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IPOUTIQUE ET ÉCONOMIEI

T u n i s i e - n i a i i c e

L e s t y l e B e n A U

PAR F r a n ç o is Soudan

Pour son premier voyage officiel en Occident, le président tunisien a voulu


imposer son image de marque : celle d’un homme tranquille, réaliste et sans
complexes. Examen de passage difficile. M ais, sem ble-t-il, réussi.

S ’il M a it démontrer à ceux qui à l’hôtel de ville de Paris, il a écouté sans En se rendant, le 14 septembre, en
en doutaient encore qu’une broncher l’orchestre municipal jouer pèlerinage à Saint-Cyr, en compagnie de
certaine forme de nationa­ l’ancien hymne tunisien au lieu du deux de ses camarades d e la promotion
lisme n’est pas forcément sy­ « Houmat al Houma ». « C ’est un Bourguiba de 1956 — Habib Am m ar et
nonyme de raideur et de froi­ c o u a c », a-t-il simplement murmuré Abdelhamid Escheikh— Ben A li a
deur, la visite officielle en Hans un sourire. Et personne n’a voulu pourtant voulu démontrer que le soud
France de Zine El Abidine voir là un quelconque lapsus significatif de l’authentidté nationale était con^)ati-
Ben A li (du 12 au 15 septembre) peut de la part de son hôte, Jacques G iirac, ble avec une fidélité sans complexes à
être considérée comme un excellent ancien chef d’un gouvernement à qui certains souvenirs (lire encadré page
exercice d’école. L ’olqet de ce type de Tunis reprocha, un moment, de n’avoir 28). Arabisme et O cdden^ ouverture et
voyage, en effet, est rarement de pren­ pas pris la mesure de la révolution tran­ tradition, culture moderniste et culture
dre, sur le champ, des décisions quille du 7 novembre... populaire : sur ces thèmeis dont il se veut
concrètes, mais plutôt de permettre à A preuve aussi, l’insistance avec la­ la synthèse - par oppœ ition au bour-
deux préddents de mieux se compren­ quelle certains hauts fonctionnaires du guibisme sénescent, perçu comme la
dre. D serait donc excessif d’en juger les Quai d’Orsay ont tenu à banaliser, au­ cause majeure du dWorce entre l’Etat et
résultats à l’aune exclusive des contrats près de quelques convives qui n’en de­ la sodété - Ben A li, dûment conseillé,
signés et des engagements souscrits, en mandaient p ^ tant, la prestation en lan­ cherche en effet à construire son image
o u t ^ t la valeur symbolique du séjour gue arabe du président tunisien, lors du de marque extérieure. C elle d’un TVmi-
(vo ir J.A . n“ 1446). dîner de gala du 12 septembre, sous les sien d ’aujourd’hui, bien dans sa peau,
En l’occurrence, les hommes qui ont lambris de l’Elysée. Q a i^ a ie n t-ils que réaliste, sans inhibitions et non pas,
« M » le 7 novembre ont voulu prou­ cet acte de nationalisme linguistique soi­ comme celui d ’hier, angoissé et culturel­
ver qu’ils étaient tout aussi capables que gneusement pesé - et que la radio li­ lement schizophrène.
leurs prédécesseurs d ’entretenir avec byenne a salué comme la démonstration Est-il parvenu à faire passer ce mes­
i’andenne puissance coloniale des rap­ de l’influence bénéfique exercée par sage, thème prindpal d e la campagpe
ports cordiaux. C est, apparemment, Kaddafi sur Ben A li — soit mal ic c e ç ^ médiatique qui a précédé son premier ^
chose faite. Sans complexe ni inhibi­ té ? < Tout cela est normal, expliquait voyage en CKxident ? Com m e tous les.'
tions.’ ainsi un diplomate tunisologue, com- chefs d’Etat - ou presque - de la se­
A preuve sans doute, la sérénité avec prenez-le : la coexistence des deux lan­ conde génération des in d ^ n d a n ces
laqudle Ben A li (si ce n’est certaim gues n’a pas eu en Tunisie un effet très aMcaines (Chadli, Biya, Diouf, arap
membres de son entourage) a accueilli, construcâ et la question nationale arabe M oï, Chissano, Dos Saatos...), Ben A li
le 13 septembre, ce qui demeurera l’uni­ lui tient à cœur ; c’est un geste de politi­ souffre d’un problème d ’image. H n’est \
que petit dérapage de cette visite. Reçu que intérieure et régionale. » guère aisé de succéder au père fonda- /
26 JE U N E AFRIQUE N» 1447 - 28 SEPTEM BRE 1988
Mardi 13 septembre : Mitterrand et
Ben Ali, au balcons reçoivent l'ova­
tion de la communauté tunisienne.

Avec Jacques Chirac, maire de Paris, à


l'hôtel de ville : « un « couac » vite ou­
blié.

s!
î

Saluant Michel Rocard, premier minis­


tre français, accompagné de son
épouse : « Des relations entre amis ».

Garde d'honneur à Coëtquidan, le 14


septembre : un retour aux sources
pour Ben Ali (et ses deux camarades
de la << promotion Bourguiba »).
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POUnOUE ET tCONONUEl

Pèterinage à SainMïyr
L es trois hommes, Zine E l Abidine Ben A li, président de la République, Habib Animar,
ministre d ’Etat, ministre de l’Intérieur et Abdelhamid Escheikh, ministre des Affaires
étrangères sont debout, émus et l’air grave, au milieu de la cour Rivoli, face à la statue
de Marceau. Les élèves officiers de l’Ecole militaire spéciale de Saint-Cyr, casoar au vent et
en grand uniforme, leur rendent les honneurs. L e temps est gris, presque pluvieux sur le
camp de Coëtquidan qui s’étend sur cinquante-deux km^ au sud-ouest de Rennes.
Les trois hommes sont en costume sombre. Près d ’eux, très détendu et vêtu de gris clair, le
ministre français de la Défense Jean-Pierre Oievènem ent et, en uniforme, le général Forray.
Ce dernier, ancien patron de la Force d ’action rapide, puis chef d’état-major particulier de
Mitterrand a été récemment nommé chef d’état-major de l’armée de terre. L ’hôte des lieux,
c’est le général Lafont, commandant des écoles de Coëtquidan.
Ben A li, Ammar et Escheikh étaient, en 1956, parmi les q^uelques élus choisis pour par­
faire leur formation en France, dès l’indépendance de la Tunisie, afin de devenir les premiers
cadres de la nouvelle armée. La vie des élèves officiers à Saint-Cyr n’était pas de tout repos.
D ’autant qu’à l’époque, la plupart des jeunes français qui choisissaient la carrière des armes
savaient qu’ils faisaient
ce choix pour aller se
battre dans les colonies,
tout particulièrement en
Algérie. Malgré la fra­
ternité d’armes si chère
aux militaires et qui visi­
blement a survécu aux
drames de la décolonisa­
iÉ I
tion, le climat, pour les
élèves officiers maghré­
bins d ’alors devait être
difficile. il %
D reste que les trois
responsables politiques
tunisiens ont tenu à visi­
ter le camp de Coëtqui­
dan. Parmi les nouveaux
bâtiments qui accueil­
lent, désormais, l’Ecole
spéciale militaire, l’Ecole
militaire interannes et
l’E cole militaire du
corps technique admi­
nistratif ainsi que le bataillon des élèves officiers de réserve, ils n’ont pu retrouver les lieux où Le général Lafont,
ils vivaient à l’époque. Ben A li l’a d ’ailleurs écrit sur le livre d ’or de l’école : « Je ne retrouve commandant des
écoles de Coëtqui­
plus mon ilôt B, je ne reconnais plus l’ilôt T. Mais Kléber est encore là, le casoar aussi, sym­
dan, remet à Ben
bole de l’étemelle tradition cyrarde à laquelle je suis fier d’appartenir. » Ali un album de
Après un déjeuner rapide au cercle des officiers et une visite au pas de charge au Musée photos. On recon­
du souvenir, les délégations ont procédé, comme il se doit, à l’échange traditionnel de ca­ naît, à la droite du
président tunisien,
deaux. Ben A li a reçu un livre sur l’école, le sabre des élèves, un képi semblable à celui qu’il Habib Ammar et, à
portait lors de son stage et qu’il avait dû rendre. D a lui-même offert un pistolet ancien, un sa gauche, Abdel­
uniforme de l’armée tunisienne et une mosmque. L ’atmosphère est plus détendue qu’au dé­ hamid Escheikh et
but de la visite. Surtout quand le général Lafont remet au président tunisien un album de Jean-Pierre Chevè­
nement, ministre
photographies consacrées à l’école dans les années cinquante. Ben A li, amusé, feuillette l’al­ français de la Dé­
bum et, Am m ar et Escheikh, reconnaît sur les photos certains camarades. fense.
Les Saint-Cyriens étaient ravis d’accueillir chez eux le seul chef d’Etat du monde actuelle­
ment au pouvoir qui soit issu de leur rang. L e dernier en date, avant Ben A li, des présidents
saint-cyriens était le général de Gaulle, le froisième ayant été, près d’un siècle avant lui, le
maréchal M ac Mahon. • H ugo Sada

28 JE U N E A FR IQ U E N° 1447 - 28 SEPTEM BRE 1988


— W H I fI Q I W I f t C O N O ifU l

> teur, encore moins d ’endosser ses ha­ Tripoli et Paris ont donné leur accord de vous connaître depuis 1952 ! - En
bits : le profil se dessine mal, la person­ sur ce point, les réticences sont encore effet. Et vous aviez déjà des problèmes
nalité flotte. sensibles du côté de N ’Djamena, même avec la police... »
Onze mois après le 7 novembre, Ben si l’audience conjointe accordée par Ben Contacts, explications, présenta­
A li n’est pas encore tout à fait sorti de A li et Mitterrand à l’ambassadeur du tions : les dossiers techniques, en fait, se
l’ombre tutélaire projetée par la statue Tchad à Paris, le 14 septembre au soir, a sont effacés devant les relations publi­
du commandeur. Certains de ses pairs, il contribué à apaiser certaines interroga­ ques. La plupart des affaires bilatérales
est vrai, installés depuis bien plus long­ tions. sont toujours en cours de négociation.
temps au pouvoir, n’y sont toujours pas Pour les Tunisiens d’ailleurs, le dos­ Et si l’on insiste tant, dans les deux capi­
arrivés. Comme eux, parce qu’il en a lui sier tchadien n’est qu’un des aspects de tales, sur la « volonté politique » , c’est
aussi souffert et parce que sa personnali­ la quasi-plaidoirie à laquelle ils aiment bien parce qu’entre le plaidoyer de l’un
té ne l’y pousse pas, il se refuse à l’omni­ désormais se livrer chaque fois qu’il est pour une meilleure adaptation de l’aide
présence médiatique de son prédéces­ question de la Libye et de son chef. de la France aux besoins de son pays
seur. Initiative louable, mais qui sup­ Ils ont ainsi entrepris une seconde (revendication classique de tous les
pose, de la part de l’opinion, une longue médiation, moins connue mais sans chefs d’Etat de la « seconde généra­
cure de désintoxication. doute plus aléatoire, entre Tripoli et Le tion » ) et les promesses d ’engagements
Il n’en demeure pas moins qu’auprès Caire. E t puis, a-t-on pu entendre à Pa­ de l’autre (du type « je vous ai com­
de la presse française - comme auprès ris, la Jamahiriya, saisie par une fièvre pris » ) , subsiste une certaine marge.
de François Mitterrand lui-même — ^toute relative, il est vrai) de libéralisme Qu’il appartiendra désormais aux minis­
Zine El Abidine Ben A li est incontesta­ économique, est un « marché à pren­ tres concernés de réduire.
blement bien « passé » . Il n’a certes pas dre » : les Tunisiens ne pourraient-ils En attendant, seule la négociation sur
crevé l’écran et l’aurait-il voulu, que la pas servir d ’ « honnêtes courtiers » ? la seconde tranche du projet de couver­
visite concomittante au Parlement euro­ ture radar de la Tunisie peut être consi­
péen de Yasser Arafat (venu, lui aussi, dérée comme (presque) bouclée — et
de Tunis) l’en aurait empêché. A l’heure encore l’était-elle avant la visite de Ben
du « prime time * , le soir, le Palestinien A li à Paris. N i les requêtes militaires
et la polémique qu’il suscitait ont feiit re­ complémentaires, ni le montant de
cette, beaucoup plus que les détails d’un l’aide budgétaire pour 1989, ni le reli­
b ila té r a u x
voyage officiel sans heurt ni anecdotes quat du problème des avoirs fiançais en
particulières (voir p. 32). Tunisie, ni la question de la diffusion en
n ’o n t p a s é t é r é g l é s .
Mais il est évident que les commen­ direct d’une chaîne de télévision fran­
taires pour le moins fevorables des jour­ çaise n’ont reçu de réponses définitives.
M a is la fo r m e
naux, pour lesquels Ben A li est avant Certes, le premier ministre, Michel
tout celui qui a « sauvé » le havre tuni­ d e c e v o y a g e Rocard, a annoncé que la France trans­
sien du pire - c’est-à-dire, à leurs yeux, formerait en don les cinquante mille
de l’islamisme militant - ont été ac­ o o m p C a il tonnes d’aide alimentaire (b lé ) prévues
cueillis avec une particulière satisfaction pour cette année. Mais l’essentiel n’était
par l’entourage du président. Et celui-ci p lu s q u e l e fo n d » sans doute pas là...
n’a pas caché, à bord du Boeing 727 Venu à Paris avec une délégation res­
« Sidi Bou Saïd » qui, le 15 septembre, treinte (cinq ministres), dont chacun des
le ramenait à Tunis, à quel point il esti­ membres avait été « symboliquement »
mait avoir réussi cette visite. La presse choisi — mais dont aucun ne cherchait à
tunisienne enfin, fort critique il y a un apparaître conune particulièrement
mois encore à rencontre de la « timidi­ « pro fiançais » - finies, les relations
té » française, ne tarit plus d ’éloges sur N i les perspectives maghrébines personnalisées - Ben A li s’est placé à
cet examen de passage. - appréciées positivement à Paris, où mi-chemin entre la « continuité » et la
La forme donc, comptait autant — si l’on estime qu’elles faciliteront le futur « novation ». « C e qui nous lie à la
ce n’est plus - que le fond. François et délicat d ia lo ^ e euro-maghrébin - ni France, ce sont, non p ^ des relations
Mitterrand, qui a promis de se rendre à la politique tunisienne de « recentrage » entre frères, mais des relations entre
Tunis, s’est personnellement investi, au- au sein du monde arabe n’ont réelle­ amis » , précisait le ministre des Affaires
delà de ce qui était protocolairement né­ ment été sujettes à débats. Tout juste y étrangères Abdelhamid Escheikh. Pré­
cessaire, comme il l’avait fait, il y a cinq voit-on parfois une résurgence de la di­ server (ou recouvrer) une identité natio­
ans, avec Chadli Bendjedid, autre « pré­ plomatie préconisée jadis par un certain nale arabe, tout en conservant avec l’ex-
sident successeur >. Mohamed Masmoudi. puissance coloniale des liens d e nécessi­
Beaucoup moins agacé que les A m é­ L ’ancien ministre des Affaires étran­ té plutôt que de cœur est un exercice
ricains par le compagnonnage de route gères, protagoniste essentiel de l’accord difficile. A l’évidence. Ben A li se sent
tuniso-libyen (et même, dit-on, intéressé tuniso-libyen avorté de Jerba, en 1974, beaucoup plus à l ’aise avec un Kaddafi
par les perspectives sur le^uelles il fut d ’ailleurs de toutes les réceptions pa­ qu’avec un Mitterrand. Mais cet
pourrait déboucher), le président fian­ risiennes. D eut même, le 14 septembre, homme, qui est tout sauf un révolution­
çais a fait savoir à son homologue qu’il à l’ambassade de Tunisie, ce bref naire, a le sens très tunisien des équili­
acceptait sans réserves la médiation tu­ échange avec François Mitterrand : bres. Et puis, ne nourrit-il pas le projet
nisienne dans l’affoire du Tchad. Mais si « Monsieur le Président, j ’ai l’hormeur de réconcilier le Français et le Libyen ? •
JE U N E AFRIQUE N° 1447 - 28 SEPTEM BR E 1988 29

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