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Rome antique
. Carthage
Localité de Tunisie, sur la côte est du golfe de Tunis, faubourg résidentiel de Tunis.
La Carthage punique
Histoire
Phéniciens et Carthaginois
Désormais, Carthage domine toute la Méditerranée occidentale et les grandes îles, laissant à ses alliés étrusques le contrôle de l'Italie
continentale, comme en témoigne une feuille d'or trouvée à Pyrgi (au nord de Rome), sur laquelle est portée une dédicace du roi
étrusque à Astarté, après la victoire d'Alalia (535) sur les Grecs. Cependant, Gélon, tyran de Gela et de Syracuse – devenue la ville la
plus prospère du monde hellénique – et allié du puissant Théron d'Agrigente, ne tarde pas à reprendre l'offensive. Battue à Himère en
480, Carthage réussit cependant à sauvegarder les territoires convoités, dont le golfe de Gabès, mais doit payer une lourde indemnité
de 2 000 talents. Après leur victoire d'Himère, les Grecs poursuivent leur progression en Méditerranée et remportent des victoires durant
les guerres médiques contre les Perses et leurs alliés phéniciens et contre les Étrusques d'Italie. Dès lors, l'arrière-plan africain prend de
l'importance dans la politique de relance économique engagée par Carthage.
La cité prend conscience de la précarité d'une économie entièrement subordonnée au commerce méditerranéen et engage une politique
agricole. À défaut d'informations directes, l'étude de l'iconographie des stèles, des épigraphes, et la lecture du Traité d'agriculture, en
vingt-huit volumes, rédigé au IVe s. par Magon, peut éclairer cet aspect de la civilisation carthaginoise. La chora, c'est-à-dire la cité
proprement dite, assure son autosuffisance alimentaire, notamment en produits d'arboriculture (olives, raisins, figues, amandes) et en
viande. La Megara, quartier périphérique au nord de Carthage, abrite une agriculture intensive avec des potagers et des jardins séparés
par des clôtures en pierres sèches, des haies vives d'arbustes épineux, de canaux, nombreux et profonds. Au-delà de la chora, les
plaines du bassin de la Medjerda et de l'oued Miliane sont consacrées au blé. Le palmier-dattier, souvent représenté sur les stèles
votives et les monnaies, a peut-être eu une fonction religieuse, alors que la grenade carthaginoise est si réputée que les Romains la
dénomment mela punica. Entre autres instruments agricoles, on utilise pour le dépiquage le plostellum punicum, sorte de traîneau en bois
pourvu de roulettes dentées, des araires munis d'un long mancheron recourbé accroché à un manche, avec, à l'extrémité, une poignée
à angle droit et un soc dans la partie inférieure, comme on en trouve encore en Afrique. Le fourrage est transporté dans des chars à
roues pleines, équipés de montants ouverts. Les rendements céréaliers sont modestes, les meilleures terres étant consacrées à la vigne
et à l'olivette. Le territoire agricole ne se limite plus à une étroite bande côtière, de surcroît menacée par les Libyens, qui exigent un
tribut, mais couvre la majeure partie de la Tunisie.
L'intérêt que porte Carthage à l'Afrique occidentale, dans la seconde moitié du Ve s., est attesté par le développement de Sabratha et de
Leptis Magna, débouchés de pistes transsahariennes. Les Garamantes et les Nasamons installés au sud du golfe de Syrte, à trente
jours de marche de la côte, sont les intermédiaires entre le « Pays des Noirs » et Carthage. Ils connaissent aux Ve et IVe s. un
accroissement démographique et un essor agricole qui ne sont pas sans relation avec l'influence des établissements carthaginois du
littoral. Carthage reçoit des escarboucles et probablement de l'ivoire, des peaux, et des esclaves capturés par les Garamantes. Le
transport de l'or est moins probable. Le redressement de Carthage est tel que, à la fin du siècle, elle reprend les hostilités, profitant des
dissensions grecques. Elle met à sac Sélinonte, Himère, Gela, et occupe les territoires à l'ouest du fleuve Halycus. Jamais l'Empire
punique n'a été aussi étendu. Cependant, en 310, Agathocle, tyran de Syracuse, réussit à débarquer au sud du cap Bon, dans le nord-est
de la Tunisie actuelle, avec 14 000 hommes, et, durant trois années, dévaste un grand nombre de cités puniques, avant de regagner
Syracuse. Carthage reste sauve, mais la preuve est désormais faite que son territoire est loin d'être inaccessible.
Pendant qu'elle combat les Grecs, Carthage s'allie avec Rome, comme en témoignent les accords d'échanges de 508, de 348 et de
306, ainsi que le traité de défense mutuelle signé en 279. Les intérêts des deux États semblent convergents. Mais une fois les Grecs
évincés de la Méditerranée occidentale, au milieu du IIIe s., les impérialismes romain et punique se retrouvent face à face. « Les Romains,
selon l'historien grec Polybe, constatant que les Carthaginois avaient étendu leur domination non seulement sur les rivages de l'Afrique,
mais encore sur une bonne partie de l'Espagne et qu'ils étaient en outre maîtres de toutes les îles de la mer Tyrrhénienne, songeaient
avec inquiétude que, si la Sicile tombait également entre leurs mains, ils auraient là des voisins excessivement encombrants et
dangereux, par lesquels ils se trouveraient encerclés, et qui pourraient menacer directement toutes les parties de l'Italie. »
Civilisation
L’économie de Carthage
Les conceptions de l'économie sont très simples. L'État prélève des taxes sur les importations et les exportations, mais ne pratique pas
de politique commerciale spécifique.
La monnaie, dont l'étalon est phénicien, est apparue tardivement, au IVe s. Dans la première phase de son développement, Carthage
importe des denrées alimentaires de ses colonies. Mais ce sont les métaux précieux de la péninsule Ibérique, particulièrement l'argent,
qui constituent l'essentiel de ses importations. Ils sont destinés à l'artisanat et à la fabrication des monnaies. De la Berbérie, la cité
carthaginoise obtient des produits agricoles et des animaux – autruches, éléphants de Numidie, singes, perroquets, fauves – qu'elle
revend en Méditerranée, notamment pour les jeux d'amphithéâtre. De nombreuses mosaïques, comme celles d'Hippone au IVe s.,
représentent des scènes de capture de fauves. Elle exporte des produits d'artisanat – tapis, parfums, étoffes de couleurs, cuillères,
tuyaux en terre cuite, etc. – et de pacotille, dont de petits masques en pâte de verre.
La vie religieuse
La civilisation et les mœurs ont gardé une forte empreinte orientale dont témoigne particulièrement la vie religieuse. Le panthéon est
dominé par Baal Hammon, le dieu mâle suprême, très souvent associé à Tanit, la divinité féminine surnommée « face de Baal ».
L'épithète Hammon (« ardent ») pourrait évoquer le soleil ou le brasier sur lequel s'accomplissent les sacrifices. Contrairement à celui de
Baal et de Melqart, le culte de Tanit n'est pas d'origine phénicienne mais africaine. Divinité de la Fécondité, elle semble surtout liée à un
rite agraire. Elle porte aussi le nom africain d'Ashtart et prend le pas sur Baal au Ve s., au moment où Carthage se tourne vers
l'agriculture et semble renouer avec son contexte africain. Les Carthaginois croient en l'existence de forces maléfiques contre lesquelles
l'homme mène un combat inégal, et en la possibilité d'agir à distance sur les choses. La maladie est considérée comme le résultat d'une
absence de protection divine et appelle l'intervention d'un guérisseur. Eshmoun, le dieu guérisseur, réside dans le temple le plus riche,
au sommet de la colline de Byrsa. Ils croient aussi à la divination : il semble qu'Hamilcar ait attaqué Syracuse parce qu'un devin lui avait
prédit qu'il dînerait le soir même dans la ville. La vie se poursuit dans l'au-delà ; le mort, pour éviter qu'il devienne un esprit malfaisant,
est l'objet de certains soins : lavé, épilé, maquillé, habillé et paré, il est incinéré et enterré, avec mobilier et provisions, dans une fosse
pour les pauvres et dans un caveau pour les riches. Le sacrifice, humain ou animal, est l'acte essentiel du culte punique. Le sacrifice
d'enfants effectué dans des sanctuaires spéciaux, les tophets, choque beaucoup, mais était une pratique courante dans les sociétés
antiques, où il accompagnait souvent l'accomplissement d'un vœu.
Comme en Phénicie, la prostitution sacrée est aussi pratiquée. Sous l'influence des résidents grecs (IVe s. avant J.-C.), Carthage a
adopté le rite de l'incinération des morts ; de même, le culte de Déméter et de Coré a été institué avec succès jusqu'à la fin de
l'Antiquité.
Littérature punique
Divers témoignages, surtout extérieurs, confirment que les Puniques avaient élaboré une riche littérature : annales, chroniques,
ouvrages de droit, d'histoire, de géographie, d'agronomie, textes religieux, poèmes mythologiques, etc. On sait, en effet, par les
écrivains grecs et latins, que Carthage avait constitué d'immenses bibliothèques, dont la plupart ont disparu lors de la destruction de la
cité. De toute cette littérature, les quelque 7 000 inscriptions puniques connues ne nous ont conservé que d'infimes vestiges : il s'agit
avant tout d'inscriptions votives et, à un moindre degré, funéraires, mais on possède aussi de longs tarifs sacrificiels, des textes
commémoratifs, etc. Cependant, des spécimens de textes proprement littéraires sont connus en transcription latine (ainsi dans
le Poenulus de Plaute) et en traduction, ou adaptation, grecque et latine, comme c'est le cas du Serment d'Hannibal, transmis par Polybe,
du célèbre Périple d'Hannon ou du Traité d'agriculturede Magon, non dépourvu de qualités littéraires.
L’art carthaginois
Pendentifs
carthaginois
Dans le monde punique, la limite est difficile à fixer entre art et artisanat ; aussi considère-t-on comme œuvres d'art tous les objets,
sacrés ou profanes, magiques ou apotropaïques, en métal, pierres précieuses, terre cuite, ivoire ou os, que sont bijoux, amulettes,
figurines et scarabées, auxquels il faut ajouter les masques et les stèles.
Les masques semblent ne rien devoir à la tradition syro-palestinienne. Ce sont des têtes avec ou sans amorce de buste, présentant
parfois un aspect négroïde, et dont le visage, plus ou moins grotesque, contraste avec l'impassibilité ou la jovialité des protomés.
Accrochés dans les demeures et dans les tombeaux, ils remplissent une fonction apotropaïque, mais peuvent aussi, reproduits en
miniature, servir de parures ou d'amulettes. Les bijoux constituent la production la plus abondante, la plus représentative et, sûrement,
la plus attrayante de l'art punique.
Les traditions syro-palestinienne, phénicienne et grecque se combinent au génie punique en une profusion de genres : pendants
d'oreilles, bracelets, bagues, pendentifs, colliers, pendeloques et amulettes réalisés au repoussage ou au grènetis. Les plus anciens
remontent à la seconde moitié du VIIe s. De très bonne facture, ils se caractérisent par un décor granulé, le filigrane étant utilisé en
bordure. Les productions postérieures sont pauvres, tant au niveau de la facture que des matériaux.
Quant aux stèles, en pierre ou en grès, de dimensions variables (entre 0,20 et 1 m), elles portent, gravé, un décor géométrique,
anthropomorphe ou animal. Elles sont particulièrement riches entre les IIIe et IIe s. et se trouvent en grand nombre dans les tophets, où
elles signifient l'accomplissement d'un vœu.
Archéologie
L'exploration de Carthage (quartiers d'habitations sur la colline de Byrsa et dans la ville basse, ports et tophet), menée sous l'égide de
l'Unesco, a enrichi l'archéologie punique ; quant à Kerkouane (à la pointe du cap Bon), qui a été détruite en 256 avant J.-C. par Regulus,
elle a livré ses temples, ses habitations et quantité d'objets. La civilisation punique, tout en gardant de fortes traditions phéniciennes,
s'en distingue nettement. Motyé en Sicile et les colonies puniques de Sardaigne reflètent fidèlement la culture punique.
DOCUMENTS ASSOCIÉS
MÉDIAS
ENCYCLOPÉDIE
Adherbal. Amiral carthaginois, qui battit la flotte romaine à Drepanum...
Baal Hammon. Grand dieu de Carthage, que les Grecs assimilèrent parfois à Apollon, à...
Barcides. les Barcides. Famille carthaginoise puissante au temps des guerres puniques et dont...
Byrsa. Citadelle de Carthage.
Carthagène. Ville d'Espagne, sur la Méditerranée, au S. de Murcie...
Caton. Homme d'État romain...
César. Jules César. Homme d'État romain...
Didon. Princesse tyrienne, connue par plusieurs traditions, que Virgile a immortalisée...
éléphant. Grand mammifère (éléphantidé) herbivore à peau épaisse, aux membres en piliers, à...
esclavage. État, condition d'esclave.
Espagne. État du sud-ouest de l'Europe, l'Espagne est baignée à l'ouest par l'océan Atlantique et à l'est par la Méditerranée.
Occupant la majeure partie de la péninsule...
Hadrumète. Ancienne ville d'Afrique, ancienne colonie phénicienne, sujette de Carthage.
Hamilcar. Général carthaginois, dont la défaite à Himère entraîna pour Carthage la...
Hannibal. Général et homme d'État carthaginois...
Hannon le Grand. Général et homme d'État carthaginois (IIIe s. avant J.-C.).
Hannon. Roi et navigateur carthaginois qui aurait mené une expédition sur...
Hasdrubal Barca. Général carthaginois...
Hasdrubal. Général carthaginois...
Himère. Ancienne ville de la Sicile septentrionale sur la mer Tyrrhénienne, à l'embouchure...
Himilcon. Navigateur carthaginois du Ve s. avant J.-C., qui atteignit peut-être la Bretagne et...
Hippone. Ancienne ville de Numidie, sur la Méditerranée (près d'Annaba), colonie de...
Leptis Parva. Ancienne cité d'Afrique du Nord, fondation phénicienne, tributaire de Carthage, qui...
Lilybée. Ancienne ville de Sicile, forteresse carthaginoise formée avec les habitants de...
Magon. Nom de plusieurs généraux carthaginois, et notamment du fils d'Hamilcar...
Masinissa. Roi des Numides...
Mercenaires (guerre des). Guerre qui opposa, de 241 à 238 avant J.-C., Carthage à ses mercenaires révoltés...
Métaure. Fleuve côtier d'Italie, tributaire de la mer Adriatique ; 110 km.
Moloch. Prétendue divinité cananéenne, mentionnée dans la Bible en corrélation avec...
peste. Maladie infectieuse contagieuse, endémique et épidémique, due au bacille de...
Phalaris. Tyran d'Agrigente (vers 570-554 avant J.-C.).
Phéniciens. Peuple sémitique de l'Antiquité.
puniques (guerres). Les trois guerres qui opposèrent Rome à Carthage entre 264 et...
Regulus. Marcus Atilius Regulus. Général romain.
Rome antique [des origines à 264 avant J.-C.] .Histoire de la Rome primitive, des origines à la conquête de l'Italie (jusqu'en
264avant J.-C.)
Sardaigne. Île et région d'Italie...
Scipion Émilien. Fils de Paul Émile, il entra par adoption dans la...
Scipion l'Africain. Général romain...
Sicile. Grande île d'Italie, dans la Méditerranée, constituant une région...
Sophonisbe. Reine de Numidie...
Syphax. Roi des Masaesyles de Numidie occidentale...
Tanit. Dénomination punique de la déesse Ashtart.
Tébessa (monts de). Montagnes d'Algérie et de Tunisie, entre les monts des Nemencha...
Tyr. Ancienne capitale d'un royaume cananéen, puis phénicien, édifiée sur un îlot à...
Utique. Ville antique d'Afrique du Nord, au N.-O. de Carthage.
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CHRONOLOGIE
814 avant J.-C. Fondation de Carthage par les Phéniciens (date traditionnelle).
vers 535 avant J.-C. Alliés aux Carthaginois, les Étrusques sont vainqueurs des Grecs au large d'Alalia (Corse).
264/241 avant J.-C. Première guerre punique ; la victoire de Rome enlève la Sicile, la Sardaigne et la Corse aux Carthaginois.
240/238 avant J.-C. Un prince numide, Naravas (Naarbaal ?), intervient aux côtés d'Hamilcar pour écraser les mercenaires
carthaginois révoltés.
218/201 avant J.-C. Deuxième guerre punique ; Carthage, vaincue, cède ses possessions espagnoles, livre sa flotte et ses
éléphants.
203 avant J.-C. Masinissa (ou Massinissa), roi des Massyles et allié des Romains, fait prisonnier Syphax, roi des Masaesyles et
allié de Carthage.
vers 193/152 avant J.-C. Masinissa (Massinissa) entreprend d'annexer des zones des territoires dépendant de Carthage
(Tripolitaine, Tunisie centrale).
149 avant J.-C. Face aux empiétements constants de Masinissa (Massinissa), Carthage riposte militairement ; c'est le début de la
troisième guerre punique, qui durera jusqu'en 146 avant J.-C.
146 avant J.-C. Les troupes romaines de Scipion Émilien s'emparent de Carthage, qui est détruite et rasée ; son territoire devient
une province d'Afrique, dont les limites avec le royaume numide sont soulignées par un fossé.
123/122 avant J.-C. Tribunat de Caius Sempronius Gracchus ; il fait décider la fondation de colonies sur le territoire de Tarente, de
Carthage et de Corinthe, et est à l'origine d'une loi frumentaire garantissant aux prolétaires du blé à bas prix.
439 Le roi vandale Geiséric s'empare de Carthage.
698 Les Arabes prennent définitivement Carthage.
1270 Lors de la huitième croisade, le roi de France, Louis IX, parti d'Aigues-Mortes, débarque à Carthage ; son frère, Charles
d'Anjou, met fin à la croisade et conclut un traité de commerce avantageux avec le souverain hafside al-Mustansir.
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