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LA PHARMACOCINÉTIQUE
NOTES DE COURS
Marie-Claude Morissette
TABLE DES MATIÈRES
Dans la séance précédente, nous avons étudié les différents paramètres pharmacocinétiques qui permettent d’élaborer les doses et les intervalles utilisés par l’usager lors de la
consommation d’une substance. Dans la réalité, un consommateur n’évalue pas ces paramètres volontairement, mais au fil de sa consommation il en arrivera à s’administrer la dose
requise lui permettant d’obtenir l’effet recherché.
Comme nous l’avons vu précédemment, la pharmacocinétique est l’action du corps sur la substance. Plusieurs variables, par exemple le poids, les fonctions rénales ou la prédisposition
génétique, vont influencer les différentes étapes du devenir de la substance, soit : l’Absorption, la Distribution, le Métabolisme et l’Élimination.
La pharmacodynamie se définit comme étant l’action de la substance sur l’organisme, soit l’effet obtenu à la suite de la consommation d’une substance. Pour mémoriser les étapes du
devenir de la substance, retenez l’acronyme suivant : ADMÉ.
Les étapes entre la consommation de la substance (psychotrope, drogue ou médicament) et l’effet recherché sont nombreuses.
La variété de la réponse inter et intra individuelle est liée à divers facteurs, énumérés ci-dessus. Ces facteurs interfèrent avec une ou plusieurs étapes de la pharmacocinétique. Il en
résulte une variation inter ou intra individuelle dans l’effet obtenu à la suite de la prise d’une substance (psychotrope, drogue ou médicament).
Avant d’être absorbée dans la circulation sanguine, la substance consommée devra être libérée de la préparation qui sert à l’administrer. C’est l’étape de libération, qui correspond au
passage du principe actif de la préparation administrée jusqu’au site d’absorption.
À la lumière de ces exemples, on constate que, pour qu’une substance psychotrope soit absorbée, elle doit être présentée à l’organisme par une voie d’administration donnée, sous une
forme donnée, dans une préparation donnée. On doit également retenir que la formulation d’une substance interfère avec les différents paramètres pharmacocinétiques. Pour une
même substance et la même voie d’administration, deux formulations différentes donneront des profils d’évolution des concentrations plasmatiques différents.
Les voies d’administration des substances psychotropes sont très variables. Elles peuvent être intraveineuses ou extravasculaires, soit : orale, sniffé, prisé, sublinguale, rectale, etc.
La voie intraveineuse permet une distribution immédiate de la substance (psychotrope, drogue ou médicament) dans la circulation sanguine sans qu’elle doive être absorbée. De ce fait,
100 % de la dose administrée se retrouve dans la circulation systémique.
L’absorption est le cheminement de la substance (psychotrope, drogue ou médicament) du site d’administration jusqu’à la circulation systémique.
Le principal site d’absorption des substances (psychotrope, drogue ou médicament) se situe au niveau de l’intestin grêle (surface de contact importante, débit sanguin élevé et pH
favorisant l’absorption des substances).
Ce passage ne se fait pas aussi facilement que l’on pourrait le croire. Plusieurs obstacles entravent le cheminement de la substance, ce qui en réduit sa biodisponibilité.
La biodisponibilité est le pourcentage de la dose administrée qui atteint la circulation systémique.
À titre d’exemple, une substance prise par voie orale, comme la MDMA, aura une biodisponibilité de 0 à 100 % tandis qu’une substance prise par voie intraveineuse, l’héroïne, aura une
biodisponibilité de 100 %.
Pour atteindre la circulation systémique, la substance consommée devra traverser certaines membranes biologiques. « Les membranes cellulaires jouent un rôle important dans la
distribution des médicaments. La présence de deux couches lipidiques dans ces membranes leur confère une structure semi-fluide.
La membrane est constituée de molécules lipidiques : cholestérol, phospholipides dont certains ont un rôle de second messager, sphingolipides (moins nombreux) et de protéines (glycoprotéines,
protéines réceptrices, protéines “transporteur”…) qui s’insèrent dans la membrane. » Loichot, C et Grima. M ( 2004). Introduction à la pharmacocinétique – passages transmembranaires [PDF]. Repéré à
http://udsmed.u-strasbg.fr/pharmaco/pdf/DCEM1_Pharmacologie_chapitre_2_Introduction_a_%20la_pharmacocinetique_passages_transmembranaires_septembre_2005.pdf
Chaque lipide membranaire est constitué d’une tête polaire hydrophile orientée vers l’extérieur de la membrane et d’une queue hydrophobe (chaîne d’acides gras saturés ou insaturés)
orientée vers l’intérieur.
La diffusion passive est le mode de passage le plus utilisé par les substances pour atteindre leur cible. Ce type de passage n’est possible que si la molécule est « soluble » dans la
membrane phospholipidique, c’est-à-dire qu’elle peut traverser directement la bicouche de phospholipides qui constituent la membrane. La molécule doit être hydrophobe
(soluble dans les graisses) ou, si elle est hydrophile (soluble dans l’eau), elle doit être suffisamment petite pour traverser la membrane (exemple : l’alcool).
Le coefficient de diffusion est un paramètre qui permet de déterminer si une substance sera en mesure de traverser facilement ou non une membrane. Les facteurs qui
modifient la diffusion passive sont les suivants :
Le gradient de concentration : Naturellement, les molécules vont se déplacer d’un milieu à haute concentration vers un milieu à faible concentration
La taille de la molécule : Une molécule de grande taille ou fixée aux protéines plasmatiques diffusera plus difficilement qu’une molécule de petite taille
La lipophilie :
Les substances lipophiles (solubles dans les graisses) ont un coefficient de diffusion élevé, c’est-à-dire qu’elles seront en mesure de pénétrer facilement les
membranes biologiques (donc passage plus rapide dans la circulation systémique)
Les substances hydrophiles (solubles dans l’eau : substances polaires ou ionisées) ont un coefficient de diffusion faible, c’est-à-dire qu’elles traverseront les
membranes biologiques difficilement (passage plus lent dans la circulation systémique)
L’ionisation :
« L’eau est un solvant polaire, et les molécules dissoutes dans l’eau sont ionisées. Seule la forme non ionisée d’une substance (psychotrope, drogue ou médicament),
si elle est suffisamment liposoluble, est capable de passer la membrane cellulaire. » Loichot, C et Grima. M ( 2004). Introduction à la pharmacocinétique – passages
transmembranaires [PDF]. Repéré à http://udsmed.u-
strasbg.fr/pharmaco/pdf/DCEM1_Pharmacologie_chapitre_2_Introduction_a_%20la_pharmacocinetique_passages_transmembranaires_septembre_2005.pdf
Plus une molécule est liposoluble, plus elle se dissout dans les graisses, et plus son coefficient de diffusion est élevé, plus elle est absorbée facilement, donc plus le pourcentage absorbé
est grand.
Il est important de retenir que la diffusion passive est non saturable, non spécifique, et qu’elle n’est pas sujette au mécanisme d’inhibition, car elle n’utilise pas de transporteur.
La molécule doit être liée à un transporteur (protéine membranaire) afin de traverser la Ce mécanisme utilise également un système de transporteur mais, à la différence du
membrane biologique. Ce processus nécessite de l’énergie, car il s’effectue contre un transport actif, la diffusion ne s’effectue pas contre le gradient de concentration, donc
gradient de concentration. La substance doit avoir la bonne structure pour être aucune énergie n’est nécessaire pour ce type de diffusion. Il s’agit d’un mécanisme
reconnue par le transporteur. De plus, ce processus est saturable, contrairement à la saturable, et il y a possibilité d’inhibition en raison d’une compétition entre deux ou
diffusion passive, qui est non saturable. En général, les substances ionisées plusieurs substances pour le même transporteur.
(hydrosolubles) traversent les membranes grâce à ce mécanisme.
Au niveau de la bouche
L’absorption au niveau des cavités buccales et de l’œsophage est quasi inexistante étant donné le faible temps passé par la substance à cet endroit, à l’exception de l’absorption
sublinguale, qui est une des voies privilégiées lors de la consommation de certaines substances. La raison est bien simple. La langue est une région très vascularisée qui permet une
absorption rapide et intense des substances. Elle a également l’avantage de permettre un passage direct des substances dans la circulation systémique.
Au niveau de l’estomac
Puisque le pH de l’estomac est très acide (pH de 1 à 3), les petites molécules à caractère acide (forme non ionisée) seront absorbées à ce niveau. Comme la surface de contact de
l’estomac est grande et que le débit sanguin est élevé, une absorption intense sera observée à ce niveau de la voie digestive. Les substances sensibles au pH gastrique pourront par
contre être détruites lors de leur passage dans l’estomac, ce qui aura pour conséquence de réduire l’absorption et, par ricochet, la biodisponibilité de la substance.
Au niveau de l’intestin
Pour la grande majorité des substances, l’intestin grêle est l’endroit où l’absorption est la meilleure. Le pH de l’intestin est plus alcalin (pH de 5 à 8), ce qui favorise l’absorption des
substances basiques. La surface de contact importante (due aux villosités et aux microvillosités), la bile qui agit comme surfactant et facilite la solubilisation des substances, le débit
sanguin augmenté, la présence marquée de transporteur (favorise le transport actif et la diffusion facilitée) font en sorte que l’absorption intestinale est la voie d’absorption la plus
importante au niveau de la voie digestive. Par contre, certaines substances seront métabolisées par les enzymes qui se trouvent à la surface de la paroi de l’intestin (élimination
présystémique ou premier passage intestinal), ce qui réduira la biodisponibilité de ces substances. L’absorption au niveau du côlon est quant à elle beaucoup plus lente, car la surface
d’échange est plus faible.
Au niveau rectal
Cette voie évite le premier passage intestinal et permet donc une augmentation de la biodisponibilité de certaines substances (psychotrope, drogue ou médicament).
Dès sa résorption au niveau de la muqueuse gastro-intestinale, la substance se retrouve dans la circulation porte, l’amenant au foie où elle peut être métabolisée (plus ou moins
complètement) avant l’arrivée dans la circulation générale. Ce processus est appelé « effet de premier passage hépatique ».
L’effet de premier passage hépatique peut conduire à une perte importante de la substance consommée et entraîner ainsi une diminution de l’effet recherché. L’effet de premier
passage hépatique est surtout marqué pour les substances liposolubles. Il est saturable et soumis à des variations interindividuelles importantes. Les conséquences de ce premier
passage hépatique sont généralement une diminution de la biodisponibilité de la substance.
L’absorption d’une substance peut également se faire par les voies respiratoires. Certains psychotropes, par exemple la cocaïne, la marijuana, la nicotine et les solvants, peuvent être
consommés par cette voie.
Les substances consommées par voie respiratoire sont absorbées rapidement au niveau des muqueuses nasales, et ce, en évitant l’effet de premier passage observé avec la voie
digestive.
Par contre, l’utilisation de la voie pulmonaire lors de la consommation de psychotropes peut induire des maladies respiratoires importantes (irritation de la muqueuse nasale, sécrétions
nasales prolongées, perforation de la muqueuse nasale par la cocaïne, cancers respiratoires, etc.).
L’absorption de particules sous forme de gaz permet une pénétration très rapide des muqueuses pulmonaires. L’efficacité de cette voie d’administration lorsqu’une substance
liposoluble de petite taille est consommée est quasi équivalente à l’administration d’une substance par voie intraveineuse. C’est-à-dire que la biodisponibilité atteint près de 100 % et
que la rapidité d’action est quasi instantanée.
La voie d’administration d’une substance influencera grandement la concentration de la substance disponible pour générer l’effet attendu, et ce, pour une dose équivalente.
DEFINITION
« Depuis sa libération, à partir de la préparation dans laquelle elle a été présentée à l’organisme, la molécule de psychotrope a été absorbée. Elle se trouve maintenant dans la
circulation systémique, qui la véhicule, la distribue, dans tout l’organisme. Le transport par le sang amène la substance active dans des tissus où elle exerce son ou ses effets
pharmacodynamiques. La circulation amène aussi des molécules aux organes d’excrétion (rein, foie, glandes mammaires et sudoripares, cheveux). C’est aussi la circulation sanguine qui,
chez les femmes enceintes, permet le transfert des substances de la mère au fœtus, ce qui, on le conçoit facilement, n’est pas sans importance dans le cas de consommation de
substances psychotropes. Voyons comment tout cela fonctionne dans les faits. »
« Afin de bien comprendre comment est transportée la molécule, il faut connaître l’intensité de la distribution. C’est le volume de distribution, un paramètre pharmacocinétique que
nous avons étudié à la séance 3, qui nous l’indique. Rappelons qu’il se définit comme le rapport entre la quantité d’une substance donnée présente à un instant donné dans un
compartiment et sa concentration plasmatique mesurée au même moment. Il mesure l’intensité de la distribution d’une substance vers un espace tissulaire et il exprime, en termes de
volume, la capacité qu’ont une drogue ou un médicament de se distribuer. Rappelons que le volume de distribution ne possède aucun support anatomique obligatoire. Prenons un
exemple. »
« Une personne boit une tasse de café contenant 100 mg de caféine, un excitant central. Imaginons qu’immédiatement après l’absorption nous mesurions la concentration de caféine dans le sang et que
nous trouvions une valeur de 3,3 mg/L. Nous pouvons donc affirmer que le volume de distribution absolu de la caféine chez cette personne est de 30 litres (100/3,3). Si le poids de cette personne est de
60 kg, le volume de distribution est de 0,5 L/kg (30/60). Tout se passe comme si la caféine se distribuait dans un volume fictif de 30 litres. Cette valeur du volume de distribution, exprimée en litres par
kilogramme de poids corporel, est caractéristique de la distribution de la caféine dans l’organisme humain. »
Brazier, J-L. et Schneeberger, P. (2004) Effets des substances psychotropes. Montréal: Faculté de l’éducation permanente. p. 5.35
La distribution est la répartition de la substance consommée dans l’ensemble de l’organisme à partir de la circulation systémique. Comme décrit à la séance 3, le volume de distribution
absolu comprend l’étendue de la distribution de la substance chez un individu d’un point de vue tant plasmatique que tissulaire. Si on se rappelle bien les concepts acquis dans la
séance 3, un Vd élevé signifie que la substance est largement distribuée dans les tissus. Il en résulte une diminution de la concentration plasmatique. À l’opposé, un faible Vd signifie que
la substance est faiblement distribuée dans les tissus et que la concentration plasmatique est augmentée. Certains paramètres influencent le Vd :
la liposolubilité
la liaison aux protéines plasmatiques et l’affinité avec celles-ci
la distribution tissulaire
le degré d’ionisation de la substance
la variabilité des flux sanguins dans les organes.
« Certaines protéines plasmatiques (l’albumine, l’α1 glycoprotéine acide, les lipoprotéines, la γ globuline) possèdent la propriété de fixer des substances endogènes, mais également les
produits exogènes comme les psychotropes. Il en résulte la formation d’un complexe [protéine – molécule psychotrope] menant à la distinction du psychotrope sous une forme libre et
sous forme liée. Les protéines plasmatiques servent de véhicules pour transporter les psychotropes de la circulation sanguine aux tissus (il est à noter qu’il existe également des
protéines tissulaires qui peuvent se complexer avec la substance consommée). »
Seule la forme libre du psychotrope est active pharmacologiquement. La forme liée, elle, est inactive et ne peut diffuser pour atteindre son lieu d’action. Cette inactivité n’est que
temporaire, car les formes liée et libre sont en équilibre réversible. Au fur et à mesure de la disparition de la forme libre (par diffusion vers les tissus ou élimination), il y a passage de la
forme liée vers la forme libre.
Les conséquences pratiques de cette liaison aux protéines plasmatiques et tissulaires peuvent être la prolongation de la durée de vie du psychotrope dans l’organisme. De plus, la liaison
aux protéines plasmatiques et tissulaires est compétitive, c’est-à-dire que la substance ayant le plus d’affinité avec la protéine plasmatique ou tissulaire sera en mesure de se lier à elle
(concept d’interaction entre psychotropes).
La barrière hématoencéphalique est une barrière étanche qui laisse passer uniquement les petites molécules liposolubles et non ionisées. Les jonctions serrées et le transport actif des
transporteurs membranaires limitent l’accès des substances (psychotrope, drogue ou médicament) au cerveau. Les psychotropes ont quant à eux les caractéristiques essentielles leur
permettant de traverser cette barrière.
La barrière fœto-placentaire est un organe d’interface important entre la mère et le fœtus, mais elle ne constitue en aucun cas une barrière étanche qui isole le fœtus. Plusieurs
substances sont donc en mesure de traverser facilement le placenta (ex. : les benzodiazépines, l’alcool, etc.).
Le stockage tissulaire
Certaines substances demeurent stockées dans les tissus pendant de longues périodes. Cela fait en sorte qu’elles peuvent être détectées dans l’organisme sur de longues périodes (ex. :
cannabis).
Le débit sanguin est un facteur crucial à la distribution tissulaire. Plus le débit sanguin d’un organe est élevé, plus la distribution dans ce tissu est importante et rapide. Par opposition, un
tissu peu vascularisé aura tendance à stocker la substance consommée.
Les barrières tissulaires, en réduisant la distribution des substances, constituent un système de défense de l’organisme. La barrière hématoencéphalique, en particulier, constitue un
élément clé dans la protection du cerveau (diminution de la diffusion tissulaire de grosses particules, hydrosolubles et ionisées).
DEFINITION
« Le métabolisme comprend les biotransformations – ou modifications chimiques – que subit une substance (psychotrope, drogue ou médicament) dans l’organisme. Le résultat de ces
biotransformations via les enzymes, est généralement la réduction de la substance en une forme inerte, appelée métabolite inactif, plus facilement éliminable. La biotransformation est
un processus dynamique et irréversible qui implique une modification chimique de la structure du médicament. »
Les substances (psychotrope, drogue ou médicament) ne sont cependant pas toutes inactivées par le métabolisme ; certaines substances dites précurseurs ne deviennent actives
qu’après leur biotransformation, d’autres sont biotransformées en un ou plusieurs métabolites actifs (ex. : héroïne transformée en morphine). Il est également possible que le
métabolite produit soit toxique.
La plupart des réactions métaboliques sont enzymatiques et se produisent dans le foie, organe très vascularisé et riche en enzymes. D’autres organes comme les poumons, le tube
digestif et le rein y contribuent également, mais de façon beaucoup moins importante.
Le métabolisme diffère d’une personne à l’autre. De ce fait, l’élimination d’une substance se fait différemment d’un individu à l’autre.
Comme mentionné précédemment, les substances qui arrivent à traverser les membranes et à atteindre leur cible sont généralement des substances liposolubles. Par contre, pour
qu’une substance soit éliminée de l’organisme, elle doit être hydrosoluble (élimination dans l’urine, bile, transpiration, etc.). L’objectif du métabolisme est donc de transformer la
substance en métabolites plus polaires, soit solubles dans l’eau, pour pouvoir l’éliminer de l’organisme.
En résumé, nous pourrions dire que la substance doit être liposoluble pour être absorbée et distribuée efficacement, mais qu’elle doit être hydrosoluble pour être éliminée de
l’organisme.
ÉLIMINATION
(Produit hydrosoluble)
Ainsi, la fonction principale des réactions de phase I est de préparer la substance pour la phase II du métabolisme et permettre une élimination ultérieure.
Les CYP450 sont les principales enzymes responsables du métabolisme des drogues en produisant l’oxydation, la réduction et l’hydrolyse (réaction de phase I) de la substance. Les
CYP450 se retrouvent principalement dans le foie, l’intestin grêle, le rein et les poumons.
« Un CYP n’est pas spécifique à un substrat. Les isoenzymes les plus impliquées dans le métabolisme des médicaments chez l’homme sont les CYP3A4, CYP2D6, CYP2C9, CYP1A2 et
CYP2C19. »
La phase II est une phase de conjugaison qui aboutit à la formation de substances conjuguées, hydrosolubles et facilement éliminées par les urines, la bile, la transpiration, la salive, etc.
Les métabolites ou les substances subissent différentes réactions de conjugaison pour donner un produit conjugué qui sera éliminé.
Les métabolites produits suivant les réactions de phase II peuvent être des métabolites inactifs, actifs ou réactifs.
© Jynto
© Ben Mills © Morphine-3D-balls
Dans la majorité des cas, le métabolite produit sera le Dans de plus rares occasions, le métabolite résultant Il est également possible qu’une substance active
résultat de la transformation d’une substance active en de la biotransformation de la substance sera un produise des métabolites toxiques ou réactifs. De
substance inactive (dénuée d’activité métabolite actif. Cette biotransformation est possible nombreuses drogues d’abus – par exemple la cocaïne
pharmacologique). à partir d’une substance active qui produit des et le PCP – produisent des métabolites réactifs qui
métabolites actifs (activité pharmacologique) occasionnent une neurotoxicité.
similaires ou supérieurs (ex. : benzodiazépines,
comme le Valium®, transformées en nordiazépam
longue demi-vie) ou bien à partir d’une substance
inactive qui produit des métabolites actifs.
Des mutations sur certains gènes peuvent affecter l’activité de l’enzyme. De ce fait, nous pouvons différencier certains individus selon leur activité métabolique : métaboliseurs rapides,
métaboliseurs très rapides, métaboliseurs intermédiaires ou métaboliseurs lents. Il est également possible que chez certains individus l’enzyme soit totalement dénuée d’activité.
Ces caractéristiques peuvent varier selon l’origine ethnique, le sexe ou les composantes génétiques individuelles. Par exemple, la codéine est transformée en morphine (métabolite actif)
par le CYP2D6. Un individu dénué d’activité de la CYP2D6 ne pourrait obtenir l’effet antidouleur de la morphine, car la codéine ne sera jamais transformée en morphine.
Un métaboliseur lent risque de s’exposer à une dose toxique tandis qu’un métaboliseur très rapide risque de ne pas atteindre la dose minimum pour générer un effet. L’aire sous la
courbe permet de déterminer la concentration plasmatique.
L’induction enzymatique peut être produite par des substances provenant de notre environnement, de notre alimentation ou d’autres substances consommées. L’induction
enzymatique se traduit par une augmentation du nombre de protéines enzymatiques (CYP) et, par conséquent, par une augmentation de l’activité enzymatique.
Cette induction entraînera ainsi une métabolisation plus rapide de la substance consommée, donc une élimination plus rapide. Si les métabolites produits sont inactifs, la durée
d’action de la substance consommée sera réduite (donc effet attendu diminué). Par opposition, si les métabolites produits sont actifs, l’effet sera augmenté et il est même possible
d’atteindre un effet toxique. Par exemple, l’alcool consommé de manière chronique et le tabac sont des inducteurs de l’activité enzymatique.
L’arrêt de l’inducteur enzymatique expose à une surdose de la substance associée dans le cas où le métabolite est inactif.
Exemple de la risperidone, un antipsychotique, lorsque prise seule ou de manière conjointe avec la cigarette :
En présence d’un inhibiteur enzymatique, les médicaments fortement métabolisés par le système enzymatique inhibé ont un métabolisme diminué, et leur demi-vie d’élimination
plasmatique augmente. Les inhibiteurs enzymatiques sont en général spécifiques d’une isoenzyme : par exemple, un inhibiteur de l’isoenzyme CYP3A4 n’est généralement pas inhibiteur
d’une autre isoenzyme. Cependant, certains médicaments sont inhibiteurs de plusieurs isoenzymes du cytochrome P450.
Plusieurs substances sont des inhibiteurs de l’activité enzymatique, par exemple le jus de pamplemousse, les inhibiteurs du recaptage de la sérotonine (antidépresseurs), la méthadone,
etc. Ces substances réduisent donc la vitesse d’élimination de la substance consommée qui utilise l’enzyme inhibée pour être métabolisée. Cela entraîne une augmentation de la
durée d’action et de l’effet de la substance consommée et, dans certains cas, l’atteinte de doses toxiques.
Exemple de la sertraline (Zoloft), un antidépresseur, lorsque prise seule ou de manière conjointe avec le jus de pamplemousse :
Un individu souffrant d’une maladie hépatique peut voir son activité enzymatique altérée. Il peut en résulter une métabolisation plus ou moins rapide de certaines drogues. Dans de tels
cas, il devient très difficile de trouver la dose permettant d’obtenir un soulagement des symptômes sans se retrouver dans la zone toxique ou dans la zone sous-optimale. Il existe
diverses maladies hépatiques : la stéatose hépatique, la cirrhose hépatique, le cancer du foie, l’hépatite, la maladie de Wilson, etc. Ces maladies altèrent les fonctions hépatiques de
l’individu.
POLYCONSOMMATION
Dans une situation de polyconsommation, tout se complique. La prise conjointe de plusieurs substances peut occasionner une surcharge de certaines enzymes impliquées dans le
métabolisme (utilisation du même mécanisme de métabolisation d’une ou de plusieurs substances). Les risques de surdosage sont donc augmentés. Le consommateur s’expose ainsi à
un très grand risque pour sa santé.
« Nous venons de voir que le but des réactions métaboliques est de transformer des molécules liposolubles en métabolites hydrosolubles, afin de les éliminer de l’organisme. Dans un
premier temps, les réactions du métabolisme de phase I transforment la molécule en créant des groupements polaires sur lesquels pourront agir les enzymes responsables des réactions
de phase II. Ces dernières greffent sur les sites ainsi formés des groupements très hydrophiles qui augmentent l’hydrosolubilité des métabolites et facilitent de cette manière leur
élimination.
Les métabolites formés peuvent être soit inactifs, soit actifs, c’est-à-dire doués de propriétés pharmacologiques et, par conséquent, toxiques, soit encore réactifs, s’ils possèdent une
forte réactivité chimique. Ces derniers sont responsables de graves phénomènes de toxicité cellulaire.
Chacun de nous diffère de son voisin quant à la répartition qualitative et quantitative des différentes enzymes du métabolisme. En effet, celles-ci montrent des différences
interindividuelles importantes. L’existence d’un polymorphisme génétique pour certaines enzymes explique ces différences interindividuelles. Le comportement d’une substance
psychotrope peut être très différent d’un sujet à l’autre, à cause de ces différences interindividuelles dans leurs processus de métabolisme et d’élimination. »
La dernière étape de la transformation d’un médicament est l’élimination. Comme décrit précédemment, la substance consommée sera libérée, absorbée, distribuée et métabolisée par
l’organisme avant d’être éliminée. Cette étape est essentielle pour éviter l’accumulation de substance dans l’organisme.
Les principales voies d’élimination des substances (psychotrope, drogue ou médicament) sont le foie et le rein. Il est également possible d’éliminer les substances par la sueur, les fèces,
les cheveux et les poumons.
Comme décrit dans la section sur le métabolisme, les substances peuvent être métabolisées par les enzymes hépatiques et/ou éliminées par excrétion biliaire. Il n’en demeure pas moins
que le rein est le principal organe d’excrétion du principe actif sous sa forme inchangée et de ses métabolites.
Le paramètre permettant d’évaluer l’élimination d’une substance est la clairance totale. Souvenons-nous que ce paramètre se définit comme étant le volume de plasma totalement
épuré par unité de temps.
Les deux structures qui jouent un rôle dans l’élimination rénale sont le glomérule et le tubule ; les médicaments peuvent être :
filtrés : La filtration glomérulaire permettra l’élimination de molécules de faible poids moléculaire qui se trouvent sous leur forme libre (c’est-à-dire non fixées aux protéines
plasmatiques ou aux protéines tissulaires). La filtration glomérulaire est calculée par la clairance à la créatinine endogène ;
sécrétés : La substance passe du sang vers la lumière des tubules par un mécanisme de transport actif appelé sécrétion tubulaire. La sécrétion tubulaire est saturable, et deux
substances peuvent entrer en compétition pour le même système de transport actif ;
ou réabsorbés : La substance filtrée, ou filtrée et sécrétée, peut être réabsorbée au niveau des tubules. Plusieurs substances endogènes comme les électrolytes, le glucose, les
acides aminés et les vitamines sont réabsorbées par transport actif. Les psychotropes sont généralement réabsorbés par diffusion passive.
L’élimination rénale permet de dépister la consommation de certaines substances. Il est parfois possible de détecter la présence d’une substance sous sa forme inchangée ou encore par
ses métabolites. Le cannabis peut être détecté dans l’urine jusqu’à 30 jours après la consommation en raison d’une forte liposolubilité de la substance.
Élimination pulmonaire
« Les gaz et les substances volatiles sont excrétés dans l’haleine. Dans le cas de substances volatiles telles que les anesthésiques généraux, l’air expiré représente leur principale voie
d’élimination. Dans le cas de l’éthanol, l’haleine est une voie d’élimination mineure. Elle joue cependant un rôle important, car elle permet la détermination de l’alcool présent dans
l’haleine d’un individu. »
Élimination lactée
Certains médicaments sont excrétés en quantités significatives dans le lait maternel. Afin de minimiser les risques pour l’enfant, l’allaitement est déconseillé dans certains cas
(consommation de psychotrope, médicament consommé par la mère à des fins médicales mais pouvant causer du tort à l’enfant, etc.).
La substance qui est entrée dans l’organisme arrive à la fin de son périple. En nature ou sous forme de métabolites hydrosolubles, toute substance qui entre dans l’organisme est
éliminée. Cette élimination s’effectue par des voies diverses, urine, bile, sueur, cheveux, en fonction des caractéristiques de chaque substance. Dans la section sur la distribution,
nous avons également étudié la possibilité que les substances psychotropes soient excrétées dans le lait maternel.
Selon la voie d’élimination, la fenêtre d’observation de l’exposition d’un individu à une substance est variable. Les voies d’élimination et leurs divers excretas permettent de procéder à
la recherche de ces substances à des fins médicolégales.
4.7 REFERENCES
Brazier, J.-L. et Schneeberger, P. (2004). Effets des substances psychotropes. Montréal : Faculté de l’éducation permanente.
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Cloutier, B. et Ménard, N. (2005). La pharmacocinétique. Repéré à http://www.cheneliere.info/cfiles/complementaire/Math_et_med_9782765027485/Pharmacocinetique.pdf.
Lien mis à jour http://www.cheneliere.info/cfiles/complementaire/Math_et_med_9782765027485/Pharmacocinetique.pdf
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