. Les relations analytiques ont été déduites en réalisant
Il est intéressant de noter que ces deux relations permettent des corrélations à différents niveaux. Ces corrélations
d’associer des valeurs, d’une part, au module d’Young et, d’autre conduisent à la forme analytique que prennent les différents
part, à la résistance en traction du béton en fonction d’une quan- modèles simplifiés.

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