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LES PAYS D'EUROPE CENTRALE ET ORIENTALE ET L'UNION

EUROPÉENNE : QUELLES STRATÉGIES DE POLITIQUES


BUDGÉTAIRE ET MONÉTAIRE ?
Alexandru Minea et Thierry Montalieu

De Boeck Supérieur | « Mondes en développement »

2014/3 n° 167 | pages 7 à 16


ISSN 0302-3052
ISBN 9782804190439

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DOI : 10.3917/med.167.0007

Les pays d’Europe centrale et orientale et l’Union


européenne : quelles stratégies de politiques
budgétaire et monétaire ?
Alexandru MINEA1 et Thierry MONTALIEU2

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es récentes élections européennes qui se sont déroulées dans un climat
pessimiste et les graves tensions manifestées dans le voisinage est-
européen, soulèvent la question du devenir des pays d’Europe centrale et
orientale (PECO). Ces économies en ont-elles terminé de leur transition
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économique ? L’intégration à l’Union européenne (UE) est-elle (toujours) un


mirage ?
Avant d’essayer de répondre à ces questions, il nous semble pertinent de
proposer un tour d’horizon de la conjoncture macro-économique dans ces
pays. Il ressort assez rapidement de ce panorama qu’au-delà des cycles
conjoncturels, beaucoup de ces économies sont confrontées à de réelles
difficultés structurelles, qu’il s’agisse de leur capacité à générer de la croissance,
ou encore de leur faculté à réorganiser leur système financier. L’intégration à
l’Union européenne a pu servir d’ancrage pour les réformes nécessaires et en
même temps pour connecter ces nouvelles économies de marché à une zone,
certes riche, mais engluée dans une croissance molle. Quelles sont les
perspectives pour les pays intégrés depuis 2004, ou plus récemment et plus
encore, pour ceux qui souhaiteraient l’être dans le futur ?

1. QUEL CONTEXTE MACRO-ÉCONOMIQUE


RÉCENT POUR LES PAYS D’EUROPE CENTRALE
ET ORIENTALE ?
Le panorama conjoncturel des PECO dressé par les institutions internationales
n’est pas favorable après six années de crise en Europe (voir, par exemple,
FMI, 2013a). Concernant la croissance économique, les performances sont

1
Université d’Auvergne, École d’Économie, Centre d’études et de recherches sur le
développement international (CERDI, UMR CNRS 6587). alexandru.minea@udamail.fr
2
Université d’Orléans, Laboratoire d’économie d’Orléans (LEO, UMR CNRS 7322).
Thierry.Montalieu@univ-orleans.fr

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8 Alexandru MINEA et Thierry MONTALIEU

décevantes à l’exclusion des pays baltes (plus de 4% en moyenne annuelle) et,


dans une moindre mesure, de la Pologne et de la Slovaquie (entre 1 et 2%) ;
pour les autres, les résultats 2012 et 2013 font état d’une récession ou d’une
quasi-stagnation (en particulier la Slovénie, la République Tchèque, la Hongrie
et la Croatie). Les projections 2014 se traduisent par une reprise modérée,
certes plus prononcée qu’en Europe de l’Ouest, mais fragile.
Il peut paraître surprenant de parler de tensions inflationnistes dans un tel
contexte, et pourtant, si l’on exclut la Bulgarie et la Lettonie, les autres PECO
s’inscrivent, en moyenne, sur la période 2012-2014, au-dessus du niveau de la
zone euro, qui lui-même est très bas (1,6% en projection 2014). Mais cela
réduit d’éventuelles marges de manœuvre pour assouplir la politique monétaire
pour beaucoup d’entre eux.
La source principale de vulnérabilité provient des comptes courants de la

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balance des paiements et donc du recours au financement extérieur. Si on met
à part les PECO de la zone euro qui connaissent des excédents courants
(Slovaquie et Slovénie) ou un léger déficit (République Tchèque), beaucoup de
pays de la zone orientale de l’Europe sont confrontés à un déficit des
paiements courants peu compatible avec une maîtrise de l’endettement et une
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stabilité du change, notamment pour la Serbie (plus de 10% de déficit en 2012)


pour la Pologne et la Roumanie (déficit supérieur à 3% en moyenne) et plus
ponctuellement pour la Bulgarie ou la Lettonie. La situation est encore plus
délicate pour les pays de la Communauté des États indépendants importateurs
nets d’énergie, avec un déficit courant moyen qui s’établit à plus de 7%. Le
déséquilibre des finances publiques est souvent à l’origine de ces tensions
extérieures.
Pour beaucoup de pays en transition, les taux de chômage restent élevés avec
parfois des perspectives peu encourageantes, au-dessus de la moyenne de la
zone euro (pourtant élevée à près de 11% sur 2012-2014). C’est
particulièrement le cas en Bulgarie, Slovaquie, Serbie, Croatie, voire en
Pologne, Hongrie et pays baltes, à l’exclusion de l’Estonie (de 11 à 25% de la
population active pour ces derniers pays). Au-delà des aléas de la conjoncture,
c’est bien la question de l’existence d’un socle de chômage structurel trop
important qui pose problème.

2. QUELQUES PROBLÈMES STRUCTURELS


2.1 L’évolution de la croissance potentielle
De nouvelles pressions financières sont apparues au printemps 2013 sur les
économies de la zone centrale et orientale de l’Europe, avec des conséquences
négatives sur les perspectives de reprise économique (voir FMI, 2013b). Le
creusement de l’ouput gap négatif dans la sous-région s’est accentué, avec le
ralentissement important de la croissance du PIB : 0,5% en moyenne annuelle
sur 2008-2012, contre les 5% prévus par les conjoncturistes avant la crise
financière. Par ailleurs, l’affaiblissement du potentiel de croissance n’est pas

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une problématique récente pour ce groupe de pays. Un faible régime


d’investissement des entreprises lié à une demande atone pour leurs produits,
des conditions financières dégradées et un besoin de restaurer leurs résultats
comptables s’est installé depuis 2008, après une phase insoutenable de
surinvestissement.
En regardant vers l’avenir, on peut trouver d’autres motifs d’inquiétudes avec
le ralentissement prévisible des financements venant des groupes bancaires
ouest-européens implantés en Europe de l’Est, une croissance atone des
principaux partenaires et un déclin accéléré de la population active.
Renforcer la croissance potentielle devient donc un enjeu vital et exige
plusieurs mesures. La première est probablement l’assainissement du secteur
financier et de son environnement institutionnel. On doit aussi signaler la
nécessaire amélioration de l’intégration des entreprises de la zone aux chaînes

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de valeurs mondialisées (global supply chains) et une amélioration du climat des
affaires au sens large, allant d’une régulation simplifiée à une transparence
accrue. Une réforme du marché du travail pour réduire le niveau de chômage
structurel s’avère également indispensable.
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2.2 Le fonctionnement des systèmes bancaires


Les banques étrangères, essentiellement d’Europe de l’Ouest, jouent un rôle
important dans les systèmes bancaires des économies d’Europe centrale,
orientale et du Sud-Est (zone Central Eastern and South Eastern Europe (CESEE),
pour le FMI), aussi bien en ce qui concerne la propriété du capital que l’origine
des ressources. Cette situation est le fruit de la transition économique quand la
privatisation des banques s’est traduite par un transfert assez systématique de
propriété à des investisseurs étrangers dans le but d’introduire rapidement des
pratiques bancaires modernes et une certaine stabilité financière. Le recours
accru à des ressources extérieures date, pour sa part, du boom de crédit de la
première moitié des années 2000, lorsque le modèle dominant a consisté pour
les groupes bancaires à « nourrir » leurs filiales à l’Est à partir de la gestion
centralisée des financements.
Si la période 2003-2008 s’est révélée plutôt positive en termes d’activités
bancaires accompagnant une croissance économique et une demande de
crédits soutenue, la période 2008-2012 s’est illustrée par une fragilisation des
systèmes liée à une inversion des flux de financements entre filiales et maison-
mère, comme conséquence de la crise bancaire mondiale de l’été 2008.
Dans ce contexte se pose logiquement la question du modèle de financement
des banques installées dans la zone CESEE (voir, par exemple, FMI, 2013c).
En particulier, faut-il abandonner le modèle « centralisé » au profit d’un modèle
de financement décentralisé ? Ou encore, comment concilier l’objectif de
modernisation et de bonne gouvernance des systèmes bancaires est-européens
avec une réduction de la dépendance à l’égard de financements extérieurs
réversibles ?

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Les choix de politique économique doivent faciliter une nouvelle transition


progressive. Au-delà d’une meilleure intégration à une véritable architecture
financière européenne (l’union bancaire et ses mécanismes communs de
supervision et de sécurisation), d’autres obstacles doivent être levés, qu’il
s’agisse de l’amélioration de la qualité des créances bancaires ou du
développement de marchés financiers offrant une alternative crédible à
l’intermédiation bancaire.

3. BILAN DE L’ADHÉSION À L’UNION


EUROPÉENNE ET PERSPECTIVES
Depuis 2004, treize pays ont rejoint l’Union européenne, parmi lesquels onze
sont issus de la zone d’influence de l’ex-URSS ou de l’ex-Yougoslavie. Ces

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derniers ont utilisé la candidature à l’entrée comme un moteur accélérant leur
transition vers l’économie de marché.
Sur quels critères objectifs se sont fondées les adhésions successives et quelles
leçons en tirer pour les candidats actuels (Macédoine), ou potentiels (Albanie,
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Arménie, Azerbaïdjan, Biélorussie, Géorgie, Moldavie, ou encore Ukraine) ?


Une étude réalisée sur les conditions dans lesquelles les négociations
d’adhésion se déroulent, illustre de manière éclairante le processus d’intégration
à l’Union européenne (voir Tamazian & Melikyan, 2010). Il s’agit d’identifier
dans des modèles à variable dépendante qualitative les facteurs les plus
déterminants pour le déclenchement du processus. Ces modèles cherchent à
approcher et à mesurer des concepts tels que l’existence d’une économie de
marché en fonctionnement, la capacité à faire face aux pressions
concurrentielles au sein de l’Union, ou encore la qualité des institutions et de
l’environnement politiques (démocratie, règles de droit, droits de l’homme,
respect et protection des minorités). Autrement dit, les variables explicatives
saisissent les critères d’adhésion progressivement définis par l’UE. L’exigence
du transfert des acquis communautaires, tant sur le plan économique que sur le
plan politique, est la pierre angulaire des négociations fondées sur un ensemble
de textes établis successivement entre 1992 et 1995 par les plus hautes
instances européennes (Traité de Maastricht, Déclaration de Copenhague,
Conseil européen de Madrid). Ce corpus laisse néanmoins une importante marge
d’interprétation pour définir le degré de maturité des candidats à l’adhésion.
Le côté paradoxal des résultats obtenus est de montrer que parmi les adhérents
actuels ou les candidats officiels (Croatie et Macédoine), les conditions
mesurables de démarrage des négociations étaient moins réunies que chez
certains candidats seulement potentiels (Albanie, Arménie, ou encore Géorgie).
Il s’agit ici d’une façon de rappeler que l’appartenance à l’Europe n’est ni une
stricte affaire de géographie, ni même de critérisation objective, mais d’abord
l’affirmation d’une volonté politique par les membres influents de l’Union.
De manière complémentaire, on peut se poser la question d’un premier bilan
de dix ans d’élargissement à l’Est de l’Union européenne. Des études

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concordantes (voir Epstein & Jacoby, 2014) mettent en avant les trois
phénomènes suivants. Tout d’abord, les effets de l’intégration ont été plus
marquants en matière de rattrapage économique (qu’il convient cependant de
relativiser) que dans la dimension politique : les efforts en matière de
démocratisation et de transparences sont encore insuffisants dans de
nombreux PECO. Ensuite, et pour comprendre cette différence, il est aisé de
montrer que, si des instruments de convergence économique existent dans la
boite à outils de l’UE, il n’en va pas de même pour la transposition des
modèles démocratiques de l’Ouest vers l’Est. Enfin, il peut sembler surprenant
de constater que les dernières années de crise économique et financière n’ont
pas fondamentalement altéré le processus de candidature pour de nouveaux
venus : l’Union européenne conserve son pouvoir d’attraction sur le voisinage.
Ces résultats interrogent le cœur de la stratégie d’intégration européenne et sa

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capacité à modifier profondément les équilibres Est-Ouest en Europe et à
traiter la divergence des trajectoires économique, sociale et technologique qui a
opéré pendant des siècles, et ce bien avant la fracture géopolitique du 20ème
siècle.
Les points que nous venons d’évoquer illustrent parfaitement l’actualité et
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l’acuité des problèmes économiques auxquels sont confrontées les anciennes


économies centralisées d’Europe centrale et orientale, aujourd’hui membres de
l’UE, mais aussi les candidats potentiels dans le voisinage européen. Faut-il
toujours parler d’une Europe centrale émergente ? L’accession à l’UE est-elle la
seule option stratégique ? Quelles réformes domestiques sont encore
nécessaires ?
C’est à partir de ces questions qu’à été construit ce dossier thématique consacré
à ce que certains appellent encore l’Europe émergente. Plus particulièrement,
les stratégies macro-économiques mises en œuvre dans les pays d’Europe
centrale et orientale seront abordées sous des angles variés, réunis autour de
trois parties.
1. Compte tenu de l’intégration souhaitée, et en partie réalisée, des
PECO dans l’Union européenne, la première partie de ce dossier thématique contient
deux articles qui proposent des leçons pour les pays en développement et
émergents, à partir des expériences des pays développés. En réponse à la
récente crise financière, de nombreux gouvernements ont adopté des
politiques budgétaires de stabilisation du revenu. L’estimation des éventuels
effets multiplicateurs de ces importants efforts financiers a provoqué un intérêt
accru, à la fois des autorités publiques, et également du monde académique.
Dans leur article, Jean-Louis Combes & Lavinia Mustea proposent une
revue de la littérature autour du concept de multiplicateur budgétaire.
Après avoir rappelé le principe du multiplicateur, notamment par opposition
avec le résultat d’Équivalence Ricardienne de Barro (1974), et réalisé une
typologie des multiplicateurs budgétaires, les auteurs présentent leurs
fondements théoriques. Ils insistent sur l’importance du cadre théorique retenu
(du modèle traditionnel ISLM jusqu’aux récents modèles de type DSGE) pour

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12 Alexandru MINEA et Thierry MONTALIEU

le signe et la magnitude des multiplicateurs budgétaires. Ces différences


trouvent un écho dans une perspective empirique. En effet, la valeur des
multiplicateurs est sensible à la méthode utilisée de calcul : par exemple,
l’approche narrative ou les modèles VAR.
Par la suite, Jean-Louis Combes & Lavinia Mustea se focalisent sur la
littérature foisonnante proposant des estimations des multiplicateurs
budgétaires. Premièrement, ils montrent la présence d’importantes non-
linéarités, principalement liées à la position de l’économie dans le cycle
économique (récessions versus expansions), la position budgétaire (en lien avec
le ratio de dette publique au PIB) et la situation de la politique monétaire (et,
en particulier, la présence d’une trappe à liquidité ou le régime de change en
place). Deuxièmement, les auteurs comparent les pays développés aux pays en
développement et émergents, et montrent, en règle générale, que les

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multiplicateurs sont plus faibles dans le dernier groupe de pays.
Compte tenu de la rareté des études portant sur l’estimation des multiplicateurs
des pays en développement et émergents par rapport aux pays développés,
Jean-Louis Combes & Lavinia Mustea insistent sur l’utilité des travaux sur les
derniers pour procéder à des évaluations concernant les premiers. Selon eux,
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une attention particulière doit être accordée aux spécificités des pays en
développement et émergents, et plus précisément en termes de qualité
institutionnelle et de régimes de change.
L’utilisation de stimuli budgétaires massifs dans de nombreux pays a eu comme
conséquence une forte dégradation des finances publiques : par exemple,
l’augmentation du ratio de dette publique au PIB est de l’ordre de 20-40 points
de pourcentage en moyenne sur les cinq dernières années dans les pays
développés. Dans ce contexte, on peut s’interroger sur la capacité des
gouvernements à mettre en place des politiques contracycliques. Dans son
article, Balázs Égert s’intéresse aux caractéristiques de la politique budgétaire
des pays de l’OCDE au cours des trois dernières décennies. À l’aide de
différentes techniques, permettant de gérer les problèmes d’endogénéité (le
recours à l’estimateur GMM en système) et de modéliser la présence d’effets
non linéaires (l’estimation d’effets de seuil en panel), l’auteur met en évidence
plusieurs résultats intéressants.
D’une part, la politique budgétaire, mesurée par le solde budgétaire total, a été
contracyclique sur la période analysée. Au contraire, la partie discrétionnaire de
la politique budgétaire, approchée par le solde budgétaire ajusté du cycle
économique, a été neutre. Cette neutralité pour l’intégralité des pays de
l’OCDE cache, cependant, d’importantes différences : il existe ainsi des
spécifications qui illustrent une politique budgétaire discrétionnaire procyclique
en République Tchèque, acyclique en Pologne, et contracyclique en Hongrie.
D’autre part, la cyclicité de la politique budgétaire semble sujette à de fortes
non-linéarités, liées à des facteurs réels et monétaires. Le type de poste
budgétaire concerné, à savoir les dépenses ou les recettes, de même que la
dette publique, font partie du premier groupe. Par exemple, Balázs Égert
montre que, alors que les revenus non ajustés (ajustés) du cycle économique

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Les pays d’Europe centrale et orientale et l’Union européenne 13

sont procycliques (acycliques), certaines catégories de dépenses, comme les


subventions, tendent à être plutôt contracycliques. La dette publique exerce
également d’importants effets non linéaires : la politique budgétaire serait
contracyclique pour des ratios de dette relativement faibles (en dessous de 30%
du PIB), mais procyclique en présence d’un ratio de dette suffisamment fort
(supérieur à un ratio de dette au PIB de 90%). Parmi les facteurs monétaires,
l’auteur évoque l’importance du prix de l’immobilier et des cours boursiers ;
une hausse de chacune de ces deux variables rendant la politique budgétaire
davantage contracyclique.
Au total, en plus de proposer des leçons des pays développés pour les pays en
développement et émergents en matière de multiplicateurs budgétaires et de
cyclicité de la politique budgétaire, les deux articles précédents mettent en
exergue la complexité de l’interaction entre facteurs réels et monétaires. C’est

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pour cette raison que les deux dernières parties de ce dossier thématique sont
consacrées aux mécanismes réels, respectivement monétaires, à l’œuvre au sein
des PECO.
2. Dans la continuité des articles précédents, Alexandra Popescu &
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Patrick Vilieu s’intéressent à la relation entre déficit, dette publique et


croissance économique dans les PECO. Les auteurs proposent une analyse en
trois étapes. Tout d’abord, ils évoquent plusieurs arguments théoriques
pouvant expliquer les nombreuses facettes de la relation entre déficit et
croissance économique, en lien notamment avec le type de réaction des agents
(keynésiens ou ricardiens) ou l’agrégat macro-économique considéré
(consommation ou investissement). C’est ainsi qu’ils arrivent à décanter une
variable clé pouvant influencer l’effet du déficit sur la croissance économique, à
savoir le ratio de dette publique.
Ensuite, Alexandra Popescu & Patrick Villieu proposent une analyse fine des
dynamiques récentes des finances publiques dans les PECO, faisant apparaître
plusieurs faits stylisés. Premièrement, bien qu’au début de la crise les stocks de
dette publique étaient généralement inférieurs à ceux des pays de l’UE, les
PECO ont subi depuis 2007 une forte contraction de leur PIB, qui risque
d’augmenter mécaniquement leurs ratios de dette au PIB. Deuxièmement, les
politiques de stabilisation mises en place par les PECO ont engendré des
dynamiques très fortes des dettes publiques, soulevant la question de la stabilité
de leur trajectoire. Troisièmement, la mise en place de politiques procycliques
avant la crise, et l’apparition d’importants spreads de taux depuis, rendent les
finances publiques des PECO très vulnérables.
Enfin, Alexandra Popescu & Patrick Villieu développent une estimation
économétrique de l’influence de la dette publique sur la relation entre déficit et
croissance économique au sein des PECO. Selon le modèle considéré, ils
identifient un seuil de dette publique entre 70% et 80% au-dessus duquel l’effet
du déficit sur la croissance changerait de signe pour devenir négatif. Ces
résultats illustrent la nécessité pour plusieurs PECO d’adopter des politiques

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14 Alexandru MINEA et Thierry MONTALIEU

de maîtrise de la dette publique, au risque de ne plus pouvoir utiliser le déficit


comme un instrument efficace pour soutenir leur croissance économique.
La deuxième contribution portant sur l’économie réelle est celle de Nikolay
Nenovsky & Kiril Tochkov, lesquels étudient la convergence du PIB (par
tête) entre les PECO et l’UE. Cet article s’inscrit dans une prolifique littérature
sur le thème de la convergence au sein de l’Europe, portant sur le PIB, les prix
ou les taux d’intérêt. En particulier, la convergence du PIB a été analysée à la
fois dans la perspective de la β et σ -convergence et également à l’aide de
méthodes inspirées des tests de racine unitaire, avec, cependant, des
conclusions contradictoires. Contrairement à ces études, les auteurs s’appuient
sur des techniques non paramétriques, permettant une meilleure appréhension
de l’intégralité de la distribution des séries de PIB par tête. De plus, l’étude
porte sur un très grand nombre de PECO et la dimension temporelle permet

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d’inclure dans l’analyse la crise financière récente, ainsi que la crise européenne
de la dette qui s’en est suivie.
Nikolay Nenovsky & Kiril Tochkov montrent, en premier, de fortes
divergences du PIB par tête entre les PECO et l’UE dans les années 1990,
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même si cette relation s’inverse dans les années 2000. Deuxièmement, ils
identifient des variables qui soutiennent, ou bien empêchent le processus de
convergence. À titre d’exemple, l’accumulation de capital humain ou la
progression des réformes économiques et la libéralisation sont favorables à la
convergence entre PECO et l’UE, à l’opposé d’un développement trop
important du crédit (dans la période précédant la crise) ou des prix trop
volatiles. Enfin, les auteurs évoquent un changement important dans la nature
de la distribution du PIB par tête des PECO, qui auraient évolué d’une
structure unimodale à une forme multimodale. Ce phénomène, révélant
d’importantes disparités de croissance au sein des PECO, pourra faire l’objet
d’investigations futures, notamment en lien avec le concept de « clubs de
convergence ».
3. En complément des travaux portant sur l’économie réelle dans les
PECO, la dernière partie de ce dossier thématique, également composée de deux
articles, est dédiée aux questions de nature monétaire dans les PECO. Sophie
Brana & Stéphanie Prat s’intéressent à l’influence du choix de la politique
monétaire, à savoir ancrage sur le taux de change ou ciblage d’inflation, sur la
stabilisation de l’inflation en Europe de l’Est. Suite aux profonds changements
politiques, institutionnels et économiques du début des années 1990, les PECO
ont adopté des politiques monétaires et de change en accord avec leur situation
domestique. Cependant, les attaques spéculatives et la crise russe à la fin des
années 1990 ont poussé les PECO à adopter des régimes de change en coin
(ancrage strict du taux de change ou flottement libre avec ciblage d’inflation).
C’est ainsi qu’en 2012 les régimes de change intermédiaires dans les PECO
représentaient autour de 15% de l’ensemble des régimes de change.
À la suite d’une analyse descriptive de l’évolution des régimes monétaires,
Sophie Brana & Stéphanie Prat développent une analyse économétrique

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Les pays d’Europe centrale et orientale et l’Union européenne 15

portant sur 14 PECO sur la période 1990-2013. Des estimations utilisant des
variables instrumentales, permettant de corriger d’éventuels problèmes
d’endogénéité, font ressortir les résultats suivants. D’une part, l’engagement
formel dans un régime de change fixe a amélioré la crédibilité au début des
années 1990 ; sur la première décennie de transition, plus le régime de change
a été flexible, plus le taux d’inflation a été élevé. Mais les bénéfices d’un
maintien d’un régime de change fixe en matière de diminution de l’inflation se
sont progressivement estompés, et sont même devenus négatifs, notamment
en favorisant l’entrée de capitaux. D’autre part, si l’on se réfère aux années
2000, l’inflation ne semble plus répondre au régime de change, mais plutôt aux
politiques de ciblage d’inflation, leur adoption ayant significativement
contribué à diminuer l’inflation. Les déterminants de l’inflation dans les PECO
ont évolué, des variables de transition (indicateur de transition de la Banque

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européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) vers les
indicateurs d’intégration commerciale et financière (par exemple, les taux
d’inflation des autres pays de l’OCDE). De surcroît, si l’inflation des PECO a
diminué par rapport aux années 1990, elle est également plus inertielle et se
rapproche en cela de celle observée dans de nombreux pays industrialisés.
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Si le choix de la politique monétaire semble avoir une importance majeure au


sein des PECO, la littérature récente a également reconnu le rôle crucial du
canal du crédit dans la transmission des mesures de politique monétaire. Dans
leur article, Cristina Badarau & Camelia Turcu explorent le canal du bilan
bancaire, en élargissant les études existantes à l’ensemble des 28 pays de
l’Union européenne. De plus, la longueur de la période étudiée, à savoir 1998-
2012, leur permet de prendre également en compte les effets de la récente crise
financière. S’appuyant sur une analyse en composantes principales, les auteurs
testent quatre hypothèses.
Premièrement, ils vérifient si une moindre liquidité du secteur bancaire et un
faible développement des marchés de financements alternatifs rendent le canal
du crédit bancaire plus efficace. À l’exception de pays comme la Bulgarie, la
Lettonie ou la Croatie, les autres PECO présentent une faible liquidité de leurs
secteurs bancaires, étant, par conséquent, plus exposés aux chocs. Au
contraire, des pays comme la Roumanie, l’Estonie ou Malte bénéficient d’une
bonne capitalisation des secteurs bancaires (hypothèse numéro deux), les
rendant moins vulnérables aux chocs. Concernant la troisième dimension, à
savoir la présence des banques sur les opérations de marché, la République
Tchèque ou la Lettonie seraient plus vulnérables que, par exemple, l’Estonie,
en raison d’une forte implication des banques sur les marché. Enfin, lorsqu’il
s’agit d’analyser la prise de risque des banques dans l’activité d’intermédiation
financière, les pays les plus exposés sont la Lettonie et la Roumanie,
contrairement à la Slovaquie et à la République Tchéque, où la présence des
risques est moindre.
À la suite de cette analyse, Cristina Badarau & Camelia Turcu agrégent les
scores pondérés pour chaque critère, afin de dégager une note globale par pays.
Si des pays comme l’Estonie, la Bulgarie ou Malte seraient les moins exposés

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16 Alexandru MINEA et Thierry MONTALIEU

au canal du bilan bancaire, notamment grâce à une bonne capitalisation et à un


risque faible, des pays comme la Pologne ou la Hongrie se trouveraient
davantage affectés par un choc à travers leurs systèmes bancaires. Ces résultats
pourront faire l’objet de développements futurs portant sur l’estimation des
effets associés à un élargissement de l’Union (monétaire) européenne à d’autres
PECO.

BIBLIOGRAPHIE

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