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L'Information Grammaticale

Microsémantique et syntaxe
François Rastier

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Rastier François. Microsémantique et syntaxe. In: L'Information Grammaticale, N. 37, 1988. pp. 8-13.

doi : 10.3406/igram.1988.2049

http://www.persee.fr/doc/igram_0222-9838_1988_num_37_1_2049

Document généré le 16/10/2015


MICROSÉMANTIQUE ET SYNTAXE

François RASTIER

Les spécialistes opposent volontiers la sémantique et la contexte linguistique ou pragmatique, en fonction de normes
syntaxe (1) et l'on ne peut donc tenir pour certain qu'elles se qui ne relèvent pas du système fonctionnel de la langue. Ces
confondent. deux types de sèmes peuvent être spécifiques ou génériques
(cf. l'auteur, 1987, ch. I).
I. LES ISOSÉMIES Cette distinction traduit -au niveau des composants - la
distinction nécessaire entre sens et signification : le sens d'un
Plutôt que d'hypostasier la division entre sémantique et énoncé est son contenu invariant en tout contexte ; sa
syntaxe, cherchons à montrer le caractère tout relatif de la signification est le contenu produit parson interprétation en
frontière qui les sépare. Et voyons en particulier comment la contexte linguistique ou pragmatique.
microsémantique peut proposer des solutions à des
problèmes traditionnellement dévolus à la syntaxe. Nous 1.1. Les accords
utiliserons pour cela le concept d'isotopie.
Ils constituent les exemples d'isosémies les plus simples ;
a) Greimas a créé ce concept (1966) pour rendre compte de mais aussi les plus trompeurs. En apparence, la description
"l'homogénéité du discours" par la récurrence de certains des phénomènes d'accord comme des isosémies semble un
composants sémantiques (les classèmes) ; l'isotopie est retour aux sources, puisque le concept d'isotopie est issu,
donc inséparable de la sémantique componentielle qui l'a indirectement, du traitement que Togeby propose de
produite. Nous avons proposé par la suite d'étendre ce l'accord (et de la rection _ cf. 1 951 , pp. 1 43 sq.). Cependant,
concept à toutes les sortes de composants sémantiques. si ces relations morpho-syntaxiques relèvent bien, selon
L'intérêt principal de ce concept tient à ce qu'il est Togeby, de l'étude du contenu, elles ne concernent que sa
indépendant par principe des structures syntaxiques et de la forme, et non sa substance, et ne sont donc pas
prétendue limite de la phrase. Une isotopie peut s'étendre sur sémantiques, à proprement parler.
deux mots, sur un paragraphe, surtout un texte. S'il est vrai que les accords peuvent manifester des
On peut distinguer entre les isotopies induites par la isosémies, c'est indépendamment de toute considération
récurrence d'un trait spécifique (ex. : /inchoatif dans L'aube morphologique. Pour montrer le caractère proprement
allume la source [Eluard]) ou d'un trait générique sémantique des accords, il convient tout d'abord de récuser
/navigation/ dans L'amiral ordonna de carguer les voiles). On la théorie insoutenable du signifiant discontinu. Elle a été
distingue aussi celles qui sont prescrites par le système formulée par Harris, qui considère que dans meus bonus
fonctionnel de la langue (les isosémies selon Pottier), et dominus, -us est un morphème discontinu appartenant au
celles qui sont facultatives en ce qu'elles relèvent d'autres groupe entier ; puis reprise par Martinet (2), qui partage on le
systèmes de normes. sait avec Harris quelque défiance à l'égard de la sémantique.
On pourrait objecter bien entendu que ces prétendus
b) Nous proposons par ailleurs de distinguer sèmes morphèmes discontinus peuvent apparaître isolément
inhérents et sèmes afférents. Les premiers sont les {domin-us), et qu'ils ne sont pas solidaires entre eux comme
constituants (en principe) invariants d'un sémème ; ils sont codifiés les morphèmes discontinus proprement dits (du type ne ...
en langue. Les sèmes afférents, dits parfois connotatifs ou pas, par exemple) (3). L'essentiel demeure ici qu'en déniant
virtuels, sont des composants intégrés au sémème par le l'occurrence de morphèmes distincts, on dénie du même

(1 ) Bien entendu, ces termes reçoivent des acceptions diverses. Osons (2) Cf. 1960, p. 101 : "Les signifiants discontinus tels que /nu...o/ dans
pour notre part une profession de fol. Nous souhaiterions une syntaxe de /nukurôy résultent fréquemment de ce qu'on appelle l'accord".
l'énoncé (pourvu d'un contexte linguistique et d'un entour pragmatique) (3) Cf. Togeby, 1951, p. 126. Hjelmslev réfute la thèse du signifiant
plutôt que de la phrase ; en effet, comme les chimères pour la biologie, il est discontinu à propos d'un exemple tiré de Jespersen : dans uirorum ommium
douteux que les phrases, artefacts des linguistes, appartiennent à l'objet bonorum ueterum, le génitif pluriel caractérise-t-ll chacune des bases
empirique de la linguistique. Par ailleurs, Il nous faudrait une sémantique de nominales, ou le syntagme pris dans son ensemble ? "On se demande si la
la signification (traitant du sens et de la référence, mais non de la vérité, que répétition est un fait qui relève de l'expression seule, ou si, en tant que
l'on peut sans dommage laisser à la logique et à la philosophie du langage). répétition, elle relève également du contenu" (1971, p. 208).

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coup la récurrence de sèmes qui leur sont communs, et l'on Nous ajouterons simplement que ces "éléments" sont des
oblitère ainsi une des relations sémantiques constitutives de sèmes. Quant aux relations de hiérarchie syntaxique décrites
l'énoncé. par la notion de rection, elles concernent la forme du
Toutefois, si les accords morphologiquement définis contenu, et non sa substance. Et cependant, l'analyse
peuvent manifester des isosémies, les isosémies sont isotopique, égalitariste à sa façon, permet un traitement identique
indépendantes des manifestations morphologiques dans la dans son principe pour les phénomènes d'accord et pour
mesure où l'existence de morphèmes "spécialisés" n'est pas ceux de rection.
nécessaire à leur manifestation. Par exemple, dans la grande
montagne, le trait /genre féminin/ est récurrent dans le B _ Les développements récents de la théorie chomskienne
contenu des morphèmes -a et-e (que l'on considère comme ont remis au goût du jour, sous le nom de government, la
des "marques du genre") mais aussi dans celui de vénérable notion de rection. Or, on pourrait supposer,
montagne, et comme le note pertinemment Martinet "la comme l'accord correspond aux règles de sélection, que la
caractéristique 'féminin' est incluse dans 'montagne'" (1 960, rection correspond aux règles de sous-catégorisation. Et
p. 101) (4). Ainsi, les phénomènes d'accord ne se réduisent comme l'accord peut être rapproché de la rection, les règles
pas à la récurrence de grammèmes liés, et concernent tout de sélection peuvent l'être de celles de sous-catégorisation ;
aussi bien le contenu des lexemes : alors qu'il n'existe pas en ainsi, Carter estime d'une part que "la sous-catégorisation et
français de "marque de l'animé", dans le cochon sommeille la rection sont apparentées" (1984, p. 181), et que "la sous-
le trait /animé/ n'en est pas moins récurrent (5). catégorisation est liée au gouvernement" (p. 182). Toutefois
Ainsi défini, ce type d'isosémie recouvre tous les les règles de sous-catégorisation associent à un item une ou
phénomènes dont la linguistique américaine rend compte plusieurs catégories morphologiques (8), et les traits qu'elles
depuis Bloomfield au moyen de restrictions de sélection (6) : définissent n'ont pas de caractère sémantique. Par la, elles
ce sont des isotopies génériques inhérentes et obligatoires. réduisent en fait les relations casuelles . de nature
Cependant, les isosémies ne rendent pas seulement sémantique - aux régimes morphosyntaxiques (9).
compte, on le verra, des phénomènes d'accord. En fait, les isosémies liées à la rection apparaissent dans la
Il nous faudra redéfinir à notre usage la notion d'accord, qui grammaire generative sous la forme de récurrences de "rôles
reste étroitement dépendante d'une linguistique du mot (des thématiques" (10). Par exemple, on dira que 'prendre',
langues indo-européennes) : bien entendu, ce ne sont pas assimilé à un prédicat, accepte trois arguments : X prend Y à Z.
deux mots, ou plus, qui s'accordent, mais deux morphèmes Ainsi, il assigne trois rôles thématiques distincts à trois
au moins qui contiennent un sème récurrent (qu'il s'agisse de arguments. Et, selon le _- critère de Chomsky (_, pour
deux grammèmes liés : la grande ; de deux lexemes : cochon thématique), "chacun des rôles thématiques qu'un prédicat
etsommeil(l)-e ; ou d'un lexeme et d'un grammème : uol- et peut assigner, en vertu de sa structure argumentale, doit être
-a- dans uolo ludant, par exemple). reçu par un et un seul argument et chaque argument doit
porter un rôle thématique" (Jacob, 1984, p. 53).
Il y a là, en d'autres termes, sune isosémie établie entre un trait
1.2. La rection du "prédicat" et un trait de "l'argument". Plus précisément, le
A- La grammaire traditionnelle comprenait les phénomènes sémantème de 'prendre' comprend un trait spécifique
d'accord sous la notion de rection. Allant plus loin, Hjelmslev inhérent /ergatif/ ; ce trait est récurrent dans le contenu de
estime que "les limites entre la concordance et la rection sont "l'argument", mais en qualité de sème afférent actualisé en
flottantes et ne jouent aucun rôle au point de vue structural" contexte.
(1971, p. 155). Par exemple, "il y a dans la préposition un Ici apparaît une différence entre isosémies "d'accord" et
élément casuel et dans la conjonction un élément modal qui isosémies "de rection" : les premières s'établissent entre
régissent un élément identique renfermé dans leur régime. sèmes inhérents, les secondes entre un sème inhérent et un
De la sorte la rection se réduite une concordance" {ibid., pp. sème afférent actualisé en contexte (1 1).
154-155) (7).

(4) Hjelmslev, pour une fois moins sémantlclen que Martinet, soutenait
toutefois que la définition sémantique du genre doit être récusée au profit
d'une définition fonctionnelle "déterminant le genre comme pur indice de
concordance" (1971. pp. 151-152).
(5) Toutefois, on relève parmi les pronoms des oppositions comme qui
vs quoi, ou H, elle, on, vs ça (8) SN, par exemple. L'objectif initial était de rendre compte de la
(6) Cf. aussi Harris et Chomsky. Certes, selon la théorie generative dite différence entre verbes transitifs et Intransitifs.
standard, les restrictions de sélection spécifient les possibilités de (9) Certaines grammaires médiévales procédaient ainsi.
cooccurrence en termes de traits "syntaxiques" (comme "abstrait" / "concret", (10) Ces rotes sont en fait des cas "profonds" qui appartiennent aux
"animé" / 'Inanimé") ; mais ces traits bel et bien sémantiques, ne sont actants de l'énoncé. La redécouverte des cas par Fillmore, puis par des
réputés syntaxiques que pour permettre de les intégrer sans contradiction à auteurs plus "orthodoxes" comme Katz puis Gruberaainsi conduit Chomsky
la syntaxe. à formuler son "critère des rotes thématiques". L'histoire toute entière de la
(7) Hjelmslev ajoute cette remarque importante du point de vue grammaire generative paraît consister en une série de replis tactiques
épistémologique : "Les faits fonctionnels de la rection nous for(en| à imposés par tes faits, et qui éloignent de plus en plus l'objectif stratégique
constater dans l'unité régissante un élément sémantique défini par sa concor- d'une grammaire formelle et asémantkjue.
dance avec le régime. Ce procédé seul est en conformité avec le principe de (11) Si on accepte ces prémisses, il y aurait par exemple accord et non
simplicité et avec la méthode empirique" QbkJ. p. 155). rection entre le contenu de sine et celui du morphème de l'ablatif.
1.3. Problèmes de description où : S1 » *iP ; S2 : 'a épousé* ; S3 : 'comédienne'
(représentation simplifiée) ; sa : sème afférent ; si : sème
A - Pour illustrer ce qui précède et préciser quelques inhérent.
directions de recherche, étudions cette remarque incidente de
J. Rey-Debove : "Si l'on dit par exemple // a épousé cette c) Le grammème a [...] -é (comme dans a épousé) ne
comédienne en 1970 [...] certains éléments de sens contient pas en tout contexte le trait /passé/ : par exemple,
apparaissent deux fois par redondance. Cette comédienne Bientôt, il a achevé son épopée est parfaitement recev-
exprime deux fois le sexe féminin {cette et -i enne) ; "femme", able (16).
contenu partiel de comédienne (hyponyme) est déjà imposé D'autre part 1970, même en position nominale, ne contient
par épouser dont le sujet // désigne un homme ; le passé pas nécessairement le trait /temporalité/ (cf. 1970 est un
exprimé par 1970 est redonné dans a épousé. Cette nombre pair) (1 7). Ce trait est actualisé dans le contexte d'un
redondance n'est jamais sentie comme étant de nature tautolo- locatif, ici en. Cependant, si en 1970 contient le trait /
gique, parce que nul usager de la langue ne peuty échapper" temporalité/, il ne contient pas nécessairement le trait /
(1978, p. 323). passé/ : Il l'épousera en 1970 est recevable. Toutefois, une
double présomption permet d'actualiser letrait /passé/ dans
Les trois récurrences mentionnées ne sont pas de même a [...] -é, où il est inhérent, et dans 1970, où il est afférent (18).
type. L'isosémie induite par cette récurrence est donc du type
rectionnel.
a) Cette et-ienne contiennent letrait /genre féminin/, qui leur
est inhérent (12). Cette isosémie "d'accord" fait l'objet d'une B - Cette analyse confirme le caractère opératoire de la
prescription absolue : à tout grammème lié à un nom et distinction entre isosémies d'accord et de rection.
contenant le trait /genre féminin/ doit être associé un Les isosémies d'accord relèvent de prescriptions strictes, car
grammème lié à un déterminant (13) et contenant le même elles sont constituées de sèmes inhérents, qui relèvent
trait ; la réciproque est vraie, si bien que si l'un de ces comme tels du système fonctionnel de la langue (bien qu'ils
grammèmes vient à manquer, on postule à sa place un puissent être neutralisés ou actualisés par le contexte).
morphème zéro (qui concrétise une exigence de rationalité Les isosémies de rection font l'objet de prescriptions moins
de la linguistique du signe). fortes, car un seul de leurs sèmes est inhérent.
b) 'a épousé' comprend les traits /ergatif/ + /sexe Enfin, il n'existe pas d'isosémies entre sèmes afférents, car
masculin/ (ou/ergatif/ + /sexe féminin/) et /accusatif/ + /sexe ces sèmes ne relèvent pas du système fonctionnel de la
féminin/ (ou /accusatif/ + /sexe masculin/) (14). Les deux langue.
premiers sont récurrents dans 'il' : on sait que 'il' contient les
traits inhérents /ergatif/ ou /nominatif/ ; /ergatif/ est ici Retenons ces conclusions : (i) Les isosémies ne sont pas
actualisé par le contexte 'a épousé' ; de même que le trait / nécessairement liées aux grammèmes, et des lexemes
sexe masculin/ (15), qui lui est afférent. Par ailleurs, le trait / peuvent participer à leur expression, (ii) elles ne sont pas
sexe féminin/ est récurrent dans 'comédienne' (où il est nécessairement constituées de sèmes génériques (comme
inhérent), alors que le trait /accusatif/ est afférent au contenu le sont les "restrictions de sélection") ; (iii) les parcours
du syntagme cette comédienne (en tant que caractéristique interprétatifs qui permettent de constituer les isosémies sont
extense).
Il y a donc là quatre isosémies élémentaires: une établie entre
sèmes inhérents (cf. accord), et trois entre sèmes inhérents et
afférents (cf. rection). On a : inhérent de ces traits est attesté par les parcours interprétatifs. Tel
personnage de La Bruyère va par exemple "faire espérer aux mères qu'il épousera".
On a ce parcours : 0) si 'mère(s)', enfant(s) ; (ii) si l'ergatif de 'épousera' est
associé à /sexe masculin/, alors son accusatif est associé à /sexe
/sexe masculin/ /sexe féminin/ féminin/ ; (III) or, /enfant/ est un sème générique de fille' (dans le taxème
où fille' se définit par rapport à 'garçon'), et /sexe féminin/ est son sème
spécifique. Ne supposons pas une ellipse de "leurs filles", comme en
grammaire classique, ou un effacement, comme en grammaire generative :
ces deux hypothèses se situent également dans une linguistique du signe,
qui ne peut rendre compte de l'interaction entre signifiés qu'en suppléant
des signifiants absents. On dira seulement que te parcours interprétatif décrit
/ergatif/ /accusatif/ crée un groupement sémique /enfant/ + /sexe féminin/ : ce sont là les
limites d'une sémantique descriptive.
(15) A ne pas confondre avec /genre masculin/, qui est inhérent à 'il'.
Ces deux traits sont indépendants : cf. une sentinelle.
(16) Cf. Cette remarque de Martinet : "Le temps qu'en français on
appelle passé composé correspond à deux types de situations. Si je dis j'ai
ou
(et'sexe
àmonème
pp.non
de101-102).
(1 mollesse
2)àféminin',
Le
cette
de trait
signifiant
Que
et?/sexe
-tonne).
il penser
n'yfort
féminin/
en Martinet
variable
aalors
pasappartient
duquiécrit
(/es/
"sexe
corresponde
bizarrement
-esse,
féminin"
à comédl-
paràexemple)
de:'genre
dans
"S'il
cette,yleféminin'"
acontexte
de
correspondant
enméridienne,
français
-ienne
(1960,
un fini c'est un présent accompli ; mais dans j'ai fini hier à cinq heures j'ai un
passé". (1 981 , p. 54). On peut même avoir un futur, comme en témoignent
ces vers de Valéry : Demain, sur un soupir des bontés constellées. Le
printemps a brisé tes fontaines scellées.
(13) Si l'énoncé contient un tel déterminant, bien entendu. (1 7) Une distinction entre usage et mention pourrait toutefois être établie
(1 4)Cela est également vrai dans les emplois dits absolus (cf. "Epouser, Ici.
c'est comme brouter des champignons mazatèques, c'est expérimental" ; (1 8) On peut dire que ces deux traits se sélectionnent réciproquement
M. Cerf, Une pâle beauté, Paris, Albin Michel, 1984, p. 231). Le caractère selon un mécanisme étudié par ailleurs ; cf. l'auteur, 1987, ch. III.

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seulement plus simples.
Tout ceci conduit à relativiser encore les oppositions
traditionnelles entre morphologie et syntaxe, d'une part, B - Les grammèmes verbaux liés.
grammaire et sémantique d'autre part.
On a, à l'indicatif :
1.4. Les isosémies de la catégorie /perfectif/ vs / a) /perfectif/ : passé simple, futur
imperfectif/ b) /imperfectif/: imparfait, conditionnel
Puisque de multiples directions de recherche se présentent c) /perfectif final/ : tous les temps composés.
ici, nous préférons n'en choisir qu'une, pour ne pas disperser Le présent ne comporte pas de sème aspectuel propre (20).
l'exposé : étudions les isosémies liées à la catégorie / On dit souvent que faute de grammème spécialisé l'inchoatif
perfectif/ vs /imperfectif/, sans prétendre faire le tour de la est exprimé par des périphrases verbales comme
question, mais pour donner un exemple de la valeur commencer à, le cessatif par des périphrases comme finir de :
heuristique que peut revêtir, dans le domaine ordinairement dévolu cela se justifie par les traits /perfectif initial/ du premier
à la morphosyntaxe, l'étude des isosémies. lexeme, et /perfectif final/ du second.
Comme le taxème de l'aspect décrit les procès et accepte
entre ses membres des relations propres à la linéarité, on C - Les grammèmes libres
peut prévoir une articulation hypotaxique de /perfectif/ en
distinguant par une borne à gauche et une borne à droite / On se limitera aux relateurs locatifs dans leur emploi temporel
perfectif initial/ de /perfectif final/. (cf. Pottier, 1974, p. 132) :
On estime communément que l'aspectualité est exprimée
par les grammèmes verbaux liés. En fait, l'aspectualité peut a) /perfectif/ en
être exprimée aussi par des grammèmes libres, et par des b) /imperfectif/ pendant
lexemes. c) /perfectif initial/ de, depuis, dès
d) /perfectif final/ à, jusqu'à
A -Les lexemes
D - Les isosémies aspectuelles
Voici des exemples des quatre types d'aspect :
Etudions successivement les isosémies entre lexemes et
a) /imperfectif/ : regarder, écrire, marcher, chercher grammèmes liés, entre lexemes et relateurs, entre
(Pottier, 1974, p. 210) ; marcher, danser, chanter grammèmes liés et relateurs.
(Hoepelman et Rohrer, 1981, p. 29) ; écrire,
conduire (Desclés, 1980, p. 213). a) La combinaison d'un lexeme comportant letrait /perfectif/
b) /perfectif final/ : s'approcher de, arriver (Pottier) ; (noté : /p/) et d'un grammème lié /imperfectif/ (noté :
mourir (Hoepelman et Rohrer) (19). /p/) peut produire un aspect itératif : par exemple, sortait se
c) /perfectif/ : parcourir (Pottier). décompose en 'sorf-/p/ -ait /p/, et dans // sortit avec elle,
d) /perfectif initial/ : s'éloigner de, partir (Pottier). on actualisera le trait /itératif/ et on admettra préféren-
tiellement l'acception 'aller se distraire' pour 'sort-' ; en
Bien que les exemples cités soient tous des verbes revanche // sortait avec elle comporte le trait /singulatif/; et
l'aspectualité des lexemes n'est pas propre aux verbes. Ainsi, l'on admettra plutôt pour 'sort-' l'acception 'passer la porte*.
des noms pourraient tout aussi bien nous servir d'exemples : Inversement la combinaison d'un lexeme /imperfectif/ et
d'un grammème lié /perfectif/ peut produire l'aspect
a) regard, marche, recherche ; b) parcours ; c) arrivée, mort ; /singulatif/ : ainsi, regretta se décompose en "regretft)'- /p/ et -a'
d) départ. /p/ ; et dans // regretta qu'il avait oublié son fusil, on
actualisera le trait singulatif. Commentant cet exemple de K.
Sandfeld, Togeby écrit : "regretta veut dire dit en regrettant
de façon que le passé défini représente pour ainsi dire le
verbe dire" (1951, p. 163) (21) ; ainsi, il substitue à regretter
(1 9) A la suite de Bull, ces auteurs font reposer leur argumentation sur /p/ un lexeme qui comporte le trait /perfectif/ {dire) (22).
la distinction entre verbes cycliques et non cycliques : "Un verbe cyclique
dénote un événement ayant une fin naturelle" (1980, p. 1). Cette définition
n'est guère satisfaisante, car elle est extensionnelle, et l'on ignore ce qu'est
une fin naturelle ; tes exemples proposés, comme écrire une lettre ou toujours (Haubert). Mais le présent n'est pour rien dans l'affaire : c'est te
construire une maison n'entraînent pas l'adhésion. Quant aux verbes non- contexte qui est ponctuel (cf. voilà), puis duratlf (cf. voilà plus de trente ans) ;
cycliques, "on peut toujours supposer un prolongement au processus qu'ils et venir qui est /perfectif final/, par opposition à être /imperfectif/.
dénotent" (Nef, 1983, p. 161). Les verbes cycliques selon Bull sont (21) Cette phrase que certains sans doute jugeront irrecevable est
apparemment identiques aux verbes téllques selon Garey (cf. Nef, loc. cit.). opposée à II regrettait qu'il eût oublié son fusil.
Desclés donne comme exemples de verbes "téllques ou terminatifs" : se (22) Ces faits ont déjà été diversement relevés, mais à propos de
noyer, mourir, fermer, mais aussi, discutablement : acheter, naître, couper, contextes plus étendus que te mot. Cf. Togeby: "Le contexte perfectif te plus
ouvrir (1980, p. 213). typique est la limitation temporelle, le contexte imperfectif te plus typique est
(20) Le caractère /Imperfectif/ des présents dits d'habitude dans la terre l'Indication d'une répétition" (1951, p. 175) ; Pottier : "Le duratlf est
tourne autour du soleil, ou gnomique dans Pierre qui route n'amasse pas fréquemment assocléàrimperfect If {...]si un contexteduratlfs'appllqueàun
mousse, tient au caractère /imperfectif/ des procès décrits par tes lexemes imperfectif, onaun effet de sens Itératif' (1974, p. 211). Rohrernote aussi que
tourn-, roui- et amass-. Wagner et Pinchon opposent certes te présent dans te cas des verbes cycliques 'l'adverbe ne mesure plus la durée d'une
ponctuel de Voilà Climène, madame, qui vient tel pour vous voir (Molière) au action unique, Il mesure combien de fois une action a lieu à l'Intérieur d'un
présent habituel de Voilà plus de trenteans que je suis dans te désertàdormlr intervalle" (1981. p. 2 ; cf. Nef. 1983. p. 162).

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b) Quand un lexeme /perfectif/ se trouve dans le contexte pendant que sera en allosémie avec le passé simple (/
d'un relateur /imperfectif/, on peut constater de même un perfectif/) : ex. ? Pendant que Michèle cousit ... ; mais en
aspect /itératif/ : cf. // saute pendant une heure. isosémie avec l'imparfait : ex. Pendant que Michèle cousait...
De même quand le relateur est perfectif final ou initial : il saute En revanche, l'allosémie entre quand (/perfectif/) et
depuis une heure, il saute jusqu'à une heure. l'imparfait (/imperfectif/) est levée ici encore par
Letrait /itératif/ est dans tous ces cas un trait afférent, produit l'interprétation iterative : c'est pourquoi Quand Michèle
par une médiation argumentative : comme un saut dure cousait, Jean lisait est recevable, à la différence de ? Quand
quelques secondes, alors il s'agit de plusieurs sauts. Hors Michèle cousait, Jean lut (25).
contexte, on se réfère à l'univers du sens commun (cf. Pottier,
1974, p. 211 : "il s'agit souvent d'interprétations f) Ces premiers résultats paraissent confirmer la valeur
d'expérience") ; mais dans un univers fictionnel, sauter pendant une heuristique de l'étude des isosémies ; ils devraient être
heure, comme le Chat Botté, n'entraînerait pas complétés par une réflexion sur les degrés de force des
nécessairement une interprétation itérative. prescriptions et des exclusions qui relèvent du système de la
langue (26).
c) Quand à l'inverse un lexeme /imperfectif/ se trouve dans
le contexte d'un relateur /perfectif/, aucun parcours (i) Par ailleurs, une combinatoire des aspects primaires
interprétatif ne permet de lever l'allosémie : cf. ?// chante (/p***/) en pourrait définir des aspects dérivés. Soit, en encadrant de
(/p/) une heure. Toutefois le lexeme peut être perfective par parenthèses letrait aspectuel qui se trouve sous la portée (27)
le contexte ; notamment s'il fait partie d'un verbe, par un d'un autre :
accusatif : ainsi dans // chante le rôle de Wotan, 'chant-' est - /imperfectif/ (/imperfectif/) : continu, duratif,
perfectif; et II chante le rôle de Wotan en une heure comporte linéaire, progressif
une isosémie par récurrence du trait /perfectif/, afférent à - /perfectif/ (/perfectif/) : ponctuel, momentané,
'chant-*, inhérent à 'en' (23). instantané.
d) Enfin on constate une allosémie quand un lexeme / - /imperfectif/ (/perfectif/) : itératif, habituel.
- /perfectif/ (/imperfectif/) : néant.
perfectif initial/ se trouve dans le contexte d'un relateur /
perfectif final/, ou inversement : cf. ? Il finit depuis Noël, ? Il Remarque : dans le dernier cas, soit la combinaison ne
commence jusqu'à Noël, que seuls des contextes bien constitue pas d'aspect dérivé (ex. chant-a), soit elle est
particuliers pourraient rendre acceptables. exclue (ex. Pendant qu'elle cous-/-t ...).
Remarque : lia fini depuis Noël est recevable, car les temps (ii) Enfin, ces résultats permettent de mettre en évidence des
composés sont perfectifs finaux, et il y a isosémie entre le récurrences remarquables. Par exemple dans cette phrase
relateur et le morphème discontinu du passé composé (24). de Maupassant : "Souvent aussi, elle demeurait durant une
journée presque entière, à se mirer dans l'armoire à glace en
e) Etudions à présent les isosémies entre relateurs et acajou [...]" ("Allouma", Contes et nouvelles, Paris,
grammèmes liés (en nous limitant à ceux de l'imparfait et du
passé simple). Gallimard, Bibl. de la Pléiade, 1974, t. I, p. 1107). Le trait /
imperfectif/ est récurrent dans les sémèmes : 'souvent/,
(i) Quand un passé simple (/perfectif/) se trouve combiné 'demeur-', '-arf , 'durant", 'mir-\ et 'journée' (nous suivons ici
avec un relateur /perfectif initial/ on constate une allosémie : Pottier, qui oppose journée à jour, comme le duratif au
ex. ? Il écrivit depuis une heure ; mais avec l'imparfait ponctuel ; cf. 1974, p. 21 1) (28).
(/imperfectif/) l'isosémie sera rétablie.
A l'inverse, un relateur /perfectif final/ combiné avec un II. DIRECTIONS DE RECHERCHE
imparfait n'induit pas d'allosémie, car il y a alors afférence du
trait /itératif/ (conformément à la règle interprétative déjà A - On pourrait rechercher à présent si l'opposition perfectif
énoncée) : ex. // écrivait jusqu'à minuit. / imperfectif qui articule letaxème de l'aspect ne trouve pas
de catégories homologues dans d'autres taxèmes, comme
(ii) Les relateurs dits interpropositionnels, comme les le mode, la partition, le nombre. Ainsi par exemple, l'article
conjonctions de subordination, posent des problèmes plus partitif serait homologue de l'imperfectif et les articles défini et
complexes, mais susceptibles du même type de traitement. indéfini, du perfectif. Si bien que : il a mangé du /imperfectif/
Prenons l'exemple de quand (/perfectif/, cf. en) et de
pendant que (/imperfectif/, cf. pendant). On peut prévoir que
(25) Pour un traitement de ce type d'exemples au moyen de la logique
Intentionnelle de Montague, cf. Nef, 1983, pp. 302 sq.
(26) En règle générale, tes prescriptions "syntaxiques" l'emportent sur
(23) Cf. Pottier, 1974, p. 210 : "L'imperfectlf peut être perfective [...] la tes prescriptions lexicales : te contenu des grammèmes est donc
présence d'un accusatif [...] peut rendre la vision perfective" ; et cette déterminant.
remarque (1983,
cyclique" de Nef p.: "161).
écrire sera non-cyclique et écrire une lettre de faire-part (27) La portée dépend de facteurs morpho-syntaxiques : si le trait
considéré appartient au contenu d'un lexeme, elle s'étend au mot ; d'un
(24) On note que te trait /perfectif Initial/ du grammème ('a [...J-l') relateur prépositionnel, au syntagme ; d'un grammème lié, au nucleus.
neutralise te trait /perfectif final/ du lexeme (fin-'). Il y a là une règle (28) C'est pourquoi on préfère pendant la journée à pendant te jour, car
générale : quand te sémantisme du lexeme "contredit" celui du grammème pendant est /imperfectif/. Pour la môme raison. 7 Pendant te matin et 7
lié, c'est toujours ce dernier qui l'emporte. Pendant l'an sont exclus.

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chocolat pendant /imperfectif/ une heure et il a mangé le / Si l'on se place dans la perspective d'une sémantique
perfectif/ gâteau en /perfectif/ cinq minutes seraient interprétative, il apparaît que l'interprétabilité d'un énoncé est
isotopes, à la différence de ? Il a mangé le chocolatpendant une conditionnée plutôt parses isotopies facultatives que parses
heure, qui est bizarre hors contexte et // a mangé du gâteau isotopies obligatoires, si l'on admet du moins que les
en cinq minutes qui est inacceptable hors contexte (29). énoncés de type c sont plus aisément interprétables que les
énoncés de type b. En d'autres termes les isosémies (ou
B _ Si l'on revient à la problématique volontairement limitée isotopies "syntaxiques") ont un rôle secondaire.
de ce qui précède, le problème des rapports entre syntaxe et
sémantique se réduit à celui des relations entre les isotopies Plus généralement, on sait que des énoncés réputés agram-
prescrites par le système fonctionnel de la langue (ou maticaux comme vous faire moi rigoler (Peter Cheyney) sont
isosémies) et celles qui peuvent être dites facultatives dans interprétés à peu près aussi bien que les énoncés corrects qui
la mesure où elles sont prescrites par d'autres systèmes de peuvent les paraphraser.
normes.
Dans le domaine de l'interprétation au moins, il semble donc
En se limitant aux isotopies génériques facultatives que la syntaxe, pourtant prééminente dans les études
procédant d'un domaine sémantique (30), on retient quatre linguistiques, doive être remise à sa place, importante certes, mais
cas remarquables (31) : néanmoins secondaire.
a) ni isotopie facultative, ni obligatoire ; ex. : Que inutilement
Au mais ie Bianca cardinal la (suite obtenue par prélèvement RÉFÉRENCES
aléatoire dans Les amants de Venise, de Michel Zévaco). Carter R., (1984) Sous-catégorisation et régulaités
Cette suite n'est ni une phrase, ni un énoncé. sélectionnelles, Communications, 40, pp. 181-210.
b) des isotopies obligatoires, mais pas d'isotopie facultative ; Chomsky N., (1 984) La connaissances du langage,
ex. : Le silence vertébral indispose le voile licite (Tesnière) Communications, 40, pp. 7-24.
ou Une paupière pavée paradait presbytéralement (Martin). Desclés J.-P., (1980) La construction formelle de la
catégorie de l'aspect, in David, J. & Martin R., éd., La
De tels énoncés sont syntaxiquement corrects (32), mais notion d'aspect, Paris, Klinchsieck, pp. 195-213.
sémantiquement insuffisants (hors contexte) : ils ne Greimas A.-J., (1966) Sémantique structurale, Paris,
renvoient à aucun domaine sémantique identifiable ; et par là, un Larousse, 262 p.
logicien pourrait les dire absurdes.
HjernslevL, (1971) Essais linguistiques, Paris, Minuit, 275 p.
c) une isotopie facultative, mais rupture d'isotopies Hoepelman J. & Rohrer C, (1980) Time, tense, and
obligatoires ; ex. : Le train disparu, la gare part en riant à la quantifiers, in Rohrer, C, éd., Proceeding of the Stuttgart
recherche du voyageur (Char). Cet énoncé induit une conférence on the logic of Tense ans Quantification,
impression référentielle en renvoyant au domaine Tubingen, Niemeyer, pp. 85-112.
//transports// : train', 'gare', 'voyageur*, 'part* comprennent un Jacob P., (1984) La syntaxe peut-elle être logique ?
sème générique (inhérent pour les trois premiers sémèmes, Communications, 40, pp. 25-96.
afférent pour le dernier) qui les indexe dans ce domaine. Un Martinet A., (1960) Eléments de linguistique générale, Paris,
logicien pourrait dire cet énoncé determinable, et faux. A. Colin, 223 p.
Martinet A., (1 981 ) Linguistique et sémiologie fonctionnelle,
d) une isotopie facultative et des isotopies obligatoires ; ex. : Istamboul, Publications de l'Ecole supérieure des
Le signal vert indique la voie libre (Tesnière), Toutes même langues étrangères, n° 2850/5, 77 p.
la plus laide a fait souffrir son amant (Apollinaire). Ces Nef F., (1983) La description de la deixis temporelle du
énoncés renvoient respectivement aux domaines français modems, Université de Paris IV, thèse de
//transports// et //amour//. Logiquement, le premier exprime une Doctorat d'Etat, 523 p.
vérité a priori, le second est determinable (33). Pottier B., (1974) Linguistique générale, Paris, Klincksieck,
338 p.
Rastier F., (1987) Sémantique interprétative, Paris, P.U.F.,
277 p.
Rey-Debove J., (1978) Le sens de la tautologie, Le français
moderne, 4, pp. 318-332.
(29) Nous devons ces exemples à B. Pottier. Pour un développement, cf. Togeby K., (1951) Structure immanente de la langue
rauteur, L'isotopie sémantique, thèse de doctorat, université de Paris IV, française, T.C.L.C, V, Copenhague, Nordisk Sprog- og
1985, ch. VI. Kurturforlag, 282 p.
(30) Sur ce concept, cf. Pottier, 1974, p. 97.
(31) Pour un développement cf. l'auteur, 1987, ch. VII.
(32) L'usage veut que l'on distingue la grammaticalité et la sémanticité.
PaigrarnmaHcalIté on entend correction syntaxique, comme si la grammaire
se réduisait à la syntaxe et ne comprenait pas la sémantique. François RASTIER
(33) Loin d'utiliser la logique pour résoudre des problèmes L.I.M.S.I. - C.N.R.S., Orsay.
sémantiques, comme on le fait communément, nous préférons montrer que
les propriétés logiques d'un énoncé sont déterminées par ses propriétés
sémantiques, et notamment sa structure isotopique.

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