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Chaurand Jacques. Foudil Cheriguen, Toponymie algérienne des lieux habités (les noms composés), 1993. In: Nouvelle revue
d'onomastique, n°23-24, 1994. pp. 259-260;
https://www.persee.fr/doc/onoma_0755-7752_1994_num_23_1_1204_t1_0259_0000_3
Pierre-Henri BILLY
Foudil CHERIGUEN, Toponymie algérienne des lieux habités (les noms composés), Alger,
Epigraphe, 1 993, 1 87 p.
La toponymie algérienne n'a pas donné lieu jusqu'ici à des études systématiques. Or c'est à une
étude systématique que se livre F.Ch. dans son ouvrage ; il s'y emploie avec méthode et en
s'adaptant à son terrain. Il s'est placé d'emblée sur un plan synchronique : le choix se justifie d'autant
mieux que la langue la plus ancienne, le berbère, est encore vivante. Il a pris pour base un "corpus"
puisé dans les cartes, le code postal, et les relevés personnels et a limité son analyse à un type
linguistique, les composés, qui offrent une pertinence à deux niveaux, celui du premier composant,
distinctif à titre de base, et celui du second qui détermine le premier.
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Nouvelle Revue d'Onomastique n° 23-24 - 1994
F.Ch. divise son répertoire selon les trois souches qui sont à l'origine du lexique, en commençant
par la plus récente, la française, en poursuivant par les souches arabe et berbère. Chacune se
caractérise non seulement linguistiquement, mais par des prédominances sémantiques liées à
l'histoire et à la sociologie. Ainsi les apports de souche française, qui subsistent surtout en Oranie,
sont marqués par l'importance de l'anthroponymie. Deux éléments principaux caractérisent la
toponymie de souche arabe, l'eau et l'homme ; la place de l'anthroponymie constitue un lien avec la
série précédente. Les populations d'origine arabe ont occupé surtout les plaines et les plateaux, et,
plutôt éleveurs qu'agriculteurs, ils se sont plus préoccupés de nommer les points d'eau que les
dénivellations de terrain. Au contraire, une part importante de la toponymie berbère, qui se répartit
surtout en Kabylie, se rapporte à cet aspect.
Un certain nombre de traits se retrouvent dans la toponymie européenne : composés tautologi-
ques qui semblent avoir une valeur distinctive et représenter une façon de satisfaire au double niveau
qui caractérise la formation composée ; appellations communes à l'hydronymie et à l'oronymie. Le
triple sens du mot oussera "ravin, torrent, ruisseau", lié au régime des eaux algérien (p. 87), fait
penser au sémantisme des aboutissements du gaulois nanto en France, selon les régions.
La situation de contact entre les langues n'est pas d'aujourd'hui et plusieurs domaines ont créé
des interférences. La toponymie est marquée par le plurilinguisme, et beaucoup de formes restent des
xénismes que caractérise le stade altération-adaptation.
Jacques CHAURAND
Un homme riche d'un passé provincial et rustique, celui de l'Agordino (p. 255), ne peut que
s'intéresser avec passion à la généalogie des mots ; sans cesse on en découvre loin de l'aire où leur
présence était déjà connue : cela ne nous incite pas à trop parler de latins régionaux, balkaniques ou
hispaniques, force mots invoqués étant arrivés partout (Lozovan cité p. 118), comme le français ou
l'anglais en Afrique. D'autres mots latins, bien sûr, furent, à des dates modernes, transportés sur les
routes, leurs emplois se restreignant, leurs sens changeant. M. P. se débrouille à merveille pour
reconnaître (cf. p. 249) Reliktwörter et Lehnwörter.
Une douzaine d'articles, dont cinq de portée plus générale, est republiée ici : armé d'une
information linguistique hors de pair et d'une extrême finesse sémantique, M. P. y lie ensemble des
vocables italiens, du Nord-Est surtout, et des vocables qui ont cours en Albanie ou plus au Nord,
jusqu'en Hongrie. D'où un regard fixé sur les vocabulaires des Balkans, de la Dalmatie ou du Frioul. Il
est entendu que, si des mots latins ou romans ont été implantés dans les Balkans, d'autres mots sont
allés des Balkans en Romania et que parfois on hésitera sur le sens du déplacement. Avec joie on
reconnaît l'émule du polyglotte Carlo Tagliavini et un spécialiste des langues anciennes comme des
modernes, capable de réexaminer et de grossir la masse des renseignements réunis par ses prédé¬
cesseurs : ainsi, p. 25-6, c'est bien par des voies populaires que scoria a donné frioul skuria et roum.
dial, scoara "scheggia di ferro"1 . On admirera p. 63-9 Continuatori balcanico-danubiani del veneto
"balota", d'où hongr. tüzes I apta "palla incendiaria", où presque tous voyaient un slavisme (p. 66).
Mais pour ainsi raisonner il faut surtout être au fait de tous les changements phonétiques
attestés dans les langues susceptibles d'être considérées, surabondants dans la foule des dialectes
qui sont dans le même cas, disons mieux innombrables.
Ceci regarde l'onomastique :
Tergeste et Opitergium, noms probablement vénètes, semblent bien proches, p. 15, de Tergolape
dans le Norique, et aussi du tergitio negotiator d'une épitaphe de Scarbantia ( Sopron ) en Pannonie. Il
1 . À deux degrés de longitude à l'Est de Zara et d'un pays qui emploie *organium < Organum x
ordmium, plus au sud l'albanais dit zgjyrè "rouille", le roumain commun (manque chez Cioranescu) dit
zgura < lat. scòria. Soit, mais le grec a окюрю, cncovpla "rouille" (M. P. écrit néo-grec skura).
Pourquoi un nom grec de la rouille serait-il passé par le latin pour ne persister qu'en furianu ?
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