Sunteți pe pagina 1din 22

L’ECONOMIE

Introduction

Le mot économie est issu d’une origine grecque, elle désigne l’ordre, l’organisation de
la maison. Aujourd’hui, on l’emploie tout en ajoutant un qualificatif, on dit l’économie
domestique.
Le terme a reçut aussi une valeur beaucoup plus large. Il a servi é designer l’ordre de
la cité. Ici encore, on l’accompagne habituellement d’un qualificatif ; on dit l’économie
sociale qui organise tous les éléments de la société, et l’économie politique qui organise
la production des biens.
A ce sujet deux erreurs doctrinales peuvent être commises : la première erreur est un
cas d’absorption du temporel par le spirituel. La seconde est un cas de laïcisme.
En réalité l’Eglise n’a pas reçu une mission pour organiser les usines ou les
associations ni elle a la capacité de résoudre tous les problèmes. En d’autres termes,
l’Eglise n’est pas théoricienne de l’économie. Pour cela, si l’Eglise n’a pas une doctrine
des techniques économiques, mais elle a une doctrine de l’être humain. En précisant ce
qu’est l’homme, c’est préciser sa valeur et dire ce qu’il est et ce qu’il n’est pas. C’est
encore assigner le rang que l’économie doit tenir dans l’estime de l’homme et dans son
action.
Préciser ce qu’est l’homme c’est enfin dégager les impératifs moraux qui traduisent
ses propres lois qui traduisent sa propre loi, telle que Dieu l’a voulue. Ils s’imposent en
tout domaine. C’est donc déterminer des règles, non plus techniques mais morales, que
l’acte économique, comme tout acte humain, est tenu d’observer.
De plus, le devoir de l’économie est d’être au service de tous, pour cela il en découle
la condamnation de ceux qui accumulent en leur possession une masse exorbitante de
biens, alors qu’une grande masse de travailleur n’en reçoit qu’une infime fraction des
revenus de la production. L’Eglise, par son enseignement, essaye de faire un équilibre
pour donner à cette masse plus de profit dans le but d’améliorer leur mode de vie et faire
une distribution des biens plus juste.
Ajoutons qu’on peut dire d’une économie conforme à l’idéal chrétien, loin de
dégrader l’homme, tend au contraire à l’anoblir en lui permettant d’exercer et de
développer ses qualités : intelligence, habilité professionnelle, énergie, honnêteté, amour
de la collectivité… elle l’aide à être heureux et chrétiens.

1
Enfin, pour l’Eglise, l’économie ne doit pas prendre le premier rang dans l’ensemble
des activités de l’homme. Elle est importante, même essentielle ; cependant il y a d’autre
bien qui sont aussi importants.

2
I- Qu’en disent les encycliques pontificales sociales ?

1- Les surs principes qui doivent gouverner la vie économique :

QA 95 Une autre chose encore reste à faire, qui se rattache étroitement à tout ce qui précède. De même qu'on ne
saurait fonder l'unité du corps social sur l'opposition des classes, ainsi on ne peut attendre du libre jeu de la
concurrence l'avènement d'un régime économique bien ordonné.
C'est en effet de cette illusion, comme d'une source contaminée, que sont sorties toutes les erreurs de la science
économique individualiste. Cette science, supprimant par oubli ou ignorance le caractère social et moral de la vie
économique, pensait que les pouvoirs publics doivent abandonner celle-ci, affranchie de toute contrainte, à ses
propres réactions, la liberté du marché et de la concurrence lui fournissant un principe directif plus sûr que
l'intervention de n'importe quelle intelligence créée. Sans doute, contenue dans de justes limites, la libre
concurrence est chose légitime et utile ; jamais pourtant elle ne saurait servir de norme régulatrice à la vie
économique. Les faits l'ont surabondamment prouvé depuis qu'on a mis en pratique les postulats d'un néfaste
individualisme. Il est donc absolument nécessaire de replacer la vie économique sous la loi d'un principe directeur
juste et efficace. La dictature économique qui a succédé aujourd'hui à la libre concurrence ne saurait assurément
remplir cette fonction ; elle le peut d'autant moins que, immodérée et violente de sa nature, elle a besoin pour se
rendre utile aux hommes d'un frein énergique et d'une sage direction qu'elle ne trouve pas en elle-même. C'est
donc à des principes supérieurs et plus nobles qu'il faut demander de gouverner avec une sévère intégrité ces
puissances économiques, c'est-à-dire à la justice et à la charité sociales. Cette justice doit donc pénétrer
complètement les institutions mêmes et la vie tout entière des peuples ; son efficacité vraiment opérante doit
surtout se manifester par la création d'un ordre juridique et social qui informe en quelque sorte toute la vie
économique. Quant à la charité sociale, elle doit être l'âme de cet ordre que les pouvoirs publics doivent
s'employer à protéger et à défendre efficacement ; tâche dont ils s'acquitteront plus facilement s'ils veulent bien se
libérer des attributions qui, Nous l'avons déjà dit, ne sont pas de leur domaine propre.

2- Finalité de l’économie nationale : la juste distribution des biens :

RM 16. L'économie nationale, elle aussi, de même qu'elle est le fruit de l'activité d'hommes qui travaillent
unis dans la communauté nationale, ne tend pas non plus à autre chose qu'à assurer sans interruption les
conditions matérielles dans lesquelles pourra se développer pleinement la vie individuelle des citoyens. Là où
ceci sera obtenu et obtenu de façon durable, un peuple sera, à parler exactement, riche, parce que le bien-être
général et, par conséquent, le droit personnel de tous à l'usage des biens terrestres, se trouvera ainsi réalisé
conformément au plan voulu par le Créateur.

RM 17. De là, chers fils, il vous sera facile de voir que la richesse économique d'un peuple ne consiste pas
proprement dans l'abondance des biens, murée selon un calcul matériel pur et simple de leur valeur mais bien
dans ce qu'une telle abondance représente et fournit réellement et efficacement comme base matérielle
suffisante pour le développement personnel convenable de ses membres. Si une telle juste distribution des
biens n'était pas réalisée ou n'était qu'imparfaitement assurée, le vrai but de l'économie nationale ne serait pas
atteint; étant donné que, quelle que fût l'opulente abondance des biens disponibles, le peuple, n'étant pas
appelé à y participer, ne serait pas riche, mais pauvre. Faites au contraire que cette juste distribution soit
effectivement réalisée et de manière durable, et vous verrez un peuple, bien que disposant de biens moins
considérables, devenir et être économiquement sain.

3
RM 18. Ces idées fondamentales sur la richesse et la pauvreté des peuples, il Nous semble particulièrement
opportun de les mettre devant vos yeux aujourd'hui, où l'on est porté à mesurer et évaluer une telle richesse et
pauvreté avec des balances et selon des critères purement quantitatifs, soit de l'espace, soit de l'abondance des
biens. Si, au contraire, on estime à sa valeur exacte le but de l'économie nationale, alors celui-ci deviendra une
lumière pour les efforts des hommes d'Etat et des peuples, et les éclairera pour s'engager spontanément dans
une voie qui n'exigera pas de continuels sacrifices de biens et de sang mais portera des fruits de paix et de
bien-être général.

MM 74 « L'économie nationale elle aussi, observe à bon droit Notre Prédécesseur Pie XII, de même qu'elle est
le fruit de l'activité d'hommes qui travaillent unis dans la communauté politique, ne tend pas non plus à autre
chose qu'à assurer sans interruption les conditions matérielles dans lesquelles, pourra se développer pleinement la
vie individuelle des citoyens. Là où cela sera obtenu, et de façon durable, un peuple sera, en vérité,
économiquement riche, parce que le bien-être général, et par conséquent le droit personnel de tous à l'usage des
biens terrestres, se trouve ainsi réalisé conformément au plan voulu par le Créateur. »

D'où il suit que la richesse économique d'un Peuple ne résulte pas seulement de l'abondance globale des biens,
mais aussi et plus encore de leur distribution effective suivant la justice, en vue d'assurer l'épanouissement
Personnel des membres de la communauté : car telle est la véritable fin de l'économie nationale.

3- Situer les problèmes sociaux dans un contexte plus large de civilisation nouvelle :

OA 7 - Ce faisant, notre but - sans oublier pour autant les problèmes permanents déjà abordés par nos
prédécesseurs - est d’attirer l’attention sur quelques questions qui, par leur urgence, leur ampleur, leur complexité,
doivent être au cœur des préoccupations des chrétiens pour les années à venir, afin qu’avec les autres hommes, ils
s’emploient à résoudre les difficultés nouvelles mettant en cause l’avenir même de l’homme. Il faut situer les
problèmes sociaux posés par l’économie moderne - conditions humaines de production, équité dans les échanges
de biens et la répartition des richesses, signification des besoins accrus de consommation, partage des
responsabilités - dans un contexte plus large de civilisation nouvelle. Dans les mutations actuelles, si profondes et
si rapides, chaque jour l’homme se découvre nouveau, et il s’interroge sur le sens de son être propre et de sa
survie collective. Hésitant à recueillir les leçons d’un passé qu’il estime révolu et trop différent, il a néanmoins
besoin d’éclairer son avenir - qu’il perçoit aussi incertain que mouvant - par des vérités permanentes, éternelles,
qui le dépassent certes, mais dont il peut, s’il le veut bien, retrouver lui-même les traces .

4- La vérité chrétienne sur le travail s’oppose à l’ « économiste » :

LE 7.1 Ces affirmations essentielles sur le travail ont toujours résulté des richesses de la vérité chrétienne,
spécialement du message même de l'«évangile du travail», et elles ont créé le fondement de la nouvelle façon de
penser, de juger et d'agir des hommes. A l'époque moderne, dès le début de l'ère industrielle, la vérité chrétienne
sur le travail devait s'opposer aux divers courants de la pensée matérialiste et «économiste».

LE 7.2 Pour certains partisans de ces idées, le travail était compris et traité comme une espèce de «marchandise»
que le travailleur _ et spécialement l'ouvrier de l'industrie _ vend à l'employeur, lequel est en même temps le
possesseur du capital, c'est-à-dire de l'ensemble des instruments de travail et des moyens qui rendent possible la
production. Cette façon de concevoir le travail s'est répandue plus spécialement, peut-être, dans la première moitié
du XIXe siècle. Par la suite, les formulations explicites de ce genre ont presque complètement disparu, laissant la
place à une façon plus humaine de penser et d'évaluer le travail. L'interaction du travailleur et de l'ensemble des
instruments et des moyens de production a donné lieu au développement de diverses formes de capitalisme _
parallèlement à diverses formes de collectivisme _ dans lesquelles se sont insérés d'autres éléments socio-
économiques à la suite de nouvelles circonstances concrètes, de l'action des associations de travailleurs et des
4
pouvoirs publics, de l'apparition de grandes entreprises transnationales. Malgré cela, le danger de traiter le travail
comme une «marchandise sui generis», ou comme une «force» anonyme nécessaire à la production (on parle
même de «force-travail»), existe toujours, lorsque la manière d'aborder les problèmes économiques est
caractérisée par les principes de l'«économisme» matérialiste.

LE 7.3 Ce qui, pour cette façon de penser et de juger, constitue une occasion systématique et même, en un certain
sens, un stimulant, c'est le processus accéléré de développement de la civilisation unilatéralement matérialiste,
dans laquelle on donne avant tout de l'importance à la dimension objective du travail, tandis que la dimension
subjective _ tout ce qui est en rapport indirect ou direct avec le sujet même du travail _ reste sur un plan
secondaire. Dans tous les cas de ce genre, dans chaque situation sociale de ce type, survient une confusion, ou
même une inversion de l'ordre établi depuis le commencement par les paroles du Livre de la Genèse: l'homme est
alors traité comme un instrument de production alors que lui _ lui seul, quel que soit le travail qu'il accomplit _
devrait être traité comme son sujet efficient, son véritable artisan et son créateur. C'est précisément cette inversion
d'ordre, abstraction faite du programme et de la dénomination sous les auspices desquels elle se produit, qui
mériterait _ au sens indiqué plus amplement ci-dessous _ le nom de «capitalisme». On sait que le capitalisme a sa
signification historique bien définie en tant que système, et système économico-social qui s'oppose au
«socialisme» ou «communisme». Mais si l'on prend en compte l'analyse de la réalité fondamentale de tout le
processus économique et, avant tout, des structures de production _ ce qu'est, justement, le travail _, il convient de
reconnaître que l'erreur du capitalisme primitif peut se répéter partout où l'homme est en quelque sorte traité de la
même façon que l'ensemble des moyens matériels de production, comme un instrument et non selon la vraie
dignité de son travail, c'est-à-dire comme sujet et auteur, et par là même comme véritable but de tout le Processus
de production.

5- Prétendue loi économique de l’accumulation du capital :

QA 60 Aussi bien, aux ouvriers victimes de ces pratiques, sont venus se joindre des intellectuels qui, à leur tour,
dressent à l'encontre de cette prétendue loi un principe moral qui n'est pas mieux fondé : tout le produit et tout le
revenu, déduction faite de ce qu'exigent l'amortissement et la reconstitution du capital, appartiennent de plein
droit aux travailleurs. Cette erreur est certes moins apparente que celle de certains socialistes qui prétendent
attribuer à l'État ou, comme ils disent, socialiser tous les moyens de production ; elle n'en est que plus dangereuse
et plus apte à surprendre la foi trop confiante des esprits mal avertis. C'est un séduisant poison ; beaucoup se sont
empressés de l'absorber, que n'eût jamais réussi à égarer un socialisme franchement avoué.

6- Les dangers de l’économisme :

SRS 28. Mais en même temps, la conception «économique» ou «économiste», liée au vocable développement,
est entrée elle-même en crise. Effectivement, on comprend mieux aujourd'hui que la pure accumulation de biens
et de services, même en faveur du plus grand nombre, ne suffit pas pour réaliser le bonheur humain. Et par suite,
la disponibilité des multiples avantages réels apportés ces derniers temps par la science et par la technique, y
compris l'informatique, ne comporte pas non plus la libération par rapport à toute forme d'esclavage. L'expérience
des années les plus récentes démontre au contraire que, si toute la masse des ressources et des potentialités mises
à la disposition de l'homme n'est pas régie selon une intention morale et une orientation vers le vrai bien du genre
humain, elle se retourne facilement contre lui pour l'opprimer.

Une constatation déconcertante de la période la plus récente devrait être hautement instructive: à côté des misères
du sous-développement, qui ne peuvent être tolérées, nous nous trouvons devant une sorte de surdéveloppement,
également inadmissible parce que, comme le premier, il est contraire au bien et au bonheur authentique. En effet,
ce surdéveloppement, qui consiste dans la disponibilité excessive de toutes sortes de biens matériels pour certaines
couches de la société, rend facilement les hommes esclaves de la «possession» et de la jouissance immédiate, sans

5
autre horizon que la multiplication des choses ou le remplacement continuel de celles que l'on possède déjà par
d'autres encore plus perfectionnées. C'est ce qu'on appelle la civilisation de «consommation», qui comporte tant
de «déchets» et de «rebuts». Un objet possédé et déjà dépassé par un autre plus perfectionné est mis au rebut, sans
que l'on tienne compte de la valeur permanente qu'il peut avoir en soi ou pour un autre être humain plus pauvre.

Nous touchons tous de la main les tristes effets de cette soumission aveugle à la pure consommation: d'abord une
forme de matérialisme grossier, et en même temps une insatisfaction radicale car on comprend tout de suite que -
à moins d'être prémuni contre le déferlement des messages publicitaires et l'offre incessante et tentatrice des
produits de consommation - plus on possède, plus aussi on désire, tandis que les aspirations les plus profondes
restent insatisfaites, peut-être même étouffées.

L'encyclique du Pape Paul VI a signalé la différence, si fréquemment accentuée de nos jours, entre l'«avoir» et
l'«être», différence exprimée précédemment avec des mots précis par le Concile Vatican II . «Avoir» des objets et
des biens ne perfectionne pas, en soi, le sujet humain si cela ne contribue pas à la maturation et à l'enrichissement
de son «être», c'est-à-dire à la réalisation de la vocation humaine en tant que telle.

Certes, la différence entre «être» et «avoir», le danger inhérent à une pure multiplication ou à une pure
substitution de choses possédées face à la valeur de l'«être», ne doit pas se transformer nécessairement en une
antinomie. L'une des plus grandes injustices du monde contemporain consiste précisément dans le fait qu'il y a
relativement peu de personnes qui possèdent beaucoup, tandis que beaucoup ne possèdent presque rien. C'est
l'injustice de la mauvaise répartition des biens et des services originairement destinés à tous.

Voici alors le tableau: il y a ceux - le petit nombre possédant beaucoup - qui n'arrivent pas vraiment à «être» parce
que, par suite d'un renversement de la hiérarchie des valeurs, ils en sont empêchés par le culte de l'«avoir», et il y
a ceux - le plus grand nombre, possédant peu ou rien - qui n'arrivent pas à réaliser leur vocation humaine
fondamentale parce qu'ils sont privés des biens élémentaires.

Le mal ne consiste pas dans l'«avoir» en tant que tel mais dans le fait de posséder d'une façon qui ne respecte pas
la qualité ni l'ordre des valeurs des biens que l'on a, qualité et ordre des valeurs qui découlent de la subordination
des biens et de leur mise à la disposition de l'«être» de l'homme et de sa vraie vocation.

Ainsi, il reste clair que si le développement a nécessairement une dimension économique puisqu'il doit fournir au
plus grand nombre possible des habitants du monde la disponibilité de biens indispensables pour «être», il ne se
limite pas à cette dimension. S'il en était autrement, il se retournerait contre ceux que l'on voudrait favoriser.

Les caractéristiques d'un développement intégral, «plus humain», capable de se maintenir, sans nier les exigences
économiques, à la hauteur de la vocation authentique de l'homme et de la femme, ont été décrites par Paul VI.

7- Lois morales et lois propres de l’économie :

GS 64. Aujourd'hui plus que jamais, pour faire face à l'accroissement de la population et pour répondre aux
aspirations plus vastes du genre humain, on s'efforce à bon droit d'élever le niveau de la production agricole et
industrielle, ainsi que le volume des services offerts. C'est pourquoi il faut encourager le progrès technique,
l'esprit d'innovation, la création et l'extension d'entreprises, l'adaptation des méthodes, les efforts soutenus de tous
ceux qui participent à la production, en un mot tout ce qui peut contribuer à cet essor. Mais le but fondamental
d'une telle production n'est pas la seule multiplication des biens produits, ni le profit ou la puissance; c'est le
service de l'homme: de l'homme tout entier, selon la hiérarchie de ses besoins matériels comme des exigences de
sa vie intellectuelle, morale, spirituelle et religieuse; de tout homme, disons-nous, de tout groupe d'hommes, sans
distinction de race ou de continent. C'est pourquoi l'activité économique, conduite selon ses méthodes et ses lois
propres, doit s'exercer dans les limites de l'ordre moral afin de répondre au dessein de Dieu sur l'homme.
6
8- Soi-disant lois économiques :

GS 67, 3. Comme l'activité économique est le plus souvent le fruit du travail associé des hommes, il est injuste
et inhumain de l'organiser et de l'ordonner au détriment de quelque travailleur que ce soit. Or il est trop courant,
même de nos jours, que ceux qui travaillent soient en quelque sorte asservis à leurs propres œuvres; ce que de soi-
disant lois économiques ne justifient en aucune façon. Il importe donc d'adapter tout le processus du travail
productif aux besoins de la personne et aux modalités de son existence, en particulier de la vie du foyer (surtout
en ce qui concerne les mères de famille), en tenant toujours compte du sexe et de l'âge. Les travailleurs doivent
aussi avoir la possibilité de développer leurs qualités et leur personnalité dans l'exercice même de leur travail.
Tout en y appliquant leur temps et leurs forces d'une manière consciencieuse, que tous jouissent par ailleurs d'un
temps de repos et de loisir suffisant qui leur permette aussi d'entretenir une vie familiale, culturelle, sociale et
religieuse. Bien plus, ils doivent avoir la possibilité de déployer librement des facultés et des capacités qu'ils ont
peut-être peu l'occasion d'exercer dans leur travail professionnel.

9- Perspective économiste de la séparation capital-travail :

LE 13,3 La rupture de cette vision cohérente, dans laquelle est strictement sauvegardé le principe du primat de la
personne sur les choses, s'est réalisée dans la pensée humaine, parfois après une longue période de préparation
dans la vie pratique. Elle s'est opérée de telle sorte que le travail a été séparé du capital et opposé à lui, de même
que le capital a été opposé au travail, presque comme s'il s'agissait de deux forces anonymes, de deux facteurs de
production envisagés tous les deux dans une même perspective «économiste». Dans cette façon de poser le
problème, il y avait l'erreur fondamentale que l'on peut appeler l'erreur de l'«économisme» et qui consiste à
considérer le travail humain exclusivement sous le rapport de sa finalité économique. On peut et on doit appeler
cette erreur fondamentale de la pensée l'erreur du matérialisme en ce sens que l'«économisme» comporte,
directement ou indirectement, la conviction du primat et de la supériorité de ce qui est matériel, tandis qu'il place,
directement ou indirectement, ce qui est spirituel et personnel (l'agir de l'homme, les valeurs morales et similaires)
dans une position subordonnée à la réalité matérielle. Cela ne constitue pas encore le matérialisme théorique au
sens plénier du mot; mais c'est déjà certainement un matérialisme pratique qui, moins en vertu des prémisses
dérivant de la théorie matérialiste qu'en raison d'un mode déterminé de porter des jugements de valeur _ et donc
en vertu d'une certaine hiérarchie des biens, fondée sur l'attraction forte et immédiate de ce qui est matériel _, est
jugé capable de satisfaire les besoins de l'homme.

10- Relier ensemble l’économique, le politique et le moral :

SRS 35. Eclairés par ce caractère moral, essentiel au développement, il nous faut considérer dans la même
optique les obstacles qui l'entravent. Si donc, pendant les années écoulées depuis la publication de l'encyclique de
Paul VI, le développement n'a pas été réalisé - ou l'a été dans une faible mesure, irrégulièrement, sinon même de
manière contradictoire -, les causes ne peuvent en être seulement de nature économique. Comme il a déjà été dit,
des mobiles politiques interviennent aussi. En effet, les décisions qui accélèrent ou freinent «le développement
des peuples» ne sont autres que des facteurs de caractère politique. Pour surmonter les mécanismes pervers
rappelés plus haut, et pour les remplacer par des mécanismes nouveaux, plus justes et plus conformes au bien
commun de l'humanité, une volonté politique efficace est nécessaire. Malheureusement, après avoir analysé la
situation, il faut conclure qu'elle a été insuffisante.

7
Dans un document pastoral, comme celui-ci, une analyse portant exclusivement sur les causes économiques et
politiques du sous-développement (et aussi, toutes proportions gardées, de ce qu'on pourrait appeler le
surdéveloppement) serait incomplète. Il est donc nécessaire de discerner les causes d'ordre moral qui, du point de
vue du comportement des hommes considérés comme des personnes responsables, interviennent pour freiner le
cours du développement et en empêcher la pleine réalisation.

De même, lorsqu'on dispose des moyens scientifiques et techniques qui doivent permettre d'acheminer enfin les
peuples vers un vrai développement grâce aux décisions concrètes indispensables d'ordre politique, on ne
surmontera les obstacles principaux qu'en vertu de prises de position essentiellement morales, lesquelles, pour les
croyants, spécialement pour les chrétiens, seront inspirées par les principes de la foi, avec l'aide de la grâce divine.

11- Economie moderne et entreprise :

CA 34. Il semble que, à l'intérieur de chaque pays comme dans les rapports internationaux, le marché libre soit
l'instrument le plus approprié pour répartir les ressources et répondre efficacement aux besoins. Toutefois, cela ne
vaut que pour les besoins « solvables», parce que l'on dispose d'un pouvoir d'achat, et pour les ressources qui sont
« vendables », susceptibles d'être payées à un juste prix. Mais il y a de nombreux besoins humains qui ne peuvent
être satisfaits par le marché. C'est un strict devoir de justice et de vérité de faire en sorte que les besoins humains
fondamentaux ne restent pas insatisfaits et que ne périssent pas les hommes qui souffrent de ces carences. En
outre, il faut que ces hommes dans le besoin soient aidés à acquérir des connaissances, à entrer dans les réseaux
de relations, à développer leurs aptitudes pour mettre en valeur leurs capacités et leurs ressources personnelles.
Avant même la logique des échanges à parité et des formes de la justice qui les régissent, il y a un certain dû à
l'homme parce qu'il est homme, en raison de son éminente dignité. Ce dû comporte inséparablement la possibilité
de survivre et celle d'apporter une contribution active au bien commun de l'humanité.

Les objectifs énoncés par Rerum novarum pour éviter de ramener le travail de l'homme et l'homme lui-même au
rang d'une simple marchandise gardent toute leur valeur dans le contexte du Tiers-Monde, et, dans certains cas, ils
restent encore un but à atteindre : un salaire suffisant pour faire vivre la famille, des assurances sociales pour la
vieillesse et le chômage, une réglementation convenable des conditions de travail.

12- Aliénation économique :

CA 41. Le marxisme a critiqué les sociétés capitalistes bourgeoises, leur reprochant d'aliéner l'existence humaine
et d'en faire une marchandise. Ce reproche se fonde assurément sur une conception erronée et inappropriée de
l'aliénation, qui la fait dépendre uniquement de la sphère des rapports de production et de propriété, c'est-à-dire
qu'il lui attribue un fondement matérialiste et, de plus, nie la légitimité et le caractère positif des relations du
marché même dans leur propre domaine. On en vient ainsi à affirmer que l'aliénation ne peut être éliminée que
dans une société de type collectiviste. Or, l'expérience historique des pays socialistes a tristement fait la preuve
que le collectivisme non seulement ne supprime pas l'aliénation, mais l'augmente plutôt, car il y ajoute la pénurie
des biens nécessaires et l'inefficacité économique.

L'expérience historique de l'Occident, de son côté, montre que, même si l'analyse marxiste de l'aliénation et ses
fondements sont faux, l'aliénation avec la perte du sens authentique de l'existence est également une réalité dans
les sociétés occidentales. On le constate au niveau de la consommation lorsqu'elle engage l'homme dans un réseau
de satisfactions superficielles et fausses, au lieu de l'aider à faire l'expérience authentique et concrète de sa
personnalité. Elle se retrouve aussi dans le travail, lorsqu'il est organisé de manière à ne valoriser que ses
productions et ses revenus sans se soucier de savoir si le travailleur, par son travail, s'épanouit plus ou moins en
son humanité, selon qu'augmente l'intensité de sa participation à une véritable communauté solidaire, ou bien que
s'aggrave son isolement au sein d'un ensemble de relations caractérisé par une compétitivité exaspérée et des
exclusions réciproques, où il n'est considéré que comme un moyen, et non comme une fin.

8
Il est nécessaire de rapprocher le concept d'aliénation de la vision chrétienne des choses, pour y déceler l'inversion
entre les moyens et les fins : quand il ne reconnaît pas la valeur et la grandeur de la personne en lui-même et dans
l'autre, l'homme se prive de la possibilité de jouir convenablement de son humanité et d'entrer dans les relations
de solidarité et de communion avec les autres hommes pour lesquelles Dieu l'a créé. En effet, c'est par le libre don
de soi que l'homme devient authentiquement lui-même, et ce don est rendu possible parce que la personne
humaine est essentiellement « capable de transcendance ». L'homme ne peut se donner à un projet seulement
humain sur la réalité, à un idéal abstrait ou à de fausses utopies. En tant que personne, il peut se donner à une
autre personne ou à d'autres personnes et, finalement, à Dieu qui est l'auteur de son être et qui, seul, peut accueillir
pleinement ce don. L'homme est aliéné quand il refuse de se transcender et de vivre l'expérience du don de soi et
de la formation d'une communauté humaine authentique orientée vers sa fin dernière qu'est Dieu. Une société est
aliénée quand, dans les formes de son organisation sociale, de la production et de la consommation, elle rend plus
difficile la réalisation de ce don et la constitution de cette solidarité entre hommes.

Dans la société occidentale, l'exploitation a été surmontée, du moins sous la forme analysée et décrite par Karl
Marx. Cependant, l'aliénation n'a pas été surmontée dans les diverses formes d'exploitation lorsque les hommes
tirent profit les uns des autres et que, avec la satisfaction toujours plus raffinée de leurs besoins particuliers et
secondaires, ils se rendent sourds à leurs besoins essentiels et authentiques qui doivent régir aussi les modalités de
la satisfaction des autres besoins. L'homme ne peut pas être libre s'il se préoccupe seulement ou surtout de l'avoir
et de la jouissance, au point de n'être plus capable de dominer ses instincts et ses passions, ni de les unifier ou de
les maîtriser par l'obéissance à la vérité. L’obéissance à la vérité de Dieu et de l'homme est pour lui la condition
première de la liberté et lui permet d'ordonner ses besoins, ses désirs et les manières de les satisfaire suivant une
juste hiérarchie, de telle sorte que la possession des choses soit pour lui un moyen de grandir. Cette croissance
peut être entravée du fait de la manipulation par les médias qui imposent, au moyen d'une insistance bien
orchestrée, des modes et des mouvements d'opinion, sans qu'il soit possible de soumettre à une critique attentive
les prémisses sur lesquelles ils sont fondés.

13- Mondialisation de l’économie :

CA 58. L'amour pour l'homme, et en premier lieu pour le pauvre dans lequel l'Eglise voit le Christ, se traduit
concrètement par la promotion de la justice. Celle-ci ne pourra jamais être pleinement mise en œuvre si les
hommes ne voient pas celui qui est dans le besoin, qui demande un soutien pour vivre, non pas comme un gêneur
ou un fardeau, mais comme un appel à faire le bien, la possibilité d'une richesse plus grande. Seule cette prise de
conscience donnera le courage d'affronter le risque et le changement qu'implique toute tentative authentique de se
porter au secours d'un autre homme. En effet, il ne s'agit pas seulement de donner de son superflu mais d'apporter
son aide pour faire entrer dans le cycle du développement économique et humain des peuples entiers qui en sont
exclus ou marginalisés. Ce sera possible non seulement si l'on puise dans le superflu, produit en abondance par
notre monde, mais surtout si l'on change les styles de vie, les modèles de production et de consommation, les
structures de pouvoir établies qui régissent aujourd'hui les sociétés. Il ne s'agit pas non plus de détruire des
instruments d'organisation sociale qui ont fait leurs preuves, mais de les orienter en fonction d'une juste
conception du bien commun de la famille humaine tout entière. Aujourd'hui est en vigueur ce qu'on appelle la «
mondialisation de l'économie », phénomène qui ne doit pas être réprouvé car il peut créer des occasions
extraordinaires de mieux-être. Mais on sent toujours davantage la nécessité qu'à cette internationalisation
croissante de l'économie corresponde l'existence de bons organismes internationaux de contrôle et d'orientation,
afin de guider l'économie elle-même vers le bien commun, ce qu'aucun Etat, fût-il le plus puissant de la terre, n'est
plus en mesure de faire. Pour qu'un tel résultat puisse être atteint, il faut que s'accroisse la concertation entre les
grands pays et que, dans les organismes internationaux spécialisés, les intérêts de la grande famille humaine soient
équitablement représentés. Il faut également qu'en évaluant les conséquences de leurs décisions, ils tiennent
toujours dûment compte des peuples et des pays qui ont peu de poids sur le marché international mais qui
concentrent en eux les besoins les plus vifs et les plus douloureux, et ont besoin d'un plus grand soutien pour leur
développement. Il est certain qu'il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine.

9
14- Utilisation des revenus disponibles :

QA 55 L'homme n'est pas non plus autorisé à disposer au gré de son caprice de ses revenus disponibles, c'est-à-
dire des revenus qui ne sont pas indispensables à l'entretien d'une existence convenable et digne de son rang. Bien
au contraire, un très grave précepte enjoint aux riches de pratiquer l'aumône et d'exercer la bienfaisance et la
magnificence, ainsi qu'il ressort du témoignage constant et explicite de la Sainte Écriture et des Pères de l'Église.

15- Légitimité sociale de l’investissement des revenus :

QA 56 Des principes posés par le Docteur angélique, Nous déduisons sans peine que celui qui consacre les
ressources plus larges dont il dispose à développer une industrie, source abondante de travail rémunérateur,
pourvu toutefois que ce travail soit employé à produire des biens réellement utiles, pratique d'une manière
remarquable et particulièrement appropriée aux besoins de notre temps l'exercice de la vertu de magnificence.
GS 70. Les investissements, de leur côté, doivent tendre à assurer des emplois et des revenus suffisants tant à la
population active d'aujourd'hui qu'à celle de demain. Tous ceux qui décident de ces investissements, comme de
l'organisation de la vie économique (individus, groupes, pouvoirs publics) doivent avoir ces buts à cœur et se
montrer conscients de leurs graves obligations: d'une part, prendre des dispositions pour faire face aux nécessités
d'une vie décente, tant pour les individus que pour la communauté tout entière; d'autre part, prévoir l'avenir et
assurer un juste équilibre entre les besoins de la consommation actuelle, individuelle et collective, et les exigences
d'investissement pour la génération qui vient. On doit également avoir toujours en vue les besoins pressants des
nations et des régions économiquement moins avancées. Par ailleurs, en matière monétaire, il faut se garder
d'attenter au bien de son propre pays ou à celui des autres nations. On doit s'assurer en outre que ceux qui sont
économiquement faibles ne soient pas injustement lésés par des changements dans la valeur de la monnaie. Accès
à la propriété et au pouvoir privé sur les biens.

16- Nécessité de la justice social pour assurer le bien commun:

DR 51. En effet, outre la justice commutative, il y a aussi la justice sociale, qui


impose des devoirs auxquels patrons et ouvriers n'ont pas le droit de se soustraire.
C'est précisément la fonction de la justice sociale d'imposer aux membres de la
communauté tout ce qui est nécessaire au bien commun. Mais de même que dans
l'organisme vivant on pourvoit aux besoins du corps entier en donnant à chacune
des parties et à chacun des membres ce qu'il leur faut pour remplir leurs fonctions,
ainsi dans l'organisme social, pour assurer le bien commun de toute la collectivité,
il faut accorder à chacune des parties et à chacun des membres, c'est-à-dire à des
hommes qui ont la dignité de personnes, ce qui leur est nécessaire pour
l'accomplissement de leurs fonctions sociales. La réalisation de la justice sociale
produira une activité intense de toute la vie économique, dans la paix et dans
l'ordre, manifestant ainsi la santé du corps social, tout comme la santé du corps
10
humain se reconnaît à l'harmonieuse et bienfaisante synergie des activités
organiques.

17- Le développement économique au service de l’homme:

GS 64. Aujourd'hui plus que jamais, pour faire face à l'accroissement de la


population et pour répondre aux aspirations plus vastes du genre humain, on
s'efforce à bon droit d'élever le niveau de la production agricole et industrielle,
ainsi que le volume des services offerts. C'est pourquoi il faut encourager le
progrès technique, l'esprit d'innovation, la création et l'extension d'entreprises,
l'adaptation des méthodes, les efforts soutenus de tous ceux qui participent à la
production, en un mot tout ce qui peut contribuer à cet essor. Mais le but
fondamental d'une telle production n'est pas la seule multiplication des biens
produits, ni le profit ou la puissance; c'est le service de l'homme: de l'homme tout
entier, selon la hiérarchie de ses besoins matériels comme des exigences de sa vie
intellectuelle, morale, spirituelle et religieuse; de tout homme, disons-nous, de tout
groupe d'hommes, sans distinction de race ou de continent. C'est pourquoi l'activité
économique, conduite selon ses méthodes et ses lois propres, doit s'exercer dans les
limites de l'ordre moral(2) afin de répondre au dessein de Dieu sur l'homme(3).

18-Développement économique et progrès social doivent être liés :

MM 73. Il est clair que les principes exprimés ci-dessus valent partout et toujours.
On ne saurait toutefois déterminer la mesure dans laquelle ils doivent être
appliqués sans tenir compte des richesses disponibles; celles-ci peuvent varier,
varient en effet en quantité et qualité de pays à pays, et, dans le même pays, d'une
période à l'autre.

MM 74. Tandis que les économies des divers pays se développent rapidement,
avec un rythme encore plus rapide depuis la dernière guerre, il Nous paraît
opportun d'attirer l'attention sur un principe fondamental. Le progrès social doit
accompagner et rejoindre le développement économique, de telle sorte que toutes
les catégories sociales aient leur part des produits accrus. Il faut donc veiller avec

11
attention, et s'employer efficacement, à ce que les déséquilibres économiques et
sociaux n'augmentent pas, mais s'atténuent dans la mesure du possible.

MM 168. Nous savons fort bien qu'en ces dernières années une conscience plus
universelle, plus approfondie, a été prise du devoir de s'employer à favoriser le
développement économique et le progrès social dans les pays qui se débattent dans
les plus grandes difficultés.

19-Le développement des différents secteurs de l’économie :

MM 128. En premier lieu, chacun doit s'employer, et d'abord les pouvoirs publics,
à ce que les milieux ruraux disposent, comme il convient, des services essentiels:
routes, transports, communications, eau potable, logement, soins médicaux,
instruction élémentaire et formation professionnelle, service religieux, loisirs; et
tout ce que requiert la maison rurale pour son ameublement et sa modernisation.
Que de tels services, qui de nos jours constituent les éléments essentiels d'un
niveau de vie décent, viennent à manquer dans les milieux ruraux, le
développement économique et le progrès social y deviennent quasi impossibles ou
trop lents. Il en résulte que l'exode des populations rurales devient à peu près
irrésistible et difficilement contrôlable.

MM 129. Il importe en outre que le développement économique de la nation


s'exerce graduellement, et avec harmonie, entre tous les secteurs de production. Il
convient à cet effet que soient réalisées dans le secteur agricole les transformations
qui regardent les techniques de production, le choix des cultures, les structures des
entreprises, telles que les tolère ou requiert la vie économique dans son ensemble;
et de manière à atteindre, dès que possible, un niveau de vie décent par rapport aux
secteurs industriel et des services.

MM 131. De la sorte, il devrait, semble-t-il, être moins difficile de contrôler, dans


les régions de départ et d'arrivée, les mouvements de la main d'œuvre libérée par la
modernisation progressive de l'agriculture; et on pourrait la munir de la formation
professionnelle voulue pour son insertion profitable dans les autres secteurs de
production. Elle recevrait aussi l'aide économique, la préparation, le secours
spirituel requis pour son intégration sociale.

20-Etat et économie :

12
CA 18. Certes, depuis 1945 les armes se taisent sur le continent européen ;
toutefois, on se rappellera que la vraie paix n'est jamais le résultat de la victoire
militaire, mais suppose l'élimination des causes de la guerre et l'authentique
réconciliation entre les peuples. Pendant de nombreuses années, par contre, il y a
eu en Europe et dans le monde une situation de non- guerre plus que de paix
authentique. La moitié du continent est tombée sous le pouvoir de la dictature
communiste, tandis que l'autre partie s'organisait pour se défendre contre ce type de
danger. Bien des peuples perdent le pouvoir de disposer d'eux-mêmes, sont
enfermés dans les limites d'un empire oppressif tandis qu'on s'efforce de détruire
leur mémoire historique et les racines séculaires de leur culture. Des masses
énormes d'hommes, à la suite de cette violente partition, sont contraintes
d'abandonner leur terre et déportées de force.

Une course folle aux armements absorbe les ressources nécessaires au


développement des économies internes et à l'aide aux nations les plus défavorisées.
Le progrès scientifique et technique, qui devrait contribuer au bien-être de
l'homme, est transformé en instrument de guerre. La science et la technique servent
à produire des armes toujours plus perfectionnées et plus destructrices, tandis qu'on
demande à une idéologie, qui est une perversion de la philosophie authentique, de
fournir des justifications doctrinales à la nouvelle guerre. Et la guerre est non
seulement attendue et préparée, mais elle a lieu dans diverses régions du monde et
cause d'énormes effusions de sang. De la logique des blocs, ou des empires,
dénoncée par les documents de l'Eglise et récemment par l'encyclique Sollicitudo
rei socialis (50), il résulte que les controverses et les discordes qui naissent dans
les pays du Tiers-Monde sont systématiquement amplifiées et exploitées pour créer
des difficultés à l'adversaire.

Les groupes extrémistes, qui cherchent à résoudre ces controverses par les armes,
bénéficient facilement d'appuis politiques et militaires, sont armés et entraînés à la
guerre, tandis que ceux qui s'efforcent de trouver des solutions pacifiques et
humaines, respectant les intérêts légitimes de toutes les parties, restent isolés et
sont souvent victimes de leurs adversaires. La militarisation de nombreux pays du
Tiers-Monde et les luttes fratricides qui les ont tourmentés, la diffusion du
terrorisme et de procédés toujours plus barbares de lutte politico-militaire trouvent
aussi une de leurs principales causes dans la précarité de la paix qui a suivi la
deuxième guerre mondiale. Sur le monde entier, enfin, pèse la menace d'une guerre
atomique, capable de conduire à l'extinction de l'humanité. La science, utilisée à
des fins militaires, met à la disposition de la haine, amplifiée par les idéologies,
l'arme absolue. Mais la guerre peut se terminer sans vainqueurs ni vaincus dans un
suicide de l'humanité, et alors il faut répudier la logique qui y conduit, c'est-à-dire
l'idée que la lutte pour la destruction de l'adversaire, la contradiction et la guerre
même sont des facteurs de progrès et de marche en avant de l'histoire (51). Si on
13
admet la nécessité de ce refus, la logique de la « guerre totale » comme celle de la
« lutte des classes » sont nécessairement remises en cause.

21-Participation de tous à la vie économique à tous les niveaux :

GS 65. 1. Le développement doit demeurer sous le contrôle de l'homme. Il ne doit


pas être abandonné à la discrétion d'un petit nombre d'hommes ou de groupes
jouissant d'une trop grande puissance économique, ni à celle de la communauté
politique ou à celle de quelques nations plus puissantes. Il convient au contraire
que le plus grand nombre d'hommes, à tous les niveaux, et au plan international
l'ensemble des nations, puissent prendre une part active à son orientation. Il faut de
même que les initiatives spontanées des individus et de leurs libres associations
soient coordonnées avec l'action des pouvoirs publics, et qu'elles soient ajustées et
harmonisées entre elles.

2. Le développement ne peut être laissé ni au seul jeu quasi automatique de


l'activité économique des individus ni à la seule puissance publique. Il faut donc
dénoncer les erreurs aussi bien des doctrines qui s'opposent aux réformes
indispensables au nom d'une fausse conception de la liberté, que des doctrines qui
sacrifient les droits fondamentaux des personnes et des groupes à l'organisation
collective de la production(4).

3. Par ailleurs, les citoyens doivent se rappeler que c'est leur droit et leur devoir (et
le pouvoir civil doit lui aussi le reconnaître) de contribuer selon leurs moyens au
progrès véritable de la communauté à laquelle ils appartiennent. Dans les pays en
voie de développement surtout, où l'emploi de toutes les disponibilités s'impose
avec un caractère d'urgence, ceux qui gardent leurs ressources inemployées mettent
gravement en péril le bien commun; il en va de même de ceux qui privent leur
communauté des moyens matériels et spirituels dont elle a besoin, le droit
personnel de migration étant sauf.

22- Autorité du travail sur les autres éléments de la vie économique

GS 67. 1. Le travail des hommes, celui qui s'exerce dans la production ci l'échange
de biens ou dans la prestation de services économiques, passe avant les autres
éléments de la vie économique, qui n'ont valeur que d'instruments.

II- Quels en seraient les fondements bibliques et théologiques ?


14
1. Fondement biblique
 Ancien Testament

Dans l'Ancien Testament, on constate une double attitude vis-à-vis des biens
économiques et de la richesse. D'un côté, l'appréciation positive pour la disponibilité
des biens matériels considérés comme nécessaires pour la vie: parfois l'abondance —
mais pas la richesse ni le luxe — est considérée comme une bénédiction de Dieu.
Dans la littérature sapientielle, la pauvreté est décrite comme une conséquence
négative de l'oisiveté et du manque de diligence (Pr 10, 4 : « Main nonchalante appauvrit, la
main des diligents enrichit. »), mais aussi comme un fait naturel (Pr 22, 2 : « Riche et pauvre se
rencontrent, Yahvé les a faits tous les deux. »).

D'un autre côté, les biens économiques et la richesse ne sont pas condamnés pour
eux-mêmes, mais pour leur mauvais usage. La tradition prophétique stigmatise les
imbroglios, l'usure, l'exploitation, les injustices criantes, en particulier à l'égard des
plus pauvres (Is 58, 3-11 : « "Pourquoi avons-nous jeûné sans que tu le voies, nous
sommes-nous mortifiés sans que tu le saches?" C'est qu'au jour où vous jeûnez, vous
traitez des affaires, et vous opprimez tous vos ouvriers. C'est que vous jeûnez pour
vous livrer aux querelles et aux disputes, pour frapper du poing méchamment. Vous
ne jeûnerez pas comme aujourd'hui, si vous voulez faire entendre votre voix là-haut!
Est-ce là le jeûne qui me plaît, le jour où l'homme se mortifie? Courber la tête comme
un jonc, se faire une couche de sac et de cendre, est-ce là ce que tu appelles un jeûne,
un jour agréable à Yahvé? N'est-ce pas plutôt ceci, le jeûne que je préfère: défaire les
chaînes injustes, délier les liens du joug; renvoyer libres les opprimés, et briser tous
les jougs? N'est-ce pas partager ton pain avec l'affamé, héberger chez toi les pauvres
sans abri, si tu vois un homme nu, le vêtir, ne pas te dérober devant celui qui est ta
propre chair? Alors ta lumière éclatera comme l'aurore, ta blessure se guérira
rapidement, ta justice marchera devant toi et la gloire de Yahvé te suivra. Alors tu
crieras et Yahvé répondra, tu appelleras, il dira: Me voici! Si tu bannis de chez toi le
joug, le geste menaçant et les paroles méchantes, si tu te prives pour l'affamé et si tu
rassasies l'opprimé, ta lumière se lèvera dans les ténèbres, et l'obscurité sera pour toi
comme le milieu du jour. Yahvé sans cesse te conduira, il te rassasiera dans les lieux
arides, il donnera la vigueur à tes os, et tu seras comme un jardin arrosé, comme une
source jaillissante dont les eaux ne tarissent pas. » ; et aussi Jr 7, 4-7; Os 4, 1-2; Am 2,
6-7; et Mi 2, 1-2). Cette tradition, bien que considérant la pauvreté des opprimés, des
faibles, des indigents comme un mal, voit aussi en elle un symbole de la situation de

15
l'homme devant Dieu; c'est de lui que provient tout bien, comme un don à administrer
et à partager.

Celui qui reconnaît sa pauvreté devant Dieu, en quelque situation qu'il vive, est
l'objet d'une attention particulière de Dieu: quand le pauvre cherche, le Seigneur
répond; quand il crie, il l'écoute. C'est aux pauvres que s'adressent les promesses
divines: ils seront les héritiers de l'Alliance entre Dieu et son peuple. L'intervention
salvifique de Dieu se réalisera à travers un nouveau David (cf. Ez 34, 22-31) qui,
comme et plus que le roi David, sera le défenseur des pauvres et le promoteur de la
justice; il établira une nouvelle Alliance et écrira une nouvelle loi dans le cœur des
croyants (Jr 31, 31-34 : « Voici venir des jours - oracle de Yahvé - où je conclurai avec la maison
d'Israël (et la maison de Juda) une alliance nouvelle. Non pas comme l'alliance que j'ai conclue avec leurs
pères, le jour où je les pris par la main pour les faire sortir du pays d'Egypte - mon alliance qu'eux-mêmes ont
rompue bien que je fusse leur Maître, oracle de Yahvé! Mais voici l'alliance que je conclurai avec la maison
d'Israël après ces jours-là, oracle de Yahvé. Je mettrai ma Loi au fond de leur être et je l'écrirai sur leur cœur.
Alors je serai leur Dieu et eux seront mon peuple. Ils n'auront plus à instruire chacun son prochain, chacun
son frère, en disant: "Ayez la connaissance de Yahvé!" Car tous me connaîtront, des plus petits jusqu'aux plus
grands - oracle de Yahvé - parce que je vais pardonner leur crime et ne plus me souvenir de leur péché. »).

Lorsqu'elle est acceptée ou recherchée dans un esprit religieux, la pauvreté prédispose


à la reconnaissance et à l'acceptation de l'ordre de la création. Dans cette perspective, le «
riche » est celui qui met sa confiance dans les choses qu'il possède plutôt qu'en Dieu; c'est
l'homme qui se fait fort de l'œuvre de ses mains et qui ne compte que sur ses forces. La
pauvreté s'élève au rang de valeur morale quand elle se manifeste comme une humble
disponibilité et comme une ouverture à Dieu, comme une confiance en lui. Ces attitudes
rendent l'homme capable de reconnaître la relativité des biens économiques et de les
traiter comme des dons divins à administrer et à partager, car la propriété originelle de
tous les biens appartient à Dieu.

La scène de la rencontre d’Abram et de Melkisédek (Gn 14, 18 – 20) vient pour


décrire une rencontre entre ces deux personnages où il y a eu un échange entre eux. Cette
scene est tres belle : un roi-prêtre cananeen offre un rafraichissement au liberateur epuisé
et ainsi, tel un hote royal, le recoit dans la paix, le shalom, de son domaine royal. Mais les
mains qui portent le pain et le vin sont les mains d’un pretre et la nourriture et la boisson
ne doivent pas etre dissociees de la benediction que Melkisédek offre à Abram au nom de
son dieu « El ». Abram, de son coté, offre au roi la dîme qui est un signe d’une certaine
soumission du croyant au pretre. Ce geste d’Abram est considéré comme une
reconnaissance de la legitimite et de la grandeur de Melkisédek.

 Nouveau Testament

16
Jésus reprend à son compte l'ensemble de la tradition de l'Ancien Testament,
notamment sur les biens économiques, sur la richesse et sur la pauvreté, en leur
conférant une clarté et une plénitude définitives (Mt 6, 24 : « Nul ne peut servir deux maîtres:
ou il haïra l'un et aimera l'autre, ou il s'attachera à l'un et méprisera l'autre. Vous ne pouvez servir Dieu et
l'Argent»et 13, 22 : « Celui qui a été semé dans les épines, c'est celui qui entend la Parole, mais le souci
du monde et la séduction de la richesse étouffent cette Parole, qui demeure sans fruit. » ; Lc 6, 20-24 et
12, 15-21; Rm 14, 6-8 et 1 Tm 4, 4). En donnant son Esprit et en changeant les cœurs,
il vient instaurer le « Règne de Dieu », afin de rendre possible une nouvelle vie en
commun dans la justice, dans la fraternité, dans la solidarité et dans le partage. Le
Règne inauguré par le Christ perfectionne la bonté originelle de la création et de
l'activité humaine, compromise par le péché. Libéré du mal et réintroduit dans la
communion avec Dieu, tout homme peut poursuivre l'œuvre de Jésus, avec l'aide de
son Esprit: rendre justice aux pauvres, affranchir les opprimés, consoler les affligés,
rechercher activement un nouvel ordre social qui offre des solutions appropriées à la
pauvreté matérielle et qui puisse endiguer plus efficacement les forces qui entravent
les tentatives des plus faibles à sortir d'une condition de misère et d'esclavage. Quand
cela se produit, le Règne de Dieu est déjà présent sur cette terre, bien que ne lui
appartenant pas. En lui, les promesses des prophètes trouveront finalement leur
accomplissement.

À la lumière de la Révélation, l'activité économique doit être considérée et accomplie


comme une réponse reconnaissante à la vocation que Dieu réserve à chaque homme.
Celui-ci est placé dans le jardin pour le cultiver et le garder, en en usant selon des limites
bien précises (Gn 2, 16-17) dans l'engagement à le perfectionner (Gn 1, 26-30; 2, 15-16;
Sg 9, 2-3). En se faisant témoin de la grandeur et de la bonté du Créateur, l'homme
marche vers la plénitude de la liberté à laquelle Dieu l'appelle. Une bonne administration
des dons reçus, notamment des dons matériels, est une œuvre de justice envers soi-même
et envers les autres hommes: ce que l'on reçoit doit être bien utilisé, conservé, fructifié,
comme l'enseigne la parabole des talents (Mt 25, 14-30; Lc 19, 12-27).

L'activité économique et le progrès matériel doivent être mis au service de


l'homme et de la société; si l'on s'y consacre avec la foi, l'espérance et la charité des
disciples du Christ, l'économie et le progrès peuvent aussi être transformés en lieux de
salut et de sanctification; dans ces domaines aussi il est possible d'exprimer un amour
et une solidarité plus qu'humains et de contribuer à la croissance d'une humanité
nouvelle, qui préfigure le monde des temps derniers. Jésus résume toute la Révélation
en demandant au croyant de s'enrichir en vue de Dieu (Lc 12, 21 : « Ainsi en est-il de celui
qui thésaurise pour lui-même, au lieu de s'enrichir en vue de Dieu. »): l'économie aussi est utile pour
17
ce faire quand elle ne trahit pas sa fonction d'instrument au service de la croissance
globale de l'homme et de la société et au service de la qualité humaine de la vie.

Pour démontrer que les disciples de Jésus ne faisaient qu’un seul cœur et un seul
esprit, le livre des Actes des Apôtres montre l’action de mise en commun des biens
(Ac 4,32 – 5,11). Deux exemples ont été donnés après la description de la situation
des disciples et des premiers chrétiens (Ac 4, 32 – 35) : « La multitude des croyants
n'avait qu'un cœur et qu'une âme. Nul ne disait sien ce qui lui appartenait, mais entre
eux tout était commun (Ac 4,32)». Le premier exemple évoque Barnabé (4, 36 – 37),
qui vendit un champ et apporta l’argent aux apôtres pour contribuer au fonds
commun. L’autre exemple, celui d’Ananie et de Saphire (5, 1- 11), est négative et
illustre le châtiment divin qui menace qui violent la pureté de la communauté
primitive.

La foi en Jésus-Christ permet une compréhension correcte du développement


social, dans le contexte d'un humanisme intégral et solidaire. La réflexion théologique
du Magistère social offre à ce propos une contribution très utile: « La foi au Christ
Rédempteur, tout en apportant un éclairage de l'intérieur sur la nature du
développement, est également un guide dans le travail de collaboration. Dans la
Lettre de saint Paul aux Colossiens, nous lisons que le Christ est le “Premier-né de
toute créature” et que “tout a été créé par lui et pour lui” (Col 1, 15-16 : « Il est l'image
du Dieu invisible, Premier-né de toute créature, car c'est en lui qu'ont été créées toutes choses dans les cieux
et sur la terre, les visibles et les invisibles, Trônes, Seigneuries, Principautés, Puissances; tout a été créé par
lui et pour lui. »).
En effet, tout “subsiste en lui” car “Dieu s'est plu à faire habiter en lui
toute la Plénitude et par lui à réconcilier tous les êtres pour lui” (Col 1, 20 « et par lui à
réconcilier tous les êtres pour lui, aussi bien sur la terre que dans les cieux, en faisant la paix par le sang de sa
croix. »). Dans ce plan divin, qui commence par l'éternité dans le Christ, “image”
parfaite du Père, et qui culmine en lui, “Premier-né d'entre les morts” (Col 1, 15. 18),
s'inscrit notre histoire, marquée par notre effort personnel et collectif pour élever la
condition humaine, surmonter les obstacles toujours renaissants sur notre route, nous
disposant ainsi à participer à la plénitude qui “habite dans le Seigneur” et qu'il
communique “à son Corps, c'est-à- dire l'Église” (Col 1, 18 « Et il est aussi la tête du Corps,
c'est-à-dire l'Eglise: Il est le Principe, Premier-né d'entre les morts (il fallait qu'il obtînt en tout la primauté) »;
Ep 1, 22-23 « Il a tout mis sous ses pieds, et l'a constitué, au sommet de tout, Tête pour l'Eglise, laquelle
est son Corps, la Plénitude de Celui qui est rempli, tout en tout. »), tandis que le péché, qui sans
cesse nous poursuit et compromet nos réalisations humaines, est vaincu et racheté par
la “réconciliation” opérée par le Christ ( Col 1, 20).

18
2. Fondement théologique

Les biens, même légitimement possédés, conservent toujours une destination universelle; toute forme
d'accumulation indue est immorale, car en plein contraste avec la destination universelle assignée par le
Dieu Créateur à tous les biens. De fait, le salut chrétien est une libération intégrale de l'homme,
libération par rapport au besoin, mais aussi par rapport à la possession en soi: « Car la racine de tous les
maux, c'est l'amour de l'argent. Pour s'y être livrés, certains se sont égarés loin de la foi » (1 Tm 6, 10).
Les Pères de l'Église insistent sur la nécessité de la conversion et de la transformation des consciences
des croyants, plus que sur les exigences de changement des structures sociales et politiques de leur
époque, en pressant ceux qui s'adonnent à une activité économique et possèdent des biens de se
considérer comme des administrateurs de ce que Dieu leur a confié.

Les richesses remplissent leur fonction de service à l'homme quand elles sont destinées à produire des
bénéfices pour les autres et pour la société: « Comment pourrions-nous faire du bien au prochain — se
demande Clément d'Alexandrie — si tous ne possédaient rien? ». Dans la vision de saint Jean
Chrysostome, les richesses appartiennent à quelques-uns pour qu'ils puissent acquérir du mérite en les
partageant avec les autres. Elles sont un bien qui vient de Dieu: ceux qui le possèdent doivent l'utiliser et
le faire circuler, de sorte que les nécessiteux aussi puissent en jouir; le mal consiste dans l'attachement
démesuré aux richesses, dans la volonté de se les accaparer. Saint Basile le Grand invite les riches à
ouvrir les portes de leurs magasins et s'exclame: « Un grand fleuve se déverse, en mille canaux, sur le
terrain fertile: ainsi, par mille voies, tu fais arriver la richesse dans les maisons des pauvres ». La
richesse, explique saint Basile, est comme l'eau qui jaillit toujours plus pure de la fontaine si elle est
fréquemment puisée, tandis qu'elle se putréfie si la fontaine demeure inutilisée. Le riche, dira plus tard
saint Grégoire le Grand, n'est qu'un administrateur de ce qu'il possède; donner le nécessaire à celui qui
en a besoin est une œuvre à accomplir avec humilité, car les biens n'appartiennent pas à celui qui les
distribue.

Celui qui garde les richesses pour lui n'est pas innocent; les donner à ceux qui en ont besoin signifie
payer une dette.

III- Quelle actualisation en faire aujourd’hui ?

1. La mondialisation: les opportunités et les risques :

Notre époque est marquée par le phénomène complexe de la mondialisation


économique et financière, sur le plan du commerce des biens et services et des
transactions financières, dans lequel toujours plus d'opérateurs adoptent une perspective
globale pour les choix qu'ils doivent opérer en fonction des opportunités de croissance et
de profit. Le nouvel horizon de la société globale est défini par la capacité d'expansion et
par la nature absolument inédite du système de relations qui est en train de se développer.
Le rôle des marchés financiers est toujours plus décisif et central; ses dimensions ont
énormément augmenté, à une vitesse impressionnante.
19
La mondialisation alimente de nouvelles espérances, mais engendre aussi
d'inquiétantes interrogations.

Elle peut produire des effets potentiellement bénéfiques pour l'humanité entière:
s'entrecroisant avec le développement impétueux des télécommunications, le parcours de
croissance du système de relations économiques et financières a permis simultanément
une importante réduction des coûts des communications et des nouvelles technologies. En
d'autres termes, il est advenu que les deux phénomènes, mondialisation économique et
financière et progrès technologique, se sont réciproquement renforcés, rendant
extrêmement rapide la dynamique globale de la phase économique actuelle.

Les risques liés aux nouvelles dimensions des relations commerciales et financières.
Une tendance à l'augmentation des inégalités, aussi bien entre pays avancés et pays en
voie de développement, qu'au sein même des pays industrialisés. La richesse économique
croissante rendue possible par les processus décrits s'accompagne d'une croissance de la
pauvreté relative.

Le souci du bien commun impose de saisir les nouvelles occasions de redistribution de


richesses entre les diverses régions de la planète, au profit des plus défavorisées, qui sont
demeurées jusqu'à présent exclues ou en marge du progrès social et économique: « En
somme, le défi est d'assurer une mondialisation dans la solidarité, une mondialisation
sans marginalisation ».

Le commerce représente un élément fondamental des relations économiques


internationales, en contribuant de manière déterminante à la spécialisation dans la
production et à la croissance économique des différents pays. La doctrine sociale a
plusieurs fois mis en lumière les distorsions du système commercial international qui,
souvent, à cause des politiques protectionnistes, discrimine les produits provenant des
pays pauvres et y entrave la croissance d'activités industrielles et le transfert de
technologies. La détérioration continuelle des termes d'échange des matières premières et
l'aggravation du fossé entre pays riches et pays pauvres a poussé le Magistère à rappeler
l'importance des critères éthiques qui devraient orienter les relations économiques
internationales: la poursuite du bien commun et la destination universelle des biens.

Une solidarité adaptée à l'ère de la mondialisation requiert la défense des droits de


l'homme. À cet égard, le Magistère souligne: « La perspective d'une autorité publique
internationale au service des droits humains, de la liberté et de la paix. Nous sommes
témoins de l'accroissement d'un écart préoccupant entre une série de nouveaux “droits”
promus dans les sociétés technologiquement avancées et des droits humains élémentaires
qui ne sont pas encore respectés, surtout dans des situations de sous-développement: je
pense, par exemple, au droit à la nourriture, à l'eau potable, au logement, à
l'autodétermination et à l'indépendance ».
20
L'extension de la mondialisation doit être accompagnée d'une prise de conscience plus
mûre, de la part des organisations de la société civile, des nouveaux devoirs auxquels
elles sont appelées au niveau mondial. « La liberté des échanges n'est équitable que
soumise aux exigences de la justice sociale ».

« La mondialisation ne doit pas être un nouveau type de colonialisme. Elle doit


respecter la diversité des cultures qui, au sein de l'harmonie universelle des peuples,
constituent une clé d'interprétation de la vie. En particulier, elle ne doit pas priver les
pauvres de ce qui leur reste de plus précieux, y compris leurs croyances et leurs pratiques
religieuses, étant donné que les convictions religieuses authentiques expriment la
manifestation la plus vraie de la liberté humaine ».

À l'époque de la mondialisation, il faut souligner avec force la solidarité entre les


générations: « Auparavant, la solidarité entre les générations était dans de nombreux pays
une attitude naturelle de la part de la famille; elle est aussi devenue un devoir de la
communauté ». Mais aujourd'hui le problème se pose aussi pour la communauté politique
globale, afin que la mondialisation ne se réalise pas au détriment des plus nécessiteux et
des plus faibles.

2. Le système financier international :

Si la création de ce que l'on a qualifié de « marché global des capitaux » a entraîné des
effets bénéfiques, grâce à une plus grande mobilité des capitaux permettant aux activités
productives d'avoir plus facilement des ressources disponibles, la mobilité accrue a par
ailleurs fait augmenter aussi le risque de crises financières.

Une économie financière qui est une fin en soi est destinée à contredire ses finalités, car
elle se prive de ses propres racines et de sa propre raison constitutive, et par là de son rôle
originel et essentiel de service de l'économie réelle et, en définitive, de développement
des personnes et des communautés humaines. Les processus d'innovation et de
déréglementation des marchés financiers tendent en effet à ne se consolider que dans
certaines parties du globe. Ceci est une source de graves préoccupations de nature
éthique, car les pays exclus de ces processus, bien que ne jouissant pas des bénéfices
produits par ceux-ci, ne sont toutefois pas à l'abri d'éventuelles conséquences négatives
de l'instabilité financière sur leurs systèmes économiques réels, surtout s'ils sont fragiles
ou si leur développement est en retard. On ne peut plus urgent de trouver des solutions
institutionnelles capables de favoriser réellement la stabilité du système, sans en réduire
les potentialités ni l'efficacité.

3. Le rôle de la communauté internationale à l'ère de l'économie globale :

21
La perte par les acteurs étatiques de leur rôle central doit coïncider avec un plus grand
engagement de la communauté internationale dans l'exercice d'un rôle décisif sur le plan
économique et financier. À cause des nouveaux liens entre les opérateurs globaux, les
mesures traditionnelles de défense des États apparaissent condamnées à l'échec et, face
aux nouvelles aires de la compétition, la notion même de marché national passe au
second plan.

Plus le système économique et financier mondial atteint des niveaux élevés de


complexité fonctionnelle et d'organisation, plus le devoir de réguler ces processus
apparaît prioritaire, pour les finaliser à la poursuite du bien commun de la famille
humaine. L'exigence apparaît clairement de voir, à côté des États-nations, la communauté
internationale assumer cette fonction délicate, à l'aide d'instruments politiques et
juridiques adéquats et efficaces.

La politique aussi, tout comme l'économie, doit savoir étendre son rayon d'action au-delà
des frontières nationales, en acquérant rapidement une dimension opérationnelle
mondiale pouvant lui permettre d'orienter les processus en cours à la lumière de
paramètres non seulement économiques, mais aussi moraux. L'objectif de fond sera de
guider ces processus en garantissant le respect de la dignité de l'homme et le
développement complet de sa personnalité en vue du bien commun.

4. La nécessité d'une grande œuvre éducative et culturelle :

Pour la doctrine sociale, l'économie « n'est qu'un aspect et une dimension dans la
complexité de l'activité humaine. La vie de l'homme, de même que la vie sociale de la
collectivité, ne peut être réduite à une dimension matérialiste, même si les biens matériels
sont extrêmement nécessaires tant pour des finalités purement de survie que pour
l'amélioration du niveau de vie: « Accroître le sens de Dieu et la connaissance de soi-
même est à la base de tout développement complet de la société humaine ».

Face à l'avancée rapide du progrès technique et économique et aux transformations tout


aussi rapides des processus de production et de consommation, le Magistère ressent
l'exigence de proposer une grande œuvre éducative et culturelle: «La nécessité et
l'urgence apparaissent donc d'un vaste travail éducatif et culturel qui comprenne
l'éducation des consommateurs à un usage responsable de leur pouvoir de choisir, la
formation d'un sens aigu des responsabilités chez les producteurs, et surtout chez les
professionnels des moyens de communication sociale, sans compter l'intervention
nécessaire des pouvoirs publics ».

22

S-ar putea să vă placă și