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Ouvrage publié sous la direction de Claire David


ISBN : 978-2-330-02350-8
©ACTES SUD, 2013 « Un endroit où aller »
Achevé d’imprimer en janvier 2016
Dép^t légal : Septembre 2013
N° d’imprimeur : 89182
1

— Ça va vous ?
— Trop aimable, merci.
— Je suis votre voisin du dessus, vous me remettez ?
— Comment donc, allons…
— Vous avez une seconde ?
— Absolument.
— Ce ne sera pas long.
— Je vous en prie.
— Vous êtes juif ?
— Pardon ?
— J’ai vu ça sur Internet.
— Ah, si c’est sur Internet, alors, oui, oui.
— J’aimerais savoir ce que c’est.
— Ce que c’est ?
— Oui, c’est quoi au juste ?
— Quoi donc ?
— Juif.
— ?
— J’entends partout « juif, juif, juif », et je ne sais toujours pas ce que c’est,
et comme il se trouve que nous sommes voisins – vous êtes pour ainsi dire mon
voisin du dessous, non ?
— Absolument.
— Et comme, en plus, vous, vous l’êtes…
— Pardon ?
— Juif, vous l’êtes, c’est sur Internet.
— Absolument, absolument.
—Je me suis dit comme ça, entre voisins…
— Oui ?
— Vous pourriez peut-être me mettre au parfum.
— Au parfum ?
— Sans vous déranger, pas la peine d’entrer dans le détail.
— Bien volontiers, mais…
— Mais ?
— Comme ça, à brûle-pourpoint, sans documentation, je…
— Oui oui, je vois.
— Je peux vous indiquer des livres.
— Des livres ?
— À lire.
— Je sais, je sais que les livres sont à lire, merci.
— Pardon ?
— On me l’avait dit !
— On vous avait dit quoi ?
— Quand il s’agit de rendre service, surtout à un non-juif, le juif…
— Non non non non ! Permettez !
— Vous fatiguez pas, on a compris je vous dis.
— Pardon, mais là je crains…
— J’ai compris, c’est clair ?
— Encore une fois, compris quoi ?
— Oh oh, doucement hein, sur un autre ton !
— Je m’excuse, mais vraiment là, c’est moi qui ne comprends pas.
— C’est vous qui comprenez pas ?
— Absolument.
— Vous vous foutez de ma gueule ou quoi ?
— Absolument pas, on se connaît à peine.
— OK. Il y a combien de temps qu’on se croise dans l’immeuble « bonjour
bonsoir, sourire sourire, ça va ça va » ?
— Heu…
— Est-ce que je vous ai déjà demandé une fois quoi que ce soit ?
— Absolument pas.
— Et moi, quand je passe dans le hall et que je vois votre boîte déborder…
— Ma boîte ?
— Je vous les repousse ! En passant.
— Pardon, vous me repoussez quoi ?
— Vos lettres, vos putains de lettres ! Pour pas qu’elles se répandent au sol,
surtout que vous vous levez à pas d’heure !
— Ah, je ne savais pas, j’ignorais, dans ce cas merci, merci beaucoup.
— Pas besoin de vos mercis, c’est normal, naturel, humain entre voisins,
l’entraide, la solidarité, mais vous : « des livres » ! Soyez franc au moins !
— Comment ça ?
— Dites que ça ne me regarde pas !
— Pourquoi je vous dirais ça ?
— Dites que vous voulez garder vos petits secrets entre vous !
— Quels secrets mon Dieu ?
— Je m’en fous moi, si vous voulez tout savoir, des juifs et des… C’est ma
femme que ça travaille, elle, elle regarde la télé, elle lit les journaux, elle reste
scotchée sur Internet, et à chaque fois, elle me dit : « Ça cause que d’eux ! »
— Que d’eux ?
— Des juifs ! Que des juifs !
— Vraiment ?
— « C’est qui, c’est quoi à la fin ? » elle me demande. Et moi, bon con, je
sais pas quoi lui répondre. Alors je vous demande, pour elle, entre voisins,
comme un service, entre hommes pour ainsi dire, parce qu’elle, elle ose pas
aborder votre épouse…
— Mon épouse ?
— Elle la trouve crâneuse.
— Ah bon ?
— Alors moi je lui ai dit que vous, au moins, vous n’aviez pas l’air de l’être.
— Pardon, mais là vous faites erreur.
— Je fais erreur ?
— C’est ma femme qui ne l’est pas.
— Votre femme ne l’est pas ?
— Ma femme, non, pas du tout.
— Elle en a l’air pourtant.
— Eh bien, elle ne l’est pas du tout.
— Ma femme n’est pas de cet avis.
— Bon, que dit Internet sur ma femme ?
— Internet ne dit pas qui est crâneur ou pas, il dit qui est juif.
— Justement.
— Justement quoi ?
— Ma femme ne l’est pas.
— Crâneuse ?
— Non juif, enfin juive.
— Et vous ?
— Et moi ?
— Vous, vous l’êtes ?
— Je ne pense pas, non.
— Vous ne pensez pas que vous êtes juif ?
— Juif si, crâneur non. La preuve : vous me parlez, je vous réponds.
— Doucement, on se comprend plus là.
— Je veux juste vous dire que mon épouse…
— Vous essayez de me balader ou quoi ?
— J’essaie de vous quoi ?
— Me balader.
— Ah pas le moins du monde, je tenais juste à préciser que ma femme, mon
épouse ne l’est pas, n’est-ce pas. Elle est de Quimper.
— Quimper ?
— Bretagne sud, oui. Et, chose étonnante, ça me saute aux yeux en vous en
parlant, mon grand-père maternel, du côté de ma mère, lui, est né à Brest.
— Brest ?
— Brest-Litovsk.
— Où vous dites ?
— Brest-Litovsk.
— Vous êtes breton ?
— Voilà, vous avez tout compris. Je suis, nous sommes, des Bretons de l’Est.
— Et c’est tout ?
— Tout quoi ?
— Les juifs sont des Bretons de l’Est, et c’est tout ?
— Effectivement. C’est un peu plus compliqué que ça, mais si on ne veut pas
entrer dans le détail, en gros, c’est ça.
— Pourquoi on parle tout le temps des Bretons de l’Est et jamais de ceux de
l’Ouest ?
— Qui en parle tout le temps ?
— Les médias.
— Internet ?
— Pas qu’internet, les médias je vous dis.
— Et qu’est-ce qu’ils disent ?
— Sur Internet, ils disent qui est juif.
— Et ils ne disent jamais rien sur ce que c’est que l’être ?
— Jamais. C’est pourquoi je me suis permis de vous interpeller, afin de
savoir quoi lui répondre à ma… quand elle me demande ce que c’est exactement.
— Être juif ?
— Voilà.
— Elle voudrait savoir comment ça s’attrape ?
— Par exemple, oui.
— Eh bien dites-lui…
— Oui ?
— Que ça s’attrape le plus souvent à la naissance.
— À la naissance ?
— Oui, si vos parents sont juifs, vous avez de grandes chances de l’être
aussi.
— D’accord. Après ?
— Après, est juif celui qui ne nie pas qu’il l’est, quand il l’est.
— Ah ouais ?
— Voilà, avec ça vous avez de quoi satisfaire madame.
— Merci, merci beaucoup.
— Pas de quoi, c’est naturel entre voisins. Bonne…
— Pardon, comment vous avez dit ?
— Ça s’attrape à la naissance.
— Non, l’autre truc ?
— Est juif…
— Ouais ?
— Qui ne nie pas qu’il l’est…
— Ouais ?
— Quand il l’est.
— Vous ne seriez pas en train de vous foutre de ma gueule ?
— Absolument pas !
— De me faire le coup de l’humour ? Parce qu’avec moi, désolé, mais…
— Là pardon, je dois vous laisser.
— Une urgence ?
— Oui, j’ai peur que la banque ferme.
— La banque ?
— Je dois passer à la banque.
— Vous travaillez dans une banque ?
— Non, je dois juste passer retirer du pognon.
— Du pognon ?
— On vous a rien dit ?
— Dit quoi ?
— Sur Internet ?
— Quoi donc ?
— À propos des juifs et du pognon ?
— Ah si, oui oui oui, bien sûr, bien sûr, pas que sur Internet, mais…
— Mais quoi ?
— Moi, que vous le soyez ou non, vous savez…
— Je suis touché.
— Ça ne me fait ni chaud ni froid. Du moment que vous n’êtes pas… ou
pire… Et puis quoi ? Vous aimez le pognon ? Moi aussi, ça tombe bien, n’est-ce
pas, ça nous fait un point commun, à part que moi le pognon m’aime pas, il
m’évite, et vous ?
— Moi ça va, merci.
— Dites…
— Pardon ?
— Vous avez pas une petite exclu ?
— C’est-à-dire ?
— Quelque chose qu’on ne lit ni dans les médias ni sur Internet, un petit truc
pour étonner ma… elle est de Bordeaux.
— Bordeaux ?
— Vous avez jamais été à Bordeaux ? Elles sont toutes comme ça là-bas.
— C’est-à-dire ?
— Difficiles à étonner.
— Ah ?
— Alors, cette exclu ?
— Oui. Alors… dites-lui qu’un juif…
— Ouais ?
— Qu’un juif est un mortel comme les autres mortels – peut-être même un
peu plus mortel que les autres mortels – mais que LES juifs, eux, sont immortels,
et c’est pour cette raison qu’on parle tellement deux dans les médias depuis cinq-
six mille ans.
— Super, merci.
— Pas de merci entre voisins. Je me sauve.
— C’est mieux quand même ?
— Oui, qu’est-ce qu’est mieux ?
— De bien s’entendre entre voisins.
— Absolument, absolument.
— Bonjour chez vous.
— Merci.
2

— Ça va bien vous ?
— Ma femme…
— Votre épouse, oui ?
— Dit que vous vous foutez de ma gueule.
— À quel propos ?
— Votre histoire de Bretons.
— J’avais précisé que c’était plus compliqué que ça.
— Elle m’a dit que les juifs sont soit morts à Auch…
— Auschwitz ?
— Soit débarqués d’Afrique du Nord dans les années 1960.
— Je crains que les sites consultés par madame votre épouse ne soient un peu
trop concis.
— Vous, vous venez d’où ?
— D’où ?
— Algérie ? Tunisie ? Maroc ?
— Non non, moi ce serait plutôt côté Auschwitz.
— Et c’est où ?
— Pologne.
— Vous êtes polonais ?
— Pas du tout. Mais si je devais venir de quelque part, je viendrais plutôt
côté Pologne ou Roumanie. Mes grands-parents, côté paternel, étant nés à…
— Et vous ?
— Et moi ?
— Vous, vous êtes né où ?
— Ici.
— Ici ?
— À Paris.
— À Paris ?
— Oui, et mes parents aussi, ce sont mes grands-parents qui sont nés en… ou
en Pologne et qui y sont d’ailleurs…
— Si vous êtes né à Paris, vous êtes français ?
— Oui, je suis français, et vous ?
— Et moi ? Et moi quoi ?
— Vous venez d’où vous ?
— Moi ?
— Vous êtes né à Paris ?
— Pas loin, mais c’est pas le problème.
— Quel est le problème, vous êtes français quand même ?
— Bien sûr je suis français !
— Vos grands-parents venaient d’où ?
— Soyez gentil, n’inversez pas le problème hein !
— Encore une fois, quel est le problème ?
— Si vous êtes français, pourquoi dire que vous êtes juif ?
— Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Internet.
— Pourquoi ne pas demander à Internet de cesser de dire que vous l’êtes ?
— Ça ne me gêne pas du tout qu’ils le disent puisque c’est vrai. Je suis
français et juif, ou juif et français, si vous préférez.
— Moi je préfère rien du tout.
— Vous vous êtes quoi ?
— Je viens de vous dire que je suis français, ça va comme ça hein !
— Vous êtes français et catholique.
— Oui, catholique.
— Eh ben voilà.
— Voilà quoi ?
— Vous êtes comme moi.
— Comment ça je suis comme vous ?
— Vous êtes catholique et français, ou français et catholique, comme moi je
suis juif et français, ou français et juif.
— Ah, juif c’est votre religion ?
— Voilà, enfin non.
— Comment ça « enfin non » ?
— Je suis sans religion.
— Je comprends rien là.
— Athée, si vous préférez.
— Je préfère rien, je voudrais juste comprendre pour pouvoir expliquer à ma
femme.
— C’est simple : je suis athée, et même de plus en plus athée, mais si j’avais
l’obligation de choisir une religion, si l’appartenance religieuse devenait
obligatoire, ou si – à Dieu ne plaise – je devenais ou redevenais croyant, ce que
je ne crois pas possible, je me déclarerais plutôt de religion juive, hébraïque,
mosaïque si vous préférez.
— Je comprends pas un mot de ce que vous racontez.
— Je parle français pourtant.
— Pour moi c’est du grec.
— Tant que c’est pas de l’hébreu !
— Vous dites ?
— Résumons : je suis juif français ou français juif, au choix, voilà, comme
vous vous êtes catholique français ou français catholique. C’est clair ?
— Pour ce que je vais à la messe ! Ma femme est protestante.
— Pratiquante ?
— Un jour oui, un jour non.
— Baptisé ?
— Ma femme ?
— Non, vous ?
— Bien sûr baptisé.
— Vous avez fait votre communion ?
— Bien sûr j’ai fait ma communion.
— Moi aussi.
— Vous aussi ? Vous croyez à la Vierge Marie alors ?
— Pas du tout. Moi j’ai fait ma bar-mitsvah.
— C’est quoi encore ça ?
— L’équivalent juif de votre communion.
— Barmiquoi vous dites ?
— Tsvah. Bar-mitsvah.
— Ouais ouais, vous êtes pas en train de me monter un nouveau bateau ?
— Non non non. Ensuite, après ma bar- mitsvah, je me suis détaché de la
religion. En fait, je m’en étais détaché avant, et je n’ai fait cette bar-mitsvah, à
douze-treize ans, que pour faire plaisir à mes parents, qui voulaient que je le
fasse en mémoire de leurs parents, mes grands-parents donc, qui eux, sont…
bon, n’entrons pas là-dedans, ça risque de devenir… Disons qu’après cette bar-
mitsvah, je suis devenu athée, fermement et totalement athée, tout en restant juif,
ou même tout en devenant de plus en plus juif. Pourquoi vous me regardez
comme ça ?
— Écoutez, je ne veux pas vous prendre en traître…
— C’est-à-dire ?
— Je suis ceinture noire, et bien que je ne pratique plus, j’ai gardé la foi, si
vous comprenez ce que je veux dire.
— Je comprends, je comprends.
— Parce que là j’ai comme l’impression que ma femme a raison.
— À savoir ?
— Vous vous foutez de ma gueule.
— Écoutez, ce n’est peut-être pas l’endroit adéquat pour débattre de tout
ça…
— Ouais, vous avez raison, ce qu’il faudrait c’est qu’on se voie un jour à tête
reposée, chez vous ou chez moi, avec ma femme et votre épouse, et qu’on fasse,
comme qui dirait, le point sur la question.
— Tout à fait d’accord, en précisant toutefois si possible la nature de la
question.
— Un soir pour l’apéro. Oh pardon !
— Pourquoi pardon ?
— Vous buvez pas d’alcool, vous.
— Comment donc, bien sûr que nous buvons de l’alcool ! De toute façon, je
ne respecte plus, et n’ai même jamais respecté, les règles de la cacherout… Déjà
mes parents étaient très peu observants, quant à mes grands-parents que je n’ai
pas connus, et pour cause, je ne sais même pas s’ils l’étaient, pratiquants et
observants, d’ailleurs même s’ils l’étaient, cela n’aurait eu aucune incidence en
ce qui concerne l’alcool qui n’est pas du tout interdit dans la religion juive.
— D’accord d’accord, donc pastis pour nous et porto pour les dames.
— Ce sont les musulmans, les Arabes n’est-ce pas, qui n’ont pas droit à
l’alcool. Je parle des croyants, les autres font ce qu’ils veulent, comme vous et
moi, question alcool, si toutefois les observants les laissent faire.
— Bon ben, merci, merci beaucoup.
— Nous, enfin les juifs, n’avons pas le droit au porc, comme eux d’ailleurs.
— Pardon ?
— Au porc, au cochon, ron{1}.
— Ah ah, alors pas de saucisson pour accompagner. Peut-être des olives ?
— Saucisson de bœuf, voire de veau, ou même d’oie.
— D’oie ?
— C’est très bon paraît-il. Mais moi je mange de tout, j’adore le porc, le
cochon, la cochonnaille la charcutaille, les tripes, le museau, le fromage de tête,
hélas on en trouve de moins en moins, et comme ma femme, elle, bien que
n’étant pas, fait attention à mon régime…
— Elle veut vous faire mincir ?
— Non non, cholestérol.
— Bon alors on se fait signe.
— Pour gagner du temps et avancer un peu vous ne voulez vraiment pas que
je vous prête un livre ou deux ?
— Quel genre de livre ?
— LE livre.
— LE livre ?
— La Bible.
— La Bible ?
— Pour commencer par le commencement, oui.
— Les Évangiles et tout ça ?
— Non non non non, pas le Nouveau, l’Ancien.
— L’Ancien quoi ?
— L’Ancien Testament.
— Écoutez, ces temps-ci je suis un peu débordé, les affaires, les soucis n’est-
ce pas, j’ai pas la tête, pas la tête à lire, même pour faire plaisir à mon épouse.
— Votre épouse alors peut peut-être jeter un œil…
— Elle préfère chercher sur… L’Ancien Testament vous dites ?
— Qu’elle tape « Talmud ». C’est une bonne base. Remarquez, j’ignore à peu
près tout moi- même de ce qu’il y a dedans, je n’ai jamais été passionné par tout
ça, tout ce qui a trait au judaïsme. En fait, je m’intéresse aux juifs
passionnément, mais pas à la… – comment dire ? – pas au judaïsme, vous
comprenez ?
— Je… je vois très bien, merci.
— Bien alors…
— Vous avez dit ?
— Talmud Torah pour débutants.
— Merci.
— Je vous en prie.
— Bonjour à vot’dame.
— Pareillement.
— Je ne manquerai pas.
3

— Bonjour, ça va toujours ?
— Ma femme m’a dit ce que vous faites aux Palestiniens !
— Moi ?!
— Vous aviez omis de m’en parler, hein !
— C’est vous qui m’avez demandé de ne pas entrer dans les détails.
— Prendre la terre d’autrui, c’est un détail pour vous ?!
— La terre d’autrui ? Il se trouve que les juifs, les israélites, les hébreux –
appelez-les comme vous voulez – vivaient sur cette terre d’autrui bien avant que
les chrétiens n’y inventent le christianisme et les mahométans l’islam.
— Et alors ? Ça vous donne des droits immémoriaux sur cette terre vous
croyez ?
— Pas plus qu’à d’autres, mais pas moins.
— Plus, moins, n’essayez pas de m’embobiner. Je suis pas d’humeur.
— Depuis ces temps immémoriaux, il y a toujours eu des juifs là-bas. Et ceux
qui, contraints à l’exil, s’étaient dispersés aux quatre coins de la terre, chaque
année à Pâques se souhaitaient et se souhaitent encore « L’année prochaine à
Jérusalem ! ».
— Pourquoi vous n’y allez pas là ?
— Où ?
— À Jérusalem. Pourquoi attendre Pâques de l’année prochaine ?
— Je ne vous suis pas du tout.
— Pourquoi, maintenant que vous avez un pays à vous, vous restez vivre ici
chez nous ?
— Je suis un grand amateur de fromage.
— Quel rapport ?
— C’est en France – pays où mes parents et un heureux hasard m’ont fait
naître – qu’on trouve la plus grande variété de fromages au monde, non ?
— Vous vous foutez de ma gueule ?
— Pas le moins du monde. Vous savez que les fromages, surtout les frais, ne
supportent, pas plus que moi d’ailleurs, ni les voyages ni la chaleur.
— Ma femme m’a aussi parlé des territoires.
— Occupés ?
— Pourquoi vous les rendez pas ? Ça énerve ma femme vous pouvez pas
savoir ! Et votre mur ? Elle le trouve hideux ce mur !
— Personnellement je suis tout à fait pour rendre les territoires et détruire le
mur hideux.
— Pourquoi vous le faites pas alors ?
— Avant, je veux d’abord vaincre le chômage en France, régler les
problèmes sociaux et économiques en Europe, tout en liquidant la dette et la
pollution. Après, promis, dans la foulée, je m’occupe du Moyen-Orient, pas
seulement d’Israël et des Palestiniens, mais de la Syrie, du Liban, de l’Égypte,
sans oublier l’Iran, l’Irak, l’Afghanistan, et après, s’il me reste un peu de temps
et d’énergie, je m’attaque à l’Afrique.
— Ouais ouais, essayez pas de vous défiler avec vos blagues à deux balles !
Êtes-vous oui ou non pour la restitution des territoires ?
— Je suis pour les rendre, oui, mais à qui ?
— À qui ?! Aux Palestiniens tiens !
— À ceux soutenus par l’Iran qui souhaitent la disparition d’Israël et de ses
habitants, ou à ceux qui, confortés par l’Arabie Saoudite, attendent que la pièce
en trop du puzzle régional disparaisse sous l’action conjuguée de leurs si
démocrates et si pacifiques voisins ?
— Arrêtez ! Vous avez l’art de tout compliquer – un puzzle maintenant ! – je
vous pose une question simple, répondez-moi simplement.
— Vous avez raison. Le plus simple serait de rendre toute la région aux
Anglais, ex-gérants des lieux, qui surent si bien empêcher les juifs européens d’y
prendre pied pendant toute la guerre 39-45, et même après. Ou mieux encore aux
Turcs qui percevaient l’usufruit régional en y faisant régner l’ordre ottoman
avant l’arrivée des Anglais.
— Pitié, pas d’histoire-géo, j’ai assez avec ma femme qui me prend la tête
toutes les nuits. Je vous demande juste votre avis, c’est tout, d’homme à homme,
de voisin à voisin.
— Écoutez, je suis, comme tout le monde, et peut-être même un peu plus que
d’autres, pour la paix et la concorde immédiates au Moyen-Orient, dans le reste
du monde et nos escaliers.
— Super.
— Et pour, bien sûr, la création illico presto d’un État palestinien
démocratique, souverain et pacifique.
— Donc je peux dire à la{2} femme que vous êtes d’accord ?
— Oui mais avec qui ?
— Avec elle !
— Avec elle, absolument.
— Parce qu’elle, depuis qu’elle passe ses nuits sur « Palestine vaincra », elle
ne veut plus entendre parler de vous, ni de l’apéro projeté.
— C’est pour ça quelle ne me salue plus dans l’escalier ?
— Euh…
— Et quelle colle des papillons « Palestine libre », « Juifs à la mer », sur ma
boîte à lettres ?
— Ah bon ?
— Conseillez-lui de changer vite de site plutôt qu’avoir à déménager.
— Déménager ? Il est pas question qu’on déménage !
— J’ai beaucoup d’amis avocats.
— Bon, quels sites lui conseillez-vous ?
— Pour ne pas réduire près de six mille ans de judaïsme aux seuls XXe et
XXIe, un site sur l’histoire des juifs, et un autre sur le Talmud pour débutants.
— Merci, je vais lui dire ça.
— Et dites-lui aussi en passant, sans dire que cela vient de moi, que si en
1948,1967, ou 1973, Israël avait été vaincu par ses voisins coalisés, il n’y aurait
plus de problème israélo-palestinien, mais plus non plus un seul juif vivant dans
tout le Moyen-Orient.
— Vous êtes dingue !
— Je suis dingue ?
— On n’aurait jamais laissé faire ça !
— Qui ça « on » ?
— Nous.
— Nous qui ?
— Nous les Occidentaux.
— Ils en ont peut-être eu marre.
— Qui ?
— Les juifs.
— Marre de quoi ?
— De se faire bouffer en attendant que les Occidentaux viennent à leur
secours en faisant régner sur terre la paix, la démocratie, l’amour et la fraternité.
Ils y ont cru un bon bout de temps, et puis maintenant ils n’y croient plus faut
croire. Sur ce, bonsoir et bonjour chez vous.
— Je manquerai pas.
— Saluez de ma part votre charmante épouse.
— Talmud vous dites ?
— Talmud Torah pour débutants.
— C’est vraiment super non ?
— Quoi donc ?
— L’harmonie.
— L’harmonie ?
— Entre voisins.
— Ah oui oui.
— Il faudrait imposer ça dans les escaliers du monde entier !
— Ce serait bien oui, mais comment ?
— Par la force !
— Par la force ?
— Oui pourquoi pas ?
— L’harmonie planétaire obligatoire librement consentie sous peine de
représailles militaires ?
— Oui. Ce serait bien, non ?
— Bonjour à madame.
— Bonjour à la vôtre.
4

— Ça va vous ?
— Merci, et vous ?
— Ma femme a passé sa nuit sur un site antisémite !
— Comment elle sait ?
— Comment elle sait quoi ?
— Que c’était un site antisémite ?
— Elle m’a pas dit. Elle m’a dit de vous dire qu’elle, elle l’était pas.
— Je sais qu’elle, elle l’est pas.
— Antisémite je veux dire.
— Ah oui, d’accord.
— Voilà, j’ai fait la commission.
— Parfait.
— Pour l’apéro…
— Comment ?
— Samedi juste avant midi ?
— Samedi avant midi je petit-déjeune.
— Ah. Alors un soir ?
— Il faut voir.
— J’organise ça.
— J’en parle à mon épouse.
— Dites…
— Oui ?
— Ma femme se demande pourquoi les antisémites aiment pas les juifs ?
— Ça, c’est une très bonne question…
— Merci pour elle.
— À poser à un antisémite.
— Vous en connaissez ?
— Moi non, et vous ?
— Moi ?
— Vous devez bien en avoir un ou deux parmi vos amis ?
— On a très peu d’amis.
— Vous en avez bien un qui dit du mal des juifs de temps en temps ?
— Du mal ?
— Sans dire du mal, un qui en parle souvent sans l’être.
— Sans l’être ? Antisémite ?
— Non, juif.
— Je comprends pas ce que vous dites.
— Connaissez-vous quelqu’un, parmi vos proches, qui parle tout le temps
des juifs, sans l’être ?
— À part ma femme je vois pas.
— Bon, à part votre femme, est-ce qu’il y a d’autres antisémites dans
l’immeuble ?
— Attendez, le type de l’entresol gauche n’aime pas les nègres.
— Comment vous savez ça ?
— Il me l’a dit.
— Ça ne prouve pas qu’il soit antisémite.
— Ça prouve quoi ?
— Qu’il est raciste.
— C’est pas pareil ?
— Non.
— Pourquoi c’est pas pareil ?
— L’antisémite n’arrive pas à reconnaître qui est juif et qui ne l’est pas, du
coup il voit des juifs partout, il se sent cerné, assiégé, agressé et il a peur. Le
raciste, lui, reconnaît facilement qui n’est pas de sa couleur de peau, du coup il
se sent cerné, assiégé, agressé et il a peur.
— Donc c’est pareil.
— Pas du tout, c’est le contraire. Vous a-t-il dit du mal des Arabes ?
— Qui ?
— L’entresol gauche ?
— Pourquoi il m’aurait dit du mal des Arabes ? Y en a dans l’immeuble ?
— Pourquoi il vous a dit du mal des nègres alors ?
— Parce que le type des recommandés l’est.
— Pardon ?
— Le préposé aux recommandés l’est.
— L’est quoi ?
— Nègre, black, antillais ! Et comme il reçoit beaucoup de recommandés
avec accusé de…
— Qui ? Le type de l’entresol ?
— Une autre fois, attendez, il ma dit…
— Quoi ?
— Que si ça allait si mal…
— Si quoi allait si mal ?
— Tout.
— Tout ?
— Oui, si tout allait si mal, c’était à cause de gens comme vous.
— Comme vous : moi ?
— Comme vous, vous, oui.
— Comme moi moi, ou comme nous nous ?
— Attendez, il a dit que c’est à cause de gens comme vous qui vont jamais
aux réunions de copropriété que tout va si mal dans l’immeuble.
— Ah bon.
— C’est antisémite ?
— Copropriétaire je dirais.
— À votre avis, ce serait bien de l’inviter à notre apéro ?
— Qui ?
— L’entresol gauche.
— Si vous voulez évoquer les problèmes de la copropriété en tête-à-tête,
faites.
— Non, je veux dire à notre apéro à nous sur la question.
— Personnellement je n’y tiens pas.
— Vous préféreriez un antisémite déclaré ?
— Non plus, non, sans façon.
— Pour lui demander pourquoi il aime vraiment pas les juifs.
— C’est votre femme qui veut savoir ça, pas moi.
— OK, d’accord, pas d’antisémite.
— Remarquez, moi je n’ai rien contre les antisémites.
— Quand même, si, un peu, non ? Vous les aimez pas vraiment ?
— Non non non, ce que je serais tenté de leur reprocher peut-être serait
justement de ne pas aimer les juifs, sinon je suis sûr qu’il y en a de très
agréables, très bien élevés, très corrects.
— Vraiment ?
— J’ai eu moi-même un ami antisémite.
— Non ?! Il ne savait pas que vous, vous étiez…
— Internet n’existait pas. Et moi je ne savais pas non plus que lui était…
— Ah oui oui oui oui oui, c’est passionnant dites donc. Je regrette que ma
femme soit pas là. Alors ?
— Alors, hélas, on n’est pas restés amis longtemps.
— Pourquoi ?
— Un jour, à table, dans une pizzeria, il m’a dit que les juifs en 40 avaient
bien cherché ce qui leur était arrivé en Allemagne et qu’un chauffeur de taxi lui
avait dit qu’ils étaient chiants sur l’itinéraire et qu’ils laissaient jamais de
pourboire.
— Ouais, alors ?
— J’ai essayé de l’étrangler.
— Non !
— On a dû nous séparer.
— Vous êtes vachement susceptible dites donc !
— N’est-ce pas ?
— Bon ben alors je mets sur pied notre apéro spécial question et on essaiera
de ne pas en venir aux mains trop vite.
— Essayons.
— Ah, avant que j’oublie, ma femme a passé son dimanche sur la région.
— La région ?
— Le Moyen-Orient. Elle a trouvé un site géopolitique super-clair.
— Je crains le pire.
— Non non non. Elle m’a dit de vous dire, après examen approfondi du
terrain, de ne pas vous précipiter pour rendre les territoires étant donné l’exiguïté
et l’extrême proximité avec les voisins proches et lointains. Elle a ajouté – je sais
pas si je dois vous le dire – qu’il fallait être vraiment dingue pour partir là-bas
quand on était juif.
— Pour ceux qui partaient et qui partent encore, ce n’est pas un départ, c’est
un retour.
— Manque de pot, les autres veulent revenir aussi maintenant !
— C’est l’inconvénient des terres deux fois promises.
— Ouais, ça devient trop compliqué pour moi !
— Pas que pour vous !
— Vous en parlerez directement avec ma femme à l’apéro. Salut !
— Salut !
— Si je ne vous croise pas, je vous glisse un mot dans la boîte.
— OK.
— Je me réjouis.
— Moi itou.
— Bonne journée.
— C’est ça. Salut !
5

— Ça va toujours vous ?
— Super ! Ma femme s’éclate sur le site Talmud Torah vice !
— Talmud Torah vice ?!
— Talmud Torah par les vices… Attendez, non, c’est l’autre mot qui
m’empêche de…
— Quel mot ?
— Witz ! Talmud Torah par les witz !
— Par les blagues ?
— Voilà. Vous connaissez celle des deux ramoneurs ?
— Les deux ramoneurs ?
— C’est bête comme chou. Ma femme m’a pris la tête avec ça. Alors c’est
deux ramoneurs qui passent par une cheminée pleine de suie. L’un en sort
dégueulasse, l’autre blanc comme neige. Lequel des deux va se laver en sortant ?
— Le propre.
— Vous la connaissez ?
— Sans avoir étudié le Talmud, je connais quand même quelques blagues,
oui.
— Alors dites-moi pourquoi c’est le propre qui se lave et pas le sale ?
— Le sale voit le propre et le propre voit le sale.
— Oui, mais comment c’est possible qu’en passant tous les deux par la
même cheminée dégueulasse, l’un en sorte propre et l’autre sale ?
— Ah ça c’est le Talmud cours supérieur ! C’est pas au programme de la
première année. Sur ce, je me sauve.
— Ma femme vous remercie !
— De quoi ?
— Pour le Talmud. Super-extra elle m’a dit.
— Je m’en réjouis, saluez-la de ma part !
— Et l’apéro ?
— Quand vous voulez en fin d’après-midi.
— OK, je m’en occupe.
— Salut !
— Salut !
6

— Ça va pas vous ?
— L’escalier B.
— L’escalier B, oui ?
— Ils veulent foutre leurs boîtes dans notre hall !
— Leurs boîtes à ordures ?
— Leurs boîtes à lettres !
— Ils veulent regrouper les boîtes à lettres dans le hall ?
— Non non non, ils veulent coller leurs boîtes dans notre hall.
— Comme le hall dessert les deux escaliers…
— Vous voyez pas le coup fourré ?
— Quel coup fourré ?
— Ils se sont fendus dune pétition.
— Une pétition ?
— Ils veulent que toutes les boîtes soient identiques.
— Esthétiquement ça se tient.
— Esthétiquement ils veulent nous faire changer nos boîtes.
— Pourquoi les nôtres ?
— Parce qu’elles sont pas aux normes.
— Ah.
— Ah quoi ?
— Si elles sont pas aux normes…
— Ils veulent nous faire changer nos boîtes parce que les leurs sont plus
petites que les nôtres, voilà.
— Pourquoi les leurs sont plus petites que les nôtres ?
— Parce que les leurs sont aux normes !
— Ah bon.
— Alors ?
— Alors quoi ?
— D’accord, OK, venez surtout pas vous plaindre après.
— Après quoi ?
— Quand vous retrouverez vos grosses enveloppes ratatinées dans votre
boîte riquiqui !
— Pour moi une boîte est une boîte.
— On peut vous marcher sur la tête, vous, vous ne bougez pas, hein ?
— On ne peut pas me marcher sur la tête, mais…
— Demain ils voudront un tapis dans leur escalier de merde et c’est nous qui
casquerons !
— On n’en est pas là.
— Donne-leur un doigt, ils te bouffent le bras.
— Vraiment je ne vois pas…
— Vous ne voyez pas ?
— Non.
— Moi je vois et j’ai peur.
— Peur ? De quoi ?
— Que ça se termine dans le sang.
— Dans le sang ?
— Oui, dans le sang.
— Entre qui et qui ?
— Le A et le B.
— Mieux vaudrait négocier alors.
— Avec l’escalier B ?
— Oui, plutôt qu’en venir au sang, non ?
— C’est vous qui me dites ça à moi ?!
— Oui, c’est moi, pourquoi ?
— Vous avez rien compris alors.
— Compris quoi ?
— Ça sert à rien de négocier avec des gens de mauvaise foi qui en plus sont
pas de votre avis. Moi le premier B qui touche à ma boîte, je le remets aux
normes dans les grandes largeurs ! Vu ?
— Vu, et après ?
— Après il sera toujours temps.
— De quoi faire ?
— Négocier, si c’est ce que vous voulez.
— D’accord.
— En attendant, pour gagner du temps, comme je vous voyais plus…
— Nous étions en vacances.
— J’ai mis votre nom sur ma pétition.
— Ah ? Merci.
— Pas de quoi, à votre service.
— Qu’en pense l’entresol gauche ?
— Il est du A, il soutient.
— Et le syndic ?
— J’en fais mon affaire.
— Madame ?
— Quoi madame ?
— Elle en pense quoi madame ?
— Elle est dans le Talmud, elle a pas le temps de penser.
— Parfait.
— Tiens, j’ai une autre colle pour vous.
— Une autre colle ?
— Comment Dieu a fait pour donner les dix commandements à Moïse au
sommet de… du…
— Sinaï ?
— Vous la connaissez aussi ?
— Non non, mais je connais le Sinaï.
— C’est beau ?
— Je n’y ai jamais été, je le connais de nom.
— Alors, comment il a fait ?
— Comment il a fait quoi ?
— Moïse grimpe au sommet de… du… comme vous dites, et il redescend
avec les Tables de la Loi.
— Oui, alors ?
— Alors comment a fait Dieu pour les lui donner ?
— Je ne sais pas… Il lui a dicté le texte ?
— C’est ça, et c’est Moïse là-haut qui l’a gravé dans la pierre ?
— Je ne sais pas moi… Dieu est descendu ?
— Descendu ?
— Au sommet du Sinaï.
— Impossible.
— Pourquoi impossible ?
— Il n’a pas de corps.
— Qui n’a pas de corps ?
— Dieu !
— Dieu n’a pas de corps ?
— C’est dans le Talmud.
— Il nous a pourtant faits à son image.
— Une image n’a pas de corps.
— C’est juste.
— Vous donnez votre langue ?
— Pardon ?
— Vous donnez votre langue ?
— Je donne ma langue, oui.
— Il a plié le ciel.
— Il a plié le ciel ?!
— Oui. Il l’a plié jusqu’à ce que le ciel recouvre complètement le sommet
de… de… du… et comme ça il a pu lui remettre en mains propres les tables de
la Loi sans sortir de chez soi. Super non ?
— Super. Mais comment il a plié le ciel ?
— Comme une couverture.
— Comme une couverture, vous êtes sur ?
— Ma femme m’a détaillé tout ça ce matin pendant que je faisais le lit… heu,
pardon, pendant qu’on faisait le lit.
— Dites-moi, c’est niveau troisième année ça, non ?
— Ma femme est une bosseuse. J’y retourne, j’ai la tête qui enfle.
— Bonne journée !
— Une dernière chose, vous savez comment s’appelait l’escalier B avant ?
— Avant quoi ?
— Avant de s’appeler B.
— Boh…
— L’escalier de service.
7

— Ça va vous ?
— Ça va moi, et vous ?
— Ça va, je cours.
— Moi aussi.
— Bonjour chez vous !
— De même !
— Pardon…
— Oui ?
— Sans vous déranger, vous pourriez me dire où vous achetez votre viande ?
— Où j’achète ma viande ?
— Oui, ça m’aiderait.
— Ce n’est pas moi qui l’achète.
— Ah ?
— C’est mon épouse.
— Ah. Et elle, elle l’achète où sans indiscrétion ?
— Au Franprix.
— Au Franprix ils font la viande casher ?
— Non, halal.
— Votre femme achète de la viande halal ?
— Non, elle achète de la viande-viande au rayon viande.
— Pas casher ?
— Pas casher.
— Ah bon ?
— On est athées.
— Même pour la viande ?
— Même pour la viande.
— Bon ben bonne journée.
— Où vous courez comme ça avec votre cabas ?
— Sur Internet ils indiquent une boucherie casher, mais elle est à perpète
alors…
— Prenez donc de la viande halal au Franprix.
— Halal ?
— C’est kif-kif.
— Kif-kif ?
— Absolument kif-kif, pareil, la même barbaque.
— Ma femme…
— Dites-lui qu’elle est casher, en plus elle est moins chère.
— Que quoi ?
— Pardon ?
— Moins chère que quoi ?
— Que la viande casher.
— Ah, merci. Merci du conseil.
— À votre service.
— J’aime mieux quand même…
— Quand même ?
— Respecter le… la…
— Libre à vous.
— Merci quand même.
— Quand même pas de quoi.
8

— Ça va, vous en avez un beau bada !


— Ma femme m’a donné le choix.
— Entre quoi et quoi ?
— Ta tête tu couvriras ou ton… ta… tu…
— Tontatu quoi ?
— Tontatu découvriras.
— Tu découvriras quoi ?
— Heu…
— Ah je vois, oui.
— Vous voyez ?
— Vous avez donc préféré vous couvrir la tête.
— Voilà.
— Pourquoi ne pas lui avoir fait valoir que moi, juif certifié juif par Internet,
je vaquais toujours tête nue ?
— Je l’ai fait.
— Alors ?
— Alors elle a dit que vous, au moins, vous étiez en règle question…
— Tontatu ?
— Voilà.
— Comment elle sait ça ?
— Internet !
— Internet ne dit pas si je suis circoncis ou non, j’espère !
— C’est sous-entendu.
— Oui bien sûr.
— C’est barbare quand même.
— Qu’est-ce qu’est barbare ?
— De faire ça à des petits enfants.
— À l’âge où on nous le fait, on se rend compte de rien
— C’est ça qu’est barbare.
— Barbare pourquoi ?
— Ils pourront même pas revenir en arrière.
— Revenir en arrière pour aller où ?
— S’ils ne veulent plus être juifs une fois adultes !
— Ils pourront se retourner contre leurs parents.
— Comment ça se retourner ?
— Leur faire un procès.
— Pour les avoir circoncis sans leur demander leur avis ?
— Non, pour les avoir fait naître dans une famille juive sans leur avoir
demandé leur avis.
— Non, sérieusement, pourquoi ne pas supprimer ça ? La tête couverte suffit
non ?
— La circoncision est au cœur des trois religions du livre. Jésus lui-même fut
circoncis.
— Jésus ?
— Huit jours après sa naissance, comme moi.
— Vous déconnez ?!
— Il est né un 25 décembre, et on l’a circoncis huit jours après, c’est pour ça
que le jour de l’An tombe le jour de l’An, pas le jour de Noël.
— Non, Noël c’est Noël, le jour de l’An c’est le jour de l’An, racontez pas
n’importe quoi quand même !
— OK, bien que circoncis…
— De qui on parle là ?
—Jésus, bien que circoncis, a pu se convertir et même fonder une autre
religion.
— Écoutez, je préférerais que vous parliez de ça directement avec ma
femme. Elle, elle pourra vous répondre. Depuis notre retour de vacances, elle
surfe sur le Net en direct avec un rabbin américain.
— Un rabbin américain ?
— Qui la coache, oui.
— Comment ça « qui la coache » ?
— Quand quelque chose lui échappe, dans le Talmud ou ailleurs, elle lui pose
la question et il lui répond par Twitter.
— Quel genre de question ?
— Pourquoi on doit pas manger de cochon.
— C’est une bonne question. Qu’est-ce qu’il lui a répondu ?
— Parce que c’est interdit.
— Cest une bonne réponse.
— Vous pouvez pas savoir ce que ça la calme. Elle, toujours sur les nerfs,
elle est comme apaisée, libérée.
— Elle ne me dit toujours pas bonjour dans l’escalier.
— C’est la première fois qu’elle sent en elle une telle paix intérieure, une
telle joie d’être au monde, et moi du coup, je…
— J’en suis ravi. Excusez-moi, je dois…
— Où vous courez comme ça ?
— Des courses à faire.
— Pourquoi vous êtes toujours en train de cavaler ?
— Je cavale pas.
— Si, vous cavalez, vous êtes tendu, nerveux, si si, pourquoi vous
consulteriez pas ce rabbin américain ?
— Je ne suis pas croyant.
— Ça fait rien ! Le rabbin a dit à ma femme qu’il n’était pas nécessaire de
croire, qu’il fallait juste respecter la Loi et les Commandements.
— D’où le chapeau.
— Il me va bien, non ?
— On dirait que vous avez été conçu spécialement pour lui.
— Merci. Ce qui m’emmerde, c’est de le garder à la maison pour dîner et
tout ça.
— Pourquoi vous l’enlevez pas à la maison ?
— Y a ma femme à la maison enfin !
— Le matin, avant de mettre votre bada, calez donc une calotte sur votre tête,
comme ça, quand vous rentrez chez vous, vous enlevez votre chapeau, et vous
vous retrouvez en calotte.
— Ah super, super, merci, merci infiniment !
— Entre juifs faut s’aider hein, sinon qui nous aidera !
— Heu… moi je ne le suis pas encore.
— Et l’apéro c’est quand ?
— Ma femme…
— Oui ?
— Ça me gêne de vous le dire…
— Quoi encore ?
— Elle veut plus vous recevoir.
— Les Palestiniens ?
— Comment ça ?
— C’est encore rapport à ce que je fais aux Palestiniens ? Son rabbin lui a dit
que c’était pas bien ? Qu’il aurait fallu attendre que le Messie arrive avant de…
— Non non non, mais d’après lui, un mauvais juif est pire qu’un antijuif.
— Moi je serais un mauvais juif ?
— Vous sortez tête nue, vous mangez du porc.
— Je suis juif, juif – moi, je suis né juif et je mourrai juif ! Je n’ai pas
d’efforts à fournir pour le devenir ou le rester ! Vous comprenez ?
— Bien sûr, je comprends, mais ma femme…
— Écoutez, je suis juif comme je veux l’être, et pas comme votre femme ou
son rabbin américain veut que je le sois. Juif des pieds à la tête, heureux et fier
de l’être !
— Comment vous pouvez être fier et heureux d’être juif, sans rien faire, ni
rien croire de ce que font ou croient les autres juifs ?
— Bon, qu’est-ce que sont censés faire les juifs pour être reconnus juifs par
votre femme et son rabbin ?
— Le minimum.
— Et c’est quoi le minimum ?
— Respecter la nourriture, se couvrir la tête…
— Vous rêvez vous ?
— Moi ? Pourquoi je rêverai ?
— Moi je rêve. Cette nuit, j’ai rêvé. J’ai rêvé que je me réveillais dans une
petite chambre inconnue, triste et sale, dans un petit lit où j’avais dormi seul. À
côté de mon lit, il y avait un autre lit, et je savais que dans ce lit dormait Hitler.
— Hitler ?!
— Oui, Adolf Hitler, vous connaissez ?
— Bien sûr je connais. Mais qu’est-ce qu’il foutait là ?
— Il dormait je vous dis !
— À côté de vous ?
— Dans le lit à côté, oui.
— Il est gonflé !
— J’étais inquiet, moyennement inquiet, mais brusquement cette inquiétude
s’est transformée en panique. Sur la table de nuit d’Hitler, j’ai vu un texte que,
bien qu’enfant, je venais d’écrire, et que je devais avoir posé là par inadvertance,
la veille au soir. Si Hitler l’avait lu, j’étais foutu. Mais je me suis dit que
j’écrivais en français et qu’Hitler ne lisait pas le français. Et puis, j’ai découvert
que, de l’autre côté du lit d’Hitler, ma femme dormait, elle aussi seule, dans un
petit lit. Et je me suis senti rassuré.
— Et alors ?
— Alors je me suis réveillé.
— C’est tout ?
— C’est tout.
— Quel rapport avec ce qu’on disait ?
— Oui, quel rapport ?
— On parlait de quoi ?
— De votre femme et de son rabbin, je crois.
— Ah oui. Il lui a demandé pourquoi vous n’allez pas au moins une fois par
an à la synagogue ?
— D’abord comment sait-il que je n’y vais pas au moins une fois par an, à la
synagogue ?
— Internet.
— Internet ?
— Syna.gog control.
— Votre femme y va, elle ?
— Où ça ?
— À la synagogue.
— Ah non, elle, elle est encore stagiaire.
— Et vous ?
— Moi ?
— Oui, vous ?
— Ben quoi moi ?
— Vous vous faites circoncire quand ?
— Heu… On négocie.
— Avec qui ?
— Heu, moi avec ma femme, et ma femme avec son coach.
— Bon, bonne cicatrisation.
— Merci.
9

— Ça va pas du tout vous ?


— Si, pourquoi ?
— Je vous vois là, affalé sur les marches.
— J’attends.
— Vous attendez quoi ?
— Que quelqu’un ouvre cette putain de porte que je puisse enfin sortir !
— Pourquoi vous l’ouvrez pas vous-même ?
— C’est shabbat, non ?
— Shabbat ?
— On est samedi.
— On est samedi, oui.
— Alors j’ai pas le droit d’appuyer sur le bouton, vous savez bien.
— Qui le saura ?
— Qui saura quoi ?
— Que vous avez appuyé sur le bouton.
— Si ma femme attend dans la rue pour rentrer et qu’elle voit que c’est moi
qui…
— Oui oui, bien sûr.
— Copropriété de merde !
— Pardon ?
— Je leur ai demandé d’équiper la porte d’une clé vocale.
— Une clé vocale ?
— Oui, on arrive, on lui dit le code…
— À qui ?
— À la clé vocale. Et elle ouvre la porte. Comme ça, on peut entrer, même
shabbat.
— Alors ?
— Alors ils ont refusé. Et vous, vous n’étiez même pas là pour me soutenir.
— Je ne vais jamais aux réunions de copropriété.
— Pourquoi ?
— Ma religion me l’interdit.
— Mais pas du tout !
— Ma religion est l’anticopropriété.
— Mais vous êtes vous-même copropriétaire, non ?
— La haine de soi, vous connaissez ?
— Vous ne savez pas ce que m’a dit l’antisémite ?
— Lequel ?
— L’entresol gauche.
— Non.
— Il m’a dit que si on n’était pas contents de la porte on pouvait retourner
chez nous.
— Chez nous ?
— Dans notre pays.
— Votre pays ?
— Mon pays oui, il a dit.
— Qu’est-ce que vous lui avez répondu ?
— Que c’est exactement ce qu’on allait faire.
— Comment ça ?
— On part.
— En Israël ?
— Vous êtes pas dingue ! En Amérique !
— En Amérique ?
— Le coach de ma femme nous a proposé d’échanger nos appartements. Le
sien est équipé d’une clé vocale.
— Je ne comprends pas.
— On parle dans le machin et la porte…
— Non, vous parlez de votre rabbin coach ?
— Kohn.
— Pardon ?
— Le rabbin Kohn, pas coach.
— Comment il fera lui, une fois ici, sans sa clé ?
— Ah, chacun ses problèmes. Il est mieux placé que nous. Lui, s’il va à une
réunion de copropriété, il arrachera le morceau, il transformera l’immeuble, il
vous transformera aussi, il fera de vous un vrai juif.
— Merci.
— Y a pas de quoi.
— Vous parlez anglais ?
— Non, pourquoi ?
— Vous parlerez quoi là-bas ?
— Iddish. Quoi d’autre ?
— Vous parlez yiddish ?
— Ma femme l’apprend.
— Par Internet ?
— Non non, à la Maison du iddish, et après elle m’apprend ce qu’on lui a
appris là-bas.
— Vous partez quand ?
— Le plus tôt possible, on sent une telle hostilité ici.
— Où, dans l’immeuble ?
— Dans l’immeuble aussi, oui, partout.
— Pardon, mais votre épouse va perdre son coach alors ?
— Non, pourquoi ?
— Si elle est chez lui, et lui chez vous ?
— Ils continueront à communiquer par Internet, Twitter, Skype.
— OK OK, bon.
— Si on se croise plus, merci, merci pour tout.
— Je vous regretterai.
— Oui, vous n’aurez plus personne à qui raconter vos rêves à la con !
— C’est vrai.
— Hitler est revenu ?
— Il n’est jamais très loin.
— Vous, vous allez vraiment rester là ?
— C’est mon pays, ma maison, ma langue.
— Mazel tov !
— Pourquoi vous me dites mazel tov ?
— J’adore dire ça. Quand je dis mazel tov je me sens encore plus juif
qu’après l’opération !
— Alors mazel tov à vous aussi !
— On s’embrasse, on peut ?
— Comment ça on peut ?
— Shabbat !
— Entre voisins, pourquoi pas… Ah, ça pique !
— On se rase pas le samedi.
— C’est pratique.
— Vous savez pourquoi il faut respecter le jour du shabbat ?
— Non.
— Vous savez pas grand-chose dites donc !
— C’est vrai.
— Pour qu’une fois dans l’autre monde…
— L’autre monde ?
— … expédié au sous-sol pour l’éternité, vous ayez quand même droit à un
jour de repos par semaine sans fouet ni flammes.
— Vous êtes sûr qu’un enfer soit nécessaire aux juifs dans l’autre monde ?
— Demandez au rabbin Kohn quand il sera là.
— En attendant je vous tiens la porte.
— Je peux vous dire encore une chose ?
— Dites.
— Ma femme vous plaint.
— Elle me plaint ?
— Avoir reçu dans son berceau la plus belle religion du monde, la plus
ancienne encore en activité, et ne pas en profiter, c’est carrément gâcher la
marchandise !
— C’est un problème entre Dieu et moi.
— Quel problème ?
— Après Auschwitz, de deux choses l’une, ou il n’existe pas, ou c’est un
pervers sadique, dans les deux cas je…
— S’il n’existe pas, vous n’avez aucune raison de lui en vouloir.
— C’est juste.
— Et s’il existe, c’est quand même pas lui qui a fait Auschwitz !
— Non, mais il a fait l’humanité qui a fait Auschwitz.
— Vous êtes dur avec lui.
— C’est lui qui est dur avec moi.
— Quand même, quand le rabbin américain sera là, sortez au moins tête
couverte histoire de pas vous faire remarquer.
— Quand votre rabbin emménage, moi je déménage.
— Alors passez donc nous voir à New York ! Ma femme se fera une joie de
convertir la vôtre. Ça marche mieux quand même dans un couple quand les deux
sont juifs, non ?
— Elle l’est déjà dans mes rêves, ça nous suffit.
— Bon ben, za guézint !
— Ça veut dire ?
— Vous parlez pas iddish ?
— Comme vous le prononcez, non.
— Va en bonne santé !
— Ah ! Gaï gézintè ait !
— Vous aussi vous le parlez mal vous savez !
— Vous trouvez ?
— Ça fait rien, comme dit le rabbin de ma femme, plus personne jamais nulle
part n’aura le bon accent. C’est pas grave, l’important c’est que le iddish se parle
encore, quelque part, afin que ça continue.
— Bien que rabbin, cet Américain ne dit pas que des bêtises ! On sort ?
— Vous savez quoi ?
— Non, pas encore.
— J’ai réfléchi.
— Ah bon ?
— Je pense que je suis un meilleur juif que vous.
— Un meilleur ? Parce que vous n’osez pas appuyer sur un bouton le
samedi ?
— Non non, parce que vous, vous êtes juif par hasard.
— Par hasard ?
— Parce que vos parents l’étaient, non ?
— Alors ?
— Moi c’est différent. Moi, j’ai choisi.
— Votre femme a choisi pour vous.
— Mais jai choisi ma femme.
— Moi aussi j’ai choisi.
— Votre femme, oui, bien sûr, mais elle n’est même pas…
— Non non, moi aussi j’ai choisi d’être juif.
— Vous ?
— En ne cachant pas que je le suis, j’ai choisi de l’être.
— Ça marche comme ça ?
— Ça marche comme ça aussi.
— Bon ben, guézint alors.
— C’est ça.
— Je vous regretterai aussi vous savez.
— Gaï guézintè ait !
— Ciao.
Annexe{3}

Quels sont les livres que se proposait de prêter le voisin du dessous au voisin
du dessus

Difficile liberté, essai sur le judaïsme Emmanuel Levinas Albin Michel, 1963
Sauvegarde Imre Kertész Actes Sud, 2012
Écrits juifs Hannah Arendt Fayard, 2012
Les récits hassidiques Martin Buber Seuil, 1996
Juifs en errance Joseph Roth Seuil, 1986
Ainsi que tous les autres ouvrages de Joseph Roth
Mon père, inventaire Jean-Claude Grurnberg Seuil, 2003
Les langues du paradis Maurice Olender Seuil, 1989
Le juif imaginaire Alain Finkielkraut Seuil, 1980
À l’intérieur du camp de Drancy Annette Wieviorka et Michel Laffitte,
Perrin, 2012
Fidélité et utopie. Essai sur le judaïsme contemporain Guershom Scholem
Calmann-Lévy, 1978
Les poèmes juifs d’André Spire, et Écrits juifs d’Henri Heine, Editions du
Sandre, 1006
L’œuvre de Bernard Lazare et Le livre de ma mère d’Albert Cohen
pour conclure et ne pas en citer des milliers d’autres.

Pour les écrits antisémites, consultez Internet.

Afin d’être aussi complet que possible, je signale – à ceux que la question
continuerait à tarauder après lecture de ce présent ouvrage – qu’un professeur
émérite d’Harvard a répertorié à ce jour 8612 façons de se dire juif. Ne se
reconnaissant dans aucune, il a déclaré à la presse qu’il poursuivait ses
recherches. Je m’associe modestement, mais de tout mon cœur, à sa quête.
Notes du numériseur
{1}
Il y a bien ron dans le livre papier…
{2}
Dans le livre il y a « la » ce qui est absurde puisque la personne parle de sa
femme, j’aurais mis personnellement « ma »
{3}
J’ai changé un peu la mise en forme, en mettant titre, auteur et éditeur sur
la même ligne

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