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DIPLOMATIE 100

SOMMAIRE
07/AGENDA
08/CARTOGRAPHIE
08 – Tanzanie : un « modèle » polémique en Afrique

10/POINTS CHAUDS

SEPTEMBRE-OCTOBRE 2019
12 – ANALYSE L’Église orthodoxe d’Ukraine : les enjeux d’une indépendance ecclésiale
18 – ANALYSE Zimbabwe : les espoirs déçus de l’après-Mugabe
23 – PORTFOLIO L’économie zimbabwéenne au bord du gouffre
24 – ANALYSE L’OPEP face aux enjeux du secteur pétrolier
29 – PORTFOLIO Dans le détroit d’Ormuz, la circulation du pétrole sous haute tension
30 – ANALYSE Haïti : le chaos, la refonte du système ou le bricolage continu ?

36/LE MONDE EN 2050


38 – ANALYSE Le monde en 2050 : la fin de la géopolitique ?
43 – TABLEAU DE BORD Quels changements dans l’ordre économique mondial
d’ici à 2050 ?
44 – ANALYSE Les États-Unis en 2050 : la cohésion nationale au défi de l’explosion
démographique
49 – FOCUS L’Amérique latine face à ses crises migratoires
50 – ANALYSE 2049 : la Chine de demain et son ombre
55 – FOCUS D’ici à 2050, l’Inde sera aux prises avec les conséquences
du déséquilibre hommes-femmes de sa population
56 – ENTRETIEN 1950-2050 : La construction européenne, cent ans après
61 – ANALYSE La Russie en 2050 : le choix d’un monde
66 – FOCUS L’Afrique subsaharienne en 2050 : trois défis et trois scénarios
68 – ANALYSE Le Moyen-Orient en 2050 : vers la fin du chaos ?
75 – ANALYSE 2050 : péril climatique ou sursaut politique ?
80 – PORTFOLIO Avant 2050, un business minier « made in space »… ?
81 – ANALYSE Science et technologie dans le monde de 2050 : continuités et ruptures

86/HISTOIRE
87 – ANALYSE La diplomatie de Napoléon III

92/ALERTES DE SÉCURITÉ
92 – CARTOGRAPHIE Alertes de sécurité dans le monde

96/LECTURES
Diplomatie 100
Affaires stratégiques et relations internationales 5
entretien
Avec Jean-Yves Camus,

1950-2050 : La construction
directeur de l’Observatoire
des radicalités politiques à
la Fondation Jean-Jaurès,
chercheur associé à l’Institut
de relations internationales et

européenne, cent ans après


stratégiques (IRIS).

Le 9 mai 2050, la déclaration Schuman, texte fondateur de la Comment envisagez-vous l’évolution de ces courants poli-
Photo ci-dessus : construction européenne, aura cent ans. Dans ce texte, le ministre tiques, à la fois à l’échelle européenne et, plus spécifique-
Alors que de nombreuses des Affaires étrangères français Robert Schuman se prononçait ment, au niveau des États membres ?
voix s’élèvent pour en faveur de la création d’une Communauté européenne du Jean-Yves Camus : Cette poussée des populismes euroscep-
demander une réforme charbon et de l’acier (CECA), qu’il envisageait comme l’une des tiques n’est compréhensible que si l’on accepte deux constats.
de l’Union européenne, « premières assises concrètes d’une Fédération européenne indis- Le premier est que le projet d’intégration européenne, dans
le président français, pensable à la préservation de la paix ». Mais, alors que la remise la forme institutionnelle de l’Union européenne, n’a pas su
Emmanuel Macron, en cause de ce processus d’intégration européenne semblait donner naissance à un narratif culturel et politique auquel
exposait à Lisbonne,
impensable jusqu’aux années 2010, la survenue de nombreux adhère une forte majorité des citoyens des pays membres
en 2018, sa vision « à dix
ou quinze ans », évoquant
vents contraires (crise de la zone euro, Brexit, arrivée au pou- de l’Union. Le second est que la crise du projet européen
une Europe en trois voir de Donald Trump, poussée des nationalismes en Europe…) est aussi celle, amplifiée 28 fois, qui touche chacun des pays
« cercles » concentriques a conduit certains analystes à pronostiquer comme possibles la membres, dans lesquels il devient de plus en plus difficile de
dont le plus central désintégration de l’Union européenne et la disparition de la zone gouverner parce que les fractures sociales, économiques,
constituerait « le cœur euro… Dans trente ans, le 9 mai sera-t-il toujours la Journée de identitaires, deviennent ingérables et qu’aucun bloc politique
du réacteur », « une Europe l’Europe… ? n’a plus de majorité stable et durable. La première affirmation
plus intégrée, qui amène une constatation : en 1950, être culturellement euro-
est allée au bout de Aux dernières élections européennes, en mai 2019, un tiers péen, appartenir à la civilisation européenne, donc être lié aux
la logique de la zone
des citoyens européens se sont tournés vers un parti radi- autres citoyens des pays du continent par tout un ensemble
euro » – un système qui
cal, populiste et eurosceptique, de droite ou de gauche [lire de repères historiques, de schémas de pensée et d’habitudes
permettrait probablement
de contourner les pays l’article de N. Brack dans Diplomatie no 99, p. 12]. Plusieurs découlant des civilisations grecque et romaine, germanique
les plus eurosceptiques. pays membres (Hongrie, Pologne, Italie…) sont gouver- et latine, du christianisme, même sécularisé, faisait encore lar-
(© Shutterstock/Alexandros nés par des partis nationalistes et/ou d’extrême droite et/ gement sens, de manière naturelle. En 2019, c’est nettement
Michailidis) ou xénophobes et/ou souverainistes à différents degrés… moins le cas, dans nos sociétés multiculturelles et globalisées.

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Septembre - Octobre 2019
Pour que l’Europe fasse de nouveau sens et qu’être européen Quel degré de probabilité accordez-vous à la perspective
soit une évidence partagée en 2050, il faut que la dimension d’une dissolution de la zone euro et d’un retour aux mon-
culturelle du fait européen prenne le pas sur la dimension ins- naies nationales ?
titutionnelle, forcément moins charnelle et plus désincarnée. Assez faible si l’on entend par là le retour de chaque État à
Sans quoi les oppositions au projet fédéraliste auquel vous sa monnaie nationale antérieure. D’ailleurs, la zone euro n’est
faites référence ne feront que s’accentuer, jusqu’à la cassure. pas toute l’Union européenne, nous sommes déjà dans un
Et il ne suffira pas que l’Europe soit plus « sociale » : la gauche a système dual, certes censément temporaire, mais qui dure.
utilisé cet argument du déficit social et cela ne lui a pas permis En revanche, il existe des scénarios possibles et plausibles,
de reconstituer ses forces, car on ne consent à la redistribution notamment celui qui verrait un bloc du Nord (Allemagne,
sociale, comme à l’impôt, que si l’on a conscience de « faire Autriche, pays du Benelux, Finlande, sans doute France) garder
peuple ». l’euro et un bloc du Sud revenir aux monnaies nationales. Le
Concernant les partis populistes et souverainistes dans les raisonnement derrière ce scénario est que seuls des pays aux
décennies qui viennent, il faut prendre acte une fois pour économies aux structures compatibles entre elles tirent avan-
toutes qu’il s’agit désormais, et depuis un quart de siècle déjà, tage d’une monnaie commune, tandis que ceux qui ne peuvent
d’une composante devenue incontournable, qui a changé le
paysage politique et que l’on peut sans grand risque de se

Pour qu’être européen soit


une évidence partagée en
2050, il faut que la dimension
culturelle du fait européen
prenne le pas sur la dimension
institutionnelle, forcément plus
désincarnée.
tromper inscrire dans celui des trente prochaines années. On
a incontestablement aujourd’hui deux gauches – une gauche
radicale et une sociale-démocrate – et trois droites : une droite
libérale ou de centre droit, une droite conservatrice tradition-
nelle que peuvent symboliser Les Républicains en France ou
la CDU-CSU en Allemagne et puis une droite populiste euros-
ceptique. Et je pense que ce clivage à l’intérieur de la grande
famille des droites est de fait devenu définitif. Il est absolu-
ment vain de se demander si ces partis ont un avenir.
Il faut intégrer aussi un fait extérieur à l’Union européenne,
que sont les flux démographiques y entrant, autrement dit la
question de l’immigration. Je ne peux absolument pas prédire
quelle serait l’évolution des opinions européennes si demain, plus supporter le poids de leur dette et souhaiteraient prati-
en raison de tel ou tel événement survenu de l’autre côté de quer des dévaluations pour redevenir compétitifs ont intérêt,
la Méditerranée ou au Moyen-Orient, une vague d’immigra- eux, à sortir de l’euro. Mais au fond, la sortie en elle-même
tion importante se produisait. Ou si la situation climatique, par est-elle le problème essentiel ? Dans ses aspects techniques,
Photo ci-dessus :
exemple en Afrique subsaharienne, poussait sur la route de sûrement pas. Plus importante est la question de la cohésion En prenant la décision
l’Europe des millions de réfugiés devant fuir des pays en voie des politiques économiques, car il est peu probable qu’un pays de quitter l’Union européenne,
de désertification. Le président Macron avait essuyé quelques sortant de l’euro ne fasse pas aussi, en matière de politiques le Royaume-Uni a montré
moqueries lorsqu’il avait évoqué cette éventualité à l’époque publiques, des choix opposés au jeu de la concurrence non à tous les États membres que
dans son discours de Ouagadougou (28 novembre 2017). Mais faussée et, de manière générale, aux postulats de base du ce choix était possible – bien
c’est un scénario parfaitement sérieux. Or l’un des détermi- libéralisme. La souveraineté économique sans la souveraineté que, trois ans après, le divorce
nants majeurs du vote pour les partis populistes euroscep- politique, cela n’a pas plus de sens que l’inverse ! Les questions ne soit pas encore effectif.
tiques, comme je viens de l’expliquer, c’est la variable identi- centrales, non négociables et pour tout dire idéologiques, sont À l’époque, de nombreux
observateurs craignaient
taire et le diptyque identité/immigration… Ce sentiment de celles de la norme juridique dominante (droit national vs droit
que les Britanniques ouvrent
plus en plus répandu que la société multiculturelle n’est pas communautaire) et de la frontière (la souveraineté consiste
la voie à d’autres États désireux
viable, en particulier quand l’autre vient de l’ère arabo-musul- d’abord à borner un territoire et à déterminer qui fait partie de sortir de l’UE, tels que
mane, est susceptible de connaître d’autres développements de la nation et qui n’y appartient pas). In fine, je pense qu’il les Pays-Bas, la Suède ou
si demain nous sommes confrontés à de nouveaux flux, qui n’existe pas de compromis possible entre le projet fédéraliste le Danemark. (© Shutterstock/
pourraient être encore plus massifs que ceux de 2015. et le projet souverainiste. Ivan Marc)

Diplomatie 100
Affaires stratégiques et relations internationales 57
Il y a trente ans tombait le mur de Berlin et commençait le physiques de l’Europe et de l’Union vont bouger du côté occi-
long cheminement vers l’intégration des pays d’Europe de dental, avec le Brexit. Celles au sud restent déterminées par
l’Est dans l’Union européenne, concrétisée par étapes en la façade méditerranéenne, de manière cohérente. Celles au
2004, 2007, 2013 et appelée à se poursuivre… Mais aupa- nord sont plus incertaines, car la Norvège et l’Islande parti-
ravant, en 2019, l’Union européenne s’apprête à passer de cipent incontestablement de la culture et de l’histoire euro-
28 à 27, si la sortie du Royaume-Uni se concrétise. Dans péennes, mais ont fait le choix de rester hors de l’Union euro-
trente ans, où dessineriez-vous les limites extérieures et péenne. La véritable question des limites se pose à l’est et au
intérieures de l’Europe (unie ou non) ? Faut-il s’attendre sud-est. À l’est parce que la Russie, comme la Biélorussie et
à un retour à l’Europe des nations, autour peut-être de l’Ukraine, sont européennes, du moins, pour la Russie, jusqu’à
systèmes d’alliances régionaux (Europe latine, Europe du l’Oural, par convention – même si dans une ville comme
Nord, Europe de Visegrad…) ? Kazan, au Tatarstan, je me sens pleinement en accord avec les
autorités locales qui situent l’endroit en « Eurasie », réalité pal-
pable dans le vécu quotidien. Au sud-est, se pose la question
de la Turquie. Et là, malgré l’existence d’une petite Turquie
d’Europe, il faut être clair : ce n’est pas rabaisser ce grand
pays que de dire qu’il n’est pas une puissance européenne.

Il n’y a pas, à mon sens,


de modèle alternatif plausible,
tant l’idée d’une Europe des
nations ethniques fédérées,
celles du retour à une Europe
impériale dans le sens du
Saint-Empire ou d’un seul État
unitaire européen semblent
éloignées du réel.
C’est une grande puissance, mais son histoire n’est tournée
vers l’Europe que pour l’expansion par la conquête. La Turquie
Les questions des limites extérieures de l’Europe et de celles de n’a donc pas vocation à entrer dans l’Union et, d’ailleurs, sa
l’Union européenne sont différentes. Il y a, d’une part, l’Union politique étrangère actuelle se déploie intelligemment sur
européenne – même si, par une confusion langagière qui s’est les deux axes naturels que sont le Maghreb/Afrique subsaha-
Photo ci-dessus : installée depuis assez longtemps, quand on dit « Europe » dans rienne d’une part, et l’ensemble des pays – notamment de l’ex-
Levée du drapeau de l’OTAN le commentaire d’actualité, on pense généralement « Union Communauté des États indépendants – où vivent des peuples
devant l’ancien quartier européenne » – et puis il y a, d’autre part, le continent Europe turciques d’autre part. L’Europe ne peut pas s’étendre infini-
général de l’Alliance dans ses très diverses définitions. Mais, même si en 2019 on ment, sauf à accréditer la thèse qu’elle n’est qu’un espace de
atlantique à Bruxelles, le envisage de plus en plus sérieusement des scénarios, non pas libre-circulation et de libre-échange. Ou alors, si l’on y rattache
10 juillet 2019. La question de dissolution de l’Union européenne, auxquels je ne crois tous les pays de culture européenne, y compris les États-Unis,
de la mise sur pied guère, mais d’abandon de l’Union par certains pays, comme le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, cela s’appelle l’Oc-
d’une défense véritablement
on est d’ailleurs déjà en train de le vivre, on a beaucoup de cident, concept qui, selon moi, masque une divergence fonda-
européenne, qui ne soit pas
dépendante de l’OTAN, s’est
mal à imaginer l’Europe sous une forme différente de celle de mentale d’intérêts stratégiques, géopolitiques, économiques,
posée avec plus d’acuité l’Union européenne. C’est ce qui rend très difficile l’exercice entre l’hyperpuissance américaine et ses alliés d’un côté, et
ces dernières années, de projection à trente ans. l’Europe de l’autre.
notamment en raison Certes, je fais partie de ceux qui ont connu ce qu’on appelait Le retour à l’Europe des nations, donc à l’équilibre « ante
des contraintes budgétaires le « Marché commun », c’est-à-dire le marché commun à six, CECA », me paraît moins probable que l’émergence d’unions
des États membres et celui des pères fondateurs. Mais on n’imagine pas aujourd’hui régionales qui existent d’ailleurs déjà sous des formes politi-
de la dégradation de sérieusement revenir à une organisation antérieure telle que quement molles (Union nordique) ou plus affirmées, comme
la relation transatlantique. celle-ci. Et il n’y a pas, à mon sens, de modèle alternatif plau- le groupe de Visegrad. Certains travaillent à la réalisation du
Les évolutions dans
sible, tant l’idée d’une Europe des nations ethniques fédérées, vieux concept de Pilsudski, l’Intermarium – unissant les pays
ce domaine feront
celles du retour à une Europe impériale dans le sens du Saint- d’Europe centrale et orientale allant de la mer Baltique à la mer
sans nul doute partie
des déterminants majeurs Empire ou d’un seul État unitaire européen semblent éloi- Noire. L’Europe du Sud, elle, manque de ce type de vision et le
du « visage » de l’Union gnées du réel. virage de la Lega italienne, de l’indépendantisme « padanien »
européenne en 2050. Je me sens naturellement européen à Oslo, à Belgrade, à vers l’unitarisme italien, a porté un coup au projet léghiste,
(© NATO) Londres et à Berne, tout en étant hors de l’Union. Les limites soutenu dans les années 1990, d’arrimer l’Italie du Nord à la

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Mitteleuropa que l’histoire lombarde et vénitienne, pour ne
pas parler de celle du Haut-Adige, donne en point d’ancrage
naturel.
On peut aussi penser que les trente prochaines années pour-
raient donner au projet européen un délai suffisant pour être
recrédibilisé. Et dans cette perspective, ne faudrait-il pas, fina-
lement, faire une pause ? Commencer par crédibiliser ce qui
existe et qui visiblement est en crise, plutôt que de continuer
à élargir. Un autre train d’élargissements est prévu d’ici à 2025-
2030, mais on sent déjà par le coup de frein qui a été donné sur
cet élargissement – notamment en ce qui concerne l’Albanie, la
Bosnie et la Macédoine – que l’hypothèse d’une pause n’est pas
totalement invraisemblable. Il ne s’agit pas d’une pause pour
tout arrêter, mais d’une pause pour consolider et mieux repar-
tir, parce que je continue à penser que l’Union européenne la
plus crédible, c’est celle qui rassemble tous les pays du conti-
nent Europe, qui ont une unité historique, une unité civilisa-
tionnelle. Est-ce que cela peut se faire à l’horizon des trente
prochaines années ? Pour certains pays, je n’en suis pas sûr.

On se retrouve confronté
à un paradoxe : les droites
populistes restent encore ou non à la porter par leurs moyens militaires et leur contri- Photo ci-dessus :
écartées des postes de bution financière, l’OTAN est-elle le parapluie militaire qu’il Reflet de la montée
décision. Elles bénéficient de faut pour une Europe qui veut compter dans le monde, et non
simplement se défendre contre un péril communiste qui a dis-
en puissance des partis
eurosceptiques et nationalistes
plus de députés, donc d’une paru ? Je ne le pense pas. Si l’OTAN a désormais pour objectif au sein de l’UE, la Ligue
de Matteo Salvini est apparue
plus grande visibilité, mais ne de mobiliser contre la Russie, c’est un projet suicidaire pour
l’Europe, une guerre civile intra-européenne supplémentaire.
comme le grand vainqueur

pourront pas peser beaucoup S’il s’agit de défendre l’Europe contre la montée de la subver-
des élections européennes
de mai 2019 en Italie
plus dans les décisions pour sion islamiste à l’intérieur et son expression à l’extérieur via
Daech et les groupes apparentés, qui peuvent – et qui vont –
(avec 34,3 % des suffrages
exprimés). Mais en raison
faire évoluer l’Union. migrer vers d’autres théâtres d’opérations, le compte n’y est d’un renversement d’alliance
pas, puisque l’objectif premier de Donald Trump est de sanc- à l’été 2019, l’ex-ministre
tuariser le territoire américain contre les attaques, pas d’abou- de l’Intérieur et son parti, qui
À quoi pourrait ressembler un système international sans tir à l’anéantissement politique des forces qui soutiennent n’est que second en nombre
de sièges à la Chambre des
Union européenne ? Comment les autres puissances réagi- l’islam radical. La question de la politique chinoise, via la Belt
députés, vont être évincés
raient-elles à sa désintégration ? Quel rôle éventuel pour- and Road Initiative ou non d’ailleurs, est différente. La Chine ne
du nouveau gouvernement
raient avoir joué certaines d’entre elles dans ce processus ? cherche pas à exporter en Europe un modèle civilisationnel, encore en cours de formation
Précisément, certaines puissances voient d’un très bon œil mais à conquérir des marchés et à neutraliser les critiques qui fin août. L’Italie offre ainsi
l’affaiblissement de l’Union européenne ! La Russie parce que peuvent être faites contre sa politique intérieure. Son champ une illustration de ce paradoxe
cela diminue la pression qui s’exerce sur elle, mais aussi, voire d’influence militaire est en Asie-Pacifique, en concurrence qui veut que les formations
surtout, parce que le pouvoir russe, suivi en cela par la majo- avec une supériorité américaine qui s’étiole. populistes ou d’extrême droite
rité de la population, croit vraiment que l’Europe actuelle a soient mieux représentées
trahi ses valeurs traditionnelles et qu’à terme, pour cette rai- Dans quelle mesure le regain de participation observé au Parlement européen qu’elles
son, elle est condamnée à se dissoudre. La Chine parce que lors du dernier scrutin européen, la montée en puissance ne le sont dans leurs pays
d’origine. (© Shutterstock/
toute guerre commerciale est gagnée plus facilement face à d’enjeux mobilisateurs de la société civile européenne
Mircea Moira)
un concurrent faible et divisé et que, en outre, elle poursuit sa (en particulier ceux liés au changement climatique) et le
politique de puissance et d’influence sans trop la calquer sur bouleversement des équilibres politiques traditionnels au
les soubresauts des autres. Et les États-Unis parce que, fon- sein du Parlement européen (PE) pourraient-ils être por-
damentalement, au-delà des questions de puissance militaire, teurs, selon vous, d’un avenir plus optimiste pour le projet
commerciale ou politique, ils considèrent l’Europe comme une européen ?
terre du passé et se sentent investis d’une mission, j’insiste sur Je fais partie de ceux qui effectivement se sont réjouis de
le terme, consistant à exporter universellement des valeurs et la participation au dernier scrutin européen, indépendam-
un mode de vie. La question de l’OTAN doit être vue à l’aune ment du fait qu’elle ait profité aux partisans de la poursuite
du désengagement voulu par Donald Trump, certes ; mais de du projet Union européenne, car, quelle que soit l’élection, il
manière plus fondamentale, que les États-Unis continuent est toujours préférable que les électeurs se prononcent. Plus

Diplomatie 100
Affaires stratégiques et relations internationales 59
ils sont nombreux à participer, et mieux c’est pour l’exercice mauvais score (perdant 21 sièges) qui venait se surajouter à
démocratique. Mais le taux de participation a été extrême- un assez mauvais score aux européennes (10,8 %, en baisse
ment variable selon les pays. Dans les pays baltes ou certains de plus de 15 points). Pour évoquer un autre pays, qui lui n’est
pays d’Europe centrale et orientale, la participation est restée pas dans l’Union : les élections municipales et régionales du
faible – ce n’est pas d’ailleurs un phénomène propre aux élec- 9 septembre en Norvège ne devraient pas non plus être un
tions européennes. grand cru pour le Parti du progrès, qui est le parti populiste
Quant au Parlement européen, certes, il n’est plus sous la anti-immigration local. N’ayons pas l’impression que ces partis
domination bipartite des sociaux-démocrates et des conserva- ont partout le vent en poupe et qu’ils ont « cassé la baraque »
teurs. Il reflète davantage la palette des opinions qui existent aux élections européennes. Je rappelle quand même que si la
dans les 28, pas seulement d’ailleurs des droites populistes et Ligue du Nord italienne a effectivement remporté un très beau
des gauches radicales : la gauche alternative, les écologistes, succès aux européennes, le score du Rassemblement natio-
sont aussi des familles politiques qui existent à l’échelle euro- nal est inférieur (très légèrement) à celui de 2014. Rappelons
péenne et il est à mon avis normal qu’elles soient représentées également que ce n’est pas sous un gouvernement de Nigel
en proportion. Cependant, on se retrouve confronté à un para- Farage que les Britanniques ont décidé de sortir de l’Union
européenne. Si, demain, d’autres pays devaient les imiter et
si l’Union européenne devait cesser d’exister, nul doute – sans

Aurons-nous encore
dans trente ans une Union
européenne aussi polarisée
autour de ce clivage Est-Ouest
qu’aujourd’hui ? Cela n’est pas
du tout évident.
s’aventurer sur un scénario de politique-fiction – qu’il y aurait
des quantités d’autres variables à considérer que le poids de
ces partis.

L’avenir de l’Union européenne dépend également, au


moins sans doute à l’horizon qui nous intéresse, du poids
respectif de ses États membres dans les institutions.
Comment voyez-vous évoluer l’influence des principaux
pays d’ici à 2050 ?
Honnêtement, c’est extrêmement difficile à prédire. Tout
dépend de l’évolution de la situation allemande, d’une part,
et de la façon dont auront évolué les pays d’Europe orientale
doxe : bien qu’un certain nombre des formations populistes ou qui servent pour le moment de contre-modèle, d’autre part.
d’extrême droite soient présentes au PE – et même plus repré- Que restera-t-il, à l’horizon 2050, du modèle de démocratie
Photo ci-dessus : sentées au PE qu’elles ne pèsent dans la vie politique de leurs illibérale prônée par Viktor Orban en Hongrie ou Jaroslaw
Manifestation en faveur pays respectifs –, les droites populistes restent encore écar- Kaczynski en Pologne ? Aurons-nous encore dans trente ans
de l’indépendance tées des postes de décision. Pas un seul poste de commissaire, une Union européenne aussi polarisée autour de ce clivage
de l’Écosse en 2014, refusée
pas de présidence de commission. Le groupe comportant la Est-Ouest qu’aujourd’hui ? Cela n’est pas du tout évident.
par 55,3 % des Écossais
cette année-là. Mais
Lega italienne et le Rassemblement national (RN) français Les jeunes générations en Pologne et en Hongrie, celles qui
la possible sortie de l’UE, comptait beaucoup sur une présidence de commission que n’ont connu que l’Union européenne, qui sont peut-être plus
surtout en cas de hard l’arithmétique lui permettait d’espérer. Finalement, rien n’est tournées vers le mode de vie occidental, et qui ont finalement
Brexit, repose la question venu. Pour ces partis, la situation n’a finalement pas beaucoup plutôt voté aux dernières élections pour les partis d’opposi-
de l’indépendance de changé. Ils bénéficient de plus de députés, donc d’une plus tion, seront peut-être devenues majoritaires. Il ne faut pas
la nation la plus au nord grande visibilité, mais ne pourront pas peser beaucoup plus nécessairement désespérer des pays du groupe de Visegrad
du Royaume-Uni, très dans les décisions pour faire évoluer l’Union. Cela est d’autant par exemple. Ils ne seront peut-être pas en 2050 dans l’état
europhile. En 2016, 62 % plus vrai en cette fin du mois d’août 2019 que Matteo Salvini d’esprit et l’attitude qui sont les leurs aujourd’hui. Dans toute
des Écossais avaient voté
se trouve dans une situation dont on ne connaît pas encore l’Europe, il y a des opinions publiques qui vont à mon avis
en faveur du maintien
l’issue. En tout état de cause, il n’est plus aussi fort qu’en bouger, assez vite, du fait des changements démographiques.
dans l’UE… C’est ainsi l’un
des dossiers qui pourraient juin. Plus généralement, on ne sait pas très bien si ces partis C’est notamment pourquoi je ne suis absolument pas de ceux
faire évoluer les contours populistes auront en milieu de mandature la même influence qui font les prophètes de malheur et disent qu’en 2050, le pro-
de l’UE d’ici à 2050. qu’au début. Au Danemark par exemple, le Parti populaire jet européen sera terminé.
(© Gerard Ferry/Flickr CC) danois a fait aux législatives qui ont suivi les européennes un Propos recueillis par Nathalie Vergeron, le 24 août 2019

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