La sexualité des mammifères, des primates, puis celle des
humains, sont organisées à partir d'une base neurobiologique innée sur laquelle interviennent les émotions et les processus cognitifs
Mais pourquoi la sexualité humaine est-elle si particulière et si
différente de celle des autres mammifères ?
Les mécanismes du plaisir et les facteurs cognitifs de
l'apprentissage sont à l'origine de la grande diversité des sexualités humaines
Nous essaierons de comprendre les processus fondamentaux à
l’origine de la complexité du comportement sexuel humain DEFINITION
Phylogenèse: terme d’origine grecque
Phylon: tribue, race, espèce
Genésis: genèse, création
Il s’agit de l’étude des parentés entre différents êtres vivants en vue
de comprendre l’évolution des organismes vivants LA SEXUALITE CHEZ LES MAMMIFERES Fonction de la sexualité chez les mammifères: la copulation Comportement crucial qui permet le dépôt du sperme dans le vagin la fécondation Comportement fondamental et nécessaire à la survie de l’espèce, régi par des mécanismes de sélection naturelle assurant son évolution dans le temps (ADAPTATION) Pour comprendre l’histoire évolutive du comportement sexuel, en particulier chez les primates et les humains, il est important de comprendre les facteurs qui contrôlent la copulation PRINCIPAUX FACTEURS BIOLOGIQUES DE LA SEXUALITE DES MAMMIFERES Les hormones sexuelles: activent, coordonnent et contrôlent la plupart des autres facteurs du comportement de reproduction Les circuits olfactifs (épithélium olfactif, organe voméro- nasal,. . . ): détectent et traitent les phéromones sexuelles, permettent l’évaluation du partenaire, l’excitation, puis le rapprochement physique des partenaires Les réflexes sexuels innés, pré-organisés dans le SNC: 1) moteurs : la lordose et l’immobilisation chez la femelle, les poussées pelviennes et l’intromission chez le mâle 2)autonomes: lubrification vaginale, érection et éjaculation 3) neuroendocriniens: l’ovulation réflexe, provoquée par le coït (chez certaines espèces ancestrales) EVOLUTION DES FACTEURS DE LA SEXUALITE CHEZ LES PRIMATES Altération de l’olfaction
Altération de l’organe vomeronasal chez les primates
et les hominidés 90 % des gènes des récepteurs aux phéromones ont disparu, chez les humains Altération de la communication par signaux chimiques chez les hominidés et les bonobos Disparition du reflexe de lordose La disparition du réflexe copulatoire de lordose chez les hominidés a eu plusieurs conséquences… La réceptivité de la femelle n’est ni obligatoire, ni passive Les réflexes moteurs sont remplacés par de nouvelles activités sexuelles, dont plusieurs sont sans aucun rapport avec la copulation et la fécondation. Par exemple, la masturbation réciproque. La position innée de lordose de la femelle est remplacée chez la femme par des positions apprises, comme le coït en face-à-face Les réflexes sexuels moteurs innés qui permettent la copulation sont remplacés par des activités de nature érotique et apprises, en particulier chez la femelle Dissociation des activités sexuelles des cycles hormonaux - Cette dissociation est progressive et devient importante chez les hominiens - Elle est majeure chez les bonobos et elle est quasi-complète chez la femme (disparition des périodes de chaleurs) - Il existe encore une influence résiduelle oestrale et saisonnière mais, il n’existe plus d’inhibition comportementale - La sexualité humaine est devenue continue. - L’être humain, masculin ou féminin, peut être sexuellement motivé, avoir des activités érotiques et ressentir des plaisirs érotiques à n’importe quelle période des cycles hormonaux et à n’importe quelle période de l’année DISSOCIATION DES ACTIVITES SEXUELLES DE LA REPRODUCTION
Courbes hormonales d’après Thibault et Levasseur, 2001.
En vert: périodes où les activités sexuelles sont possibles au cours du cycle Importance fonctionnelle des récompenses érotiques Chez les grands primates, le système de récompense, associé aux zones érogènes, devient continuellement fonctionnel. Evolution des zones érogènes : plusieurs régions du corps humain, non génitales, peuvent devenir érogènes Le système pileux, qui joue un rôle social chez les mammifères, peut chez l’humain transmettre des sensations érotiques Toute action qui active le système de récompense peut induire l’apprentissage d’une motivation à répéter cette activité érotique L’apprentissage de la motivation sexuelle humaine n’est plus limitée à la copulation hétérosexuelle, mais peut s’étendre à tous les types de stimulations érotiques des corps Corticalisation du SNC chez les mammifères C’est le développement relativement graduel du néocortex chez les mammifères. Ce développement des aires associatives corticales polymodales permet l’émergence graduelle de capacités cognitives élaborées, qui permettront dans l’espèce humaine l’apparition de la culture En raison de la sophistication des traitements cognitifs, les activités érotiques ne sont plus de simples réponses aux caractéristiques d’un environnement ou d’un partenaire Le comportement sexuel humain n’est plus un simple comportement érotique et l’attachement n’est plus uniquement la recherche de la proximité physique Le plaisir, ainsi que la signification individuelle et sociale du plaisir, peuvent être intégrés dans des comportements ou des situations symboliques complexes Evolution des principaux facteurs qui contrôlent le comportement sexuel des mammifères. D’après Wunsch (2014). DESORGANISATION DE LA COPULATION ET EMERGENCE D’UN COMPORTEMENT DE TYPE « EROTIQUE » Désorganisation de la copulation hétérosexuelle La dissociation des activités sexuelles des cycles hormonaux fait que les activités peuvent avoir lieu même quand les gamètes ne sont pas matures L’altération de l’olfaction affaiblit l’attraction pour le sexe opposé La disparition fonctionnelle du réflexe de la lordose induit la disparition de l’immobilisation et de la position adaptée à la copulation Par conséquent, la proportion d’activités sexuelles qui ne permettent pas la reproduction augmente Emergence d’un comportement de type érotique
Parallèlement à ces modifications, le système de
récompense associé aux zones érogènes primaires devient continuellement fonctionnel Les observations éthologiques indiquent que les activités sexuelles des hominidés ne sont plus orientées principalement vers la copulation hétérosexuelle, mais plutôt vers des stimulations des zones érogènes génitales La sexualité humaine est détachée de l’instinct en faveur de l’apprentissage Dynamique probable du comportement sexuel des hominidés D’après Wunsch (2007, 2014) La sexualité érotique et culturelle des humains L’évolution majeure des capacités cognitives chez les humains permet d’élaborer et d’attribuer des significations et des valeurs particulières aux activités de stimulations des zones érogènes l’humain peut concevoir des pratiques érotiques raffinées ou au contraire limiter la sexualité à la reproduction Toutes les activités humaines deviennent ainsi chargées de normes intériorisées ou de significations symboliques, qui sont transmises par apprentissage social, et qui s’accumulent au cours des générations Apparition de la culture
Les données historiques et ethnologiques montrent la
diversité des valeurs sexuelles et des pratiques culturelles, qui sont très différentes d’une société à l’autre Les études sociologiques ont montré l’importance majeure et structurante de la culture sur la sexualité humaine L’être humain est la seule espèce qui va imaginer une série d’activités hautement spécifiques, à la recherche du plaisir (Sports, gastronomie, musique, …) CONCLUSION
Chez la plupart des mammifères, il existe une
organisation biologique spécifique pour la copulation hétérosexuelle, qui permet la fécondation par le dépôt du sperme dans le vagin. Chez les hominidés, qui cumulent toutes les altérations et évolutions décrites précédemment, la dynamique fonctionnelle du comportement sexuel est significativement modifiée La dynamique copulatoire hétérosexuelle des mammifères a évolué, chez l’être humain, vers une sexualité érotique et culturelle Ce qui caractérise l’être humain du reste du règne animal est la CULTURE