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L'Homme

J. Goody, The Domestication of the Savage Mind


Dan Sperber

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Sperber Dan. J. Goody, The Domestication of the Savage Mind. In: L'Homme, 1978, tome 18 n°3-4. De l'idéologie. pp. 201-
203;

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sives dont parlent les linguistes et les psychologues quand ils voient dans le langage
poétique l'émanation d'un sujet enclin à l'inceste (J. Kristeva) ou le rapport à l'oncle
maternel comme dérivant d'un rapport plus fondamental à la mère et au père, peut-être
inaccessible à l'anthropologue (André Green).
Les exposés des mathématiciens et des logiciens (Jean Petitot et Michel Serres) ont
une toute autre incidence que les précédents puisqu'ils élaborent des modèles encore
inutilisables pour des combinatoires particulières et fomentent des remises en question
d'une nature philosophique où la topologie joue un rôle de premier plan, en proposant une
nouvelle façon d'aborder des problèmes traités par l'anthropologie. Ainsi, M. Serres
suggère une équivalence entre pensée topologique et pensée mythique, toutes deux
occupées à parcourir des espaces qualitativement différents en branchant et débranchant,
connectant et déconnectant, franchissant et bifurquant. Tout cet « outillage spatial »
est certes d'un grand intérêt pour l'anthropologie, applicable à l'étude des mythes, mais
pourquoi pas à celle de la parenté qui fait couramment appel à des notions — encore
rudimentaires et imprécises — de topologie.
Biologiste, Antoine Danchin explique quel processus de différenciation — l'épi-
génèse — rend compte de la création d'une identité biologique individuelle stable en
relation avec le milieu extérieur. Il confirme ainsi la matérialité d'une identité individuelle
mais faite d'un réseau si complexe de liaisons neuroniques qu'apparaît la possibilité
d'une convergence, en quelque sorte philosophique, avec les conceptions samo ou
indonésienne d'une identité multiple.
A travers cet ouvrage, et dans les deux textes — d'ouverture et de conclusion — de
J.-M. Benoist, circulent des notions comme celles de spéculante, de corps pulsionnel,
de transport et de catastrophe qui concourent, apprend-on, à cliver le sujet et à
déconstruire la notion d'identité. Ces exercices décrivent ainsi une parabole entre une
préoccupation polémique que rappelle C. Lévi-Strauss — et qui consiste de la part des
anthropologues à évacuer la notion d'une quête ou d'une perte d'identité, et à répondre à la
critique qui leur est faite de nier l'altérité des cultures qu'ils étudient — et la constatation
que la notion d'identité est un « foyer virtuel », une « limite à quoi ne correspond en
réalité aucune expérience » (p. 332). « Virtuel » en effet, car j'avoue pour ma part être
bien souvent incapable de discerner la convergence des propos derrière l'amalgame
des concepts.
Charles Macdonald

Jack Goody, The Domestication of the Savage Mind. Cambridge-London-New York,


Cambridge University Press, 1977, x -f- 180 p., bibl., index, fig., tabl. (Themes in
the Social Sciences).

Il y a vingt ans, les anthropologues britanniques n'écrivaient pas de livres comme


celui-ci qui ne traite ni d'une société particulière ni d'une question de cours du genre
« l'oncle utérin » ou « la notion de tabou ». Le propos d'ensemble est un réexamen original
de l'opposition entre les primitifs et les modernes, « eux » et « nous », opposition qu'il est
convenu de récuser en principe tout en la conservant en fait, et entre guillemets. Jack
Goody pense qu'il y a des différences entre les modes de pensée des sociétés humaines,
mais des différences multiples plutôt que binaires, à expliquer par des facteurs complexes
plutôt qu'à postuler sous la forme d'une « grande dichotomie ». Le facteur plus
particulièrement examiné dans ce livre est l'écriture, dont sont envisagées aussi bien les
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conséquences psychologiques que sociologiques. Les données utilisées sont historiques


autant qu'ethnologiques. Parmi les auteurs cités, des psychologues comme Georges
Miller, des philosophes comme Popper ou Kuhn, des historiens, des linguistes.
De l'écriture, on remarque généralement qu'elle permet de préserver indéfiniment
la parole et ainsi d'abolir les limites de la mémoire humaine. Le grand mérite de ce livre
est de souligner que cette fonction n'est pas la seule, que l'écriture sert non seulement
à reproduire des discours qui lui préexistent, mais aussi et surtout à créer de nouveaux
objets de pensée, les objets d'une pensée nouvelle : tableaux, listes, formules, recettes
ne se développent vraiment qu'avec l'écriture, ouvrent de nouvelles possibilités à
l'intellect, lui imposent de nouvelles contraintes.
L'œuvre des intellectuels dans les sociétés sans écriture se fond dans un processus
de « transmission generative » ; l'oubli y fait fonction de critique. L'écriture, à l'inverse,
non seulement conserve l'individualité des œuvres, mais permet le développement
d'une critique détaillée de textes dont tous les éléments sont simultanément présents
ou immédiatement accessibles à l'œil. Par là, de nouveaux critères peuvent s'imposer
à la créativité littéraire ou scientifique. Goody donne ainsi l'exemple d'un critique de
Kuhn qui lui reproche d'avoir utilisé dans La Structure des révolutions scientifiques le
mot « paradigme » dans vingt et un sens différents ; il remarque que si l'œuvre de Kuhn
était transmise oralement, « aucun auditeur ne pourrait jamais repérer les vingt et un
usages du mot » (p. 49). L'écriture favorise une exigence de cohérence, un souci logique,
une attitude reflexive, qui à leur tour favorisent un développement cumulatif des
connaissances.
L'écriture permet la création et l'exploitation d'objets autres que le discours : des
listes qui inspirent une exigence d'exhaustivité, qui suggèrent, voire imposent, une
interprétation hiérarchique. Des tableaux qui inspirent une exigence de symétrie et dont
les cases ont horreur du vide. Des formules aussi complexes que l'on veut et qui inspirent
une exigence de conformité. Goody n'insiste pas sur l'exemple le mieux connu : le calcul
mathématique, et, ce qui est dommage, il ne cite pas son précurseur le plus méconnu :
Lucien Gerschel. Mais il avance un ensemble de réflexions parfois profondes, souvent
originales, toujours stimulantes, toujours illustrées avec bonheur, sur un thème vraiment
anthropologique dont on s'étonne qu'il ait à ce point été négligé par la profession.
L'ouvrage contient plusieurs développements critiques qui me paraissent moins bien
venus. Il y a quelque paradoxe à prendre Lévi-Strauss comme défenseur type de la
« grande dichotomie » et à voir dans l'opposition combien asymétrique entre « pensée
sauvage » et « pensée domestiquée » un avatar de l'opposition symétrique, ou asymétrique
dans l'autre sens, entre « primitifs » et « civilisés ». Un chapitre entier, surtout, est consacré
à critiquer les tableaux d'oppositions du style « droite »/« gauche », « mâle »/« femelle »,
« haut »/« bas », etc., qui ont été utilisés depuis Mauss et Durkheim jusqu'à Rodney
Needham et ses élèves en passant par Granet, Griaule, Lévi-Strauss, etc. Goody remarque
que ces tableaux sont caractéristiques de l'écriture, en particulier à ses débuts, et sont,
en revanche, absents du discours oral. Il conteste que cette structure écrite puisse
adéquatement servir de modèle à une pensée sans écriture. Pour justifier cette critique,
il donne, hélas, de ces modèles une interprétation que les utilisateurs n'ont jamais
avancée, voire ont expressément récusée. Ainsi, il écrit : « comme modèles manifestes
d'actes communicatifs ces tableaux laissent beaucoup à désirer » (p. 71) ; mais qui y a vu
de tels modèles ? Il proteste que les termes appartenant à une même colonne ne sont
pas toujours rapprochables, mais Rodney Needham, à qui il s'en prend, a plusieurs fois
mis en garde contre une telle interprétation : ces tableaux ne sont jamais qu'une
représentation spatiale d'une série d'analogies, c'est-à-dire de rapprochements entre des
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relations et non entre les termes de ces relations. De deux choses l'une : ou bien des
analogies en série existent dans les sociétés sans écriture et ces tableaux sont une façon
commode de les représenter, ou bien Goody pense que de telles séries d'analogies ne
peuvent pas exister sans écriture, et c'est là une thèse vigoureuse qui mériterait d'être
développée directement.
L'index (autre produit spécifique de l'écriture) laisse à désirer, mais les illustrations
et les exergues ont été choisis avec un agréable éclectisme.
Dan Sperber

Tzvetan Todorov, Théories du symbole. Paris, Seuil, 1977, 378 p., notices bibliogr.,
index (Poétique).

Si la futilité coutumière de la vie intellectuelle parisienne n'avait pas, en 1977,


atteint un comble, c'est ce livre-ci que l'on aurait lu et discuté (parmi quelques autres,
dont Homo aequalis de Louis Dumont, qui lui est à divers égards comparable) . Tzvetan
Todorov y met en lumière deux mille ans de réflexion occidentale sur les symboles et les
signes, un foisonnement de penseurs, de concepts, d'hypothèses, de controverses, auprès
de quoi la sémio tique contemporaine et ses ténors font figure de comparses de l' avant-
scène, originaux surtout par leur outrecuidance à se croire les premiers et les seuls,
à prétendre qu'est vide la scène obscurcie par leurs soins.
Todorov combine deux perspectives : l'une, systématique, embrasse les rapports
entre symboles et signes, les notions qui les décrivent, les théories qui en rendent compte.
L'autre, historique, fait ressortir quelques étapes significatives dans le parcours à peine
accidenté qui mène d'Aristote à Jakobson. Le livre est organisé en deux parties
apparemment symétriques : un long chapitre intitulé « La Naissance de la sémiotique
occidentale », et qui a pour personnage principal saint Augustin, est suivi de quatre chapitres
plus courts consacrés pour deux d'entre eux à la rhétorique, pour les deux autres à
l'esthétique classique, et en particulier à la notion d'imitation. Puis un long chapitre
intitulé « La Crise romantique », où Moritz, Novalis, Schelling et les frères Schlegel se
partagent la vedette, est suivi de quatre autres plus courts consacrés au langage originel
et au langage sauvage tel que l'a conçu en particulier Lévy-Bruhl, à la rhétorique de
Freud, au symbolisme chez Saussure, à la poétique de Jakobson. Le choix des thèmes
et des personnages comprend une part d'arbitraire : par exemple, l'herméneutique, la
philosophie des religions, la logique, la grammaire ne sont qu'effleurées ; Pierre de La
Ramée, Max Millier sont absents, Coleridge et Peirce à peine mentionnés. Pourtant, en
préférant une sélection de tableaux détaillés, à peine reliés entre eux, à un défilé qui de
vertigineux serait vite devenu monotone, Todorov apporte la preuve a fortiori d'une
des rares thèses d'un livre qui comporte surtout des questions : « La réflexion sur le
signe s'est exercée dans plusieurs traditions distinctes et même isolées, telles que :
philosophie du langage, logique, linguistique, sémantique, herméneutique, rhétorique,
esthétique, poétique. L'isolement des disciplines, la variété terminologique nous ont fait
ignorer l'unité d'une tradition qui est parmi les plus riches de l'histoire occidentale » (p. 9).
La constante de cette tradition sémiotique, féconde par ailleurs en conceptions qui
s'opposent, c'est le refus ou l'incapacité de mettre le signe et le symbole sur le même
plan sans pour autant les confondre : ou bien on les confond, ou bien on fait de l'un
l'inférieur, l'ébauche ou l'extension de l'autre. Pour les classiques le signe l'emporte ;
pour les romantiques, le symbole. Mais entre la signification paraphrasable des signes

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