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PROCÉDÉS CHIMIE - BIO - AGRO

Ti452 - Opérations unitaires. Génie de la réaction chimique

Procédés industriels de base


en chimie et pétrochimie

Réf. Internet : 42329 | 3e édition

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Opérations unitaires. Génie de la réaction
chimique
(Réf. Internet ti452)
composé de  :
Industrialisation des procédés et usine du futur Réf. Internet : 42602

Innovations en génie des procédés Réf. Internet : 42487

Modélisation en génie des procédés Réf. Internet : 42328

Thermodynamique et cinétique chimique Réf. Internet : 42323

Transfert de matière en génie des procédés Réf. Internet : 42326

Catalyse et procédés catalytiques Réf. Internet : 42325

Opérations unitaires : évaporation et séchage Réf. Internet : 42316

Opérations unitaires : techniques séparatives sur membranes Réf. Internet : 42331

Opérations unitaires : distillation et absorption Réf. Internet : 42324

Opérations unitaires : extractions fluide/fluide et fluide/ Réf. Internet : 42332


solide

Opérations unitaires : séparation de phases, décantation Réf. Internet : 42484


et filtration

Opérations unitaires : tri et traitement des liquides et des Réf. Internet : 42446
solides

Opérations unitaires : traitement des gaz Réf. Internet : 42485

Opérations unitaires : agitation et mélange Réf. Internet : 42486

Réacteurs chimiques Réf. Internet : 42330

Électrochimie Réf. Internet : 42322

Génie des procédés et protection de l'environnement Réf. Internet : 42327

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Opérations unitaires. Génie de la réaction
chimique
(Réf. Internet ti452)

dont les exper ts scientifiques sont  :


Jean-Claude CHARPENTIER
Professeur et directeur de recherches CNRS au Laboratoire Réactions et Génie
des Procédés à l'ENSIC-Nancy, Ancien directeur de l'ENSIC-Nancy, de l' ESCPE
Lyon et du département Sciences pour l'ingénieur du CNRS, Past-président de
la Fédération européenne de génie chimique (EFCE)

Jean-Pierre DAL PONT


Président de la Société Française de Génie des Procédés (SFGP), Secrétaire
Général de la Fédération Européenne du Génie Chimique (EFCE), Président de
la Société des Experts Chimistes de France (SECF)

Jean-François JOLY
Ingénieur de l'École supérieure de chimie industrielle de Lyon, Ingénieur-
docteur de l'Université de Lyon, Directeur expert à l'IFP Énergies Nouvelles

Olivier POTIER
Responsable du Groupe Thématique de la Société Française de Génie des
Procédés (SFGP), Laboratoire Réactions et Génie des Procédés (CNRS UMR
7274, Université de Lorraine, Nancy), École Nationale Supérieure en Génie des
Systèmes et de l'Innovation (ENSGSI - Université de Lorraine)

Marie-Odile SIMONNOT
Professeur en Génie des procédés à l'Université de Lorraine (Nancy)

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Pierre AUDEBERT Raphaël HUYGHE Pascal METIVIER


Pour l’article : J5820 Pour l’article : J5210 Pour les articles : J5720 – J5780

Patrick BELLIARD Jean-François JOLY Fabien MIOMANDRE


Pour l’article : J5860 Pour les articles : J5680 – J5915 Pour l’article : J5820

Nicolas BOUDET Émile KUNTZ Ludovic PINARD


Pour l’article : J5200 Pour l’article : J5750 Pour l’article : J1218

Christophe BOYER Roger LAMARTINE Jean-Pierre QUENTIN


Pour l’article : J5500 Pour l’article : J5800 Pour l’article : J5850

Raymond COMMANDEUR André LANTZ Claude RAIMBAULT


Pour l’article : J5610 Pour l’article : J5670 Pour l’article : J5460

Jacques DUGUA André LE GALL Magalie ROY-AUBERGER


Pour l’article : J5630 Pour l’article : J5480 Pour les articles : J5200 – J5210

Gilles FOURNIER Gilles LEFEBVRE Jean-Pierre SCHARFF


Pour l’article : J5915 Pour l’article : J5460 Pour l’article : J5800

Fabrice GIROUDIÈRE Philibert LEFLAIVE Jean-Louis SENGEL


Pour l’article : J5480 Pour l’article : J5920 Pour l’article : J5690

Sébastien GONNARD Philippe LOLL Michel SIBONY


Pour l’article : J5482 Pour l’article : J5890 Pour l’article : J5630

Constantin GOSSELIN Régis LOZE Cécile THOMAZEAU


Pour l’article : J5925 Pour l’article : J5620 Pour l’article : J5500

Matteo GUIDOTTI Julia MAGNÉ-DRISCH Bernard TORCK


Pour l’article : J1218 Pour l’article : J5482 Pour l’article : J5550

Émmanuelle GUILLON Pierre MARION Laurent WATRIPONT


Pour l’article : J5920 Pour les articles : J5200 – J5210 Pour l’article : J5910

Michel GUISNET Roby MARSEU


Pour les articles : J1217 – J1218 Pour l’article : J5440

Thierry HAMAIDE Ernest MARÉCHAL


Pour les articles : J5830 – J5832 Pour l’article : J5831

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VI
Procédés industriels de base en chimie et pétrochimie
(Réf. Internet 42329)

SOMMAIRE
Réf. Internet page

Gazéiication du charbon J5200 9

Liquéfaction du charbon (CTL) J5210 13

Gazéiication des résidus pétroliers par le procédé Shell J5440 17

Vapocraquage des hydrocarbures J5460 21

Production des gaz de synthèse par vaporeformage J5480 25

Traitement du gaz naturel J5482 29

Hydrogénation des hydrocarbures J5500 35

Hydratation des oléines J5550 41

Chloration et oxychloration des composés aliphatiques J5610 43

Chloration et oxychloration des composés aromatiques J5620 47

Chloration des métaux et carbochloration des oxydes J5630 49

Fluorations J5670 51

Alkylation des oléines par les paraines J5680 53

Alkylation des composés aromatiques J5690 57

Nitration des composés aromatiques J5720 61

Hydroformylation des alcènes (ou oléines) J5750 63

Carbonylations J5780 67

Estériication J5800 69

Procédé sol-gel de polymérisation J5820 73

Polymérisations en chaîne. Mécanismes J5830 77

Polymérisations en chaîne. Procédés J5832 83

Polycondensation, polyaddition et modiication des polymères J5831 89

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VII
Polycondensation des polyesters saturés J5850 95

Polycondensation des polyesters insaturés J5860 99

Oxyalkylations. Oxyéthylations et oxypropylations J5890 101

Isomérisation des paraines J5910 105

Reformage catalytique J5915 107

Catalyse bifonctionnelle redox-acide. Applications en rainage du pétrole et J1217 111


pétrochimie
Catalyse bifonctionnelle. Application en valorisation des alcanes légers et en chimie J1218 117
ine
Traitement des essences aromatiques pour la pétrochimie J5920 123

Extraction de produits aromatiques des goudrons de houille J5925 127

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jURPP

Gazéification du charbon

par Nicolas BOUDET


Ingénieur procédés
Institut français du pétrole IFP
Pierre MARION
Expert technico-économique
Institut français du pétrole IFP
Magalie ROY-AUBERGER
Docteur Ingénieur, chargée de Veille
Institut français du pétrole IFP

1. Propriétés des charbons et principales réactions chimiques...... J 5 200 - 3


1.1 Composition typique des charbons selon la source ................................. — 3
1.2 Réactions chimiques .................................................................................... — 3
1.3 Éléments de cinétique chimique................................................................. — 4
1.4 Équilibres thermodynamiques.................................................................... — 5
1.5 Conditions opératoires et composition du gaz de synthèse .................... — 5
1.6 Performances thermodynamiques ............................................................. — 6
2. Défis technologiques .............................................................................. — 6
2.1 Introduction du charbon dans le réacteur.................................................. — 6
2.2 Brûleurs......................................................................................................... — 10
2.3 Système de gestion des cendres ................................................................ — 10
2.4 Choix du réfractaire et de la métallurgie.................................................... — 10
2.5 Traitement du syngas .................................................................................. — 12
2.6 Récupération thermique .............................................................................. — 12
2.7 Évolution des technologies ......................................................................... — 12
3. Description des procédés industriels modernes ............................. — 13
3.1 Gazéifieur en lit fixe (Sasol-Lurgi) .............................................................. — 13
3.2 Flux entraîné................................................................................................. — 14
3.3 Lit fluidisé : procédé Winkler....................................................................... — 16
4. Applications ............................................................................................... — 16
4.1 IGCC + CCS ................................................................................................... — 16
p。イオエゥッョ@Z@、←」・ュ「イ・@RPPY@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

4.2 CTL Coal to liquids – voie indirecte ............................................................ — 16


4.3 CTC Coal to Chemicals (méthanol, DME,
et autres produits chimiques) ..................................................................... — 16
4.4 Production d’hydrogène .............................................................................. — 16
Pour en savoir plus ................................................................................................. Doc. J 5 200

e terme de gazéification couvre la conversion de toute matière carbonée en


L un produit gazeux ayant un pouvoir calorifique utilisable (essentiellement
CO, H2 , CH4). La gazéification du charbon comprend une étape initiale de
pyrolyse suivie d’une oxydation partielle produisant un gaz de synthèse (ou
« syngas ») comprenant principalement du CO et de l’hydrogène en teneurs
variables. L’oxydant peut être l’oxygène, l’air ou la vapeur d’eau. Cette
technologie a connu un fort développement au cours des années 1945-1955,
avant l’utilisation du gaz naturel, puis les développements ont fluctué en fonc-
tion des prix et des disponibilités du pétrole et du gaz (voir aperçu historique).
La gazéification du charbon permet de fournir une grande variété de produits :

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie


est strictement interdite. – © Editions T.I. J 5 200 – 1


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GAZÉIFICATION DU CHARBON _________________________________________________________________________________________________________

60
Capacité de gaz de synthèse (GW thermique)

50

40

30

20

10

0
Chimie Électricité Base Gaz
carburant (FT)
programmée
réelle
FT Fischer Tropsch

Figure 1 – Utilisations de la gazéification du charbon

électricité, produits chimiques, substituant au gaz naturel (SNG), carburants


pour le transport, et présente un intérêt non négligeable dans le contexte éco-
nomique actuel (figure 1).
La production électrique est devenue un marché porteur pour la gazéification
qui est perçue comme un moyen d’augmenter l’acceptabilité environnemen-
tale du charbon. L’idée d’utiliser le gaz de synthèse dans les turbines n’est pas
nouvelle. Dès 1950, les problèmes techniques tels que l’augmentation de la
température dans les turbines ont été étudiés ; des prototypes ont été
construits aux USA et en Europe, et depuis une dizaine d’années des unités
commerciales sont en fonctionnement. Un intérêt majeur pour l’IGCC (Inte-
grated Gasification Combined Cycle) est apparu en 2003 et s’est concrétisé par
le rachat aux USA de la technologie Texaco par GE Energy et en Europe celui
de Future Energy par Siemens.
La production d’intermédiaires chimiques de base CTC (Coal to Chemicals)
est également une voie en plein essor (méthanol, diméthyléther DME, ammo-
niac, oléfines). Les développements se font aux USA et principalement en
Chine.
La gazéification de charbon comme substitut au gaz naturel reste limitée
(Unité de Dakota – Beula), mais de nombreux projets sont à l’étude vue l’aug-
mentation du prix du gaz naturel.
Enfin la liquéfaction indirecte du charbon CTL (Coal To Liquids) pour la pro-
duction de carburants synthétiques, via la gazéification du charbon puis la
synthèse Fischer Tropsch présente un regain d’intérêt au-delà de l’Afrique du
Sud, en Chine mais aussi aux États-Unis, même si le bilan économique (et
environnemental) de cette filière est nettement moins favorable que celui du
GTL (Gas to Liquid). Ce dernier point de la liquéfaction indirecte du charbon
sera traité en détails dans un autre dossier.

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie


J 5 200 − 2 est strictement interdite. − © Editions T.I.

QP
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_________________________________________________________________________________________________________ GAZÉIFICATION DU CHARBON

1. Propriétés des charbons Aperçu historique


et principales réactions
Le premier gaz de synthèse a été produit par pyrolyse du
chimiques charbon à la fin du XVIIIe siècle. La gazéification est devenue
un procédé commercial en 1812 avec The London Gas, Light
and Coke Company.
1.1 Composition typique des charbons Les premières applications étaient alors l’éclairage suivi par
selon la source le chauffage. La production d’électricité n’est intervenue que
beaucoup plus récemment.
La composition des charbons varie considérablement d’un type
de charbon à l’autre, et a une influence sur les réactions de gazéi- La gazéification du charbon a connu un fort développement
fication. Les analyses globales (proximate) donnent une indication au cours des années 1940-1955, avant l’utilisation du gaz natu-
sur le type et la qualité du charbon : rel. Pendant cette période, elle a été largement développée
principalement en République Fédérale d’Allemagne mais
– le taux de matières volatiles (indice MV) égal à la masse de aussi en France, en Grande Bretagne et aux États-Unis.
matière volatile moins la perte en eau rapportée à la masse initiale Ensuite, l’utilisation des gazéifieurs a été limitée par le déve-
déterminée par un essai normalisé où on chauffe le charbon pen- loppement de l’emploi du gaz naturel et du pétrole, moins
dant un temps et à une température déterminés (7 min à 950 oC – coûteux. Les seuls pays ayant développé massivement la
ASTM D3175) ; gazéification du charbon sont l’Allemagne pendant la seconde
– le taux d’hydratation (Moisture) est déterminé en séchant le guerre mondiale et l’Afrique du Sud à partir de 1955 pour pal-
charbon dans des conditions standard (1 h, 104-110 oC) ; lier à l’absence de ressources pétrolières liée à une situation
– le taux de cendres (Ash) est la masse de résidus inorganique d’embargo (filière de production de carburants de synthèse à
restant après combustion du charbon. partir du charbon).
Les analyses chimiques (ultimate) sont les pourcentages Suite à la première crise pétrolière des années 1970, la
massiques des éléments carbone, hydrogène, oxygène, azote, et gazéification du charbon est apparue à nouveau comme un
soufre. procédé intéressant pour la production de carburants liquides
Le tableau 1 rapporte les analyses pour différents types de char- et gazeux.
bon commerciaux. Des efforts considérables ont alors été faits pour le dévelop-
pement de nouvelles technologies. Après une pause durant
les années 1980, on observe la renaissance des technologies
1.2 Réactions chimiques de gazéification ces 10 à 15 dernières années.
La transformation du charbon en gaz, ou gazéification met en jeu
à haute température un ensemble complexe de réactions chimiques
entre le charbon, l’oxygène et la vapeur d’eau. Ces réactions n’inter- – les conditions opératoires appliquées au gazéifieur, soit le taux
viennent qu’après décomposition du charbon par pyrolyse. d’injection de vapeur d’eau, la pression opératoire, ainsi que la
qualité du comburant (oxygène pur ou air) et son volume qui per-
Le gaz récupéré en sortie du gazéifieur est appelé gaz de syn-
met de fixer la température de gazéification à la valeur souhaitée.
thèse (syngas en Anglais ). Sa composition dépend principalement
des paramètres suivants : Le degré d’avancement des réactions mises en œuvre dans un
– la composition élémentaire du charbon en carbone, hydro- gazéifieur et donc la composition du syngas découlent de
gène, soufre, azote, oxygène, ainsi que de son taux d’humidité, constantes cinétiques et thermodynamiques décrites dans les
son taux de cendres, et son pouvoir calorifique inférieur (PCI) ; paragraphes suivants.

Tableau 1 – Analyses de quelques charbons typiques [1]


Type Brown Coal Lignite Sub-bitumineux Bitumineux Bitumineux Anthracite
Appellation Française Lignite Lignite Flambant sec Flambant gras Anthracite
Origine Allemagne Rhin Dakota Nord Montana Illinois Chine-Datung Allemagne-Ruhr
Analyses globales (%) – charbon tel quel (avec cendres et humidité)
MV 20 24,9 34,7 37 28,1 7,7
Eau 60 36,9 10,5 13 11,9 4,5
Cendres 2,7 10,4 11,2 10,7 9,1 6,0
Analyses massique chimiques (%) (*)
C 67,5 71 76,4 78,4 84,4 91,8
H 5 4,3 5,6 5,4 4,4 3,6
O 26,5 23,2 14,9 9,9 9,5 2,5
N 0,5 1,1 1,7 1,4 0,9 1,4
S 0,5 0,4 1,4 4,9 0,8 0,7
Pouvoir calorifique
26,2 26,7 31,8 33,7 33,4 36,2
(Mj/kg) (*)
(*) ramené à la partie organique du charbon, sans cendre et sans humidité (moisture and ash free map).

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est strictement interdite. – © Editions T.I. J 5 200 – 3

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GAZÉIFICATION DU CHARBON _________________________________________________________________________________________________________

1.2.1 Pyrolyse Tableau 2 – Pouvoir calorifique des constituants


du gaz de synthèse
Le charbon se décompose thermiquement en donnant naissance :
Constituant Masse molaire PCI
– d’une part, à des matières volatiles (MV) constituées de gaz (g/mol) (kJ/mol)
(principalement H2 et CH4) et de vapeurs condensables (vapeur
d’eau, huiles et goudrons) ; CO 28,01 283,4
– d’autre part, à un résidu solide ou coke. H2 2,02 242,7
CO2 44,01
Cette réaction s’amorce à des températures de 350 oC à 400 oC
H2 O 18,02
suivant les charbons. Dès 500-550 oC, la totalité des vapeurs
condensables et la plus grosse fraction du méthane sont déga- CH4 16,04 803,3
gées. Cette pyrolyse est terminée au-dessus de 900 oC. H2 S 34,08 519,1
NH3 17,03 317,1
N2 28,01
1.2.2 Gazéification proprement dite Ar 39,95
Après l’étape de décomposition par pyrolyse, on peut considérer
que l’oxygène et la vapeur d’eau réagissent directement sur le car-
Des réactions secondaires conduisent à la formation de
bone pour conduire à un mélange variable de monoxyde de car-
sous-produits tels que l’oxysulfure de carbone (COS), le disulfure
bone (CO), hydrogène (H2), dioxyde de carbone (CO2), eau (H2O),
de carbone (CS2) ou l’acide cyanhydrique (HCN) notamment.
méthane (CH4), sulfure d’hydrogène (H2S), ammoniac (NH3), et
dans certaines conditions carbone (C), (plus azote (N2) et argon
(Ar) entraînés par l’oxygène utilisé comme comburant). Ces pro-
duits sont caractérisés par leur pouvoir calorifique inférieur ou PCI 1.3 Éléments de cinétique chimique
(LHV en anglais), qui est défini comme la chaleur qu’ils dégagent
par combustion complète dans des conditions standard, les molé- Les réactions homogènes (6), (7), (8) et (9) sont très rapides et peu-
cules d’eau produites restant à l’état vapeur (tableau 2). vent être considérées comme pratiquement instantanées dans les
conditions de températures élevées régnant au sein du gazéifieur.
Les réactions hétérogènes mettent en œuvre le carbone (solide)
et les autres molécules chimiques (gazeuse). Au contraire, pour les En ce qui concerne les réactions hétérogènes, les réactions (1) et
réactions homogènes, l’ensemble des réactifs et des produits sont (2) d’oxydation de la charge par l’oxygène sont les plus rapides.
en phase gazeuse (tableau 3). L’oxydation du carbone par la vapeur d’eau (4) est 50 fois plus
lente, et l’oxydation du carbone par le CO2 (3) 150 fois plus lente.
Les réactions de combustion [réactions (1), (2), (6) et (7)] sont Cependant, au-delà de 1 000 oC environ, et compte tenu des phé-
totales, toutes les molécules de réactif sont brûlées (jusqu’à dispa- nomènes physico-chimiques rencontrés (cinétique chimique et
rition d’un des réactifs). Le carbone (C) et l’oxygène (O2) sont ther- phénomènes diffusionnels), le dimensionnement des gazéifieurs
modynamiquement instables dans les conditions habituelles de du commerce laisse un temps suffisant pour qu’il y ait :
réaction.
– soit disparition des réactifs (par exemple, le carbone hormis
Les réactions (8) et (9) sont équilibrées, une certaine quantité de une faible quantité de suies en sortie de réacteur effectivement liée
réactifs reste dans le milieu en mélange avec les produits. Les à la cinétique) dans le cas d’une réaction totale ;
réactions (3), (4) et (5) sont totales sauf dans une fenêtre de – soit obtention de l’équilibre thermodynamique dans le cas des
conditions opératoires (stabilité thermodynamique du carbone). réactions équilibrées.

Tableau 3 – Principales réactions dans un gazéifieur


Enthalpie de réaction
No Réaction Constante d’équilibre Nom usuel ⌬H
(kJ/mol) (1)
Réactions hétérogènes
(1) C + O2 → CO2 Combustion du carbone – 393,65
(2) C + 1/2 O2 → CO Oxydation partielle du carbone – 110,56
(3) C + CO2 ↔ 2 CO K3 Équilibre de Boudouard + 172,52
(4) C + H2O ↔ CO+ H2 K4 Hydro-oxydation du carbone + 131,34
(5) C + 2 H2 ↔ CH4 K5 Méthanation – 74,87
Réactions homogènes
(6) CO + 1/2 O2 → CO2 Combustion du CO – 283,01
(7) H2 + 1/2 O2 → H2O Combustion de l’hydrogène – 241,09
(8) CO2 + H2 ↔ CO + H2O K8 Conversion du CO ou équilibre de Shift + 41,18
(9) CO + 3 H2 ↔ CH4 + H2O K9 Réduction du CO – 206,23
Autres réactions
S + H 2 → H2 S
2 N + 3 H2 → 2 NH3
(1) T = 298 K, P = 1,013 bar, carbone à l’état de graphite et eau sous forme vapeur.

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J 5 200 – 4 est strictement interdite. – © Editions T.I.

QR
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Liquéfaction du charbon (CTL)

par Raphael HUYGHE


Ingénieur développement à l’IFP
Pierre MARION
Ingénieur en études économiques à l’IFP
et Magalie ROY-AUBERGER
Ingénieur de recherches à l’IFP

1. Voie indirecte ............................................................................................ J 5 210 - 2


1.1 Enchaînement de procédés ......................................................................... — 2
1.2 Principales réalisations industrielles .......................................................... — 3
2. Voie directe ................................................................................................ — 10
2.1 Principe ......................................................................................................... — 10
2.2 Préparation de la charge ............................................................................. — 11
2.3 Liquéfaction .................................................................................................. — 11
2.4 Hydrotraitement des effluents .................................................................... — 15
3. Gestion de l’hydrogène........................................................................... — 15
4. Performances globales de la filière liquéfaction ............................ — 16
4.1 Rendements et qualités de produits........................................................... — 16
4.2 Émissions de gaz à effet de serre ............................................................... — 16
4.3 Vers une intégration voie directe/voie indirecte ? ..................................... — 17
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 210

a liquéfaction du charbon « Coal to Liquid ou CTL » est une technologie


L ancienne, initialement développée pendant la première moitié du
XXe siècle, qui produit des carburants de type diesel ou essence et/ou des
bases pour la chimie à partir du charbon. Dans l’ère du pétrole roi, seuls des
contextes géopolitiques très particuliers ont pu justifier l’industrialisation de
cette filière (voir encadré historique) : le prix de revient des carburants de syn-
thèse était beaucoup plus élevé que celui des carburants pétroliers en raison
p。イオエゥッョ@Z@、←」・ュ「イ・@RPQP@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

des forts niveaux d’investissements requis et du prix – alors faible – du pétrole


brut. Aujourd’hui, la prise de conscience de la relative raréfaction du pétrole et
du gaz naturel, ainsi que les cours historiques qu’ils ont atteints pendant
l’année 2008 provoque un regain d’intérêt pour la liquéfaction du charbon sur
fond de sécurité d’approvisionnement et de diversification énergétique. Le
charbon constitue un candidat incontournable au remplacement du pétrole
sous réserve de la mise en œuvre de technologies de captage de stockage du
CO2 émis en grande quantité par la filière.
Chimiquement, tout l’enjeu de la liquéfaction consiste à tripler la teneur en
hydrogène du charbon (rapport atomique H/C inférieur à 1) jusqu’à des valeurs
compatibles avec les spécifications des carburants pétroliers (rapport H/C de
l’ordre de 2).
Deux familles de procédés catalytiques ont été développées pour pallier à
l’insuffisance des technologies antérieures basées sur des procédés purement
thermiques (cokéfaction ou pyrolyse) en termes de quantité et de qualité du
liquéfiat.
– Dans la voie directe, le charbon, préalablement broyé et dissout dans un
solvant organique, est envoyé dans un réacteur d’hydroconversion qui le
convertit directement en liquide. Ce liquide, riche en aromatiques, est envoyé

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LIQUÉFACTION DU CHARBON (CTL) _____________________________________________________________________________________________________

dans une unité d’hydrogénation profonde et/ou d’hydrocraquage pour en faire


des carburants aux spécifications requises.
– Dans la voie indirecte, le charbon broyé est tout d’abord converti en un
mélange H2 + CO appelé gaz de synthèse (procédé de gazéification), puis en
un mélange d’hydrocarbures paraffiniques, via le procédé Fischer-Tropsch, qui
subit une étape finale d’hydroisomérisation et/ou d’hydrocraquage.

Abréviations utilisées Historique

ASF : Anderson-Schultz-Flory Les premières utilisations du charbon liquéfié datent du début


ASU : unité de production d’oxygène par séparation de l’air du XXe siècle. Dès l’origine, les développements technologi-
Pour les capacités élevées nécessitées par la liquéfaction du ques relatifs à la liquéfaction du charbon se sont basés sur
charbon, cette séparation est généralement basée sur une dis- deux voies de conception radicalement différentes, que l’on
tillation cryogénique retrouve aujourd’hui :
Claus : unité transformant les gaz acides issus de la – une voie dite « directe », s’appuyant sur les travaux de
décomposition des molécules soufrées (essentiellement des Bergius entre 1910 et 1927 en Allemagne ;
mélanges eau, NH3 et H2S) en soufre solide – une voie dite « indirecte », basée sur les travaux de deux
CTL (Coal to Liquid ) : liquéfaction du charbon chimistes, eux aussi allemands, Hans Fischer et Franz Tropsch
DSV : distillat sous vide (fraction d’hydrocarbures générale- (brevet BASF de 1913). Ils réussissent dès 1922 à produire un
ment d’origine pétrolière dont la température d’ébullition est mélange d’alcools, d’aldéhydes, d’acides gras et d’hydrocar-
habituellement comprise entre 350 et 550 oC), ou colonne de bures en passant par un produit intermédiaire, mélange
distillation sous vide produisant ce distillat sous vide H2 + CO appelé « gaz de synthèse », suivi d’une étape de syn-
EDS : procédé Exxon pour la liquéfaction directe thèse sur catalyseur au fer.
La première application industrielle à grande échelle de la
ETBE : éthyl tertio butyl éther liquéfaction du charbon est réalisée pendant la seconde guerre
FRAC : fractionnement primaire (distillation sous pression mondiale, toujours en Allemagne. Elle permettra au IIIe Reich
atmosphérique) d’alimenter la quasi-totalité des avions de la Luftwaffe (soit
FT : Fischer-Tropsch. Procédé de synthèse de paraffines à par- 600 kt/an essentiellement par le procédé direct) grâce au char-
tir d’un mélange H2 + CO appelé « gaz de synthèse » bon de la Ruhr, malgré le blocus imposé par les alliés sur
GES : gaz à effet de serre, en pratique dans cette fiche, le CO2 l’approvisionnement en pétrole.
et le méthane À partir de 1955, l’Afrique du Sud, soumise elle aussi à un
GPL (LPG en Anglais) : gaz de pétrole liquéfiés, c’est-à-dire embargo international lié au régime d’apartheid, installe pro-
mélange de propane et de butane gressivement via la société Sasol une capacité de production
HDC : hydrocraquage (utilisé comme traitement de finition de près de 175 000 b/j (8,8 Mt/an) selon le procédé de liquéfac-
dans la liquéfaction directe) tion indirect, permettant au pays de couvrir plus d’un tiers de
HCI ou HDI : hydrocraquage fortement isomérisant (utilisé ses besoins en combustibles liquides à partir de gisements de
comme traitement de finition dans la liquéfaction indirecte) charbons locaux.
Enfin, une première tranche de liquéfaction directe de
HDT : hydrotraitement
20 000 b/j (1,0 Mt/an) construite et opérée par le plus gros pro-
HTFT : procédé Fischer-Tropsch à haute température ducteur Chinois de charbon, Shenhua, démarre au premier
LTFT : procédé Fischer-Tropsch à basse température semestre 2009 en Chine (Mongolie intérieure, région d’Erdos).
maf (masture and ash free ) partie organique du charbon ou
charbon sec hors cendres Nota : b pour barils.
PSA : Pressure Swing Absorber. Procédé permettant de pro-
duire par purification de l’hydrogène de très haute pureté
(> 99,9 %) à partir d’un mélange
RA : résidu atmosphérique (fraction d’hydrocarbures lourds
1. Voie indirecte
généralement d’origine pétrolière dont la température d’ébulli-
tion est habituellement supérieure à 350 oC) 1.1 Enchaînement de procédés
RLB : réacteur en lit bouillonnant (étape cœur de la liquéfaction
La liquéfaction indirecte du charbon comprend les étapes sui-
directe)
vantes (figure 1) :
RSV : résidu sous vide (fraction d’hydrocarbures très lourds
généralement d’origine pétrolière dont la température d’ébulli- – préparation du charbon ;
tion est habituellement supérieure à 550 oC) – production d’oxygène ;
– gazéification à l’oxygène pur ;
SBCR : procédé Fischer-Tropsch à basse température et avec
– conversion du CO en H2 (water gas shift) ;
réacteur en slurry (Slurry Bubble Column Reactor )
– purification du gaz de synthèse ;
Slurry : mélange de liquides et de solides. Dans le procédé de – synthèse de Fischer-Tropsch, FT (cœur du procédé) ;
liquéfaction du charbon, le mélange poudre de charbon + eau, – hydrocraquage isomérisant HDI des paraffines longues pour
ou le mélange particules de catalyseur + solvant sont des slur- aboutir à un carburant « fini » ;
ries – production de l’hydrogène pur consommé par l’unité d’hydro-
SRC 1 et SRC 2 : procédés Gulf Oil pour la liquéfaction directe. craquage ;
VI : indice de viscosité, utilisé pour caractériser les huiles lubri- – production de l’électricité consommée par le complexe ;
fiantes. Un indice élevé signifie que la viscosité de l’huile varie – traitement des gaz acides (procédé Claus).
peu avec la température du moteur, gage de qualité
Ces différentes étapes sont décrites et détaillées ci-après.

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_____________________________________________________________________________________________________ LIQUÉFACTION DU CHARBON (CTL)

CO2

Claus Soufre

H2
Purif. PSA

Gaz Turbine
Électricité
à gaz

Fuel Gaz
Charbon Gazéifi- Fischer- GPL
Préparation Shift HDI Naphta
cation Trospch
Diesel

Cendres
ASU
O2

HDI hydrocraquage fortement isomérisant


ASU unité de production d’oxygène par séparation de l’air
PSA Pressure, Swing absorber (procédé de purification de l’hydrogène)
GPL gaz de pétrole liquéfié

Figure 1 – Schéma de liquéfaction indirecte

1.2 Principales réalisations industrielles qui produisent des carburants et des produits chimiques indirecte-
ment (figure 2).
Fischer et Tropsch FT ont publié leurs premiers résultats en Cet essor s’est poursuivi avec SASOL II et III dans les années
1923, et ont reçu le prix Nobel en 1932. Dans cette publication his- 1980 (environ 3 Mt/an) : près de 50 % des besoins nationaux en
torique, ils mettent en évidence les caractéristiques de base de carburants et produits variés (une centaine) étaient alors couverts
cette réaction catalysée : par ce procédé.
– les catalyseurs au Fe, Ni et Co sont les plus actifs. Le Co Suite aux deux chocs pétroliers de 1973 et 1979, de nombreux
conduit aux paraffines et à l’eau comme sous-produit, le Fe plutôt travaux de R&D ont été entrepris tant dans des sociétés privées
aux oléfines et au CO2 comme sous-produit, le Ni conduit surtout que dans des instituts de recherches publics, pour développer des
au méthane ; catalyseurs et des technologies performantes. Ils n’ont pas abouti
– les conditions opératoires les plus favorables à la production à des réalisations industrielles, rattrapés par le contre-choc pétro-
de produits liquides sont : pression comprise entre 7 et 30 bar et lier de 1986. Seul SHELL a persévéré dans le développement de
température comprise entre 200 et 350 oC. son procédé SMDS (Shell Middle Distillate Synthesis) aboutissant
Suite à cette découverte, d’énormes travaux ont été réalisés en à la construction d’une unité industrielle de 0,4 Mt/an en Malaisie
Allemagne entre 1925 et 1945. La majorité des découvertes et des en 1993. Cette unité utilise uniquement des technologies mises au
mises au point (catalyseurs, conditions opératoires, réacteurs, pro- point par SHELL à partir d’une charge de gaz naturel :
duits) datent de cette époque. En effet, entre 1935 et 1945, les – oxydation partielle à l’oxygène pur ;
besoins en carburants et produits chimiques de l’économie de – synthèse FT, en lit fixe, sur catalyseur au cobalt, à basse tempéra-
guerre étant très grands, la synthèse FT permit d’obtenir une ture et moyenne pression, formant des paraffines – Traitement des
grande variété de produits de façon indépendante du pétrole, à paraffines pour produire des carburants, des solvants et des cires.
partir du charbon. Des unités industrielles voient le jour dès 1936, Une autre unité de production à partir du gaz naturel
utilisant un catalyseur au cobalt en lit fixe. Puis, en 1938, des cata- (MOSSGAS, issu de la collaboration avec STATOIL) a vu le jour en
lyseurs au fer sont mis en œuvre dans des unités de production. Afrique du Sud, à Mossel Bay, en 1992, basé sur une technologie
En 1939, on évalue à 450 kt/an la production de carburants et SASOL.
produits chimiques obtenus par cette voie. Compte tenu d’un Historiquement, la synthèse de Fischer-Tropsch a donc été utili-
accès difficile aux minerais de cobalt pendant la guerre, c’est le fer sée à la fois pour la production de carburants automobile (essences,
qui a été le plus largement utilisé. diesel) et kérosène et pour la production de produits chimiques (en
À la fin de la 2e guerre mondiale, le développement rapide et particulier alcools, oléfines et aromatiques). Aujourd’hui, l’accent
généralisé de l’industrie pétrolière n’a pas encouragé l’industriali- est plutôt mis sur la production des carburants (surtout diesel). De
sation du procédé FT dans les pays développés. Aux États-Unis, nouveaux projets sont annoncés en Chine.
seul le procédé Hydrocol, utilisant un catalyseur au fer en lit flui-
disé et un gaz de synthèse produit à partir de gaz naturel, a vu le
jour suite à des travaux menés au Texas dès 1945, mais l’unité 1.2.1 Description des procédés
industrielle n’a pas fonctionné au-delà de 1953. 1.2.1.1 Préparation de la charge
Ce n’est qu’en Afrique du Sud que les développements indus-
Le charbon éventuellement séché est broyé à la granulométrie
triels se sont poursuivis pour pallier l’absence de ressources pétro-
requise, puis il est introduit dans le gazéifieur soit :
lières liée à une situation d’embargo durant 40 ans. Ce pays a
cherché à tirer tous les bénéfices des développements réalisés en – par un système de trémies, par fluidification dans un gaz por-
Allemagne et aux États-Unis. Les premières unités industrielles ont teur, par des sas ou encore par des pompes spéciales (introduction
vu le jour, dès 1955 (SASOL I à Sasolburg, 0,3 Mt/an). Dans ces « sèche ») ;
unités, le gaz de synthèse est fabriqué à partir du charbon abon- – en phase liquide (ou slurry) mélangé à l’eau.
dant et bon marché, puis épuré (pour enlever surtout les traces de Les technologies de transport du charbon broyé sont décrites
soufre) et alimente des unités (lit fixe, lit fluide, catalyseur au fer) dans le dossier [J 5 200] Gazéification du charbon.

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LIQUÉFACTION DU CHARBON (CTL) _____________________________________________________________________________________________________

Air Charbon Charbon Eau

O2 Gazéifieur H2O Centrale


ASU
Lurgi électrique

Syngas
N2
Brai
Atelier
Extraction Séparation Goudrons et huiles Créosote
BTX (benzène, toluène, xylènes)
(NH4)2SO4 Phénols Naphta
Rectisol
CO2 + H2S

Fischer-Trosch
Synthol
(lit fixe) Alcools Cétones
Reformage

H2O H2O
Atelier
Séparation Séparation
oxygénés
Huile C3-C4
Cires

Hydrogénation Atelier Essence Atelier Oligomé-


Huiles Diesel Huiles risation

Fuel Essence Essence


Séparation H2 Synthèse
CH4 cryogénique Ammoniac

Gaz de ville N2 NH3

Figure 2 – Schéma du site SASOL I

1.2.1.2 Gazéification 1.2.1.4 Purification


Nota : les principales technologies de gazéification disponibles industriellement et leur Un nombre important de procédés a été et est utilisé pour la
adaptabilité aux différents charbons sont également décrites dans le dossier [J 5 200] purification du gaz de synthèse produit par gazéification et en par-
Gazéification du charbon. ticulier pour sa désulfuration.
Tous sont basés sur l’une des réactions suivantes :
1.2.1.3 Conversion du CO en H2 (Water Gas Shift )
– l’absorption (physique ou chimique) dans un solvant liquide
La composition du gaz de synthèse (syngaz) entrant dans le avec une étape ultérieure de désorption ;
réacteur Fischer-Tropsch a une influence sur la réaction. Pour pro- – l’adsorption toujours physique ou chimique sur des particules
duire un maximum de paraffines de formule chimique CnH2n+2 , ce solides ;
réacteur demande logiquement un gaz de synthèse dont le rapport – la diffusion à travers une membrane ;
molaire H2/CO avoisine 2 (le rapport optimal varie légèrement en – la conversion chimique, en général sur un catalyseur.
fonction de la technologie, du catalyseur et des produits désirés). Le choix de l’une ou l’autre des technologies est conditionné par
C’est la réaction de shift qui permet d’atteindre ce rapport à partir les contraintes de pureté du procédé aval (dans notre cas, le
d’un gaz de synthèse beaucoup plus pauvre en hydrogène Fischer-Tropsch), la composition initiale du gaz de synthèse et la
(H2/CO < 0,7). sélectivité désirée (par exemple, vis-à-vis du CO2).
Cette réaction équilibrée s’écrit : La figure 3 reporte un diagramme sur le choix des techniques de
purification en fonction des caractéristiques initiales du gaz de syn-
CO + H2O ↔ CO2 + H2 thèse et de la pureté désirée [1].
L’équilibre en sortie de gazéifieur peut être déplacé dans un Dans le cadre de la liquéfaction du charbon, le procédé Rectisol
réacteur additionnel opérant à beaucoup plus basse température utilisé par Sasol est le plus cité (figure 4) [2]. C’est un procédé
de manière à augmenter le rapport H2/CO du gaz de synthèse. La d’absorption qui utilise le méthanol froid comme solvant. Il a été
réaction est équimolaire et largement indépendante de la développé à l’origine pour le traitement du gaz provenant du
pression ; elle se fait selon les cas en un ou deux réacteurs sur gazéifieur en lit mobile de Lurgi et qui contient, outre l’H2S et le
différents systèmes catalytiques, à des températures comprises CO2 des hydrocarbures, du COS et de l’ammoniac.
entre 200 et 500 oC. Le type de catalyseur est déterminé en fonc- Dans la gamme usuelle de températures opératoires (– 30 à
tion de la gamme de température utilisée et de la qualité (teneur – 60 oC), les coefficients d’absorption du méthanol sont très élevés
en soufre) du gaz de synthèse, selon qu’il est placé en amont ou et le procédé permet d’atteindre des puretés inaccessibles par
en aval de l’unité de purification. Les catalyseurs haute tempéra- d’autres procédés. Le méthanol est par ailleurs très sélectif. Le pro-
ture sont à base d’oxydes mixtes de fer et de chrome, les cataly- cédé présente néanmoins un coût opératoire important dû en par-
seurs basse température à base de Cu-ZnO. ticulier à l’opération de refroidissement.

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Gazéification des résidus pétroliers


par le procédé Shell

par Roby MARSEU


Ingénieur de l’École nationale supérieure de chimie de Strasbourg (ENSCS)
Docteur ès sciences pétrolières de l’École nationale supérieure
des pétroles et moteurs (ENSPM)
Service « études stratégiques – compétitivité – industrie » de la Société des Pétroles Shell

1. Réactions chimiques ............................................................................... J 5 440 - 2


2. Variables opératoires .............................................................................. — 3
2.1 Nature de la charge d’hydrocarbures ........................................................ — 3
2.2 Rapports O2 /charge et H2O/charge ............................................................ — 3
2.3 Pression ........................................................................................................ — 4
2.4 Modérateurs de température de flamme .................................................. — 4
3. Mise en œuvre industrielle.................................................................... — 4
3.1 Description du procédé ............................................................................... — 4
3.2 Gazéification................................................................................................. — 4
3.3 Récupération de chaleur ............................................................................. — 5
3.4 Élimination des suies .................................................................................. — 5
3.5 Récupération du carbone............................................................................ — 5
3.6 Traitement des eaux usées ......................................................................... — 7
3.7 Traitement du gaz de synthèse................................................................... — 7
4. Applications du procédé SGP .............................................................. — 7
4.1 Production d’hydrogène ............................................................................. — 8
4.2 Production d’énergie par cogénération ..................................................... — 9
4.3 Applications chimiques............................................................................... — 9
4.3.1 Production d’ammoniac..................................................................... — 9
4.3.2 Production de méthanol..................................................................... — 10
4.4 Applications spécialités chimiques ............................................................ — 10
4.5 Synthèse de carburants .............................................................................. — 10
4.6 Autres applications...................................................................................... — 11
Références bibliographiques ......................................................................... — 11

es besoins croissants en « gaz de synthèse » (mélange de monoxyde de car-


L bone et d’hydrogène) et le remplacement du charbon par des produits pétro-
liers dans certaines de ses applications ont conduit, vers le milieu des années
50, au développement de procédés de gazéification de coupes pétrolières.
Parmi ces procédés, deux ont pris une part prépondérante : le procédé de Shell,
décrit ci-après, et le procédé de Texaco.
Le procédé SGP (Shell Gasification Process) est un procédé d’oxydation
partielle non catalytique qui permet de convertir une charge d’hydrocarbures
en gaz de synthèse avec production de vapeur haute pression.
Une de ses caractéristiques est qu’il peut traiter une grande variété de charges
allant du gaz naturel aux résidus pétroliers contenant des teneurs élevées en
soufre et en métaux.
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GAZÉIFICATION DES RÉSIDUS PÉTROLIERS PAR LE PROCÉDÉ SHELL ______________________________________________________________________________

La grande flexibilité des conditions opératoires du procédé SGP permet son


utilisation dans de nombreuses applications industrielles, en particulier dans la
production d’hydrogène, de monoxyde de carbone, d’ammoniac, de méthanol
et de divers produits chimiques, ainsi que la production de gaz combustibles
et d’électricité.
Dans le contexte d’une augmentation croissante des contraintes sur les rejets,
entraînant une limitation de l’utilisation des fuels lourds, le procédé SGP constitue
une solution attractive pour la conversion des résidus pétroliers. Associé à un
cycle combiné, il peut assurer la production non polluante d’hydrogène et d’élec-
tricité à partir de résidus. Du point de vue protection de l’environnement, il est
caractérisé par des niveaux bas d’émissions de SO2 , NOx et de particules.

1. Réactions chimiques ■ La décomposition du méthane, favorisée à haute température,


produit des particules solides de carbone (suies), selon la réaction :
CH 4 % C + 2H 2 (6)
Le procédé Shell de gazéification (SGP) est un procédé d’oxydation
o
partielle qui consiste à convertir une charge d’hydrocarbures en gaz avec ∆H 298 = 74,87 kJ/mol .
de synthèse (CO + H2), suivant le schéma général suivant : La présence d’eau et de CO2 permet de limiter la formation de
Cn Hm + n/2 O2 → nCO + m/2 H2 (1) carbone par les équilibres suivants :

Cette transformation résulte de la mise en œuvre d’un grand C + CO 2 % 2CO (7)


nombre de réactions, dont les principales sont décrites ci-après.
Équilibre de Boudouard
■ La combustion complète d’une partie de la charge d’hydro- o
avec ∆H 298 = 172,53 kJ/mol .
carbures conduit à la formation de CO2 et H2O :
et C + H 2 O % CO + H 2 (8)
Cn Hm + (n + m/4) O2 → nCO2 + m/2 H2O (2)
o
avec ∆H 298 = 131,35 kJ/mol .
Cette réaction est très exothermique, exentropique et complète.
Elle permet d’atteindre la température nécessaire à l’opération qui, ■ Le soufre contenu dans la charge est converti dans la flamme en
exception faite d’un préchauffage à faible niveau thermique, se H2S et COS. Le sulfure de carbonyle est obtenu par les réactions
déroule adiabatiquement. suivantes :
■ Les molécules de CO2 et H2O formées réagissent avec les molé- H 2 S + CO % COS + H 2 (9)
cules d’hydrocarbures :
H 2 S + CO 2 % COS + H 2 O (10)
C n H m + n CO 2 % 2n CO + m/2 H 2 (3)
La quantité de sulfure de carbonyle dépend très peu de la pression
C n H m + n H 2 O % n CO + ( m/2 + n ) H 2 (4) et de la température. En pratique, des rapports molaires H2S/COS
de l’ordre de 25 sont mesurés.
Ces réactions endothermiques absorbent une partie de la chaleur H2S et COS peuvent être facilement séparés du gaz par des
dégagée par la réaction de combustion et permettent d’abaisser la procédés tels que les procédés Sulfinol ou Rectisol (cf. article
température des gaz vers 1 300-1 500 oC. [J 5 480] Production des gaz de synthèse, dans ce traité).
■ La présence d’eau formée lors de la combustion, ou apportée par ■ Les composés azotés de la charge, généralement des dérivés de
injection de vapeur, provoque la réaction d’équilibre du « gaz à la pyridine, se décomposent en produisant de l’ammoniac, dont la
l’eau » : majeure partie se décompose en N2 et H2 suivant :
CO + H 2 O % CO 2 + H 2 (5)
2 NH 3 % N 2 + 3 H2 (11)
o
avec ∆H 298 = – 41,18 kJ/mol . o
avec ∆H 298 = 92 kJ/mol .
D’un point de vue thermodynamique, l’obtention d’une teneur
élevée en H2 dans le gaz de synthèse brut est favorisée à basse L’ammoniac résiduel, très soluble dans l’eau, se concentre dans
température, condition incompatible avec l’opération d’oxydation du l’eau utilisée pour l’élimination des suies. Le pH de cette solution
fait de la forte exothermicité de celle-ci. est de l’ordre de 9, ce qui permet d’éviter la corrosion de l’équi-
pement par le dioxyde de carbone en solution.
En pratique, l’injection de vapeur d’eau permet de corriger cet effet
en limitant la température de flamme et de déplacer l’équilibre vers ■ Pour plus de détails sur les réactions chimiques, le lecteur se
la formation d’hydrogène. reportera aux références bibliographiques [1] [2].
■ Ces différentes transformations s’accompagnent de réactions
secondaires de craquage qui conduisent à la formation de méthane,
d’hydrogène et de produits craqués. Ceux-ci réagissent alors avec
CO2 et H2O selon les réactions (3) et (4).

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_____________________________________________________________________________ GAZÉIFICATION DES RÉSIDUS PÉTROLIERS PAR LE PROCÉDÉ SHELL

2. Variables opératoires atteindre 2 % en masse. À l’inverse, dans le cas d’un traitement de


gaz naturel, le gaz de synthèse est exempt de particules de carbone.

Les principales variables opératoires qui déterminent le procédé


de gazéification sont :
— la nature de la charge d’hydrocarbures ;
2.2 Rapports O2 /charge et H2O/charge
— les rapports oxygène/charge et vapeur d’eau/charge ;
— la pression ; Ces variables opératoires dépendent, dans une large mesure, de
— l’utilisation de gaz modérateurs de température de flamme, la charge d’hydrocarbures utilisée et déterminent la température de
autres que la vapeur d’eau, par exemple l’azote (gazéification d’air) réaction (1 300 à 1 500 oC). Comme indiqué dans le tableau 1, les
ou le dioxyde de carbone. besoins en oxygène par unité de masse de charge augmentent avec
la teneur en hydrogène de celle-ci. Cependant, ramenée à l’unité de
volume de gaz produit (CO + H2), la consommation en oxygène varie
2.1 Nature de la charge d’hydrocarbures peu avec la nature de la charge et est de l’ordre de 0,27 à 0,28 Nm3
de O2 par Nm3 de (CO + H2).
Une des caractéristiques du procédé Shell est qu’il peut traiter une Nota : Nm3 (normomètre cube ) mesuré dans les conditions normales de pression
(1,013 × 105 Pa) et de température (0 oC).
grande variété de charges : gaz naturel, naphta, fuel lourd, résidu
de distillation sous vide (RSV), résidu de viscoréduction (craquage L’augmentation du rapport O2 /charge permet d’éviter la formation
thermique de RSV) ou l’asphalte obtenu par extraction au solvant de suies et ainsi d’obtenir dans le gaz final un rendement élevé en
(propane, butane ou pentane) de charges lourdes. (CO + H2) et une faible teneur en méthane.
Le tableau 1 donne la composition des gaz de gazéification La gazéification peut se faire avec de l’air ou de l’air enrichi en
obtenus à partir de différentes coupes d’hydrocarbures. La oxygène. Un rapport O2 /charge plus élevé est alors nécessaire pour
composition des gaz de synthèse dépend de la nature de la charge. atteindre la température voulue.
Ils contiennent majoritairement CO et H2 et des petites quantités de L’addition de vapeur d’eau permet d’abaisser la température de
CO2 , CH4 , N2 et H2S. la flamme par son effet direct de modération et par la mise en jeu
De plus, les gaz contiennent des particules de carbone. Dans le de réactions endothermiques entre les hydrocarbures et la vapeur
cas d’un traitement de résidus pétroliers lourds, la teneur peut d’eau. (0)

Tableau 1 – Composition des gaz obtenus par gazéification de différentes charges d’hydrocarbures,
pour la production de 1 000 Nm3 de CO + H2
Charge ......................................... Gaz Naturel Naphta léger Fuel lourd Résidu sous vide Asphalte (5)
Propriétés de la charge :
● densité à 15
oC ......................... .................................. 0,67 0,97 1,04 1,09
● rapport massique H/C.............. 0,3 0,19 0,13 0,12 0,10
● soufre (% masse) ..................... .................................. 0,03 3,50 4,25 4,92
● cendres (% masse)................... .................................. .................................. 0,07 0,15 0,10
Température de préchauffage
de la charge ......................... (oC) 400 27 260 260 300
Rapport O2 /charge (1) ................ 1,1 1,24 1,05 1,01 0,98
Rapport valeur d’eau /charge .... 0,2 0,4 0,45 0,5 0,5
Naphta pour récupération
du carbone ............................ (kg) .................................. .................................. 0,8 0,8 0,8
Produits de gazéification
(40 oC, 56 bar) (2) :
● Composition (% vol. sec) :

— hydrogène ............................. 59,79 52,27 46,94 44,94 44,10


— monoxyde de carbone.......... 35,48 42,51 47,41 48,92 49,86
— dioxyde de carbone .............. 3,83 4,78 4,31 4,63 4,31
— méthane ................................. 0,50 0,30 0,30 0,30 0,30
— azote + argon......................... 0,40 0,13 0,23 0,20 0,25
— sulfure de dihydrogène ........ .................................. 0,01 0,78 0,97 1,13
— sulfure de carbonyle ............. .................................. .................................. 0,03 0,04 0,05
● Rapport molaire H2/CO ........... 1,69 1,23 0,99 0,92 0,88
Production de vapeur
à 80 bar, saturée :
— brute (3) ................................. 2,89 3,0 2,62 2,56 2,61
— nette (4) .................................. 2,69 2,61 2,17 2,06 2,11
(1) 100 % O2 de pureté 99,5 % vol.
(2) 100 % de recyclage du carbone (sauf cas du gaz naturel).
(3) Production brute = vapeur totale récupérée au niveau de l’échangeur (en kg/kg charge).
(4) Production nette = production brute – vapeur recyclée dans le réacteur (en kg/kg charge).
(5) Asphalte obtenu par désasphaltage d’un résidu sous vide au propane.

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Vapocraquage des hydrocarbures

par Claude RAIMBAULT


Ingénieur ENSPM
Expert à la Direction Stratégie-économie-programme à l’IFP
Professeur à l’ENSPM
et Gilles LEFEBVRE
Ancien Ingénieur Principal à l’IFP
Professeur honoraire à l’ENSPM

ENSPM : École Nationale Supérieure du Pétrole et des Moteurs


IFP : Institut Français du Pétrole

1. Généralités................................................................................................. J 5 460 - 2
1.1 Introduction.................................................................................................. — 2
1.2 Historique ..................................................................................................... — 2
2. Physico-chimie de la pyrolyse des hydrocarbures saturés .......... — 2
2.1 Considérations thermodynamiques........................................................... — 2
2.2 Schéma réactionnel simplifié ..................................................................... — 3
2.3 Caractéristiques cinétiques......................................................................... — 4
3. Étude des variables opératoires de la section de pyrolyse.......... — 5
3.1 Température de réaction ............................................................................. — 5
3.2 Temps de séjour........................................................................................... — 6
3.3 Pression partielle des hydrocarbures et rôle de la vapeur d’eau ............ — 6
3.4 Analyse de la notion de sévérité ................................................................ — 7
3.5 Taux de conversion...................................................................................... — 8
4. Influence de la nature de la charge sur les performances de
l’unité de vapocraquage......................................................................... — 8
4.1 Vapocraquage de l’éthane .......................................................................... — 8
4.2 Vapocraquage de naphta ............................................................................ — 8
4.3 Vapocraquage de gazoles ........................................................................... — 10
5. Mise en œuvre industrielle en four tubulaire .................................. — 10
5.1 Fours de pyrolyse ........................................................................................ — 10
5.1.1 Dimensionnement des tubes de pyrolyse ........................................ — 10
5.1.2 Conception et agencement des fours ............................................... — 12
5.2 Trempe.......................................................................................................... — 13
5.3 Cokage et durée de cycle ............................................................................ — 14
5.4 Fractionnement primaire ............................................................................ — 14
5.5 Train de séparation et de purification aval ................................................ — 15
5.5.1 Séparations ......................................................................................... — 15
5.5.2 Compression, désulfuration et séchage ........................................... — 15
5.6 Qualité des produits .................................................................................... — 15
6. Évolution technologique et contexte économique ........................ — 15
6.1 Évolution technologique ............................................................................. — 15
6.2 Contexte économique ................................................................................. — 16
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. J 5 460
p。イオエゥッョ@Z@ウ・ーエ・ュ「イ・@QYYU

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VAPOCRAQUAGE DES HYDROCARBURES ___________________________________________________________________________________________________

e vapocraquage consiste en la pyrolyse d’hydrocarbures saturés issus du


L gaz naturel ou du pétrole, en présence de vapeur d’eau.
Il produit en premier lieu l’éthylène, mais aussi le propylène et secondairement,
selon la charge utilisée, une coupe C4 riche en butadiène et une coupe C 5+ (hydro-
carbures à cinq carbones ou plus) à forte teneur en aromatiques et plus particu-
lièrement en benzène. Cet inventaire ne tient pas compte des constituants légers
ou lourds qui, au sein même du vapocraquage, constituent une source d’énergie
non négligeable et lui assurent sur ce plan son autonomie. La diversité des pro-
ductions auxquelles le vapocraquage donne lieu en fait une unité clé, autour de
laquelle se greffera le complexe des installations de la chimie organique indus-
trielle, utilisatrice des hydrocarbures de base produits.

1. Généralités Depuis 1920, déjà, aux États-Unis, l’éthylène était obtenu par pyro-
lyse de l’éthane, constituant associé au méthane dans certains gaz
naturels. C’est en 1942 que la société British Celanese construisit la
1.1 Introduction première unité de craquage de gazole lourd qui fournissait l’éthylène
nécessaire à la synthèse ultérieure de l’éthanol et de l’acide acétique.
La production d’éthylène était d’environ 6 kt/an.
Le développement considérable de la pétrochimie, lié à la crois-
sance des industries productrices de matières plastiques, de fibres Dès 1950, trois complexes pétrochimiques importants traitant des
synthétiques, d’élastomères de synthèse, de détergents et de coupes pétrolières étaient construits, l’un par British Petroleum à
nombreux autres produits de la chimie organique, requiert chaque Grangemouth en Écosse, d’une capacité de 30 kt/an d’éthylène, le
année des quantités plus importantes de matières premières hydro- deuxième par Petrochemicals Ltd à Carrington dans le Lancashire,
carbonées. d’une capacité de 10 kt/an d’éthylène, enfin le troisième par ICI, à
Wilton dans le Cleverland, qui fournissait 30 kt/an d’éthylène.
Or, le gaz naturel et les fractions pétrolières obtenues par distilla-
tion, après le fractionnement primaire du brut, sont principalement Entre 1940 et 1950, la capacité moyenne des unités est passée
constitués d’hydrocarbures saturés, paraffines (alcanes) et naph- de 10 à 50 kt/an d’éthylène, mais c’est au cours de la décennie 1950-
tènes (cyclanes), dont la réactivité chimique est médiocre et qui ne 1960 que sont apparues les unités géantes produisant couramment
donnent lieu qu’à des transformations chimiques lentes et peu 300 kt/an d’éthylène à partir du naphta pétrochimique [2].
sélectives : ils ne permettent guère d’atteindre une grande diversité Actuellement, la capacité de production européenne d’éthylène est
de composés chimiques plus ou moins complexes. En revanche on de 25 Mt/an. La France, pour sa part, qui en 1953 avait monté son
peut, par vapocraquage, obtenir des hydrocarbures insaturés de premier vapocraqueur de 18 kt/an à Lavéra (Bouches-du-Rhône), a
nature aliphatique ou aromatique qui, en raison de leurs nombreuses atteint en 1983 une capacité de production de 3 Mt/an, inchangée
possibilités réactionnelles, présentent sur le plan de la synthèse depuis.
organique une souplesse d’emploi remarquable (voir Tableau synop-
tique. Pétrochimie [J 6 015] dans le présent traité).
L’acétylène, qui a été pendant de longues années l’hydrocarbure
de base le plus utilisé en chimie aliphatique, a été progressivement 2. Physico-chimie
remplacé, en raison de son coût de production élevé, par l’éthylène,
le propylène ou le butadiène, selon les synthèses envisagées de la pyrolyse
(cf. tableau A en [Doc. J 5 460]). Actuellement, l’éthylène conserve
toujours son avantage économique par rapport à l’acétylène issu du des hydrocarbures saturés
gaz naturel ou du charbon.
2.1 Considérations thermodynamiques
1.2 Historique Sur le plan thermodynamique [1], les hydrocarbures insaturés
recherchés n’apparaissent stables par rapport aux hydrocarbures
Initialement, vers 1930 et durant la Seconde Guerre mondiale, saturés qui leur donnent naissance qu’à des températures relati-
l’éthylène était produit par liquéfaction et fractionnement des gaz vement élevées (> 350 oC). Ce fait est illustré par la figure 1 qui tra-
de fours à coke, par déshydratation de l’alcool éthylique et même duit la variation, en fonction de la température T (en kelvins), de
par hydrogénation partielle de l’acétylène. À mesure que la demande o
en éthylène se faisait plus importante, on s’est tourné de manière l’énergie libre de formation ∆G form rapportée à un atome de car-
croissante, pour sa fabrication, vers la pyrolyse des fractions pétro- bone, pour quelques composés hydrocarbonés caractéristiques.
lières (gaz légers, naphta pétrochimique). Pour une température donnée, un hydrocarbure est :
— instable vis-à-vis de ses éléments constitutifs (C + H2) et de tous
Naphta pétrochimique est le nom donné à des coupes pétro- les hydrocarbures dont le point représentatif demeure situé
lières dont l’intervalle de distillation se situe entre 35 et 200 oC au-dessous du sien propre (puisque sa formation à partir de ces
environ. derniers nécessite alors un apport d’énergie) ;
— stable dans le cas contraire.

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J 5 460 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés

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___________________________________________________________________________________________________ VAPOCRAQUAGE DES HYDROCARBURES

Compte tenu de l’extrême simplicité de la structure chimique d’un


hydrocarbure saturé, comme l’heptane normal par exemple, l’acti-
vation thermique ne peut provoquer que la rupture d’une liaison
C — C ou C — H.
Dans le premier cas, la coupure aléatoire d’une liaison C — C de
la chaîne carbonée, qui constitue la réaction de craquage, fournit
une paraffine et une oléfine :
C7H16 → C3H8 + C4 H8
o
avec ∆G T  J  mol  = 75 200 – 142 T .
La rupture d’une liaison C — H entraîne par déshydrogénation la
formation d’une oléfine (de même nombre d’atomes de carbone
que l’hydrocarbure saturé de départ) et d’hydrogène :
C7H16 → C7H14 + H2
o
avec ∆G T  J  mol  = 125 400 – 142 T .
Il s’agit de transformations fortement endothermiques, s’effec-
tuant avec augmentation du nombre de molécules. En vertu du
principe de Le Chatelier, le craquage ainsi que la déshydrogénation
des hydrocarbures saturés sont donc favorisés, sur le plan thermo-
dynamique, à haute température et basse pression.
Mais, par ailleurs, la comparaison des énergies des liaisons C — C
et C — H qui sont respectivement de 345 kJ/mol et 413 kJ/mol permet
d’affirmer que l’acte primaire de la pyrolyse des hydrocarbures satu-
rés réside dans la rupture d’une liaison C — C, puisque ce processus
nécessite une énergie nettement inférieure à celle mise en jeu dans
la coupure d’une liaison C — H.

2.2 Schéma réactionnel simplifié


Pour plus de détails, on se reportera à la référence bibliographique [2].
La réaction fondamentale qui gouverne le craquage des fractions
lourdes (figure 2) consiste en la scission d’un hydrocarbure alipha-
tique saturé en une paraffine et une oléfine [réaction ➀] : c’est le
craquage primaire. Les entités ainsi formées conduisent, par des
réactions de craquage secondaire [réactions ➁ et ➂] en divers
points de leur chaîne hydrocarbonée, à des produits légers variés,
riches en oléfines, dont la composition et le rendement dépendent
des conditions opératoires retenues. Simple dans son principe, la
transformation chimique des paraffines selon cette voie apparaît en
réalité beaucoup plus complexe, car de nombreux autres processus
interfèrent avec les craquages primaires et secondaires.
Figure 1 – Stabilité thermodynamique des hydrocarbures :
Ainsi, les réactions réalisant la déshydrogénation plus poussée
diagramme d’énergie libre
des oléfines directement issues du craquage sont à terme les plus
gênantes, car elles fournissent des composés fortement insaturés
comme les dérivés acétyléniques [réaction ➃], qui constituent des
Il en ressort notamment que les hydrocarbures sont à toute tempé- impuretés gênantes dans l’utilisation des coupes C2 ou C3 oléfi-
rature instables par rapport à leurs éléments constitutifs, à l’excep- niques, ou encore les dioléfines [réaction ➃] qui possèdent, lorsque
tion toutefois du méthane dans le domaine des températures basses les doubles liaisons qu’elles renferment sont en positions conju-
et moyennes (moins de 200 oC). guées dans la molécule, une réactivité chimique prononcée.
L’acétylène, dont la synthèse à partir de ses éléments ou des hydro- Or, ces dernières réagissent dans une direction opposée au cra-
carbures saturés nécessite de toute manière une énergie consi- quage, puisqu’elles donnent naissance à des produits lourds par
dérable (ce qui explique son coût de fabrication prohibitif), ne devient réaction de Diels et Alder ou cycloaddition, c’est-à-dire attaque d’une
stable par rapport aux paraffines les plus simples qu’à des tempé- oléfine par une dioléfine conjuguée avec formation d’une structure
ratures largement supérieures à 1 000 oC. cyclique comprenant six atomes de carbone [réaction ➄].
La situation apparaît plus favorable avec les hydrocarbures insa- Les composés cycliques insaturés ainsi formés sont alors sus-
turés tels que l’éthylène, stable par rapport à l’éthane au-dessus ceptibles de fournir, par déshydrogénation ultérieure poussée
de 750 oC, ou le benzène qui se révèle, sur le plan thermodynamique, [réaction ➅] des hydrocarbures aromatiques variés et notamment
favorisé par rapport à l’hexane normal dès 350 ou 400 oC. le benzène.
Le recours à des températures élevées dans la synthèse des hydro- La transformation d’hydrocarbures saturés en oléfines de masse
carbures oléfiniques à partir des paraffines (ou alcanes) ou des moléculaire moindre s’accompagne donc d’une aromatisation
naphtènes (ou cyclanes) constitue aussi, sur le plan cinétique, un marquée de la fraction lourde des effluents de réaction. Ces produits
moyen d’activation de la réaction chimique dont la vitesse augmente constituent de plus les précurseurs naturels de substances poly-
exponentiellement, conformément à la loi d’Arrhenius, avec la tem- aromatiques condensées désignées, selon leur état pâteux ou solide,
pérature. sous les vocables généraux de goudrons et de coke, vers lesquelles
ils évoluent inéluctablement par une succession appropriée de réac-
tions de cycloaddition et de déshydrogénation [réaction ➆].

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VAPOCRAQUAGE DES HYDROCARBURES ___________________________________________________________________________________________________

Figure 2 – Schéma réactionnel simplifié de la pyrolyse des alcanes

2.3 Caractéristiques cinétiques

Se reporter aux références bibliographiques [2] [3].


La figure 3 indique, pour chaque réaction, le niveau thermique
requis (température minimale de la réaction) pour atteindre un degré
d’avancement élevé à des temps de contact de l’ordre de la seconde.
Alors que la vitesse de la réaction de craquage devient importante
au-dessus de 700 oC, les déshydrogénations n’interviennent de
manière notable qu’à partir de 800 ou 850 oC. On peut remarquer
par ailleurs que les processus de formation des hydrocarbures poly-
aromatiques et du coke, qui ne se déroulent de manière rapide qu’à
des températures supérieures à 900 ou 1 000 oC, constituent de toute
manière les étapes les plus lentes du schéma réactionnel de la pyro-
lyse. Il apparaît donc que l’adoption de temps de contact élevés ou
l’élévation des températures de réaction favorisent d’autant la filière Figure 3 – Pyrolyse des hydrocarbures : vitesse relative
conduisant aux dérivés aromatiques lourds, et ce, aux dépens de des différentes étapes composantes du schéma réactionnel
la sélectivité de la production d’oléfines légères par craquage.
La polymérisation des composés insaturés aliphatiques (oléfines,
dioléfines et dérivés acétyléniques) est, en raison de leur réactivité Dans le cas déjà complexe de la pyrolyse de l’éthane, les diffé-
intrinsèque élevée, très rapide dès les basses températures, mais rentes étapes élémentaires sont :
ces réactions demeurent, dans les conditions opératoires de la pyro- — l’amorçage :
lyse (haute température et basse pression), particulièrement défavo- ●
risées du point de vue thermodynamique. CH 3  CH 3 → CH 3 + CH 3 ●

Par ailleurs, en ce qui concerne les étapes de craquage proprement


dites, la réactivité des hydrocarbures augmente, dans chaque — la propagation :
famille, avec le nombre d’atomes de carbone (figure 4). ● ●
CH 3 + CH 3  CH 3 → CH 4 + CH 3  CH 2
On peut s’interroger, pour terminer, sur la nature des formes
intermédiaires réactionnelles créées par activation thermique dans CH 3  CH2 → CH 2  CH 2 + H
● ●

la pyrolyse des hydrocarbures saturés. Le caractère radicalaire des H + CH 3  CH 3 → H 2 + CH 3  CH 2


● ●

processus concernés a été mis en évidence par Rice et ses colla-


borateurs [4] [5] [6].

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J 5 460 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés

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Production des gaz de synthèse


par vaporeformage

par Fabrice GIROUDIÈRE


IFP Énergies nouvelles
et André LE GALL
Technip

1. Présentation et contexte........................................................................ J 5 480v2 - 2


2. Procédé de vaporeformage ................................................................... — 3
2.1 Charges ......................................................................................................... — 3
2.2 Prétraitement des charges .......................................................................... — 3
2.3 Reformage .................................................................................................... — 4
2.4 Préreformage et reformage secondaire ..................................................... — 10
3. Purification du gaz de synthèse........................................................... — 11
3.1 Conversion du CO par la vapeur d’eau ...................................................... — 11
3.2 Séparation par adsorption PSA .................................................................. — 12
3.3 Décarbonatation du gaz............................................................................... — 13
3.4 Méthanisation............................................................................................... — 15
4. Schémas alternatifs avec captage du CO2........................................ — 16
4.1 Captage et stockage du CO2 dans une unité de production
d’hydrogène ................................................................................................. — 16
4.2 Procédé HyGenSys® .................................................................................... — 16
5. Utilisation du gaz de synthèse ............................................................. — 17
5.1 Marché .......................................................................................................... — 17
5.2 Données économiques ................................................................................ — 18
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 480v2

e dossier concerne uniquement la production d'hydrogène à partir de


C charges légères par vaporeformage, et ne concerne pas la production par
oxydation partielle de charges lourdes (partial oxidation – POX en anglais), ni
par gazéification du charbon [J 5 200].
Le terme gaz de synthèse peut prêter à une interprétation très vaste. En réalité, il
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@RPQR@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

est d’usage de considérer qu’il s’applique à des mélanges gazeux susceptibles de se


combiner pour réaliser la synthèse de composés organiques ou celle de l’ammoniac.
On trouve systématiquement, dans les gaz de synthèse, deux ou plusieurs,
combinés ou non, des quatre éléments les plus répandus dans la nature : le car-
bone, l’oxygène, l’hydrogène et l’azote. L’oxygène est pratiquement toujours
combiné au carbone sous forme de monoxyde ou de dioxyde de carbone.
L’hydrogène est le composant essentiel du gaz de synthèse. L’azote est
indispensable à la synthèse de l’ammoniac, mais serait inerte dans le cas des
synthèses de produits organiques.
Les hydrocarbures (gaz naturel ou plus rarement coupes pétrolières) sont la
source principale de gaz de synthèse.
Les matières premières les plus légères font l’objet d’une conversion cataly-
tique, utilisant la vapeur d’eau comme oxydant, appelée vaporeformage. Les
charges plus lourdes (résidus pétroliers, charbon, biomasse...) font l’objet
d’une conversion à l’oxygène appelée oxydation partielle ou gazéification.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. J 5 480v2 – 1

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PRODUCTION DES GAZ DE SYNTHÈSE PAR VAPOREFORMAGE _______________________________________________________________________________

Après leur démarrage dans les années 1980, ces procédés de conversion
sont devenus marginaux, mais connaissent depuis quelques années un regain
d’intérêt, soit dans des contextes géographiques particuliers (Chine, Inde dans
les années à venir), soit du fait de la raréfaction des débouchés futurs des
résidus pétroliers (fuels à très haute teneur en soufre, coke de pétrole...).
La production de gaz de synthèse par oxydation partielle des fuels lourds et
par gazéification du charbon fait l’objet des dossiers [J 5 440] et [J 5 200].

1. Présentation et contexte
Vapo- Conversion
Dans la fabrication du gaz de synthèse, on opère donc la trans- Purification Purification
reformage du CO
formation de C et/ou CnHm en CO, CO2 , H2 avec parfois addition
de N2 , l’oxygène étant apporté soit directement, soit par la vapeur
d’eau ou l’air. En termes d’utilisation du gaz de synthèse, on
distingue essentiellement :
– H2 purifié qui est le composant essentiel de toutes les
réactions d’hydrogénation ;
– le mélange CO + CO2 + H2 qui est à l’origine de la synthèse du
méthanol ;
– CO seul qui conduit aux réactions de carbonylation ;
– le mélange CO + H2 qui est la base des synthèses oxo et des Gaz Hydrogène
synthèses Fischer-Tropsch (Gas-to-Liquid ) ; naturel
– H2 et N2, débarrassés de tous les composés oxygénés, qui per- a production d’hydrogène par vaporeformage
mettent la synthèse de l’ammoniac, base essentielle de la chimie
de l’acide nitrique et des engrais azotés.
L’objet du présent dossier est l’étude des différentes opérations
de production et de traitement des gaz de synthèse par la voie du Vapo- Synthèse de
Purification Distillation
reformage, sachant toutefois que certaines unités de ce traitement reformage méthanol
s’appliquent aussi aux installations produisant du gaz de synthèse
par oxydation partielle de fuel lourd ou par gazéification de char-
bon. C’est le cas des unités de conversion et de décarbonatation.
Les trois schémas de la figure 1 présentent de manière synthé-
tique les chaînes de production d’hydrogène, de méthanol et
d’ammoniac à partir de gaz naturel.
Les développements récents des unités de production et de
conversion de gaz de synthèse ont essentiellement porté sur l’aug-
mentation des capacités unitaires. Gaz Méthanol
Le développement de nouvelles générations de catalyseurs, de naturel
métallurgies (en particulier pour les tubes catalytiques des fours b production de méthanol par vaporeformage
de vaporeformage) et l’introduction de technologies telles que le
reformage secondaire à l’oxygène ont facilité cette tendance à
l’augmentation des capacités unitaires.
Conversion Décarbo-
Méthanation
Les unités de grande taille atteignent aujourd’hui du CO natation
220 000 Nm3/h pour les unités d’hydrogène, 5 000 t/jour et
3 000 t/jour respectivement pour les unités de méthanol et Reformage Synthèse
d’ammoniac. Air
secondaire d’ammoniac

Dans l’état actuel de la technologie, de nouveaux accrois- Vapo-


Purification
sements des capacités unitaires sont envisageables dans un avenir reformage
proche en utilisant des technologies telles que le reformage auto-
therme (reformage à l’oxygène – ou à l’air – combiné avec un
reformage à la vapeur d’eau). Cette technologie permettra de
s’affranchir du four de vaporeformage qui est dans la majorité des
cas l’étape limitante, ainsi que le principal poste d’investissement.
Outre l’augmentation des tailles d’unités, trois tendances Gaz Ammoniac
devraient orienter le développement des unités de production de naturel c production d’ammoniac par vaporeformage
gaz de synthèse :
– le développement de solutions conduisant à des consommations
spécifiques plus faibles, du fait du renchérissement croissant des Figure 1 – Production d’hydrogène, de méthanol et d’ammoniac
coûts des matières premières ; à partir de gaz naturel

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J 5 480v2 − 2 est strictement interdite. − © Editions T.I.

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_______________________________________________________________________________ PRODUCTION DES GAZ DE SYNTHÈSE PAR VAPOREFORMAGE

– le recours croissant à des matières premières telles que les


résidus pétroliers (résidus, coke de pétrole...) et le charbon, voire à Gaz
la biomasse pour des unités de production de taille modeste ; Réacteur Réacteurs
de charge
d’hydrogénation d’adsorption de l’H2S (*)
– la réduction de l’impact environnemental des unités, avec, en préchauffée
particulier le développement de solutions permettant le captage du en zone de
dioxyde de carbone à des fins de stockage géologique. convection
du four
de SMR

2. Procédé de vaporeformage Hydrogène


recyclé
ou gaz
de synthèse
2.1 Charges
Le vaporeformage s’adresse à des charges légères, principa-
lement du gaz naturel, mais aussi du gaz combustible de raffinerie,
du gaz de pétrole liquéfié (propane, butane) ou du naphta léger. Gaz
Les charges les plus lourdes nécessitent de préférence un prérefor- désulfuré
mage. Ces charges doivent être exemptes d’impuretés pouvant (*) Les vannes et tuyauteries permettent le fonctionnement
désactiver les catalyseurs utilisés, principalement le soufre, qui des réacteurs d’adsorption de l’H2S soit en parallèle, soit en série.
doit être en quantité très faible dans la charge (quelques ppm) et SMR Steam Methane Reforming
est éliminé totalement dans le prétraitement incorporé à l’unité de
vaporeformage.
Figure 2 – Schéma de principe d’une désulfuration finale

Les teneurs en impuretés des gaz sont exprimées en partie La désulfuration finale est constituée le plus souvent d’un pre-
par million (ppm), soit 10–6, en volume (sauf indications mier réacteur d’hydrogénation, suivi de deux réacteurs d’absorp-
contraires). tion de H2S (cf. figure 2 la configuration la plus fréquente).

Au cas où la charge contient une quantité plus importante de 2.2.1 Hydrogénation


soufre, il convient de la traiter avant de l’envoyer au vaporefor-
mage, par exemple par un traitement aux amines, ou bien pour du
naphta par une hydrogénation catalytique. Se reporter au dossier Hydrogénation des hydrocarbures
[J 5 500].
Les composés chlorés sont également un poison des catalyseurs
mis en œuvre, ils sont transformés en acide chlorhydrique (HCl)
par l’hydrogénation du prétraitement, qui doit également alors Les composés du soufre (COS, mercaptans, THT) sont transfor-
comporter des masses adsorbantes spécifiques pour éliminer més en H2S par réaction avec l’hydrogène mélangé au gaz à trai-
l’HCl. ter. La réaction s’effectue à environ 350 à 400 oC, en présence de
catalyseur d’hydrogénation. La teneur en hydrogène dans le gaz
est de 2 à 5 % en volume ; cet hydrogène est généralement obtenu
par recyclage d’un peu du gaz de synthèse produit.
2.2 Prétraitement des charges
Les catalyseurs mis en œuvre sont utilisés pour hydrogéner à la
La désulfuration finale est l’élimination presque totale du soufre fois les composés du soufre, de l’oxygène, de l’azote et des hydro-
de la charge qui alimente un four de reformage à partir d’une carbures insaturés. Ils contiennent tous du molybdène et, soit du
charge à faible teneur en soufre : la teneur résiduelle maximale cobalt soit du nickel, le support étant de l’alumine. Les catalyseurs
admissible en soufre est de 0,1 ppm vol. sont fournis à l’état oxydé. Le catalyseur cobalt-molybdène CoMo
contient de 4 à 5 % en masse de CoO, et de 10 à 13 % en masse de
Les composés soufrés présents dans le gaz sont généralement : MoO3 , le catalyseur nickel-molybdène NiMo environ 3 % de NiO,
– du sulfure de dihydrogène H2S ; et de 5 à 9 % de MoO3 . Sous forme oxydée, ils présentent déjà
– des mercaptans légers R—SH, tels que le méthylmercaptan, une certaine activité pour l’hydrogénation. Cependant, leur activité
l’éthylmercaptan ; est fortement accrue par la fixation du soufre ; c’est pourquoi, il est
– du sulfure de carbonyle COS, notamment lorsque le gaz d’usage de présulfurer le catalyseur. Il faut en outre noter que la
contient des oxydes de carbone. présence de quantités significatives (> 1 % vol.) de CO et CO2
accompagnant l’hydrogène recyclé peut conduire à des réactions
Les gaz distribués par les réseaux nationaux contiennent sou- de méthanisation (§ 3.4) et ainsi provoquer une forte élévation de
vent des traceurs odorants tels que le tétrahydrothiophène (THT), à température et la détérioration du catalyseur.
raison de 1 à 5 ppm vol.
Le choix entre catalyseurs Co-Mo ou Ni-Mo dépend de la nature de
Les naphtas, outre les composés précédemment cités, la charge à traiter. Les catalyseurs contenant du cobalt ont une activité
contiennent des sulfures, composés plus lourds du type R—S—R′. supérieure à celle des catalyseurs contenant du nickel. Lorsque le gaz
L’élimination complète du soufre se fait par combinaison irréver- ou l’hydrogène recyclé contient des oxydes de carbone qui peuvent
sible du sulfure de dihydrogène avec de l’oxyde de zinc selon la causer une baisse d’activité temporaire des catalyseurs d’hydrodésul-
réaction : furation, les catalyseurs contenant du nickel sont recommandés, à
cause de leur faible sensibilité aux oxydes de carbone.
H2S + ZnO → ZnS + H2O La durée de vie attendue de ces catalyseurs est de 10 ans environ.

Une des premières étapes de la désulfuration est donc la trans-


formation de tous les composés du soufre en H2S par hydrogé- Ils peuvent être fournis par la plupart des fabricants euro-
nation catalytique. péens de catalyseurs cités en [Doc. J 5 480].

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PRODUCTION DES GAZ DE SYNTHÈSE PAR VAPOREFORMAGE _______________________________________________________________________________

2.2.2 Fixation du sulfure de dihydrogène Jusque vers les années 1950, seuls les hydrocarbures légers
étaient traités et ce, à basse pression.
Elle se faisait autrefois par adsorption et nous citerons pour La décennie 1950 vit apparaître le reformage de gaz sous
mémoire le charbon actif (additionné d’un promoteur chimique : pression.
CuO). Ce charbon actif n’avait qu’une faible capacité d’adsorption ;
aussi a-t-il été remplacé presque partout par l’oxyde de zinc avec Au cours de la décennie 1960 se développèrent les installations
une hydrogénation préalable du gaz. de reformage des hydrocarbures supérieurs, notamment les
hydrocarbures liquides : ce fut la grande période des unités de
La réaction de fixation de l’H2S peut s’effectuer à des tempéra- production d’ammoniac (1 000 t/j) utilisant les naphtas ou les
tures comprises entre 200 et 400 oC. La teneur en soufre à satu- essences légères comme matières premières.
ration dépend de la température et peut atteindre 20 à 35 kg pour
100 kg de ZnO. Les absorbants commerciaux se composent Les années 1970 virent le déclin du reformage du naphta rem-
aujourd’hui de plus de 90 % en masse de ZnO. La teneur en soufre placé progressivement par le gaz naturel de plus en plus abondant
du gaz et la durée de vie escomptée définissent la quantité de ZnO et moins onéreux.
mise en œuvre. De trop fortes teneurs en soufre conduiraient à des La quasi-totalité des unités d’ammoniac et d’hydrogène utilisant
volumes trop importants. On estime raisonnable de ne pas traiter, le reformage et construites dans le monde depuis lors est alimen-
dans ce genre d’installation, des gaz contenant plus de 100 ppm tée en gaz naturel. Bien entendu, la raison majeure de cette évo-
volume de soufre. lution est le coût de la matière première, la simplification du
reformage et de meilleures performances énergétiques.
Exemple Dans les années 1990, la plus grosse unité d’ammoniac attei-
Pour un atelier d’ammoniac de 2 000 t/j utilisant environ gnait 1 800 tonnes par jour ; puis, dans les années 2000, la taille
55 000 Nm3/h de gaz contenant 30 mg de soufre par Nm3 de gaz, la standard des unités d’ammoniac atteignait 2 000 tonnes par jour.
quantité d’oxyde de zinc mise en œuvre pour une durée de vie de Des unités de 3 000 tonnes par jour ont été construites avec le pro-
1 an est de 35 m3 environ. cédé Krupp Uhde (Dual Pressure Concept ) de synthèse d’ammo-
niac, et sont aujourd’hui les plus grandes unités d’ammoniac en
opération.
Une augmentation similaire de la capacité unitaire des unités de
On rappelle qu’un normomètre cube de gaz (1 Nm3) corres- production d’hydrogène et de méthanol a vu le jour. Actuellement,
pond à un mètre cube de gaz mesuré dans les conditions nor- les unités d’hydrogène atteignent couramment 100 000 Nm3/h, les
males de pression (1,013 bar soit 1,013 × 105 Pa) et de unités les plus importantes pouvant atteindre 200 000 Nm3/h. La
température (0 oC). taille de la section de vaporeformage est l’élément limitant l’aug-
mentation des capacités unitaires, ce qui a amené la mise en
œuvre de réacteurs de préreformage ou d’échangeurs-réacteurs.
2.2.3 Mise en œuvre industrielle Les unités de production de méthanol ont aujourd’hui des capa-
La mise en œuvre des catalyseurs d’hydrogénation et du réactif cités unitaires de 3 000 à 5 000 t par jour, suivant qu’elles mettent
d’absorption de H2S est assez simple. Le catalyseur est disposé en en œuvre un reformage secondaire à l’oxygène ou non.
un ou deux lits dans des réacteurs cylindriques verticaux.
Compte tenu des conditions de température et de la pression 2.3.2 Thermodynamique et cinétique
partielle d’hydrogène, les réacteurs d’hydrogénation et d’absorp- de la réaction
tion sont généralement construits en acier légèrement allié
contenant 1,25 % en masse de chrome et 0,5 % en masse de moly- 2.3.2.1 Principales réactions observées
bdène. Le gaz naturel et les hydrocarbures légers après désulfuration
Deux réacteurs d’adsorption à l’oxyde de zinc (figure 2) sont sont transformés en gaz de synthèse par vaporeformage.
généralement installés en série, le second assurant ainsi une garde Pour le méthane, constituant principal du gaz naturel, la réaction
à soufre complémentaire, mais peuvent également être utilisés en principale de reformage à la vapeur SMR (Steam Methane
parallèle. Reforming ) correspond à l’oxydation catalytique suivante :
En situation normale, les températures optimales vont de 350 à
400 oC. Il est recommandé de ne pas utiliser une température plus CH4 + H2O ⇔ CO + 3H2 , ∆H 760o C = 226 kJ/mol (1)
élevée que nécessaire. Les pressions opératoires vont couram-
ment de 20 à 45 bar (2 à 4,5 MPa). Il est nécessaire de veiller à ce Cette équation se généralise aux hydrocarbures légers sous la
qu’il y ait toujours un excès d’hydrogène recyclé. forme :

CnH2n +2 + n H2O ⇔ n CO + (2n + 1) H2 (2)


2.3 Reformage La principale réaction secondaire est la conversion du
monoxyde de carbone par la vapeur d’eau (Water gas shift ) :
2.3.1 Historique
CO + H2O ⇔ CO2 + H2 , ∆H 760o C = − 34, 3 kJ/mol (3)
Le procédé de reformage des hydrocarbures est apparu au
début de ce siècle à l’occasion des études et recherches conduites La réaction (1) est endothermique et thermodynamiquement
par le Dr F. Bergius, puis développées en Allemagne à l’IG Farben équilibrée donc incomplète ; le nombre de moles formées par la
pour la fabrication de carburants de synthèse. réaction est supérieur à celui des réactifs. En conséquence, la
Les premières unités industrielles de reformage d’hydrocarbures réaction dans le sens direct est favorisée par un fonctionnement à
à la vapeur furent réalisées dès 1930 aux États-Unis par la Stan- faible pression et une forte température.
dard Oil Company of New Jersey. D’autres réalisations suivirent La réaction (3) de conversion du monoxyde de carbone par la
rapidement, en Angleterre et en Allemagne principalement. vapeur d’eau est, quant à elle, exothermique, équilibrée et équimo-
Seulement après la guerre furent installés les premiers fours de laire. Cela conduit à rechercher un fonctionnement à basse tempé-
reformage à l’ONIA à Toulouse (1946-1949). rature pour favoriser la production d’hydrogène. Du fait du

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Traitement du gaz naturel

par Julia MAGNÉ-DRISCH


Ingénieur de l’École supérieure de chimie organique et minérale (ESCOM)
Docteur en chimie – sciences pétrolières de l’Université Pierre et Marie Curie (Paris VI),
France
Chef du département Séparation
Chef de projet Traitement de gaz
IFP Énergies nouvelles
et Sébastien GONNARD
Ingénieur de l’École supérieure de chimie physique électronique de LYON (ESCPE), France
Ingénieur recherche, conception et modélisation de procédés
IFP Énergies nouvelles

1. Présentation et contexte .................................................................... J 5 482 - 2


2. Séparation en sortie de puits ............................................................ — 7
3. Procédés de désacidification ............................................................ — 8
4. Déshydration.......................................................................................... — 22
5. Dégasolinage.......................................................................................... — 25
6. Production du soufre ........................................................................... — 26
7. Traitement des gaz de queue ............................................................ — 27
8. Conclusion .............................................................................................. — 28
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. J 5 482

e gaz naturel est une énergie d’utilisation souple, offrant des réserves
L abondantes et émettant moins de CO2 que le pétrole pour une même
quantité d’énergie dégagée. À ce titre, il joue un rôle important dans la tran-
sition énergétique en attendant le déploiement de nouvelles énergies à
contenu moindre en carbone. Le gaz naturel permet d’aider à répondre à
l’accroissement de la demande énergétique mondiale, tout en répondant aux
besoins de respect de l’environnement.
p。イオエゥッョ@Z@ョッカ・ュ「イ・@RPQU@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

Le marché du gaz naturel est en croissance, avec une prévision d’une aug-
mentation de la demande en gaz de 1,6 % pour le gaz naturel et de 3 % pour le
gaz naturel liquéfié. Afin de répondre à cette demande, à un horizon 2035, les
capacités de traitement à installer constituent un enjeu majeur pour les opéra-
teurs gaziers et pour les fournisseurs de technologies.
La chaîne de traitement du gaz naturel, depuis la tête de puits jusqu’à une
utilisation commerciale, comporte plusieurs étapes successives qui vont
dépendre de la nature du gaz (composition H2S, CO2 , COS, mercaptans, hydro-
carbures lourds, aromatiques...), des conditions de disponibilité (température,
pression, débit), de l’application visée (gaz naturel liquéfié ou non) et des spé-
cifications imposées, du fait de l’application visée mais aussi variables selon
les pays. Le choix des technologies est donc dépendant de critères techniques
mais aussi de critères économiques.
L’objectif de la chaîne de traitement du gaz est de :
– désacidifier le gaz brut (élimination du CO2 et de l’H2S) afin de répondre
aux spécifications requises pour une utilisation, mais aussi afin de pouvoir
transporter le gaz ou le liquéfier ;

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TRAITEMENT DU GAZ NATUREL _______________________________________________________________________________________________________

– éliminer les composés soufrés tels que les mercaptans, le sulfure de car-
bonyle (COS) ou le disulfure de carbone (CS2) qui sont présents en faibles
teneurs mais contribuent à la teneur en soufre total dans le gaz ;
– déshydrater le gaz ;
– dégasoliner le gaz traité afin de récupérer les hydrocarbures liquides
valorisables ;
– traiter le gaz acide issu de l’étape de désacidification par une chaîne de
production du soufre permettant de minimiser les rejets de gaz soufrés à
l’atmosphère (H2S, SO2).
Cet article présente une revue des technologies existantes pour réaliser les
différentes étapes nécessaires dans la chaîne de traitement du gaz naturel. Les
procédés de liquéfaction ne sont pas abordés dans ce dossier.

1. Présentation et contexte

Production de gaz naturel (bcm)


900
800
700
1.1 Marché du gaz naturel 600
Dans le contexte énergétique mondial, et dans l’attente du 500
déploiement de nouvelles énergies à contenu moindre en carbone, 400
le gaz naturel est une énergie majeure de transition, permettant de 300
répondre à l’accroissement des besoins mondiaux, tout en mini- 200
misant l’impact environnemental des énergies fossiles. En 2013, le 100
marché international du gaz a subi une augmentation de 2,1 % par 0
rapport à 2012.
d

nt

ie

pe

ue

e
CE

tin
or

an
rie

ro

iq
La production mondiale de gaz naturel est en constante aug-
N

La

fr
-O

Eu
du

A
O

ue
mentation avec à ce jour une prévision moyenne de croissance de
en

e-
ue

iq
oy

si
+ 1,6 %/an pour le gaz naturel et de + 3 %/an pour le gaz naturel

ér
iq

A
M

m
ér

liquéfié, à un horizon 2035. Les évolutions de la production de gaz

A
m
A

sont variables selon les zones géographiques, avec pour


l’Amérique du Nord, l’impact de la production des gaz non 2011 2012 2013
conventionnels (figure 1).
Figure 1 – Évolution de la production mondiale de gaz naturel
par zone géographique sur la période 2011-2013 (bcm)
9 3
Le bcm (billion cubic meter), soit 10 m , est l’unité conven-
tionnellement utilisée dans le langage des opérateurs gaziers.
Les mètres cubes de gaz naturel correspondent à des mesures En 2014, 688 installations de production de gaz en fonction-
dans les conditions standards (Sm3, à 15 °C et 1,013 bar). La nement sont recensées dans le monde (figure 4) et 256 projets en
conversion entre des mètres cubes standards et des mètres construction ou planifiés [2].
cubes aux conditions normales (Nm3, à 0 °C et 1,013 bar) est L’accroissement du besoin mondial en gaz montre les enjeux en
donnée par la relation : 1 Nm3 = 1,055 Sm3. termes de développement et de choix de technologies permettant
de traiter les gaz bruts de telle manière à les rendre transportables
et utilisables pour des applications commerciales.
En 2014, les réserves prouvées de gaz dans le monde sont de
200,576 bcm [1]. La forte disparité géographique de ces réserves
(figure 2) nécessite la mise en œuvre de différents types de tech-
nologies (§ 1.4), la nature du gaz et donc le type de traitement 1.2 Objectifs du traitement
requis étant souvent liée à une zone géographique.
Le traitement des gaz bruts, depuis la tête de puits jusqu’à la
De manière simplifiée, on peut classer les gaz en trois familles : production de soufre, a plusieurs objectifs :
– gaz brut comportant du CO2 ; – éliminer les composés acides, qui rendent le gaz impropre à la
– gaz brut comportant de l’H2S ; consommation du fait de leur toxicité (H2S) ou faible pouvoir calo-
– gaz brut comportant du CO2 et de l’H2S. rifique (CO2), et/ou afin de pouvoir liquéfier le gaz ;
Par exemple, en Europe et en Amérique du Sud, 2/3 des gaz ne – éviter les problèmes de corrosion, inhérents à la présence de
comporte que du CO2 tandis qu’au Moyen-Orient, la quasi-totalité composés acides, lors du transport du gaz par pipe ;
des gaz comporte du CO2 et de l’H2S. En Australie, Asie et CEI, – éliminer l’eau du gaz, qui conduit à la formation d’hydrates
plus de la moitié des réserves correspondent à des gaz avec CO2 et dans les pipes ;
exempts d’H2S. Les régions Amérique du Nord et Canada sont – séparer les fractions à fortes valeurs ajoutées (éthane,
connues pour leur gaz à fortes teneurs en H2S. propane, butanes, C5+) ;
L’évolution de la demande mondiale de gaz a conduit à un – minimiser les rejets à l’atmosphère ;
accroissement notable des capacités de production (figure 3). La – d’une manière générale, atteindre les spécifications requises
capacité globale a été multipliée par 4 en 35 ans. (§ 1.3).

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________________________________________________________________________________________________________ TRAITEMENT DU GAZ NATUREL

Europe/Eurasie
34,9 %

Amérique Nord
5,7 %

Asie/Pacifique
8,4 %

Moyen-Orient
Afrique 40,0 %
7,2 %

Amérique Sud + Centre


3,8 %

5,5 Valeur en 1 000 milliards de m3


> 10 000 milliards de m3 > 1 000 milliards de m3
> 5 000 milliards de m3 > 500 milliards de m3
> 2 500 milliards de m3 < 500 milliards de m3

RÉSERVES MONDIALES : 200 300 milliards de m3

Figure 2 – Réserves prouvées de gaz dans le monde en 2013 (doc. CEDIGAZ)

450 140
400 120
350 100
300 80
Gaz (bcm)

Gaz (bcm)

250 133
60
200 399
342 40
320 69
150 310
242 243 20 32 24 23 7 6
100 183
16 13 13
160 0
127 A ie e a e ie e e he ie
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1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 2014

Figure 3 – Évolution de la capacité de production mondiale de gaz par année et capacités de production des 10 plus gros pays producteurs

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TRAITEMENT DU GAZ NATUREL _______________________________________________________________________________________________________

Asie/Océanie Autres
22 3 Asie/Océanie Autres
4% 2%
CEI 50

Europe 151 CEI 29 % Amérique du


Nord
39 %
Amérique du
Nord
462

Europe 26 %

a installations de production b capacités de production

Figure 4 – Répartition des installations de production de gaz et pourcentage de capacités par zones géographiques

Le sulfure d’hydrogène (H2S) est un gaz inflammable


incolore, à l’odeur nauséabonde d’œuf pourri. Ce gaz présente 5,5
la particularité d’entraîner une perte d’odorat en 2 à 15 min
5,0
au-delà de 100 ppmv. L’H2S est irritant pour les yeux au-delà
de 10 ppmv et pour l’appareil respiratoire au-delà de 200 à 4,5
300 ppmv. Au-delà de 500 ppmv, l’H2S entraîne une perte de
conscience, un arrêt respiratoire puis la mort, dans un délai 4,0
d’exposition variant de quelques secondes à 30 min selon la 3,5
Teneur (% mol)

concentration. En cas d’incendie, l’H2S se transforme en SO2


par oxydation, les fumées émises sont donc également extrê- 3,0
mement nocives. 2,5

2,0
1.3 Composition, contaminants 1,5
et spécifications 1,0
La composition des gaz en tête de puits est très variable, selon 0,5
sa localisation géographique. La figure 5 présente des valeurs
0,0
moyennes des teneurs en H2S et CO2 selon les zones géogra-
phiques. Moyen CEI Afrique Asie Am. Am. Europe Océanie
Orient Lat. Nord
Il s’agit de valeurs moyennes mais on peut observer également
une grande disparité au sein d’une même zone géographique. H2S moyenne % molaire
CO2 moyenne % molaire
Exemple : à l’ouest de la Sibérie, les gaz acides comportent du
CO2 dans des teneurs variant de 0,5 à 2 %vol, tandis que dans la mer
Caspienne, on observe des gaz comportant jusqu’à 20 %vol de CO2 Figure 5 – Valeurs moyennes des teneurs en H2S et CO2 des champs
et 20 %vol d’H2S. de gaz selon la zone géographique

La composition des gaz en tête de puits va également varier


– d’impuretés soufrées comme les mercaptans (RSH) ou le
selon la durée de vie du site de production.
sulfure de carbonyle (COS) ;
Exemple : en France, le gaz de Lacq, lors de la mise en production – d’eau ;
en 1957, comportait environ 6 %vol d’H2S et 9 %vol de CO2 et cette – d’azote ;
composition a évolué au cours du temps jusqu’à atteindre 15 %vol – parfois de traces d’impuretés métalliques comme le mercure.
d’H2S et 10 %vol de CO2 à l’arrêt de la production en 2013.
À titre indicatif, les gammes de compositions des principaux
Le gaz naturel est composé : constituants des gaz sont reportées dans le tableau 1 ainsi que les
valeurs extrêmes observées sur certains champs plus atypiques.
– d’hydrocarbures, principalement du méthane (CH4) et de
l’éthane (C2H6) mais aussi d’hydrocarbures plus lourds pouvant
aller jusqu’à 6 atomes de carbone et plus. Ces hydrocarbures sont
majoritairement des alcanes linéaires ou ramifiés mais aussi des Les teneurs en impuretés des gaz sont exprimées en partie
alcanes cycliques (naphtènes) et des aromatiques ; par million, soit 10–6, en volume (ppmv, sauf indications
contraires).
– de composés acides, CO2 et/ou H2S ;

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________________________________________________________________________________________________________ TRAITEMENT DU GAZ NATUREL

Tableau 1 – Composition des gaz


Composé Gamme moyenne Min – Max observé
CO2 2 à 20 % vol. 0 – 70 % vol.
H2S 0 à 20 % vol. 0 – 40 % vol.
CH4 70 à 95 % vol. 30 – 98 % vol.
C2 H6 2 à 10 % vol. 0 – 20 % vol.
C3 H8 0 à 4 % vol. 0 – 15 % vol.
C4+ 0 à 3 % vol. 0 – 10 % vol.
BTX (Benzène, Toluène, Xylènes) 0 à 0,1 % vol. 0 – 0,5 % vol.
RSH 0 à 400 ppmv 0 – 1 000 ppmv
COS 0 à 100 ppmv 0 – 400 ppmv
CS2 0 à 5 ppmv 0 – 10 ppmv
H2 O 0 à 0,2 % vol. 0 – 0,5 % vol.
N2 0 à 5 % vol. 0 – 30 % vol.

dans les gaz bruts (tableau 1), nécessitent la mise en œuvre de


Tableau 2 – Spécifications H2S et CO2 sur le gaz technologies spécifiques de désacidification (§ 3.1) ou de trai-
Gaz H 2S CO2 tement additionnels (catalytique, tamis) qui permettent d’amener
le COS à une valeur inférieure à 1 ppmv et les mercaptans à une
Gaz naturel : valeur inférieure à 5-15 ppmv, teneurs limites souvent imposées
par les opérateurs gaziers.
– Gaz de pipe < 4 ppmv 2 à 3 %vol.
– GNL (gaz naturel liquéfié) < 4 ppmv < 50 ppmv
La spécification sur les mercaptans va dépendre du type de
Gaz de raffineries 4 à 150 ppmv pas de spécification mercaptan présent dans le gaz (CH3SH, C2H5SH, C3H9SH ou
plus lourds), la contribution de ces composés en termes de S
Fumées – ≈ 90 % d’élimination total étant dépendante de la masse molaire du composé.
Gaz de queue < 250 ppmv –
Gaz de synthèse (oxo) < 1 ppmv 10 à 100 ppmv D’autres contraintes sont également dépendantes des trai-
tements en aval. Lorsque le gaz acide (CO2 , H2S) issu de la désaci-
Gaz de synthèse dification du gaz naturel est envoyé sur une chaîne de traitement
– < 500 ppmv du soufre (unité Claus), il est préférable de limiter la teneur en
(ammoniac)
hydrocarbures et en particulier en aromatiques du gaz de charge
et de maximiser la teneur en H2S, un ratio H2S/CO2 > 0,5 à 0,6 per-
Les spécifications visées sont variables selon l’application mettant d’améliorer le fonctionnement du Claus et de maximiser la
(injection directe du gaz dans les réseaux ou liquéfaction) et selon durée de vie des catalyseurs. Le choix de technologies de traite-
les pays. Ces spécifications résultent de réglementations environ- ment peut donc également être conditionné par la teneur initiale
nementales (pour les composés soufrés), de la nécessité d’ajuster dans le gaz brut en hydrocarbures lourds et en particulier en aro-
le pouvoir calorifique du gaz (limitation de la teneur en CO2) et matiques et par le ratio initial H2S/CO2 , afin de limiter la solubilité
sont conditionnées par les limitations inhérentes aux procédés en des hydrocarbures et afin de maximiser la sélectivité H2S/CO2 .
aval (limite sur le CO2 admissible pour les procédés de liqué-
faction).
Les spécifications sur le CO2 et l’H2S classiquement rencontrées
1.4 Chaîne de traitement du gaz naturel
pour le gaz naturel selon l’application visée, mais aussi pour La figure 6 présente un schéma global, depuis la sortie du puits,
d’autres types de gaz sont résumées dans le tableau 2. jusqu’à la production des produits et coupes valorisables. En tête
de puits, une première séparation est effectuée, de telle manière à
isoler le gaz des hydrocarbures les plus lourds, puis le gaz est
Pour plus de détails sur les compositions et spécifications éventuellement comprimé, avant de subir les traitements et sépa-
des gaz de synthèse, se reporter à l’article Production des gaz ration, permettant de produire le gaz de vente (vers pipe) et les
de synthèse par vaporéformage [J 5 480]. coupes éthane, propane et butane, qui constituent les GPL (gaz de
pétrole liquéfié), C5+ (hydrocarbures à 5 atomes de carbone et
plus), les condensats et le soufre. La suite de cet article porte sur la
La spécification sur le soufre total est généralement comprise description des technologies de traitements mises en œuvre dans
entre 10 et 50 mg/Nm3 de gaz. Cette spécification sur le S total le bloc diagramme « Traitement du gaz » du schéma de la figure 6.
nécessite donc d’éliminer l’H2S mais également les autres Après la séparation en tête de puits, la chaîne de traitement du
composés soufrés comme le sulfure de carbonyle (COS) ou les gaz naturel comporte des étapes clés et des étapes optionnelles,
mercaptans. Ces composés soufrés, pourtant en faibles teneurs qui vont dépendre de la composition du gaz brut traité (figure 7).

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TRAITEMENT DU GAZ NATUREL _______________________________________________________________________________________________________

CO2 pour EOR


Gaz traité
Réinjection vers pipe ou liquéfaction

Huile brute Éthane


Propane
i-Butane GPL GNL
Traitement du gaz n-Butane
C5+
Condensats
Soufre
Condensats
Compression Prétraitement
(option) (option)
Gaz

Puits Puits Puits


Production Production
Huile Gaz Gaz
Séparation Séparation

Poche Gaz ou
Gaz non associé
Gaz associé
Huile Eau Eau
Eau

Figure 6 – Schéma de production et traitement du gaz (doc. GPA)

Gaz naturel
vers pipe ou liquéfaction

C2
Gaz désacidifié Extraction C3 Déshydratation
Déshydratation
GNL C4 Purifications
C5+

Gaz brut Désacidification


Prétraitement Désacidification
Gaz très acides

Gaz acide

CO2
Enrichissement

H2S

Rejet à l'atmosphère
Traitement de Gaz aux spécifications
Claus Incinération
gaz de queue

Figure 7 – Étapes de la chaîne de traitement du gaz naturel

Étape 1 de désacidification, prétraitement des gaz très acides : gies mises en œuvre lors de cette étape (bulk removal) sont le plus
elle consiste à abaisser les teneurs en CO2 et/ou H2S, de telle souvent des procédés cryogéniques ou membranaires. La descrip-
manière à pouvoir soulager la désacidification principale et per- tion de ces procédés est détaillée dans les paragraphes 3.5 et 3.6.
mettre d’amener le gaz aux spécifications à des coûts moindres
(étape optionnelle, qui concerne les gaz bruts comportant des Étape 2 de désacidification : elle vise à éliminer le CO2 et l’H2S
teneurs supérieures à 20-30 % de CO2 ou d’H2S, cette limite étant dans le respect des spécifications requises. Le choix de la techno-
variable et dépendante du choix des technologies, des logie, à cette étape de désacidification, va principalement
contaminants et résultant d’un calcul économique). Les technolo- dépendre des teneurs en gaz acides et des contaminants, certains

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Hydrogénation des hydrocarbures

par Cécile THOMAZEAU


Docteur en chimie et catalyse de l’Université Lyon I
Ingénieur CPE
Ingénieur de recherche
Chef des projets « Hydrogénations sélectives » de l’IFP énergies nouvelles
et Christophe BOYER
Docteur en mécanique de fluides de l’INPG
Ingénieur ENSEEIHT
Ingénieur de recherche
Chef de projets à l’IFP énergies nouvelles
Actualisation de l’article rédigé en 1997 par Jean COSYNS et Germain MARTINO (IFP)

1. Caractéristiques générales des hydrogénations ............................. J 5 500v2 - 2


1.1 Thermodynamique ...................................................................................... — 2
1.2 Catalyseurs ................................................................................................... — 2
1.3 Cinétique....................................................................................................... — 4
1.4 Procédés ....................................................................................................... — 4
1.5 Utilisations dans l’industrie......................................................................... — 5
2. Hydrogénations sélectives..................................................................... — 5
2.1 Caractéristiques particulières...................................................................... — 5
2.2 Hydrogénations des alcynes et diènes....................................................... — 9
2.3 Hydrogénation des oléfines dans une coupe aromatique........................ — 15
2.4 Autres hydrogénations sélectives .............................................................. — 16
3. Hydrogénations partielles ou totales ................................................. — 17
3.1 Caractéristiques particulières...................................................................... — 17
3.2 Hydrogénations d’alcènes ou d’alcadiènes ............................................... — 17
3.3 Hydrogénations partielles ou totales des aromatiques ............................ — 18
4. Conclusions et perspectives ................................................................. — 20

Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 500v2


p。イオエゥッョ@Z@ウ・ーエ・ュ「イ・@RPQQ@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

armi les hydrocarbures insaturés, seuls les aromatiques sont présents


P dans les bruts pétroliers et, plus encore, dans les liquéfiats de charbons.
Les autres composés insaturés : oléfines, dioléfines et acétyléniques sont pro-
duits au cours des transformations thermiques ou catalytiques, mises en
œuvre dans les procédés de raffinage et de pétrochimie. Viscoréduction et
cokéfaction des résidus pétroliers, vapocraquage des gaz naturels liquéfiés,
des condensats de gaz ou des naphtas, et pyrolyse des charbons sont les prin-
cipaux procédés thermiques qui génèrent des molécules insaturées.
Déshydrogénation des paraffines légères, reformage catalytique des essences
et craquage catalytique des distillats sous vide sont les procédés catalytiques
les plus répandus qui génèrent les insaturés.
Les hydrogénations partielles, sélectives ou non, ou encore totales d’hydro-
carbures insaturés sont des réactions essentielles des opérations de raffinage
du pétrole et de production des grands intermédiaires pour la pétrochimie. En
effet, il est nécessaire d’éliminer les hydrocarbures les plus insaturés (alcynes,
dioléfines) des coupes pétrolières oléfiniques légères pour permettre leur utili-
sation en pétrochimie ou dans l’industrie des polymères, où des puretés en

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est strictement interdite. – © Editions T.I. J 5 500v2 – 1

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HYDROGÉNATION DES HYDROCARBURES _______________________________________________________________________________________________

oléfines très élevées sont exigées. De la même façon, ces composés insaturés,
précurseurs de gommes, doivent également être éliminés des coupes essences
pour assurer leur stabilité.
Les hydrogénations sélectives pour la production des oléfines sans hydrogé-
nation supplémentaire conduisant à la formation des alcanes et/ou à la
hydrogénation du cycle aromatique des différents composés de la coupe
essence, sont des réactions d’intérêt car elles permettent de valoriser au
maximum les coupes pétrolières traitées.
Les caractéristiques de ces réactions d’hydrogénation sont présentées dans
ce dossier : thermodynamique, cinétique, catalyseurs et procédés. Les hydro-
génations propres à la purification des différentes coupes pétrolières sont
ensuite décrites en fonction de leur type (sélective, partielle ou totale).
Comme il est d’usage dans la profession, les compositions indiquées sont,
sauf indication contraire, des valeurs massiques.

1. Caractéristiques générales Tableau 1 – Enthalpies de réaction, mesurées


à 82 oC, pour l’hydrogénation de quelques
des hydrogénations hydrocarbures insaturés [1]
− ⌬H
Réaction
(kJ · mol–1)
1.1 Thermodynamique
Acétyléniques
Toutes les hydrogénations sont des réactions acétylène → éthylène .................................. 177
exothermiques [1]. Dans chaque famille de composés (tableau 1),
propyne → propylène ................................. 166
l’enthalpie libre d’hydrogénation diminue légèrement lorsque la
masse moléculaire des hydrocarbures augmente. 2-butyne → 2-butène ................................... 154

De plus, l’addition d’hydrogène à une molécule insaturée se tra- Diéniques


duit par une diminution d’entropie de l’ensemble du système et, propadiène → propylène ............................ 172
par conséquent, toutes les hydrogénations sont des réactions
1,3-butadiène → 1-butène........................... 110
équilibrées. L’obtention des molécules saturées est favorisée par
les températures faibles et les pressions d’hydrogène élevées : Oléfines
même à 10 MPa de pression, les hydrogénations de la plupart des
hydrocarbures acétyléniques et oléfiniques sont quasi complètes, éthylène → éthane....................................... 136
pour des températures inférieures à 300 oC. propylène → propane ................................. 125
En revanche, pour les hydrocarbures aromatiques tels que le 2-butène (cis) → butane .............................. 120
benzène et ses dérivés alkylés, ou les aromatiques à plusieurs 2-butène (trans) → butane .......................... 116
noyaux condensés (figure 1), les taux d’hydrogénation importants cyclohexène → cyclohexane ...................... 120
ne sont obtenus à 300 oC qu’en opérant sous pression [2]. Dans ce styrène → éthylbenzène.............................. 118
cas, une augmentation de la masse moléculaire, pour une struc-
ture aromatique donnée, entraîne une augmentation de la Aromatiques
concentration en composés aromatiques présents à l’équilibre
benzène → cyclohexane ............................. 208
dans des conditions identiques.
Ces considérations thermodynamiques permettent de délimiter
les domaines de température et de pression dans lesquels les 1.2.1 Métaux
réactions d’hydrogénation sont possibles, mais les basses tempé-
ratures nécessitent l’utilisation de catalyseurs actifs et les hautes Les métaux se révèlent les plus actifs. Leur classement par acti-
pressions conduisent à des coûts d’installation élevés. vité décroissante est donné dans le tableau 2 [3] [4] [5] pour
l’hydrogénation des différentes familles de composés.
Lorsqu’une sélectivité particulière est recherchée, par exemple la
1.2 Catalyseurs transformation d’un dérivé acétylénique ou d’un diène en oléfine
(ou alcène), tout en évitant la formation de paraffine (ou alcane),
L’hydrogénation des hydrocarbures insaturés n’est suffi- certains métaux pourtant très actifs se révèlent peu sélectifs,
samment rapide qu’en présence de catalyseur. Le choix de ce der- comme le montre le tableau 3 [4] [5]. Le palladium est le meilleur
nier fait non seulement intervenir l’activité, mais également la parmi les métaux nobles eux-mêmes les plus actifs. Notons que le
sélectivité et la stabilité en cours de fonctionnement (cf. dossier nickel occupe également une bonne position.
Catalyse hétérogène. Mode d’action des catalyseurs [J 1 250]). De Ces dernières années ont vu l’introduction de catalyseurs bimé-
nombreuses espèces chimiques, métaux, oxydes et sulfures sont talliques, à base de palladium essentiellement, qui ont permis des
actives en hydrogénation. Dans le domaine des hydrocarbures, les gains d’activité et de stabilité, mais surtout des améliorations
métaux et les sulfures sont essentiellement utilisés. notables de sélectivité dans l’hydrogénation des acétyléniques ou

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________________________________________________________________________________________________ HYDROGÉNATION DES HYDROCARBURES

Tableau 3 – Classement des métaux


selon leur sélectivité en hydrogénation
X (%)

sélective [4] [5]


100
PH2 = 20 MPa Classement par sélectivité
Réaction
décroissante
80
Dioléfines → Oléfines Fe, Co, Ni, Pd > Ru > Rh, Pt, Os > Ir

60 Alcynes → Oléfines Pd > Rh, Pt > Ru > Ir, Os

40 des dioléfines. L’élément ajouté au palladium est par exemple


l’argent ou l’or. Ce sont les modifications géométriques et électro-
niques du palladium (présence du palladium et de l’argent sur la
20 surface métallique de la nanoparticule) qui sont à l’origine de
l’amélioration de la sélectivité [6].
0
300 350 400 450 500 1.2.2 Sulfures
Température (oC)
Les sulfures ont des activités apparentes de quelques ordres de
X taux d’aromatique résiduel dans le mélange total, grandeurs plus faibles que celles des métaux, mais ils présentent
après hydrogénation l’avantage de fonctionner en présence de composés sulfurés.
a influence du degré de substitution du noyau benzénique
Industriellement, ils sont utilisés à plus haute température et sous
sur l’équilibre d’hydrogénation du benzène, du toluène, forme d’associations plus actives. Ils permettent d’obtenir d’excel-
des xylènes et du mésitylène lentes sélectivités car ils ne catalysent que très mal l’hydrogé-
nation des mono-oléfines ou des aromatiques.
X (%)

1.2.3 Influence des impuretés


100
Dans les unités industrielles, un fonctionnement aussi stable que
PH2 = 20 MPa
possible du catalyseur est recherché. Le manque de stabilité est lié
80 soit à l’empoisonnement par les impuretés présentes dans les
réactifs, soit à l’encrassement par formation de polymères ou de
coke, catalysé par le métal lui-même ou bien son support.
60 De manière générale, l’empoisonnement est la cause principale
de la diminution de l’activité des catalyseurs d’hydrogénation. Ces
effets se manifestent différemment suivant les conditions
40
opératoires et surtout suivant la nature du catalyseur et de la
réaction considérée. Certaines impuretés se comportent comme
20 des poisons irréversibles et d’autres comme de simples
inhibiteurs.
Ainsi, dans tous les cas, la présence de composés organométal-
0 liques (tels que les composés organométalliques du mercure, de
300 350 400 450 500
l’arsenic, du plomb ou du silicium) dans les charges conduit à un
Température (oC) empoisonnement irréversible (poison). La présence de monoxyde
X taux d’aromatique résiduel dans le mélange total, de carbone dans l’hydrogène ou encore celle de composés azotés
après hydrogénation dans les charges conduit à une inhibition de l’activité avec une
diminution plus ou moins importante, et une récupération de cette
b influence du nombre de noyaux benzéniques dernière dès que les impuretés sont supprimées (inhibiteur). Le
sur l’équilibre d’hydrogénation du benzène, comportement des composés sulfurés, plus complexe, est pré-
du naphtalène et du phénanthrène senté dans le tableau 4. En effet, les composés sulfurés peuvent se
comporter comme des poisons, ou des inhibiteurs selon la nature
du composé sulfuré, et le type de catalyseur (métal ou sulfure)
Figure 1 – Équilibre d’hydrogénation des aromatiques
considéré.

Tableau 2 – Classement des métaux


selon leur activité hydrogénante [3] [4] [5] 1.2.4 Catalyseurs industriels
Hydrogénation Les raisons précises du choix de chaque catalyseur sont explici-
Classement par activité décroissante
considérée tées plus loin. Le tableau 5 présente les quelques catalyseurs le
plus couramment utilisés en hydrogénation, en dehors des nickels
Oléfines Rh > Pd > Pt > Ni > Fe > W > Cr > Ta
de Raney, ou encore des catalyseurs homogènes obtenus par
Alcynes Pd > Pt > Ni, Rh > Fe, Cu, Co, Ir > Ru, Os réaction de sels de nickel avec des réducteurs organométalliques
en milieu hydrocarboné. En effet, les catalyseurs les plus utilisés
Dioléfines Pd > Ni > Co en milieu industriel sont des catalyseurs supportés sur alumine
(avec une teneur comprise entre 0,1 et 30 % en métal ou phase
Aromatiques Pt, Rh, Ru > Ni > Pd active sulfurée dispersée sur support, en général l’alumine).

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HYDROGÉNATION DES HYDROCARBURES _______________________________________________________________________________________________

Tableau 4 – Effets des composés sulfurés sur les propriétés catalytiques


Agents actifs
Réactions Sulfures
Composés sulfurés
d’hydrogénation Pt Pd Ni de Ni-Mo
ou de Ni-W
Alcyne → Oléfine • Sulfures et composés thiophéniques — I Ip I
Dioléfine → Oléfine • Disulfures ou mercaptans — Ip P I
• COS et H2S — Ip/P P I
Oléfine → Alcane Tous composés Ip Ip P I
Aromatiques → Cycloalcanes Tous composés P — P I
I : inhibiteur. Ip : inhibiteur puissant. P : poison. — : effet négligeable.

interne ou externe au grain de catalyseur. Il existe en effet deux


Tableau 5 – Catalyseurs sur supports types de limitations au transfert de matière :
les plus couramment utilisés en hydrogénation
– limitation au transfert externe ; le transfert de matière dans
Phase active Supports l’écoulement autour des grains de catalyseur limite le flux des
réactifs vers le catalyseur et réduit le flux réactionnel global ;
Ni Alumine/silice/kieselguhr – limitation au transfert interne ; le transfert de matière à l’inté-
rieur du grain de catalyseur sous la forme de la diffusion des réac-
Pd Alumine/alumine modifiée tifs au travers des pores du catalyseur limite le flux de ces réactifs
Pt Alumine/zéolithe ± acide vers les sites actifs et réduit le flux réactionnel global. La vitesse
apparente de la réaction est dans ce cas plus faible que la vitesse
Sulfures mixtes de Ni-Mo Alumines dopées par exemple de réaction intrinsèque au catalyseur, et l’énergie d’activation
et de Ni-W par Si ou P apparente est plus faible que l’énergie d’activation intrinsèque au
catalyseur.
Lorsque cette énergie d’activation est très faible, typiquement
1.3 Cinétique inférieure à 10 à 15 kJ/mol, elle traduit principalement l’impact de
la température sur les phénomènes d’adsorption et de diffusion, la
La vitesse globale d’une hydrogénation peut être contrôlée soit température n’ayant quasiment plus d’impact sur la vitesse de
par la vitesse chimique de la réaction, soit par la vitesse de trans- réaction. La réaction est dans ce cas considérée comme totalement
fert des réactifs : la cinétique de réaction est examinée de façon limitée par le transfert de matière externe au grain. Le transfert de
générale dans le dossier [J 1 250], néanmoins, nous allons très l’hydrogène depuis la phase gazeuse en écoulement autour des
rapidement préciser ici quelques points particuliers aux hydrogé- grains de catalyseur vers les sites catalytiques est potentiellement
nations. un transfert limitant pour les réactions d’hydrogénation.
Soit une réaction : De la même façon, le transfert de matière par diffusion au sein
des pores du catalyseur peut limiter la vitesse de la réaction en
créant un gradient de concentration entre la surface externe du
A + n H2 → B catalyseur et les sites catalytiques situés au sein des pores du cata-
lyseur. La concentration en réactif est alors plus faible au voisi-
avec k constante de vitesse. nage des sites qu’au niveau de la phase fluide et la vitesse de
De manière générale, lorsque la vitesse de réaction est limita- réaction est ainsi plus faible que si les sites étaient en contact avec
tive, elle peut se mettre sous la forme générale : la concentration des réactifs en phase fluide. L’énergie d’activation
apparente représente dans ce cas environ la moitié de l’énergie
K H PH2 d’activation intrinsèque au catalyseur.
K A [A]
v =k (1) Ces phénomènes se traduisent également par des changements
1 + K A [A] + K B [B ] + Σ K Ii [Ii ] 1 + K H PH2
d’ordre de réaction par rapport aux réactifs. Dans le cas de
réactions de type hydrogénations sélectives, ils peuvent avoir pour
avec [ ] concentrations des différentes espèces, conséquence des modifications de la sélectivité en produit
K constantes d’adsorption respectives, recherché [5]. En effet, les transferts de matière, externe et/ou
interne dépendent de la concentration en réactifs, ce qui induit des
I représentant de tous les autres composés présents dans différences entre les flux de matière de chacun des réactifs et peut
le milieu réactionnel. créer une sélectivité différente entre les produits formés.
La constante de vitesse k n’est fonction que de la nature du cata-
lyseur et du nombre de sites catalytiques.
À noter par ailleurs que cette expression de vitesse implique 1.4 Procédés
l’hypothèse d’une absence de compétition d’adsorption entre
La mise au point d’un procédé consiste essentiellement à sélec-
l’hydrogène et les hydrocarbures, hypothèse généralement vérifiée
tionner le meilleur réacteur possible en tenant compte des caracté-
expérimentalement lorsque l’hydrocarbure A est présent dans le
ristiques de l’hydrogénation envisagée, en particulier la quantité
milieu réactionnel.
d’énergie thermique à éliminer pour ces réactions très exo-
Certaines réactions d’hydrogénation sont très rapides et leur thermiques et la vitesse de la transformation chimique pour ces
vitesse peut être contrôlée par la vitesse du transfert de matière réactions très rapides.

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Tableau 6 – Choix des réacteurs d’hydrogénation


Moyens d’éliminer la chaleur
Types de réacteur Applications
dégagée
Recyclage du produit
après circulation
Monotubulaire
dans un échangeur externe
Vaporisation partielle
Lit fixe avec gradient
de concentration (LFGC) Échange thermique entre fluide Hydrogénations partielles
en phase liquide ou gazeuse Échangeur multitubulaire caloporteur et paroi des tubes ou sélectives
ou en phase mixte gaz/liquide catalytiques
Échange thermique entre fluide
Multilits adiabatiques caloporteur et réactif entre deux
lits fixes successifs
Circulation forcée dans
la boucle d’échange thermique
Lit agité à concentration stationnaire (LACS) en phase liquide Hydrogénations complètes
extérieure et évaporation
du produit de la réaction

Le choix d’un système adapté d’élimination de l’énergie 1.5 Utilisations dans l’industrie
thermique permet d’éviter les points chauds dangereux et généra-
teurs de réactions parasites. À l’exception des coupes les plus L’hydrogénation des hydrocarbures répond à de nombreux
légères, les réacteurs fonctionnent avec les réactifs en phase objectifs qui sont résumés dans les paragraphes suivants.
liquide, elle même au contact du catalyseur. Cela permet une
meilleure efficacité thermique pour évacuer les calories produites
par la réaction dans le grain de catalyseur. L’excès d’enthalpie est 1.5.1 Provenance des charges à hydrogéner,
ainsi transféré à l’écoulement liquide et est ensuite évacué : type d’hydrogénation à effectuer
– soit par circulation de l’effluent au travers d’un échangeur en fonction de l’application des produits
externe au réacteur. La phase liquide de cet effluent refroidi est
ensuite réinjectée en entrée du réacteur en mélange avec la charge Le tableau 7 résume les principales provenances des différentes
non hydrogénée. Cela permet une dilution thermique de l’enthal- charges à hydrogéner, quel type d’hydrogénation doit être
pie de réaction dans la phase liquide au sein du réacteur et limite appliqué (totale, sélective) en fonction du type de l’application des
ainsi les gradients thermiques dans le réacteur ; produits formés.
– soit par circulation d’un fluide caloporteur dans des tubes en
contact avec les tubes contenant le catalyseur et la charge. Il s’agit
dans ce cas d’un réacteur échangeur multitubulaire ;
– soit par circulation d’un fluide caloporteur dans des sections 1.5.2 Spécifications recherchées dans les charges
d’échangeurs situées entre deux lits catalytiques. Il s’agit dans ce traitées pour la production d’intermédiaires
cas d’un réacteur échangeur à multilits adiabatiques. Ce type de pour la pétrochimie
réacteur est pour l’instant réservé à des réacteurs de petites capa-
Pour les applications ultérieures des charges hydrogénées en
cités et est issu du développement d’échangeurs à plaques multi-
pétrochimie, il faut fournir des produits sélectivement hydrogénés ou
fonctionnels.
totalement hydrogénés dans lesquels les hydrocarbures insaturés
La rapidité de la réaction implique un dimensionnement du réac- indésirables sont presque totalement éliminés, de manière à satis-
teur tel que la vitesse globale de transformation ne soit contrôlée, faire les exigences sévères des transformations chimiques ultérieu-
dans la mesure du possible, que par la cinétique chimique. Ainsi, res. Le tableau 8 rassemble les exemples principaux de ces
le transfert de matière externe au catalyseur ne doit pas influer sur hydrogénations avec les puretés exigées (spécifications) par rapport
le flux global de réaction. Pour cela, les flux de transferts de à l’hydrocarbure insaturé à hydrogéner. Ces exigences sont très gran-
matière gaz/liquide et/ou liquide/solide doivent être suffisamment des puisqu’il faut descendre généralement au-dessous de 20 ppm.
élevés dans le lit catalytique.

Cela impose des vitesses de circulation élevées dans le lit


catalytique pour intensifier les flux de transferts de matière
externes au catalyseur. Ces contraintes, dépendant de la 2. Hydrogénations sélectives
vitesse de réaction intrinsèque, conduisent à des vitesses
superficielles (débit-volume sur la section du réacteur vide) de
l’écoulement des réactifs de 1 à 10 cm/s dans le lit catalytique. 2.1 Caractéristiques particulières
Les deux grands types de réacteurs utilisés et leurs applications 2.1.1 Définition des sélectivités recherchées
sont résumés dans le tableau 6.
Un autre type de réacteur consiste à combiner des sections cata- Deux types de sélectivités peuvent être distingués :
lytiques à l’intérieur d’une colonne de distillation. Ce type de réac- – la sélectivité de la réaction d’hydrogénation elle-même,
teur multifonctionnel couplant la réaction et la séparation est c’est-à-dire la formation d’un composé hydrogéné bien précis au
surtout avantageux dans le cas de réactions équilibrées. détriment de la formation d’autres composés hydrogénés ;

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TP
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Hydratation des oléfines

par Bernard TORCK


Ingénieur de l’École des hautes études industrielles de Lille
et de l’École nationale Òsupérieure du pétrole et des moteurs
Ingénieur-docteur de l’Université de Paris
Expert à la Direction stratégie-économie-programme de l’IFP (Institut français du pétrole)

1. Thermodynamique de l’hydratation ................................................... J 5 550 - 2


2. Catalyseurs d’hydratation ..................................................................... — 3
2.1 Réactivité des oléfines................................................................................. — 4
2.2 Catalyseurs liquides .................................................................................... — 4
2.3 Catalyseurs solides...................................................................................... — 4
3. Réactions principale et secondaires................................................... — 4
3.1 Réaction principale ...................................................................................... — 4
3.2 Schéma réactionnel..................................................................................... — 5
3.3 Réactions secondaires................................................................................. — 5
4. Mise en œuvre industrielle.................................................................... — 6
4.1 Hydratation indirecte en présence d’acide sulfurique.............................. — 6
4.1.1 Butènes normaux ............................................................................... — 6
4.1.2 Autres oléfines .................................................................................... — 7
4.2 Hydratation directe ...................................................................................... — 7
4.2.1 Éthylène............................................................................................... — 7
4.2.2 Propylène ............................................................................................ — 7
4.2.3 Butènes................................................................................................ — 7
4.2.4 Isobutène............................................................................................. — 8
4.3 Importance industrielle ............................................................................... — 8
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. J 5 550

’hydratation des oléfines (ou alcènes) est mise en œuvre industriellement


L pour obtenir des alcools par addition d’eau sur la double liaison des oléfines.
Alors que les premières unités industrielles concernaient surtout la réaction
inverse de déshydratation des alcools, obtenus par fermentation, en oléfines,
l’installation de vapocraqueurs produisant des quantités importantes d’oléfines
ayant 2 à 4 atomes de carbone a contribué à promouvoir progressivement la
production d’alcools par hydratation.
Le présent article traite des aspects thermodynamiques et cinétiques des réac-
tions d’hydratation des oléfines, des catalyseurs et des mécanismes réactionnels.
Puis sont décrits les procédés industriels d’obtention du butanol-2, de l’éthanol
et du propanol-2.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@QYYW

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© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés J 5 550 − 1

TQ
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HYDRATATION DES OLÉFINES ____________________________________________________________________________________________________________

1. Thermodynamique
de l’hydratation
L’hydratation des oléfines appartient au groupe classique des réac-
tions équilibrées exothermiques, c’est-à-dire avec diminution
d’entropie. Elle s’effectue par ailleurs avec diminution du nombre
de molécules. La formation d’alcool par hydratation directe nécessite
donc d’effectuer la réaction à la plus basse température compatible
avec les impératifs cinétiques, conditionnés par l’activité du cataly-
seur et à la pression la plus élevée possible lorsque l’on opère en
phase gazeuse.
Les conditions de conversion maximale dépendent en fait des
stabilités relatives des alcools et des oléfines. Les constantes d’équi-
libre, exprimées en termes d’activité, et leur variation avec la tempé-
rature, peuvent être calculées à partir des entropies et des enthalpies
de formation en phase vapeur des constituants de l’équilibre, dispo-
nibles dans la littérature [1]. Les chaleurs de réaction ∆H o qui se
situent entre – 39 et – 54 kJ/mol à 298,15 K et les variations avec la
o
température (en kelvins) de la constante d’équilibre K T en phase
vapeur sont données pour les différents alcools dans le tableau 1
et représentées sur la figure 1. Il apparaît que la formation d’alcool
n’est favorisée qu’à basse température puisque, pour obtenir des
constantes d’équilibre proches de 1, la réaction devrait être effectuée
à des températures inférieures à 100 oC. Si l’on ne dispose que de
catalyseurs actifs à haute température, les taux de conversion de
l’oléfine sont alors relativement faibles. (0)

Tableau 1 – Données thermodynamiques Figure 1 – Variation, avec la température, de la constante d’équilibre


de l’hydratation en phase vapeur : chaleur d’hydratation des oléfines en phase vapeur
de réaction et variation de la constante d’équilibre
avec la température

o o A
∆H 298,15 lg K T = ----- – B
Alcool Oléfine T
produit de départ
A B
(J · mol–1) (K)
Éthanol.............. Éthylène – 45 120 2 358 6,551
Propanol-2 ........ Propylène – 50 196 2 623 7,594
Alcool tert-
butylique........... Isobutène – 53 740 2 809 8,163
Butanol-2 .......... Butène-1 – 50 522 2 641 7,190
Butanol-2 .......... Butène-2 cis – 44 075 2 304 6,825
Butanol-2 .......... Butène-2 trans – 39 890 2 085 6,597

De nombreuses études expérimentales ont été effectuées pour


déterminer les constantes d’équilibre à différentes températures [2].
Dans le cas de l’éthylène l’hydratation, qui s’effectue en phase vapeur
à haute température (environ 280 oC), est régie par un équilibre dont
la constante, déterminée expérimentalement et exprimée en termes
de fractions molaires, varie avec la température (en kelvins) selon
la relation [3] :
lg Kp = (2 132/T ) – 6,241

■ Les taux de conversion de l’éthylène à l’équilibre ont été calculés


en fonction de la température, de la pression et du rapport molaire
éthylène/eau, en partant des constantes en phase vapeur calculées
o
K T et des coefficients de fugacité de chaque constituant ϕ = f /p où f
et p sont respectivement la fugacité et la pression partielle [4]. Ces
taux de conversion sont présentés sur la figure 2 en fonction du Figure 2 – Taux de conversion de l’éthylène en fonction du rapport
rapport molaire éthylène/H 2 O et pour différentes pressions et molaire C2H4 /H2O à différentes températures et pressions
températures. d’hydratation

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TR
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Chloration et oxychloration
des composés aliphatiques

par Raymond COMMANDEUR


Docteur de l’Université de Marseille
Responsable de recherches sur les dérivés chlorés organiques
Elf Atochem

1. Principaux composés aliphatiques chlorés ...................................... J 5 610 - 2


1.1 Importance économique ............................................................................. — 2
1.2 Fabrication industrielle................................................................................ — 2
1.3 Applications diverses .................................................................................. — 2
2. Chloration par le chlore ......................................................................... — 4
2.1 Chloration des alcanes et des alkylaromatiques....................................... — 4
2.1.1 Photo-initiation ................................................................................... — 4
2.1.2 Initiateurs chimiques : catalyseurs de chloration ............................ — 6
2.1.3 Chloration thermique non catalysée................................................. — 7
2.1.4 Chloration thermique catalysée ........................................................ — 7
2.1.5 Influence de la température sur la sélectivité .................................. — 8
2.1.6 Influence des solvants sur la sélectivité ........................................... — 8
2.1.7 Orientation de la réaction par différents effets ................................ — 8
2.1.8 Inhibiteurs de chloration .................................................................... — 8
2.2 Chloration des hydrocarbures éthyléniques et acétyléniques................. — 8
2.2.1 Initiation ionique................................................................................. — 9
2.2.2 Initiation radicalaire............................................................................ — 9
2.3 Chloration des alcools................................................................................. — 9
2.4 Chloration des sulfures et des sulfones..................................................... — 9
3. Chloration par l’acide chlorhydrique ................................................. — 9
3.1 Réactions avec les alcools, les éthers, les aldéhydes............................... — 9
3.1.1 Hydrochloration des alcools et des éthers ....................................... — 9
3.1.2 Hydrochloration des aldéhydes......................................................... — 10
3.2 Hydrochloration des alcènes (ou oléfines) et des alcynes ....................... — 10
4. Oxychloration............................................................................................ — 10
4.1 Principe......................................................................................................... — 10
4.2 Oxychloration des alcanes.......................................................................... — 10
4.2.1 Réaction en lit fixe ou lit fluide .......................................................... — 10
4.2.2 Réaction en milieu sels fondus.......................................................... — 10
4.3 Oxychloration des alcènes (ou oléfines).................................................... — 11
Références bibliographiques ......................................................................... — 11

algré les soubresauts liés à la pression écologique, le niveau de production


M des composés chlorés aliphatiques reste très élevé car la plupart inter-
viennent comme intermédiaires indispensables dans la fabrication de nombreux
composés. En effet, 50 % des tonnages produits par la chimie mondiale actuelle
reposent sur le chlore.
L’objet du présent article est de décrire les différents procédés industriels de
chloration par le chlore, par l’acide chlorhydrique ou par le couple HCl-O2
(oxychloration).
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@QYYU

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TS
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CHLORATION ET OXYCHLORATION DES COMPOSÉS ALIPHATIQUES ______________________________________________________________________________

1. Principaux composés 1.2 Fabrication industrielle


aliphatiques chlorés La synthèse de ces composés fait appel à des techniques de chlo-
ration diverses rassemblées dans l’encadré 1, page ci-contre, avec
des mécanismes réactionnels différents que nous allons examiner
1.1 Importance économique successivement au cours des paragraphes suivants.

Les composés organiques dont la molécule contient un ou


plusieurs atomes de chlore liés à des atomes de carbone aliphatique,
représentent une grande famille de produits de la chimie industrielle. 1.3 Applications diverses
La production de certains d’entre eux rassemblés dans le tableau 1
atteint des tonnages impressionnants. (0) ■ Solvants
CHCl  CHCl , CCl 2  CCl 2 , CHCl  CCl 2 ,
Tableau 1 – Principaux dérivés chlorés aliphatiques CH2 Cl2 , CCl4 , CH3 CHClNO2 .
■ Aérosols
Nom chimique Formule
CH2Cl2 , CCl3 CH3 , ainsi que toute la gamme des Fréons en C1 ou
Chlorure de méthyle..................... CH3Cl C2 qui dérivent de leurs homologues chlorés.
C1 Chlorure de méthylène ................ CH2Cl2 ■ Plastifiants ou lubrifiants
Chloroforme .................................. CHCl3 Paraffines chlorées à différentes teneurs en chlore.
Chlorure d’éthyle .......................... CH3 —CH2Cl ■ Monomères
Dichloroéthane ............................. CH2Cl—CH2Cl CH 2  CHCl (chlorure de vinyle).
Trichloroéthane ............................ CH3 —CCl3 CH 2  CCl 2 (chlorure de vinylidène).
CH 2  CHCl CH 2  CH—CCl  CH 2 (chloroprène).
C2 Chlorure de vinyle ........................
Trichloroéthylène ......................... CHCl  CCl 2 ■ Insecticides
Chlorure de vinylidène ................. CH 2  CCl 2 Hexachlorocyclohexane (Lindane),
CH2Cl—CHCl—CH3 (dichloro-1,2 propane),
Tétrachloroéthylène ..................... CCl 2  CCl 2
CH3—CCl2—CO2H (Dalapon).
C3 Chlorure d’allyle ........................... CH 2 Cl—CH  CH 2
■ Polymères chlorés
C4 Chloroprène .................................. CH 2  CCl  CH  CH 2
PVC, PVDC, polyéthylène chloré, caoutchouc chloré.
■ Intermédiaires non fonctionnels de synthèse
Les productions concernées ont subi de profondes modifications
depuis le début des années 90 pour des raisons d’ordre essentielle- CH 2 Cl  CH 2 Cl & chlorure de vinyle
ment écologique.
Pour plus de détails, on se reportera à l’article [J 6 225] Chloro- CH 3 Cl silicones, chlorométhanes
fluoroalcanes consacré à la production des CFC (ou chlorofluoro- &
carbures) et des HCFC (ou hydrochlorofluorocarbures).
En 1994, la mutation est toujours en cours d’où la difficulté de CH 3  CCl 3 & HCFC 141b et 142b
divulguer les chiffres précis de production.
Il est néanmoins possible de donner l’évolution sur le plan
qualitatif :
— quasi-disparition de la production de CCl4 , la molécule
elle-même ainsi que ses dérivés fluorés (CFC 11 et 12) étant accusés
de détruire la couche d’ozone stratosphérique ;
— disparition du marché du trichloro-1,1,1 éthane comme solvant
de dégraissage, toujours à cause de son action néfaste sur la couche
d’ozone. Par contre, un certain niveau de production sera conservé
car il constitue l’intermédiaire dans la fabrication des substituts de
CFC que sont les HCFC 141 b et 142 b. Toutefois, l’avenir dans cette
application n’est pas assuré puisque l’emploi de ces produits devrait
être interdit en 2014 ;
— un certain niveau de production du tétrachloroéthylène (ou
perchloréthylène ) et du trichloroéthylène sera maintenu car ces CH 2  CH—CH 2 Cl & épichlorhydrine
produits garderont un emploi comme solvant de dégraissage et
constituent la matière première du HFC 134 a promis à un bon
développement dans l’industrie du froid ;
— très forte diminution de la production du chlorure d’éthyle uti-
lisé essentiellement dans la fabrication du plomb tétraéthyle, additif
de l’essence plombée dont le marché est en voie de disparition ;
— bonne croissance de la consommation du chlorure de vinyle,
monomère du PVC.

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J 5 610 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés

TT
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_____________________________________________________________________________ CHLORATION ET OXYCHLORATION DES COMPOSÉS ALIPHATIQUES

Encadré 1 – Voies d’obtention industrielle des principaux hydrocarbures chlorés de C1 à C4

CH 3 — ( CH 2 ) 16 —CH 2 Cl  alcools et mercaptans corres- hexachlorocyclopentadiène insecticides


 pondants, sels d′ammonium
&
CH 3 — ( CH 2 ) 14 —CH 2 Cl  & quaternaire, agents d′alkylation
 des aromatiques
CH 3 — ( CH 2 ) 10 —CH 2 Cl 

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TU
TV
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Chloration et oxychloration
des composés aromatiques

par Régis LOZE


Ingénieur ENSIC (École nationale supérieure des industries chimiques de Nancy)
Responsable des procédés « solvants chlorés » à la Direction technique Elf Atochem

Mise à jour du texte de Pierre BOUVET (PCUK) paru en 1982 dans ce traité.

1. Mécanismes réactionnels de chloration ............................................ J 5 620 - 2


1.1 La réaction de chloration directe................................................................. — 2
1.2 Agents de chloration .................................................................................... — 3
1.3 Autres méthodes .......................................................................................... — 4
2. Mise en œuvre industrielle..................................................................... — 4
2.1 Caractéristiques des milieux de chloration ................................................ — 4
2.2 Problèmes posés par la chloration directe................................................. — 5
2.3 Exemples de procédés industriels discontinus.......................................... — 7
2.4 Procédés continus de chloration sur le noyau........................................... — 8
3. Principaux produits obtenus et leurs applications industrielles — 9

Références bibliographiques .......................................................................... — 10

halogénation directe est la substitution d’un atome d’hydrogène par un


L’ atome d’halogène ou l’addition d’halogène ou d’hydracide halogéné sur
une liaison multiple. En ce qui concerne les chlorations aromatiques, il s’agit
principalement de la substitution d’un atome d’hydrogène par un atome de
chlore.
L’objet du présent article est de décrire les mécanismes de chloration directe
des dérivés aromatiques, les agents de chloration ainsi que leur mise en œuvre
industrielle : réactifs et conditions opératoires pour les principaux procédés
continus ou discontinus.
Ces vingt dernières années, peu de nouveaux procédés ont vu le jour, mais la
tendance déjà ancienne est aux unités industrielles de production ayant une
capacité de plus en plus importante et qui soient fortement automatisées.
Par ailleurs, les nouvelles données écologiques concernant les produits chlo-
rés obligent les industriels à éliminer les différentes sources de pollution et à
recycler ou valoriser leurs déchets. Pour ces raisons, certains procédés voient
leur importance diminuer au profit de procédés plus performants et plus sélec-
tifs.
Les produits chlorés ainsi obtenus, principalement à partir du benzène, du
toluène conduisent aux intermédiaires de synthèse utilisés dans l’industrie des
colorants, des produits pharmaceutiques, des pesticides, etc.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@QYYX

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TW
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CHLORATION ET OXYCHLORATION DES COMPOSÉS AROMATIQUES ______________________________________________________________________________

1. Mécanismes réactionnels Le mécanisme est aussi de type radicalaire en chaîne, amorcé par
un initiateur chimique ou photochimique, comme pour la substitu-
de chloration tion sur la chaîne latérale du toluène [2].
Cependant, en raison de sa toxicité vis-à-vis de l’environnement,
le lindane, qui est un insecticide puissant, tend à être de moins en
1.1 La réaction de chloration directe moins utilisé.

1.1.1 Mécanisme général [1] 1.1.2 Orientation selon les conditions opératoires
1.1.1.1 Substitution sur le noyau aromatique
Selon les conditions opératoires, la chloration directe peut être
La réaction peut s’écrire : orientée soit sur le noyau, soit sur les chaînes latérales. Lorsqu’elle
se fait sur le noyau, elle est orientée comme les autres substitutions
Ar Ð H + Cl 2 ® Ar Ð Cl + HCl électrophiles en fonction des groupes déjà présents.
avec Ar radical aryle Les facteurs déterminants sont :
Cette réaction peut être interprétée comme une substitution élec- — la température ;
trophile selon le mécanisme représenté sur la figure 1. — les radiations lumineuses ou les promoteurs ;
+ — la présence ou l’absence de catalyseurs.
L’ion Cl provient du clivage hétérolytique d’une molécule de
Ces différents facteurs déterminent la forme de clivage de la
chlore sous l’effet de catalyseurs tels que les acides de Lewis (accep- molécule de chlore en ions ou en radicaux libres :
teurs de doublets électroniques) par exemple avec le chlorure d’alu-
— forme Cl permettant l’attaque électrophile du noyau (en pré-
+
minium :
sence de catalyseurs) ;
AlCl 3 + Cl 2 ® AlCl 4Ð .... Cl +
— forme Cl (chlore atomique actif ) permettant soit l’addition
sur les doubles liaisons du cycle, soit la substitution en chaîne laté-
1.1.1.2 Substitution sur les chaînes latérales rale en l’absence totale de métaux tels que Fe, Sb, Al et de leurs
Ar CH3 + Cl2 Ar CH2Cl + HCl combinaisons (à titre indicatif : 0,003 % de fer favorise la chloration
du toluène sur le noyau).
Ar CH2Cl + Cl2 Ar CHCl2 + HCl
Ar CHCl2 + Cl2 Ar CCl3 + HCl

Ces réactions sont interprétées comme des substitutions radica-


1.1.3 Orientation sur le noyau benzénique
laires obéissant à un mécanisme en chaîne amorcé par clivage pho- substitué
tochimique (+ h n : énergie d’un photon) ou sous l’action de
promoteurs [PCl3, peroxydes, azoisobutylnitrile (AIBN)...]. Lorsque le noyau aromatique contient déjà des substituants,
ceux-ci vont orienter la substitution électrophile en fonction de la
Initiation : Cl Cl + hn Cl + Cl stabilité de l’ion arénium intermédiaire. Cette stabilité dépend de
l’effet inductif des substituants et, de façon plus importante souvent,
Propagation : H H des effets de conjugaison possibles.
Ar C H Ar C + H Cl
1.1.3.1 Monochloration
H Cl H
Les orientations des substitutions s’effectuent comme pour les
nitrations ou les sulfonations des composés aromatiques (cf. arti-
H H
cles spécialisés dans le présent traité).
Cl
Ar C + Cl + Ar C Cl
Cl Les substituants à effet + E (OH, OR, CH3, halogène, etc.)
H H
orientent la chloration en positions ortho et para ; et il en est de
1.1.1.3 Addition sur le noyau aromatique même des substituants à effet + I.

C’est aussi une technique industrielle permettant de fabriquer, à


partir du benzène, l’hexachlorocyclohexane dont un des isomères
(
Les substituants à effet - E NO2, CN, C O, SO3H, etc. )
est le lindane : orientent la chloration en position méta ; et il en est de même

C 6 H 6 + 3Cl 2 ® C 6 H 6 Cl 6 des substituants à effet - I.

+ +
H Cl H H Cl Cl
Cl H
H H H H H
+ + +
+ Cl + H

Complexe p Complexe s Complexe p

Figure 1 – Chloration sur le noyau aromatique : mécanisme de substitution électrophile

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J 5 620 - 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés

TX
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Chloration des métaux


et carbochloration des oxydes

par Jacques DUGUA


Docteur-Ingénieur CNAM
Responsable du Secteur « Chlore-soude, phosphore et dérivés » à la Direction Technique
d’Elf Atochem
et Michel SIBONY
Ingénieur de l’École Nationale Supérieure de Chimie de Paris
Ingénieur de recherche au Centre de Recherches de CEZUS

Mise à jour du texte de Jean ANDRIOLY et Daniel PILLET (PCUK), paru en 1982 dans ce traité.

1. Chloration des métaux ........................................................................... J 5 630-2


1.1 Aspect thermodynamique .......................................................................... — 2
1.2 Diagramme d’Ellingham ............................................................................. — 2
2. Carbochloration des oxydes ................................................................. — 3
2.1 Principe......................................................................................................... — 3
2.2 Aspect thermodynamique .......................................................................... — 3
2.2.1 Cas du carbone ................................................................................... — 3
2.2.2 Cas du monoxyde de carbone........................................................... — 3
2.3 Réactions en lit fixe ..................................................................................... — 3
2.4 Réactions en lit fluidisé ............................................................................... — 4
3. Production du chlorure d’aluminium ................................................. — 4
3.1 Chloration directe de l’aluminium.............................................................. — 4
3.2 Carbochloration de l’alumine ..................................................................... — 5
3.3 Applications de AlCl3................................................................................... — 5
4. Production du tétrachlorure de titane............................................... — 5
5. Production du tétrachlorure de zirconium ....................................... — 6
5.1 Carbochloration du silicate de zirconium .................................................. — 6
5.2 Applications de ZrCl4................................................................................... — 6
6. Production du chlorure ferrique.......................................................... — 6
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@QYYV@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

6.1 Chlorure ferrique anhydre .......................................................................... — 6


6.2 Chlorure ferrique hydraté ........................................................................... — 6
6.2.1 Attaque acide de ferraille ................................................................... — 6
6.2.2 Attaque acide de minerai ................................................................... — 7
6.2.3 Applications de FeCl3 ......................................................................... — 7
7. Production du chlorure d’antimoine .................................................. — 7
8. Chloration des déchets métalliques ................................................... — 7
Références bibliographiques ......................................................................... — 8

’importance des chlorations directes des métaux ou des carbochlorations


L d’oxydes est bien moindre que celle des chlorations organiques (cf. articles
séparés dans ce traité).

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CHLORATION DES MÉTAUX ET CARBOCHLORATION DES OXYDES ________________________________________________________________________________

Les chlorations directes des métaux concernent principalement Al, Fe, Ti, Sb
pour obtenir les chlorures anhydres correspondants. Les carbochlorations des
oxydes se limitent industriellement à celles du rutile pour l’obtention du TiO2
via TiCl4 , du zircon pour l’obtention de Zr via ZrCl4 et de l’alumine pour l’obten-
tion de AlCl3 . Dans les années 1975-1985, la carbochloration des oxydes, en par-
ticulier kaolin et alumine, a été beaucoup étudiée surtout aux États-Unis. L’idée
était d’utiliser l’électrolyse de AlCl3 pour obtenir l’aluminium, voie permettant
d’économiser de l’énergie tout en évitant de dépendre des pays fournisseurs de
bauxite. Les conditions économiques ayant évolué et probablement devant les
difficultés d’extrapolation à grande échelle de ce procédé, celui-ci n’a pas été
industrialisé.

1. Chloration des métaux 1.2 Diagramme d’Ellingham

Certains chlorures métalliques sont recherchés en tant que tels L’application à la fabrication des chlorures métalliques de la
à cause de leurs propriétés catalytiques. Il s’agit essentiellement du formule de Gibbs-Helmholtz :
chlorure d’aluminium, du chlorure ferrique ainsi que du chlorure ∆G = ∆H – T∆S
d’antimoine.
avec ∆G enthalpie libre ou énergie libre de réaction,
On procède en général par chloration directe, c’est-à-dire que l’on
fait agir le chlore gazeux sur le métal en morceaux ou liquide. C’est ∆H enthalpie de réaction,
le cas pour l’aluminium, dont la fusion est provoquée par l’exo- ∆S entropie de réaction,
thermicité de la réaction. T température absolue (en K)
démontre qu’à toute température T la chloration d’un métal est exo-
thermique. En effet, ∆HT est négatif et la variation d’entropie ∆ST
1.1 Aspect thermodynamique est généralement positive car les chlorures obtenus sont le plus
souvent fondus ou gazeux (la règle empirique de Pictet-Trouton [4]
[5] prévoit environ 92 kJ/K pour la production d’une mole de gaz),
Nota : les notions de base théoriques sont exposées en détail dans les articles Thermo- ce qui entraîne une forte augmentation d’entropie.
dynamique chimique de ce traité. Le lecteur s’y reportera avec profit ainsi qu’aux
ouvrages [1] [2]. Ces prévisions peuvent être faites facilement à l’aide d’une repré-
La réaction du chlore sur un métal est très fortement exother- sentation graphique de la relation de Gibbs-Helmholtz que l’on
mique. On parle d’ailleurs de combustion dans le chlore et beaucoup appelle diagramme d’Ellingham. Ayant remarqué que ∆H et ∆S
ont vu sans doute l’expérience classique qui consiste à plonger dans variaient très peu avec la température, Ellingham [3] a pu, avec une
un récipient rempli de chlore un fil de fer chauffé au rouge. La approximation suffisante pour la pratique, linéariser la fonction :
o o
réaction très vive s’entretient d’elle-même. ∆ G T = ∆ H T – T ∆S T
Cette exothermicité de réaction est, comme pour la combustion
et la formation des oxydes, liée au caractère électropositif du métal. avec la seule variable T, l’exposant o signifiant l’état de référence
Elle est très élevée pour les alcalins K, Na, Li et les alcalino-terreux standard.
Ba, Ca, Mg, ainsi que pour Al. La figure 1 présente les courbes d’enthalpie libre de formation des
chlorures. Les changements de pente des différents segments de
À titre d’exemple, on peut comparer les réactions :
droite proviennent évidemment des variations d’entropie ∆S résul-
2 Al + 3/2 O2 → Al2O3 tant d’un changement d’état physique des corps (réactifs ou pro-
duits) comme la fusion ou la volatilisation [6].
et
2 Al + 3 Cl2 → Al2Cl6
Avec la convention habituelle de prendre pour valeur de référence à
l’état standard (indice o) l’enthalpie des éléments à 25 oC (298 K), les
enthalpies de formation sont :
— pour Al2O3 ∆H o = 1 675 (± 6) kJ/mol ;
— pour Al2Cl6 ∆H o = 1 276 (± 10) kJ/mol.
On conçoit qu’un réacteur sensiblement adiabatique conduise à la
fusion de l’aluminium.

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J 5 630 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés

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Fluorations

par André LANTZ


Ancien Responsable des recherches sur les dérivés fluorés organiques
Elf Atochem, Centre de recherches Rhône-Alpes

1. Principaux composés fluorés organiques.......................................... J 5 670 - 2


2. Généralités concernant les procédés de fluoration........................ — 2
3. Substitution d’un atome d’hydrogène................................................ — 2
3.1 Fluoration par le fluor élémentaire ............................................................. — 2
3.2 Fluoration par les fluorures métalliques .................................................... — 3
3.3 Fluoration électrochimique.......................................................................... — 3
4. Préparation de produits fluorés par échange chlore-fluor............ — 4
4.1 Échange chlore-fluor à l’aide d’acide fluorhydrique ................................. — 4
4.1.1 Fluoration avec de l’acide fluorhydrique en absence
de catalyseur — 4
4.1.2 Fluoration en présence de catalyseur................................................ — 5
4.2 Échange chlore-fluor à l’aide de fluorures métalliques ............................ — 5
4.2.1 Fluoration avec les fluorures d’antimoine......................................... — 5
4.2.2 Fluoration avec le fluorure de potassium.......................................... — 5
5. Addition de HF ou de fluor sur les doubles
ou triples liaisons C-C.............................................................................. — 6
6. Méthodes diverses de fluoration.......................................................... — 6
6.1 Méthode de diazotation ............................................................................... — 7
6.2 Réactifs de fluorations sélectives................................................................ — 7
7. Préparation de produits fluorés par transformation
d’autres dérivés fluorés .......................................................................... — 7
7.1 Préparations et transformations des monomères fluorés ........................ — 8
7.2 Alcools, cétones, éthers fluorés .................................................................. — 8
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J. 5 670

L es dérivés fluorés organiques constituent une classe importante de produits


chimiques qui ont trouvé des applications dans des domaines très variés.
Bien que la grande majorité de ces composés soient préparés selon des pro-
cédés mettant en œuvre des échanges chlore-fluor à l’aide d’acide fluor-
hydrique, il existe de nombreuses autres voies d’accès.
L’objet du présent article est de décrire les différentes méthodes de fluoration
à l’aide d’acide fluorhydrique, de fluor élémentaire, de fluorures métalliques ou
non métalliques, et les principaux procédés de préparation des composés
fluorés organiques, en insistant tout particulièrement sur les procédés exploités
industriellement.
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FLUORATIONS _________________________________________________________________________________________________________________________

1. Principaux composés 2. Généralités concernant


fluorés organiques les procédés de fluoration
Les composés organiques dont la molécule contient un ou plu- ■ Contrairement aux dérivés chlorés qui sont essentiellement
sieurs atomes de fluor représentent une grande famille de produits obtenus selon des réactions de chloration avec du chlore (substi-
qui ont trouvé des applications dans de nombreux domaines [1] à tution d’un atome d’hydrogène ou addition sur un composé à
[3]. double ou triple liaison CCC ), la fabrication des dérivés fluorés ne
peut qu’être exceptionnellement réalisée à partir de fluor élémen-
■ Les composés les plus importants sont les chlorofluoroalcanes taire.
dont les productions et les consommations sont en pleine mutation,
suite à la découverte de l’implication de certains d’entre eux dans la En raison des très fortes énergies des liaisons CCF (447 à
destruction de l’ozone stratosphérique. 505 kJ/mol) et HF (566 kJ/mol), les fluorations par le fluor élémen-
taire, telles que par exemple :
À la fin des années quatre-vingt, les 4 produits les plus consom-
més, essentiellement utilisés comme fluides frigorigènes, agents C H + F2 C F + HF
d’expansion des mousses plastiques, propulseurs d’aérosols et sol-
vants, étaient : sont très exothermiques (environ 440 kJ/mol) et se traduisent en
— le CFC 11 de formule CFCl3 ; général par des réactions violentes, dans certains cas explosives,
— le CFC 12 de formule CF2Cl2 ; qui donnent lieu à des coupures des liaisons CCC , dont l’énergie
— le CFC 113 de formule CF2ClCFCl2 ; de formation est d’environ 348 kJ/mol.
— le HCFC 22 de formule CHF2Cl. ■ Dans ces conditions, la très grande majorité des dérivés fluorés
Nota : CFC (chlorofluorocarbures) et HCFC (hydrochlorofluorocarbures ) ; pour plus de sont obtenus selon d’autres méthodes de fluoration mettant en
détails et, en particulier, pour la nomenclature abrégée de ces produits, on se reportera à œuvre l’acide fluorhydrique ou les fluorures métalliques. La plupart
l’article du présent traité cité en référence bibliographique [14].
des grands produits industriels sont ainsi fabriqués par substitution
Suite aux différentes réglementations internationales, les compo- d’un dérivé chloré par l’acide fluorhydrique selon la réaction géné-
sés perhalogénés (CFC 11, 12, 113, 114, 115) ont progressivement rale :
été remplacés par d’autres produits, en particulier par les hydrochlo-
rofluorocarbures (HCFC 22, 141b, 142b, 123, 124...) et par les hydro- C Cl + HF C F + HCl
fluorocarbures (HFC 134a, 143a, 32, 125...) et ils ont été entièrement
supprimés à partir de 1996 dans les pays développés. La production Ces échanges chlore-fluor sont des réactions pratiquement ather-
mondiale estimée de l’ensemble de ces produits est donnée en miques (DH de l’ordre de - 10 à - 20 kJ/mol) qui, selon les produits
Doc. J 5 670. visés, peuvent être réalisées soit en phase liquide, soit en phase
gazeuse, en absence ou en présence de catalyseurs. La difficulté
Par ordre d’importance, les produits actuellement les plus
essentielle de ces fluorations provient des dangers inhérents à la
consommés dans le monde sont :
manipulation d’HF anhydre (toxicité, corrosion..., cf. [14] dans ce
— le HCFC 22 de formule CHF2Cl ; traité).
— les HCFC 141b et 142b de formule CH3CFCl2 et CH3CF2Cl ;
— le HFC 134a de formule CF3CH2F ; ■ De nombreuses autres méthodes de fluoration ont néanmoins
— les CFC 11 et 12 de formule CFCl3 et CF2Cl2. été étudiées et sont, dans certains cas, utilisées industriellement.
Les principales sont examinées ci-dessous, en signalant bien évi-
■ En dehors des chlorofluoroalcanes et de leurs produits de substi- demment celles qui ont donné lieu à des développements indus-
tution, il existe de nombreux autres produits fluorés fabriqués en triels et en classant ces différentes méthodes d’obtention de
quantités importantes. On peut en particulier citer, de façon non produits, aussi bien perfluorés que peu fluorés, selon les méca-
exhaustive : nismes suivants :
— les monomères fluorés, utilisés essentiellement pour la fabri- — introduction de fluor par échange hydrogène-fluor, par le fluor
cation des polymères fluorés (leurs productions mondiales élémentaire, par certains fluorures métalliques, par fluoration
annuelles sont données en Doc. J 5 670) : électrochimique ;
— échange chlore-fluor à l’aide d’acide fluorhydrique ou de fluo-
CF2 CF2 ; CF3 CF CF2 ; CF2 CH2 ; CF2 CFCl et rures métalliques ;
— addition d’HF ou de fluor sur des doubles ou triples liaisons
CFH CH2 CCC ;
— introduction de fluor dans une molécule selon des méthodes
— les agents anesthésiques fluorés dont les principaux sont : diverses telles que la substitution des groupements amino dans un
• l’Isoflurane : CF3CHClOCHF2 composé aromatique ;
• l’Enflurane : CHFClCF2OCHF2 — transformation d’autres dérivés fluorés.
• l’Halothane : CF3CHBrCl
— certains produits pharmaceutiques [3] [11], herbicides, pestici-
des composés biologiquement actifs [12], dont la plupart sont fabri-
qués à partir de quelques grands intermédiaires tels que le fluoro-
benzène, le trifluorométhylbenzène et leurs dérivés ; en 1995,
3. Substitution d’un atome
environ 8 % des produits pharmaceutiques et 25 % des pesticides
commercialisés dans le monde étaient des produits fluorés [3] [12] ;
d’hydrogène
— certains fluides inertes (éthers et hydrocarbures perfluorés)
utilisés essentiellement dans l’industrie électronique ;
— les tensioactifs fluorés et les produits d’hydrofugation et 3.1 Fluoration par le fluor élémentaire
d’oléofugation des textiles, du cuir et du papier, à chaîne perfluoro-
alkyle CnF2n+1 (avec n = 6 à 14) ;
— différents intermédiaires de synthèse tels que les acides Comme indiqué précédemment, la fluoration d’un composé
CF3COOH et CF3SO3H et leurs dérivés, CF3COCF3 , CF3CH2OH... hydrogéné par le fluor élémentaire est une réaction très violente,

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Alkylation des oléfines


par les paraffines

par Jean-François JOLY


Ingénieur de l’École supérieure de chimie industrielle de Lyon
Ingénieur-docteur de l’Université de Lyon
Chef du Département réactions et modélisation des réacteurs à l’IFP

1. Réaction principale, catalyseurs et réactifs ..................................... J 5 680v2 - 2


1.1 Réaction principale ...................................................................................... — 2
1.2 Catalyseurs ................................................................................................... — 2
1.3 Paraffines ...................................................................................................... — 2
1.4 Oléfines ......................................................................................................... — 2
2. Schéma réactionnel de l’alkylation..................................................... — 5
2.1 Réaction principale ...................................................................................... — 5
2.2 Réactions secondaires ................................................................................. — 5
2.3 Les trois mécanismes d’Albright ................................................................ — 7
3. Mise en œuvre industrielle des procédés HF et H2SO4 ................. — 7
3.1 Facteurs physico-chimiques et conditions opératoires ............................ — 7
3.2 Influence des impuretés de la charge ........................................................ — 8
3.3 Réacteurs ...................................................................................................... — 9
3.4 Évolution des procédés HF.......................................................................... — 10
4. Procédés d’alkylation en présence de catalyseurs hétérogènes — 11
5. Environnement et comparaison des procédés ................................. — 12
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 680v2

e procédé d’alkylation des oléfines par les paraffines a été développé dans
L les années 1930 et a connu un grand essor au début de la seconde guerre
mondiale pour produire des carburants aviation à hauts indices d’octane. Plus
récemment, la demande croissante en essence ainsi que la reformulation des
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carburants (en particulier la diminution des teneurs en soufre et des teneurs en


composés aromatiques) s’est accompagnée d’une augmentation des capacités
mondiales de production d’alkylats. En effet, ces derniers offrent des avan-
tages appréciables par rapport aux essences issues d’autres procédés : leur
indice d’octane élevé permet de compenser en partie la disparition du plomb
dans l’essence, leur toxicité est faible et leur combustion donne lieu aux émis-
sions les moins polluantes.
La réaction d’alkylation consiste à faire réagir une molécule d’isobutane avec
une molécule d’oléfine légère pour produire une coupe essence constituée de
paraffines dont les nombres d’atomes de carbone sont compris entre 5 et 12.

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ALKYLATION DES OLÉFINES PAR LES PARAFFINES ________________________________________________________________________________________

– la viscosité de l’acide H2SO4 est nettement plus élevée que


1. Réaction principale, celle de l’acide HF, cela se traduit par des choix technologiques dif-
catalyseurs et réactifs férents pour créer l’émulsion ;
– la température de fusion de H2SO4 est relativement élevée
(voisine de 10 oC pour de l’acide anhydre, la présence d’eau abais-
sant cette température de fusion) bien qu’une température de réac-
1.1 Réaction principale tion basse soit favorable à l’alkylation ; la limite sera donc voisine
de 10 oC ;
La réaction la plus typique de l’alkylation est l’addition de l’iso- – les densités des deux acides sont supérieures à celle de l’iso-
butane sur les butènes pour donner l’isooctane : butane (0,60) et de l’alkylat (0,71) ; la séparation entre l’acide et la
phase hydrocarbure est facile et peut être réalisée par simple
CH3 CH3 CH3 décantation.
CH3 C H + C4H8 → CH3 CH CH2 C CH3 Les acides HF et H2SO4 permettent de réaliser l’akylation des
oléfines C3 , C4 et C5 en présence d’isobutane.
CH3 CH3
Du fait de sa réactivité plus faible, l’éthylène ne peut être alkylé
isobutane butènes isooctane qu’en présence de chlorure d’aluminium.
avec ∆H298 = – 84 kJ/mol.
1.2.2 Nouveaux catalyseurs
C’est une réaction exothermique, qui s’effectue à basse tempéra-
ture (10 à 40 oC) en présence de catalyseurs acides. L’acide fluorhydrique liquide, bien qu’utilisé majoritairement, est
Diverses hypothèses ont été émises pour expliquer la formation quelque peu contesté du fait des problèmes graves qu’il pourrait
des produits. Toutes ces hypothèses sont basées sur des réactions provoquer lors d’incidents sur l’unité industrielle. On craint, en
s’effectuant par l’intermédiaire d’ions carbonium. particulier que, du fait de sa pression de vapeur élevée, des
nuages toxiques menacent des régions entières.
Pour tenter d’éliminer les inconvénients des catalyseurs liquides,
1.2 Catalyseurs un grand nombre de sociétés pétrolières et de centres de
recherche ont envisagé de mettre au point des catalyseurs
solides [2]. Cet aspect sera traité dans le paragraphe 4.
1.2.1 Catalyseurs conventionnels
L’alkylation s’effectue en présence de catalyseurs acides suscep-
tibles de protoner les oléfines et de favoriser les transferts 1.3 Paraffines
d’hydrure à basse température. Les catalyseurs utilisés industriel-
lement sont l’acide sulfurique à 98 % en masse et l’acide fluorhy- L’alkylation ne se produit qu’en présence de paraffine possédant
drique anhydre. un hydrogène tertiaire. L’isobutane est en fait la seule paraffine uti-
lisée industriellement.
Les principales caractéristiques des acides H2SO4 et HF sont
données dans le tableau 1. L’isopentane peut s’additionner sur une oléfine dans les
conditions de l’alkylation des paraffines ; il n’est pas utilisé, d’une
Ce tableau met en évidence des différences importantes de pro-
part, parce qu’il est lui-même un bon constituant du pool essence
priétés physico-chimiques qui ont un impact direct sur les techno-
et, d’autre part, parce que le cation tert-amyle :
logies retenues pour les réacteurs industriels, en particulier :
– la solubilité de l’isobutane et des produits de la réaction dans
les acides est très faible ; il y a donc deux phases distinctes au sein CH3
du réacteur et un apport d’énergie est nécessaire pour créer une
interface suffisante entre ces deux phases (formation d’une émul- CH3 C CH2 CH3
+
sion), pour que la réaction d’alkylation se déroule à une vitesse
suffisante ;
a une tendance plus grande que le cation tert-butyle à perdre un
proton, entraînant, selon la réaction de rupture de chaîne, une
consommation trop élevée d’isoparaffine.
Tableau 1 – Principales caractéristiques des acides
HF et H2SO4 [1]
Caractéristique HF H2SO4
1.4 Oléfines
Masse moléculaire ....................................... 20,01 98,08 1.4.1 Butènes
Température d’ébullition .......................(oC) 19,4 290
Température de fusion ..........................(oC) – 82,8 10 Les butènes sont les oléfines les plus utilisées pour produire des
alkylats à haut indice d’octane. Le pourcentage massique typique
Densité........................................................... 0,99 1,84 des quatre butènes (butène-1, butène-2 cis, butène-2 trans, isobu-
Viscosité ..................................................(cP) 0,256 33 tène) dans une coupe C4 de craquage thermique est respective-
(0 oC) (15 oC) ment égal à 25, 5, 12 et 58. Dans une coupe C4 de craquage
Acidité Hammett (-Ho) ................................. 10,0 11,1 catalytique, il est égal à 24, 22, 30 et 24.
D’après le mécanisme réactionnel, les produits d’addition
Solubilités massiques primaire se forment peu par rapport aux autres structures
iC4H10 dans acide 100 % (27 oC) ...........(%) 2,7 – isomères. Les analyses de la fraction octane (tableau 2) obtenue
iC4H10 dans acide 99,5 % (13 oC) ..........(%) – 0,1 par l’alkylation de l’isobutane sur les butènes-2 montrent, en effet,
que les octanes sont constitués essentiellement de triméthyl-
HF dans iC4H10 (27 oC)...........................(%) 0,44 –
pentanes (TMP), mais que le 2,2,3-triméthylpentane ne se forme
HF dans C3H8 (27 oC) .............................(%) 0,90 – qu’en très faible quantité. La formation des diméthylhexanes

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_________________________________________________________________________________________ ALKYLATION DES OLÉFINES PAR LES PARAFFINES

Tableau 2 – Composition massique de la fraction C8 de l’alkylat obtenu à partir d’isobutane


et de butènes. Conditions opératoires : catalyseur HF, température d’alkylation 25 oC, rapport
volumique isobutane/butène égal à 13 [3]
Composé NOR NOM Butène-2 trans Butène-2 cis Isobutène Butène-1
2,2,3 TMP 109,6 99,9 1,4 % 1,4 % 1,3 % 1,5 %
2,3,3 TMP 106,1 99,4 13,8 % 13,8 % 11,7 % 13,3 %
2,3,4 TMP 102,7 95,9 20,2 % 20,4 % 13,4 % 15,6 %
2,2,4 TMP 100,0 100,0 54,4 % 54,3 % 62,6 % 46,3 %
3,4 DMH 76,3 81,7 0,3 % 0,3 % 0,3 % 1,2 %
2,3 DMH 71,3 78,9 2,7 % 2,8 % 2,2 % 8,9 %
2,4 DMH 65,2 69,9 3,9 % 3,9 % 4,4 % 8,1 %
2,5 DMH 55,5 55,7 3,3 % 3,1 % 4,1 % 5,1 %
TM triméthyl ; DM diméthyl ; P pentane ; H hexane.
NOR nombre d’octane recherche.
NOM nombre d’octane moteur.

(DMH) à partir des butènes-2 est due à l’isomérisation subsé-


quente des triméthylpentanes. Indices d’octane
Partant du butène-1, le produit d’addition primaire devrait être le
2,2-diméthylhexane selon la réaction : L’indice d’octane (ou nombre d’octane) d’un carburant est,
par définition, le nombre entier le plus proche du pourcentage
en volume d’isooctane dans un mélange d’isooctane et de
CH3 n-heptane, dont les caractéristiques antidétonantes équivalent
à celles du carburant étudié, lorsqu’on les compare suivant les
CH3 C+ + CH2 CH CH2 CH3 → méthodes standard, dites méthode Recherche donnant le
CH3 nombre d’octane recherche (NOR) et méthode Moteur don-
CH3
nant le nombre d’octane moteur (NOM), correspondant à des
CH3 C CH2 CH CH2 CH3 conditions de fonctionnement différentes du moteur expéri-
+
mental CFR (Cooperative Fuel Research), essentiellement la
CH3
vitesse de rotation du moteur, respectivement égale à 600 et
900 tr/min.
En fait, cet isomère ne se forme pas du tout, parce que le réar-
rangement de l’ion carbonium secondaire donne des ions carbo-
nium tertiaire plus stables. On explique également la formation de Toutefois, comme le butène-1 produit une proportion non négli-
ces derniers par isomérisation du butène-1 en butènes-2 avant geable de diméthylhexanes, globalement la qualité de l’alkylat du
l’alkylation. point de vue de l’indice d’octane diminue selon l’ordre :
Les résultats obtenus avec l’isobutène montrent que l’isooctane
majoritaire, le 2,2,4-triméthylpentane, est, dans ce cas, le produit butènes-2 > isobutène > butène-1
d’addition primaire :
Ces résultats ont été obtenus en utilisant l’acide fluorhydrique
comme catalyseur. C’est la raison pour laquelle, lorsque l’on utilise
CH3 CH3 CH3 CH3 l’acide fluorhydrique, l’alkylation est souvent effectuée après une
hydroisomérisation du butène-1 en butènes-2 [6].
CH3 C+ + CH2 C CH3 → CH3 C CH2 C CH3
+
Avec l’acide sulfurique, l’ordre décroissant est différent :
CH3 CH3

Cela s’explique par le fait que l’ion carbonium obtenu est alors butènes-2 > butène-1 > isobutène
tertiaire.
Le tableau 4 montre en effet, qu’en présence d’acide sulfurique,
Il conduit néanmoins aux autres structures isomères par réarran- l’isobutène conduit à des réactions secondaires importantes et que
gements intramoléculaires, lesquels sont plus rapides que le trans- l’indice d’octane de l’alkylat est alors plus bas que celui obtenu
fert d’hydrure qui est l’étape limitative. Les valeurs des nombres avec des n-butènes :
d’octane recherche (NOR) et moteur (NOM) indiquent que ces réar-
rangements sont souhaitables vers les triméthylpentanes et non
vers les diméthylhexanes possédant des indices d’octane beau- NOR = 93,
2comparé à 97,8.
coup plus faibles.
Les butènes se différencient également par l’importance des Cette constatation milite en faveur de la transformation de l’iso-
réactions secondaires conduisant à un mélange de paraffines plus butène préférentiellement en méthyl tert-butyléther (MTBE) avant
légères et plus lourdes que les isooctanes, comme l’indique le l’alkylation. Le nombre d’octane recherche (NOR) du MTBE est
tableau 3. Ces réactions secondaires se produisent d’autant plus égal à 118.
rapidement que la température de réaction est plus élevée. L’iso-
butène donne une quantité de sous-produits plus importante que Pour les butènes, le rendement en alkylat est compris entre 204
les n-butènes. et 208 parties en masse d’alkylats pour 100 parties de butènes.

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Alkylation des composés aromatiques

par Jean-Louis SENGEL


Ingénieur ENSCS (École nationale supérieure de chimie de Strasbourg)
Ingénieur procédés Elf-Atochem

1. Présentation générale de l’alkylation ................................................ J 5 690 - 2


1.1 Définition de l’alkylation ............................................................................. — 2
1.2 Importance des réactions d’alkylation des composés aromatiques ....... — 2
2. Réactions chimiques ............................................................................... — 2
2.1 Réactions d’alkylation ................................................................................. — 2
2.2 Transalkylation ............................................................................................. — 3
2.3 Conditions d’alkylation et de transalkylation ............................................ — 3
2.4 Déalkylation.................................................................................................. — 3
2.5 Réactions secondaires................................................................................. — 3
3. Mécanismes de réaction ........................................................................ — 3
3.1 Catalyse par carbocations........................................................................... — 3
3.2 Alkylation par carbanions ........................................................................... — 4
3.3 Mode d’action des zéolithes ....................................................................... — 4
3.4 Nature des réactifs et vitesse d’alkylation ................................................. — 4
3.5 Rôle du catalyseur ....................................................................................... — 4
3.6 Isomérisation ............................................................................................... — 5
4. Productions industrielles....................................................................... — 5
4.1 Production de l’éthylbenzène ..................................................................... — 5
4.1.1 Principes généraux ............................................................................. — 5
4.1.2 Procédé au chlorure d’aluminium..................................................... — 5
4.1.3 Procédé par contact des zéolithes avec des réactifs gazeux........... — 6
4.1.4 Procédé par contact des zéolithes avec des hydrocarbures
aromatiques en phase liquide et avec l’éthylène gazeux................ — 7
4.1.5 Comparaison des procédés ............................................................... — 8
4.2 Production du cumène ................................................................................ — 8
4.2.1 Procédé à l’acide phosphorique ........................................................ — 8
4.2.2 Autres procédés.................................................................................. — 9
4.2.3 Précautions particulières à la production de cumène ..................... — 9
4.3 Production des alkylbenzènes .................................................................... — 10
4.3.1 Procédé au chlorure d’aluminium AlCl3 ........................................... — 10
4.3.2 Procédé à l’acide fluorhydrique HF ................................................... — 10
4.4 Production des alkylphénols....................................................................... — 10
4.4.1 Production des crésols et des xylénols par alkylation
du phénol par le méthanol................................................................. — 10
5. Sécurité et protection de l’environnement ...................................... — 11
5.1 Risques ......................................................................................................... — 11
5.2 Rejets ............................................................................................................ — 12
Références bibliographiques ......................................................................... — 12
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ALKYLAT ION DE S COMPOSÉ S AROMAT IQUE S _______________________________________________________________________________________________

et article est consacré à l’étude de l’alkylation des seuls dérivés aromati-


C ques qui ont une importance industrielle :
— le benzène ;
— à une échelle beaucoup moindre, le phénol.
L’alkylation des amines aromatiques (aniline, naphtylamines, etc.) ne concerne
que des volumes faibles et n’est citée ici que pour mémoire.
L’introduction du radical alkyle peut se faire sur un atome de carbone situé,
en fonction des conditions dans lesquelles se fait la réaction, soit dans le noyau
aromatique, soit dans une chaîne latérale, s’il y en a une.
Nous n’étudierons pas l’obtention des amines substituées à l’azote ou celle
des phénols substitués (alkyl-phényl-éthers).

1. Présentation générale Sur le plan industriel, ces réactions ont une grande importance
dans :
de l’alkylation — l’industrie des matières plastiques : l’addition d’éthylène
au benzène permet la production d’éthylbenzène à partir duquel
est assurée la totalité de la production de styrène, et donc des poly-
1.1 Définition de l’alkylation styrènes et des caoutchoucs qui en contiennent, et des ABS ;
— l’industrie chimique en général : l’addition de propylène au
L’alkylation est la fixation d’un ou plusieurs radicaux aliphatiques, benzène conduit au cumène dont l’hydroperoxyde est utilisé pour
c’est-à-dire saturés (alkyle), dans une molécule ou sur un atome. produire le phénol et l’acétone ;
— l’industrie des détergents : les alkylats obtenus par action
Dans le cas le plus simple, cette fixation est la conséquence de
du benzène sur des hydrocarbures ou un mélange d’hydrocarbures
la réaction d’addition d’un alcène sur un hydrocarbure saturé :
voisins des dodécènes conduisent, après sulfonation (cf. article
cas de la réaction de l’éthylène sur le benzène ; il se forme de
l’éthyl-benzène puis, la réaction se répétant, des di-, tri-, jusqu’aux Sulfonation et sulfatation [J 5 740]), à des composés ayant des
hexaéthylbenzènes. propriétés tensioactives.
Dans cette réaction, l’alcène peut être remplacé par un composé
organique susceptible de libérer un radical alkyle dans le milieu À titre indicatif, on estime qu’en 1994, 72 % du benzène
réactionnel : un alcool, un halogénure d’alkyle, un ester, un éther, consommé dans le monde, environ 17 Mt/an, était transformé
un alcane, etc. par alkylation.
Exemple :

CHCl 3 + 3C 6 H 6 & ( C 6 H 5 ) 3 CH + 3HCl


2. Réactions chimiques
Dans ce cas, il peut y avoir libération d’un autre composé qui peut
avoir une action néfaste sur le milieu réactionnel. 2.1 Réactions d’alkylation
Cette addition peut se faire sur le noyau aromatique lui-même ou
sur une chaîne latérale préexistante. Ainsi, suivant les conditions
opératoires, l’une des deux réactions ci-dessous prédominera : Si Ar H symbolise un hydrocarbure aromatique et un alcène

C 6 H 5 CH 3 + HCH 2 OH C6 H5 C2 H5 + H2 O (ou oléfine), la réaction d’alkylation s’écrit de manière générale :


&
ou C 6 H 5 CH 3 + HCH 2 OH & C 6 H 4 ( CH 3 ) 2 + H 2 O

Il est convenu de ne pas considérer les réactions d’addition


d’hydrocarbures éthyléniques entre eux comme des réactions
d’alkylation : la molécule formée contient une liaison éthylénique ; Exemple :
elle réagit à son tour, ce qui conduit à la formation de polymères
par polyaddition. C6 H6 + C2 H4 C 6 H 5 CH 2 CH 3
&
benzène éthylène éthylbenzène

1.2 Importance des réactions d’alkylation Cette réaction est exothermique : ∆H ≈ – 473 kJ/mol.
des composés aromatiques Elle ne s’arrête pas à ce stade, mais se poursuit par la fixation
d’autres chaînes latérales suivant le schéma :

Ce type de réaction autorise, en principe, la production de sque- C 6 H 5 CH 2 CH 3 + C 2 H 4 & C 6 H 4 ( CH 2 CH 3 ) 2


lettes hydrocarbonés de dimension et de configuration souhaitées,
dans lesquels pourront être ultérieurement introduits les groupe-
ments fonctionnels voulus.

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_______________________________________________________________________________________________ ALKYLATION DES COMPOSÉS AROMATIQUES

Ce dernier composé est de la forme : On opère :


— soit thermiquement, donc sans catalyseur, par exemple sous
4 MPa et 700 oC ;
— soit en présence de catalyseur, par exemple des oxydes de
molybdène déposés sur de l’alumine.
Cette seconde réaction a les mêmes caractéristiques que la Globalement, cette réaction est fortement exothermique à
première ; toutefois l’enthalpie libérée par la fixation du premier cause de l’hydrogénation des fragments.
radical est, en général, légèrement supérieure à celle de fixation
des suivants.
2.5 Réactions secondaires
2.2 Transalkylation Le milieu dans lequel se fait l’alkylation est particulièrement réactif
du fait des catalyseurs utilisés.
À côté des réactions citées ci-dessus, il existe les réactions de Aussi, à côté des réactions souhaitées d’alkylation et éventuelle-
transalkylation par lesquelles une molécule polyalkylée est mise au ment de transalkylation, se produisent des réactions :
contact d’une molécule de degré d’alkylation moindre, ou de l’hydro- — de polymérisation de l’oléfine avec elle-même ou avec les
carbure aromatique initial, pour donner naissance à plusieurs molé- oligomères déjà formés ;
cules de degré d’alkylation intermédiaire. — d’alkylation de ces oligomères sur l’hydrocarbure à alkyler.
Exemple : Dans le cas des hydrocarbures aromatiques, les réactions
d’isomérisation peuvent affecter :
(1)
— soit uniquement la chaîne latérale, en général dans le sens
C6 H3 ( C2 H5 )3 + C6 H5 C2 H5 &
: 2C 6 H 4 ( C 2 H 5 ) 2
d’une ramification plus poussée ;
— soit la position relative des chaînes latérales sur le noyau, en
Cette réaction est très légèrement exothermique : général dans le sens d’une augmentation de la quantité de l’isomère
∆H ≈ 5,44 kJ/mol, dans le sens (1). méta ;
— soit déplacer des radicaux, par exemple méthyle, prélevés sur
la chaîne latérale qui est donc raccourcie, de celle-ci vers le noyau.
L’importance de ces réactions croît avec la durée de contact, la
2.3 Conditions d’alkylation température ; elle dépend aussi de la nature du catalyseur : les zéo-
et de transalkylation lithes favorisent l’isomère méta par suite de l’effet de filtre de leurs
pores.
Ces réactions se font en présence de catalyseurs. De leur
nature, examinée par la suite, dépendent :
— les conditions de réaction : température et pression ;
— les proportions à l’équilibre des divers isomères des composés 3. Mécanismes de réaction
polyalkylés ;
— le taux d’alkylation par passage dans le réacteur ;
— la plus ou moins grande importance des réactions de trans- 3.1 Catalyse par carbocations
alkylation par rapport à celle d’alkylation ;
— la position du carbone alkylé : sur le noyau, ce qui est le cas Les alkylations industrielles d’hydrocarbures aromatiques se font
le plus fréquent, ou sur la chaîne latérale s’il s’agit de la fixation d’un par catalyse acide avec formation d’ions carbonium. Parmi les cata-
deuxième radical. lyseurs agissant suivant ce processus, citons :
— le chlorure d’aluminium AICI3 ;
— l’acide fluorhydrique HF ;
2.4 Déalkylation — l’acide phosphorique H3PO4 ;
— le trifluorure de bore BF3 ;
Il est possible de séparer la chaîne latérale d’un noyau — l’acide sulfurique H2SO4 .
aromatique. Ce sont des réactions de substitution électrophile s’effectuant
Certaines des réactions qui ont lieu dans les fours de vapocra- en deux étapes, comme indiqué ci-après.
quage en vue de produire éthylène et propylène sont des réactions ■ La formation de l’ion carbonium, par addition, sur l’alcène uti-
de déalkylation. Elles s’y produisent toutefois à côté de nombreuses lisé, d’un proton provenant d’un acide XH susceptible d’en libérer
réactions d’aromatisation, de coupures de chaînes et de déshydro- (acides sulfurique, fluorhydrique, phosphorique, catalyseur de type
génation dans des conditions sévères (températures de l’ordre de Friedel et Crafts en milieu acide, zéolithes modifiées) suivant la repré-
700 oC). sentation :
Les réactions industrielles de déalkylation se font généralement
sous forte pression d’hydrogène et à des températures
élevées. On obtient l’hydrocarbure aromatique et du méthane ; ce
dernier provient de l’hydrogénation des radicaux méthyle séparés
du toluène et des xylènes mais aussi de l’hydrogénation des
fragments d’une chaîne latérale plus compliquée, en général peu
stable dans les conditions opératoires (700 oC et 4 MPa) : ainsi le La vitesse de formation de cet ion dépend de la nature de l’alcène
radical propyle du cumène formera, après rupture de son squelette et de celle du catalyseur : l’éthylène est le moins réactif des alcènes
et hydrogénation des fragments, trois molécules de méthane. Cela de faible masse molaire ; les plus réactifs sont ceux qui ont un atome
fait que l’on ne peut pas considérer cette réaction comme la réaction de carbone tertiaire, tout en ayant la plus faible masse molaire (l’iso-
inverse de la réaction d’alkylation. butène).
À partir des octènes, la réactivité diminue et les réactions secon-
daires prennent de l’importance.

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Nitration des composés


aromatiques

par Pascal METIVIER


Rhône-Poulenc Industrialisation

Mise à jour du texte de Pierre BOUVET (PCUK) paru en 1982 dans ce traité.

1. Présentation générale ............................................................................. J 5 720 - 2


1.1 Principales fonctions chimiques obtenues................................................. — 2
1.2 Principaux produits ...................................................................................... — 2
2. Chimie de la nitration.............................................................................. — 2
2.1 Nitration électrophile aromatique : mécanisme général .......................... — 2
2.2 Orientation de la substitution...................................................................... — 3
2.3 Chimie parasite de la nitration .................................................................... — 4
2.4 Autres méthodes de nitration...................................................................... — 4
2.4.1 Nitration avec N2O5 ............................................................................. — 4
2.4.2 Cas particulier des mononitrophénols [9] ......................................... — 4
2.4.3 Cas du (TNB) trinitrobenzène [10]...................................................... — 4
2.4.4 Cas de l’acide picrique [11]................................................................. — 4
3. Mise en œuvre industrielle..................................................................... — 4
3.1 Principaux agents de nitration industrielle ................................................ — 4
3.1.1 Nature des agents de nitration........................................................... — 4
3.1.2 Cas du mélange sulfonitrique ............................................................ — 5
3.2 Sécurité des procédés de nitration ............................................................. — 5
3.3 Exemples de procédés industriels .............................................................. — 5
3.3.1 Nitration discontinue........................................................................... — 5
3.3.2 Nitration continue................................................................................ — 5
4. Perspectives industrielles de la réaction de nitration ................... — 6
Références bibliographiques .......................................................................... — 6

a nitration aromatique est la méthode industrielle la plus simple pour intro-


L duire un groupement azoté sur un hydrocarbure aromatique. Cette tech-
nique permet d’obtenir des composés nitroaromatiques, qui peuvent être inté-
ressants tels que, mais sont essentiellement des composés intermédiaires.
De toutes ces utilisations consécutives possibles, la plus importante est sans
conteste la réduction du groupement nitroaromatique en aniline, source d’une
chimie extrêmement variée. On retrouve des produits issus de cette chimie dans
tous les domaines : les produits agrochimiques (que ce soit des insecticides ou
des herbicides), la pharmacie, les polymères polyuréthanes, les colorants, les
stabilisants, les produits anti-UV, etc.
L’objectif de cet article est de décrire les principaux aspects de la chimie de la
nitration. Ces dix dernières années ont été marquées par l’apparition d’un nou-
p。イオエゥッョ@Z@ウ・ーエ・ュ「イ・@QYYX

veau procédé adiabatique pour la nitration du benzène, ainsi que le développe-


ment de nouvelles techniques pour la chimie fine.

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NITRATION DES COMPOSÉS AROMATIQUES _________________________________________________________________________________________________

1. Présentation générale Ar H
Ar Cl Ar NO

1.1 Principales fonctions chimiques Ar OH Ar NO2 Ar Cl (ou Br)


Intermédiaires
obtenues fabriqués par
Ar SO3H réaction de
Ar NH2 Ar N º Nl Sandmeyer
+
Les composés nitrés sont des intermédiaires importants en chi- Amines primaires X–
mie organique. À partir de ces intermédiaires, une chimie, permet- aromatiques
Colorants
tant d’avoir accès à différentes fonctions azotées ou non [1], [2], azoïques (1)
s’est développée (figure 1). X – anion monovalent

Quelques produits finis, possédant la fonction nitro, ainsi que Les flèches en tiretés indiquent des réactions de moindre importance.
leurs applications sont présentés sur la figure 2. La figure 3 réperto- Ar radical aryle : radical dérivé d'un noyau aromatique par élimination d'un
rie quelques grands produits finis non nitrés mais issus d’un produit atome d'hydrogène, par exemple C6H5 phényle et C10H7 naphtyle.
nitré.

Figure 1 – Principales fonctions chimiques obtenues


à partir des dérivés nitrés par substitution ou modification
1.2 Principaux produits du groupe nitré

Les deux principaux produits sont, sans conteste, le nitrobenzène


et le dinitrotoluène.
PRODUIT STRUCTURE APPLICATION
Le nitrobenzène est converti presque exclusivement en aniline, CH3
elle-même majoritairement convertie en MDI (méthylène diisocya- O2 N NO2
nate) monomère pour mousses polyuréthanes. Le dinitrotoluène est
trinitrotoluène (TNT) explosif
lui exclusivement utilisé à la fabrication de TDI (toluène diisocya-
nate), lui aussi monomère pour la fabrication de mousses polyuré-
thanes. NO2

Les capacités des deux produits sont en augmentation perma- OH


nente avec une croissance de l’ordre de 2 à 5 % par an. Dans le cas O2N NO2
du dinitrotoluène les accroissements de production sont tous effec- acide picrique explosif pharmacie
(sel de, antibactérien)
tués par augmentation de production des unités existantes. Les
capacités mondiales connues sont données dans le tableau 1. NO2
OH
O2 N
dinoseb herbicide, inhibiteur
Tableau 1 – Production mondiale par zone de polymérisation

Nitrobenzène : États-Unis 820 kt NO2


2 462 kt Europe 1 550 kt
Japon 92 kt CH3
O2 N NO2
Dinitrotoluène : États-Unis 358 kt
712 kt Europe 334 kt musk xylol parfum
Asie 30 kt
NO2
S
C2H5O NO2
parathion insecticide
2. Chimie de la nitration C2H5O
P
O

CO2H
HO
2.1 Nitration électrophile aromatique : jaune alizarine R N colorant
mécanisme général N
OH NO2

Cette réaction a fait l’objet d’un nombre très important d’études


dans les années 1960-1980 [3]. Le bilan net de la réaction est extrê-
mement simple et attrayant d’un point de vue économique et envi- métronidazole H3C N pharmacie
NO2
(antiprotozoaire)
ronnemental puisqu’il y a consommation stœchiométrique d’un
équivalent d’acide nitrique (réactif peu cher) avec coproduction d’un N
équivalent d’eau. La réaction est en général conduite en milieu acide
fort, l’ion nitronium NO 2+ engendré dans le milieu étant l’espèce
active [4] (figure 4). Figure 2 – Quelques produits finis nitrés

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Hydroformylation des alcènes


(ou oléfines)

par Émile KUNTZ


Ingénieur chimiste de l’École supérieure de chimie industrielle de Lyon
Licencié en sciences économiques de l’université de Lyon
Laboratoire de chimie organométallique de surface (CPE Lyon)

1. Réaction chimique et catalyseurs d’hydroformylation.................. J 5 750 - 2


1.1 Réaction chimique ....................................................................................... — 2
1.2 Catalyseurs................................................................................................... — 3
2. Matières premières.................................................................................. — 3
3. Hydroformylation du propène .............................................................. — 4
3.1 Ancien procédé au cobalt ........................................................................... — 4
3.2 Procédés au rhodium-triphénylphosphine (Union Carbide Corp.
et autres sociétés)........................................................................................ — 5
3.3 Procédé biphasique (Ruhrchemie – Rhône-Poulenc)................................ — 6
3.4 Comparaison des procédés ........................................................................ — 7
4. Hydroformylation d’autres alcènes..................................................... — 7
4.1 Procédés conventionnels au cobalt ........................................................... — 7
4.2 Procédé au cobalt modifié (cobalt tributylphosphine) ............................. — 8
4.3 Procédés au rhodium .................................................................................. — 9
5. Hydroformylation d’alcènes fonctionnalisés ................................... — 10
5.1 Hydroformylation de l’alcool allylique : accès au butanediol.................. — 10
5.2 Hydroformylation de l’octénal : accès au nonanediol
et à la nonanediamine................................................................................. — 10
6. Sécurité et protection de l’environnement ...................................... — 11
7. Perspectives en synthèse organique .................................................. — 11
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 750
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@RPPS@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

’hydroformylation (ou synthèse oxo) consiste à faire réagir un composé olé-


L finique avec un mélange d’oxyde de carbone et d’hydrogène sous pression
pour former un aldéhyde selon la réaction :

C C + C O + H 2 C C

H C H O

Les deux métaux les plus efficaces pour catalyser cette réaction sont le cobalt
et le rhodium. Les formes actives de ces deux métaux sous formes d’hydrures
carbonylés sont solubles dans le milieu réactionnel, ce qui confère à l’hydrofor-
mylation le caractère d’une réaction catalytique homogène.
À partir, principalement, des oléfines linéaires terminales, les aldéhydes obte-
nus sont des produits de chimie de base importants qui peuvent être convertis
en alcools, esters, acides, amines, etc.

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HYDROFORMYLATION DES ALCÈNES (OU OLÉFINES) __________________________________________________________________________________________

L ’ h ydroformylation du propène en butanal (et en isobutanal), qui permet


d’accéder au butanol, à l’isobutanol et au 2-éthylhexanol, représente 70 % des
capacités mondiales d’hydroformylation (tableau A).
(0)

T a bleau A – Capacités de production d’aldéhydes par hydroformylation (1)


Aldéhydes C3 C4 C5 à C13 > C13
Pourcentage 6% 70 % 18 % 6%
(1) Le total mondial estimé en 2001 é tait de 7 millions de tonnes.

Les alcools courts (C3 à C5 ) et leurs esters sont utilisés principalement comme
solvants tandis que les alcools à longue chaîne (C12 à C18) sont utilisés pour la
production de détergents. Les phtalates d’alcoyles (C8 à C10) sont employés
comme plastifiants, notamment du PVC.
Depuis 1974, la plupart des unités de production d’aldéhydes (C3, C4, C5 ) par
catalyse au cobalt ont été remplacées par des unités opérant dans des condi-
tions plus douces, à plus basse pression, en présence de catalyseurs au rho-
dium. Le rendement en aldéhy   
% et même 99 % pour
certains procédés. L’utilisation du rhodium en catalyse homogène est complète-
ment maîtrisée dans le réacteur et dans les opérations de recyclage et de régéné-
ration. En particulier, le procédé Ruhrchemie-Rhône-Poulenc, qui utilise un
système biphasique avec séparation du catalyseur par décantation, a permis une
grande simplification du procédé d’hydroformylation du propène et du butène.
Avec le rhodium, le même concept de séparation du catalyseur par décantation
a permis l’industrialisation de la synthèse du butanediol par hydroformylation
de l’alcool allylique, du nonanediol par hydroformylation de l’oct-7-én-1-al et de
divers intermédiaires. Toutefois la catalyse au cobalt demeure très compétitive
dans la production des alcools utilisés pour la fabrication des détergents.
De nombreuses innovations ont provoqué un regain en recherche industrielle
et universitaire depuis 1

9     


Ces améliorations ont conforté la position de la réaction d’hydroformylation
pour la production d’alcools primaires et de leurs dérivés à partir des alcènes (ou
oléfines). Les efforts déployés en recherche depuis 1980 pour améliorer les per-
formances des réactions d’oxydation des alcanes, d’hydratation des oléfines et
du butadiène, n’ont pas obtenu des résultats permettant de concurrencer la réac-
tion d’hydroformylation.

1. Réaction chimique important. Ainsi, l’ heptanal(n) et le 2-mé thylhexanal (iso) sont obte-
nus avec l’ hex-1-è ne suivant la ré action :
et catalyseurs Isomè re n
O
d’hydroformylation
+ CO + H2
Isomè re iso
1.1 Réaction chimique O

Les ré actions secondaires constaté es sont les suivantes


L’ hydroformylation a é té dé couverte en 1938 par Roelen de Ruhr- (fi gure 1) :
chemie qui mit en é vidence la formation de propanal à partir — hydrogé nation de l’ olé fi ne en alcane (fi gure 1 a) ;
d’ é thylè ne, de CO et de H2, à tempé rature et pression é levé es, en
— isomé risation de l’ olé fi ne (olé fi ne à double liaison terminale en
pré sence de catalyseur au cobalt [1]. L’ hydroformylation peut ê tre
olé fi ne à double liaison interne) (fi gure 1 b) ;
appliqué e à un grand nombre d’ alcè nes à chaî ne liné aire ou rami-
fi é e, à double liaison interne ou terminale. La ré action a lieu à des — formation de cé tones (fi gure 1 c) ;
tempé ratures et des pressions é levé es avec le cobalt (entre 100 et — ré duction de l’ eau par l’ oxyde de carbone avec formation
200 ˚ C et 100 et 300 bar) et infé rieures avec le rhodium (entre 50 et d’ hydrogè ne et de gaz carbonique (fi gure 1 d).
130 ˚ C et 5 et 50 bar).
Les ré actions secondaires mettant en œ uvre les aldé hydes formé s
La ré action sur une olé fi ne terminale donne naissance à deux sont beaucoup plus importantes. L’ aldé hyde peut ê tre hydrogé né en
aldé hydes : l’ isomè re liné aire (n) et l’ isomè re ramifi é (iso). La sé lec- alcool ou transformé en acide en pré sence de traces d’ oxygè ne. Les
tivité d’ un catalyseur en produit liné aire (n/n+iso) est un paramè tre ré actions d’ aldolisation, de crotonisation, d’ acé talisation entraî nent

T oute reproduction sans autorisation du Centre franç ais d’ exploitation du droit de copie est strictement interdite.
J 5 750 − 2 © Techniques de l’ Ingé nieur, traité Gé nie des procé dé s

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__________________________________________________________________________________________ HYDROFORMYLATION DES ALCÈNES (OU OLÉFINES)

HRh(CO)2L2
H2 a + CO – CO
n-butanal OC L
CH3CH2CH2CHO
Rh
H2
L H
b
OC L OC L

Rh Rh isobutanal
CH3CH(CH3)CHO
L COCH2CH2CH3 L H

CO + H2
1/2  冣2 c OC L
O Rh
OC CO L OC L
L CH(CH3)2
Rh Rh
CO + H2O CO2 + H2 d L CH2CH2CH3 L CH2CH2CH3

Figure 1 – Hydroformylation de l’hex-1-ène CO

L triphénylphosphine
l’apparition de composés lourds qui constituent le problème majeur
des procédés d’hydroformylation. Figure 2 – Mécanisme de l’hydroformylation du propène en n-butanal
et en isobutanal catalysée par le système rhodium-
La sélectivité en produits lourds est souvent supérieure à 5 % triphénylphosphine
avec les catalyseurs au cobalt qui sont beaucoup plus acides que les
catalyseurs au rhodium. Depuis la découverte de cette réaction,
cette contrainte a toujours entraîné une plus grande complexité des
provoque une amélioration de la sélectivité (92 % dans les condi-
procédés au cobalt. Dans les procédés au rhodium dans lesquels
tions optimales). Certaines phosphines permettent des sélectivités
l’aldéhyde (butanal) est éliminé par distillation ou entraîné par des
supérieures à 96 %. Les sous-produits signalés dans le paragraphe
gaz, la masse réactionnelle contenant le catalyseur est constituée
précédent proviennent d’une modification de ce cycle catalytique
principalement de produits lourds qui s’accumulent très lentement.
(hydrogénation, isomérisation, etc.).
Dans ce cas, la sélectivité en lourds est très inférieure à 1 %. Après
plusieurs mois de production, voire une année, il est nécessaire de
changer la masse catalytique. Le catalyseur usé est traité afin de
récupérer le rhodium et une grande partie du cocatalyseur selon des
méthodes dont le détail est demeuré confidentiel. 2. Matières premières
■ Gaz de synthèse
1.2 Catalyseurs Les procédés généralement utilisés pour fabriquer le gaz de
synthèse dans ce traité destiné au procédé oxo (rapport H2 /
CO = 1 à 1,25) sont (cf. références [30] [31] dans ce traité) :
Les sels métalliques usuels de cobalt (Co2+) ou de rhodium (Rh3+)
réagissent avec un mélange d’hydrogène et d’oxyde de carbone — la conversion catalytique du gaz naturel ou d’hydrocarbures
avec formation d’hydrure de métal tétracarbonyle [HM(CO)4] solu- légers au moyen de la vapeur d’eau (reformage à la vapeur) ;
ble en milieu organique (avec M = Co, Rh). — l’oxydation partielle d’hydrocarbures par de l’oxygène ;
— la gazéification du charbon par la vapeur d’eau et l’oxygène.
L’hydrure de rhodium est engendré et stabilisé dans des condi-
tions douces (température inférieure à 100 ˚C et faible pression), ■ Hydrocarbures oléfiniques
celui de cobalt est engendré dans des conditions plus sévères et est Il existe un grand nombre de procédés industrialisés de produc-
instable si la pression diminue : le cobalt métallique précipite en tion d’oléfines.
partie. Mais, dans les conditions de la réaction, le catalyseur est
● Obtention à partir d’hydrocarbures d’origine pétrolière :
maintenu dans la phase liquide sans précipitation de métal.
— obtention d’alcènes gazeux (éthylène, propène et butènes) par
L’addition de ligands, en particulier les alkyl et arylphosphines (L), vapocraquage d’hydrocarbures (cf. référence [32] dans ce traité) ;
donne naissance à une famille de complexes en équilibre avec les — obtention d’alcènes linéaires à double liaison terminale et
hydrures de métaux carbonylés (avec n ⭐ 4 ) : d’alcènes linéaires à double liaison interne, respectivement par cra-
HM(CO)4 + n L → HM(CO)4 − n Ln + n CO quage thermique à 520 ˚C et par craquage catalytique de paraffines
à longue chaîne ;
Le système cobalt-tributylphosphine et surtout le système rho- — obtention d’alcènes linéaires à double liaison interne par dés-
dium-triphénylphosphine sont utilisés industriellement. La cinétique hydrogénation catalytique de paraffines linéaires [procédé Pacol-
et le mécanisme de la réaction avec les catalyseurs au cobalt et au Olex de Universal Oil Products Co. (UOP)] [2].
rhodium ont été étudiés dans le détail. À partir de HRh(CO)2L2 ● Obtention par oligomérisation d’un grand nombre d’alcènes
(L = TPP = triphénylphosphine), nous avons présenté (figure 2) les légers :
deux cycles catalytiques qui conduisent au n -butanal et à l’isobutanal. — obtention, sous l’action de catalyseurs Ziegler à base d’alcoyl-
La sélectivité de la réaction en présence du rhodium sans phos- aluminium, d’alcènes linéaires à double liaison terminale (hex-1-
phine est de 50 % environ ( n/n+iso ) . L’addition de ligand en excès ène, oct-1-ène, déc-1-ène, etc.), à partir de l’éthylène ;

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Carbonylations

par Pascal MÉTIVIER


Docteur de l’Université Louis-Pasteur
Ingénieur de l’École Européenne des Hautes
Études des Industries Chimiques de Strasbourg
Chef du groupe Catalyse de Rhodia

1. Caractéristiques générales du monoxyde de carbone .................. J 5 780 - 2


1.1 Propriétés générales.................................................................................... — 2
1.2 Sources de monoxyde de carbone ............................................................ — 2
1.3 Mécanisme réactionnel général des réactions de carbonylation ............ — 2
2. Carbonylation des alcools et dérivés ................................................. — 3
2.1 Carbonylation du méthanol en acide acétique ......................................... — 3
2.2 Carbonylation de l’acétate de méthyle en anhydride acétique................ — 3
2.3 Synthèse de l’ibuprofène ............................................................................ — 3
3. Carbonylation des oléfines.................................................................... — 4
3.1 Synthèse oxo................................................................................................ — 4
3.2 Hydrocarbonylation des oléfines ............................................................... — 4
3.3 Réaction de Koch : synthèse d’acides ramifiés ......................................... — 4
4. Carbonylation des acétylures ............................................................... — 4
5. Carbonylations des halogénures ......................................................... — 4
5.1 Synthèse des malonates ............................................................................. — 4
5.2 Synthèse de l’acide phénylacétique........................................................... — 4
5.3 Synthèse du Lazabémide ............................................................................ — 4
6. Carbonylations diverses......................................................................... — 5
6.1 Synthèse de polycétones ............................................................................ — 5
6.2 Synthèse du propane 1,3-diol..................................................................... — 5
6.3 Synthèse du diméthylformamide............................................................... — 5
6.4 Carbonylation oxydante : synthèse des oxalates et des carbonates....... — 5
7. Quelques aspects industriels de la réaction de carbonylation ... — 6
8. Conclusion ................................................................................................. — 6
Références bibliographiques ......................................................................... — 7

e monoxyde de carbone CO peut être considéré comme un synthon à la dis-


L position du chimiste permettant de préparer un produit ayant un squelette à
n + 1 carbones à partir d’un produit ayant un squelette carboné de n carbones.
Les réactions de carbonylation permettent d’aboutir à des produits comportant
une nouvelle fonction qui peut être un aldéhyde, un acide, un ester, un amide, un
alcool, un anhydride, un isocyanate, etc. Le coût faible de ce synthon et sa pré-
paration à partir de matières premières d’origine très diverses (pétrole, charbon,
gaz naturel) en font une matière première de choix pour l’industrie et en particu-
lier pour la synthèse des grands produits de base de l’industrie chimique.
Si la diversité des réactions possibles à partir du monoxyde de carbone est
extrêmement variée, sa toxicité et sa manipulation difficile en font un réactif
limité dans son utilisation à des unités spécifiques.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@RPPQ

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CARBONYLATIONS _____________________________________________________________________________________________________________________

Après le rappel des principales propriétés et des sources de CO, cet article pré-
sente quelques réactions qui conduisent à des produits industriels. Au travers de
ces réactions, les possibilités offertes seront abordées.

1. Caractéristiques générales
du monoxyde de carbone Hydrure
métallique
M
L
Métal
Ligand
CO H NuH Nucléophile

Nu Ln M CO
1.1 Propriétés générales L
H 0 4 1

NuH
Le monoxyde de carbone est un gaz incolore et inodore et haute-
ment inflammable à température ambiante. Sa température d’ébul-
O H H
lition est de − 190 ˚C à pression atmosphérique normale et sa
température de solidification de − 207 ˚C [1] [25] [26]. LnM Ln – 1 M CO
Le monoxyde de carbone est un gaz t o xique. De par son affinité
pour l’hémoglobine, 200 fois supérieure à celle de l’oxygène dans le
sang, son inhalation conduit progressivement à l’asphyxie. L’utilisa- H
tion de ce réactif que ce soit en laboratoire ou dans l’industrie néces-
site l’application d’importantes normes de sécurité. La 3 2
concentration maximale admissible dans l’air pour une exposition L M
de 8 heures par jour, recommandée par l’INRS est de 50 ppm (partie Ln – 1 CO
par million en volume) soit 55 mg/m3 [2].

Figure 1 – Cycle catalytique d’une réaction de carbonylation


sur une double liaison
1.2 Sources de monoxyde de carbone

Nota : pour plus de renseignements, le lecteur se reportera dans ce traité à l’article Pro- 1.3.1 Catalyse organométallique
duction des gaz de synthèse [J 5 480], référence [30].

Découvert à la fin du XVIIIe siècle, le monoxyde de carbone a été Deux mécanismes généraux peuvent être écrits, un pour l’activa-
fabriqué industriellement à partir des années 1920 par les industriels tion des doubles et triples liaisons, l’autre pour les composés
allemands. Les trois grandes voies de préparation du monoxyde de halogénés et leurs dérivés.
carbone sont le réformage à la vapeur de produits pétroliers
(méthane essentiellement), l’oxydation partielle d’hydrocarbures et ■ Dans le cas des oléfines (ou acétylures), l’espèce active est un
la gazéification du charbon. Tous ces procédés conduisent à la for- hydrure organométallique. La réaction de carbonylation fait interve-
mation de gaz de synthèse, c’est-à-dire d’un mélange monoxyde de nir successivement les étapes suivantes (figure 1) :
carbone/hydrogène, en proportions variables selon la matière pre-
mière et le procédé. Selon l’utilisation désirée du gaz de synthèse, le — 1 : ligandage de la liaison insaturée sur le métal ;
ratio CO/H2 peut être ajusté en utilisant la réaction de gaz à l’eau : — 2 : transfert de l’hydrure, formation d’une liaison métal-car-
bone de type sigma ;
CO + H2O → CO2 + H2 ∆H 0 (298 ˚C) = − 41,16 kJ/mol — 3 : formation d’un complexe acyl-métal par insertion du CO ;
La préparation de monoxyde de carbone pur nécessite une sépa- — 4 : solvolyse du complexe organométallique avec un nucléo-
ration qui est généralement effectuée soit par distillation cryogéni- phile pour obtenir le produit.
que [3] [27], soit par absorption/désorption utilisant des sels de Si le nucléophile est de l’hydrogène, on obtient un aldéhyde (syn-
cuivre [4] [28]. thèse oxo ou hydroformylation), si le nucléophile est de l’eau, un
alcool, une amine, on obtient respectivement un acide, un ester ou
un amide par des réactions appelées hydroxycarbonylation, alcoxy-
carbonylation ou aminocarbonylation.
1.3 Mécanisme réactionnel général
des réactions de carbonylation ■ Dans le cas des halogénures, l’espèce active est le complexe
organométallique et la réaction de carbonylation fait intervenir suc-
cessivement les étapes suivantes (figure 2) :
Quelques grands principes sont à la base des mécanismes de tou- — 1 : insertion oxydante du métal sur la liaison carbone-
tes les réactions chimiques dans lesquelles le monoxyde de carbone halogénure ;
intervient [5]. Étant peu réactif, son activation nécessite l’utilisation
d’un catalyseur. Ces catalyseurs peuvent être classés en deux — 2 : formation d’un complexe acyl-métal par insertion du CO ;
catégories : les catalyseurs organométalliques et les catalyseurs aci- — 3 : élimination réductrice ou solvolyse du complexe organo-
des. métallique avec un nucléophile pour obtenir le produit.

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Estérification

par Roger LAMARTINE


Professeur à l’Université Claude Bernard de LYON
et Jean-Pierre SCHARFF
Professeur à l’Université Claude Bernard de LYON et à l’École Supérieure
de Chimie Physique Électronique de LYON

1. Définitions.................................................................................................. J 5 800 - 2
1.1 Esters, estérification, lactides, lactones ..................................................... — 2
1.2 Transestérification ....................................................................................... — 2
1.3 Interestérification......................................................................................... — 3
1.4 Esters minéraux ........................................................................................... — 3
2. Mise en œuvre industrielle.................................................................... — 4
2.1 Méthodes d’obtention des esters............................................................... — 4
2.2 Aspects thermodynamiques....................................................................... — 5
2.3 Aspects cinétiques....................................................................................... — 5
2.4 Procédés d’estérification............................................................................. — 6
2.5 Stockage, manipulation, transport............................................................. — 7
2.6 Toxicologie ................................................................................................... — 8
3. Principaux esters et polyesters d’intérêt industriel ...................... — 9
3.1 Monomères .................................................................................................. — 9
3.2 Polymères..................................................................................................... — 10
Références bibliographiques ......................................................................... — 11

es esters sont des composés dérivant formellement d’un oxo-acide et d’un


L alcool, phénol, hétéroarénol ou énol par union avec perte d’eau à partir du
groupe hydroxyle de l’acide et du groupe hydroxyle de l’autre composé.
Les esters sont fabriqués en grand nombre par l’industrie chimique et parfois
avec des tonnages importants ; c’est le cas notamment de l’acétate de vinyle, du
méthacrylate de méthyle, du butylacrylate.
De nombreux esters sont utilisés comme produits finis pour des applications
comme solvants, plastifiants, parfums ou intermédiaires réactionnels.
Ce sont aussi des précurseurs pour des matières plastiques de grande
diffusion ; le marché des polyesters techniques représente actuellement environ
450 kt/an au niveau mondial.
Cet article général présente de façon synthétique les principales possibilités
réactionnelles d’obtention des esters monomères et leur mise en œuvre indus-
trielle.
p。イオエゥッョ@Z@ウ・ーエ・ュ「イ・@QYYX

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ESTÉRIFICATION _______________________________________________________________________________________________________________________

1. Définitions — à une estérification intramoléculaire dans le cas d’acides


alcools g ou d conduisant à une g ou d-lactone :

CH2 CH2
R CH C O
1.1 Esters, estérification, lactides, OH HO CH2 CH2
lactones acide g-alcool R CH C O + H2O
O
g-lactone
1.1.1 Esters, estérification
Un acide alcool de ce type est constamment en équilibre avec la
lactone correspondante. Les acides b-alcools conduiraient à un
Les esters sont des composés qui, par hydrolyse, conduisent à la cycle à quatre atomes peu stables et donc ne forment pas de lac-
formation d’alcools, de phénols et d’acides suivant la réaction : tone.
RA + H2O R OH + HA Les lactones macrocycliques comportant un cycle de 12 chaînons
ou plus sont appelées des macrolides.
RA : ester (R = groupe aryle ou alkyle), ROH : alcool, phénol, HA :
acide organique (cf. § 1.4 pour les esters minéraux).

La réaction inverse appelée estérification est la méthode usuelle


1.2 Transestérification
de préparation des esters. On a par exemple à partir d’un acide car-
boxylique :
Trois voies de transestérification sont connues : l’échange ester-
R C OH + R ' OH R C OR ' + H2O alcool, l’échange ester-acide et l’échange ester-ester.
O O
acide alcool ester
1.2.1 Échange ester-alcool ou alcoolyse
En milieu alcalin, l’hydrolyse d’un ester prend le nom de saponifi-
cation [J 5 810], car cette réaction appliquée aux esters que sont les Il s’agit de la réaction entre un ester et un alcool conduisant à un
corps gras, sert à la fabrication des savons ; la réaction est alors autre ester :
totale :
O O
R COOR ' + NaOH R COONa + R ' OH R C + R '' OH R C + R ' OH
OR ' OR ''
Certains termes spécifiques sont utilisés pour désigner des esters
particuliers tels que : De nombreux exemples peuvent être cités :
— acrylals : diesters de diols géminés R2C[OC(O)R]2 ; — l’obtention du polyéthylène téréphtalate (PET) par réaction de
l’éthylèneglycol (EG) avec le téréphtalate de diméthyle (DMT). Cette
— depsides : esters intermoléculaires formés à partir de deux voie d’accès est décrite dans ce traité dans les articles Poly(téréph-
molécules (ou plus) d’acides polyhydroxybenzoïques ; talate d’éthylène) [J 6 020-2 151] et Polycondensation des polyesters
— glycérides : esters du glycérol (propane - 1,2,3-triol) et des saturés [J 5 850] ;
acides gras ; — à l’inverse, la méthanolyse est un des trois procédés utilisés
pour le recyclage chimique du PET. L’action du méthanol permet
— orthoesters : composés de structure RC(OR ’)3 ou C(OR ’)4 une dépolymérisation complète du PET pour obtenir après distilla-
avec R ’ ¹ H. tion-purification, les deux monomères DMT et EG ;
Le lecteur pourra se reporter à l’article Nomenclature des compo- — le polyalcool de vinyle (PVAL) peut être obtenu par alcoolyse
sés organiques [K 220]. du polyacétate de vinyle :

( CH2 CH )n + n CH3OH [ CH2 CH ]n + n AcOCH3


1.1.2 Estérification inter et intramoléculaire : OAc OH
lactides, lactones
— la méthanolyse des corps gras, huiles et graisses, qui sont des
esters d’acides gras et de glycérol, conduit aux esters méthyliques
Les acides alcools peuvent donner lieu : qui s’imposent peu à peu comme grands intermédiaires oléochi-
miques :
— à une estérification réciproque (intermoléculaire) de deux
molécules d’acide a-alcools avec formation d’esters cycliques tels CH2 COOR CH2 OH
que les lactides (nom générique utilisé même si l’acide a-alcool
n’est pas l’acide lactique CH3 C CHOH C COOH). CH COOR + 3 CH3OH 3 R COOCH3 + CH OH
Cette réaction facile implique l’impossibilité de conserver un CH2 COOR CH2 OH
acide a-alcool, si ce n’est sous forme de l’un des sels :
triglycéride ester méthylique glycérol
OH O CO
— un cas très intéressant est l’obtention du Diester®, marque
2 CH3 CH CH3 CH CH CH3 + 2H2O déposée pour l’ester méthylique d’huile de colza, qui s’avère être un
COOH CO O carburant pour moteurs diesels parfaitement substituable au gazole
lactide (ou au fioul domestique). De tels biocarburants peuvent aussi être

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______________________________________________________________________________________________________________________ ESTÉRIFICATION

obtenus par transestérification d’huiles de tournesol, de maïs, de sente un comportement à la fusion différent de celui de la graisse
soja, etc., par le méthanol ou l’éthanol. d’origine sans que les autres propriétés en soient changées (ici le
point de fusion est abaissé).

Dans le cas des lactones, le traitement par les alcools donne


un ester linéaire hydroxylé :
1.4 Esters minéraux
H3C O + R OH H3C CH CH2 CH2 COOR
O Bien que le terme ester désigne, en principe, uniquement le pro-
OH
duit de la réaction entre un alcool et un acide organique, on appelle
esters minéraux les composés résultant de réactions de substitution
du type :
1.2.2 Échange ester-acide ou acidolyse
R OH + HA RA + H2O
La réaction générale est la suivante :
■ Hydracides halogénés :
O O O
R C + R '' COOH R '' C + R C R OH + HCl R Cl + H2O
OR ' OR ' OH
■ Acide nitrique
On trouve un exemple d’acidolyse dans l’obtention de polybuty-
rate de vinyle à partir de polyacétate de vinyle et d’acide butyrique : CH2 OH CH2 ONO2

( CH2 CH )n + n CH3 (CH2)2 COOH CH OH + 3 HNO3 CH ONO2 + 3 H 2O

OAc [ CH2 CH]n + n AcOH CH2 OH CH2 ONO2


nitroglycérine (constituant «actif»
COO(CH2)2 CH3 de la dynamite)

■ Acides sulfurique et sulfureux


1.2.3 Échange ester-ester On connaît les esters acides R C OSO3H, R C OS(O)OH et les dies-
ters R C OSO3R ’ et R C OS(O)OR ’.
O O O O
R C + R '' C R C + R '' C Les monoesters de l’acide sulfurique sont importants industrielle-
ment en raison de l’utilisation de leurs sels (sulfates d’alkyle)
OR ' OR ''' OR ''' OR '
comme tensioactifs dans les détergents. Ils peuvent être préparés
en traitant les alcools par SO3 ou ses complexes, H2SO4 et les acides
chlorosulfoniques :
On peut également observer des transestérifications intra-
moléculaires : R OH + SO3 R OSO3H

O O ■ Acides sulfoniques
C C Les esters d’acides sulfoniques sont aisément obtenus en partant
OEt O + EtOH des chlorures d’acides :
CH2 OH CH2 SOCl2 R ' OH
phtalide R SO3H R SO2Cl
ou PCl5
R SO2OR'(R = alkyl ou aryl)

les groupes sulfonates sont des groupes partants exceptionnelle-


1.3 Interestérification ment réactifs dans les réactions de substitution nucléophile sur le
carbone. Parmi les esters sulfoniques les plus couramment
employés, on peut citer :
Toutes les graisses naturelles présentent une distribution particu- — les méthanesulfonates ;
lière des acides gras sur le glycérol estérifié. L’interestérification — les p-toluènesulfonates (tosylates) ;
consiste à modifier la structure glycéridique. Soient par exemple : — les p-bromobenzènesulfonates (brosylates).
O l’acide oléique : CH3 C (CH2)7 C CH c CH C (CH2)7 C COOH ;
■ Acides orthophosphorique et orthophosphoreux
S l’acide stéarique : CH3 C (CH2)16 C COOH ;
Les phosphates et les phosphites de trialkyle sont obtenus à partir
OOO la trioléine ; des chlorures d’acides en présence d’une amine :
SSS la tristéarine
c’est-à-dire respectivement les esters des acides oléique et stéari- 3CH3CH2OH + POCl3 + 3
que du glycol ; on peut écrire la réaction d’interestérification : N

OOO + SSS OOS + OSO + SSO + SOS (CH3CH2O)3P O + 3 Cl–


N+
Cette réaction est catalysée par l’éthylate de sodium (0,1 à 2 % en
masse par rapport à l’huile, T = 100 à 200 °C). Le produit fini pré- H

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Procédé sol-gel de polymérisation

par Pierre AUDEBERT


Professeur
et Fabien MIOMANDRE
Maître de conférences
Laboratoire photochimie et photophysique supra et macromoléculaires, UMR CNRS 8531,
École normale supérieure de Cachan

1. Caractéristiques d’un gel....................................................................... J 5 820 – 2


2. Aspects chimiques de la polymérisation sol-gel............................. — 2
2.1 Procédé hydrolytique .................................................................................. — 2
2.1.1 Cas des alcoxydes de silicium ........................................................... — 3
2.1.2 Cas des alcoxydes de métaux de transition ..................................... — 4
2.1.3 Systèmes divers et multicomposants............................................... — 5
2.2 Sol-gels non hydrolytiques ......................................................................... — 5
3. Aspects physico-chimiques de la polymérisation sol-gel ............. — 5
3.1 Gélification et structure du gel ................................................................... — 5
3.1.1 Généralités .......................................................................................... — 5
3.1.2 Considérations théoriques................................................................. — 6
3.2 Vieillissement des gels................................................................................ — 6
3.3 Séchage des gels ......................................................................................... — 6
4. Gels hybrides, structures diverses et applications ........................ — 7
4.1 Gels hybrides ............................................................................................... — 7
4.1.1 Hybrides de classe I............................................................................ — 7
4.1.2 Hybrides de classe II........................................................................... — 7
4.1.3 Hybrides multimétalliques................................................................. — 8
4.2 Xérogels mésostructurés ............................................................................ — 8
4.3 Hybrides et xérogels à précurseurs superstructurés................................ — 9
5. Applications des matériaux sols-gels ................................................ — 9
5.1 Fibres et couches minces ............................................................................ — 10
5.2 Films protecteurs ......................................................................................... — 10
p。イオエゥッョ@Z@、←」・ュ「イ・@RPPU@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

5.3 Décoration à l’aide de films hybrides ........................................................ — 10


5.4 Divers............................................................................................................ — 10
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 820

a première polymérisation sol-gel a été réalisée par Ebelmen, qui décrivit


L dès 1845 « la conversion en verre solide de l’acide silicique exposé à l’air
humide » [1]. Cependant, le commencement de la polymérisation sol-gel date
des années 1930 avec l’utilisation pour la première fois, par la firme allemande
Schott, d’un procédé sol-gel pour fabriquer des récipients en verre.
Le principe du procédé sol-gel, autrefois appelé « chimie douce », repose sur
l’utilisation d’une succession de réactions d’hydrolyse-condensation, à tempéra-
ture modérée, pour préparer des réseaux d’oxydes, qui peuvent être à leur tour
traités thermiquement. La formation du réseau d’oxyde a lieu en solution à une
température proche de l’ambiante. Il s’agit d’un processus de conversion en
solution d’alcoxydes métalliques, tels que les alcoxydes de silicium, zirconium,
aluminium, titane... Même s’il est possible d’utiliser d’autres dérivés que les

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PROCÉDÉ SOL-GEL DE POLYMÉRISATION ___________________________________________________________________________________________________

alcoxydes (chlorures par exemple), ceux-ci sont de loin les plus employés du fait
de leur réactivité modérée et de leur grande modularité. En effet, le choix du
groupement alkyle permet de moduler la réactivité de l’alcoxyde en fonction des
propriétés finales envisagées pour le matériau.
Comme nous le verrons dans cet article, la réactivité de l’alcoxyde dépend éga-
lement beaucoup de la nature du métal (ou métalloïde), et il peut être nécessaire
d’utiliser des additifs pour diminuer ou augmenter cette réactivité selon les cas.
Nous allons notamment détailler les différents modes de catalyse et d’inhibition
rencontrés dans les procédés sol-gel.

1. Caractéristiques d’un gel Hydrolyse


Al(OR)3 Al(OH)3

■ Bien que le terme « gel » ait reçu de nombreuses définitions dans 300 210 120 030
la littérature, il est généralement admis, notamment dans la
« communauté sol-gel », que :

Condensation
201 111 021

le gel est constitué d’un réseau d’oxyde gonflé par le solvant,


avec des liaisons chimiques assurant la cohésion mécanique du 102 012
matériau en lui donnant un caractère rigide, non déformable (un
gel peut présenter un caractère élastique, mais pas de viscosité
macroscopique). 003

(Al-O-Al)3
Nous nous conformerons à cette définition dans la suite. Dans la
plupart des cas, ce sont les liaisons chimiques covalentes qui sont à
la base du réseau du gel (comme dans les gels de silice) [39], mais il Figure 1 – Schéma réactionnel de la formation de gel dans le cas
arrive que ce réseau repose sur des liaisons chimiques plus faibles, de l’aluminium
comme des liaisons de coordination ou des liaisons hydrogène. La
structure du gel peut changer avec le temps (c’est d’ailleurs généra-
lement le cas), grâce à la création de nouvelles liaisons ou, au d’halogénures), étant donné que ceux-ci font l’objet de 95 % des tra-
contraire, la destruction de liaisons, ou les deux à la fois : cepen- vaux décrits dans la littérature, nous nous limiterons ici à leur étude.
dant, un certain nombre de liaisons est nécessaire pour maintenir le La polymérisation sol-gel peut être « hydrolytique », c’est-à-dire
caractère « gel ». nécessiter l’ajout d’eau et donc inclure une ou plusieurs étapes
d’hydrolyse ou, au contraire, être « non hydrolytique » lorsqu’elle
■ Avant que l’état de gel ne soit atteint, le système est dans l’état est réalisée sans eau. Le cas des gels hydrolytiques est de loin le
liquide : il est constitué d’un mélange d’oligomères colloïdaux et de plus important et le plus répandu [2].
petites macromolécules ainsi que, selon le degré d’avancement de
la réaction de polymérisation, de différents monomères partielle-
ment hydrolysés. Cette solution liquide est appelée « sol ».
2.1 Procédé hydrolytique
Le temps nécessaire au « sol » pour se transformer en « gel »
est appelé temps de gel (ou point de gel), et noté tg. Dans ce cas, le procédé sol-gel inclut au moins une étape d’hydro-
lyse avant la polymérisation. On peut ainsi décrire la réaction en
deux étapes : hydrolyse de l’alcoxyde (équation (1)), suivie de la
■ Lorsque le gel vieillit, le phénomène de réticulation conduit au condensation (équation (2)) :
rétrécissement du matériau avec expulsion du solvant : on parle
alors de « synérèse ». Indépendamment de la synérèse, il est possi- M ( OR ) n + m H 2 O → M ( OH ) m ( OR ) n – m + m ROH (1)
ble de sécher le gel, soit en conditions atmosphériques, soit en
conditions supercritiques. Dans les deux cas, on obtient un réseau
plus ou moins dense sans solvant, appelé « xérogel » lorsque le 2 M ( OX ) n → ( OX ) n – 1 M  O  M ( OX ) n – 1 + X 2 O avec X = R ou H (2)
séchage a lieu en conditions atmosphériques, et « aérogel » [40] [41]
en conditions supercritiques. Les xérogels sont généralement plus Les équations ci-dessus décrivent le schéma global du processus
denses que les aérogels, mais ce point sera discuté plus loin. sol-gel, lequel peut faire intervenir plusieurs chemins réactionnels
possibles, qui seront détaillés dans le cas où M est le silicium.
Pour obtenir une vitesse de réaction acceptable, il peut être néces-
saire d’ajouter un catalyseur ou, au contraire, un inhibiteur. De plus,
2. Aspects chimiques de les métaux étant le plus souvent multivalents, de nombreuses espè-
ces différentes sont susceptibles d’intervenir dans le schéma
la polymérisation sol-gel réactionnel conduisant à la formation du gel.
La figure 1 montre, dans le cas de l’aluminium, un exemple de ces
différentes espèces : les 3 chiffres dans chaque case symbolisent
Bien qu’il soit possible de réaliser la polymérisation sol-gel à par- successivement, de gauche à droite, le nombre de substituants
tir d’autres précurseurs que les alcoxydes (par exemple, à partir alcoxy, hydroxy et d’ordre supérieur (c’est-à-dire reliés à d’autres

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___________________________________________________________________________________________________ PROCÉDÉ SOL-GEL DE POLYMÉRISATION

+ +
RO
RO ORH ORH RO OR
H2O
Si(OR)4 + H+ Si H2O Si Si + ROH + H+
Figure 2 – Mécanisme réactionnel de
RO OR OR OR HO OR la catalyse acide dans le cas des alcoxydes
de silicium

espèces O  M ) sur le métal. Chacune des flèches est associée à ■ Tous ces mécanismes dépendent fortement de la concentration
une réaction possible, qui peut être effective ou non selon le type en catalyseur, ainsi que des contraintes stériques inhérentes à la
d’alcoxyde et les conditions opératoires. L’étape d’hydrolyse repré- nature de l’alcoxyde. En particulier, même si les mécanismes sont
sente la conversion de fonctions alcoxy en fonctions hydroxy, alors similaires, les vitesses peuvent changer notablement entre l’hydro-
que l’étape de condensation représente la conversion de fonctions lyse et la condensation selon le type de catalyse, avec des
hydroxy (ou plus rarement alcoxy) en espèces M  O  M . répercussions importantes sur la morphologie et le temps de gel.

À ce stade, il est nécessaire d’examiner le cas des différents 2.1.1.2 Influence du pH


métaux : nous traiterons successivement les exemples du silicium
(qui est de loin le plus important), des métaux de transition (que l’on Comme indiqué précédemment, le temps de gel dépend forte-
peut inclure dans une même classe) et enfin les autres métaux. ment du type de catalyse. Le tableau 1 donne la dépendance du
temps de gel en fonction du pH et du catalyseur utilisé. Les résultats
montrent que le contre-ion a peu d’importance dans le cas des aci-
des forts, tandis que le pH semble être le seul paramètre influent
2.1.1 Cas des alcoxydes de silicium dans les autres cas. Certains auteurs ont étudié la cinétique de gélifi-
cation en fonction du pH pour différents types d’acides [3]. Les résul-
tats montrent qu’il existe un pH optimal, inférieur à 1 ou compris
Les alcoxydes de silicium réagissent très lentement avec l’eau, et entre 3 et 6, correspondant probablement à un compromis entre la
sont d’ailleurs indéfiniment stables en l’absence d’eau. C’est pour- protonation du groupe partant et celle, indésirable, du nucléophile.
quoi, la synthèse de gels de silice requiert une étape d’hydrolyse. (0)

Les précurseurs commerciaux les plus répandus sont les


tétraméthoxy- et tétraéthoxysilanes (en abrégé TMOS et TEOS res- Tableau 1 – Influence du catalyseur et du pH sur le temps
pectivement). Les alcoxydes de silicium étant non miscibles à l’eau, de gel
on utilise un cosolvant (généralement l’alcool parent) pour effectuer
la réaction. L’étape d’hydrolyse étant très lente avec l’eau pure, on Temps de gel
ajoute toujours un catalyseur, qui peut être un acide ou une base. Catalyseur pH de la solution
(h)
Ces deux types de catalyseurs conduisent à deux types de gels très
différents. Aucun 5 1 000
HF 1,9 12
2.1.1.1 Mécanismes catalytiques HCl 0 92
HNO3 0 100
■ Les étapes d’hydrolyse et de condensation en catalyse acide se
produisent selon un mécanisme de substitution nucléophile SN2, H2SO4 0 106
après protonation de l’alcoxyde. La figure 2 représente le CH3COOH 3,7 72
mécanisme réactionnel de la catalyse acide, valable pour les deux
étapes (il suffit de remplacer H2O par SiOH pour passer de l’hydro- NH4OH 10 107
lyse à la condensation).
2.1.1.3 Influence des substituants
■ Le mécanisme en catalyse basique se produit suivant un schéma Les effets électrodonneurs ou électroattracteurs des substituants
réactionnel légèrement différent selon qu’on utilise une base con- sur l’atome de silicium ont, comme prévu, une influence importante
ventionnelle ou l’ion fluorure. Dans le premier cas, il y a attaque de sur les vitesses d’hydrolyse et de condensation. La densité électro-
l’alcoxyde par l’ion hydroxyle selon un mécanisme SN2 (figure 3), nique sur l’atome de silicium décroît dans l’ordre suivant des
alors que, dans le second cas, on forme un adduit hypervalent du substituants :
silicium à l’issue de la première étape, suivie d’une addition d’eau R > OR > OH > O  Si
(resp. SiOH) dans une deuxième étape, avec élimination d’une
molécule d’eau et d’un ion fluorure. Logiquement, les états de transition chargés positivement en
catalyse acide sont favorisés par des substituants électrodonneurs,
alors que ceux chargés négativement en catalyse basique sont favo-
risés par les substituants électroattracteurs.
– Ces observations ont des conséquences importantes : ainsi, en cas
OR
OR RO OR d’hydrolyse acide, la vitesse d’hydrolyse diminue avec le nombre de
substituants OH sur l’atome de silicium, car ceux-ci sont moins élec-
Si(OR)4 + OH– OH Si Si + RO– trodonneurs que les groupements OR. De même, les réactions de
condensation seront beaucoup plus lentes que les réactions d’hydro-
OR OR HO OR
lyse, les effets électroattracteurs des substituants O  Si s’ajoutant
aux effets stériques globalement croissants. En conséquence,
l’hydrolyse en milieu acide sera généralement terminée dès le début
RO– + H2O ROH + OH– de la condensation, bien avant le point de gel, conduisant à un
polymère faiblement réticulé. Suivant cette même tendance, la gélifi-
Figure 3 – Attaque de l’alcoxyde par l’ion hydroxyle selon cation et la cogélification de siloxanes substitués par des groupe-
un mécanisme SN2 ments alkyle seront nettement facilitées en milieu acide.

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur J 5 820 − 3

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Polymérisations en chaîne
Mécanismes
par Thierry HAMAIDE
Professeur
Université Claude Bernard Lyon 1
Ingénierie des matériaux polymères, Villeurbanne, France.

Cet article est la version actualisée de l’article [J 5 830] intitulé « Polymérisation », rédigé
par Alain GUYOT et publié en 2000.

1. Définitions et notions de base .......................................................... J 5 830v2 - 2


1.1 Polymères et macromolécules................................................................. — 2
1.2 Macromolécules linéaires et réseaux...................................................... — 3
1.3 Distribution des masses molaires ........................................................... — 4
1.4 Chimies macromoléculaires..................................................................... — 4
2. Polymérisations ioniques.................................................................... — 5
2.1 Polymérisations anioniques..................................................................... — 5
2.2 Polymérisations cationiques .................................................................... — 8
3. Polymérisations radicalaires.............................................................. — 10
3.1 Construction des chaînes par voie radicalaire........................................ — 10
3.2 Cinétique de polymérisation .................................................................... — 13
3.3 Distribution des masses molaires ........................................................... — 14
3.4 Polymérisations radicalaires contrôlées ................................................. — 14
4. Copolymérisations radicalaires......................................................... — 16
4.1 Construction des macromolécules .......................................................... — 16
4.2 Diagramme de composition et dérive de composition ......................... — 17
4.3 Probabilités et microstructure des chaînes............................................. — 18
5. Conclusion............................................................................................... — 19
6. Glossaire .................................................................................................. — 19
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. J 5 830v2

es polymères représentent une classe de matériaux incontournables qui


L concurrence celle des matériaux traditionnels, métaux et matériaux inorga-
niques, de par une faible densité alliée à des propriétés thermomécaniques de
plus en plus élaborées, à des propriétés particulières conduisant à des applica-
tions parfois très spécifiques (polymères fonctionnels) et à une aptitude au
recyclage, du moins en ce qui concerne les matières thermoplastiques, qui
progresse d’année en année. L’industrie a produit 322 millions de tonnes en
2015, dont 58 millions pour couvrir la demande européenne. Quelques
polymères, appelés polymères de commodité, représentent la moitié de la
production. Par ailleurs, le développement de nouvelles méthodes ou procédés
de synthèse conduit à des matériaux aux propriétés, et donc à des applica-
tions, totalement nouvelles à partir des mêmes monomères.
Cet article est consacré aux mécanismes des polymérisations en chaîne
radicalaires ou ioniques, les polymérisations en chaîne catalytiques étant
traitées dans l’article [J 1 260]. Les procédés de polymérisation en chaîne
(polymérisations en milieux homogène et dispersé) sont développés dans
l’article [J 5 832].
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@RPQW

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POLYMÉRISATIONS EN CHAÎNE _______________________________________________________________________________________________________

Symbole Usuelle Définion 1.1 Polymères et macromolécules


CT Constante de transfert
Un polymère est un assemblage de macromolécules de
Dispersité (encore souvent masse molaire élevée, qui peuvent être décrites par une suc-
Ð dénommé indice de cession d’unités monomère ou d’unités de répétition issues des
polymolécularité I) monomères mis en œuvre lors de leur synthèse.
fi Fraction molaire de l’espèce i
La structure chimique des unités monomère, ainsi que leur
Indice de polymolécularité. Il
I nombre et leur arrangement dans les macromolécules permettent
convient de le nommer dispersité Ð
de comprendre les différents états physiques et les propriétés des
Constante de vitesse de polymères qui en découlent. Les polymères sont principalement
K s–1 utilisés pour l’élaboration de matériaux de structure dont les pro-
polymérisation
priétés thermomécaniques spécifiques et l’aptitude à être mis en
Constante de vitesse de forme les différencient des autres matériaux inorganiques
kd s–1 décomposition d’un amorceur (métaux, verres, céramiques).
chimique (AIBN...)

kp L · mol–1 · s–1 Constante de vitesse de propagation Note : en pratique, le terme polymère présente une signifi-
cation ambiguë puisqu’il désigne aussi bien une substance
kt L· mol–1 · s–1 Constante de vitesse de terminaison
polymère qu’une macromolécule. Le terme macromolécule
Dans une copolymérisation, fait référence à une molécule individuelle constituée d’unités
constante de vitesse de propagation monomère et le terme polymère désigne une substance
kAB L · mol–1 · s–1 constituée de macromolécules.
de la chaîne en croissance (centre
actif) A sur le monomère B On notera que dans le guide pour les monomères et les
polymères, l’agence européenne des produits chimiques,
Concentration du monomère au conformément au règlement REACH (article 3, paragraphe 5),
[M(t)] mol · L–1
temps t définit une « molécule de polymère » (soit une macromolé-
cule) comme une molécule qui contient une séquence d’au
g · mol–1 Masse molaire moyenne en nombre
moins 3 unités monomère, liées de façon covalente à au
g · mol–1 Masse molaire moyenne en masse moins une unité monomère ou un autre réactif [1].
Le terme polymère peut être utilisé sans ambiguïté comme
Mi g· mol–1 Masse molaire de l’espèce i substantif et adjectif (mélange polymère, par exemple). Les
adjectifs polymérique et monomérique n’existent pas. Il est
mi g Masse de l’espèce i préconisé de ne pas accorder monomère dans l’expression
Ni Nombre de moles de l’espèce i unités monomère, car on fait référence à des unités de type
monomère (cf. liaisons hydrogène = liaisons de type hydro-
Dans un copolymère, probabilité gène).
conditionnelle pour qu’une unité
PAB
monomère A soit suivie d’une unité
monomère B Il est d’usage de représenter une réaction de polymérisation en
faisant apparaître le(s) monomère(s) et l’unité de répétition
Rapport de réactivité du monomère (figure 1). On ne précise pas les extrémités de chaîne.
rAB A dans la copolymérisation des
deux monomères A et B Les homopolymères sont formés à partir d’un seul monomère.

Degré de polymérisation moyen en Exemple : polyéthylène, polystyrène, poly(chlorure de vinyle)...


nombre

Degré de polymérisation moyen en Dans ce cas, l’unité monomère constitue à elle seule l’unité de
masse répétition (tableau 1). L’utilisation de plusieurs monomères
conduit à des copolymères.
wi Fraction massique de l’espèce i
Exemple : copolymères à base de butadiène et de styrène (BS),
isobutène et isoprène (caoutchouc butyle), éthylène et acétate de
vinyle.
1. Définitions et notions
de base Dans ce cas, les unités monomère peuvent se distribuer de diffé-
rentes manières dans les macromolécules selon le protocole opé-
ratoire et la réactivité des monomères.
Bien que l’objet de cet article soit la synthèse macromoléculaire
par polymérisation en chaîne, il est nécessaire de définir au préa- Exemple : la figure 2 illustre la répartition des unités monomère
lable un certain nombre de termes de chimie et de physico-chimie dans un fragment de chaîne d’un copolymère statistique à base de
macromoléculaires. Les définitions de l’IUPAC, traduites en fran- styrène et d’acrylonitrile.
çais par la Commission d’enseignement du groupe français des
polymères [1] [2] sont gardées dans cet article, même si l’usage et
le monde industriel utilisent assez souvent des termes différents Il est alors souvent impossible de définir une unité de répétition,
spécifiques à chaque domaine d’application des polymères, hérités sauf si les unités monomère sont parfaitement alternées
d’anciennes nomenclatures. (copolymères alternés). L’unité de répétition est alors constituée

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________________________________________________________________________________________________________ POLYMÉRISATIONS EN CHAÎNE

n
n

a synthèse du polystyrène à partir du styrène


O
O
O H
OH HO m
m HOOC COOH + m HO
+ (2 m – 1) H2O

O
La nature des extrémités de chaînes dépend des conditions expérimentales
b synthèse du poly(éthylène téréphtalate) à partir de l’acide téréphtalique et de l’éthylène glycol

Figure 1 – Représentation générale d’une réaction de polymérisation

Tableau 1 – Exemples d’homopolymères


CN CN CN
Unité +
CN
Formule du monomère Nom du
Nom usuel
monomère (entre polymère
parenthèses) Figure 2 – Représentation générale d’un copolymère statistique
poly(styrène – co - acrylonitrile)

CH2 CH2 Éthylène Polyéthylène


n par la succession de deux unités monomère différentes. Un grand
nombre de polyesters, tel que le poly(éthylène téréphtalate) et de
polyamides, tel que le PA 6-6, en sont des exemples.
CH3 Propylène Polypropylène
CH3 n
1.2 Macromolécules linéaires et réseaux
Chlorure Poly(chlorure
Cl de vinyle de vinyle) La structure macromoléculaire peut être décrite par l’arrange-
Cl n ment des unités monomère les unes par rapport aux autres. De par
les possibles rotations autour des liaisons C—C, une macromolé-
cule de polyéthylène adopte de multiples conformations au cours
du temps. De même, un polymère peut être décrit à un instant
Styrène Polystyrène donné par une collection de multiples macromolécules présentant
toutes des conformations différentes [AM 3 037].
n On parle de macromolécules linéaires lorsque les unités mono-
mère sont toujours placées les unes à la suite des autres, quelle que
soit la conformation envisagée. Les macromolécules peuvent aussi
Acrylonitrile Polyacrylonitrile présenter des points de ramification. Les chaînes (c’est-à-dire tout
CN CN n ou partie d’une macromolécule) issues de ces points de ramification
peuvent aussi être ramifiées. Dans ces deux cas, le polymère est
F formé de macromolécules individuelles qui peuvent éventuellement
F être séparées les unes des autres par solubilisation. Soumises à des
CF2 CF2 Tétrafluoro- Polytétrafluoro- sollicitations mécaniques, ces macromolécules peuvent changer de
éthylène F éthylène conformations et se déplacer les unes par rapport aux autres par rep-
F n tation, ce qui permet au matériau polymère d’être mis et remis en
forme (matériaux thermoplastiques).

La connexion de ces ramifications les unes aux autres peut


O CH3 Acétate de n Poly(acétate conduire à la formation de structures tridimensionnelles (réseau
O CH3
vinyle de vinyle) réticulé). Il n’y a plus de macromolécules individuelles et la solu-
O bilisation du polymère est impossible, de même que sa remise en
O
forme. Les propriétés thermomécaniques dépendent non seule-
ment de la structure chimique, mais aussi du nombre de points de
réticulation et de la masse molaire entre ces points de réticulation.
Acide Poly(acide Il est d’usage de distinguer les élastomères réticulés et les réseaux
n
acrylique acrylique) thermodurs. Les structures réticulées tridimensionnelles sont
O OH O OH
détaillées dans l’article [A 3 045].

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POLYMÉRISATIONS EN CHAÎNE _______________________________________________________________________________________________________

Par définition, le degré de polymérisation X d’une macromolé-


On utilise très souvent l’appellation thermodurcissable ou cule est le nombre d’unités monomère constituant cette macromo-
résine thermodurcissable en lieu et place de thermodur. On lécule (X est la notation IUPAC officielle, mais on rencontre très
met en œuvre une résine thermodurcissable qui conduit après souvent la notation DP ). Si l’on considère un homopolymère dont
réaction chimique à un produit thermodur. Les températures la masse molaire de l’unité monomère est m0 , la masse molaire
de transition vitreuse des thermodurs sont en général supé- moyenne en nombre de ce polymère s’écrit :
rieures à la température ambiante, contrairement aux élasto-
mères.
(5)

On parle de réseau covalent lorsque les connections sont for- étant le degré de polymérisation moyen en nombre qui
mées de liaisons chimiques covalentes. Des interactions faibles se définit aussi par le rapport du nombre d’unités monomère,
(liaisons hydrogène, forces de van der Waals) peuvent aussi mener autrement dit le nombre de monomères ayant polymérisé, sur le
à un assemblage macromoléculaire non covalent. Ces réseaux nombre de macromolécules :
physiques forment des gels viscoélastiques de faible module élas-
tique qui présentent un comportement de solide lorsqu’ils sont au
repos (liquides qui ne coulent pas à l’échelle de temps de leur uti- (6)
lisation). La suppression de ces interactions conduit à des macro-
molécules individuelles. Il existe un continuum de la solution
visqueuse au gel sans frontière bien définie et la transition sol-gel Cette relation générale est particulièrement utile en synthèse
apparaît lorsque la viscosité tend vers l’infini. macromoléculaire : le nombre de macromolécules formées est fixé
par la chimie de polymérisation utilisée (polymérisation en chaîne
radicalaire ou ionique) tandis que la conversion indique le nombre
1.3 Distribution des masses molaires d’unités monomère. On a donc facilement accès au degré de poly-
mérisation moyen en nombre.
En pratique, il est impossible d’obtenir un polymère dont toutes
les macromolécules présentent exactement le même nombre
d’unités monomère, et donc ayant la même masse molaire. On Il faut noter que les propriétés des polymères dépendent
définit une masse molaire moyenne en nombre par le rapport non seulement de leur structure moléculaire et des interac-
de la masse de polymère sur le nombre de moles de tions intra- et interchaînes qui en découlent, mais aussi de
macromolécules : leurs masses molaires, tant par leur valeur moyenne que par
leur distribution. On sait déterminer expérimentalement ces
valeurs moyennes par différentes techniques analytiques, par
(1) exemple par chromatographie liquide d’exclusion stérique
(SEC), viscosité en solution diluée... [A 3 060].
Si l’on fractionne le polymère en familles de macromolécules
ayant sensiblement la même masse molaire Mi , la masse molaire
moyenne en nombre peut être écrite sous la forme : 1.4 Chimies macromoléculaires
1.4.1 Grandes chimies de polymérisation
(2)
Selon la polymérisabilité des monomères, on distingue habituel-
lement deux grands modes de chimie macromoléculaire, à savoir
la polymérisation par étapes et la polymérisation en chaîne. Les
avec mi masse de la famille de masse molaire Mi , mécanismes et les intermédiaires réactionnels sont fondamentale-
Ni nombre de moles de macromolécules de masse molaire ment différents et il est essentiel d’en connaître les bases pour
Mi , comprendre la façon dont les macromolécules se construisent [3]
fi fraction molaire de la famille de masse molaire Mi . [4] [A 3 040].

Si la masse molaire moyenne en nombre est très souvent utili- La polymérisation par étapes fait appel à des monomères au
sée pour caractériser un polymère, certaines propriétés des maté- moins difonctionnels porteurs de fonctions chimiques réactives
riaux polymères, notamment les propriétés rhéologiques, sont telles qu’alcool, acide, amine, isocyanate, époxyde... Les réactions
sensibles, non pas à la fraction molaire, mais à la fraction mas- entre ces fonctions chimiques conduisent à des entités difonction-
sique wi des populations. Par exemple, l’ajout d’une faible fraction nelles qui assurent la croissance des macromolécules par
molaire de macromolécules de masse molaire élevée dans une couplages successifs de chaînes toujours plus grandes avec libéra-
solution de polymère peut suffire à augmenter notablement la vis- tion éventuelle de molécules de faible masse molaire (eau, éthy-
cosité du système. On est ainsi amené à considérer une masse lène glycol...) (figure 3a ) [J 5 831].
molaire moyenne en masse définie par :

(3) Mj + Mk Mj+k (+L)


a par étapes

Les moyennes en masse et en nombre sont reliées par la disper-


sité Ð (appellation IUPAC, encore très souvent appelée indice de AMj• + M AMj+1

polymolécularité I) définie par : b en chaînes

(4)
Figure 3 – Polymérisation par étapes et polymérisation en chaîne

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________________________________________________________________________________________________________ POLYMÉRISATIONS EN CHAÎNE

La polymérisation en chaîne concerne principalement les olé- l’extrémité active se transfère de la chaîne macromoléculaire en
fines, les diènes conjugués, les monomères vinyliques et plusieurs croissance à une autre molécule, dite agent de transfert, qui
hétérocycles oxygénés ou azotés. La croissance des chaînes se fait devient à son tour active.
par réactions successives des molécules de monomère sur un Certaines polymérisations en chaîne peuvent aussi avoir lieu
centre actif porté par la chaîne en croissance (figure 3b ). selon un mécanisme de coordination-insertion dans une liaison
métal-carbone ou métal-oxygène. La polymérisation des oléfines
Cet article est consacré aux polymérisations en chaîne par catalyse Ziegler-Natta et métallocène (formation des PEHD,
par voies ioniques et radicalaires avec un focus particulier PELLD, PP notamment) met en œuvre les liaisons métal-carbone.
sur ces dernières car de loin les plus pratiquées industrielle- Cet article ne traite pas de la polymérisation catalytique des
ment. oléfines [J 1 260]. Un exemple de la polymérisation par coordina-
tion-insertion des lactones est développé dans le paragraphe 2.1.1.

Les polymérisations en chaîne sont encore souvent appelées 1.4.3 Ingénierie macromoléculaire
polyadditions car le mécanisme global peut aussi être vu
comme une succession d’additions de molécules de mono- L’ingénierie macromoléculaire, ou architecture macromolécu-
mère sur un centre actif. De même, toutes les polymérisations laire, a pour objet la préparation de polymères dont la structure est
par étapes sont appelées polycondensations. La nomenclature parfaitement contrôlée. Le contrôle peut porter sur n’importe quel
officielle IUPAC distingue les polymérisations en chaîne et les élément de la structure macromoléculaire :
polymérisations par étapes. – les masses molaires et leur distribution, en particulier pour cer-
taines applications une recherche de distribution des masses
molaires étroite ;
1.4.2 Généralités sur les polymérisations – la nature des extrémités de chaîne : oligomères et polymères
en chaîne fonctionnalisés ;
– les modes d’enchaînement des motifs : copolymères à blocs,
Que l’on soit en mode ionique ou radicalaire, la construction de statistiques ;
la chaîne commence toujours par une réaction d’amorçage qui – les ramifications : polymères et copolymères greffés,
consiste en la réaction d’un centre actif, le plus souvent issu d’un copolymères peignes, voire le taux de réticulation (élastomères et
amorceur, avec une première molécule de monomère. Le centre thermodurs) ;
actif peut être un ion (anion, cation) ou un radical et nécessite – le contrôle de la stéréochimie des enchaînements (polymère
l’apport d’un amorceur dans le milieu réactionnel. La nature du isotactique ou syndiotactique).
centre actif définit le type de polymérisation (anionique, catio- D’une manière générale, le contrôle de la distribution des masses
nique, radicalaire, complexe métallique). Cette réaction d’amor- molaires passe le plus souvent par le contrôle des réactions de ter-
çage conduit à une nouvelle molécule porteuse d’un centre actif minaison des chaînes de façon à obtenir un caractère « vivant »
capable de réagir avec une autre molécule de monomère. La nou- pour le type de mécanisme considéré (§ 2.1.1). Cet adjectif est sou-
velle molécule issue de cette réaction porte aussi à son extrémité vent accolé à la polymérisation anionique. Il est plus difficile de
un centre actif capable de réagir avec une autre molécule de contrôler les polymérisations cationiques et il a fallu attendre les
monomère, et ainsi de suite. La figure 4 explicite ces trois modes années 1990 pour trouver des systèmes efficaces pour la polyméri-
de polymérisation en chaîne anionique, cationique et radicalaire sation radicalaire contrôlée (PRC). Quelques exemples d’ingénierie
d’un monomère porteur d’une double liaison polymérisable macromoléculaire sont donnés au fur et à mesure de l’article.
(dérivé vinylique...).
La construction de la chaîne se poursuit par un grand nombre de
réactions de cette nature (réactions de propagation). On appelle
chaîne cinétique une chaîne macromoléculaire constituée d’un 2. Polymérisations ioniques
certain nombre d’unités monomère et porteuse d’un centre actif à
son extrémité (extrémité active). La croissance de la chaîne peut
s’arrêter par une réaction de terminaison bimoléculaire entre 2.1 Polymérisations anioniques
deux chaînes cinétiques provoquant la destruction de ces deux
centres actifs. La croissance de la chaîne cinétique peut aussi être 2.1.1 Amorceurs et construction
interrompue par une réaction de transfert, au cours de laquelle de la chaîne macromoléculaire
Le centre actif est un carbanion ou un oxanion associé à un
contre-ion le plus souvent métallique. La polymérisation peut se
R R faire par ouverture d’une double liaison vinylique (styrène,
A A diène, méthacrylate de méthyle...) ou d’un hétérocycle (oxirane,
A R R lactone, lactame, cyclosiloxane...). Les amorceurs sont des com-
posés organométalliques tels que le butyl lithium (BuLi), le
diphénylméthane potassium, le cumyl potassium, des alcoolates
R R alcalins (éthanolate de potassium...) ou des systèmes généra-
teurs d’ions radicaux (naphtalène sodium) qui agissent par
A A
A R R transfert d’électrons. Le choix de l’amorceur dépend non seule-
ment du monomère, mais aussi de l’architecture des macromolé-
cules recherchées. La polymérisation se fait en solution dans un
R R solvant inerte vis-à-vis du centre actif (solvant aprotique tel que
A cyclohexane, tétrahydrofurane, dioxane, DMSO...).
A
A R R
La figure 5 rappelle l’ensemble des réactions élémentaires mises
en œuvre lors de la polymérisation anionique du styrène
A = centre actif issu de l’amorceur amorcée par le BuLi. En l’absence de toute autre molécule pré-
sente sous forme d’impureté ou introduite volontairement suscep-
Figure 4 – Les trois modes de polymérisation en chaîne tible de réagir avec le centre actif, les réactions de propagation se

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Polymérisations en chaîne
Procédés

par Thierry HAMAIDE


Professeur
Université de Lyon
Université Claude Bernard Lyon 1
Ingénierie des Matériaux Polymères, Villeurbanne, France

1. Caractéristiques générales des procédés


de polymérisation en chaîne .............................................................. J 5 832 - 2
1.1 Spécificités des polymérisations en chaîne............................................ — 2
1.2 Milieux homogènes et dispersés............................................................. — 2
2. Polymérisation en masse .................................................................... — 4
2.1 Polystyrène cristal et polystyréne choc (HIPS) ....................................... — 4
2.2 Polyéthylène basse densité (PE-BD) et copolymères de l’éthylène ...... — 6
2.3 Poly(méthacrylate de méthyle) (PMMA) ................................................. — 7
2.4 Polyamide 6 ............................................................................................... — 7
2.5 Polyesters et copolymères greffés par extrusion réactive .................... — 8
3. Polymérisation en solution................................................................. — 9
3.1 Polymères superabsorbants .................................................................... — 9
3.2 Caoutchouc butyle .................................................................................... — 10
3.3 Élastomères à base de diènes.................................................................. — 10
4. Polymérisation en suspension........................................................... — 11
4.1 Polymérisation du polystyrène ................................................................ — 12
4.2 Polymérisation du poly(chlorure de vinyle)............................................ — 12
5. Polymérisation en émulsion............................................................... — 13
5.1 Mécanismes............................................................................................... — 13
5.2 Contrôle de la morphologie en polymérisation en émulsion ............... — 16
6. Polymérisation en mini-émulsion ..................................................... — 17
6.1 Principe de la polymérisation en mini-émulsion.................................... — 17
6.2 Stabilité et mécanismes de la polymérisation en mini-émulsion ......... — 17
6.3 Agents hydrophobes et encapsulation ................................................... — 17
7. Conclusion............................................................................................... — 18
8. Glossaire .................................................................................................. — 19
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. J 5 832

es polymères synthétiques occupent une part importante dans l’industrie


L chimique et trouvent leur place dans tous les secteurs économiques. Cet
article fait suite à l’article [J 5 830] traitant des chimies de polymérisations en
chaîne par voies radicalaire et ionique et aborde la mise en œuvre de ces réac-
tions dans les principaux procédés industriels de fabrication des polymères.
L’une des spécificités des réactions de polymérisation est inhérente à la syn-
thèse de macromolécules de haute masse molaire qui peut conduire à des
milieux réactionnels visqueux limitant les échanges diffusionnels et ther-
p。イオエゥッョ@Z@ウ・ーエ・ュ「イ・@RPQW

miques. Les procédés de polymérisation doivent ainsi être conçus de manière


à répondre à ces contraintes spécifiques. Selon les propriétés et les applica-
tions recherchées, les polymérisations s’effectuent en milieu homogène ou

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J 5 832 – 1

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POLYMÉRISATIONS EN CHAÎNE _______________________________________________________________________________________________________

hétérogène (milieu dispersé). La polymérisation peut aussi être effectuée de


façon continue ou discontinue (opération en continu ou en batch).
Les procédés de polymérisation de l’éthylène, du styrène et du chlorure de
vinyle, sont plus particulièrement décrits. Les procédés catalytiques de poly-
mérisation des oléfines sont traités par ailleurs [J 1 260]. La polymérisation de
l’ε-caprolactame et de lactones est aussi abordée.

Cet article est consacré aux procédés de polymérisation en


Acronymes Développé chaîne par voies ionique et radicalaire. Le principe même de
la construction des macromolécules par polymérisation en chaîne
DVB Divinylbenzène implique que les réactions de propagation (croissance des
chaînes) puissent avoir lieu en limitant au maximum les autres
HIPS High Impact PolyStyrene réactions possibles des centres actifs. L’obtention de hautes
masses molaires implique donc souvent des matières premières
PBd Polybutadiène présentant des degrés de pureté élevés. Ainsi, les impuretés,
notamment les sous-produits générés lors de la synthèse des
PCL Polycaprolactone monomères, les stabilisants ajoutés pour le transport et les pro-
duits de décomposition, qui pourraient réagir avec les centres
PE-BD Polyéthylène basse densité actifs et arrêter la croissance des chaînes, doivent être éliminés
avant la polymérisation. Il en est de même avec les impuretés
Poly(methyl methacrylate) ; éventuelles dans les solvants et les gaz. Toute trace d’humidité est
PMMA
Poly(méthacrylate de méthyle) rédhibitoire pour les polymérisations ioniques et l’oxygène est un
poison pour les polymérisations radicalaires.
PS Polystyrène
L’enthalpie de polymérisation ∆Hp est généralement com-
Poly(vinyl chloride) ; poly(chlorure de prise entre 0,50 et 1,6 kJ · g–1 pour les oléfines et monomères viny-
PVC
vinyle) liques et monte jusqu’à 3,6 kJ · g–1 pour l’éthylène (tableau 1) [3].
L’une des spécificités des réactions de polymérisation étant la syn-
SBS Copolymères à blocs PS-b-PBd-b-PS thèse de macromolécules de haute masse molaire qui peuvent
conduire à des milieux réactionnels visqueux, la gestion des
TPE Thermoplastiques élastomères échanges de chaleur constitue une difficulté supplémentaire qui
participe au choix des réacteurs et des agitateurs.
Les critères de choix des réacteurs (fermé (batch),
semi-continu ou continu, agité ou non) dépendent des contraintes
industrielles (volumes, nombre de produits d’une même famille
1. Caractéristiques générales présentant des caractéristiques spécifiques à produire, complexité
des procédés de de la réaction de polymérisation, viscosité finale...). La polymérisa-
tion en milieu dispersé permet dans certains cas de s’affranchir de
polymérisation en chaîne cette augmentation de viscosité. La figure 1 reprend quelques cri-
tères de choix spécifiques aux réactions de polymérisation. La des-
cription des réacteurs de polymérisation, ainsi que la discussion
détaillée de ces critères de choix, ne sont pas développés dans cet
1.1 Spécificités des polymérisations article. Dans tous les cas, le nombre d’opérations unitaires est
limité, à savoir la préparation des monomères, la polymérisation et
en chaîne la récupération du polymère. Les effluents sont récupérés, traités
ou éliminés selon leur nature. Les meilleures techniques de pré-
La synthèse des macromolécules qui constituent les polymères vention et de réduction de la pollution sont éditées dans un docu-
repose sur deux grands types de chimies selon la nature des ment de référence de la Commission Européenne [4] et dans les
monomères mis en œuvre : la polymérisation par étapes et la poly- directives environnementales, sanitaires et sécuritaires (directives
mérisation en chaîne. Les mécanismes réactionnels sont fonda- EHS) [5].
mentalement différents et il est important d’en connaître l’essentiel
pour comprendre les bases des différents procédés de polymérisa-
tion utilisés pour la fabrication des polymères. On rappelle simple-
ment que la polymérisation par étapes fait appel à des monomères 1.2 Milieux homogènes
au moins difonctionnels porteurs de fonctions chimiques (alcool, et dispersés
acide, amine, isocyanate, époxyde...) alors que la polymérisation
en chaîne concerne principalement les oléfines, les monomères Selon les contraintes inhérentes à la polymérisation, les proprié-
vinyliques, quelques hétérocycles et nécessite la mise en œuvre tés et les applications recherchées, les polymérisations en chaîne
d’un amorceur de polymérisation. s’effectuent en milieu homogène ou en milieu dispersé, selon le
nombre de phases en présence. Par exemple, on choisit la polymé-
risation en masse pour faire des plaques de PMMA, la polymérisa-
tion en suspension pour faire des résines échangeuses d’ions, la
Se reporter aux ouvrages d’enseignement de chimie des polymérisation en émulsion pour des applications peinture en
polymères [1] [2] et à l’article [J 5 830]. phase aqueuse.

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Tableau 1 – Chaleur de polymérisation de quelques oléfines et monomères vinyliques


Masse molaire
Monomère
(g · mol–1) (kJ · mol–1) (kJ · g–1)
Éthylène 28,05 102 3,62
Propylène 42,07 84 0,50
Isobutène 56,11 48 0,86
Butadiène 54,09 73 1,35
Styrène 104,15 70 0,67
Chlorure de vinyle 62,50 96 1,54
Acétate de vinyle 86,09 88 1,02
Méthacrylate de méthyle 100,12 56 0,56
Acrylamide 71,08 79 1,12
Oxyde d’éthylène 44,105 95 2,15

Propriétés physico-chimiques
Quel polymère ? Quel(s) monomère(s) ?
des monomères ; dangerosité

Quelle chimie ? Voie radicalaire, ionique ?


Quel amorceur ? Mise en œuvre de l’amorceur

Quelles applications ? Granulés, fils, feuilles


Sous quelle forme ? Résines, Latex, Poudre

Hétérogène
Précipitation du polymère ? Procédés Homogène
Milieu dispersé de polymérisation Masse, solution ?
Suspension, émulsion ?

Quelle quantité ?

Réacteur fermé (batch)


Type de réacteur Réacteur continu (piston, agité)
Semi-continu

Équipements
Transfert de chaleur Atmosphère inerte
Agitateurs
Transfert de masse Humidité
Réfrigérant
Transfert de fluides Lumière
chauffage

Récupération du polymère
Mise en forme pour
utilisation ultérieure

Figure 1 – Quelques critères de choix pour un procédé de polymérisation en chaîne

Certains polymères sont aussi fabriqués selon différents procé- ioniques, en fonction des contraintes inhérentes à la mise en
dés pour obtenir des produits ayant des applications différentes. œuvre d’une chimie ionique. Plusieurs exemples en seront donnés
Ainsi, le polystyrène peut être polymérisé en masse ou en milieu dans cet article.
dispersé.
■ Les procédés en milieu homogène font référence à un sys-
Même si les procédés de polymérisation sont souvent décrits tème monophasique parfaitement mélangé jusqu’à l’échelle molé-
dans le cadre de la polymérisation radicalaire, il est évident que culaire. On distingue habituellement les polymérisations en masse
ces mêmes procédés peuvent aussi s’adapter aux polymérisations et les polymérisations en solution.

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POLYMÉRISATIONS EN CHAÎNE _______________________________________________________________________________________________________

Pour les polymérisations en masse, le milieu réactionnel n’est mini-émulsion à l’échelle industrielle soit limité, en particulier par
constitué que des monomères et du polymère soluble dans les la nécessité de mettre en œuvre un procédé de dispersion beau-
monomères. Il n’y a pas de solvant et les amorceurs et autres addi- coup plus énergivore que pour la polymérisation en suspension,
tifs sont tous solubles dans le milieu réactionnel. La polymérisa- ses potentialités sont importantes et abordées dans cet article.
tion peut y être rapide, mais conduit à une augmentation notable
Enfin, quel que soit le procédé utilisé, celui-ci se doit aussi d’inté-
de la viscosité et rend difficile le contrôle de la chaleur de réaction.
grer les contraintes environnementales (limitation, voire absence
de solvants, limitation de la teneur résiduelle en monomère, rejets
Exemple : considérons la polymérisation homogène de 100 g de des effluents, comme souligné dans les directives environnemen-
styrène (∆Hp = 0,67 kJ · g–1) en solution dans 400 g de toluène tales, sanitaires de la Commission européenne [4] [5]).
menée à 80 % de conversion. Si l’on suppose que la réaction est
effectuée dans des conditions adiabatiques, la chaleur Q dégagée est
égale à 100 × 670 × 0,8 = 53 600 J. Si l’on suppose une capacité
thermique massique (chaleur spécifique) moyenne de l’ensemble (sol-
vant + polymère + monomère résiduel) c = 2 J · g−1 · K−1, l’élévation
2. Polymérisation en masse
de température ∆T est telle que Q = m c ∆T, soit ∆T = 53,6 °C. Cette
élévation de température augmente la vitesse de réaction, et donc la
chaleur dégagée. 2.1 Polystyrène cristal et polystyrène
choc (HIPS)
Dans le cas des polymérisations radicalaires, l’approximation de
l’état quasi-stationnaire est plus difficile à respecter dans la
mesure où la diffusion des macroradicaux nécessaire pour assurer Le polystyrène est un polymère de commodité que l’on
les réactions de terminaison bimoléculaires devient de plus en trouve sous plusieurs formes, notamment le polystyrène cristal
plus lente de par l’augmentation notable de la viscosité. L’énergie développé pour ses propriétés optiques, le polystyrène choc
d’activation de la réaction de décomposition de l’amorceur est qui incorpore du polybutadiène afin d’améliorer sa résistance
souvent la plus importante, d’où la plus grande sensibilité de cette au choc, le polystyrène expansé et les résines échangeuses
réaction à la température. Une variation de température entraîne d’ions.
l’élargissement de la distribution des masses molaires. Enfin, à
conversion élevée, il est nécessaire de maintenir une température
de réaction supérieure à la température de transition vitreuse ou Parmi toutes ces formes, seul le PS cristal est effectivement
de cristallisation du polymère. obtenu par polymérisation radicalaire en milieu homogène dans la
mesure où l’on observe un milieu monophasique tout au long de
Le PE-BD et ses copolymères, le PS, le PMMA, de même que la la réaction. Les points essentiels de l’élaboration du PS cristal sont
production du PA-6, sont élaborés par ce procédé. Le cas particulier rappelés ci-après.
des procédés de polymérisation en masse des lactones (lactide,
ε-caprolactone) par extrusion réactive est aussi abordé dans cet
article. Pour plus de détails, se reporter aux articles Polystyrène-
Polymérisation en continu [J 6 550] et Polystyrène [AM 3 340].
Les polymérisations en solution requièrent un solvant des
monomères et du polymère formé. La dilution permet de limiter
l’augmentation de viscosité et favorise d’autant l’échange ther- ■ Le styrène présente une enthalpie de polymérisation élevée
mique avec l’extérieur. Le système reste liquide même à haute (670 J · g–1). La polymérisation est effectuée en continu dans une
conversion dans la plupart des cas. Les cinétiques de polymérisa- série de réacteurs travaillant à températures croissantes de 120 à
tion suivent les mêmes lois que les polymérisations en masse, 180 °C (figure 2) [AM 3 340]. On peut aussi ajouter au milieu réac-
mais sont ralenties de par la dilution des espèces actives et des tionnel une petite quantité d’éthylbenzène (précurseur du styrène)
monomères. Les inconvénients résident dans la toxicité de certains de façon à abaisser la viscosité et favoriser les échanges ther-
solvants organiques, le coût de la séparation du solvant et la diffi- miques (procédé masse-solution). La polymérisation est effectuée
culté d’éliminer totalement celui-ci du polymère (contamination du en continu dans une série de réacteurs agités ou dans un réacteur
polymère par des traces de solvant). de type piston. La conversion dépasse les 80 % et le monomère
résiduel est éliminé sous vide à 230 °C, puis recyclé. Après dévola-
■ Dans les procédés hétérogènes (polymérisation en milieu dis- tilisation, le polymère est repris dans une extrudeuse pour être mis
persé), l’eau est le plus souvent le milieu continu ; les monomères sous forme de granulés. La masse molaire moyenne en nombre
et les polymères sont dispersés dans l’eau (dispersion « directe » est de l’ordre de 105 g/mol. Ce polystyrène, dit cristal car trans-
huile dans eau : H/E). Lorsque la phase continue est de nature parent, est amorphe (sans phase cristalline) avec une température
organique, on parle de dispersion « inverse » eau dans huile : E/H. de transition vitreuse de 100 °C. Les granulés de PS sont ensuite
Les procédés en milieu dispersé permettent de contrôler plus faci- mis en œuvre par moulage par injection ou extrusion.
lement la température du milieu réactionnel par échange de la cha-
leur de réaction avec la phase continue et de limiter fortement la
■ Le PS cristal reste un matériau fragile. Ses propriétés mécaniques
peuvent être adaptées aux besoins par addition de nodules élasto-
viscosité globale du milieu réactionnel. Ils permettent aussi de
mères à base de polybutadiène. Le PS choc HIPS (High Impact PS ),
récupérer en fin de réaction les produits sous une forme qui se
est obtenu par polymérisation en masse du styrène dans lequel des
prête davantage à leur application finale que ne l’autorisent les
particules de polybutadiène (environ 6 % en masse) ont été préala-
procédés en milieu homogène. Par exemple, les résines échan-
blement dissoutes ou gonflées. On peut ajouter un solvant pour
geuses d’ions et les liants polymères des peintures « à l’eau » sont
diminuer la viscosité et un agent de transfert pour limiter les masses
élaborés par polymérisation en milieu dispersé.
molaires si besoin. Le milieu est initialement homogène et le reste
Selon la taille des objets dispersés dans la phase continue, on jusqu’à environ 2 % de conversion. Le polystyrène formé et le poly-
classe les milieux dispersés de la suspension à la microémul- butadiène sont incompatibles : il se forme une émulsion de
sion, en passant par l’émulsion et la mini-émulsion. L’industrie polymères constituée d’une phase continue de PBd en solution dans
utilise essentiellement les deux procédés de polymérisation en le styrène et une phase dispersée de PS en solution dans le styrène.
suspension et en émulsion conventionnelle (macroémulsion). Bien Les domaines dispersés sont stabilisés par des copolymères greffés
que le développement du procédé de polymérisation en PBd-g-PS, formés en même temps que les macromolécules de PS,

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E4 Éthylbenzène + styrène à recycler


P10
P11
Eau
Eau
E3

Eau

R3

D1
P6 D2
R1
E2
B
E1 R2

H P7
P4 P5 P8

G F
P9
Polybutadiène

I Polystyrène
C
Air (vers stockage) Fluide
V caloporteur
A Styrène

P3 P2 P1

A bac de stockage de la dissolution E1 et E2 échangeurs de chaleur P1 pompe centrifuge


de polybutadiène dans le styrène E3 et E4 condenseurs P2 à P9 pompes à engrenages
B bac de recyclage et d'alimentation F fillière P10 et P11 pompes à vide
C cuve de dissolution du polybutadiène G granulateur R1, R2 et R3 réacteurs de polymérisation
dans le styrène H filtre V compresseur
D1 et D2 dévolatiliseurs I broyeur

Figure 2 – Procédé de polymérisation en masse du polystyrène [AM 3 340]

qui stabilisent les domaines dispersés en se plaçant aux interfaces donc influe directement sur les propriétés physico-chimiques du
et en diminuant les tensions interfaciales. matériau final.
Le styrène de la phase PS-styrène continue à polymériser et le
volume de la phase dispersée augmente jusqu’à une inversion de Il y a une différence majeure entre les émulsions conven-
phase qui apparaît entre 10 et 20 % de conversion : la phase tionnelles (type H/E) et les émulsions de solutions de
PBd-styrène devient la phase dispersée dans une phase styrène-PS polymères. Dans le premier cas, les deux phases en présence
continue. Le styrène de la phase dispersée PBd-S continue à poly- sont de polarités très différentes et l’immiscibilité résulte de
mériser et entraîne une nouvelle démixtion avec formation d’occlu- l’incompatibilité entre ces deux phases. Dans les émulsions de
sion PS-S dans cette phase. La polymérisation du styrène solutions de polymères, le solvant est le même dans les deux
augmente la taille de ces occlusions et fait apparaître d’autres phases et l’immiscibilité des liquides est la conséquence de
occlusions (lors de l’inversion de phase, le styrène solubilisant le l’incompatibilité des deux polymères en solution. Les molé-
PBd entraîne aussi un peu de PS). La figure 3 [6] [J 5 830] donne cules de solvant peuvent passer librement d’une phase à
une idée de l’évolution du système. l’autre. Dans le cas du PS choc, c’est la polymérisation du sol-
Tout au long de ce processus, la quantité de copolymère vant (le styrène) qui conduit in fine à un matériau ayant les
PBd-g-PS formé gère le nombre et la distribution de taille des propriétés mécaniques recherchées. On note aussi le rôle fon-
domaines dispersés, tant les nodules de PBd dans la phase conti- damental du copolymère greffé PBd-g-PS dans la structure
nue de PS que les occlusions de PS dans les nodules de PBd, et finale du matériau (structure en « salami »).

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Polycondensation, polyaddition
et modification des polymères

par Ernest MARÉCHAL


Agrégé de sciences physiques
Docteur ès sciences
Professeur émérite à l’université Pierre-et-Marie-Curie (Paris)

1. Définitions et exemples. Écriture des polycondensats ................. J 5 831 − 2


2. Nature et formation des sites réactionnels...................................... — 2
3. Principales étapes des polycondensations et polyadditions....... — 3
4. Réactions secondaires............................................................................ — 4
5. Contrôle des masses molaires ............................................................. — 5
6. Distribution molaire dans les polycondensats linéaires............... — 6
7. Polycondensations équilibrées............................................................. — 8
8. Cinétique des polycondensations et polyadditions ....................... — 8
9. Systèmes à fonctionnalité supérieure à 2. Point de gel ............... — 11
10. Techniques de polycondensation......................................................... — 12
11. Généralités sur la modification chimique................................... — 15
12. Principales réactions sur les polymères ..................................... — 15
13. Techniques de modification chimique des polymères ................ — 19
14. Principales applications de la modification chimique................ — 21
Références bibliographiques ......................................................................... — 22

et article a pour objectif de présenter les bases théoriques de la polyaddition


C et de la polycondensation, en particulier la définition de leurs principales
étapes, leur thermodynamique et leur cinétique ; la contribution des réactions
secondaires est analysée. Les relations permettant le contrôle et la distribution
des masses molaires ainsi que celles relatives au phénomène de gélification
sont données. Les principales techniques de polyaddition et de polycondensa-
tion sont décrites, en particulier celles qui ont été plus récemment développées.
Nous traitons aussi ici de l’importance croissante de la modification chimique
en synthèse macromoléculaire et de son développement industriel.
p。イオエゥッョ@Z@、←」・ュ「イ・@RPPP

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POLYCONDENSATION, POLYADDITION ET MODIFICATION DES POLYMÈRES _______________________________________________________________________

1. Définitions et exemples. [réaction (7)]. Par contre, la réaction (6) ne peut s’appliquer à P*m
car, si elle réagissait avec une autre chaîne active (P*n), leurs grou-
Écriture des pes actifs seraient détruits et il se formerait une ou deux chaînes
incapables de croître (chaîne morte).
polycondensats
Les termes polycondensation et polyaddition sont les mêmes
en français et en anglais. Par contre, la littérature anglo-saxonne
1.1 Définitions officielles données utilise aussi, et très souvent, les termes : step-polymerization,
par l’IUPAC et autres dénominations step-growth polymerization et step-polyaddition qui sont totale-
ment bannis dans la nomenclature officielle et, qui plus est, sont
équivoques.
Les réactions générales (1) et (2) décrivent à la fois les poly-
condensations et les polyadditions :
Dans ce qui suit, seul le mot polycondensation est utilisé quand il
(n + 1) A C X C A + (n + 1) B C Y C B → n’y a pas lieu de distinguer la polycondensation de la polyaddition.
A C [X C A′B ′ C Y C B ′A′]n C X C A′B ′ C Y C B + C (1)

(n + 1) A C Z C B → A C [Z C B ′ C A′]n C Z C B + C (2)
1.2 Exemples
En général C est un produit, ou un ensemble de produits, de
faible masse molaire ; sa présence est caractéristique des poly-
condensations mais il est absent dans les polyadditions. Les réactions (8) à (11) (cf. encadré 2) montrent à la fois la diver-
sité des produits et l’importance de la nature des extrémités de
Les monomères A C X C A, B C Y C B et A C Z C B renferment chaîne. Même si les fonctions terminales sont difficiles à mettre en
des fonctions réactives A et B dont la condensation ou l’addition est évidence, particulièrement quand la masse molaire est élevée, il est
à l’origine de la croissance des chaînes. A′ et B′ sont les groupes A nécessaire d’avoir à l’esprit qu’elles peuvent jouer un rôle important
et B après réaction (encadré 1). au moment de la mise en œuvre du polymère et dans ses diverses
utilisations. Enfin, les groupes terminaux sont essentiels dans les
oligomères-α,ω-difonctionnels ou encore nommés oligomères télé-
Encadré 1 − Exemples de polycondensation chéliques bien qu’il s’agisse d’un abus de langage.
avec élimination d’eau

Dans la polycondensation (3) :


(n + 1) HOOC(CH2)4COOH + (n + 1) HO(CH2)6OH → 2. Nature et formation
H[OOC(CH2)4COO(CH2)6]n + 1OH + (2n + 1)H2O (3)
des sites réactionnels
Les groupes chimiques HO, COOH, O, COO, (CH2)4, (CH2)6 et
H2O correspondent respectivement aux lettres A,B,A′,B ′,X,Y et
C de la réaction (1). Un polycondensat peut être obtenu à partir de réactions et
Dans la polycondensation (4) : de monomères différents contrairement aux polymérisations en
chaîne qui, le plus souvent, ne mettent en jeu qu’un type de réac-
(n + 1) HO C (CH2)6 C COOH → H[OOC(CH2)6]nOH + n H2O (4)
tion et de monomère pour un polymère donné. Ainsi le polyester
Les groupes chimiques HO, COOH, (CH2)6 et H2O sont respec- ~ R−COO−R ′−OOC ~ peut être formé à partir des systèmes réaction-
tivement A,B,Z et C de la réaction (2). nels suivants (12) :

Dans la polycondensation (1), les fonctions réactives A et B sont diacide + diol :


portées par deux monomères différents alors que, dans la R'
HOOC R COOH + HO OH
réaction (2), elles sont portées par le même monomère. Les poly-
condensations (ou polyadditions) de type (1) sont dites AA + BB dichlorure de diacide + diol :
alors que celles de type (2) sont dites AB + AB. Cl C R C Cl + HO R' OH
La nomenclature officielle définit une polycondensation comme O O
étant une polymérisation dans laquelle les chaînes polymères crois- anhydride de diacide + diol :
sent par des réactions de condensation se produisant entre des O
molécules ayant des degrés de polymérisation différents. Cette défi-
C
nition peut être transposée directement à la polyaddition. Elle est (12)
illustrée par les deux réactions suivantes : R O + HO R' OH
O
Pm + M → Pm+1 (5)
O
Pm + P n → P m + n (6)
diester + diol :
Les deux macromolécules Pm et Pn peuvent réagir avec une molé-
cule de monomère M selon la réaction (5) ou réagir entre elles selon R" OOC R COOR" + HO R' OH
la réaction (6). diacide + diester :
En cela les polycondensations et les polyadditions diffèrent fon- HOOC R COOH + R" COO R' OOCR"
damentalement des polymérisations en chaîne [1] [2] :
Le site réel, responsable de la construction effective de la chaîne,
P*m + M → P*m+1 (7)
est très souvent créé in situ. On peut citer comme exemple la syn-
* indique que la chaîne croissante P*m porte un groupe réactif thèse du poly (1,4-diisopropylbenzène) préparé par chauffage du
(radical libre, ion) qui peut réagir avec une molécule de monomère 1,4-isopropylbenzène avec un générateur de radicaux libres (R•) tel

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_______________________________________________________________________ POLYCONDENSATION, POLYADDITION ET MODIFICATION DES POLYMÈRES

Encadré 2 − Formation de polyamides, de polyester et de polyuréthane

■ Formation d’un polyamide aliphatique à partir d’un diacide et d’une diamine :

( n + 1) HOOC R COOH + (n + 1)H2N R' NH2 HOOC R C NH R' NH C R C NH R' NH2


O O O n (8)
+ (2n + 1)H2O

■ Formation d’un polyamide aromatique à partir d’un dichlorure d’acide aromatique et d’une diamine aromatique :

(n + 1)Cl C C Cl + (n + 1)H2N NH2 H2N NH C C NH NH C C Cl


O O O O O nO (9)

+ (2n + 1) HCl

■ Formation d’un polyester semi-aromatique à partir d’un diester et d’un diol :

(n + 1)H3C OC CO CH3 + (n + 1) HO(CH2)2OH HO(CH2)2 OC CO (CH2)2 OC CO CH3


O O O O O nO (10)

+ (2n + 1) CH3OH

■ Formation d’un polyuréthane à partir d’un diisocyanate et d’un diol :

(n + 1)O C N R N C O + (n + 1) HO R' OH

(11)
O C N R NH C O R' O C NH R NH C O R' OH
O O O n

qu’un peroxyde ou un dérivé azoïque. Les radicaux (R•) arrachent les


atomes d’hydrogène des carbones tertiaires [réaction (13)] : 3. Principales étapes
des polycondensations
CH3 CH3
[R •]
CH3 CH3
et polyadditions
H C C H H C C•
CH3 CH3 CH3 CH3 (1 3)

3.1 Croissance de la chaîne


R 1•

Les radicaux ainsi formés se polyadditionnent selon le schéma La formation des sites réactionnels a été décrite dans le
réactionnel (14) : paragraphe 2. La croissance de la chaîne est l’étape essentielle qui,
avec la terminaison, a une influence déterminante sur la valeur des
masses molaires et leur distribution, sur la répartition des unités
Couplage des radicaux R1• constitutives dans la chaîne, lorsque plus de deux monomères sont
2R1• R1 R1 utilisés, et sur la formation des branchements.
Plusieurs caractéristiques importantes la distinguent de la phase
Attaque de R1 R1 par un radical (R • ou R1• ) « propagation » des polymérisations en chaîne :
(R1 R1) (R1 R1) •
— en polycondensation et polyaddition, il n’y a pas permanence
R 2• (1 4) d’une espèce active portée par une extrémité de la chaîne ; chaque
Couplage des radicaux étape doit être activée ;
R1• + R2• R1 R2 — la croissance se fait par réaction de x-mères :
R2• + R2• R2 R2 monomère + monomère → dimère

• + Rn• dimère + monomère → trimère


Rm Rm Rn
dimère + dimère → tétramère
L’étape cinétique (étape de la limitation de vitesse) est la forma- ou, d’une façon plus générale :
tion des radicaux libres R1•, R2•, etc., à partir du monomère, de
R1 C R1, etc. x-mère + y-mère → (x + y)-mère

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POLYCONDENSATION, POLYADDITION ET MODIFICATION DES POLYMÈRES _______________________________________________________________________

3.2 Cessation de croissance des chaînes La préparation la plus classique des polyesters insaturés consiste
à polycondenser un mélange de diols et d’anhydrides renfermant
presque toujours de l’anhydride maléique et, pour certains grades,
Elle limite le degré de polymérisation et peut être de deux natures de l’anhydride phtalique. La réaction principale est la suivante (18) :
différentes.
O
■ T erminaison physique
C
Les groupes fonctionnels ne sont pas détruits ; il s’agit d’une ces- HO R OH + HC CH + O
sation de croissance due, par exemple, à une augmentation impor-
tante de la viscosité du milieu qui empêche la diffusion des chaînes C C C
et les mouvements segmentaires de se produire. L’addition d’un O
O O O (18)
agent diluant ou une élévation de température peut alors éventuel-
lement permettre le redémarrage de la réaction.
ROOC CH CH COOR OOC COO R OOC
■ Terminaison proprement dite
Les groupes fonctionnels sont détruits en partie ou en totalité par
des réactions très diverses.
● Décarboxylation La parenthèse indique que l’anhydride phtalique est présent ou
non.
R COOH R H + CO2 (15) Cette réaction principale est accompagnée de nombreuses réac-
tions secondaires ; trois d’entre elles (19), (20), (21) sont données ci-
le symbole désigne la chaîne. dessous :
● Formation d’un sel — quand H O C R C OH est le pr opane-1,2-diol
(CH3 C CHOH C CH2OH), deux unités constitutives isomères sont
R NH2 + HCl R NH3+ + Cl – (16) formées :

CH3 CHOH CH2OH


Cette réaction se produit quand, par exemple, un dichlorure
d’acide réagit avec une diamine [synthèse des polyamides aromati-
ques, réaction (9)] ; cette réaction secondaire peut être éliminée par (19)
CH2 CHOH CH3 et CH CH2OH
addition d’une amine tertiaire ou de pyridine au milieu réactionnel,
ce qui fixe le chlorure d’hydrogène formé. CH3
● Cyclisation

Lorsque l’hexaméthylènediamine (HMD) est polycondensée avec — les hydroxy terminaux peuvent s’additionner aux doubles
l’acide succinique (acide butane-1,4-dioïque), la croissance des chaî- liaisons :
nes est limitée par une contribution importante des cyclisations
(encadré 3). O C CH CH C O
O O

Encadré 3 − Cyclisation de l’acide succinique CH CH2OH CH2 CHOH


CH3 CH3
NH ( CH2 ) 6 NH C (CH2)2 COOH
O C CH CH2 C O O C CH CH2 C O
O
O Cyclisation
C O O O O O O
CH2
NH (CH2)6 N
CH2 CH2 CH CH CH2
C
HMD (17) CH3 CH3
O
Terminaison (20)
NH ( CH2 ) 6 NH C (CH2)2 C NH (CH2)6 NH2 La contribution de la réaction (20) peut être élevée ; elle a pour
conséquence la destruction de la stœchiométrie du mélange réac-
O O tionnel (§ 5.1) et la formation de branchements pouvant modifier les
Croissance propriétés des matériaux correspondants de façon imprévisible. La
réaction (20) peut être intramoléculaire [réaction (21)] :

O O

4. Réactions secondaires R O C CH CH C O R OH
O
(21)
La plupart des polycondensations et des polyadditions sont R O C CH CH2
accompagnées de réactions dites secondaires qui peuvent être très O C O
différentes de la réaction principale. Les progrès de l’analyse chimi- R O
que ont permis de montrer des anomalies structurales dans des sys-
tèmes considérés longtemps comme purs. Par ailleurs, l’exigence — la configuration cis de l’anhydride maléique est transformée
croissante des applicateurs oblige le producteur à détecter et à éli- en configuration trans ; il s’agit bien d’une réaction secondaire mais
miner au maximum ces phénomènes parasites. Le cas des poly- très positive puisque seules les chaînes trans peuvent se copolymé-
esters insaturés est typique de ces phénomènes. riser avec le styrène.

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_______________________________________________________________________ POLYCONDENSATION, POLYADDITION ET MODIFICATION DES POLYMÈRES

5. Contrôle des masses Il est essentiel de souligner que la relation (27) ne peut être utili-
sée que quand N A0 = N B0 ; un tel mélange est dit stœchiométrique.
molaires Quand N A0 est différent de N B0 (le mélange est dit non stœchio-
métrique), f ne peut être calculé par la relation (27). Dans un sys-
Les relations données dans cette partie permettent de préparer un
mélange réactionnel menant à un polymère ayant une masse tème A C A + B C B où N A0 < N B0 , les groupes ( N B0 Ð N A0 ) B, en excès,
molaire déterminée et, éventuellement, à des groupes terminaux ne peuvent réagir et ils ne doivent pas être pris en considération
bien définis. Il est évident que des phénomènes imprévus (réactions dans l’application de (27) où N B0 doit être remplacé par N A0 :
secondaires, précipitation partielle ou totale du polymère) peuvent
conduire à des écarts aux valeurs données par ces relations ; elles
sont cependant précieuses dans la mesure où elles permettent de N A0 + N A0 2 n A0 f A N A0 n A0 f A n A0 f A
f = ----------------------- = --------------------
- r = -------- = --------------
- n B0 = --------------
- (28)
déterminer une composition approchée du mélange réactionnel et, 0
nA + nB 0 n A0 + n B0 NB 0 n B0 f B rf B
par conséquent, de limiter le nombre d’expériences préalables.
2 n A0 f A 2 rf A f B
f = ------------------------------
- = ------------------- (29)
n A0 f A f A + rf B
5.1 Relations générales et systèmes n A0 + ---------------
rf B
A C A + B C B ou A C B + A C B
Compte tenu de (26)
Soit un système constitué de deux types de monomères : des f A + rf B
2
molécules portant fA groupes A et des molécules portant fB DP n = ----------------- = -------------------------------------------
- (30)
groupes B ; fA et fB sont respectivement les fonctionnalités de cha- 2 Ð pf f A + rf B Ð prf A f B
cun de ces monomères.
où r = N A0 ⁄ N B0 est appelé rapport stœchiométrique du système.
n A0 , n B0 , nA et nB sont les nombres de molécules de chacun de ces
monomères au temps zéro et au temps t. Quand N A0 est différent de N B0 , ce sont les groupes minoritaires
N A0 , N B0 , NA et NB sont les nombres de fonctions A et B au temps qui sont désignés par A et, par conséquent, N A0 < N B0 et r < 1. Lors-
zéro et au temps t : que N A0 = N B0 ; r = 1.
Deux cas sont particulièrement importants :
N A0 = n A0 f A et N B0 = n B0 f B (2 2)
fA = fB :
Le degré d’avancement, dit encore conversion, est le paramètre p
défini par les relations (23) et (24). Si N A0 = N B0 , p est commun aux 1+r
deux fonctions ; par contre, si N A0 est différent de N B0 , p doit être DP n = --------------------------------- (31)
1 + r Ð rf A p A
défini pour chaque fonction, ainsi pour pA :
fA = fB = 2 :
N A0 Ð N A 2 ( n A0 Ð n A )
p A = ---------------------- = ----------------------------
- (23)
NA 0 n A0 f A 1+r 1+r 1+r
DP n = --------------------------------- = --------------------------------- = ------------------------------ (32)
1 + r Ð 2 rp A 1 + r Ð 2 rp B 1 + r Ð 2 rp
2 n
ou p A = -----  1 Ð ------A- (24)
fA n A0

Il correspond aux groupes B une relation analogue : 5.2 Systèmes A C A + B C B + RC B


2 n
p B = -----  1 Ð ------B- (25)
fB n B0 RCB est un composé monofonctionnel ajouté au mélange
A C A + B C B ; dans ce qui suit A C A, B C B et R C B seront écrits
Les relations (24) et (25) peuvent être généralisées par la plus simplement : AA, BB et RB. Le groupe réactionnel B est iden-
relation (26). tique dans BB et RB ; R est un groupe inerte vis-à-vis de la poly-
condensation considérée.
2 n 2 1
p = ----  1 Ð ------ = ----  1 Ð ----------- (26)
f n0 f DP n N A0 et N B0 ont la même signification que dans le paragraphe 5.1
0
et n RB est le nombre de molécules RB. Le degré de polymérisation
f et DP n sont respectivement la fonctionnalité moyenne du
mélange réactionnel et le degré de polymérisation moyen en nom- DP n est donné par la relation :
bre du polymère dans sa totalité, c’est-à-dire contenant toutes les
molécules du mélange réactionnel : le monomère et toutes les espè-
1 + r + 2q
ces polymères (dimère, trimère, etc.). DP n = ------------------------------------------ (33)
1 + r + 2 q Ð 2 rp
f est défini par la relation (27) où n i0 est le nombre de molécules
ayant la même fonctionnalité fi : 0
n RB N A0
où q = ---------
- et r = -------
- (34)
∞ N B0 N B0
∑ n i0 f i
1 Le mélange réactionnel peut être de deux types différents : le
f = ------------------
- (27)
∞ composé inerte RB est ajouté à un mélange stœchiométrique
∑ n i0 AA + BB où, au contraire, c’est l’ensemble du mélange AA + BB + RB
1 qui est stœchiométrique.

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Polycondensation des polyesters


saturés

par Jean-Pierre QUENTIN


Ancien chef de service
ex-Rhône-Poulenc Industrialisation

1. Polyesters saturés industriels .............................................................. J 5 850 - 2


2. Polyalkylènetéréphtalates (PET, PTT et PBT) ................................... — 2
2.1 Présentation ................................................................................................. — 2
2.2 Procédés de synthèse.................................................................................. — 3
2.2.1 Chimie des réactions principales ...................................................... — 3
2.2.2 Chimie des réactions secondaires..................................................... — 4
2.2.3 Catalyse des réactions principales .................................................... — 6
2.2.4 Accès aux matières premières .......................................................... — 6
2.2.5 Technologie des procédés.................................................................. — 7
3. Polyéthylènenaphtalate et copolymères (PEN)................................ — 9
3.1 Présentation ................................................................................................. — 9
3.2 Chimie du procédé de polycondensation
et des réactions secondaires ...................................................................... — 10
3.3 Accès au naphtalènedicarboxylate de méthyle (NDC) ............................. — 10
3.4 Technologie du procédé de polycondensation ......................................... — 10
4. Polyesters aliphatiques .......................................................................... — 10
4.1 Acide polylactique (PLA) ............................................................................. — 10
4.2 Polycaprolactone (PCL) ............................................................................... — 11
4.3 Polyesters aliphatiques hyperbranchés ..................................................... — 11
Références bibliographiques ......................................................................... — 12

et article décrit les procédés de synthèse des (co)polyesters saturés, semi-


C aromatiques et aliphatiques. Ces polymères sont thermoplastiques ; ils sont
obtenus par polycondensation en phase fondue (suivie éventuellement d’une
postcondensation en phase solide) d’un diacide aromatique majoritaire
(téréphtalique ou naphtalènedicarboxylique) ou de son ester diméthylique sur
un diol aliphatique (éthylèneglycol, propanediol ou butanediol), ou encore d’un
hydroxyacide aliphatique sur lui-même ou sa forme lactonique (acide lactique et
caprolactone).
Les motifs unitaires qui constituent la chaîne macromoléculaire des polyesters
concernés contiennent donc nécessairement une séquence hydrocarbonée ali-
phatique. Sont donc exclus de ce chapitre les polyesters aromatiques, tels que
les polyarylates ou les LCP (« Liquid Cristal Polymer »), résultant de la poly-
condensation de diacides aromatiques (ou du chlorure d’acide) et de diphénols,
ainsi que les polycarbonates obtenus à partir du phosgène et du bisphénol A.
Les procédés de synthèse sont décrits sous leur aspect chimique (réactions
principales et secondaires) et technologique. Mention est également faite d’une
nouvelle famille de polyesters, celle des polyesters hyperbranchés aliphatiques
qui est apparue récemment sur le marché.
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@RPPT

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POLYCONDENSATION DES POLYESTERS SATURÉS ____________________________________________________________________________________________

En ce qui concerne plus particulièrement, le polyéthylènetéréphtalate, le


lecteur pourra se reporter à l’article [J 6 488] qui est spécialement consacré à ce
polymère et où sont détaillés les procédés de fabrication actuels ainsi que les
techniques de recyclage.
Nous décrivons plus spécialement dans le présent article la chimie secondaire
qui accompagne les réactions principales de polycondensation conduisant au
PET.
Le lecteur désirant consulter une source d’information complémentaire pourra se reporter à
l’ouvrage récent en deux volumes consacré aux polyesters thermoplastiques [1].
(0)

Abréviation Désignation Abréviation Désignation


APS Advanced Photosystem NDC Naphtalène-2,6-dicarboxylate de méthyle
BDO 1,4-Butanediol PBT Polybutylènetéréphtalate
BISFA Bureau international des standards des fibres PCL Polycaprolactone
artificielles PDO 1,3-Propanediol
DMT Diméthyltéréphtalate PEN Polyéthylènenaphtalate
DEG Diéthylèneglycol PET Polyéthylènetéréphtalate
EG Éthylèneglycol PLA Acide polylactique
LCP Liquid Crystal Polymer PTA Pure Terephthalic Acid
MEG Monoéthylèneglycol PTT Polytriméthylènetéréphtalate
NDA Acide naphtalène dicarboxylique THF Tétrahydrofurane

1. Polyesters saturés 2. Polyalkylènetéréphtalates


industriels (PET, PTT et PBT)
On appelle polyesters saturés les polymères résultant de la réac-
tion de polyestérification entre des diacides et des diols ou d’un 2.1 Présentation
hydroxyacide sur lui-même (ou de sa forme lactonique). Les mono-
mères qui interviennent dans cette réaction ne comportent aucune
double liaison éthylénique susceptible de conduire à des polymères Ces polyesters, de structure semi-aromatique, ont comme for-
réticulés (par opposition aux polyesters insaturés dont la poly- mule générale :
condensation fait l’objet d’un article séparé [J 5 860] dans ce traité.
Peuvent cependant être introduits dans la chaîne polymérique des  O  CO  Ar  CO  O  ( CH 2 ) n 
monomères trifonctionnels (triols et/ou dihydroxyacides) dans le
but d’obtenir des architectures moléculaires particulières, telles que avec n =2 (PET), 3 (PTT) ou 4 (PBT) et Ar = C6H4
celles présentées par les polyesters hyperbranchés. Ils répondent pratiquement à la définition des polyesters pour
Dans ce qui suit, nous nous limiterons à la catégorie des poly- fibres, énoncée selon les règles du BISFA (Bureau international des
esters saturés classés parmi les matériaux thermoplastiques. La standards des fibres artificielles) :
relation structure-propriété ainsi définie se fonde sur la relative
stabilité chimique de ces polymères, dont la mise en forme, lors des
étapes de transformation industrielle, fait intervenir essentiellement « Fibres composées de macromolécules linéaires ayant dans
des phénomènes physiques (fusion, cristallisation, écoulement la chaîne au moins 85 % en poids d’un diol et d’acide
sous contrainte, etc.), les modifications chimiques étant générale- téréphtalique ».
ment limitées et considérées comme des dégradations.
Les polyesters dont il sera question dans cet article sont tous Les diols qui interviennent dans la synthèse de ces trois poly-
obtenus industriellement par polycondensation en phase fondue, esters, le PET, le PTT et le PBT, sont respectivement l’éthylèneglycol,
suivie éventuellement d’une postcondensation à l’état solide. le propanediol ou le butanediol.
Nous décrirons donc successivement les procédés de synthèse Le PET connut ses premiers débouchés commerciaux dans les
relatifs aux polyesters ci-après : années 1950 dans le domaine des fibres et des filaments continus ;
— polyalkylènetéréphtalates (polyéthylène-, triméthylène-, le PBT fut introduit sur le marché, principalement comme filament
butylènetéréphtalate) et leurs copolymères ; continu, quelques années plus tard et c’est au début des années
— polyéthylènenaphtalènedicarboxylate, couramment appelé 2000, lorsque le propanediol fut accessible industriellement, que le
polyéthylènenaphtalate et les copolymères ; PTT arriva sur le marché international.
— acide polylactique ; Ces polyesters diffèrent l’un de l’autre par le nombre de carbones
— polycaprolactone ; de la séquence aliphatique. Ce paramètre structural régit en partie
— polyesters hyperbranchés. les températures de fusion Tf et de transition vitreuse Tg (tableau 1),

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J 5 850 − 2 © Techniques de l’Ingénieur

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___________________________________________________________________________________________ POLYCONDENSATION DES POLYESTERS SATURÉS

la cinétique de cristallisation et intervient dans la chimie du procédé


de polycondensation, plus particulièrement au niveau de la ciné-
600

Capacité (103 t/an)


tique et des produits secondaires.
(0)
5 0 0

Tableau 1 – Caractéristiques thermiques 400


des polytéréphtalates
300
Tf Tg
Polyester
(˚C) (˚C) 200

PET 258 78
100
PTT 230 51
PBT 228 48 0
1 993 1994 19 9 5 1996 1997 1998 1999 2000

Nouvelles applications Japon


Ces trois polyesters sont des polymères semi-cristallins. Leur Reste du monde Europe de l'Ouest
vitesse de cristallisation est fonction croissante de la longueur de la
séquence aliphatique. C’est donc le PBT qui cristallise le plus rapide- Autres pays asiatiques USA
ment, ce qui lui ouvre des débouchés dans les plastiques techniques Corée/Taiwan
(faible retrait au moulage).
La chaîne polymérique du PTT présentant une conformation
hélicoïdale à l’intérieur du cristallite lui confère une extensibilité Figure 1 – PBT : demande et capacité mondiales [5]
élastique comparable à celle du polyamide 6-6.
■ Copolymères
● Le PBT cristallise rapidement. Cette propriété le situe en bonne
L’introduction d’un troisième monomère (diacide ou diol) permet place dans le domaine des plastiques techniques pour l’industrie
de modifier ou d’ajuster certaines caractéristiques en fonction de automobile et l’électronique. La production au niveau mondial est
l’application visée : affinité tinctoriale, cinétique de cristallisation, en croissance régulière (figure 1) ; il est mis en œuvre principale-
obtention d’une structure amorphe, hydrorésorbabilité.
ment par injection [27] et peut être utilisé seul ou en mélange avec
Sont commercialisés aujourd’hui un certain nombre de copoly- d’autres polymères où une combinaison judicieuse des propriétés
esters, possédant généralement une base PET. est recherchée.
● Copolyesters à affinité tinctoriale cationique
Exemple : dans le cas du mélange PBT-polycarbonate, qui est le
Ce sont des polyéthylènetéréphtalates contenant en faible pro- plus connu commercialement, le PBT apporte sa résistance chimique
portion (moins de 10 %    !"#"$&'!(  )!  et sa cristallinité et le polycarbonate sa résistance au choc à basse tem-
 s pérature [3].
● Copolyesters amorphes ou à cinétique de cristallisation
maîtrisée Le PBT est également présent dans le domaine des fibres [4].
Ils contiennent des motifs à conformation moléculaire non linéaire
ou « encombrants » tels que l’acide isophtalique, le dihydroxy-1,4-
cyclohexane (souvent appelé cyclohexanediméthanol-1,4),
l’hydroxy-2-éthoxy-2-éthanol (appelé diéthylèneglycol (DEG)), le 2.2 Procédés de synthèse
néopentylglycol ou bien des diacides aliphatiques tels que l’acide
adipique (copolymère du PBT).
Cette cristallisation contrôlée (taux et forme) permet d’obtenir des 2.2.1 Chimie des réactions principales
matériaux transparents après mise en forme (corps creux, films ou
feuilles thermoformables) ou hydro- ou biorésorbables (réactions
d’hydrolyse et biochimiques facilitées). Les deux grandes voies d’accès décrites dans l’article consacré au
■ Applications PET [25], la voie ex-DMT (diméthyltéréphtalate) et la voie ex-PTA
(Pure Terephthalic Acid), sont également à la base des procédés de
● Les principales applications du PET se situent dans le domaine
du textile et des corps creux. Les tonnages produits sont très impor- synthèse du PTT et du PBT.
tants et en forte croissance [25] [26] [27].
On retrouve donc la réaction d’interéchange dans la voie ex-DMT
● Le PTT présente certaines caractéristiques intrinsèques, plus
et celle d’estérification dans la voie ex-PTA qui conduisent majoritai-
particulièrement la résistance aux taches, l’affinité tinctoriale et éga- rement à la formation, suivant le polymère, du téréphtalate
lement l’élasticité qui est comparable à celle du Nylon (cf. ci-des-
d’hydroxy-2-éthyle (PET), d’hydroxy-3-propyle (PTT) ou d’hydroxy-
sus), qui permettent des applications dans le domaine des fibres et
monofilaments [12] [16]. Il offre également des possibilités, grâce à 4-butyle (PBT).
sa cinétique de cristallisation relativement rapide, comme plastique
technique [13]. Les prévisions de marché pour l’horizon 2010 Ces réactions sont lentes et équilibrées ; pour accélérer la conver-
seraient, d’après Shell Chemicals [14], supérieures au million de sion des réactifs, ceux-ci sont introduits hors stœchiométrie (avec
tonnes par an, se répartissant entre les tapis (55 %), les applications un excès de diols), parfois en présence d’un catalyseur. L’excès de
textiles (41 %) et les plastiques techniques (4 %). Des licences texti- diol est éliminé avant l’étape suivante, celle de polycondensation où
les ont été accordées à Asahi au Japon et SK Chemical en Corée en interviennent des réactions de transestérification et d’estérification
particulier. Le prix de vente du PTT est voisin de celui du PA6. qui sont également lentes et équilibrées.

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Polycondensation des polyesters


insaturés

par Patrick BELLIARD


Docteur en Chimie
Ancien Directeur des Laboratoires synthèses applications du Département Résines de
structures : Cray Valley (Groupe Total)

Mise à jour de [J 5 860] rédigé par Alain ZALMANSKI (PCUK) en 1982 puis par Patrick
ARLAUD (Cray Valley) en 1994

1. Présentation générale ............................................................................. J 5 860v2 - 2


1.1 Remarque préliminaire................................................................................ — 2
1.2 Aspects économiques.................................................................................. — 2
2. Fabrication industrielle des résines polyesters ............................... — 3
2.1 Polycondensation......................................................................................... — 3
2.2 Dilution du polycondensat dans le monomère ......................................... — 4
2.3 Conduite industrielle de la réaction............................................................ — 5
2.4 Écobilan ........................................................................................................ — 5
3. Copolymérisation ..................................................................................... — 6
3.1 Principe ......................................................................................................... — 6
3.2 Modes d’activation....................................................................................... — 6
3.3 Cinétique du durcissement ......................................................................... — 7
3.4 Caractéristiques des résines copolymérisables ........................................ — 7
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 860v2

es polyesters insaturés sont obtenus par polycondensation d’un ou


L plusieurs diacides avec un ou plusieurs diols (ou glycols), l’un au moins
des diacides contenant une double liaison éthylénique susceptible de réagir
ultérieurement sur un composé vinylique, acrylique ou allylique. En pratique,
la plupart des polyesters insaturés sont obtenus par polycondensation de
mélanges d’anhydrides et de diol(s).
Bien que de très nombreuses variantes soient possibles, 80 * +,- ./01,-2,3-
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@RPPY@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

insaturés commercialisés sont des maléophtalates de propylène glycol en


solution dans le styrène. Par copolymérisation et mise en œuvre appropriée,
ils conduisent essentiellement aux plastiques renforcés verre/polyester, dont
les applications sont nombreuses dans le bâtiment et dans bien d’autres sec-
teurs industriels.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. J 5 860v2 – 1

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POLYCONDENSATION DES POLYESTERS INSATURÉS ______________________________________________________________________________________

1. Présentation générale 1.2 Aspects économiques

1.2.1 Production
1.1 Remarque préliminaire
En France, la capacité totale de production de polyesters insatu-
Le terme générique polyesters recouvre une famille de poly- rés est voisine des 180 000 tonnes par an.
mères dont les motifs unitaires sont constitués par des groupe-
ments alcooliques unis à des groupements acides. Leur formule La production totale métropolitaine, nettement supérieure à la
générale est la suivante : consommation nationale annuelle de l’ordre de 100 000 t environ,
s’ouvre de plus en plus à l’exportation et plus particulièrement
OH[( CH2)n O C ( CH2)m C O]p H vers l’Europe de l’Est dont le marché est en fort développement.
O O
Le marché de l’Europe de l’Ouest est actuellement de 600 000 t
Les différents polyesters utilisés dans l’industrie sont environ avec une constante progression depuis ces dix dernières
principalement : années. Les applications dans le domaine du moulage avec renfort
– les polyesters thermoplastiques (linéaires et saturés), à struc- de fibres de verre représentent plus de 70 % de la résine
ture cristalline hautement orientée qui les rend aptes au filage et à consommée et des nouvelles applications comme celles des pales
la préparation de films ; d’éoliennes et des revêtements pour rénovation de canalisations
enterrées ont vus le jour ces derniers temps.
Exemple : le poly(éthylène téréphtalate) bien connu sous les
marques Mylar, Dacron ou Tergal, etc.
– les plastifiants polyesters, obtenus par action d’un diacide 1.2.2 Applications
saturé sur un polyol et utilisés essentiellement pour plastifier les
polymères vinyliques et les dérivés nitrocellulosiques ; Elles sont de deux types :
– les résines alkydes (glyptals ou glycérophtaliques), obtenues – principalement sous forme de polyesters insaturés renforcés
par condensation d’anhydride phtalique et de polyols, et générale- de fibres de verre (25 à 40 % en masse), en présence ou non
ment modifiées par des huiles ou des acides gras pour la fabrica- d’autres charges telles que le carbonate de calcium (tableau 1) ;
tion de peintures et de certains revêtements ;
– les polyesters pour polyuréthannes, à haute teneur en groupe- – dans une moindre mesure, sous forme de polyesters insaturés
ment OH (polyols) susceptibles de réagir avec les isocyanates pour non renforcés, essentiellement pour les vernis, la production de
l’obtention de mousses, d’élastomères, de revêtements, etc. boutons, les bétons de résines, les mastics pour carrosseries et les
gel coats.
L’étude de ces différents produits fait l’objet de plusieurs dos-
siers dans la base Plastiques et Composites de notre collection et
ne sera pas abordée dans ce dossier consacré aux polyesters insa-
turés et à leur procédé de fabrication.
Tableau 1 – Répartition de la consommation
en Europe de l’Ouest de polyesters
Aperçu historique Secteur d’utilisation (kT) (%)

On peut noter dès 1894 la préparation des maléates et APPLICATIONS AVEC RENFORT DE VERRE 424,6 75,96
fumarates d’éthyléneglycol par l’Allemand Vorlander. Il fallut
ensuite attendre les travaux de Bradley, vers 1937, aux Bâtiment
États-Unis, qui montrèrent, à la suite des théories de Principalement plaques ondulées,
Carothers, que la formation d’un polyester infusible et insolu- sanitaire, piscines, parements et autres 106,4 19,03
ble était due à la présence des doubles liaisons dans la chaîne
macromoléculaire. Transport
Puis, à la même époque, Ellis découvrit que l’addition d’un Secteurs du ferroviaire et de l’automobile,
monomère insaturé à un polyester également insaturé aug- panneaux pour camions frigorifiques et
mentait la vitesse de durcissement de ce dernier dans de autres 91,3 16,33
notables proportions. On transformait en réalité un polymère
linéaire thermoplastique, à tendance plus ou moins siccative, Corps creux
en un polymère réticulé par un monomère, donc tridimension- Cuves, tuyaux, réparation canalisations etc. 83,2 14,88
nel et thermodurci.
Le premier polyester commercialisé vers 1941 fut le polycar- Électricité
bonate d’allyldiglycol ou Allymer Cr 39 de la société Pittsburgh Eoliennes, pièces diverses moulées 41,5 7,42
Plate Glass ; puis l’American Cyanamid fournira un polyester
en solution dans le styrène, dont les applications furent essen- Marine
tiellement militaires. La fin de la guerre fit chuter la production Plaisance, pèche, transport passagers etc. 70,6 12,62
de ces polyesters qui n’était plus, aux États-Unis, que de 500 t
en 1947. Pièces industrielles
Le marché repartira en flèche lors de l’apparition des pre- Pièces pour applications diverses 31,6 5,65
miers stratifiés verre-résine mettant en évidence la facilité de
préparation de plastiques renforcés de fibres de verre. Au fur et APPLICATIONS SANS RENFORT DE VERRE 134,4 24,04
à mesure de l’étude des propriétés et des applications des Bétons polyester, gel coat, mastic, boutons
polyesters (renforcés ou non) se développaient les techniques etc.
de préparation et de contrôle et se créaient de nouvelles appli-
cations (§ 1.2.2). TOTAL 559,00 100,00

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J 5 860v2 – 2 est strictement interdite. – © Editions T.I.

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Oxyalkylations
Oxyéthylations et oxypropylations
par Philippe LOLL
Docteur-ingénieur de l’École nationale supérieure de chimie et de physique de Bordeaux
Responsable technique – ICI C&P France SA

Mise à jour de l’article de Messieurs D. Aftalion et J.-M. Plecety (ICI France) paru en 1989.

1. Généralités................................................................................................. J 5 890 - 2
1.1 Les oxydes d’alkylène OE et OP ................................................................. — 2
1.2 Obtention des oxydes d’éthylène et de propylène ................................... — 2
1.3 Importance industrielle des oxyalkylations et produits obtenus............. — 2
2. Mise en œuvre industrielle.................................................................... — 4
2.1 Réactions générales d’oxyalkylation ......................................................... — 4
2.2 Catalyse ........................................................................................................ — 5
2.3 Sécurité......................................................................................................... — 6
3. Procédés continus ................................................................................... — 7
3.1 Schémas de principe ................................................................................... — 7
3.2 Production des éthylèneglycols et des propylèneglycols ........................ — 7
3.3 Production des éthers de glycols ............................................................... — 8
3.4 Production d’éthanolamines et de propanolamines ................................ — 9
3.5 Production d’alkyléthanolamines............................................................... — 9
3.6 Production de chlorure de choline ............................................................. — 10
4. Procédés discontinus.............................................................................. — 10
4.1 Types de réacteurs utilisés.......................................................................... — 10
4.2 Schéma de principe ..................................................................................... — 10
4.3 Cinétique des oxyalkylations en discontinu.............................................. — 11
4.4 Produits obtenus.......................................................................................... — 11
4.5 Problèmes spécifiques aux dérivés de l’OP .............................................. — 12
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 890

e terme oxyalkylation désigne la réaction d’addition d’une ou de plusieurs


L molécules d’oxyde d’alkylène (principalement l’oxyde d’éthylène ou l’oxyde
de propylène) sur un réactant ayant un hydrogène labile.
Ces réactions ont une importance industrielle considérable, car les capacités
mondiales de production d’oxydes d’éthylène et de propylène dépassent
18 millions de tonnes par an.
Selon les masses molaires des produits finis, on mettra en œuvre soit des pro-
cédés continus, soit des procédés discontinus qui permettent de fixer un seul
oxyde ou bien deux. Dans ce dernier cas, on obtiendra soit des structures blocs,
soit des structures statistiques.
L’oxyde d’éthylène conduit à des produits hydrophiles, solubles dans l’eau
alors que l’oxyde de propylène conduit à des composés hydrophobes, insolubles
dans l’eau.
Cette chimie est donc extrêmement versatile et permet, en jouant sur les quan-
tités d’oxydes et sur leur répartition, d’optimiser telle ou telle propriété pour une
application bien définie.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@RPPR

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OXYALKYLATIONS ______________________________________________________________________________________________________________________

1. Généralités ● Voie classique ex-chlorhydrine (Dow Chemical)

Le propylène réagit avec du chlore en milieu aqueux pour donner


une chlorhydrine qui est déhydrochlorée en présence de Ca(OH)2
1.1 Les oxydes d’alkylène OE et OP selon les réactions :

La réaction d’oxyalkylation consiste à faire réagir un ou plusieurs


oxydes d’alkylène avec un initiateur (réactant) comportant un
hydrogène labile. 2 CH3CH = CH2+ 2 HOCI CH3 CH CH2 CI + CH3 CH CH2OH
Les deux premiers termes des oxydes d’alkylène (oxydes d’oléfi-
OH Cl
nes) sont :
l’oxyde d’éthylène CH3 CH CH2 Cl + CH3 CH CH2OH + Ca (OH)2
H2C CH2 (OE)
OH Cl
O
2 CH3 HC CH2 + CaCl2 + 2 H2O
et l’oxyde de propylène H3C HC CH2 (OP) O
O

Ils sont respectivement produits à partir de l’éthylène et du propy-


lène issus des vapocraqueurs, et constituent le point de départ
d’une grande famille de produits ayant des applications très diver-
● Époxydation catalytique
ses et une importance industrielle considérable, comme nous le ver-
rons ci-après.
Deux hydroperoxydes ont une importance industrielle : celui
Ces deux oxydes (que nous appellerons OE et OP) réagissent avec de tertiobutyle et celui d’éthylbenzène. Par action sur le propy-
les multiples composés chimiques dont la formule générale est lène, ils conduisent à l’oxyde de propylène suivant les
RX  H , et dont l’hydrogène est suffisamment mobile pour réagir
réactions :
avec une molécule d’OE ou d’OP (cf. § 2.1). Il s’agit d’une réaction
d’addition et, de ce fait, toutes les molécules obtenues comportent
une fonction OH et peuvent donc réagir à leur tour avec l’OE ou l’OP.

CH3CH CH2 + (CH3)3COOH CH3 HC CH2 + (CH3)3 CH COH

On appelle oxyéthylations les réactions d’addition mettant en O


œuvre l’oxyde d’éthylène. Oxyde de propylène + TBA

On appelle oxypropylations les réactions d’addition mettant


en œuvre l’oxyde de propylène. CH3CH CH2 +C6H5CH OOH CH3 HC CH2 + C6H5 CH OH

CH3 O CH3
Oxyde de propylène + MPC
Les autres termes des oxydes d’alkylène ont une utilisation indus-
trielle limitée. On connaît quelques débouchés pour l’oxyde de
butylène, mais la réactivité diminuant très rapidement avec l’aug-
mentation de masse molaire de l’oxyde d’alkylène, les utilisations
majeures concernent l’OE et l’OP.
Le premier conduit à la formation d’alcool terbutylique TBA (ter-
tiobutyl alcohol) utilisé par Lyondell. Le second conduit à la forma-
tion de méthylphénylcarbitol MPC (methylphenyl carbitol) utilisé
1.2 Obtention des oxydes d’éthylène par Shell.
et de propylène
Sumitomo a développé un nouveau procédé passant par le
peroxyde du propylène [9], et devrait démarrer une nouvelle unité
■ Oxyde d’éthylène de 200 000 t/an au Japon en 2002.
Quasiment toutes les unités de production utilisent un procédé
d’oxydation directe de l’éthylène par l’oxygène [10], en présence
d’un catalyseur entre 240 et 270 ºC et sous une pression de 15 à
25 atm (1,5 à 2,5 MPa) selon la réaction : 1.3 Importance industrielle
C2H4 + 1/2 O2 → C2H4O + 103,4 kJ/mol des oxyalkylations
et produits obtenus
Une faible capacité de production en Chine utilise encore l’ancien
procédé à l’éthylène chlorhydrine (2-chloroéthanol H2C CH2 ).

■ Oxyde de propylène Cl OH Les réactants, les produits obtenus et leurs principales applications
Il existe deux procédés principaux d’obtention. sont donnés dans les tableaux 1 et 2 et en [Doc. J 5 890].

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_____________________________________________________________________________________________________________________ OXYALKYLATIONS

(0)

T ableau 1 – Oxyéthylations
Réactant (1) Produits obtenus Applications
• Liquides de refroidissement
• Fibres polyesters
Eau Monoéthylèneglycol • Explosifs
• Résines, solvants
Alcools gras de C7 à C20
Nonylphénol • Détergents à usage domestique
Éthoxylats • Tensioactifs industriels
Octylphénol • Produits pharmaceutiques
Monoéthylèneglycol
Propylèneglycol • Détergents à usage domestique
Alcools gras de C7 à C20 • Détergents à usage industriel
Copolymères • Textiles
Éthylènediamine • Cosmétiques
Polyols (triméthylolpropane TMP, glycérine...) • Lubrifiants
Éthanol
Méthanol • Solvants pour peintures et encres
Éthers de glycol
Buthanol • Fluides hydrauliques (liquides de freins)
Phénol
• Agents de purification pour traitement des gaz
Ammoniac Éthanolamines • Tensoactifs industriels
• Intermédiaires chimiques
Glycérine HOCH 2  CHOH  CH 2 OH (+ OP)
Saccharose C12H22O11 (+ OP) • Polyuréthanes
Polyols • Lubrifiants
Divers polyols (+ OP)
Triméthylolpropane (+ OP)
Huile de ricin Corps gras éthoxylés • Tensioactifs (émulgateurs, dispersants, mouillants...)
Ester de sorbitan (Span ®) Tween ® • Cosmétique (émulgateurs)
• Biocides pour traitement des eaux
Amines grasses de C8 à C22 Dérivés d’amines grasses • Détergents à usage domestique ou pour l’agrochimie
• Inhibiteurs de corrosion
Méthylamines Aminoéthanols
• Agents de purification pour traitement des gaz
• Intermédiaires, en particulier agents de floculation
Éthylamines Chlorure de choline • Aliments pour animaux
(1) (+ OP) signifie que l’on part d’un réactant propoxylé qui est ensuite éthoxylé. Par exemple, lorsqu’il y a écrit Triméthylolpropane (+ OP), cela veut dire que ce
qui est utilisé est du TMP propoxylé (donc du TMP + n OP) qui est ensuite éthoxylé. Dans la pratique, on part d’un TMP propoxylé sur lequel on ajoute quelques
moles supplémentaires d’OP, puis quelques moles d’OE.

(0)

Tableau 2 – Oxypropylations
Réactant (1) Produits Applications
• Produits antigel
Eau Monopropylèneglycol • Résines polyesters insaturées
• Produits pharmaceutiques et cosmétiques...
Divers (+ OE) Polyols • Lubrifiants
Éthanol
Méthanol
Éthers de glycols • Solvants pour peintures et encres
Butanol
Phénol
Propylèneglycol (+ OE)
• Détergents à usage domestique
Alcools gras de C7 à C20 (+ OE) • Détergents à usage industriel
Copolymères
Polyols (+ OE) • Textiles
• Cosmétiques
Éthylènediamine (+ OE)
Ammoniac Propanolamines • Agents de purification pour traitement des gaz
(1) (+ OE) signifie que l’on part d’un réactant éthoxylé qui est ensuite propoxylé. Par exemple, lorsqu’il y a écrit Alcools gras de C7 à C20 (+ OE), cela signifie que
l’on part d’alcool gras sur lequel on fixe quelques moles d’OE puis quelques moles d’OP.

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Isomérisation des paraffines


par Laurent WATRIPONT
Ingénieur ENSPM (École nationale supérieure du pétrole et des moteurs)
Responsable technique – Département technologie – Axens – IFP Group Technologies

1. Réaction d’isomérisation des paraffines.................................... J 5 910v2 – 2


1.1 Aspect thermodynamique .................................................................. 2
1.2 Catalyseurs ......................................................................................... 2
1.3 Cinétique et mécanismes réactionnels .............................................. 3
2. Procédés industriels ....................................................................... 3
2.1 Conditions opératoires moyennes ..................................................... 3
2.2 Schémas de procédé d’isomérisation................................................ 3
2.3 Perspectives d’avenir ......................................................................... 6
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. J 5 910v2

’isomérisation des paraffines normales (ou alcanes linéaires) à quatre, cinq


L et six atomes de carbone en isoparaffines (ou alcanes ramifiés) dont les
qualités antidétonantes sont meilleures est utilisée pour l’obtention de produits
à haut indice d’octane destinés à la formulation des carburants, à partir princi-
palement de coupes de distillation directe des pétroles (coupes pétrolières 30 –
80  C), ou à partir de coupes C4 dans le cas du n-butane conduisant à la produc-
tion d’isobutane, réactif de base pour le procédé d’alkylation aliphatique [1].
p。イオエゥッョ@Z@ウ・ーエ・ュ「イ・@RPPX

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ISOMÉRISATION DES PARAFFINES ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

1. Réaction d’isomérisation

Composition molaire (%)


des paraffines 90

I
80
1.1 Aspect thermodynamique
L’isomérisation est une réaction équilibrée et faiblement exother- 70
mique (4 à 20 kJ/mol). II
La formation des structures ramifiées (isomères à indice d’octane
élevé) étant favorisée à basse température (figure 1), on recherche 60
industriellement l’opération à la température aussi faible que pos- 0 50 100 150 200 250
sible. Mais quelle que soit la température opératoire, on obtient Température t (°C)
toujours en sortie de réacteur un mélange de paraffines normales i –– C5
Courbe I : = f (t )
et d’isoparaffines. i –– C5 + n –– C5
H3C
avec i –– C5 isopentane CH CH2 CH3
1.2 Catalyseurs H3C
et n –– C5 pentane normal
Ce sont des catalyseurs acides permettant la formation de carbo-
i –– C4
cations, reconnus comme espèces actives intermédiaire [1]. Courbe II : = f (t )
i –– C4 + n –– C4 H3C
Depuis l’utilisation, en phase liquide ou sur support, des cataly-
seurs monofonctionnels de Friedel et Crafts (catalyseurs dits de avec i –– C4 isobutane CH CH3
première génération) pour l’isomérisation du n-butane [1], les H3C
auteurs distinguent trois générations de catalyseurs [2]. et n –– C4 butane normal
Les catalyseurs des deuxième et troisième générations, ou cata-
a pentanes et butanes
lyseurs bifonctionnels d’hydro-isomérisation, ont à la fois une acti-
vité acide apportée par un support de grande surface spécifique
(200 à 300 m2/g) et une fonction hydrogénante – déshydrogénante 80
Composition molaire (% par rapport à l’ensemble des isomères en C6)

apportée par un métal (0,2 à 0,6 % en masse de platine en général).


Ces catalyseurs fonctionnent sous pression d’hydrogène et sont
d’autant plus actifs que le support est acide. C’est ainsi que la tem- 70
pérature opératoire évolue de 500  C à 120  C en passant de l’alu-
mine aux alumino-silicates amorphes, puis aux zéolithes, et aux
alumines chlorées pour les catalyseurs de troisième génération. 60
Pour être complet, il existe également une génération de cataly- III
seurs à base de zircone sulfatée associée à une fonction hydrogé-
nante – déshydrogénante assurée par dispersion de platine. La 50
température opératoire pour ce type de catalyseur se situe aux
alentours de 180 – 200  C.
L’application industrielle de cette gamme de catalyseur est très 40
limitée [12].
Aujourd’hui, les catalyseurs les plus actifs et les plus utilisés
industriellement, utilisant du platine déposé sur de l’alumine chlo- 30
rée (5 à 10 % en masse de chlore), sont normalement préparés à IV
partir d’un support d’alumine haute pureté [1], par réaction avec le
chlorure d’aluminium (AlCl3) [15] [16], ou le tétrachlorure de car- 20
V
bone (CCl4) [2] [17], ou bien avec un chlorure d’hydrocarbylalumi-
nium (C2H5)AlCl2 [3].
La chloration peut être effectuée chez le producteur de catalyseur 10
VI
ou in situ au moment du démarrage de l’unité d’isomérisation.
Cependant, cette dernière pratique est aujourd’hui presque totale- VII
ment abandonnée du fait des règlementations de plus en plus 0
sévères concernant les rejets et les autorisations pour l’utilisation 0 50 100 150 200 250
de certains composés chlorés. Température (°C)
La stabilité et l’activité de ces catalyseurs superacides (dans courbe III : diméthyl-2,2-butane
l’échelle d’acidité de Hammett) sont maintenues par l’injection courbe IV : méthyl-2-pentane
d’agent chlorant, précurseurs d’acide chlorhydrique (perchloroéthy- courbe V : méthyl-3-pentane
lène – C2Cl4) au taux de 10–4 à 10–3 en masse par rapport à la
courbe VI : diméthyl-2,3-butane
charge.
courbe VII : n –– C6 : hexane normal
Seuls les catalyseurs dont la chloration était réalisée in situ
étaient régénérables sur site. Cependant, les durées de cycle des b hexanes
catalyseurs actuels sont telles que la régénération sur site ne se
justifie plus, d’autant que la conception des unités récentes opérant Figure 1 – Diagrammes d’équilibre thermodynamique en phase
en phase mixte (majoritairement liquide) ne permet pas cette gazeuse des paraffines à quatre, cinq et six atomes de carbone
opération. (d’après [2])

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Reformage catalytique

par Gilles FOURNIER


Marketing Manager, Aromatics
AXENS-IFP Group Technologies
et Jean-François JOLY
Docteur-ingénieur
Chef de projet Reformage catalytique
IFP (Solaize)

Mise à jour de l’article de A. Chauvel et G. Lefebvre (IFP) paru en 1988

1. Types de réactions à promouvoir ........................................................ J 5 915 - 2


2. Considérations thermodynamiques et cinétiques .......................... — 2
3. Activation catalytique des réactions ................................................. — 3
3.1 Types de catalyseurs ................................................................................... — 3
3.2 Activité des catalyseurs .............................................................................. — 4
3.3 Préparation des catalyseurs........................................................................ — 5
4. Schémas réactionnels du reformage catalytique ........................... — 5
5. Mise en œuvre industrielle.................................................................... — 6
5.1 Principaux types d’installations.................................................................. — 6
5.2 Conditions opératoires................................................................................ — 6
5.3 Équipements ................................................................................................ — 6
5.4 Principaux procédés de reformage ............................................................ — 7
5.5 Prétraitement ............................................................................................... — 9
6. Performances moyennes du reformage............................................. — 9
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 915

e reformage catalytique est, depuis son origine en 1939 aux États-Unis, un


L p r océdé de raffinage des essences, mais il assure aussi une partie non négli-
p。イオエゥッョ@Z@、←」・ュ「イ・@RPPQ@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

geable de l’approvisionnement de la pétrochimie en hydrocarbures aroma-


tiques, le procédé de vapocraquage de coupes pétrolières étant la deuxième
voie principale de production du benzène, du toluène et des xylènes.
À l’origine, le but du reformage catalytique était essentiellement la transforma-
tion de coupes pétrolières à faible indice d’octane (40 à 60), couramment appe-
lées naphtas, en bases pour carburant à haut indice d’octane. Cette amélioration
de l’indice résultant essentiellement d’une forte augmentation de la teneur en
aromatiques, on envisagea l’utilisation du procédé pour la production de ceux-
ci. On opérait alors, dans des conditions particulières, sur une coupe d’essence
sélectionnée, en vue de produire plus spécifiquement des hydrocarbures desti-
nés à la chimie.
Cependant, à la fois pour des raisons économiques et techniques, cette distinc-
tion s’est estompée. En effet, les besoins en carburants à hautes performances
ont crû plus vite que ceux de la chimie en benzène, toluène et xylènes. La recher-
che d’un indice d’octane élevé (90 à 100) liée à la teneur en aromatiques des
reformats et à la sévérité du traitement a conduit à des conditions de fonctionne-
ment et à des résultats sensiblement analogues pour les deux types de production.

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REFORMAGE CATALYTIQUE ______________________________________________________________________________________________________________

Deux événements ont contribué par la suite à accentuer encore cette


tendance à accroître les rendements en composés aromatiques. Il s’agit de la
mise en place d’une r é g l ementation antipollution préconisant, en particulier,
une diminution de la teneur en plomb des essences, et de l’obligation de prati-
quer des économies d’énergies et, pour ce faire, de mieux valoriser les coupes
pétrolières. Ainsi, les industriels ont mis au point des procédés plus spécifiques
et mieux adaptés à leurs contraintes et il existe actuellement :
— pour le raffinage, des procédés de reformage opérant dans des conditions
sévères, avec une plus grande stabilité de fonctionnement et des rendements en
essences plus élevés ;
— pour la pétrochimie, des techniques fonctionnant à plus haute température
et dont la production d’aromatiques est optimisée.
On ne traite ici que de ce second aspect du reformage catalytique.
Le lecteur se reportera à l’article Traitement des essences aromatiques pour la pétrochimie
[J 5 920] pour les techniques de séparation des hydrocarbures aromatiques.

1. Types de réactions 2. Considérations


à promouvoir thermodynamiques
et cinétiques
Les charges habituellement traitées par reformage sont des
essences issues de la distillation du pétrole brut, les naphtas. Leur
composition chimique varie suivant l’origine du brut, mais il s’agit La stabilité des hydrocarbures aromatiques par rapport aux autres
de mélanges d’hydrocarbures ayant de 6 à 10 atomes de carbone. Si hydrocarbures croît avec la température ; de ce fait, on opère à tem-
la concentration en hydrocarbures aromatiques est toujours infé- pérature élevée, supérieure à 300 ˚C. Cependant, la compétition
rieure à 20 % en volume, la teneur en cyclanes (hydrocarbures cinétique entre les réactions souhaitées et les réactions parasites
naphténiques) peut varier de 10 à 70 % ; de même, la teneur en conduit à choisir des conditions opératoires spécifiques des trans-
paraffines (alcanes) est très variable, atteignant 60 % dans les naph- formations visées.
tas issus de bruts du Moyen-Orient. L’augmentation de la teneur en
composés aromatiques aux dépens des autres hydrocarbures ■ Déshydrogénation des cyclanes en hydrocarbures aromatiques
implique :
Un exemple de cette réaction est donné ci-dessous :
— la déshydrogénation des cyclanes (alkylcyclohexanes) en
composés aromatiques ; + 3 H2

— la déshydrocyclisation des n-paraffines et des isoparaffines en Cyclohexane Benzène


composés aromatiques, ces deux premières réactions s’accompa-
gnant d’une production importante d’hydrogène, de sorte que le Cette réaction est très endothermique (∆H = 210 kJ/mol) et
reformage catalytique est une source non négligeable de ce gaz ; s’accompagne d’une augmentation du nombre de moles ; elle est
donc favorisée par un accroissement de la température et un abais-
— l’isomérisation des paraffines et des cyclanes, cette réaction sement de la pression. Par ailleurs, la vitesse de la réaction diminue
alimentant les deux transformations précédentes en structures avec l’augmentation du nombre d’atomes de carbone de la charge
moléculaires favorables. mais demeure notablement plus élevée que celles des autres réac-
tions, qui augmentent, elles, avec le nombre d’atomes de carbone
Les conditions opératoires et les catalyseurs mis en œuvre pour de la charge.
réaliser ces trois réactions favorisent, en outre, des réactions para-
sites, notamment : ■ Déshydrocyclisation des paraffines
— le craquage des paraffines et des cyclanes ; Un exemple de cette réaction est donné ci-dessous :
— l’hydrodésalkylation des composés aromatiques, en particulier
la déméthanation ; CH3 (CH2)4 CH3 + 4 H2

— la dismutation des composés aromatiques ;


La déshydrocyclisation des paraffines est encore plus endother-
— l’alkylation des composés aromatiques. mique (∆H = 250 kJ/mol) que la déshydrogénation et s’accompagne
d’une augmentation du nombre de moles ; elle est donc favorisée
Enfin, la forte proportion d’hydrocarbures aromatiques et les tem- par une température plus élevée et une pression plus basse, mais
pératures élevées mises en jeu favorisent la formation de coke qui elle est, par contre, beaucoup plus lente et, à cause de sa faible
se dépose sur les catalyseurs et entraînent leur désactivation vitesse, ne devient importante que si les conditions adoptées sont
progressive. sévères (température élevée et basse pression).

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______________________________________________________________________________________________________________ REFORMAGE CATALYTIQUE

■ Isomérisation des n-paraffines en isoparaffines et des


alkylcyclopentanes en alkylcyclohexanes Conclusion : L’examen de ce tableau 1 montre que les
meilleures conditions orientant l’ensemble des transformations
Un exemple de ces deux réactions est donné ci-dessous : recherchées vers la formation d’hydrocarbures aromatiques
correspondent à une pression de 0,1 MPa et à des températures
CH3 (CH2)4 CH3 CH3 CH (CH2)2 CH3 ne dépassant pas 350 ˚C, mais alors les réactions de craquage et
la formation de coke sont trop importantes. La sélectivité de
CH3 l’opération s’en trouve réduite. Il devient, de ce fait, nécessaire
d’activer sélectivement les réactions conduisant aux hydrocar-
CH3
bures aromatiques et d’opérer sous une pression d’hydrogène
suffisante.

Méthylcyclopentane Cyclohexane

L’isomérisation, faiblement exothermique (∆H = − 10 à − 20 kJ/mol), 3. Activation catalytique


est très rapide dans les conditions usuelles de fonctionnement. De
ce fait, elle est peu sensible à une variation de température et insen-
des réactions
sible à la pression, mais elle est inhibée par les composés aromati-
ques formés dans la réaction globale de reformage. L’équilibre
thermodynamique de l’isomérisation est constamment déplacé par 3.1 Types de catalyseurs
les deux réactions précédemment décrites.
L’activation des réactions est réalisée par des catalyseurs suscep-
■ Formation de coke tibles de favoriser aussi bien l’isomérisation et la cyclisation que la
déshydrogénation. De ce fait, les systèmes catalytiques mis en
Elle résulte d’un craquage poussé des hydrocarbures, favorisé par œuvre sont multifonctionnels, c’est-à-dire qu’ils possèdent en
une haute température et une basse pression. Elle constitue l’une théorie :
des réactions parasites les plus gênantes puisqu’elle entraîne une
— une fonction hydrogénation-déshydrogénation, apportée par
diminution de l’activité des catalyseurs. Elle est combattue en main- la présence d’un métal [cet élément doit être actif et stable aux tem-
tenant une pression d’hydrogène qui oriente vers l’hydrocraquage pératures de réaction (≈ 500 ˚C) et sa teneur doit être contrôlée pour
mais exerce un effet défavorable sur la thermodynamique de la dés- éviter autant que possible les réactions de production d’hydrocarbu-
hydrogénation. res légers indésirables (méthane)] ;
— une fonction acide, fournie par le support, avec ou sans l’addi-
■ Hydrocraquage tion d’un composé halogéné, qui favorise à des degrés divers les
réactions d’isomérisation et de cyclisation, l’acidité devant être
C’est une réaction exothermique (∆H = − 40 kJ/mol), thermodyna- contrôlée pour limiter l’hydrocraquage.
miquement complète dans les conditions opératoires usuelles mais ■ Deux types de catalyseurs peuvent être alors envisagés en
limitée par une vitesse de réaction lente. Lorsque la température pratique :
s’élève, cette transformation peut devenir plus importante que l’iso- — les uns contiennent des oxydes ou sulfures de Cr, Mo, Co, Ni,
mérisation et la déshydrogénation. Elle devient d’autant plus impor- W;
tante que la concentration en composés aromatiques croît. Ces — les autres renferment des métaux nobles : le plus souvent, il
considérations sont illustrées par le calcul thermodynamique dont s’agit de platine, seul ou associé à d’autres constituants métalliques.
certains résultats sont rassemblés dans le tableau 1.
Les oxydes ou sulfures ont été les premiers employés, parce que
peu sensibles aux composés soufrés de la charge ; ils ont cependant
(0) été abandonnés, à cause de leur faible sélectivité, au profit des cata-
lyseurs à base de métaux nobles dont les caractéristiques, pour les
systèmes conventionnels, sont les suivantes :
Tableau 1 – Reformage catalytique : données
thermodynamiques — le support est constitué le plus souvent par une alumine γ,
additionnée d’un composé halogéné, chlorure ou fluorure, seul ou
Température d’équilibre en mélange. Il se présente, fini, sous forme d’extrudats de 1,5 mm
pour une conversion de 90 % en masse de diamètre environ, dont la surface spécifique atteint 200 m2/g, ou
à différentes pressions de billes dans certains procédés (systèmes régénératifs, § 5.5) ;
Réactions
(˚C) — la teneur en métal noble (platine) est comprise entre 0,2 et
0,8 % en masse.
0,1 MPa 1,0 MPa 2,5 MPa 5,0 MPa
■ De nouveaux catalyseurs bi et multimétalliques - c e éeé m- n n ort
Cyclohexane → 294 355 443 487 cialisés.
Benzène + 3 H2 ● Ainsi, tout d’abord, l’introduction de rhénium a permis d’obte-
Méthylcyclopentane → 315 391 492 540 nir une plus grande stabilité des performances dans le temps, liée à
Benzène + 3 H2 une apparente tolérance vis-à-vis des dépôts de coke, avec pour
conséquence la possibilité soit de réaliser des cycles de durées plus
n-Hexane → 354 487 562 623
Benzène + 4 H2 longues, soit d’opérer dans des conditions plus sévères (pression
plus basse, taux d’hydrogène plus faible, température plus élevée).
Méthylcyclohexane → 248 320 356 385 ● Par la suite, l’utilisation de divers autres promoteurs s’est tra-
Toluène + 3 H2
duite en plus par une meilleure sélectivité intrinsèque (rapport des
n-Heptane → 305 428 496 550 vitesses d’aromatisation et de craquage du n-heptane). Cette amé-
Toluène + 4 H2 lioration s’accompagne, sans diminution de la stabilité du cataly-

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© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés J 5 915 − 3

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Catalyse bifonctionnelle redox-acide


Applications en raffinage du pétrole
et pétrochimie
par Michel GUISNET
Professeur des Universités
Catalyse en chimie organique, Poitiers, France
Center for Biological and Chemical Engineering, Lisbonne, Portugal

1. Catalyse bifonctionnelle redox-acide .............................................. J 1 217 - 2


1.1 Catalyseurs et catalyse bifonctionnels.................................................... — 3
1.2 Schéma d’un processus catalytique bifonctionnel ................................ — 5
2. Paramètres déterminant la catalyse bifonctionnelle.................. — 6
2.1 Caractéristiques des fonctions métalliques (M) et acide (A)................. — 6
2.2 Caractéristiques du chemin de diffusion des intermédiaires
oléfiniques ................................................................................................. — 7
3. Effet des caractéristiques physico-chimiques des catalyseurs
bifonctionnels ........................................................................................ — 7
3.1 Influence de la « balance » entre fonctions hydrogénante et acide ..... — 7
3.2 Influence de l’intimité entre sites hydrogénants et sites acides ........... — 9
3.3 Influence de la structure poreuse de la zéolithe..................................... — 10
3.4 Catalyse bifonctionnelle idéale................................................................ — 10
4. Procédés du raffinage du pétrole et de la pétrochimie ............. — 11
4.1 Hydroisomérisation des alcanes C5-C6 — 11
4.2 Reformage catalytique ............................................................................. — 12
4.3 Hydrocraquage.......................................................................................... — 15
4.4 Déparaffinage catalytique des distillats moyens et huiles .................... — 17
4.5 Isomérisation de la coupe C8 aromatique (éthylbenzène et xylènes) — 18
5. Conclusion .............................................................................................. — 21
Pour en savoir plus ......................................................................................... Doc. J 1 217

ar définition, un processus catalytique bifonctionnel fait intervenir deux


P types de fonctions (ou de sites) du catalyseur, cette intervention pouvant
être concertée (par exemple catalyse acido-basique) ou consécutive (par
exemple catalyse redox-acide). Seule la catalyse redox-acide est impliquée
dans les transformations des hydrocarbures paraffiniques, naphténiques et
aromatiques des coupes pétrolières. La mise en évidence sur les catalyseurs
de reformage, d’une synergie entre leurs fonctions hydrodéshydrogénante et
acide date des années 1950, un schéma réactionnel ayant été proposé peu de
temps après pour expliquer son origine. Ce schéma comporte de multiples
étapes successives :
– de catalyse sur les sites hydrodéshydrogénants (formation d’espèces
intermédiaires insaturées très réactives) et acides (réarrangement, craquage,
cyclisation, etc. de ces espèces) ;
– de transport des molécules de réactifs, produits et intermédiaires
réactionnels.
Bien que complexe, cette transformation bifonctionnelle se produit très rapi-
dement et en une seule étape apparente : les intermédiaires insaturés,
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPQU

thermodynamiquement très défavorisés, n’apparaissent en effet que sous


forme de traces dans les produits finaux.

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CATALYSE BIFONCTIONNELLE REDOX-ACIDE _____________________________________________________________________________________________

Si certaines transformations mises en œuvre industriellement par catalyse


bifonctionnelle redox-acide peuvent aussi se produire par catalyse monofonc-
tionnelle acide (ou redox), opérer par catalyse bifonctionnelle est souvent
économiquement préférable. C’est ce que montre la comparaison des pro-
cédés d’hydrocraquage (bifonctionnel) et de craquage acide (FCC, Fluid
Catalytic Cracking) de charges lourdes (Teb > 350 oC) :
– la transformation de ces charges est mise en œuvre à plus basse
température : 380 à 420 oC en hydrocraquage, 480 à 580 oC en FCC ;
– cette transformation est aisément orientée vers des produits plus
valorisables : bases huile, carburant diesel au lieu d’essence, et la sélectivité en
produits désirés est plus grande ;
– les unités d’hydrocraquage opérant sous pression d’hydrogène, la désac-
tivation des catalyseurs par dépôt de coke est beaucoup plus lente : les
catalyseurs d’hydrocraquage sont régénérés après plusieurs années de
fonctionnement (1 à 3 ans), ceux de FCC doivent l’être après quelques secondes.
L’intérêt supplémentaire de la catalyse bifonctionnelle est celui de rendre
possible la transformation de composés réfractaires en catalyse monofonction-
nelle acide. Ainsi, les catalyseurs de craquage catalytique (FCC) sont
incapables de transformer les hydrocarbures polyaromatiques des charges
lourdes, ce que permettent les catalyseurs bifonctionnels d’hydrocraquage.
C’est aussi le cas pour l’isomérisation du composant éthylbenzène des coupes
C8 aromatiques, uniquement réalisable par catalyse bifonctionnelle.
Ces atouts ont permis aux catalyseurs bifonctionnels de prendre une place
prépondérante dans les procédés de conversion du raffinage du pétrole et de la
pétrochimie. Lorsque la charge contient peu ou pas de poisons des sites hydro-
génants (reformage des essences, hydroisomérisation des alcanes légers,
déparaffinage de distillats moyens et huiles, transformation de la coupe C8 aro-
matique), le platine est choisi en raison de sa très grande activité pour catalyser,
seul ou associé à d’autres métaux, les étapes d’hydrogénation et de déshydrogé-
nation. Dans le cas contraire (par exemple, l’hydrocraquage), le platine trop
sensible aux poisons de la charge est remplacé par le palladium ou plus généra-
lement par des sulfures mixtes de nickel et de molybdène ou tungstène, moins
actifs, mais beaucoup plus résistants à l’empoisonnement. Ces composants
hydro-déshydrogénant (Pt, Pd, NiMoS, NiWS) sont généralement supportés
sous forme dispersée sur un solide (alumine chlorée, zéolithe protonique…) pré-
sentant des sites acides protoniques forts, capables de catalyser efficacement
les transformations souhaitées des intermédiaires alcènes. Toutefois, des sup-
ports acides moins forts sont parfois choisis, tels qu’une alumine peu chlorée en
reformage des essences qui, pour des raisons d’équilibre thermodynamique,
doit être opéré à température très élevée ou une silice alumine en hydrocra-
quage pour limiter les coupures secondaires de liaisons C—C.
Dans cet article sont décrites les caractéristiques de la catalyse bifonction-
nelle redox-acide et son application aux procédés essentiels du raffinage du
pétrole et de la pétrochimie, l’accent étant mis sur les réactions (mécanismes
et cinétique), les catalyseurs et la mise en œuvre des procédés.

Comme il est d’usage dans la profession, les compositions sont sauf précision contraire
massiques.

1. Catalyse bifonctionnelle catalyseurs bifonctionnels très particuliers sont examinés ici. Par
ailleurs, de nombreuses zéolithes acides étant choisies comme
redox-acide composants acides des catalyseurs bifonctionnels industriels, les
structures poreuses des principales zéolithes sont présentées dans
le tableau 2 .
La catalyse bifonctionnelle redox-acide joue un rôle essentiel en
raffinage du pétrole et en pétrochimie [1] [2] [3]. Les principaux
procédés de conversion auxquels elle participe sont présentés
dans le tableau 1, les charges traitées, les produits désirés, les Le lecteur peut trouver des informations complémentaires
sur le site de l’Association internationale des zéolithes
catalyseurs utilisés étant précisés. Tous ces procédés, à l’exception
du dernier qui traite de l’aromatisation des alcanes légers sur des (http://www.iza-structure.org)

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_____________________________________________________________________________________________ CATALYSE BIFONCTIONNELLE REDOX-ACIDE

Tableau 1 – Raffinage et pétrochimie : procédés utilisant des catalyseurs bifonctionnels redox-acide


Produits désirés
Procédés Charges Catalyseurs Catalyse
(objectif)
n-C4 i–C4 (→ alkylation) Pt/γ-Al2O3 très chlorée Acide
Hydroisomérisation
des n-alcanes C4-C6 i–C5 , i–C6 (→ essence Pt/γ-Al2O3 très chlorée Acide
n-C5-n-C6
RON élevé) Pt/HMOR Bifonctionnelle
Coupe naphta C6-C10 : Bifonctionnelle
Essence RON élevé
– P (25 à 65 %) Pt ou PtM/γ-Al2O3 chlorée (déshydrocyclisation)
Reformage ou base pour
– N (20 à 25 %) avec M = Re, Sn, Ge, Ir Métallique
BTX + Hydrogène
– A (< 15 %) (déhydrogénation)
Distillat sous vide :
Distillats moyens
Hydrocraquage DSV (350 à 550 oC) – NiWS/, NiMoS/ ou Pt,Pd/
(kérosène, gasoil, base Bifonctionnelle
(gazole léger) Gazole léger de FCC, – Al2O3 , SiO2 Al2O3 ou HFAU
pour huiles), ou essence
DSV + huile désalphatée
Pt/H zéolithe : Bifonctionnelle
Kérosène
Déparaffinage Gasoil Bonne tenue à froid – Pt/HMFI – hydrocraquage
Huile
– Pt/SAPO11, Pt/HFER, Pt/HBEA – hydroisomérisation
Isomérisation de X et EB Pt/HMOR, Pt/HEUO
Isomérisation de la coupe X : 50 à 80 % Bifonctionnelle (EB)
C8 aromatique + EB : 20 à 50% Isomérisation de X Acide (X)
Pt/HMFI
et désalkylation de EB
Aromatisation
Alcanes C3 , C4 BTX Ga/HMFI Bifonctionnelle
des alcanes légers
P, N, A, B, T, X, EB : paraffines, naphtènes, aromatiques, benzène, toluène, xylènes, éthylbenzène.
L’aromatisation qui utilise un catalyseur très particulier sera décrit dans un deuxième article sur la catalyse bifonctionnelle et ses applications à la valorisation
des alcanes C1-C4 et à la chimie fine.

Catalyseurs bifonctionnels Mode de craquage


A+, M+ Hydrocraquage

A–, M+ Hydrogénolyse
A+, M– Craquage acide

A–, M– Craquage thermique

Le symbole + signifie que les sites sont nombreux et (ou) très actifs, le symbole – qu’ils sont peu nombreux et (ou) peu actifs.

Figure 1 – Relation entre les propriétés des sites acides (A) et des sites métalliques (M) de catalyseurs bifonctionnels et le mode de craquage
des alcanes [4]

1.1 Catalyseurs et catalyse – avec intervention des seuls sites acides (craquage par catalyse
acide) ;
bifonctionnels – avec intervention des seuls sites métalliques (hydrogénolyse
par catalyse métallique) ;
Si d’évidence, tous les processus de catalyse bifonctionnelle – sans qu’aucun site du catalyseur n’intervienne (craquage
redox-acide exigent l’utilisation de catalyseurs bifonctionnels, la thermique) [4].
mise en œuvre d’un catalyseur bifonctionnel n’implique pas néces-
Le deuxième cas est également observé en isomérisation sque-
sairement que la réaction désirée se produise par catalyse bifonc-
lettale d’alcanes légers C5-C6 sur Pt/alumine fortement chlorée
tionnelle.
(donc fortement acide) à 120-150 oC sous faible pression d’hydro-
Pour une même réaction (par exemple, craquage), les caractéris- gène. Si sur ce catalyseur bifonctionnel, l’isomérisation se produit
tiques respectives des sites acides et des sites métalliques des uniquement par catalyse acide, le platine joue cependant un rôle
catalyseurs bifonctionnels (et les conditions opératoires) détermi- important : l’hydrogène qu’il active limite la formation de produits
nent le schéma réactionnel (figure 1) [4] : de condensation responsables de la désactivation des sites acides.
Le platine catalyse la formation d’HCl à partir de l’agent chloré
– avec intervention successive des deux types de sites (hydro- introduit en continu, maintenant ainsi la « superacidité » proto-
craquage par catalyse bifonctionnelle) ; nique du catalyseur [5].

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Tableau 2 – Structure poreuse des zéolithes utilisées comme composants acides des principaux
catalyseurs bifonctionnels du raffinage du pétrole et de la pétrochimie
Charpente
Zéolithe Structure Système microporeux Procédé
(matériau type)

<100>12 6,6 × 67**


BEA (Beta) Déparaffinage
↔[001]12 5,6 × 5,6*

Zéolithes
à
larges pores <111> 12 7,4 × 7,4***
FAU (Faujasite) Hydrocraquage
Supercages 13 Å Ø

Isomérisation des C8
[001] 12 6,5 × 7,0* ↔
aromatiques,
MOR (Mordenite) {[010] 8 3,4 × 4,8
hydroisomérisation
↔ [001] 8 2,6 × 5,7}*
des alcanes légers

AEL
[001] 10 4,0 × 6,5* Déparaffinage (SAPO-11)
(AlPO-11)

EUO [100] 10 4,1 × 5,4* Isomérisation des C8


(EU-1) Larges poches latérales aromatiques

Zéolithes à taille
de pores intermédiaires
MFI
(ZSM-5)
{[100] 10 5,1 × 5,5 ↔
Déparaffinage
[010] 10 5,3 × 5,6}***

TON
(Theta-1)

[001] 10 4,6 × 5,7* Déparaffinage

Dans la description de leur système microporeux (colonne 3), chaque système de canaux équivalents est caracterisé par :
– la direction des canaux ;
– le nombre des atomes T : Al et Si (indiqué en gras) des ouvertures de canaux ;
– les diamètres cristallographiques libres des canaux (en Å).
– la dimensionnalité du système : 1, 2 ou 3 astérisques pour mono, bi ou tridimensionnel.

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Il convient de souligner que la plupart des procédés du raffinage tionnel Pt/H zéolithe sont présentées figure 2. Bien que cette réac-
traitent des charges complexes, nécessitant de multiples réactions, tion semble se produire en une étape apparente unique (seules
certaines exigeant une catalyse bifonctionnelle redox-acide, des traces des alcènes intermédiaires sont détectées), elle requiert
d’autres ne nécessitant qu’une catalyse monofonctionnelle acide 7 étapes successives :
ou métallique. Ainsi, les principaux composants des charges de – 3 étapes chimiques, deux d’entre elles catalysées par les sites
reformage des essences, ayant de 6 à 10 atomes de carbone, vont : métalliques (étapes 2 et 6), une par les sites acides protoniques
– pour les alcanes s’isomériser ou se déshydrocycliser par cata- (étape 4) ;
lyse bifonctionnelle ; – 4 étapes physiques, c’est-à-dire diffusion des molécules de
– pour les naphtènes se déshydrogéner en aromatiques par cata- n-C6 de la phase gaz vers les sites de Pt (étape 1), diffusion des
lyse métallique ;
n-hexènes (n -C6= ) des sites métalliques aux sites acides de la
ce qui répond dans les deux cas à l’objectif souhaité d’augmen-
zéolithe (étape 3), des méthylpentènes (MP=) des sites acides aux
tation de l’indice d’octane [6] [7] [8]. Des réactions secondaires
sites métalliques (étape 5) et des molécules de MP des sites métal-
sont également observées : hydrocraquage et formation de coke
liques à la phase gaz.
par catalyse bifonctionnelle, hydrogénolyse d’alcanes, naphtènes
et alkyl aromatiques par catalyse monofonctionnelle sur des Remarquons que si les étapes 3 et 5 se produisent au sein des
ensembles de sites métalliques contigus [9]. micropores de la zéolithe, les étapes 1 et 7 se produisent soit uni-
quement en phase gaz si le platine est localisé sur la surface des
cristallites de zéolithe, soit en phase gaz et dans les micropores si
1.2 Schéma d’un processus catalytique il est localisé à l’intérieur des cristallites. Les arguments en faveur
de ce schéma réactionnel tirés des références [9] [10] [11] [12] sont
bifonctionnel résumés dans le tableau 3, les principaux étant illustrés dans les
figures 3 [53].
Les diverses étapes impliquées dans l’isomérisation du
n-hexane (n-C6) en méthyl pentanes (MP) sur un catalyseur bifonc-

Phase gaz Sites Pt Micropores Site H+ Micropores Sites Pt Phase gaz

1 7
n – C6 n – C6 i – C6 i – C6
Diffusion Diffusion
+ H2 6
– H2 2

3 4 5
n – C 6= n – C 6= i – C 6= i – C 6=
Diffusion Diffusion

Figure 2 – Étapes chimiques (2, 4, 6) et physiques (1, 3, 5, et 7) de l’hydroisomérisation du n-hexane (n-C6) sur un catalyseur bifonctionnel
Pt/zéolithe

Tableau 3 – Confirmation expérimentale du schéma d’hydroisomérisation de n-alcanes


sur des catalyseurs bifonctionnels Pt/acide [53]

(1) Participation des sites hydrodéshydrogénants et des sites acides protoniques à la catalyse
– Effet de synergie : activité (A) de mélanges mécaniques de Pt/γ-Al2O3 + acide > somme des A des composants (figure 3a)
– Mise en évidence d’un effet des concentrations des sites hydro-déhydrogénants et des sites acides sur l’activité (figure 3b)
– Effet de poisons des sites métalliques (H2S) et des sites acides (NH3) sur l’activité (figure 3c)

(2) Intermédiaires oléfiniques


– Mise en évidence de traces de ces intermédiaires dans les produits de réaction (GC, MS)
– Vitesse très grande de réarrangement de ces intermédiaires

(3) Étapes de diffusion


– Effet positif de l’intimité entre sites hydro-déhydrogénants et sites acides sur l’activité

(4) Modélisation cinétique


– Vérification expérimentale de l’équation de vitesse tirée du schéma d’hydroisomérisation bifonctionnelle avec étape acide (isomérisation
des alcènes intermédiaires) cinétiquement limitante (figure 3d ) :

a (Pn −C6 /PH2 ) 1 b 1 PH2


v= → = +
1+ b (Pn −C6 /PH2 ) v a a Pn −C6

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Catalyse bifonctionnelle
Application en valorisation des alcanes
légers et en chimie fine

par Michel GUISNET


Professeur des universités
Catalyse en chimie organique, Poitiers, France
Centre for Biological and Chemical Engineering, Lisbonne, Portugal
Ludovic PINARD
Maître de conférences
Institut de chimie des milieux et matériaux de Poitiers (IC2MP)
École nationale supérieure d’ingénieurs de Poitiers (ENSIP), France
et Matteo GUIDOTTI
Chercheur
Conseil national des recherches
Institut de sciences et technologies moléculaires, Milan, Italie

1. Valorisation des alcanes légers C2-C4 par catalyse J 1 218 - 2


bifonctionelle.........................................................................................
2. Synthèse de composés fonctionnalisés à haute valeur
ajoutée (Chimie fine)............................................................................ — 12
3. Conclusion .............................................................................................. — 22
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. J 1 218

article [J 1 217] démontre le rôle essentiel que joue la catalyse bifonction-


L’ nelle redox- acide dans les grands procédés de conversion du raffinage
du pétrole et de la pétrochimie. Les catalyseurs utilisés comportent deux types
de sites actifs :
– des sites hydrodéshydrogénants provenant soit de métaux nobles Pt ou
Pd, soit de sulfures mixtes de métaux des groupes 6 (Mo ou W) et 8 (Co, Ni) ;
– des sites acides protoniques provenant d’oxydes inorganiques : alumines
chlorées, zéolithes acides et silice alumines.
Les schémas réactionnels des transformations bifonctionnelles d’hydrocar-
bures comportent de multiples étapes successives de catalyse sur les sites
hydrodéshydrogénants et protoniques et de transport des molécules de réac-
tifs, produits et intermédiaires réactionnels. En dépit de cette complexité, ces
transformations se produisent très rapidement et en une seule étape appa-
rente, les intermédiaires insaturés, thermodynamiquement très défavorisés,
n’apparaissant en effet que sous forme de traces dans les produits finaux. Par
ailleurs, l’optimisation des procédés (catalyseur et conditions opératoires)
permet d’orienter la sélectivité vers les produits souhaités tout en limitant la
désactivation des catalyseurs.
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Ces atouts peuvent être, et sont déjà partiellement valorisés en valorisation


des alcanes légers C1-C4 et en synthèse organique de produits à haute valeur
ajoutée (Chimie fine). Cet article [J1 218] fait le point sur les avancées réalisées
dans ces domaines, le choix de les traiter dans un article spécifique étant lié

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CATALYSE BIFONCTIONNELLE _________________________________________________________________________________________________________

aux limitations importantes imposées dans le développement de procédés


industriels par les particularités de la plupart des transformations souhaitées.
– La première, qui vaut aussi bien pour la valorisation des alcanes légers que
pour la Chimie fine est que les réactions de coupure de liaisons prépondé-
rantes dans les procédés du raffinage du pétrole et de la pétrochimie sont
naturellement supplantées par des réactions de condensation.
– La seconde, particulière à la Chimie fine tient à la très grande réactivité des
molécules de réactifs, intermédiaires et produits (désirés ou non) que leur
confèrent les groupements fonctionnels qu’elles présentent.

1. Valorisation des alcanes déshydrogénation de l’alcane, la seconde de catalyse acide, les


alcènes formés subissant une isomérisation squelettale ou alkylant
légers C2-C4 par catalyse un hydrocarbure aromatique [3].

bifonctionnelle § La troisième voie de valorisation des alcanes légers, leur aroma-


tisation, est originale par la nature particulière de la phase hydro-
déshydrogénante (§ 1.4.2) des catalyseurs bifonctionnels
Les alcanes légers (C2-C4), souvent associés au méthane dans le utilisés [3].
gaz naturel, sont aussi formés par craquage catalytique de coupes
pétrolières lourdes (FCC). Disponibles en grande quantité et donc Il est essentiel de noter que les deux dernières voies conduisent
très bon marché, ces alcanes sont très largement utilisés comme non seulement aux produits organiques désirés mais aussi à un
combustibles : éthane et propane comme fuel pour les raffineries, autre composé de grand intérêt, l’hydrogène, car très utilisé en raf-
propane seul ou en mélange avec le butane comme gaz de pétrole finage du pétrole.
liquéfié (LPG) [1] [2] [3]. Une partie des butanes est toutefois
incluse dans les essences mais les nouvelles réglementations
concernant leur pression de vapeur se sont traduites par une limi-
tation importante de leur teneur en C4 [4]. Par ailleurs, les alcanes 1.1 Hydroisomérisation du n-butane
légers servent aussi de charges de vapocraquage pour la
production d’alcènes légers, essentiellement éthylène et propène Comme l’hydroisomérisation des n-alcanes plus longs, celle du
utilisés pour la synthèse de polymères et de divers composés n-butane est exothermique, donc favorisée à basse température.
pétrochimiques. Toutefois, la concentration d’isomère branché dans le mélange des
De nouvelles voies permettant d’accéder en une seule étape à butanes en équilibre thermodynamique est plus faible que dans
des composés de haute valeur ajoutée ont été explorées au cours celui des alcanes à chaîne plus longue, ce que montre la figure 1
des dernières décennies. Ces voies qui s’appuient généralement [7] comparant les teneurs d’équilibre respectives en isobutane et
sur la catalyse bifonctionnelle redox-acide [3] sont classées en isopentane [6]. Des catalyseurs bifonctionnels très actifs (donc
trois catégories. d’acidité très forte), capables d’opérer à très basse température
doivent donc être choisis.
§ La première voie concerne l’hydroisomérisation du n-butane,
depuis longtemps mise en œuvre pour augmenter la disponibilité
en isobutane pour la production d’alkylats isobutane-butènes
d’indice d’octane élevé ou déshydrogéné en isobutène pour ses
diverses applications (production de polymères, de méthyl-tertio- 90
butyl-ether, etc.). Cette transformation bifonctionnelle présente la 85
même succession d’étapes chimiques et physiques que l’hydroiso-
Teneur en isoparaffine (% mol)

mérisation de n-alcanes plus lourds (cf. [J 1 217], figure 2) : 80


– trois étapes catalytiques : déshydrogénation du réactif, isomé- 75 Isopentane
risation squelettale des alcènes formés et hydrogénation des
isoalcènes en produit désiré ; 70
– quatre étapes de transport : diffusion des molécules de 65
n-butane de la phase gaz vers les sites redox, des n-butènes des
sites redox vers les sites acides, de l’isobutène des sites acides vers 60
les sites redox et de l’isobutane des sites redox vers la phase gaz. 55
Toutefois, le mécanisme de l’étape d’isomérisation est notable-
50
ment différent. Par ailleurs, une isomérisation par catalyse pure- Isobutane
ment acide accompagne souvent, voire remplace la transformation 45
bifonctionnelle [3] [5].
40
§ La seconde voie comprend : 75 125 175 225 275 325
– la déshydroisomérisation du n-butane ; Température (°C)
– la déshydroalkylation de benzène ou toluène par l’éthane ou le
propane ;
Figure 1 – Pourcentage d’isobutane et d’isopentane
deux transformations bifonctionnelles ayant la particularité de dans leur mélange d’équilibre thermodynamique avec les isomères
n’impliquer que deux réactions successives, la première de linéaires en fonction de la température [7]

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1.1.1 Schémas réactionnels CH3 -CH+3 -CH2 -CH3 formé avec production d’hydrogène ou par trans-
fert d’hydrure de cette molécule à un ion carbenium préexistant ;
Comme les n-alcanes plus longs, le n-butane peut s’isomériser à la – soit par protonation du butène résultant de la déshydro-
fois sur des catalyseurs purement acides tels que les zéolithes proto- génation du n-butane sur les sites métalliques des catalyseurs
niques, la zircone sulfatée (SZ), l’alumine fortement chlorée, etc. et bifonctionnels.
sur des catalyseurs bifonctionnels associant une phase hydro-
génante (généralement le platine) à ces mêmes solides acides. Cette Cette isomérisation squelettale étant par conséquent très lente, un
isomérisation présente toutefois la particularité d’être toujours processus bimoléculaire d’alkylation-isomérisation-craquage, plus
accompagnée d’une dismutation du butane avec formation de facile car n’impliquant que des ions carbenium secondaires et tertiai-
propane et pentanes [3] [6]. Cette particularité s’explique par la res prend sa place et cela quel que soit le type de catalyse, purement
formation d’un ion carbenium primaire (CH3 )2CHCH2+ , donc très acide ou bifonctionnelle. Les schémas bifonctionnels d’isomérisation
instable lors de l’isomérisation squelettale de l’ion carbenium secon- monomoléculaire et bimoléculaire sont présentés sur la figure 2.
daire CH-CH+-CH2-CH3 . L’ion carbenium secondaire est formé :
Le schéma réactionnel bimoléculaire d’isomérisation du
– soit par protonation d’une molécule de n-butane sur un site pro- n-butane a été démontré sur de nombreux catalyseurs acides
tonique très fort suivie de la décomposition de l’ion carbonium (HMOR, alumine chlorée, zircone sulfatée etc) et bifonctionnels

– H2 + H+ +
C—C—C—C C—C C—C C—C—C—C
+ +
C—C—C—C + C—C C—C C—C—C—C—C—C



C C
+
C—C—C—C—C—C


+ C C
C—C—C—C—C—C ~ CH3, H


C C +
C—C—C—C—C—C


C C
C
+ +


C—C—C—C—C—C C—C—C—C + C—C C

C C –H+
C—C C—C
+ +
C—C—C—C—C—C C—C—C + C C—C—C


C C –H+ C
C—C C
– H2 + H+ +
C—C—C—C C—C C—C C—C—C—C + H2
C—C C C—C—C
H+
C C + H2
+ — + C—C C—C C—C—C—C

C—C—C—C C—C—C C—C—C


+ H2
C C C C C—C—C C—C—C—C
– H+ + H2

+
C—C—C C—C C C—C—C C C

a isomérisation monomoléculaire b isomérisation bimoléculaire en absence d’isobutène

C
— —

+
C—C—C—C—C

C C
~ CH3, H
C—C C—C

+ C
C—C—C
— —

+

C—C—C—C—C
C ~ H saut d’hydrure

C C ~ CH3 saut de méthyle

C

C—C C

c isomérisation bimoléculaire en présence d’isobutène ou de cation terbutyle

Figure 2 – Schémas bifonctionnels de l’isomérisation monomoléculaire et bimoléculaire du n-butane en absence et en présence d’isobutène

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(Pt/zéolithes, Pt/alumine chlorée, Pt/zircone sulfatée, etc.) par la for- celle-ci comportant souvent deux réacteurs successifs, le premier
mation simultanée d’isobutane et d’un mélange équimolaire (au opérant à température élevée pour approcher rapidement
moins à faible conversion) de propane et pentanes [5] [7] [8]. l’équilibre thermodynamique, le second à température plus basse
D’autres observations confirment ce mécanisme : pour compléter l’isomérisation dans des conditions thermodyna-
– ordre en n-butane généralement supérieur à 1, parfois égal à 2 miquement plus favorables [5].
pour l’isomérisation [7] ;
– composition des produits résultant de la transformation
d’espèces marquées au carbone 13 (n-butane 13C-1 [9] ou double-
1.2 Transformation d’alcanes légers
ment marqué sur les carbones 1 et 4 [10]). par un processus successif
Avec ce mécanisme bimoléculaire, la sélectivité en isobutane de réactions de déshydrogénation
dépend de la conversion du n-butane, la formation initiale d’ions et de catalyse acide
carbenium intermédiaires en C8 par réaction entre un ion car-
benium et un alcène à squelette n-C4 (figure 2b) étant peu à peu 1.2.1 Déshydroisomérisation du n-butane
remplacée par des réactions plus faciles entre molécules de n -C =4
et i -C =4 avec formation d’ions carbenium en C8 de grande réactivité Comme l’hydroisomérisation des n-alcanes plus longs, la déshy-
(figure 2c). La présence d’hydrogène et son activation par des droisomérisation du n-butane (n-C4) en isobutène (i -C =4 ) implique
sites métalliques qui réduisent la teneur en oléfines dans le milieu deux types de réactions :
réactionnel provoquent une diminution de l’activité mais ont un – déshydrogénation, généralement sur le platine ;
effet bénéfique à la fois sur la sélectivité en isobutane et la stabilité – isomérisation squelettale des n-butènes (n -C =4 ) sur des sites
des catalyseurs [5]. Ces effets sont respectivement expliqués par acides protoniques.
une inhibition du processus bimoléculaire, le processus monomo-
léculaire étant moins affecté, et par une réduction de la formation Toutefois, le schéma réactionnel bifonctionnel est beaucoup
de butadiène, donc de coke. plus simple, n’impliquant qu’une seule fois ces deux réactions et
non la succession de nombreuses étapes réversibles d’hydrodés-
hydrogénation et isomérisation impliquée dans l’hydroisomérisa-
Les zéolithes, des aluminosilicates cristallisés microporeux, tion bifonctionnelle des n-alcanes [J 1 217]. Si deux chemins
sont les composants acides de très nombreux catalyseurs réactionnels sont théoriquement possibles, celui qui implique suc-
bifonctionnels utilisés industriellement. Le tableau 2 de cessivement la déshydrogénation du n-butane et l’isomérisation
[J 1 217] présente la structure poreuse des zéolithes, les plus des n-butènes par catalyse acide est très largement favorisée ; la
couramment utilisées : BEA, FAU, MOR, MFI, etc. déshydrogénation du n-butane est en effet beaucoup plus rapide
que la première étape du second chemin potentiel, son isomérisa-
tion par catalyse acide.
1.1.2 Comparaison des catalyseurs bifonctionnels Le schéma réactionnel simple de la déshydroisomérisation du
n-butane :

Les catalyseurs les plus étudiés se classent dans l’ordre sui- Déshydrogénation Isomérisation
vant d’activité décroissante (ou de température d’utilisation n-C4 ← 

  → n-C= ←
4


  → i -C=
4
n-butane n-butène isobutène
croissante) :
suggère que cette transformation peut non seulement être mise en
Pt/Al2O3 chlorée > Pt/zircone sulfatée (SZ) > Pt /HMOR œuvre sur un catalyseur bifonctionnel mais aussi sur des lits suc-
cessifs de catalyseurs déshydrogénant et acide. L’intérêt de ce sys-
tème de lits successifs est lié à la possibilité de choisir des
La grande activité de SZ (assez proche de celle de l’alumine chlo- catalyseurs et des conditions optimaux pour les deux réactions
rée) a d’abord été attribuée à une superacidité de ses sites désirées : déshydrogénation du n-butane (premier lit) et isomérisa-
protoniques [11] [12], superacidité infirmée par la suite [13] [14] [15] tion squelettale des n-butènes (second lit).
[16] : les sites protoniques de SZ ne sont pas superacides comme
ceux de l’alumine fortement chlorée mais seulement de force voi-
sine de ceux des zéolithes. Cette activité élevée ne peut donc prove- Ces réacteurs à double lit ont été expérimentés par Bellussi et
nir, comme sur l’alumine chlorée, d’une initiation de l’isomérisation al. (cf. brevet en [Doc. J 1 218]), avec un premier lit constitué de
par protonation du n-butane mais d’un autre mode d’initiation, Pt/alumine sylilée promu par In et Sn et un second lit constitué d’une
démontré [17] comme étant la déshydrogénation oxydante de boralite, et par Pirngruber et al. [19], avec des lits successifs de
molécules de butane physisorbées sur des espèces soufrées : Pt/HMFI et d’une zéolithe HMWW (H-MCM-22). Ce dernier système
s’est révélé respectivement plus actif et plus sélectif ou plus stable
que les catalyseurs bifonctionnels Pt/HMFI et Pt/HMWW.
CH3 -CH2 -CH2 -CH3 + SO 3 ( CH3 -CH —
— CH-CH3 + SO 2 + H2O
La première étape de la déshydroisomérisation du n-butane
(déshydrogénation) est fortement endothermique, donc thermo-
Notons que si pour l’isomérisation des essences légères C5-C6, dynamiquement favorisée à température élevée, la seconde (iso-
un procédé commercial (Par-isom) utilisant le catalyseur Pt/SZ est mérisation squelettale des n-butènes) étant légèrement
maintenant opérationnel [18], seul le Pt/alumine chlorée est utilisé exothermique [19], donc favorisée à basse température :
industriellement pour l’isomérisation du n-butane [5]. Sa grande
activité, donc la possibilité d’être mis en œuvre dans des 0 = + 131 kJ/mol
n -C 4H10 ( n -C 4H8 + H2 ∆H 298
conditions de température thermodynamiquement plus favorables,
compense en effet sa grande sensibilité à l’eau et aux n -C 4H8 ( i -C 4H8 0 = − 16,1 kJ/mol
∆H 298
contaminants soufrés et azotés et la nécessité d’un appoint continu
de chlore. Les conditions opératoires typiques sont : température Pour choisir les conditions opératoires optimales, une réaction
entre 160 et 200 °C, pression de 15 à 20 bar, rapport H2/butane endothermique supplémentaire, la déshydrogénation des
entre 0,5 et 2, les faibles valeurs de ce rapport constituant le n-butènes en butadiène, précurseur du coke bien connu, doit
meilleur compromis pour limiter la formation de coke sans trop nécessairement être considérée [19] [20]. Pour minimiser sa forma-
affecter l’activité isomérisante. Pour optimiser l’opération, un déi- tion donc la désactivation des catalyseurs, la déshydroisomérisa-
sobutaniseur est généralement associé à l’unité d’isomérisation, tion du n-butane est mise en œuvre en présence d’hydrogène et à

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En addition aux n-butènes (qui sont les produits primaires pré-


pondérants) et à l’isobutène désiré, de nombreux autres produits
50 =
n-C 4 sont formés : méthane, éthylène, éthane, isobutane, propène,
45 propane et pentènes, ces trois derniers étant majoritaires. Le prop-
pène (C =3 ) et les pentènes (C5= ) résultent essentiellement du proces-
40 sus d’alkylation-isomérisation-craquage du n-butène, processus
qui conduit simultanément à l’isobutène (figure 2b).
35
= Bien que le propane provienne de l’hydrogénation du propène,
Rendement (%)

i -C 4 le rapport C =3 /C5= est supérieur à l’unité, ce qui suggère que :


30
– soit ce processus implique la condensation de plus de
25 2 molécules de butènes ;
– soit plus probablement que les pentènes initialement formés
20
subissent des transformations secondaires rapides telles que :
15 ==
C4
C5= + C =4 ( C9= ( C =3 + C6= ( 3 C =3
10
Notons qu’à la température élevée de la réaction, les intermé-
5 diaires oléfiniques C8= et C9= étant thermodynamiquement très
défavorisés ne peuvent être observés dans les produits de réac-
0
400 500 600 700 800 tion. Par ailleurs, le méthane, l’éthane et une petite partie du
propane résultent essentiellement de l’hydrogénolyse du n-butane
Température (°C) sur le Pt et pour une très faible part de son craquage protolytique.
= = ==
n-C 4 : n-butènes i -C 4 : isobutène C 4 : butadiène
1.2.3 Effet des caractéristiques des catalyseurs
Conditions opératoires : et des conditions opératoires
pression de 1,8 bar,
composition molaire de l’alimentation : 10 % de n-butane, L’analyse des travaux réalisés à 560 °C sur une série de cataly-
20 % d’H2 et 70 % de N2 seurs Pt/HMFI [20] [21] montre que la balance entre leurs fonctions
hydrodéshydrogénante et acide joue un rôle déterminant en dés-
hydroisomérisation du n-C4 : la conversion du n-C4 et le rende-
Figure 3 – Équilibre lors de la déshydrogénation du n-butane en ment en isobutène augmentent avec le rapport CPt /CH+ des
n-butènes, isobutène et butadiène en fonction de la température [21] concentrations de leurs sites hydrodéshydrogénants et acides
protoniques accessibles tandis que celui en produits non désirés
diminue.
température relativement basse : inférieure à 530 °C dans les
conditions opératoires de la figure 3 [21].
Le rendement le plus élevé en isobutène est obtenu sur un cataly-
seur de rapport CPt / CH+ élevé (0,34) avec 0,5 % en masse de platine
1.2.2 Schéma réactionnel bien dispersé sur une zéolithe de rapport Si/Al élevé (240) donc de
concentration en sites acides très faible. Ce rendement (12,5 %) est
Un schéma réactionnel détaillé de la déshydroisomérisation du toutefois bien loin de la limite thermodynamique (22 %), ce qui
n-butane (figure 4) [3] a été établi dans les conditions opératoires s’explique par une formation importante de propène et pentènes [20].
suivantes :
Pour limiter cette formation, d’autres zéolithes protoniques
T = 550 ° C, PH 2 = 0, 36 bar et PnC 4 = 0,18 bar connues pour être plus sélectives en isomérisation squelettale des
n-butènes ont été substituées à la zéolithe HMFI : HFER, HTON [22],
sur une série de catalyseurs bifonctionnels Pt/HMFI : teneur massi- HMWW [18]. Les catalyseurs Pt/HFER et Pt/HTON se révèlent
que en Pt de 0,1 à 0,5 %, zéolithe de rapport Si/Al élevé, donc de fai- cependant moins sélectifs que Pt/HMFI. Cette observation inatten-
ble concentration en sites acides [20]. due s’explique par une réaction secondaire d’hydrogénolyse très

=
Pt + H2, H
C 1 + C3
= C2= C2
C 2 + C2 H+
,C
P C3= C3
H+, PD
= =
n-C4 n- C4= H+, Ol C8-C12 H+, Cr
i - C4= i-C4
oligomères

Pt, DH
yd C5= C5
,H
H2
Pt+
C1,C2,C3
C6= C6

CP : craquage protolytique Ol : oligomérisation DH : déshydrogénation Hyd : hydrogénolyse


PD : déshydrogénation protolytique Cr : craquage H : hydrogénation

Figure 4 – Schéma réactionnel de la déhydroisomérisation du n-butane sur un catalyseur bifonctionnel Pt/HMFI [3]

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importante liée à la localisation sur leur surface externe d’une La déshydroalkylation présente les mêmes attraits que la déshy-
grande partie du Pt sous la forme de larges cristallites. Par ailleurs, droisomérisation du n-butane :
si le catalyseur Pt/HMWW est beaucoup moins hydrogénolysant – elle permet d’économiser l’étape de production des alcènes
que Pt/HFER et Pt/HTON, il est beaucoup plus sensible à la désacti- par vapocraquage, peu sélective, énergétiquement intensive et
vation par le coke [19]. productrice de larges quantités de CO2 ;
Notons que la substitution du platine par un composé – de l’hydrogène qui joue un rôle clé en raffinage est coproduit.
bimétallique tel que Pt-Cu [23] [24], Pt-In ou Pt-Sn [24] permet de De plus, les alkyaromatiques étant liquides, leur transport est
limiter notablement l’importance de l’hydrogénolyse, réaction dite bien plus facile, moins dangereux et moins coûteux que celui des
« exigeante » car demandant pour sa catalyse l’intervention de plu- alcanes gazeux ; la mise en place de l’alkylation sur le site de pro-
sieurs sites métalliques adjacents [25]. La dilution de Pt par un duction des alcanes légers est donc particulièrement
second métal provoque donc son inhibition sans affecter notable- bénéfique [27], d’autant qu’elle évite leur élimination partielle par
ment les réactions non exigeantes de déshydrohydrogénation. torchage.

1.2.4 État des lieux et perspectives


Les travaux les plus complets concernent la déshydroalkyla-
Les travaux réalisés en déshydroisomérisation du n-butane sur tion du benzène ou du toluène par l’éthane sur des catalyseurs
des catalyseurs bifonctionnels Pt/zéolithes ont permis de confirmer Pt/HMFI [27] [29] [30] [31] ou Pd/HMFI [28] [32] [33].
le schéma réactionnel proposé, comportant successivement des
étapes de déshydrogénation du n-butane sur le platine et d’isomé-
Le choix de cette zéolithe étant lié à sa large utilisation dans les
risation squelettale des n-butènes sur les sites acides protoniques
procédés commerciaux d’alkylation du benzène et du toluène par
via un mécanisme bimoléculaire. Dans les conditions de tempéra-
l’éthylène. Les première et deuxième étapes de ces transforma-
ture élevée imposées par la thermodynamique de la déshydrogé-
tions sont respectivement fortement endo et exothermiques, le
nation du n-butane, trois réactions secondaires importantes sont
processus complet étant légèrement endothermique. Les valeurs
observées :
d’enthalpies de ces diverses transformations sont données
– l’hydrogénolyse du n-butane sur des ensembles d’atomes de ci-après pour la déshydroéthylation du benzène [27] :
Pt ;
– le craquage en propène et pentènes des intermédiaires
dimères de l’isomérisation ; C2H6 C2H4 + H2 0 = 136,4 kJ/mol
∆H298
– l’hydrogénation partielle de l’isobutène.
Par ailleurs, à température élevée, la déshydrogénation du
butène en butadiène est thermodynamiquement favorisée, ce pré-
+ C2H4 0 = – 113,8 kJ/mol
curseur de coke provoquant une désactivation rapide des cataly- ∆H298
seurs. Si l’hydrogénolyse peut être limitée par substitution du Pt
par un composé bimétallique, il paraît plus difficile de réduire
l’importance des autres réactions secondaires en opérant avec un
catalyseur bifonctionnel unique. Un système de deux lits succes- 0 = + 22,6 kJ/mol
sifs de catalyseurs très actifs et sélectifs, opérant dans des + C2H6 + H2 ∆H298
conditions optimisées, le premier pour la déshydrogénation du
n-butane et le second pour l’isomérisation squelettale du n-butène,
devrait permettre de dépasser ces limitations. La mise en œuvre
de la déshydroisomérisation du n-butane dans un réacteur à mem- Les conditions standard d’étude de ces déshydroalkylations
brane sélective en hydrogène est une autre stratégie prometteuse, sont relativement similaires : réacteur à lit fixe opérant à pres-
cette combinaison en une seule unité de la production d’isobutène sion atmosphérique, températures relativement basses : 370
et de la séparation du coproduit valorisable qu’est l’hydrogène se et 350 °C, rapport molaire éthane/aromatique de 9 et 4 pour
traduisant en effet par une meilleure économie du procédé. Qui les alkylations respectives du benzène et du toluène.
plus est, l’élimination de l’hydrogène du milieu réactionnel se tra-
duit par un déplacement de l’équilibre de déshydrogénation du
n-butane vers des teneurs plus élevées en n-butènes, donc par une Dans ces conditions, la conversion d’équilibre de l’éthane en
production plus importante d’isobutène [26]. éthylène est faible (environ 0,5 % en déshydroalkylation du ben-
zène), ce qui permet de limiter les transformations bimoléculaires
des alcènes, connues pour être à l’origine de la formation d’alkyl-
1.3 Déshydroalkylation d’aromatiques benzènes indésirables et de produits polyaromatiques (coke) res-
ponsables de la désactivation des catalyseurs [29].
par l’éthane ou le propane
Cette transformation s’appuie sur le même concept que la déshy- 1.3.1 Schéma réactionnel
droisomérisation du n-butane en isobutène : les alcanes, trop peu
réactifs en catalyse acide sont déshydrogénés en alcènes suffisam- L’effet du temps de contact sur l’éthylation du benzène et du
ment réactifs pour conduire à des produits de haute valeur ajoutée. toluène, déterminé dans les conditions standard, a permis d’établir
Toutefois, les molécules d’alcènes intermédiaires ne réagissent plus le schéma réactionnel (figure 5).
entre elles mais avec d’autres molécules organiques (benzène, Les résultats obtenus en éthylation du benzène sur un catalyseur
toluène, etc.). Les applications des produits formés : éthylbenzène, Pt/HMFI d’acidité élevée [30] sont détaillés ci-après à titre
éthyltoluène, cumène, etc., sont nombreuses et variées. d’exemple.
– À de faibles temps de contact (< 0,05 h), la désactivation du
catalyseur est négligeable et les principaux produits formés sont
Ainsi, plus de 90 % de l’éthylbenzène est transformé en sty-
l’hydrogène, l’éthylène et l’éthylbenzène (EB) ; d’autres produits
rène qui par polymérisation conduit au polystyrène
(propène, propane, diéthylbenzènes et propylbenzène) apparaissent
(~ 23 millions t/an), les 10 % restants servant pour la produc-
également mais sous forme de traces. Ces derniers produits qui
tion d’acétophénone, d’éthyl anthraquinones, etc. [27].
ne sont pas présents à des temps de contact proches de zéro

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Traitement des essences


aromatiques pour la pétrochimie

par Emmanuelle GUILLON


Ingénieur INSA
Docteur de l’université Pierre et Marie Curie
Ingénieur de recherches à l’IFP Énergies nouvelles
et Philibert LEFLAIVE
Ingénieur ENSI Chimie Strasbourg
Docteur de l’université de Poitiers
Chef de Projet Séparation des aromatiques à l’IFP Énergies nouvelles

1. « Complexe aromatique » ...................................................................... J 5 920v2 - 2


1.1 Contexte....................................................................................................... — 2
1.2 Sources d’aromatiques............................................................................... — 2
1.3 Produits cibles et leur valorisation ............................................................ — 3
1.4 Description du complexe aromatique ....................................................... — 3
2. Procédés de séparation .......................................................................... — 5
2.1 Types de séparation employés au sein du complexe aromatique ......... — 5
2.2 Procédés d’extraction des aromatiques .................................................... — 5
2.3 Séparation et purification des isomères de la coupe C8-aromatiques
autres que le paraxylène ............................................................................ — 8
2.4 Séparation du paraxylène des isomères de la coupe
C8-aromatiques ........................................................................................... — 9
3. Procédés de conversion ......................................................................... — 12
3.1 Hydrodésalkylation ..................................................................................... — 13
3.2 Isomérisation des aromatiques en C8 ....................................................... — 13
3.3 Dismutation/transalkylation du toluène .................................................... — 15
4. Principales améliorations récentes ..................................................... — 16
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 920v2
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@RPQQ@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

es hydrocarbures aromatiques, en particulier le benzène, le toluène et les


L xylènes, sont des grands intermédiaires en pétrochimie, pour la synthèse
de résines, de plastifiants et de fibres polyester.
La production de ces produits aromatiques est réalisée au sein d’un
complexe industriel nommé « complexe aromatique », à partir d’essences aro-
matiques provenant d’unités de raffinerie (reformage catalytique ou
vapocraquage). Ce complexe pétrochimique regroupe des unités d’extraction
et de purification des produits aromatiques à très haute pureté (> 98 %), mais
également des unités de conversion catalytique, afin d’obtenir les molécules
cibles en adéquation avec les besoins du marché pétrochimique.
Dans ce dossier, on propose de décrire les différentes étapes de traitement
des essences aromatiques au sein du complexe aromatique ainsi que les tech-
nologies mises en œuvre.

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TRAITEMENT DES ESSENCES AROMATIQUES POUR LA PÉTROCHIMIE _________________________________________________________________________

1. « Complexe aromatique » Tableau 1 – Compositions massiques moyennes


des essences aromatiques issues du reformage
catalytique haute sévérité et du vapocraquage
1.1 Contexte
Les aromatiques sont une famille d’hydrocarbures présents dans Essence
Aromatique Reformat
les pétroles bruts, particulièrement importante dans le monde de de pyrolyse
la pétrochimie. Ils sont notamment à la base de la fabrication d’un
grand nombre de matériaux synthétiques modernes. Les intermé- Benzène 25,6 % 41,5 %
diaires aromatiques les plus recherchés sont le benzène, le toluène
et le paraxylène (BTX) (figure 1). Ces composés doivent répondre Toluène 23,1 % 19,1 %
à la demande en matières premières aromatiques de l’industrie
pétrochimique. Les hydrocarbures aromatiques sont obtenus prin- Éthylbenzène (EB) 4,6 % 7,9 %
cipalement par les procédés de reformage catalytique ou vapocra-
quage, qui fournissent une « essence aromatique ». Cette dernière Paraxylène (pX) 5,1 % 1,6 %
étant obtenue dans des proportions non adaptées à la demande, il
est alors nécessaire de procéder à des transformations Métaxylène (mX) 11,5 % 3,6 %
complémentaires. C’est le rôle du complexe aromatique, à l’inter-
face entre le raffinage (source d’hydrocarbures aromatiques) et la Orthoxylène (oX) 6,6 % 2,1 %
pétrochimie (production sélective des hydrocarbures aromatiques).
Le complexe aromatique est d’ailleurs très souvent localisé sur les Aromatiques en C9+ 17,4 % 17,6 %
mêmes sites industriels que les raffineries.
Non aromatiques 6,3 % 6,5 %

1.2 Sources d’aromatiques


Les aromatiques, et en particulier le benzène et le toluène,
La répartition en 2008 des différentes sources d’aromatiques
peuvent également avoir une origine non pétrolière et provenir du
pour les besoins de la chimie était la suivante :
charbon. L’hydroraffinage catalytique (élimination des composés
– 72 % issus du procédé de reforming ; soufrés, oxygénés et azotés) des benzols issus de la transforma-
– 24 % issus des essences de pyrolyse (vapocraquage) ; tion de houille en coke permet d’obtenir une coupe riche en ben-
– 4 % issus du charbon. zène et en toluène que l’on peut ensuite séparer. En raison de leur
La principale source de production de BTX est le reformage cata- faible contribution à la production des aromatiques (quelques %)
lytique qui est utilisé par les raffineurs pour améliorer l’indice ainsi que du traitement spécifique de ce type de coupes, les ben-
d’octane de l’essence par fabrication d’aromatiques. Ce procédé zols de cokerie ne sont pas considérés dans ce dossier.
produit une coupe riche en hydrocarbures aromatiques appelée Dans le tableau 1, on constate que les deux principales sources
reformat à partir duquel on peut extraire puis séparer les aroma- d’aromatiques ont des compositions très différentes, de sorte que
tiques. La teneur en aromatiques d’un reformat varie selon la selon les besoins du marché, l’une ou l’autre sera employée. S’il
composition de la charge appelée naphta ainsi que selon la sévérité convient de produire essentiellement du benzène, l’essence de
du procédé de reformage. Le reformage catalytique à haute sévérité pyrolyse est en principe mieux adaptée ; si au contraire, on
(tel le procédé Aromizing d’Axens) est nettement préféré au refor- recherche les xylènes, l’utilisation d’un reformat est nettement
mage catalytique à basse sévérité qui fournit une essence contenant préférable.
une plus grande quantité de composés non aromatiques.
La fraction constituée des xylènes et de l’éthylbenzène est dési-
La deuxième source d’aromatiques est l’essence de pyrolyse
gnée comme la coupe C8-aromatiques (coupe hydrocarbonée
issue du vapocraquage de naphtas ou de gazoles. Le vapocra-
constituée de molécules aromatiques à huit atomes de carbone).
quage, dont le rôle principal est la production d’oléfines courtes
telles que l’éthylène et le propylène, produit en effet généralement
également une fraction plus lourde dont l’intervalle de distillation
est proche de celui d’une essence, fraction appelée essence de La production respective de benzène et de xylènes peut
pyrolyse. Cette essence est riche en BTX et plus particulièrement également être ajustée via la transformation du toluène en
en benzène. Cette fraction doit être stabilisée par hydrogénations ces deux composés par dismutation ou transalkylation (cf.
sélectives des dioléfines avant son utilisation au sein du complexe § 3), le toluène étant nettement moins recherché que les deux
aromatique. précédents.

Benzène (C6)

Xylènes (C8)
1
Toluène (C7) 6 2
5 3
4
1,2-diméthylbenzène 1,3-diméthylbenzène 1,4-diméthylbenzène
(orthoxylène) (métaxylène) (paraxylène)
Éthylbenzène (C8)

Figure 1 – BTX (Benzène, Toluène, Xylènes)

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_________________________________________________________________________ TRAITEMENT DES ESSENCES AROMATIQUES POUR LA PÉTROCHIMIE

Aniline Polyuréthanes
Nylon 6 Caprolactame Polystyrène
Nitro Autres 7 %
Nylon 66 Acide adipique
benzène
8% Styrène
Vapo
craquage Cycloh
hexane
2008 12
2% ÉthylBenzène
Production 53 %
Autres
21 %
53 %
Benzène Cumène
(40 %) 20 %
47 %
Diisocyanate
Phénol (polyuréthanne)
Résines
25 % (acétone) 6%
Toluène
(20 %)
75 % Carburants, mX, EB
3% Solvant
oX 13 %
4% 9%
Xylènes Solvants
(40 %) 4% Dismutation
96 % Hydrodésalkylation
60 %
Anhydride
phtalique
Résines
Films
PET
7 % Divers Benzène
14 % 6% Plastifiants Xylènes
Reformage
catalytique
Polyéthylènenaphtalate
PTA (93 %) pX
DMT (7 %) 84 % Résines
Fibres Autres (< 1 %) rigides
Pourcentages massiques 73 %

Figure 2 – Principaux débouchés des produits aromatiques BTX

1.3 Produits cibles et leur valorisation lement consommés sous forme de pX. Ce dernier, par l’intermé-
diaire du diméthyltéréphtalate (DMT) et surtout de l’acide
Les produits aromatiques sont caractérisés par l’existence d’un téréphtalique pur (PTA) obtenu par oxydation du pX, est à l’origine
noyau benzénique dans leur molécule. Ce noyau est d’une grande des fibres polyesters utilisés pour les vêtements et les résines et
stabilité, ce qui explique qu’à la différence des oléfines, les aroma- films de polyéthylène-téréphtalate (PET).
tiques existent dans le pétrole brut. Les principaux aromatiques L’orthoxylène, présent dans la coupe C8-aromatiques en quan-
cibles dans le complexe aromatique sont le benzène, le toluène et tité voisine de celle du pX, constitue également un isomère relati-
les trois isomères des xylènes (ortho-, méta- et para-). vement recherché (9 %) car il conduit à l’anhydride phtalique,
À titre d’exemple, la production mondiale de benzène en 2008 est matière de base pour l’obtention de plastifiants.
estimée à 39,7 millions de tonnes, celle de toluène de 19,7 millions Le métaxylène constitue l’isomère majoritaire de la coupe
de tonnes et 39,2 millions de tonnes pour les xylènes dont 33,0 de C8-aromatiques (≈ 40 %), mais il est de bien moindre intérêt. Il est
paraxylène et 3,6 d’orthoxylène. donc préférentiellement transformé par isomérisation catalytique.

Les utilisations principales des aromatiques BTX sont décrites Enfin, l’éthylbenzène présent dans la coupe C8-aromatiques ne
sera qu’exceptionnellement produit au sein du complexe aroma-
figure 2.
tique (97 % de l’éthylbenzène est produit par alkylation du ben-
Les principaux débouchés du benzène sont : zène) et est converti dans l’unité d’isomérisation, soit en benzène
– l’éthylbenzène (53 %) par alkylation du benzène par l’éthylène, par désalkylation lorsque ce produit est recherché, soit en xylènes
vers une utilisation en styrène après déshydrogénation ; par isomérisation pour maximiser le rendement en paraxylène.
– le cumène (20 %) par alkylation du benzène avec le propylène, Le taux d’accroissement annuel des aromatiques est d’environ
qui par oxydation fournira le phénol et l’acétone ; 4 %/an. Le paraxylène a cependant un taux supérieur d’accrois-
– le cyclohexane (12 %) obtenu par hydrogénation du benzène ; sement d’environ 5-6 %/an.
– le nitrobenzène.
Concernant le toluène, ses principales valorisations sont le ben-
zène par hydrodésalkylation ou dismutation et les xylènes (par dis- 1.4 Description du complexe aromatique
mutation ou transalkylation avec des aromatiques à plus de huit
Les produits pétrochimiques sont des produits de haute pureté
atomes de carbone AC9+) (60 %). (pureté requise de 98 % à 99,7 % en masse selon le produit
Bien que présent en quantité minoritaire (≈ 20 %) dans la coupe considéré) qui vont nécessiter l’utilisation d’unités de purification
C8-aromatiques, le paraxylène (pX) connaît les applications les sophistiquées. De même, les quantités d’aromatiques présentes
plus importantes puisque plus de 80 % des xylènes sont fina- dans les essences aromatiques ne correspondent pas aux quantités

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TRAITEMENT DES ESSENCES AROMATIQUES POUR LA PÉTROCHIMIE _________________________________________________________________________

1 Raffinat
2 Benzène

Extraction Hydrodésalkylation
Essence d’aromatiques Toluène
C7 –
de pyrolyse

Hydrogénation
Dismutation
sélective
Transalkylation 5
Toluène/AC9+
Hydrotraitement Reformage
Paraxylène
H2 C8
Extraction Isomérisation
C8 + du paraxylène des xylènes
Naphtas
AC9 + AC10

Boucle C8-aromatiques

Aromatiques
lourds AC10 +
4 C9 +

Figure 3 – Schéma de base des traitements des aromatiques en C8 (complexe aromatique)

demandées par le marché, notamment concernant le benzène et le


paraxylène. Il faut donc prévoir des unités de séparation et de trans- Tableau 2 – Compositions massiques moyennes
formation, qui constituent le complexe aromatique. de coupes C8-aromatiques
La figure 3 présente l’ensemble du complexe aromatique,
Extrait d’essence Extrait
c’est-à-dire l’ensemble des étapes de séparation, purification et Composé
de pyrolyse de reformats
conversion en vue de la production de BTX à partir d’essences
aromatiques.
Non aromatiques ............................... traces
Ce complexe comprend cinq étapes principales.
1 – La génération d’une essence aromatique par reformage Toluène traces traces
catalytique de naphta et/ou par hydrogénations sélectives des
essences de pyrolyse. Éthylbenzène (EB) 52 17
2 – Une séparation des coupes C7– /C8+ par distillation, afin Paraxylène (pX) 11 19
d’obtenir une coupe contenant essentiellement des composés à six
ou sept atomes de carbone dont le benzène et le toluène et une Métaxylène (mX) 23 47
coupe C8-aromatiques, qui sont ensuite traitées séparément. Après
séparation du benzène et du toluène, les coupes C8-aromatiques Orthoxylène (oX) 14 17
riches en C8 ont la composition moyenne donnée dans le tableau 2.
Aromatiques en C9+ ............................... traces
3 – Une étape d’extraction des aromatiques de la coupe légère,
suivie de la production du benzène et du toluène par fraction-
nement. Cette étape d’extraction permet également l’élimination
(au raffinat) des composés non aromatiques du complexe. Dans le amoindrie (conversion de l’éthylbenzène), et d’où il faut à nouveau
cas où l’on souhaite maximiser la production de benzène, une séparer les produits recherchés, c’est-à-dire le paraxylène. Ce
conversion du toluène en benzène par hydrodésalkylation est mélange est à nouveau envoyé dans l’unité d’extraction du
possible. paraxylène. On crée de cette manière une véritable « boucle
C8-aromatiques » qui permet en définitive d’épuiser la totalité des
4 – Une étape de valorisation des xylènes essentiellement en isomères non recherchés ou, le cas échéant, d’effectuer un souti-
paraxylène, selon un procédé dit de « boucle C8-aromatiques », rage de C8 en mélange, pour des usages déterminés.
incluant des étapes de séparation (élimination des composés 5 – Afin d’augmenter l’offre en paraxylène d’un complexe aro-
lourds dans la « colonne des xylènes », extraction du paraxylène)
et d’isomérisation des xylènes. En général, l’isomère paraxylène matique, la valorisation du toluène et/ou de la coupe C9+ -aroma-
est obtenu par adsorption sélective sur tamis moléculaire. Le raffi- tiques (composés aromatiques lourds à 9 atomes de carbones et
nat, riche en métaxylène (mX), orthoxylène (oX) et éthylbenzène plus, par exemple éthylméthylbenzène, triméthylbenzène, méthyl-
(EB), est ensuite traité dans une unité d’isomérisation catalytique propylbenzène) au sein d’unités de dismutation et/ou de
qui redonne un mélange d’aromatiques en C8 , dans lequel la pro- transalkylation est réalisée.
portion des xylènes (ortho-, métal- et paraxylène) est pratiquement L’ensemble des étapes de séparation et de conversion est traité
celle de l’équilibre thermodynamique et la quantité d’éthylbenzène respectivement dans les paragraphes 2 et 3.

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Extraction de produits aromatiques


des goudrons de houille

par Constantin GOSSELIN


Ingénieur de l’École nationale supérieure de chimie de Lille
Chef d’établissement de la société HGD (Huiles, Goudrons et Dérivés)

1. Obtention et composition des goudrons .......................................... J 5 925 - 2


1.1 Goudrons de haute température................................................................ — 2
1.2 Goudrons de basse température................................................................ — 2
1.3 Goudrons issus de la gazéification du charbon ........................................ — 2
1.4 Composition du goudron de houille .......................................................... — 2
2. Traitement industriel des goudrons de houille................................ — 3
3. Techniques utilisées ................................................................................ — 3
3.1 Procédé discontinu ...................................................................................... — 3
3.2 Procédés continus ....................................................................................... — 3
4. Productions et applications .................................................................. — 5
4.1 Benzol ........................................................................................................... — 5
4.2 Composés hydroxylés (phénols) ................................................................ — 6
4.3 Naphtalène ................................................................................................... — 6
4.4 Méthylnaphtalènes ...................................................................................... — 7
4.5 Pyridines (bases pyridiques)....................................................................... — 8
4.6 Huile acénaphtène ou huile de lavage....................................................... — 8
4.7 Huile anthracénique .................................................................................... — 8
4.8 Huile chrysène.............................................................................................. — 9
4.9 Brai................................................................................................................ — 9
5. Données relatives à la sécurité et à l’environnement ................... — 10
5.1 Toxicité par ingestion .................................................................................. — 10
5.2 Toxicité par les voies respiratoires (valeurs limites d'exposition)........... — 11
5.3 Toxicité aquatique........................................................................................ — 11
5.4 Risques cancérogènes................................................................................. — 11
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. J 5 925
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@RPPP@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPQV

es goudrons de houille sont produits au cours du traitement de pyrolyse de


L la houille pour fabriquer du coke. Les premières unités de traitement de gou-
dron sont apparues en Europe au milieu du XIXe siècle puis cette activité s’est
fortement développée pendant la première moitié du XXe siècle.
Les molécules aromatiques présentes dans les huiles distillées des goudrons
ont permis la naissance et le développement de la chimie organique industrielle.
L’extraction des molécules aromatiques telles que le benzène, le toluène, le
naphtalène, le phénol, les crésols, les pyridines, l’anthracène, le carbazole, etc.,
a jeté les bases de l’industrie chimique moderne, dans un grand nombre de
domaines, en particulier pour les matières plastiques, les colorants, les phytosa-
nitaires, les antioxydants, les résines, les tensioactifs, les produits pharmaceu-
tiques.

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EXTRACTION DE COMPOSÉS AROMATIQUES DES GOUDRONS DE HOUILLE ________________________________________________________________________

Aujourd’hui, la pétrochimie a pris la relève pour fournir en grande quantité des


molécules que l’industrie du goudron ne pouvait plus fournir en volumes suffi-
sants. Néanmoins, un grand nombre des produits issus des goudrons gardent
une position intéressante dans l’industrie, soit parce qu’ils possèdent un avan-
tage qualitatif comme pour les matériaux carbonés, soit parce que leurs coûts
d’extraction sont compétitifs.

1. Obtention et composition présents dans ces goudrons présentent un indice d’aromaticité plus
faible que les goudrons de haute température.
des goudrons
1.4 Composition du goudron de houille
1.1 Goudrons de haute température
Le goudron de houille est un mélange complexe composé pres-
que exclusivement de composés aromatiques. Les principaux com-
Actuellement, la majeure partie des goudrons est constituée par
posants du goudron sont le naphtalène, le phénanthrène, le
les goudrons de haute température obtenus au cours de la pyrolyse
fluoranthène, le pyrène, l’acénaphtène, l’anthracène, le carbazole, la
du charbon pour fabriquer le coke sidérurgique destiné à la produc-
quinoléine, le phénol et quelques composés soufrés comme le thio-
tion de la fonte dans les hauts fourneaux. Cette carbonisation
naphtène.
s’effectue dans des fours à coke à une température comprise entre
1 000 et 1 200 °C et pendant une durée comprise entre 12 et 20 h. Le nombre total de constituants est estimé à 10 000, mais dans
Une tonne de charbon produit environ 750 kg de coke sidérurgique, des proportions très variables, seulement 150 ont été identifiés [1].
30 kg de goudron, 11 kg de benzol, le reste étant constitué de gaz
Les teneurs moyennes pour les constituants principaux [2] sont
(370 m3) d’ammoniac et d’eau.
les suivantes.
L’Europe de l’Ouest produit actuellement dans ses cokeries sidé-
rurgiques environ 2,2 millions de tonnes de goudron et il existe des H y drocarbures :
capacités de traitement de ces goudrons égales à 2,4 millions de naphtalène C10H8 : 10,0 %
tonnes.
phénanthrène C14H10 : 4,5 %
fluoranthène C16H11 : 3,0 %

1.2 Goudrons de basse température acénaphtylène C12H8 : 2,5 %


pyrène C16H10 : 2,0 %
fluorène C13H10 : 1,8 %
En Grande-Bretagne et dans les pays de l’Est, il reste quelques
petites unités faisant de la cokéfaction à basse température, c’est-à- 2-méthylnaphtalène C11H10 : 1,5 %
dire entre 700 et 800 °C. Ces unités produisent du semi-coke destiné
anthracène C14H10 : 1,3 %
à une utilisation en tant que combustible domestique sans fumée.
L’obtention du semi-coke s’accompagne de la même façon d’une chrysène C18H12 : 1,0 %
coproduction de gaz et de goudron. Ce dernier a la particularité indène C9H8 : 1,0 %
d’être beaucoup plus riche en composés phénoliques et plus pauvre
en composés aromatiques non alkylés que les goudrons de haute Hétérocycles :
température. dibenzofurane C12H8O : 1,3 %
La production en Europe de l’Ouest est d’environ 100 000 t/an.
carbazole C12H9N : 0,9 %
thionaphtène C8H6S : 0,3 %
quinoléine C9H7N : 0,3 %
1.3 Goudrons issus de la gazéification
du charbon indole C8H7N : 0,2 %
Composés phénoliques :

Seules les unités sur le procédé Lurgi pour la gazéification du phénol C6H6O : 0,7 %
charbon produisent des goudrons. En Europe de l’Ouest, on ne m-crésol C7H8O : 0,4 %
trouve pas d’unités industrielles de ce type, bien que de nombreu-
p-crésol C7H8O : 0,2 %
ses unités expérimentales aient été montées et exploitées, il y a
quelques dizaines d’années. o-crésol C7H8O : 0,2 %
En Afrique du Sud, la compagnie Sasol exploite une unité indus- diméthylphénols C8H10O : 0,4 %
trielle importante et produit également des goudrons de basse tem- Nota : les pourcentages indiqués dans cet article sont toujours des pourcentages mas-
pérature riches en composés phénoliques. Les hydrocarbures siques.

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________________________________________________________________________ EXTRACTION DE COMPOSÉS AROMATIQUES DES GOUDRONS DE HOUILLE

2. Traitement industriel remplacé par des procédés continus qui s’apparentent au fraction-
nement primaire du brut dans les raffineries de pétrole.
des goudrons de houille
Le traitement industriel des goudrons de houille consiste à sépa-
3.2 Procédés continus
rer par distillation une fraction vaporisable dénommée huile de
goudron de houille, d’une fraction lourde non volatile à une tempé-
rature de l’ordre de 360 °C sous pression atmosphérique. Cette frac- 3.2.1 Procédés en colonne unique [3]
tion lourde résiduelle est appelée « brai de houille ».
Ce procédé a été mis au point et développé lors de la mise en
Historique place des premières installations travaillant en continu qui sont tou-
tes basées sur le même principe (figure 1).
L’utilisation et la valorisation des produits obtenus après le Le goudron brut est envoyé à travers une série d’échangeurs et
traitement de distillation a évolué notablement au cours du chauffé aux environs de 160 °C pour être déshydraté. Au cours du
temps. préchauffage, une petite quantité de soude diluée est injectée pour
Au XIXe siècle, les goudrons étaient distillés essentiellement neutraliser les chlorures d’ammonium et éviter la corrosion dans
pour séparer le brai et utiliser ce dernier comme revêtement l’installation.
pour le calfatage des bateaux.
Pendant la première moitié du XXe siècle, la distillation des Le goudron déshydraté est ensuite chauffé à travers un four sous
goudrons s’est perfectionnée de manière à extraire par des trai- une pression requise et à une température suffisante pour vaporiser
tements supplémentaires tels que l’extraction physico-chimi- toutes les huiles contenues dans le goudron.
que, la cristallisation, la rectification, un certain nombre de Cette vaporisation s’opère dans un ballon de « flash » qui sépare
molécules aromatiques qui ont jeté les bases de la chimie orga- les vapeurs d’huile du brai résiduel. Les huiles vaporisées sont frac-
nique industrielle. tionnées dans une colonne et soutirées en continu à différents
On peut citer dans ce contexte : niveaux en fonction de leur température d’ébullition (tableau 1).
— le benzène ;
— le toluène et les xylènes ;
— le phénol ;
— les crésols et les xylénols ;
— le naphtalène ;
Tableau 1 – Caractéristiques des huiles extraites
— les méthylnaphtalènes ; à la colonne
— l’anthracène ;
— le carbazole ; Température Fraction du goudron
— la pyridine ; Fraction d’ébullition (indicatif)
— les picolines ; (°C) (%)
— la quinoléine. Huile légère (benzol) 80 - 160 1,5
L’utilisation du brai se faisait principalement dans trois appli-
cations : Huile phénolique 160 - 210 4
— l’agglomération des fines de charbon pour les boulets des- Huile naphtalénique 210 - 240 12,5
tinés aux chauffages domestiques ;
— la formulation de goudrons routiers destinés à la construc- Huile acénaphtène 240 - 300 9
tion et à l’entretien des routes ; Huile anthracénique 290 - 360 12
— la formulation de produits d’étanchéité et de revêtement
anticorrosion. Huile chrysène 320 - 400 12
À partir de la seconde guerre mondiale, la chimie organique a
connu un développement exceptionnel pendant une vingtaine
d’années. La disponibilité en molécules aromatiques issues des
goudrons de houille n’était plus suffisante pour répondre aux Le procédé Ab-der-Halden utilisé en France est probablement le
besoins de l’industrie et c’est ainsi que la chimie organique s’est plus simple des procédés à une passe fonctionnant à pression
développée à partir des distillats de pétrole brut et des traite- atmosphérique.
ments en aval des raffineries de brut.

3.2.2 Procédés en colonnes multiples

3. Techniques utilisées Il diffère notablement du procédé précédent par l’utilisation de


plusieurs colonnes montées en séries. Chaque colonne est équipée
d’un four et le taux de reflux peut y être ajusté en fonction de la
pureté souhaitée pour la production extraite en tête. Le fond de
3.1 Procédé discontinu colonne est envoyé à l’alimentation de la colonne suivante.
Ce procédé permet de faire fonctionner les colonnes à des pres-
L’ancienne méthode consistait à chauffer le goudron chargé dans sions différentes ; généralement, la colonne séparant les fractions
un bouilleur (cornue) jusqu’à l’ébullition et à recueillir les huiles lourdes fonctionne à pression réduite.
après passage dans un condenseur. Le bouilleur était chauffé direc-
tement par les flammes du combustible. En fin de distillation, le brai Le procédé Koppers est le plus représentatif pour ce type d’instal-
restant dans le bouilleur était vidé vers le stockage et l’opération sui- lation et il est en continuel perfectionnement dans les unités qui ont
vante pouvait redémarrer. été construites depuis de nombreuses années.
Il existe encore en Europe quelques petites unités avec des L’unité Rütgers VFT AG. à Castrop Rauxel est le résultat des amé-
bouilleurs de 60 m3, mais ce procédé en voie de disparition a été liorations de ce procédé (figure 2).

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