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4) A la lecture de l’ascension érotique du Banquet de Platon, en quoi le rapport de l’âme

et du corps est-il différent chez Platon et Plotin ?

Pour Platon, il y a une source absolue du sens et de nos idées, il y a une beauté absolue dont les beautés
matérielles sont les traces multiples de son rayonnement. Dans Le Banquet (extraits) (210 b - 211 a) Platon
écrit :

« DIOTIME - Toi-même, tu pourrais t’initier aux mystères de l’amour. Mais je ne sais si tu seras capable de
parvenir au degré ultime de cette démarche. Je vais quand même t’en expliquer les étapes. Essaie de me
suivre. Pour suivre ce chemin et atteindre son but, il faut commencer dès son jeune âge à rechercher la beauté
physique. Il n’aimer qu’un seul corps et, à cette occasion, dire de belles paroles. Ensuite, il faut comprendre
que la beauté d’un corps est semblable, comme une sœur, à la beauté d’un autre corps. Il convient de
rechercher la beauté des formes, celle qui se trouve dans tous les corps. Arrivé à cette vérité, on doit devenir
l’amant de tous les beaux corps, abandonner l’amour impétueux pour un seul, comme une chose qui ne mérite
que dédain. Puis, on considérera la beauté de l’âme comme plus précieuse que celle du corps, jusqu’à ce
qu’une belle âme, même dans un corps peu attrayant, nous suffise à engendrer de belles paroles. On sera
alors amené à considérer la Beauté dans les actions et dans les lois, à voir qu’elle est toujours la même, dans
tous les cas. On en arrivera à regarder la beauté du corps comme peu de chose. Enfin, on passera aux sciences
et on en découvrira la beauté. On sera alors parvenu à une vision globale de la Beauté. On ne s’attachera plus
à la seule beauté d’un seul objet. On cessera d’aimer un enfant, un homme, une action. On sera désormais
tourné vers l’océan de la Beauté, en contemplant ses multiples aspects. On enfantera sans relâche de beaux
et magnifiques discours. La sagesse et la pensée jailliront de l’amour qu’on a, jusqu’à ce que notre esprit
aperçoive la science unique, celle de la Beauté en soi. Celui qu’on aura guidé sur le chemin gradué de l’amour
découvrira une beauté merveilleuse, une Beauté éternelle qui ne connaît ni la naissance ni la mort, qui jamais
ne change. Cette Beauté qui ne se présente pas comme un visage ou comme une forme corporelle, elle n’est
pas non plus un raisonnement, ni une science. Cette Beauté existe en elle-même et par elle-même, simple et
éternelle, et d’elle découlent toutes les belles choses. Lorsque grâce à l’amour bien compris des jeunes gens,
l’on s’est élevé au dessus des choses sensibles jusqu’à cette Beauté en soi, on est proche du but. C’est cela le
véritable chemin de l’amour, que l’on s’y engage soi-même ou que l’on s’y laisse conduire. Il consiste, en
partant des beautés sensibles, à monter sans cesse vers la Beauté surnaturelle en passant, comme par des
échelons, d’un beau corps à deux beaux corps, puis de deux beaux corps à tous les beaux corps, enfin des
beaux corps aux belles actions, et des belles actions aux belles sciences. Pour aboutir à cette science qui n’est
autre que celle de la Beauté absolue, et pour connaître enfin le Beau tel qu’il est en soi. Si la vie vaut la peine
d’être vécue, c’est à ce moment : lorsque l’humain contemple la Beauté en soi. Si tu y arrives, l’or, la parure,
les beaux jeunes gens dont la vue te trouble aujourd’hui, tout cela te semblera terne. Songe au bonheur de
celui qui voit le Beau lui-même, simple, pur, sans mélange, plutôt que la beauté chargée de chairs, de couleurs
et de cent autres artifices périssables... »

EXPLICATION : remarque : ici Eros = Dieu de l’Amour. Dans ce texte écrit par Platon, Platon fait parler
de Socrate qui lui-même fait parler Diotime. Dans ce passage, Socrate raconte comment il a été initié par
Diotime.

1re étape : l’ascension érotique. C’est la recherche de la beauté. La recherche sensuelle de la beauté et limitée.
On ne peut pas posséder les corps par le toucher. Cette 1re étape laisse une insatisfaction. L’Antiquité Gréco-
romaine affirme que l’homme est un animal triste après le coït (le sexe). Le plaisir sexuel ne parvient jamais
à satisfaire le désir de beauté (théorie de Platon). Quand l’acte sexuel a eu lieu, il n’y a plus une seule chair,
il y a deux corps. Diotime suggère que cette incomplétude peut être réduite si le désir de posséder la beauté
passe au niveau du sens de la vue.

2e étape : la vue. Elle permet de détacher le désir érotique des appétits les plus charnels. Le sens de la vue est
le sens le + immatériel. On comprend mieux l’importance du modèle visuel de la conscience. Les aveugles
humains ont la capacité de reconstituer un espace géométrique à l’aide du toucher. La vue va permettre
d’accentuer le goût pour la beauté plastique / géométrique des choses. Souvent, l’attirance pour la beauté
plastique nous ramène à l’attirance pour la possession physique.
3e étape : La découverte de la beauté comme grâce. La grâce est liée à la qualité du mouvement. Cette
découverte de la grâce permet de se détacher de la qualité visuelle des choses. L’amoureux de la beauté
découvre que la grâce peut s’acquérir. La grâce n’est pas seulement l’art de vivre en société, c’est aussi l’art
d’aimer son amant, c’est l’art de mener un combat. La grâce est donc reliée à toutes les vertus pratiques &
sociales. Il y a là un tournant, la beauté n’est plus cherchée à l’extérieur mais à l’intérieur. L’amoureux de la
beauté peut enfin espérer une satisfaction totale parce qu’il n’est dépendant de personne pour découvrir cette
beauté. Il peut s’aider toutefois d’un maître ou d’un compagnon plus avancé. Pour Platon (ou Socrate), nos
histoires d’amour seraient plus satisfaisantes si notre amour se dirigeait en fonction de la beauté intérieure.
Au début, il n’est pas évident de distinguer le rayonnement de la chair appétissante et le rayonnement de la
grâce.

4e étape : La beauté a une source intérieure. Il s’agit alors de se connaître soi-même, d’explorer sa conscience.
Pour Platon, notre identité, notre individualité la plus authentique n’est donc pas le corps ni les émotions, ni
les idées personnelles. Notre identité la plus authentique est justement notre amour de la beauté. Ce désir de
beauté, ce feu intérieur, qui nous anime dans notre besoin de beauté, c’est l’âme. Il va s’agir d’explorer l’âme
pour comprendre le lien entre le désir de beauté et la beauté. Plus il y a un désir de beauté, plus l’âme est
belle. Il faut se demander quelle est la source intérieure de l’âme et la source du désir de l’âme. Pour Platon,
on devient alors adepte de la science. La science platonicienne à la différence de nos sciences d’aujourd’hui
cherche non seulement à expliquer mais à comprendre l’existence de toute chose. La science est toujours une
science de l’unité du tout. Une « pensée scientifique » (selon Platon) est toujours une intuition de l’unité du
tout qui permet d’expliquer les parties.

Etape 5 : La science. Pour Platon, le philosophe découvre qu’il existe un monde avec des idées immatérielles
éternelles qui commandent les évènements immatériels et matériels. Le philosophe découvre que la beauté
physique est toujours en rapport avec les nécessités d’espèce. La conscience, en découvrant la science,
découvre que certaines idées existent en elle toujours, alors que les matérialisations de ces idées sont
temporelles et temporaires. Au niveau des idées, on a une plénitude, alors qu’au niveau de la matérialisation
des idées, il nous manque des choses. Pour Platon, la véritable beauté se rencontre dans le monde des idées
à qui il ne manque rien. Le monde des idées est la source du monde matériel. On peut faire l’expérience de
formes intelligibles qui engendrent les choses : l’homme est un inventeur technique qui matérialise des idées
restées jusque là immatérielles. Mais aussi la conscience que j’ai de moi est de la même origine que la
conscience que l’autre a de soi-même. C’est une même loi immatérielle qui matérialise nos deux consciences.
Cette loi est la plupart du temps inconsciente mais si je me connais vraiment, alors je découvre l’unité de
toutes les consciences en moi au fond de mon âme. Pour Platon, l’existence de lois universelles (par exemple,
mathématiques ou philosophiques) implique l’existence profonde d’une unité de conscience de toutes les
consciences individuelles. Connaître son âme revient à sentir l’origine unique et commune de toutes les âmes.
Cette origine commune et surtout unique, lorsqu’elle est explorée, mène à la dernière étape.

Etape 6 : Le beau en soi / Le beau absolu : Pour Platon, on peut découvrir l’origine commune des idées dont
l’idée d’âme, l’idée de beauté, etc. Cette origine est au-delà des idées qui sont habituellement définissables
et observables grâce à la pratique de l’ascension dialectique. Cette beauté absolue est au-delà des idées
incommensurables c’est-à-dire les plus incomparables tellement elles semblent contradictoires. C’est un
mouvement et ce n’est pas un mouvement. C’est en-dehors du temps, de l’espace, donc c’est éternel et
impérissable et c’est l’origine unique de l’existence, de tout ce qui existe temporellement. Une âme a
l’existence, notre corps a une existence temporaire, et cette beauté absolue EST l’existence. L’erreur
philosophique de jeunesse dans sa recherche de beauté est de confondre la recherche de l’être avec celle de
l’avoir.

Parallèle et diiférence entre Plotin et Platon :

Cette progression se reconnaît dans la construction du Traité sur le beau de Plotin :

 dans l’introduction du traité de Plotin, on distingue le passage des beautés sensibles aux beautés
intelligibles, les vertus étant à la charnière des deux. Mais déjà dans ce premier paragraphe on note
que Plotin privilégie immédiatement les sens les plus immatériels comme celui de la vue. Chez
Platon le toucher avait sa place dans la recherche du beau. Diotime évoque la relation sexuelle
comme le premier moment de l’ascension érotique vers le beau absolu.
 à propos de la beauté des corps, Plotin montre d’abord qu’on ne peut pas l’expliquer par l’harmonie.
Il exclut ainsi un explication de la beauté par l’immanence, c’est-à-dire par le seul plan corporel. Là
encore dans la suite de son raisonnement on reconnaît l’ascension érotique de Platon puisque
l’harmonie, la proportion sera définitivement exclue comme explication de la beauté en considérant
que les vices dont la laideur est indéniable peuvent eux aussi recéler des proportions, une cohérence.
Enfin quand Plotin explique finalement l’harmonie il évoquera les idées ou formes intelligibles qui
est une étape encore plus élevée de l’ascension érotique. Mais là encore Plotin semble implicitement
entendre que la recherche spirituelle du Beau ne commence vraiment qu’avec une purification de
l’âme par les vertus. Il exclut le domaine des relations amoureuses que Platon lui ne manquait pas
de valoriser.
 Plus loin dans le traité, en 4,20 et suivant puis dans le paragraphe 5 Plotin reprend le vocabulaire
platonicien des amants mais ils sont d’abord des amoureux des réalités non sensibles.
Là où Platon dans un premier temps montre l’imbrication des appétits charnels amoureux avec Eros qui porte
vers la recherche spirituelle du beau, Plotin insiste lui sur le fait que Eros agit d’abord au niveau de l’âme.
Il semble donc que la relation entre l’âme et le corps soit davantage mise en valeur par Platon que par Plotin
même si Plotin ne rejette pas le corps puisqu’il affirme une beauté agissante dans la matière. Pour Platon les
appétits charnels amoureux abrite l’action d’Eros qui peut éventuellement les sublimer. De fait l’amour chez
Platon peut engendrer une descendance ce qui accomplit le mouvement de manifestation du beau car les
corps jeunes ont plus de chance d’être beau mais aussi l’amour peut engendrer sa sublimation dans une
ascension érotique. La suite du Banquet montre d’ailleurs la difficulté d’envisager cette sublimation pour
Alcibiade amoureux de la beauté de Socrate mais incapable de comprendre que la beauté de Socrate ne peut
pas être saisie charnellement. Socrate qui est corporellement laid a une beauté qui vient de son âme. Alcibiade
ne peut être amoureux que de la beauté de l’âme de Socrate mais faute de répondre par la sublimation exigée
par Socrate son amour ne voit que les appétits charnels pour s’exprimer. Alcibiade désire charnellement une
beauté qui vient de l’âme et faute de le comprendre et d’y répondre il est seulement frustré.

Plotin n’envisage donc pas cet aspect de l’ascension érotique qui implique une relation entre l’âme et le corps
plus imbriquée chez Platon que dans son interprétation.

5) Construisez un parallèle différence entre l’allégorie de la caverne dans La


République de Platon et le Traité sur le beau de Plotin.

Platon écrit dans La République, Livre Vll, 514a-515e :

« Représente-toi donc des hommes qui vivent dans une sorte de demeure souterraine en forme de caverne,
possédant, tout au long de la caverne, une entrée qui s’ouvre largement du côté du jour ; à l’intérieur de cette
demeure ils sont, depuis leur enfance, enchaînés par les jambes et par le cou, en sorte qu’ils restent à la même
place, ne voient que ce qui est en avant d’eux, incapables d’autre part, en raison de la chaîne qui tient leur
tête, de tourner celle-ci circulairement. Quant à la lumière, elle leur vient d’un feu qui brûle en arrière d’eux,
vers le haut et loin. Or entre ce feu et les prisonniers, imagine la montée d’une route, en travers de laquelle il
faut te représenter qu’on a élevé un petit mur qui la barre, pareil à la cloison que les montreurs de marionnettes
placent devant les hommes qui manuvrent celles-ci et au-dessus de laquelle ils présentent ces marionnettes
aux regards du public.

- Je vois ! dit-il.

- Alors, le long de ce petit mur, vois des hommes qui portent, dépassant le mur, toutes sortes d’objets
fabriqués, des statues, ou encore des animaux en pierre, en bois, façonnés en toute sorte de matière ; de ceux
qui le longent en les portant, il y en a, vraisemblablement, qui parlent, il y en a qui se taisent.

-Tu fais là, dit-il, une étrange description et tes prisonniers sont étranges !
-C’est à nous qu’ils sont pareils ! répartis-je. Peux-tu croire en effet que des hommes dans leur situation,
d’abord, aient eu d’eux-mêmes et les uns des autres aucune vision, hormis celle des ombres que le feu fait se
projeter sur la paroi de la caverne qui leur fait face ?

- Comment en effet l’auraient-ils eue, dit-il, si du moins ils ont été condamnés pour la vie à avoir la tête
immobile ?

- Et à l’égard des objets portés le long du mur, leur cas n’est-il pas identique ?

- Évidemment ! (...)

-Et, si en outre il y avait dans la prison un écho provenant de la paroi qui leur fait face ? Quand parlerait un
de ceux qui passent le long du petit mur, croiras-tu que ces paroles, ils pourront les juger émanant d’ailleurs
que de l’ombre qui passe le long de la paroi ?

- Par Zeus, dit-il, ce n’est pas moi qui le croirai !

- Dès lors, repris-je, les hommes dont telle est la condition ne tiendraient, pour être le vrai, absolument rien
d’autre que les ombres projetées par les objets fabriqués.

- C’est tout à fait forcé ! dit-il.

- Envisage donc, repris je, ce que serait le fait, pour eux, d’être délivrés de leurs chaînes, d’être guéris de leur
déraison, au cas où en vertu de leur nature ces choses leur arriveraient de la façon que voici. Quand l’un de
ces hommes aura été délivré et forcé soudainement à se lever, à tourner le cou, à marcher, à regarder du côté
de la lumière ; quand, en faisant tout cela, il souffrira ; quand, en raison de ses éblouissements, il sera
impuissant à regarder lesdits objets, dont autrefois il voyait les ombres, quel serait, selon toi, son langage si
on lui disait que, tandis qu’autrefois c’étaient des billevesées qu’il voyait, c’est maintenant, dans une bien
plus grande proximité du réel et tourné vers de plus réelles réalités, qu’il aura dans le regard une plus grande
rectitude ? et non moins naturellement, si, en lui désignant chacun des objets qui passent le long de la crête
du mur, on le forçait de répondre aux questions qu’on lui poserait sur ce qu’est chacun d’eux ? Ne penses-tu
pas qu’il serait embarrassé ? qu’il estimerait les choses qu’il voyait autrefois plus vraies que celles qu’on lui
désigne maintenant ?

- Hé oui ! dit-il, beaucoup plus vraies !

- Mais, dis-moi, si on le forçait en outre à porter ses regards du côté de la lumière elle-même, ne penses-tu
pas qu’il souffrirait des yeux, que, tournant le dos, il fuirait vers ces autres choses qu’il est capable de
regarder, qu’il leur attribuerait une réalité plus certaine qu’à celles qu’on lui désigne ?

- Exact ! dit-il. »

On peut à l’évidence rapprocher ce texte de nombreux passages du Traité sur le beau de Plotin où le monde
sensible est considéré comme un monde d’ombres inférieur au monde intelligible auquel la purification de
l’âme conduit.

Ainsi dans la traduction GF dirigée par Luc Brisson et Jean-François Pradeau, on peut à la fin du chapitre 3 :

« En voilà assez à propos des beautés qui relèvent de la sensation. Elles ne sont que des images et des ombres ;
au mieux, elles courent vers la matière pour la mettre en ordre par leur venue même, et elles nous troublent
par leur apparition. »
Dans l’allégorie de la caverne les ombres sont les copies des objets réels, les copies sensibles des idées
intelligibles. Le parallèle ne pose ici aucune difficulté à justifier. Ce passage charnière du Traité est une
invitation à se libérer de la caverne et de ses illusions.

Toutefois si Plotin reconnaît que le sage dispose d’une vision qu n’a pas celui dont l’âme n’a pas été purifiée,
il n’y a rien du drame qui se joue dans l’allégorie de la caverne entre celui qui a vu la réalité et ses compagnons
d’infortune qui préfèrent le chasser ou l’éliminer plutôt que de se rendre à ses raisons et de le suivre sur son
chemin de libération.

6) Rapprochez la conscience de l’intérieur et de l’extérieur de Plotin dans le traité avec


des passages de Platon dans Le Phédon ou autour de la ligne dans La République.

remarque : notre réponse va plutôt se construire autour de La République de Platon

Dans les textes de Platon et de Plotin, il n’est pas question de conscience mais de vision, de regard, d’œil.
L’analyse qui suit montrera que l’assimilation de ces concepts à ce que nous désignons comme la conscience
est possible.

Platon dans La République écrivait :

« - Mais lorsqu’on les tourne vers des objets qu’illumine le soleil, ils voient distinctement et montrent qu’ils
sont doués de vue nette.

 Sans doute.
 Conçois donc qu’il en est de même à l’égard de l’âme ; quand elle fixe ses regards sur ce que la
vérité et l’être illuminent, elle le comprend, le connaît, et montre qu’elle est douée d’intelligence
(436) ; mais quand elle les porte sur ce qui est mêlé d’obscurité, sur ce qui naît et périt, sa vue
s’émousse, elle n’a plus que des opinions, passe sans cesse de l’une à l’autre, et semble dépourvue
d’intelligence.
 Elle en semble dépourvue, en effet. 508e
 Avoue donc que ce qui répand la lumière de la vérité sur les objets de la connaissance et confère au
sujet qui connaît le pouvoir de connaître, c’est l’idée du bien (437) ; puisqu’elle est le principe de la
science et de la vérité, tu peux la concevoir comme objet de connaissance (438), mais si belles que
soient ces deux choses, la science et la vérité, tu ne te tromperas point en pensant que l’idée du bien
en est distincte et les surpasse en beauté ; comme, 509 dans le monde visible, on a raison de penser
que la lumière et la vue sont semblables au soleil, mais tort de croire qu’elles sont le soleil, de même,
dans le monde intelligible, il est juste de penser que la science et la vérité sont l’une et l’autre
semblables au bien, mais faux de croire que l’une ou l’autre soit le bien ; la nature du bien doit être
regardée comme beaucoup plus précieuse.
 Sa beauté, d’après toi, est au-dessus de toute expression s’il produit la science et la vérité et s’il est
encore plus beau qu’elles. Assurément, tu ne le fais pas consister dans le plaisir.
 Ne blasphème pas, repris-je ; mais considère plutôt son image de cette manière.
 Comment ? 509b
 Tu avoueras, je pense, que le soleil donne aux choses visibles non seulement le pouvoir d’être vues,
mais encore la génération, l’accroissement et la nourriture, sans être lui-même génération.
 Comment le serait-il, en effet ?
 Avoue aussi que les choses intelligibles ne tiennent pas seulement du bien leur intelligibilité, mais
tiennent encore de lui leur être et leur essence, quoique le bien ne soit point l’essence, mais fort au-
dessus de cette dernière en dignité et en puissance »
Ce texte relie donc la vision de l’âme avec celle de la chair en s’intéressant à la génération. Au fond c’est la
lumière matérielle qui suscite l’œil de chair comme la lumière immatérielle suscite l’âme et sa vision. En
dernier ressort la lumière immatérielle de la vérité est source de la lumière matérielle, la vision de l’œil de
chair prolonge donc celle de l’œil intérieur de l’âme.
Cette thématique de la vision qui unit la vision de l’œil de chair avec la vision de l’œil intérieur de l’âme se
retrouve chez Plotin. Par exemple Plotin dans le paragraphe 9 du Traité sur le beau écrit :

« Que voit donc cet œil intérieur ? Dès son réveil, il ne peut bien voir les objets brillants. Il faut accoutumer
l’âme elle-même à voir d’abord les belles occupations , puis les belles œuvres, non pas celles que les arts
exécutent, mais celles des hommes de bien. Puis il faut voir l’âme de ceux qui accomplissent de belles œuvres.
Comment peut-on voir cette beauté de l’âme bonne ? Reviens en toi-même et regarde : si tu ne vois pas
encore la beauté en toi, fais comme le sculpteur d’une statue qui doit devenir belle ; il enlève une partie, il
gratte, il polit, il essuie jusqu’à ce qu’il dégage de belles lignes dans le marbre ; comme lui, enlève le superflu,
redresse ce qui est oblique, nettoie ce qui est sombre pour le rendre brillant, et ne cesse pas de sculpter ta
propre statue, jusqu’à ce que l’éclat divin de la vertu se manifeste, jusqu’à ce que tu voies la tempérance
siégeant sur un trône sacré. »

Pierre Hadot effectue le rapprochement entre Plotin et Platon sur ce thème du regard intérieur et extérieur
dans son livre Plotin ou la simplicité du regard. Il écrit p.104-106 :

Pour Plotin, comme pour Platon, la vision consiste dans un contact de la lumière intérieure de l’œil avec la
lumière extérieure. Mais Plotin en conclut que lorsque la vision devient spirituelle, il n’y a plus de distinction
entre la lumière intérieure et la lumière extérieure. La vision est lumière et la lumière est vision. Il y a une
sorte d’autovision de la lumière : la lumière est comme transparente à elle-même.

Ici-bas, certains phénomènes visuels nous permettent d’imaginer cette unité de la vision et de la lumière :

Ce n’est pas toujours la lumière extérieure et étrangère que l’œil voit, mais, en de courts instants, il voit,
avant la lumière extérieure, une lumière qui lui est propre et qui est plus lumineuse. Ou bien elle émane de
lui la nuit dans l’obscurité, ou bien, s’il abaisse les paupières, quand il ne désire rien voir dès autres choses,
il projette pourtant une lumière, ou bien lorsque le possesseur de l’œil le presse, il voit la lumière qui est en
lui. Alors il voit sans voir et c’est alors surtout qu’il voit, car il voit la lumière. Les autres choses n’étaient
que lumineuses, elles n’étaient pas la lumière. (V 5, 7, 23.)

Dans l’expérience mystique, l’œil intérieur de l’âme ne voit que lumière :

Emporté, en quelque sorte, par la vague de l’Esprit lui-même, soulevé par ce flot qui, en quelque sorte, se
gonflait, le voyant a vu soudainement, sans voir comment il a vu, mais la vision, remplissant les yeux de
lumière, ne faisait pas voir quelque chose d’autre par cette lumière, mais la lumière elle-même était l’objet
de la vision. Car, dans cet objet de vision, il n’y avait pas d’un côté ce que l’on voit, de l’autre côté sa lumière,
il n’y avait pas un pensant et un pensé, mais seulement une clarté resplendissante qui a engendré ces choses
dans un moment ultérieur... Ainsi le Bien est purement lumière... (VI 7, 36, 17.)

C’est avec cette clarté originelle que le regard l’âme vient se confondre. C’est comme si me voyait la lumière
qui est à l’intérieur même de son propre regard :

On est bien obligé d’admettre que l’âme Le voit, lorsqu’elle est soudainement remplie de lumière. Car cette
lumière vient de Lui et est Lui même. Et alors on est bien obligé de croire qu’Il est présent, lorsque, comme
un autre dieu que l’on appelle dans sa maison, Il vient et nous illumine. S’Il n’était venu, Il ne nous aurait
pas illuminés. Si elle n’est pas illuminée par lui, l’âme est privée de Dieu.

1 . Homère, Odyssée, V, 393 : « Il put voir la terre toute proche ; son regard la fouillait du sommet d’une
grande vague qui l’avait soulevé. »

En d’autres termes, il est donc possible d’affirmer que la conscience de l’extérieur qui passe par les sens dont
la vue s’inscrit paradoxalement au sein d’une conscience essentiellement intérieure qui se décline de l’absolu
jusqu’à l’âme en passant par la conscience inhérente à l’Intelligence de l’absolu qui se prolonge en idées.

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