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Morad Mousli
2010/10 n° 40 | pages 54 à 72
ISSN 1768-5958
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Résumé
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doivent intégrer dans leur stratégie des préceptes de responsabilité sociale
dont les conséquences sur le contrôle de gestion sont théoriquement
nombreuses, notamment en matière de mesure et de reporting. Ainsi,
en proie à ce qui constitue l’une des clés de lecture de l’implication des
sociétés en matière de RSE, le système budgétaire doit être configuré
de façon adaptée afin qu’il puisse assurer une fonction de mesure de la
nouvelle performance sociétale et être susceptible de fonder des actions
stratégiques à long terme. C’est pourquoi, les objectifs de notre recherche
sont d’établir un état des lieux des pratiques de contrôle dans 50 sociétés
cotées françaises afin de savoir si, d’une part, la RSE influence bien la
configuration du système budgétaire et, d’autre part, si les contrôleurs de
gestion disposent d’une latitude suffisante afin de réaliser effectivement des
activités afférentes à un « éco-contrôle ».
Abstract
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Le déplacement du contrôle de gestion vers
la RSE : un «éco-contrôle» plus juste ou juste
l’écho d’un contrôle ? Cas de 50 sociétés cotées
françaises
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effet, quelle influence notoire peut-on relever sur les missions du contrôle de
gestion dans le cas des sociétés cotées soumises à une obligation légale
et institutionnelle fixée en France par la loi sur les Nouvelles Régulations
Economiques (2001), en particulier dans un système budgétaire où les activités
de mesure de la performance financière sont particulièrement nombreuses et
chronophages ? Bien que des outils nouveaux aient été proposés comme étant
susceptibles de mesurer la performance de la RSE (Biecker, 2002 ; Kaplan et
Norton, 2003), on peut se demander si ces indicateurs sont bel et bien utilisés,
en particulier dans un contexte instable et incertain où le système budgétaire
semble en prise à des exigences de plus en plus élevées de maximisation
financière ainsi qu’aux nouvelles normes d’établissement des états financiers
(Bollecker et al., 2006). En outre, RSE est-elle réellement ancrée dans les
stratégies des sociétés cotées françaises ou bien constitue-t-elle, du point de vue
de sa performance, une simple réponse aux pressions de leurs environnements
commercial et institutionnel (Meyssonnier, Rasolofo-Distler, 2008 ; Boccara,
2009) ? L’observation des activités réalisées dans le système budgétaire
pourrait nous renseigner sur la place qu’occupe effectivement la RSE au regard,
notamment, de la latitude dont disposent les contrôleurs de gestion, c’est-à-dire
leur propension à réaliser l’ensemble des tâches nécessaires au parfait exercice
des fonctions dudit système.
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Née en partie de la stakeholder theory de Freeman (1984), la problématique de
la RSE suggère une responsabilité à la fois sociale et sociétale de l’entreprise
à l’endroit de son environnement direct et de la société dans son ensemble.
Ce postulat a suggéré de nouvelles pratiques dans les entreprises en matière
de stratégies de développement durable, notamment dans leur façon de
communiquer (Martinet et Reynaud, 2001), mais également une augmentation
notoire d’un contrôle « éco » qui se traduit par le développement d’outils ad hoc
et d’un reporting sociétal (Henri et Giasson, 2006 ; Bollecker et al., 2006). Mais
au-delà de la comptabilité environnementale ou du « bilan sociétal » (Capron,
2000), il est possible de s’interroger sur l’influence véritable de la RSE sur le
contrôle et, plus particulièrement, dans un contexte de crise qui suggèrerait, en
cas de maintien des préoccupations « éco » du système budgétaire, une volonté
manifeste des directions générales de piloter et de mesurer leur performance
globale et non plus exclusivement financière. Le développement durable sacralise
donc l’avènement de la RSE comme source de performance à part entière dont
les conséquences structurelles semblent devoir rejaillir naturellement sur le
contrôle de gestion (Moquet, 2005 ; Caron et al., 2007), et en particulier sur les
indicateurs de mesure et la nature du reporting. En effet, la création de valeur n’est
plus l’apanage des actionnaires mais de l’ensemble des parties prenantes dont
la part doit être identifiée et mesurée au même titre que celle de l’actionnariat.
De la même façon, les indicateurs de performance sont modifiés en raison des
représentations des concurrents jugés à partir d’une nouvelle conception de la
compétitivité.
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la RSE : un «éco-contrôle» plus juste ou juste
l’écho d’un contrôle ? Cas de 50 sociétés cotées
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de bord est pour ainsi dire unique (Mendoza et Zrihen, 1999). Autrement dit, bien
que les phases constitutives soient les mêmes, elles conduisent rarement aux
mêmes conclusions. Ces phases sont :
- le repérage des indicateurs : ils servent à « modéliser » la structure,
l’activité pour ainsi dire à des fins de contrôle et d’évaluation. Il est
nécessaire, pour cela, de conduire un double examen, d’une part, des
moyens techniques (fonctionnement et structure) et, d’autre part, des
performances attendues et des leviers d’action le cas échéant ;
- la prise en compte du temps : c’est la nécessité de définir le temps
imparti respectivement à la réalisation de l’activité (ou des activités) et à
la construction des informations de suivi. Aussi, il faut prendre en compte
le temps de façon globale, sans exclure, de fait, les délais de construction
et de restitution des données ;
- l’évaluation de la faisabilité des solutions retenues : qui, à partir des deux
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premières étapes, va consister à construire une information claire et
fiable quant à la situation de l’organisation et aux solutions à préconiser.
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Dans tous les cas, les outils mis en place dans le but d’exercer un contrôle ad
hoc des activités qui découlent de la RSE sont encore peu nombreux ou peu
adaptés (Rivière-Giordano, 2007) dans un système budgétaire où la mesure de
la performance financière reste la priorité avérée de l’ensemble de ses acteurs.
En outre, l’une des questions clés est de savoir quel arbitrage peut-on, dans
l’absolu (et en théorie), obtenir entre les activités « classiques » et les activités
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nouvelles liées à la RSE dans le système budgétaire et ce, du point de vue, non
seulement des outils nouvellement mis en place, mais surtout de la latitude dont
disposent les contrôleurs de gestion.
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peut être la source d’un déséquilibre notoire (Hope et Fraser, 2000 ; Berland,
2004) « des contrôles » en tant qu’outils dans les sociétés soumises à des
normes d’établissement des états financiers de plus en plus strictes (PN Hague,
2004 ; Ogien, 2005). Nous retrouvons ainsi deux des trois tensions fondatrices
du contrôle (Cappelletti, 2007) que sont l’opposition « stabilité-instabilité » et
l’opposition « régularité-changement ». La finalité majeure du contrôle étant
comprise dans sa terminologie même (« maîtrise »), le contexte économique,
environnemental et institutionnel des sociétés cotées (Meyssonnier, Rasolofo-
Distler, 2008) renvoie à la difficulté, voire au paradoxe, qui consiste à contrôler
ce qui est instable et changeant, financier ou non financier.
Quelles que soient les missions réellement exercées par le système budgétaire,
elles renvoient manifestement à la problématique de la latitude des contrôleurs
de gestion que nous pourrions formuler ainsi : la configuration du système
budgétaire permet-elle au contrôleur de gestion d’exercer des activités afférentes
à la RSE au regard du temps dont il dispose et qu’il impartit à ses différentes
missions ? Une enquête auprès de plusieurs sociétés cotées pourra nous aider à
comprendre l’influence de la RSE sur la configuration du système budgétaire et à
décrire les pratiques courantes des contrôleurs de gestion dans le but d’observer
si ces derniers disposent de suffisamment de temps afin d’exercer des activités
rattachées à la RSE.
2. Méthodologie de la recherche
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Stratégie de RSE
utilisées (Biecker, 2002) afin de mesurer la présence d'un
contrôle et d'un reporting societal dans une société. La
Indicateurs de contrôle
stratégie identifée de RSE permet de classer les entreprises
Configuration
selon leur degré d'implication. Les trois autres variables
Reporting societal
sont directement inhérentes à un "éco-contrôle" et peuvent
Actions correctives à long nous renseigner sur la configuration du système budgétaire.
terme
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de la latitude des contrôleurs de gestion
La construction du questionnaire s’est faite autour des variables observées
et liées aux deux concepts clés de notre étude : la configuration du système
budgétaire et la latitude des contrôleurs de gestion.
2.3.1. Configuration du système budgétaire
La liste des questions portant sur le concept de configuration est la suivante :
Quel est le degré d’implication de votre société dans une démarche de RSE ?
Nul Faible Elevé
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enquêtés qui n’utilisent que le budget pouvaient répondre « budget » alors que
ceux qui utilisent le tableau de bord ou le BSC en plus du budget pouvaient
répondre l’une ou l’autre respectivement. Ensuite, une question portant sur la
présence d’éléments afférents à la RSE dans la stratégie de la société a été posée
également afin de connaître le degré d’implication et de permettre une lecture
des résultats selon cette même implication. Enfin, la configuration du contrôle
proprement dite a été observée à partir d’une série de questions portant sur la
nature des indicateurs utilisés, la présence d’un reporting sociétal et les actions à
long terme découlant de ce dernier. L’ensemble des variables ont été mesurées à
partir d’une échelle ordinale à trois niveaux (« faible », « moyenne », « élevée »).
Des exemples d’indicateurs ont été signifiés clairement dans le questionnaire afin
de faciliter la réponse des personnes sondées. La dernière question porte sur la
nature du reporting, autrement dit sur la nature des informations essentiellement
transmises. Les enquêtés ont évalué la nature du reporting selon une échelle à
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trois niveaux (« financières », « financières et qualitatives », « qualitatives »). Le
but de cette question était d’évaluer les pratiques de contrôle et de reporting des
entreprises en dehors de la RSE.
2.3.2. Thème portant sur la latitude des contrôleurs de gestion
Afin de mesurer le degré de latitude des contrôleurs de gestion, nous avons
observé le temps imparti à l’ensemble des activités usuelles ou afférentes à
la RSE à partir de deux sous-thèmes portant respectivement sur leur niveau
d’autonomie et de responsabilité. Les quatre questions étaient les suivantes :
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françaises
Fonctions Nombre
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Contrôleur de gestion 200
Responsable contrôle de gestion 13
Manager commercial 77
Le traitement des données s’est fait à partir de deux échantillons distincts : les
sociétés impliquées dans une démarche de RSE et les sociétés peu impliquées.
À partir de cela, nous avons réalisé des tests uni-variés et multi-variés afin
d’observer et de comprendre les pratiques du système budgétaire de ces sociétés
en matière d’éco-contrôle au regard de leur configuration et de la latitude des
contrôleurs de gestion.
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indicateurs spécifiques rattachés à la RSE est celle qui utilise un BSC, seul
outil pouvant présenter un axe dédié à la performance sociétale de l’entreprise.
Ajoutons, enfin, que les informations comprises dans le reporting des sociétés
de cet échantillon sont essentiellement financières (93 % des cas) et qu’aucune
action à long terme découlant dudit reporting n’a été identifiée par les personnes
interrogées.
3.1.2. La latitude des contrôleurs de gestion
Les résultats des questions portant sur le concept de latitude n’ont ici que peu
d’importance en raison du lien qui existait dans notre questionnaire entre les deux
concepts. En revanche, il est intéressant de constater qu’à la question portant
sur le poids des tâches afférentes à la mesure financière des résultats, une
majorité des répondants pensent que cette activité est chronophage et empêche
la réalisation d’autres tâches.
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performance attachée à la RSE. En effet, nous constatons que 91 % d’entre-
elles disent posséder des indicateurs ad hoc contre 9 % qui n’en disposent pas.
Nous retrouvons, par ailleurs, les 2 sociétés (9% de l’échantillon) qui n’utilisent
pas d’outil supplémentaire à coté du budget. Cela peut signifier deux choses. Soit
que l’instrumentalisation de leur système budgétaire n’est pas encore achevée,
soit que la mesure de la performance liée à la RSE est d’ordre financier. En
tout état de cause, la configuration du système budgétaire semble ici largement
influencée par la démarche de RSE.
Il ressort, qui plus est, après un tri croisé, que la pratique la plus rigoureuse
en matière de mesure de la performance sociale revienne au tableau de bord
classique (84 % des cas), loin devant le BSC (12 %) et le budget (4%). Néanmoins,
la présence d’un reporting afférent à la RSE n’implique pas naturellement
d’actions correctives à long terme comme en témoignent les résultats de la
question suivante.
Quelle est la fréquence des actions stratégiques qui découlent du reporting sociétal ?
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l’examen de l’ensemble des résultats, qu’une majorité des acteurs interrogés
pensent que le contrôleur de gestion a un niveau de responsabilité réduit au
regard, d’une part, de la structure du système budgétaire (notamment le rôle
et la nature des E.R.P.) et, d’autre part, des tâches assignées prioritairement et
afférentes très souvent à l’analyse de la performance financière. Ainsi, dans 77
% des cas, les contrôleurs interrogés estiment que la configuration du système
les empêche souvent de réaliser d’autres tâches alors que 9 % d’entre eux
uniquement estiment que cela est rarement le cas.
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ailleurs que 6 personnes n’ont pas répondu à cette question, ce qui témoigne
certainement de la difficulté de se prononcer quant à son degré d’autonomie
dans une organisation.
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la priorité donnée aux tâches usuelles est un déterminisme à la fois technique
et technologique (voir plus haut) mais également d’ordre managérial si l’on en
juge par la volonté des contrôleurs de satisfaire des directions générales dont
l’attention semble focalisée sur les résultats financiers à court terme.
Après un tri croisé des différentes réponses aux questions portant sur les niveaux
de responsabilité et d’autonomie, nous avons pu évaluer la répartition des
contrôleurs de gestion par degré de latitude (tableau 4). Il ressort de ce test que
les contrôleurs de gestion ont, majoritairement, un degré de latitude faible (73 %
des cas) pour 1 seul cas de latitude élevée (5% des cas).
Tableau 4 : Répartition de la population selon les trois degrés de latitude des contrôleurs
de gestion
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actionnaires et, par conséquent, à la nécessité d’obtenir une rente financière
importante à court terme (Dodd et Favaro, 2007). D’autre part, et ceci est la
conséquence du premier point, la configuration du système budgétaire ainsi que
la latitude des contrôleurs de gestion plaident en faveur d’une mesure prioritaire
de la performance financière. En effet, l’organisation du contrôle renvoie à une
forte dimension technique (structure, outils d’analyse, ERP) dont la principale
conséquence est l’omniprésence de données financières et quantitatives dans le
reporting. Qui plus est, au regard de notre hypothèse de départ, nous pouvons
observer que les contrôleurs de gestion disposent, d’une part, d’un niveau de
responsabilité très réduit en raison essentiellement du poids des tâches afférentes
à la mesure financière des résultats et, d’autre part, d’un niveau d’autonomie très
faible compte tenu de l’ascendant managérial des directions générales dans les
choix que ces derniers opèrent au sein du système budgétaire. Cette tendance
semble plus marquée encore dans le contexte actuel de crise qui voit grandir
l’intérêt des dirigeants pour la performance financière. Les trois enseignements
majeurs que l’on peut tirer de ces résultats sont donc les suivants.
D’une part, les stratégies de RSE ne sont pas suffisamment ancrées dans
la structure et la culture de l’entreprise de telle sorte que la configuration du
contrôle s’en ressent. En effet, le rôle des directions générales est manifeste
dans l’organisation et le type de contrôle (Berland, 2002). Il en découle que
l’absence d’indicateurs ou d’utilisation de ces derniers relève en premier lieu
du manque de poids des axes et actions stratégiques tournées vers une plus
grande performance sociétale de l’entreprise. Peut-on en déduire que la mise en
œuvre d’une stratégie de RSE n’est pas une priorité, voire une nécessité pour
les sociétés cotées à l’heure actuelle ? L’une des réponses que nous pourrions
apporter à cette question renvoie à la dimension « stratégique » de la RSE mais
du point de vue, non pas de la performance sociétale effective de l’entreprise
mais davantage de sa communication externe. De nombreux auteurs ont, à
l’instar de Naro (2005), observé que les sociétés cotées, bien qu’étant parmi les
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D’autre part, le tableau de bord « classique » bien que souvent cité ne semble
que très peu lié à des objectifs stratégiques précis. Il sert essentiellement à
identifier certains aspects clés qui font l’objet de plans d’actions opérationnels.
Il en découle que les objectifs stratégiques ne sont pas en lien avec la mesure
de la performance autre que financière et que cette dernière semble « relayée
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au second plan ». Pour autant, notre enquête par questionnaires nous montre
que le tableau de bord classique reste en tête devant le BSC en ce qui concerne
l’utilisation d’indicateurs afférents à la RSE. Ceci peut s’expliquer par la tendance
encore marquée aujourd’hui à préférer cet outil au BSC qui, lorsqu’il est choisi,
semble demeurer plus près des versions antérieures au « remaniements » de
ses auteurs qui faisaient apparaitre une dimension « RSE ». Par ailleurs, les
outils classiques du contrôle (budget, ERP) sont particulièrement lourds à utiliser
et chronophages qui plus est. Une grande partie des personnes interviewées
lors d’une étude exploratoire antérieure avaient ainsi fait valoir leur difficulté
à gérer aussi bien les aspects techniques (évaluation et suivi des résultats,
analyse des écarts) que technologiques (gestion de l’ERP, simulation, extraction
de données, transmission d’informations, etc.) eu égard à la configuration du
système budgétaire. Cela peut, dans un contexte de crise, intensifier les tensions
inhérentes aux clôtures mensuelles et au reporting et induire des focalisations
quasi « symptomatiques » sur les données financières.
Enfin, bien que les indicateurs afférents à la RSE soient moyennement présents
ou utilisés quel que soit le contexte, on relève une faible implication de données
non-financières dans le contrôle et notamment au niveau du reporting. Deux
réponses peuvent être apportées ici. Soit il est nécessaire de revoir les outils et
leur capacité à intégrer des indicateurs dédiés exclusivement à la RSE, ce qui
signifierait que, sur le plan technique, des outils ad hoc sont peut être à explorer
mais que, idéologiquement, la performance financière détermine la performance
sociale (Preston et O’Bannon, 1997). Soit, cela suggère, une fois encore, que la
culture de la RSE n’a pas encore imprégné les sociétés cotées en général et leur
système budgétaire en particulier.
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Conclusion
Nous avons présenté dans cette contribution les résultats d’une étude quantitative
portant sur le déplacement du contrôle de gestion vers la RSE. En somme, les
résultats de l’enquête par questionnaires permettent de dire que les sociétés cotées
ne sont pas encore totalement engagées dans des démarches de RSE (56 %
des sociétés sondées) mais qu’en revanche, celles qui s’impliquent en la matière
(44 % des cas) ont majoritairement des systèmes budgétaires organisés de façon
spécifique. Ainsi, parmi elles, 61 % disent utiliser un tableau de bord classique à
des fins de contrôle social ou sociétal contre 29 % qui disposent d’un BSC. Parmi
ces sociétés, la plupart possèdent des indicateurs de mesure de la performance
attachée à la RSE (91 % des cas) et, dans les mêmes proportions, disent utiliser
des données à la fois financières et qualitatives dans leur reporting. Néanmoins,
la présence d’un reporting afférent à la RSE n’’implique pas naturellement la
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mise en place d’actions stratégiques (77 % des cas). Les résultats concernant
la latitude des contrôleurs de gestion corroborent ces premières observations.
En effet, 77 % des contrôleurs interrogés estiment que les tâches de contrôle
usuelles sont susceptibles de les empêcher de réaliser d’autres activités et, dans
64 % des cas, que le temps imparti à l’éco-contrôle est « faible ». Par ailleurs,
64 % des contrôleurs avouent ne pas être en mesure d’orienter leurs missions
et de se concentrer en priorité sur les tâches afférentes à la RSE alors que 68
% d’entre eux estiment comme « élevée » l’importance à accorder à ces mêmes
tâches. En somme, le degré de latitude des contrôleurs de gestion évoluant dans
un système budgétaire configuré à des fins d’éco-contrôle est majoritairement
faible (73 % des cas).
Nous avons ainsi observé que parmi les sociétés impliquées en matière de RSE,
le contrôle ad hoc de la performance qui en découle n’est pas effectif quand bien
même le système budgétaire dispose d’outils adaptés. Ceci s’explique en grande
partie par la configuration même d’un système budgétaire dont les missions et la
structure sont ordonnées par des directions générales elles-mêmes prisonnières
du chiffre et des intérêts majeurs dictés par leur conseil d’administration. Le
contexte actuel est certainement un biais bien que l’absence d’actions stratégiques
qui découleraient du reporting sociétal témoigne néanmoins de l’importance
relative de ce dernier. Il est dès lors possible d’imaginer que l’implication dans
une démarche de RSE ne soit pas véritablement une établie en raison, sinon de
l’absence d’outils spécifiques à la mesure de la performance qui en découle, du
moins du faible impact du reporting sociétal sur les actions stratégiques à long
terme. La solution est-elle d’ordre technique, c’est-à-dire à chercher dans les
outils utilisés dans le système budgétaire des sociétés cotées, ou bien se situe-
t-elle davantage au niveau des directions générales, introductrices du contrôle
(Goold et Campbell, 1987) et seules capables d’assurer l’effectivité et la pérennité
des activités d’éco-contrôle ?
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Le déplacement du contrôle de gestion vers
la RSE : un «éco-contrôle» plus juste ou juste
l’écho d’un contrôle ? Cas de 50 sociétés cotées
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