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Dimitris Sakellariou
ERES | « Psychanalyse »
2013/3 n° 28 | pages 21 à 24
ISSN 1770-0078
ISBN 9782749238890
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.inforevue-psychanalyse-2013-3-page-21.htm
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Freud avait pourtant identifié dès ses premiers textes 2 le lien qui pouvait exister
entre jouissance du symptôme et transfert. Si l’on ajoute à cela la surdétermination
du symptôme, la question qui surgit est celle-ci : comment envisager un terme, une
fin satisfaisant à une cure analytique ? On sait que, contrairement à Ferenczi, Freud
n’était pas partisan de l’acharnement thérapeutique 3. La question néanmoins de
« l’analyse à fond » reste capitale, au moins pour ceux qui prétendent occuper cette
place de l’analyste et conduire des cures. Dans son écrit « Die endliche und die unend-
liche Analyse » (1937), Freud identifie un point de butée majeur empêchant de
conclure de façon assurée à un postulat de fin possible.
Ce point de structure concerne à coup sûr le rapport entre les sexes. L’analyse
n’apprend pas comment on est homme ou femme face à l’Autre sexe. Chaque parlêtre
doit y faire face sans le secours d’un discours établi 4. Lacan précise dans Télévision
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que les choses de l’amour se distinguent de tout type de lien social 5. En l’absence d’un
lien social qui assurerait la symbiose des corps et des jouissances, il n’existe qu’une
suppléance : le symptôme. La fable de l’harmonie des rapports entre les sexes n’a pas
survécu à l’avènement du discours analytique 6. Lacan, dans une tentative de trouver
une issue à cette impasse, se centrera, partant de la relation prégénitale, sur une redé-
finition de l’objet a. Cet objet prend une consistance qui vient recouvrir l’inexistence
du rapport sexuel dans le fantasme. Quel est donc l’interêt de ce déplacement qu’opère
Lacan d’une impasse (le roc freudien de la castration) vers cette autre impasse pour le
sujet qui est celle du fantasme ? C’est qu’en posant le principe qu’il est possible de tra-
verser celui-ci, il pose en même temps le postulat d’une passe qui dégage une possibi-
lité de conclure une analyse de façon satisfaisante pour le sujet et... quelques autres.
En effet, au contraire de Freud, Lacan s’appuie sur l’impossible, qui est le nom de la
catégorie du réel, aussi bien pour le fantasme que pour le symptôme.
Côté fantasme
L’ancêtre de cet objet, l’objet perdu freudien, est à jamais perdu, à la fois par
l’Autre et par le sujet. Cet objet, le sujet va le situer dans l’Autre et instituer ainsi le fan-
tasme. Cet objet vient sustenter le sujet au point même de sa défaillance (défaillance
normale liée au signifiant) et condense son être de jouissance comme reste (chute) de
la division subjective. Cet objet a dans la formule $ ◊ a fonctionne comme un leurre
(la carotte) face au sujet. Ce processus renforce l’aliénation à l’Autre et à sa demande,
dont le sujet reste dépendant. Le transfert pourrait en être contaminé et s’installer
dans l’inertie de la répétition, reproduisant sans fin cette impasse du sujet. Sa mécon-
naissance du lieu d’où il désire se perpétue. La pente « naturelle » du transfert consiste
5. Notamment l’incompatibilité avec le discours capitaliste, voir « Télévision », dans Autres écrits, Paris,
Le Seuil, coll. « Le champ freudien », 2001.
6. Exception faite de l’IPA qui croit encore… à la pulsion génitale.
7. S. Freud, « Le mode de formation du symptôme », dans Introduction à la psychanalyse, Paris, PBP,
p. 343, 352.
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à aller dans le sens des identifications idéales. L’analyste (s’il parvient à être à la hau-
teur de sa tâche) comme désir en acte vise plutôt à une désidentification, afin qu’il
soit déchu de la position de l’idéal où l’analysant le place, tout en soutenant le désir
de savoir à la place du désir de l’Autre 8.
Identification au symptôme
Restent bien sûr des questions sur l’après-analyse et l’après-passe. Nous ne retien-
drons ici qu’une d’entre elles : que devient le symptôme ? Plus précisément, qu’est-ce
qui change dans le rapport du sujet à son symptôme ? N’oublions pas que le symptôme
8. J. Lacan, « Proposition d’octobre 1967 sur le psychanalyste de l’École », Scilicet, n° 1, Paris, Le Seuil,
1968, p. 22.
9. Dès le séminaire sur l’angoisse Lacan parle de l’objet a comme reste de la division subjective donc à
consistance purement logique.
10. J. Lacan, « Proposition du 9 octobre1967 sur le psychanalyste de l’École », op. cit., p. 25.
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diffère des autres formations de l’inconscient en ceci qu’il ne se réduit pas à son inter-
prétation. La surprise est venue par l’introduction d’une thèse lacanienne radicale
qui prend à rebours toutes les conceptions psychanalytiques antérieures sur le deve-
nir du symptôme en fin de cure. Le 16 novembre 1976, dans L’insu que sait de l’Une-
bévue s’aile à mourre, il déclare : « En quoi consiste ce repérage qu’est l’analyse ? Est-
ce que ce serait ou non s’identifier, tout en prenant ses garanties d’une espèce de
distance à son symptôme ? »
L’on connaissait jusqu’alors les trois identifications de Freud, la thèse sur l’iden-
tification à l’analyste de M. Balint ainsi que l’identification au surmoi de l’analyste
selon E. Glover. Les deux dernières sont catégoriquement récusées par Lacan. Il
convient également d’opposer l’identification au symptôme à toute identification à
l’idéal, car il ne devient possible de l’aborder qu’à partir de la traversée des identifi-
cations et la chute de celles-ci. L’identification au symptôme transforme celui-ci de
l’avoir à l’être. Le sujet n’a pas de symptôme, il est son symptôme. Nous dirons avec
Pierre Bruno que la condition de cette identification est « de l’avoir perdu comme
objet de jouissance 11 », ce qui suppose une dévalorisation de cette jouissance. Cette
version s’oppose à toutes les versions précédentes, la version père (ou père-version), la
version femme comme symptôme de l’homme, la version célibataire, voire la version
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11. P. Bruno, « L’identification au symptôme », dans La passe, Toulouse, Presses universitaires du Mirail,
2003.