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Brézil
Une nouvelle génération
Aracy Amaral
URI: https://id.erudit.org/iderudit/53710ac
Publisher(s)
La Société La Vie des Arts
ISSN
0042-5435 (print)
1923-3183 (digital)
Tous droits réservés © La Société La Vie des Arts, 1991 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including
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Frida Baraned,
Sans titre. 1990,
Tiges, pailles et plaques de 1er, 245 X 320 X 220 cm
Coll: Gabinette de Arte. S. Paolo
À Sào Paulo, au début de 1983, une avant-garde, en dépit du révision- la mesure où elles soulignent la nécessité
d'innombrables artistes dans la jeune nisme qui l'a caractérisée. des discussions sur l'art et sur leurs
vingtaine se considéraient aptes à exposer Peintures sans chassis, la bâche qui propres travaux. L'exposition de Leonilson
dans les musées et les salons. Sortis, pour remplace la toile de lin, les supports les (1983), présentée simultanément à Sâo
la grande majorité, de l'École d'art de la plus variés, une grande liberté dans le Paulo et à Rio, a inauguré joyeusement et
Fondation Alvares Penteado, ils se choix des formats, dimensions peu avec fracas la nouvelle peinture des
définissaient comme peintres, nouveauté communes, voire gigantesques, chez des années 80. Leonilson sera, pendant toute
considérable si l'on jeunes sans marché, qui commencent à la décennie, l'artiste errant entre Sâo
Aracy A. Amaral es. critique ^ c o m p, e d u fai, peine, ainsi qu'une attitude profession- Paulo, l'Allemagne et la France, éternel
que la génération nelle marquante, et une inspiration puisée voyageur qui ouvrait des portes et qui
et historienne de ian précédente avait été dans un vocabulaire européen digéré avec exposait à égalité avec les jeunes artistes
celle de l'art con- beaucoup d'esprit, voilà autant de des pays qu'il visitait. La même année, le
à sao Paulo. Directrice ceptuel. Autre point caractéristiques de la génération apparue Musée d'art contemporain de l'Université
marquant: l'axe de au début de la décennie qui vient de de Sâo Paulo (MAC-USP) présentait, dans
de h ptnacoteca do Esiado référence n e partait s'écouler. l'exposition collective (Peinture en tant
plus des États-Unis, Deux questions nous viennent main- que moyen), P i n t u r a corno Meio,
deS. Paulo (1975-1979) comme cela arrivait tenant à l'esprit, qui nourrissent une les nouvelles tendances avec Leda,
depuis les années réflexion toujours en cours. En premier Romagnolo, Ana Tavares, Niculitcheff et
60, mais d'Europe, heu, celle du critique et poète Ferreira Cozzolino. Au même moment, deux jeunes
et du Musée d'art contemporain
d ' A l l e m a g n e et Gullar, qui ouvre son livre Vanguarda e femmes artistes préparaient, avec l'appui
d'Italie en parti- Subdesenvolvimento, 1969, en se du MAC-USP, un grand événement «out
de l'Université de Sào Paulo culier, à cause de demandant: «Une avant-garde esthétique doors» dans les rues de la capitale de
l'effervescence de valable en Europe et aux États-Unis, a-t- l'État. On y voyait les affiches/oeuvres de
(1982-1986), elle a publié la peinture en ces elle la même validité dans un pays sous- Nina Moraes, Leda Catunda, Jac Leirner,
pays. Mentionnons développé comme le Brésil ? » m La Groupe Six Mains, Ana Horta, Guto Lacaz,
notamment Tarstla suaobrae encore, dans le Cas deuxième question est soulevée par Eduardo Duar, Leonilson. L'année
de l'Italie, le travail Clément Greenberg qui reconnaît, en suivante, l'événement, répété en trois
seu tempo, 1975, Biaise t h é o r i q u e de 1945, «deux formes de provincialisme en capitales (Sâo Paulo, Brasilia, Rio), aura
Bonito Oliva, dont art» : celle de l'artiste qui, quelle que soit une résonance nationale avec des
l'importance pour sa tendance, travaille dans un style propositions variées venues de nouveaux
Cendrars no Brasil e os Moder
cette nouvelle démodé ou dans une tendance dévalorisée artistes. Avec fougue, une nouvelle
génération n'est par le centre métropolitain (Paris, Rome génération se constituait et prenait
nislas. 1970, Arte e Melo place aux côtés des artistes reconnus.
comparable q u ' à ou Athènes), et celle «de l'artiste,
celle de Pierre généralement d'un pays éloigné, qui avec Le grand événement de 1984, consacré
Artistico entreafeijoada e ox- Restany vingt a n s la plus grande honnêteté et la plus grande par la presse de Rio et qui a eu un
auparavant. admiration se voue au style alors en cours immense impact, ce fut l'exposition
burger, 1982, Arte para que? La peinture de dans le centre métropolitain, même si, (Comment vas-tu, génération de 80 ?)
cette génération d'une manière ou d'une autre, il ne réussit Corno vai voce geraçào 80 ?. Organisée
A preocupaçâo social M arte assume intégra- pas à comprendre de quoi il s'agit»'". par Marcus Lontra à l'École Parque
lement les libertés Si, à Rio de Janeiro, le père de la Laje de Rio de Janeiro, elle réunissait
brasileira (1930-1970). 1984. nouvelles, issues génération locale de la décennie fut Aquila les jeunes déjà connus et quelques
des ruptures des da Rocha Miranda, professeur à l'École du débutants de Sâo Paulo, Rio et Belo
années 60, qui avaient conduit à l'objet, à Parque Laje, un peintre qui n'a jamais Horizonte.
la performance, au happening, etc. Dans quitté les pinceaux pour le conceptuel, à Le marché s'est montré attentif à ces
le célèbre essai de Bonito Oliva certaines Sào Paulo, presque toute la génération qui nouveaux messages visuels. À côté de ceux
expressions reviennent sans cesse: «le fleurit au début des années 80 est qui, tel Luisa Strina, étaient présents dès
plaisir de peindre», le tableau en tant que redevable à trois artistes qui venaient des le premier moment, de nouveaux mar-
dépôt d'énergies, l'indifférence envers la années 60 : Nelson Leirner, Julio Plaza et chands surgissent. Ainsi, déjà en 1984,
culture «high» ou «low», le plaisir de Regina Silveira. «Regina Silveira, rappelle la nouvelle Galerie Thomas Cohn, de Rio,
l'esprit, la distance face à l'idéologie, Nina Moraes, m'a appris à penser mon amène Berredo, Cozzolino, Leda, Roma-
«l'oeuvre en tant que lieu de transition propre développement de façon cohé- gnolo, Leonilson et Claudio Fonseca à
d'un style à un autre sans schéma fixe», rente». Julio Plaza ce fut la rigueur, î'Arco de Madrid.
etc 1 ". A u j o u r d ' h u i on insiste s u r l'artiste qui s'articule conceptuellement À la fin 1983, le Panorama de la
l'inexistence des avant-gardes. Cependant sur le lien entre la technologie et l'art, un peinture brésilienne au Musée d'art
il faudra bien admettre que la «trans- orienteur pour les jeunes apprentis. moderne de Sâo Paulo présenta des
avant-garde» de Bonito Oliva représente Leirner a agit comme le libérateur de artistes vétérans de retour à la peinture.
la tendance de pointe des années 80, en l'intuition, des élans les plus audacieux. La tendance gestuelle expressionniste
r a i s o n p r é c i s é m e n t de l ' a b s e n c e Ces nouveaux artistes se réunissaient «néo fauve» y était fortement représentée,
d'expérimentations qui auraient évincé les éventuellement en petits groupes et dans une claire démonstration de la
mouvements précédents. En d'autres travaillaient ensemble dans des ateliers; manière dont tous ces artistes con-
termes, la trans-avant-garde est devenue ces caractéristiques sont importantes dans naissaient, eux aussi, les modes artistiques
Quelques jeunes choisissent, après situations. Otavio Roth et un «inventeur» Milan, Gian Carlo Politi Edit., 1982.
sionnisme gestuel, Ramos s'adonne à une l'univers de l'ennui. Peut-être, comme Press, Ltd, 1988 (John O'Brien éd.), p. 3.
espèce de réductionnisme radical, avec chez Tony Cragg ou Liliana Porter, s'agit-
4. Quelques artistes de Sào Paulo, ceux du groupe Casa 7. en
l'occurrence, manifestent au début de la décennie une
des constructions de bois, blanchies à la il d'assembler et de reformuler afin de admiration singulière pour la peinture contemporaine nord-
chaux. Ramos devait retourner ensuite à récupérer le sens perdu du temps que américaine; attentifs à l'expressionnisme abstrait en général, ils
étaient particulièrement attirés par la peinture de Philip Guslon.
une peinture agressive faite de matières nous vivons ? D'un autre côté, comment présenté à l'une des dernières Biennales de Sào Paulo des
denses, dans un véritable corps à corps expliquer le catastrophisme universel de années 70. À part les inlérêLs de ce groupe, les seuls artistes