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Réalisé par :
BELAAOUAD Nor El Houda
BENKIRANE Habiba
RAFIK Mariam
EL FRAINI Ikram
EL ATTAR Chaimaa
Remerciements
2
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Sommaire
Introduction…………………………………………………………………………………………….………4
Conclusion…………………………………………………………………………………….……………….18
Bibliographie………………………………………………………………………………………………….19
3
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Introduction
Le droit pénal est un droit si spectaculaire, qu’il passe bien souvent aux yeux du profane,
pour la première et la seule image du droit1. Le droit pénal alors, est la branche qui définit
les faits de violence, de ruse, ou d’indiscipline, qualifiés « d’infraction » ainsi que les
« peines » qui s’y appliquent.
Parmi les grandes branches de droit pénal il ya le droit pénal des affaires, qui incrimine et
réprime certains comportements, lorsque leur auteur a agi dans le cadre d’une entreprise,
en se servant de ses mécanismes de fonctionnement soit pour son propre compte soit pour
le compte de l’entreprise. Ces infractions ont pour cadre ou pour moyen l’entreprise mais on
doit distinguer deux types d’infractions d’affaires : les infractions qui ont un rapport
nécessaire avec l’entreprise, c'est-à-dire qu’elles ne peuvent être commises que dans le
cadre de l’entreprise, et les infractions qui n’ont qu’un rapport occasionnel avec l’entreprise.
Actuellement cette matière est désignée plus par la « criminalité d’affaires » que de « droit
pénal des affaires », cette conception est apparue sous l’expression « criminalité en col
blanc » qui est une ancienne terminologie utilisée par des divers sociologues en 1872.
En effet, pour qu’il y ait une infraction il faut le cumul de trois éléments essentiels :
Elément légal ;
Elément matériel ;
Elément moral.
Pour la légalité de l’infraction c’est un principe constitutionnel avant qu’il soit pénal. Il est
garanti par l’article 23 de la Constitution de 2011, qui dispose : « Nul ne peut être arrêté,
détenu, poursuivi ou condamné en dehors des cas et des formes prévus par la loi». Le Code
pénal réaffirme ce principe dans son article 3 qui prévoit que « nul ne peut être condamné
pour un fait qui n’est pas expressément prévu comme infraction par la loi, ni puni des peines
que la loi n’a pas édictés » Autrement dit :« pas d’infraction et pas de peine sans texte»2.
Ainsi, le juge ne peut pas créer de nouvelle incrimination ou peine, il ne peut pas compléter
une loi insuffisante ni appliquer une sanction autre que celle prévue. Il n’y a pas d’analogie
en matière pénale.
Pour la matérialité de l’infraction il faut que celle-ci soit matériellement constituée pour être
punissable. Le droit pénal n’admet pas que l’on réprime la simple pensée coupable ;
1
Pour Stendhal : « il n’y a de droit que lorsqu’il y a une loi pour défendre de faire telle chose, sous peine de
punition » Le rouge et le noir.
2
Omar BROUKSY, « Maroc : un projet de réforme du code pénal divise la société » sur Le Monde, Paris, 14 avril
2015.
4
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Pour la moralité de l’infraction sur laquelle on doit se focaliser dans ce travail, elle consiste
dans un fait de ruse ou de tromperie, qui produit un résultat contraire à la loi pénale3.
L’intention consiste dans l’accomplissement délibéré de l’acte matériel constitutif de
l’infraction. Un acte matériel constitutif d’un crime ou d’un délit et non soutenu par une
volonté coupable ne serait pas pénalement répréhensible. Tel est l’aspect moral du droit
pénal : il n’intervient pas seulement pour protéger des valeurs, mais également pour
sanctionner les fautes qui reposent sur la volonté. Il est donc nécessaire dès l’opération de
qualification de mettre en évidence cette faute ou « élément moral » de l’infraction. Il serait,
en effet, contraire aux principes les plus fondamentaux de notre droit d’imputer à un
individu un acte sans vérifier préalablement qu’il est sous-tendu par une volonté et une
conscience criminelle ou délictuelle.
De ce qui précède, on est amené à s’interroger principalement sur les questions suivantes :
Quelles sont les différentes variations de l’intentionnalité ? Quel est l’importance de
l’élément moral dans la qualification des infractions dans le monde des affaires et le rôle
du juge dans l’appréciation dudit élément moral ?
Dans la suite de notre travail, il s’agira pour nous de voir dans un premier temps la
prééminence de l’intention dans une infraction pénale pour ensuite souligner dans la
seconde partie les règles légales et judiciaires gouvernant l’appréciation de l’élément
moral des infractions d’affaires tout en respectant le plan suivant :
Partie II : Les règles légales et judiciaires gouvernant l’appréciation de l’élément moral des
infractions d’affaires
Section 1 : L’importance de l’élément moral dans la qualification des infractions d’affaires
Section 2 : La consécration de présomptions de responsabilité
3
Xavier PIN, « Droit pénal général », édition Dalloz, p.133.
5
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
L’élément intentionnel n’est pas un élément constitutif de toutes les infractions et il peut se
manifester de différentes façons suivant le degré d’intention requis. Mais, la plupart des
délits et crimes ne comportent que la nécessité de rapporter la preuve de l’élément
intentionnel.
Lorsque la loi prévoit un crime ou un délit, celui-ci contient toujours dans ses éléments
constitutifs la nécessité de rapporter la preuve de la volonté de commettre l’élément
matériel de l’infraction par la personne. Un acte matériel non soutenu par une volonté
coupable ne serait pas pénalement répréhensible. Tel est l’aspect moral du droit pénal : il
n’intervient pas seulement pour protéger des valeurs mais également pour sanctionner des
fautes, lesquelles reposent toujours sur la volonté. Il est donc nécessaire dès l’opération de
qualification de mettre en évidence cette faute ou élément moral de l’infraction4. Plus
exactement, tout acte matériel répondant à la définition légale d’une infraction n’est
punissable que s’il a été réalisé par son auteur avec la volonté ou la conscience de violer la
loi pénale, sauf exceptions prévues par la loi. Il serait, en effet, contraire aux principes les
plus fondamentaux de notre droit d’imputer à un individu un acte sans vérifier
préalablement qu’il est sous-tendu par une volonté et une conscience criminelle ou
délictuelle.
4
V. également en ce sens, J. LEROY, Droit pénal général, LGDJ/Montchrestien, 2003, n° 360 s; v. cependant J.-H.
Robert, Droit pénal général, op. cit., p.316 s. (l’auteur étudie la culpabilité au titre des conditions d’imputation).
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L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
La seule imputabilité matérielle ne suffit pas, il faut qu’il y ait aussi une culpabilité.
L’imputabilité est le fondement moral de la responsabilité pénale, reposant sur le
discernement et le libre arbitre5 alors que la culpabilité est la situation d’une personne qui se
voit reprocher l’élément moral d’une infraction, soit au titre de l’intention, par hostilité aux
valeurs morales protégées, soit au titre de la non-intention, par indifférence auxdites
valeurs. La culpabilité suppose que l’imputabilité est acquise. Toutefois, la mise en évidence
de cette culpabilité est difficile car elle relève du for intérieur
Or, souvent on fait une confusion entre l’intention et le mobile, une distinction entre ces
deux notions est donc de première importance. En droit pénal, l’intention est définie
comme le dol général/simple. Le mobile est le but vers lequel tendait l’auteur de l’infraction,
l’objectif qu’il poursuivait en commettant un acte sanctionné pénalement.
Le mobile relève du for intérieur. Il est la raison qui pousse l’agent à commettre une
infraction6. A la différence de l’intention, dol général, qui consiste dans une volonté
abstraite, le mobile varie suivant les auteurs : la jalousie, la haine, la colère, le dépit, la
cupidité, la plaisanterie, etc…
Dans une perspective policière, les mobiles sont importants car ils constituent l’anse par
laquelle on tient le criminel. Néanmoins, en droit pénal, la loi étant par nature générale et
abstraite, les mobiles sont en principe indifférents. Ils ne jouent aucun rôle dans l’opération
de qualification, ni comme élément constitutif, ni comme fait justificatif. Ainsi, on peut
commettre un vol pour lutter contre le capitalisme ou pour payer ses dettes, peu importe ;
dès lors qu’il y a soustraction frauduleuse de la chose d’autrui, il y a infraction punissable. De
même, dans le délit de trafic d’influence, l’auteur de ce délit agit volontairement dans un but
précis. S’il le fait pour obtenir d’une autorité publique des distinctions ou toute autre
décision favorable, c’est un mobile, mais qui n’ôte rien au caractère volontaire de
l’infraction.
En principe, sauf texte contraire, les mobiles légitimes ou honorables n’exonèrent pas
l’auteur et donc ne supprime pas le caractère intentionnel de l’infraction. D’ailleurs, le fait
que l’auteur de l’infraction ne se soit pas enrichi ou n’ait tiré profit par la commission de
l’infraction est sans influence sur le caractère frauduleux de l’infraction. Cependant,
l’intention ne peut résulter de la négligence ou de l’absence de précautions.
Cependant, l’indifférence des mobiles doit être nuancée, le mobile est aussi pris en
considération par le législateur soit pour préciser l’élément intentionnel (dol spécial) soit
pour aggraver la répression (dol aggravé).
5
Les troubles psychiques ou neuropsychisiques et les contraintes sont des causes de non-imputabilité et donc
d’irresponsabilité.
6
Ph. CONTE, P. MAISTRE du CHAMBON, Droit pénal général, op. cit., n° 383.
7
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Aux termes de l’article 133 alinéa 1, du code pénal marocain « les crimes et les délits ne sont
punissables que s’ils ont été commis intentionnellement ». En matière criminelle et
délictuelle, il est donc nécessaire, sauf texte contraire, de prouver l’intention coupable pour
pouvoir appliquer une qualification pénale. Plus précisément, il y a intention lorsque l’agent
a recherché le résultat délictueux, c'est-à-dire qu’il agit volontairement, et qu’il en a
conscience, c’est à dire qu’il agit sciemment. L’intention est en effet classiquement définie
comme une volonté tendue vers le but illicite. On la désigne par la qualification de dol, en
opérant une distinction entre le dol général, le dol spécial et le dol aggravé.
a. Dol général
Le dol général se rencontre dans toutes les infractions intentionnelles8, il s’agit de l’élément
moral minimal. Il est caractérisé, quelque soit le mobile qui inspire l’agent : il n’est pas
nécessaire pour le prouver de démontrer un esprit particulièrement malveillant ou une
intention de nuire. Il s’agit simplement de l’intention de violer la loi pénale9 ou d’enfreindre
l’interdit pénal. En principe, cette intention doit être prouvée, cette exigence découle de
l’article 133 susmentionné du code pénal et du principe culpabilité. Plus précisément, le dol
général suppose à la fois la volonté et la conscience du résultat : l’acteur veut accomplir
l’acte qu’il sait défendu.
b. Dol spécial
A cette exigence de dol général, le législateur a ajouté une intention plus affinée, dénommée
dol spécial, qui est propre à chaque infraction. On parle de dol spécial lorsque l’auteur de
l’infraction, en plus d’avoir conscience de violer la loi, a une volonté plus orientée, et qu’il
tend à un certain résultat par la loi pénale. L’exemple classique est le vol : le voleur doit avoir
7
Ph. CONTE, P. MAISTRE du CHAMBON, Droit pénal général, op. sit., n° 388 s.
8
V.F. DESPORTES, et F. Le GUNEHEC, Droit pénal général, op. cit., n° 471 s.
9
Ph. CONTE, P. MAISTRE du CHAMBON, Droit pénal général, op. cit., n° 382.
8
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
c. Dol aggravé
Pour certain, le dol aggravé doit être assimilé à la préméditation10. Pour d’autre, le dol
aggravé correspond à la prise en considération du mobile de l’auteur dans la commission de
l’infraction11.
Le mobile peut être pris en compte dans la détermination de la sanction. Certains mobiles
sont ainsi des facteurs légaux d’aggravation de la peine12. Tel est le cas lorsque l’infraction a
été planifiée à l’avance et se réalise avec préméditation ou en bande organisée ou lorsque le
dessein poursuivi par les auteurs est particulièrement condamnable.
La faute non-intentionnelle est celle qui correspond à une volonté mal maitrisée : l’auteur a
bien voulu son geste mais il n’a eu ni la volonté ni la conscience de ses conséquences. On
dira que l’auteur a été imprudent, maladroit ou négligent.
La personne ne poursuivait pas un résultat par des moyens prohibés, mais a provoqué, par
imprudence, imprévoyance, négligence, inattention ou maladresse, une issue telle, que les
conséquences causent un préjudice dont la réparation dépasse le seul intérêt de la victime.
La faute simple ou faute ordinaire peut être retenue, lorsque la loi le prévoit, à l’encontre
des personnes physiques qui ont causé directement un dommage : elle correspond à un
relâchement de la vigilance, à une inadvertance coupable. Plus exactement, plusieurs
articles du code pénal vise la faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une
obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement en y ajoutant aussi la
10
Stéfani, LEVASSEUR, BOULOC, Droit pénal général, Dalloz, 1987, p.275.
11
DESPORTES et LE GUNEHEC, Le nouveau droit pénal, économica, 1994, p. 353.
12
F. DESPORTES, F. Le GUNEHEC, Droit pénal général, op. cit., n° 478.
13
V. G. GIUDICELLI-DELAGE, « La sanction de l’imprudence », in Mélanges Couvrat, 2000, p. 523 s.
9
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Les fautes qualifiées sont des marques particulières d’indiscipline et de mépris de la norme :
des comportements proches de l’insouciance. C’est le cas d’une personne physique qui n’a
pas causé directement le dommage, mais qui ont contribué à créer la situation qui a permis
la réalisation du dommage (auteurs indirects) ou qui n’ont pas pris les mesures permettant
de l’éviter (auteurs médiats). Or, il y a deux catégories de fautes d’insouciance plus difficiles
à établir que l’imprudence simple : la faute délibérée et la faute caractérisée.
La faute délibérée : C’est quand l’agent a violé de façon manifestement délibérée une
obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou par le règlement.
Cette faute délibérée est une forme d’hostilité à la norme particulièrement blâmable que
l’on recherchera nécessairement en présence d’un auteur indirect ou médiat, personne
physique.
La faute caractérisée : Elle traduit une indifférence à l’égard d’autrui. Elle n’est constituée
que si l’agent a exposé autrui à un risque d’une particulière gravité qu’il ne pouvait ignorer14.
Autrement dit, l’auteur n’a pas conscience du résultat mais il a conscience des risques qu’il
crée. Il conviendra donc de démontrer que cet auteur indirect ou médiat savait, ou plutôt ne
pouvait pas ne pas savoir, que son action ou omission créait l’encontre des tiers un danger
d’une particulière importance : il peut s’agir d’une absence de prévention ou d’information
de la part de celui qui devait connaitre les risques et qui n’a pas pris les précautions
nécessaires.
Entre l’attitude de celui qui a prévu et voulu le résultat et celle de celui qui n’a pas voulu ni
prévu le résultat, plusieurs attitudes psychologiques peuvent être adoptées : moins
volontaires que le dol, mais plus volontaires que l’imprudence. Ces états psychologiques
intermédiaires se rencontrent lorsque le résultat pénal non voulu a pu être conçu par l’agent
pénal. Plus exactement, trois situations de ce type sont théoriquement envisageables : Le
dol indéterminé ; le dol dépassé ; ou le dol éventuel.
a. Dol Indéterminé
Il est des cas où l’agent commet volontairement un acte, sans se soucier du résultat, alors
qu’un tel résultat était abstraitement prévisible. L’auteur de l’infraction a pris le risque de la
commettre sans pour autant être en mesure de prédire son résultat. En principe, l’auteur
doit répondre des conséquences prévisibles de ses actes, on dit que le dol indéterminé est
équipollent au dol général. L’indétermination peut porter sur la survenance du résultat
14
V. A. PONSEILLE, « La faute caractérisée en droit pénal », RSC 2003. 79 s.
10
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
comme il peut porter sur la gravité ; la peine étant proportionnée à la gravité du dommage.
Peu importe donc que ce résultat n’ait pas été concrètement prévu par l’agent : les
conséquences plus graves étant concevables, on considère que l’agent les a acceptées.
Le dol dépassé correspond à l’hypothèse de l’auteur qui a crée une situation qui n’est pas
celle qu’il avait prévue et qui porte atteinte à un intérêt différent de celui qu’il croyait léser.
L’auteur est littéralement dépassé par les événements. On est en présence d’une infraction
praeter-intentionnelle, c'est-à-dire qui va au-delà de l’intention. Dans ce cas, l’infraction
commise étant d’une autre nature que celle qui était prévue, l’agent doit en répondre sur un
autre fondement.
c. Dol éventuel
Le dol éventuel correspond à la situation de l’agent qui viole délibérément une norme de
prudence, en ayant prévu les suites dommageables possibles et en se moquant ou en
s’accommodant du résultat : l’agent prend des risques délictueux et manifeste une coupable
indifférence à l’égard d’autrui. L’auteur du dol sait qu’il viole une règle de sécurité qui est
mise à charge, mais qui passe outre, et préfère, en quelque sorte, courir sa chance.
Dans le dol éventuel, la personne accepte par avance que son choix puisse éventuellement
causer un dommage, sans qu’elle ait la volonté directe d’en créer un.
11
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
L’escroquerie est, selon l’article 540 du code pénal, le fait d’induire astucieusement en
erreur une personne par des affirmations fallacieuses, ou par la dissimulation de fats vrais,
ou exploite astucieusement l’erreur où se trouvait une personne et la détermine ainsi à des
actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires illégitimes ou à ceux d’un tiers.
L’escroquerie est naturellement un délit intentionnel, qui suppose que soit prouvée
l’intention frauduleuse de l’escroc. En réalité, puisqu’il s’agit d’un délit qui nécessite la mise
en œuvre de manœuvres frauduleuses, l’intention résultera généralement desdits moyens
qui reposent sur la construction d’un scénario de tromperie.
Comme pour la plupart des infractions figurant dans le code pénal, le mobile de l’escroc est
indifférent à la qualification de l’infraction. Que les mobiles de l’escroc soient nobles ou non,
légitimes ou illégitimes, ils n’ont pas d’influence sur la caractérisation de l’infraction et ne
peuvent en avoir que sur la peine qui sera rendu par le tribunal.
2- L’abus de Confiance
L’abus de confiance est, selon l’article 547 du code pénal, le fait par une personne de
détourner ou dissiper de mauvaise foi au préjudice d’autrui, soit des effets, des biens ou des
écrits de toute nature contenant ou opérant obligations ou décharges et qui lui avaient été
remis à l condition de les rendre ou d’en faire un usage déterminé.
12
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Pour cette raison, l’excuse invoquée d’une simple négligence est souvent un mauvais
argument de défense : la négligence, dans un certain contexte peut être coupable. Là
encore, à l’instar du préjudice, les conditions posées pour la constatation de l’intention
frauduleuse sont très souples puisqu’à de nombreuses reprises, il a été jugé que l’affirmation
de la mauvaise foi était nécessairement incluse dans la constatation du détournement au
préjudice d’autrui.
3- Le recel de choses
Le recel est un délit que le chef d’entreprise peut facilement se le voir reprocher. En effet, le
receleur n’est pas seulement celui qui recueille le produit d’un vol, receleur de profession,
comme le laisse croire l’opinion commune : il y a aussi un receleur d’un abus des biens
sociaux, d’un abus de confiance, d’une banqueroute… Une des caractéristiques du recel est
qu’il permet de poursuivre celui qui profite de la réalisation de l’infraction.
Le recel est, selon l’article 571 du code pénal, le fait de dissimuler sciemment, en tout ou en
partie des choses soustraites, détournés ou obtenues à l’aide d’un crime ou d’un délit.
Le recel est évidemment un délit intentionnel mais dont l’intentionnalité peut poser
problème. A priori, le caractère intentionnel de l’infraction consiste dans la connaissance du
prévenu de l’origine frauduleuse des objets recelés.
Toutefois, le fait de rendre la mauvaise foi apparente reste à l’appréciation du juge. En fait,
c’est au travers du contexte et du moment de la détention de la chose que la mauvaise foi
peut être établie.
D’autre part, si la chose détenue a été achetée, on peut parler du contexte d’achat douteux
ou de l’achat à vil prix, c'est-à-dire l’achat d’un bien avec un prix anormalement bas.
L’intention peut aussi être tirée de la profession du receleur puisque certaines professions
ont un devoir particulier de vigilance comme par exemple le banquier.
L’abus de biens sociaux est le délit commis par les dirigeants des sociétés commerciales qui,
de mauvaise foi, ont détourné les biens ou les crédits de la société pour en faire un usage
contraire à l’intérêt social ou à des fins personnelles ou favoriser une autre société dans
laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement.
13
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Ce délit réprimé par l’article 384 du droit des sociétés suppose que soit établit la mauvaise
foi du dirigeant. Dans ce cas, la preuve de l’élément intentionnel est à double détente :
Dans tous les cas, l’inculture comptable ou juridique n’est pas une excuse.
L’élément moral de l’abus de biens sociaux est complexe, contrairement à la majorité des
infractions. En effet, les mobiles sont inclus dans le champ répressif. Il est donc nécessaire de
caractériser à la fois le dol général, autrement dit l’intention frauduleuse, c'est-à-dire la
mauvaise foi caractérisée par la conscience d’agir dans un sens contraire à l’intérêt social ;
mais il faut aussi démontrer le dol spécial, c'est-à-dire le but poursuivi par le dirigeant social,
qui doit agir à des fins personnelles ou agir pour favoriser une autre société ou entreprise
dans laquelle il a un intérêt.
5- La contrefaçon
La contrefaçon est une violation d’un droit de propriété intellectuelle qui se traduit par une
reproduction, totale ou partielle, ou par une imitation frauduleuse de la chose sur laquelle
porte le droit de propriété. La contrefaçon est définie dans la loi n° 17-97 relative à la
propriété industrielle telle que modifiée par la loi n° 31-05 à l’article 201.
Autrefois associée au luxe, la contrefaçon des marques s'est répandue d'une manière
spectaculaire au cours de ces dernières années au point de gangrener aujourd'hui tous les
secteurs de l'économie. Véritable fléau, elle s'attaque aussi bien à l'économie marocaine,
européenne que mondiale. Ayant un effet dévastateur, aucun secteur industriel n'est
épargné par elle. Les principaux secteurs victimes de cette épidémie, hormis le secteur des
produits de luxe, sont le textile, les produits alimentaires, les jouets, et l'industrie
pharmaceutique15...
Le délit de contrefaçon fait l’objet d’une incrimination éparpillée à travers les alinéas 3, 4 et
5 de l’article 225 et l’alinéa 3 de l’article 226 de la loi 17-97 ainsi que dans plusieurs articles
du code pénal.
15
Article sur les droits de propriété intellectuelle du 17 Avril 2007 www.euractive.com, in sanctions pénales de
contrefaçon : état des lieux et perspectives d'avenir, A. Terranova, Mém. Univ. Schuman. Strasbourg, 2006-
2007, p. 5.
14
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
foi dans le cas où il a pris soin de se faire délivrer une attestation de l’authenticité des
produits qu’il se proposait de commercialiser ; ou lorsqu’il justifie que les produits ont été
acquis dans le cadre d’une cession de fonds de commerce déjà revêtus de la marque en
cause.
En cas d’un procès pénal, le doute est au profit du prévenu même s’il laisse subsister sa
responsabilité civile. C’est ainsi qu’a été relaxé le revendeur qui a acheté des produits, pour
une société Espagnole, portant une marque contrefaite d’un tiers dès lors qu’il n’était pas
établi qu’il connaissait avec précision le catalogue des produits fourni par le titulaire de la
marque et qu’il a pu traiter en confiance avec une entreprise dont le sérieux n’était pas
contesté16.
Certes, on constate bien souvent que le juge répressif considère que le prévenu qu’il a à
juger est un professionnel, un spécialiste qui par hypothèse, sait nécessairement ce qu’il doit
faire ou ne pas faire. En quelque sorte, le juge considère qu’en sa qualité de commerçant,
dirigeant d’entreprise, commissaire aux comptes.., le prévenu ne pouvait pas ne pas savoir
et qu’il a donc nécessairement agi sciemment.
Et ce, d’autant plus, que le même raisonnement conduit aussi à quasiment interdire au
professionnel poursuivi d’invoquer la cause d’irresponsabilité pénale fondée sur l’erreur sur
le droit qu’il aurait pu légitimement commettre dans l’interprétation de la règle de droit qui
sert de fondement aux poursuites dirigées contre lui.
Le juge pénal dispose aujourd’hui d’un arsenal législatif considérable pour combattre les
agissements frauduleux. La mondialisation de l’économie et son corollaire ; la corruption ; le
pouvoir des entreprises, les pratiques de la vie politique imposent au juge pénal une
intervention dans le monde des affaires pour l’encadrer, le moraliser et sanctionner les
dérives de ses acteurs, personnes physiques ou personnes morales
Les présomptions de responsabilité découlent de la méthode déductive retenue par le juge
pénal en matière d’infractions d’affaires. Les juges en réduisant l’élément intentionnel à la
16
S. DURRANDE, Contrefaçon, encyclopédie de droit pénal et de procédure pénale, Edition Dalloz, 1998, p. 278.
15
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
S’il est vrai que le juge pénal s’affranchit parfois des exigences du principe de la légalité des
délits et des peines, il est possible d’expliquer cette attitude par une volonté de justice. Il
apparaît en effet, que les motivations du juge pénal sont fondées sur un souci de répression
équitable et efficace face à une délinquance spécifique.
La contestation de la légitimité du juge pénal porte, pour l’essentiel, sur l’exercice de ses
pouvoirs juridictionnels. La mission du juge pénal est d’appliquer la loi, en revanche
interdiction lui est faite de créer la norme pénale au regard du principe de séparation des
pouvoirs qui fonde notre société, et du principe de la légalité des délits et des peines qui
16
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
demeure fondamental en droit pénal. La création de la norme pénale est un pouvoir réservé
à la loi entendue au sens large ; y compris le règlement.
Le juge pénal est conduit pour l’appliquer à interpréter la loi pénale. Mais il doit, au regard
des principes se limiter à une interprétation stricte qui dégage le sens de l’incrimination. Si la
loi pénale est claire et précise, le juge n’a pas besoin de l’interpréter pour lui donner un
sens : il l’applique au cas d’espèce. Si la loi pénale est imprécise ou obscure, le rôle du juge
s’en trouve accru puisqu’il doit éclairer les dispositions législatives pour pouvoir les
appliquer tout en restant dans le cadre légal de l’interprétation stricte.
17
L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Conclusion
En guise de conclusion, il faut signaler que le concept d’élément intentionnel relève du droit
pénal de fond. Cet élément fait partie des composantes principales de l’infraction, qu’elle
soit une infraction normale (vol, meurtre…etc) ou une infraction liée au droit des affaires
(abus des biens sociaux, escroquerie…etc).
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L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Bibliographie
VERON Michel, Droit pénal des affaires, 10ème édition, Dalloz, 2013.
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L’élément moral des infractions dans le monde des affaires
Table de matières
Introduction…………………………………………………………………………………………….………4
1- L’escroquerie………………………………………………………………………………………..12
2- L’abus de confiance………………………………………………………………………………12
3- Le recel de choses…………………………………………………………………………………13
4- L’abus de biens sociaux…………………………………………………………………………13
5- La contrefaçon……………………………………………………………………………………..14
Conclusion…………………………………………………………………………………….……………….18
Bibliographie………………………………………………………………………………………………….19
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