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Karim MISSOUM, Auteur de «ZHUR», adaptation en Kabyle de l'œuvre universelle de

Tawfik Al Hakim «ISIS» :

«Écrire en sa langue maternelle libère, soulage et donne de la force au message que l’on
veut transmettre»

L’écriture étant toujours en lui, il n'a jamais cessé d’écrire. Alors que ses poèmes font la mue
et subissent des transformations et changent de langue, ses textes restent souvent inachevés.
Jusqu'à ce qu'il sera interpelé par la question identitaire, Karim Missoum s'est donné à écrire
dans sa langue maternelle. Tout récemment, il décide de passer à l’acte pour sortir son
premier livre qui a pour titre «ZHUR»...
A cette occasion, il a bien voulu répondre à nos questions.
Le Jeune Observateur : Vous venez de signer votre premier livre «ZHUR», qu’évoque-t-
il ?
Karim Missoum : Effectivement, après des embûches, je viens de publier «ZHUR», mon
premier livre ce printemps 2019. «ZHUR» est une adaptation en ma langue maternelle de
l'œuvre universelle de Tawfik Al Hakim "ISIS". C'est une pièce de théâtre qui met en scène
une femme à la recherche de son mari en premier lieu.
Dans un second temps, elle fera tout pour récupérer le trône de son mari, pour ensuite faire
asseoir son fils à la place du tyran.
L’histoire de «ZHUR» évoque la lutte et le combat des hommes pour l’accession au pouvoir
et la gestion de la cité, c’est aussi le conflit perpétuel entre le bien et le mal. Les luttes pour le
pouvoir, l’acharnement des forces du mal et le triomphe du bien est continuel, l’histoire se
répète tout le temps ! «ZHUR», c’est la légende d’ISIS racontée en Kabyle.
LJO : Pourquoi vous vous êtes intéressé à l'œuvre de Tawfik Al Hakim «ISIS» ?
KM : ISIS est la mère d’Horus, le roi qui a engendré les pharaons. La légende d’ISIS est
connue dans le monde entier, les civilisations grecques et romaines se sont inspirées de
l’histoire d’ISIS. Il faut rappeler que cette œuvre est universelle, elle est traduite dans
plusieurs langues à travers le monde. A mon tour, je me suis intéressé à son histoire et essayé
de la ramener et la raconter dans ma langue maternelle. J’ai beaucoup aimé la manière dont
Tawfik Al Hakim a orchestré cette légende sous forme théâtrale ; il m’a inespéré et très vite je
me suis trouvé entrain de traiter les premières pages.
Le théâtre permet de s’exprimer à travers différents personnages, c’est une option qu’offre la
littérature, sans oublier que c’est le père des arts. Tawfik Al Hakim est très célèbre par ses
œuvres et surtout par son théâtre qu’il a révolutionné en son temps. Son œuvre est d’actualité,
elle est bonne pour tous les temps.
LJO : L'histoire de «ZHUR» traite de la gestion de la cité. Quelle est la relation entre
l'histoire dans votre livre et la pratique actuelle du pouvoir à travers le monde et
particulièrement en Algérie, notamment avec les récents évènements ?
KM : Notre société est en perpétuelle évolution, elle n’est pas en marge de tout ce qui se passe
et se trame dans le monde. L’ère du numérique a fait accélérer les choses. Le vent du
changement qui a soufflé ces dernières années sur la région MENA (Moyen Orient et Afrique
du Nord) ne pouvait épargner notre pays.
Les masses de jeunes gens qui se soulèvent et réclament un changement radical dans la
gestion du pays, se révoltent sur la frange qui s’est accaparé illégitimement le pouvoir depuis
l’indépendance. Le peuple qui scande « Dégagez Tous » veut être représenté dignement et
gouverné par des personnes capables et compétentes que lui-même élira et placera dans toutes
les institutions de l’Etat.
L’histoire de «ZHUR» traite de cette légitimité. Son mari, le roi savant, est évincé du trône
par son frère qui va prendre le pouvoir et gérera la cité avec gabegie et prédation. Le nouveau
roi proclamé va même assassiner son frère après l’avoir jeté dans l’oued la première fois.
Zhur, après l'avoir retrouvé, ramène son mari au pays et le cache du regard du nouveau règne.
Elle donne naissance à un fils et vit tranquillement auprès des paysans.
Le tyran, ayant découvert le retour de son frère, passe à l’acte et disperse sa chair en lambeaux
dans l’oued pour que plus jamais il ne revienne. Vingt ans après, le fils légitime a grandi et
muri, il est prêt à reprendre le trône de son père. Mais comment va-t-il procéder ? Seule la
justice du peuple peut l’introniser. C’est une parabole de ce qui se passe actuellement chez
nous…
LJO : Adapter des œuvres universelles en kabyle a toujours été le domaine de
prédilection du feu Mohia, que pourriez-vous dire sur ce sujet ? Un mot sur Mohia…
KM : Exactement, c’est son domaine de prédilection. Mohia a tracé le chemin, et depuis,
nombreux sont ceux qui ont suivi ses traces. Pour moi, Mohia, le plus célèbre des inconnus,
est un exemple de don et de partage, c’est toute une école en lui-même. J’aime beaucoup ses
œuvres, il m’est arrivé des fois de les injecter en overdose. Son apport à notre culture est
immense. Dans une des interview qu’il a accordé dans sa vie, il a conseillé d’aller ramener
des œuvres universelles et les adapter à notre langue, traduire et adapter des prix Nobel, de
savants et d’illustres écrivains, car ce n’est qu’on faisant cela qu’on rattraperait l’immense
retard que nous avons subi.
Un ancien membre des vingt détenus du printemps berbère m’a dis un jour: « Il faut traduire
en tamazight toutes les grandes œuvres. La traduction est une ouverture sur le monde, c’est la
meilleur façon de quitter le repli sur soi, car si le repli sur soi est sécurisant il est surtout
stérilisant, il faut s’ouvrir sur les autres peuples et civilisations ».
LJO : Quels-sont les auteurs qui vous ont toujours inspirés ou influencés ?
KM : Pour dire la vérité, je lis tout ce qui me tombe sous la main. Dans mon domaine,
l’agronomie, la bibliographie est diverse et diversifiée et elle est tout le temps en évolution. Et
comme dirait l’autre : tous les secrets du monde sont dans les livres.
Pour ce qui est de la littérature, mes lectures aussi son diverses, je lis en français, en arabe et
en tamazight. Je lis des classiques, j’admire aussi les écrivains contemporains comme
Yasmina Khadra et Kamal Daoud, mais aussi Paolo Coelho et Anna Gavalda. Pour parler
d’inspiration et d’influence, il m’est inévitable de citer Mouloud Mammeri et Rachid
Mimouni. Du fleuve détourné à la colline oubliée, c’est la révolution des jeunes qui restituera
l’honneur à la tribu.
LJO : Votre histoire avec l'écriture ne date pas d'aujourd'hui. Comment avez-vous
mené et vécu cette longue aventure. Que représente-t-elle pour vous ?
KM : C’est depuis la fin des années 90 que j’ai commencé à écrire. C’était de la poésie, des
poèmes en kabyle et en français. Au début, j’écrivais en français et j’ai même publié quelques
uns dans la rubrique "Notre Epoque" du journal Horizon ces temps-là.
Ma véritable prise de conscience fut lorsque j’ai entendu l’histoire de Dda Lmulud. Elle se
résume comme suit : Après avoir édité son livre "La colline oublié" en 1952, il a eu un
échange avec un vieux de son village. Celui-ci lui dit : "Te voila auteur et célèbre, fils de
Taourirt, tu as écrit en français, la langue de l’occupant, et à ta propre langue qu’as-tu fait ?"
Depuis, Dda Lmulud s’est fixé le but de développer et faire connaitre sa langue à lui, et c’est
comme ça qu’il en est devenu le père spirituel. Tamɛamrit, en référence à Mouloud Mammeri,
est le nom de la transcription actuelle de Tamazight. Cette histoire m'a personnellement
interpelé, je me suis posé à mon tour cette question !
C’est sur, l’écriture est une aventure fabuleuse, mais aussi tumultueuse, surtout pour celui qui
n’a pas étudié tamazight. Nonobstant, écrire en sa langue maternelle libère, soulage et donne
de la force au message que l’on veut transmettre car tout y est : les expressions, les locutions
et les mots ; il suffit juste de bien agencer le tout. C’est long mais c’est faisable ; car qui
voudra, pourra.
LJO : Beaucoup assimilent le fait de se mettre à l'édition et sortir un livre à un acte de
militantisme, vu le marché, les difficultés et l'environnement qui le caractérisent.
Pourriez-vous partager avec nos lecteurs votre propre expérience ?
KM : Ecrire c’est bien, ce faire lire c’est mieux, mais il faut éditer d’abord. Alors que les
maisons d’édition fleurissaient, surtout en Kabylie, se faire éditer de prime-à-bord n’est pas
aussi facile qu’on l’imagine. Il faut lutter, défendre son manuscrit et bien sur le financer pour
pouvoir être accompagné par un éditeur. C’est vrai, avant l’officialisation de la langue
amazigh, écrire et éditer dans notre pays été bien un acte de militantisme, car les libertés
étaient muselées. Maintenant, c’est le lecteur qui achète le livre amazigh par militantisme.
Pour mon cas, mon livre est à compte d’auteur.
Après une longue attente, j’ai retiré mon manuscrit chez deux éditeurs qui n’arrivaient pas à
se prononcer. Ayant conçu moi-même la forme du livre, je l’ai déposé chez un imprimeur
professionnel pour l’imprimer. C’est avec l’aide de la famille et de QI Progress, un centre de
développement de la ressource humaine et des compétences sis à Azazga, que j’ai pu produire
un premier lot.
Il m’est aussi très important de citer le grand désire de voir se constituer une commission
locale de lecture et de correction, celle-ci pourra aider les jeunes qui se lancent dans
l’aventure de l’écriture. Que ce soient en tamazight ou en d’autres langues, des commissions
devraient exister quitte à monnayer leurs services. Moi, j’ai abusé du temps d’enseignants de
tamazight pour la correction de mon manuscrit, qu’ils trouvent ici mon entière
reconnaissance.
LJO : Avez-vous des dates ou des rendez-vous proches à donner à ceux qui vous suivent
?
KM : Mon livre est sorti des presses de l’imprimeur début avril. Actuellement, les lecteurs
peuvent le trouver à Azazga et Tizi-Ouzou en attendant une large distribution dans d’autres
wilayas. Mon premier rendez-vous avec le public est prévu le 20 Avril 2019 à la maison de la
culture Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou, le 23 Avril je serai à l’annexe d’Azazga pour une
présentation du livre et une vente dédicace.
LJO : Qu’en est-il de vos projets ?
KM : Après avoir franchi le premier pas, il n’est surtout pas question de faire marche arrière.
Actuellement, je travaille sur plusieurs projets, notamment un recueil de nouvelles en kabyle
qui verra bientôt le jour. Plusieurs thèmes y seront traités : l’amour et la jeunesse entre autres.
Sinon, je viens de terminer une autre pièce de théâtre de Tawfik Al Hakim, adaptée en kabyle.
Celle-ci nécessitera critiques et corrections bien sûr avant de l’éditer.
LJO : Un dernier mot pour conclure….
KM : Pour finir, permettez-moi de vous remercier chaleureusement pour cet espace que vous
m’avez réservé. J’espère que «ZHUR» trouvera sa place au sein de la population, pourquoi
pas la voir montée un jour sur les planches.
Pour conclure, je dirais qu’écrire en tamazight n’est pas aisé, c’est un travail de longue
halène. Mais, le désire d’apporter ma part à l’édifice de notre langue et notre culture en
construction me pousse à transcender tout obstacle. C’est mon cas, et cela devrait être le cas
de tout un chacun, jaloux de cette langue millénaire que nul n’a pus effacer de l’Afrique du
nord, berceau des civilisations. Notre culture orale a vécu et vivra pour des années encore.
"Hier, elle se transmettait de bouches à oreilles, maintenant on la transcrit sur papier", dixit
Ait Menguellet.
Il faut réinvestir la lecture et la promouvoir, il faut se remettre à l’écriture et à la production
des livres. Ibn Khaldoun a mis la production des livres à côté de la production agricole et la
production industrielle dans le progrès de la cité et sa civilisation.
Propos recueillis par Hamza SAHOUI.
BIO EXPRESS :
Karim Missoum, diplômé d’un ingéniorat en agronomie spécialité hydraulique, de
l’institut d’agronomie de l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou (2003), est né
un jour de neige de l’année 76 à Azazga, en Kabylie. Issu du mouvement associatif, il est
bercé dès son jeune âge, comme tous les jeunes de sa génération, par l'ouverture du
champ politique et le combat démocratique qu'avait connu l'Algérie durant les années
90. Passionné de la culture et de la lecture, il a toujours écrit, depuis son adolescence, des
poèmes et des nouvelles, mais ses écrits n’ont pas vu le jour jusqu'à la sortie de son
premier livre «ZHUR».

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