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UCL-Fopa 1300 Hervé Pourtois

LLN / 2011-2012
Philosophie de l’éducation et de la formation
Jean-Jacques Rousseau (1712-1778)
Éléments de synthèse

Notes à usage exclusivement interne au cours.


Ne pas diffuser s.v.p.

Introduction : une pensée du malheur

« L’homme naît libre, mais partout il est dans des fers» (Du contrat social, I,1)
« Tout est bien sortant des mains du créateur de toute chose, tout dégénère
dans les mains de l’homme » (Emile ou De l’éducation, I).

Ces deux phrases sont le point de départ de l’anthropologie de Rousseau. Par


nature, l’homme est libre et bon. Mais rapidement il perd cette liberté et devient
mauvais.
Le mal n’est donc pas inhérent à la nature de l’homme : il est exogène. La
dégénérescence vient de la société qui corrompt l’homme et l’aliène.
Plus précisément c’est la dépendance, la mise sous tutelle de l’individu par l’ordre
social, qui lui est néfaste. Cette mise sous tutelle implique ce que l’on pourrait
appeler l’hétéronomie. L’homme reçoit sa loi d’un dehors, d’une instance qui lui est
extérieure. Il se laisse conduire par la convention sociale plutôt que par sa propre
conscience.

Pour expliquer ce fait, R imagine un état de nature présocial (Cf. Discours sur
l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes), celui du premier âge de
l’histoire de l’humanité1, dans lequel chaque individu (famille) se suffisait à lui-même.
Dans une telle situation présociale, les hommes sont libres. Chacun est mu par
l’amour de soi, par le souci de sa conservation qu’il peut assurer sans dépendre
d’autrui et sans faire dépendre autrui de lui-même.
D’où vient la déchéance de l’homme ? Elle vient de ce que ce sentiment humain le
plus fondamental, l’amour de soi, se dégrade en amour-propre. Cette dégradation
surgit lorsque le souci de soi se transforme en désir d’être préféré, d’être choisi aux
dépens d’autrui. C’est la tendance à se comparer autrui, inhérente à la vie en
société, qui génère l’amour propre : « Chacun commença à regarder les autres et à
vouloir être regardé, l’estime publique eût un prix ». L’amour-propre fait naître l’envie,
le sens de la propriété privé, la vanité, la haine, l’orgueil,… Il semble inhérent à la
vie en société

L’homme peut-il se libérer de l’amour-propre et se libérer ?

1
On peut se demander si R pensait vraiment que l’état de nature ait jamais existé. Il faut en fait plutôt
le concevoir une fiction méthodologique qui aide à penser l’origine du mal et donc à imaginer les
moyens de s’en délivrer.

PHEDF - Rousseau 1
Il est évident que tout retour à un état de nature, à l’innocence primitive, est
impossible. Par définition, l’innocence est une chose qui ne peut être recouvrée. Il
faut donc trouver une solution qui permette à l’homme de vivre librement en société.
Cette solution est double : politique et éducative.

La solution politique (Du contrat social, 1762)


L’homme peut accéder à la liberté lorsqu’il accepte de subordonner son amour-
propre, son désir, à des lois qui sont l’expression de la volonté générale. L’homme
gagne sa liberté lorsqu’il obéit à une loi qu’il s’est donnée à lui-même. Et la loi ne
peut pleinement satisfaire cette condition que lorsqu’elle est l’expression de la
volonté générale (et non expression de la volonté d’un groupe d’en dominer un
autre). On identifie chez R une forme de républicanisme civique. C’est l’engagement
du citoyen qui sauve l’homme. Mais ce républicanisme se distingue de celui
d’Aristote en ce sens qu’il n’implique pas une identification avec une communauté
civique, une amitié civique, mais plutôt un accès au point de vue abstrait de la
volonté générale.
Toutefois cette identification ne serait pas possible sans une éducation qui la
soutient. La solution politique doit donc se doubler d’une solution éducative.

La solution éducative (Emile ou De l’éducation, ).


L’ouvrage
Publié en 1762 et condamné presqu’aussitôt à Paris et à Genève. Prenant le
contrepied des conceptions et des pratiques éducatives de son temps, R expose sa
propre conception en décrivant par le détail l’éducation d’Emile, orphelin élevé dans
la liberté et à la liberté, dès ses premiers jours, en dehors de toute société, par un
gouverneur.

La perfectibilité de l’homme
La radicalité de l’action éducative réside en ce qu’elle est dirigée à l’égard d’êtres qui
au point de départ ne sont pas corrompus par la société. Chaque génération, chaque
nouvelle naissance, est donc une chance pour l’humanité future.
Le petit d’homme se distingue en effet du petit de l’animal par sa perfectibilité.
À la naissance, le petit d’homme n’est pas achevé et son achèvement n’est pas
programmé par un instinct qui le pousserait nécessairement à faire ce qu’il faut faire.
C’est ce qui le rend vulnérable. Mais s’il est pauvre en réalisations, il est riche en
aptitudes. La nature a mis en lui des potentialités qui n’existent pas chez les autres
animaux, celles de raisonner et d’être autonome (de conduire sa vie selon son
jugement). L’homme a donc la capacité de se perfectionner. C’est cette capacité que
l’éducation doit actualiser.

Une éducation pour la liberté par la liberté


La perfectibilité est précisément la condition même de la liberté. L’individu humain
n’est pas réductible à ses déterminations naturelles. Il possède la possibilité de
devenir autre et sa vie est riche de nombreux possibles : elle ne conduit pas
inéluctablement à une fin déterminée. La raison n’est pas simplement ce qui chez
l’homme remplace l’instinct. Elle est cette faculté qui lui permet de conduire son
existence sur le mode de la liberté plutôt que sur celui de la nécessité. Elle confère à
l’existence humaine une plasticité que l’on ne retrouve chez aucun animal.

PHEDF - Rousseau 2
Mais la capacité de raisonner n’est pas d’emblée donnée à la naissance. L’enfant ne
l’acquiert que progressivement. Pour ce faire il est essentiel qu’il soit protégé des
influences sociales, qui ont tendance à inhiber l’aptitude à raisonner et l’amour de la
liberté.
C’est par l’exercice de la liberté qu’on acquiert l’amour de la liberté et qu’on apprend
la liberté. La liberté est à la fois la fin et le moyen de l’éducation.
• La fin : il s’agit de rendre l’homme autonome, soumis à la seule autorité de
son jugement raisonné, délesté des contingences et des déterminismes
sociaux. Emile est une figure imaginaire qui symbolise cet individu universel et
abstrait.
• Le moyen : il s’agit d’éduquer non par la contrainte ou la transmission mais
par la libre expérimentation et la libre expression face aux choses.

Une pédagogie négative : « prendre le contrepied de l’usage »


Comment l’éducation qui est nécessairement un processus relationnel et social, donc
potentiellement corrupteur, peut-elle engendrer la liberté ?
1. L’éducation doit être avant tout négative : le rôle de l’éducateur n’est pas de
transmettre ni d’apporter un savoir. Parce que l’accès aux capacités et à juger
résulte d’un processus naturel. L’éducateur doit simplement veiller à ce
qu’aucun obstacle, aucun vice ou préjugé social ne vienne perturber le
développement de l’enfant. Il s’agit de laisser faire la nature. La culture
déforme plus qu’elle ne forme.
2. Une éducation personnalisée dans une relation face à face qui isole l’élève de
tout contexte social jusqu’à ce qu’il soit capable de raisonner.
3. Le respect des rythmes de l’enfant. Il n’est pas un petit adulte mais un petit
d’adulte. Il est non seulement inutile mais néfaste de vouloir lui apprendre des
choses avant que sa raison ne soit suffisamment développée pour les juger et
les comprendre. Il faut connaître et reconnaître les spécificités de l’enfant et
de chaque stade d’apprentissage : « Perdre du temps pour pouvoir en
gagner »
4. L’importance du bonheur et de la liberté de l’enfant. Il ne faut pas sacrifier le
bonheur et la liberté de l’enfance au profit d’un hypothétique bonheur futur
pour l’adulte. Mais il ne faut non plus maintenir l’enfant dans l’enfance. Le but
de l’éducation est de l’en faire sortir.
5. Une éducation par la libre expression. C’est en suscitant (au besoin par des
artifices) la libre expression face à des situations concrètes que l’éducateur
permet à l’enfant d’apprendre par lui-même. Le rôle de l’éducateur est de
mettre l’éduqué en présence des choses pour qu’il apprenne en s’y
confrontant. Une éducation par les choses plutôt que par les mots.
6. Paradoxe : l’éducateur est un manipulateur qui éveille à la liberté par des
artifices donnant à l’enfant le sentiment de la liberté. Ce sentiment est la
condition même de la liberté. Car la source de l’hétéronomie, de l’absence de
liberté, est l’amour propre, la tendance à se rendre dépendant du jugement
d’autrui et des préjugés sociaux.
7. Une telle éducation est une condition nécessaire à la formation de bons
citoyens.

Quelques éléments de mise en perspective.


A certains égards, cette conception de l’éducation rappelle celle de Platon.
L’éducation n’est pas une affaire de transmission. L’éducateur n’est qu’un éveilleur

PHEDF - Rousseau 3
qui doit amener l’éduqué à trouver par lui-même les réponses aux questions
auxquelles il est confronté. Bien entendu, la situation d’apprentissage n’est pas
naturelle. Elle doit être construite par l’éducateur.
Toutefois les situations respectives d’apprentissage sont très différentes. Pour Platon
(et Socrate), c’est un dialogue sur le sens des notions et des mots que l’on utilise qui
conduit à l’auto-apprentissage (qui est compris comme processus de réminiscence).
En revanche, pour R, c’est le contact direct avec les choses (R se méfie du langage)
qui suscite l’apprentissage.
Notons aussi que tant Platon que R se méfient de l’apprentissage par l’habitude, par
la coutume ou par l’imitation qui, en revanche, sont, pour Aristote, des conditions
nécessaires de l’éducation morale.
Enfin, il y a un point qui rapproche R d’Aristote et qui les distingue de Platon. Pour
eux, l’acquisition de connaissances scientifique n’est nullement un gage de vertu
morale. Aristote insistait sur le fait que c’est avant tout la sagesse pratique
(phronèsis) qui nous aide à discerner le bien dans les situations concrètes. Cette
sagesse n’est pas le fruit d’un savoir scientifique.
De son côté, R s’oppose au Lumières qui pensaient que l’Homme s’émanciperait
grâce aux connaissances scientifiques et techniques (cf. le projet des
Encyclopédistes). Pour R, la conscience morale n’est pas l’expression d’une raison
calculatrice mais du sentiment d’amour. Les actes de la conscience morale ne sont
pas des jugements raisonnés mais des sentiments. La conscience morale est
immédiate : elle sait spontanément ce qui est bon ou mal. Pourtant, c’est là le
paradoxe, le développement de cette conscience morale ne surgit que si les lumières
de la raison se sont préalablement développées. Ce qui ne peut être le cas que si
l’on a pris soin de l’éducation de l’enfant dans le sens indiqué plus haut.
La conscience morale doit donc associer l’intelligence et le sentiment. Une
intelligence qui n’est pas une intelligence scientifique mais une intelligence pratique
que Kant théorisera de manière plus approfondie.

* *
*

En guise de prolongements :

• Jean-Jacques ROUSSEAU, Emile ou De l’éducation [1762], Paris


Gallimard, 1969 (Folio-essais, 281). Voir aussi:
http://classiques.uqac.ca/classiques/Rousseau_jj/rousseau.html

• Michel SOËTARD, « Jean-Jacques Rousseau », Perspectives : revue


trimestrielle d’éducation comparée (Paris, UNESCO : Bureau
international d’éducation), vol. XXIV, n° 3/4, 1994 (91/92), p. 443-456.
http://www.ibe.unesco.org/fileadmin/user_upload/archive/publications/T
hinkersPdf/rousseaf.pdf

• Pierre KAHN, « Emile et les Lumières » in KAHN P., OUZOULIAS A. &


THIERRY P. (dirs), L’éducation. Approches philosophiques, Paris,
P.U.F., 1990, pp. 173-209.

PHEDF - Rousseau 4

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