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MELVIN M.

WEBBER

L'URBAIN

SANS LIEU

NI BORNES

Préface et annotations
de Françoise Choay

l'aube
essar
Collection ,Uonde CIl cours
dirigée par Jean Viard Melvin M. Webber

Ouvrage publié avec le concours du ~IVill~J .

L'urbain sans lieu ni bornes

Traduit de J'américain par Xavier Guillot

Préface et annotations de Françoise Choay

Couve rture : Anroinette Seurbelle

Turc (Jri.~in al: « The Urban Place and the Nonplace Urban Realm ",

pan, in tvlel vin M. Webber (ed.), Explorationsinto UrbaN Stmcture,

Unive rsity of Pennsylvania Press, Philadelphia, 1964.

V T rustees of the University of Pennsylvania, 1964.

l~ É ditions de l'Aube, 1996, pour la traduction française.

ISBN 2-87678-2262_6
éditions de l'aube

PRÉFACE

Depuis le dernier tiers de siècle, la France n'a cessé, à


l'in star des autres pays industriels avancés, de perfection­
ne r, selon son style propre, un ensemble de techniques de
mé morisation, de communication et de transport dont la
mise en réseau a transformé et continue de transformer à
la fois la physionomie de notre pays et les comportements
de s Français dans l'espace et le temps. Cependant, en
grande majorité, nos hommes politiques, nos édiles, nos
administrateurs, nos sociologues, nos architectes, et souvent
nos urbanistes, continuent, pour la plupart, de penser la
ville et la campagne, les collectivités locales, le travail et
le logement selon les instruments conceptuels et adminis­
tratifs que nous a légués le XIXC siècle. Nous peinons à
reconnaître la révolution urbaine qui se poursuit sous nos
yeux, incapables d'en interpréter les signes: dépeuple­
ment des centres urbains anciens, consommation foncière
annuelle (70 000 hectares vierges, soit cinq fois la surface
de Paris), mobilité des personnes traduite en flux aériens,
ferroviaires et automobiles, comme en termes de change­
ment de domicile (52 % entre les deux derniers recense­
ments), ou encore poussée du télétravail et émergence de
la télé éducation.

5
( ;( li t ' .. ré vollltion de la ville », voici plus de trente ans
«/I I(" l' l\ llI éricain Melvin M. Webber l'a nommée, a corn­ co nflits urbains. Cette multiplicité d'approches demeu­
111('/ 1('(: :) la décrire, à la penser, à en inventorier les signes
fait fondée, dans ses critiques, ses critères, ses choix de
1' 1 Ic ~ prOCl.:ss us. D'emblée, il donnait pour titres à ses vale urs, sur une vision traditionnelle de la ville.
IlIdcs les formules dérangeantes qui énoncent la portée Web ber, comme le montrent les notes infrapaginales
d e SI;S d écouvertes : The Nonplace Urban Realm " du présent ouvrage, a utilisé toutes ces sources, mais pour
,'o///I// lll1i ( y Hti"tho/tt Propùlq/tity 2, The Post-Ci~y Age 3. Sa les critiquer et les dépasser. Il s'inscrit dans une direction
rUk x ion sc focalisait sur le développement des tech­ inve rse : « Il nous faut implanter en Amérique une contre­
lI iq llcS de transport et de télécommunication pour en rra­ tradition qui, en explorant le futur, pourrait donner forme
1/1 re r les impacts effectifs ou potentiels et les convertir en ~ une politique nationale de développement... Nous pen­
1Il re synt hèse prospective.
sions que le développement des suburbies allait fournir des
Les Français sont passés à côté de ces travaux. Pas un loge me n ts décents à tous, et maintenant nous pensons
d<. ;
1IJ o
s opuscules publiés par Webber entre 1958 et q ue rien d'autre que la reconstruction immédiate des
: .i llrd 'h ui n'a été traduit dans notre langue.
ancie nnes villes ne les sauvera du désastre... » Ces lignes
Parmi la prodUCtion américaine consacrée aux problé­ vise nt des auteurs, comme Jane Jacobs, qui voient dans la
Ill ari<ju <.; s et à la planification urbaines durant cene tren­ grand e ville de type européen le remède aux maux
lail1t: d'années, nous nous sommes intéressés à trois sociaux des États-Unis, mais aussi tous ceux qui ont pu
c:Hé gorit:s d'ouvrages, les uns d'inspiration scientiste, ê tre influencés par les œuvres d'Européens comme
les nurrcs dominés par des préoccupations sociales. La Simmel et Spengler, ou qui s'intéressent comme Lynch à
l'r <.;llIièrt: catégorie, largement inspirée des travaux de la la morphologie des cités historiques de l'ancien monde.
p.<:ographit: allemande, concerne les recherches de locali­ En fait, « l'exploration du futur» préconisée par Webber
S:II iOIl . Elle a été tôt introduite en France par P. Merlin 4,
s'inscrit dans la tendance anti-historique de la sociologie
dt:sro a vaut la traduction de Méthode d'analyse régionale, une ct des études urbaines américaines qui depuis leur émer­
i lll r!lI r:l i OII à /a scÎellce régiollale 5, de W. Isard. La
ge nce se sont toujours penchées sur les problèmes du pré­
d<.;ll xiè ll1 e concerne l'application de la théorie des sys­
'(~'/II t:~j ~ l'analyse urbaine, symbolisée par les travaux de
se nt et propres à la société américaine. Au reste, Webber
poursuit : « Mais il est insuffisant d'engouffrer nos res­
lU », Meit:r ct J,W Forrester 6, ainsi que les méthodolo_ sour ces dans les problèmes manifestes sans s'attaquer
gi<.;s diverses fondées sur l'usage de l'ordinateur. La troi­ au ssi aux enjeux moins visibles. Il faut tenir compte du
sièm e catégorie, enfin, embrasse un ensemble d'ouvrages 7 vaste changement historique qui va remodeler le caractère
de lonalité sociologique, qui dénoncent les effets de la de la société urbaine dans le monde développé 10. »
"(- novation
l1 urbaine et de s nouvelles formes d'urbanisa­ L'originalité de la position de Webber réside dans son
I io , comme ceux de J, Jacob 8 ou de K. Lynch 1) et/ou
rapport à la technique, envisagée non point comme un ins­
:' II:dyscn t les processus de ségrégation territoriale et les trument méthodologique mais comme un fait social global,
lié par une boucle de rétroaction à toutes les dimensions
6
7
pl' Y:-li" /ll:s c r mentales de nos sociétés. Sa démarche est, en
10/lS pOillL\ opposée à celle de Lewis Mumford, dont la li notion de paradigme appliqué à la planification, Taleott
ll"cbllilJl w avait POUrtant été le premier objet d'étude à I'ursons, qui l'a aidé à penser la question institutionnelle
1 le procès de modernisation, et Daniel Bell, le théori­
partir ullqllel il abordait la ville ll. Mais, pour ce dernier,
l'illcidellce toujours plus forte des développements tech­ rie n de la société post-industrielle. Par ailleurs, les ana­
/liqll es sur les formations urbaines des sociétés indus- lyses de Louis Wirth sur les minorités urbaines lui étaient
t rid k s avancées était responsable de leurs tares et de leurs
familiè res et il connaissait bien les thèmes développés
éc/wcs. Elle appelait des jugements de valeur négatifs et dans le sillage de Max Weber sur le destin de la ville oeci­
des stratégies de détournement pour pouvoir retrouver des dentale, en particulier, les observations formulées par Don
~ tab l iss ements urbains « organiques» dont, en fait, la ville Mart indale dans sa fameuse introduction à la traduction
Illédi(':vale fournissait l'idéal-type. amé ricaine de Die Stadt : « La ville moderne est en train
Wcbber, lui, ne juge pas. II enregistre dans le champ de perdre sa structure physique et formelle. Intérieu­
des transports et des communications des performances rement, elle est en état de décomposition tandis que la
illédir:es, d'Une nouveauté radicale quant à l'accélération nouv elle communauté représentée par la nation se déve­
c r aux modalités au sein desqueIIes elles s'inscrivent dans loppe partout à ses dépens. L'âge de la ville semble avoir
le pr ocessus de dénaturalisation du monde qui, depuis atteint son terme 13. » Webber reprend à son compte ces
rOI/ jours, a caractérisé l'intervention des humains. Il constats, mais sans nostalgie ni pessimisme.
\ <'0 1I~ t" te l'i nél uetabi 1ité de leur développement, suppu te Dans le champ plus précis de la planification urbaine,
Il: nom de Webber n'est pas séparable de ceux de John W.
leu rs impacts et, dans le domaine des établissements
bl//llains, pointe le plus fondamental: le désengagement Dyckman, Donald L. Foley, j. Friedmann..., avec qui il a
dd traditionnelles contraintes spatiales de localisation, de participé à de nombreux ouvrages collectifs. Cependant,
for/l}a lisation, d'enracinement ou, en d'autres termes, la parmi tous, Melvin Webber est celui qui a su décrire avec
('olldamnation, par obsolescence, de la ville, Il: plus de force et de précision ce qu'il appelle 1'« érosion
S'il allait à Contre-courant, Webber n'était cependant ni
du localisme 14 » et la déspatialisation de la ville.
un isolé, ni un solitaire. On ne peut même comprendre
Telle est la raison qui nous fait traduire aujourd'hui The
('l'Ill: pensée de la modernité hors du COntexte intellectuel
Nonplaœ Urban Rea/m. Ce texte a été choisi de préférence à .
i1 111éricain qui l'a nourrie. Elle ne doit pas seulement être
d'autres, postérieurs et d'une lecture plus facile, parce qu'il
('da irée par l'idéologie anti-urbaine de Thoreau ou des était le premier travail important de Webber et marquait sa
prl" llliers théoriciens américains de la ville comme Joseph place pionnière dans l'histoire des idées et de la planifica­
S , rOllg 12, et rattachée au pragmatisme de John Dewey. tion urbaine. II importe toutefois de le situer dans la dyna­
On Il l: peur dissocier sa démarche épistémologique et les mique de la recherche de Webber.
oril:lltations de Son analyse sociale des travaux de trois L'intuition fondamentale, qui demeure le socle perma­
'ra llds sociologues - Merton, auquel Webber a emprunté ne nt de tous les textes, concerne le rôle « déspatialisant »
des techniques de pointe de communication et de trans­

8
9 .
l''''' , 1 " ,"' r;/IH'hissl: nlCnt qu'elles nous aSSurent à l'égard
~ cl , 1 t l/ I I r:l i,ll<.;s ancestrales exercées par la distance, les d 'expansion et où il s'accroît à mesure de sa consomma­
Il t ,d {'I II S gé og rap hiq ues, la répartition des aggloméra_ I ion... On peut prédire avec vraisemblance que les

I,,,, f.'! : /';II l/(I/llO bilc ct le téléphone SOnt les deux instru­ Amé ricains se consacreront de plus en plus aux entre­
111 1 1I1 ~1 SY/llllOliq ucs ct homologues de cette libération. pris es intellectuelles. Le savoir est déjà devenu la res­
1\ " pla/l du territoire, celle-ci se manifeste par une source économique critique pour les producteurs privés
''''',/I ,isario/l diffuse sans précédent, « une échelle de dis­ . t publics de biens et de services. Il tend rapidement à
/, 1 IS'OII spatiale jamais possible auparavant 15 », caractéri_ dev e nir de la même façon la ressource critique pour les
(.(' p:! r la disparition des anciennes limites, l'extension consom mate urs 21. »
d(','t rr:lIlges périphériques, l'investissement de territoires Les anciennes villes, devenues obsolètes ct appelées à
vl('rg(:s, l'apparition des configurations urbaines filamen­ s' efface r dans la dispersion (<< La colle qui tenait
1('''ses le long des Côtes, des grands lacs, des fleuves e nse m ble l'établissement spatial est en train de se dis­
'1 ,, '1 k rvé Le Bras a décrites en France en 1992 16. sou dre et il se disperse sur des territoires toujours plus
Ali plan social, cette liberté nouvelle, qui rompt avec vaste s 22 »), sont donc remplacées par une nouvelle forme
.. I(JIIIl: l'llÎstoire humaine [oùll 'organisation sociale a coïn­ d' ur banité, « une nouvelle sorte de société urbaine de
<"i.lé uvee l'organisation spatiale 17 » se manifeste par la vaste échelle... de plus en plus indépendante de la
IlI lI lriplication indéfinie des rappOrts sociaux à travers les ville 23 » , Ce domaine urbain, « producteur de l'informa­
r<Sseaux de communications. « Nous vivons une révolution tion et des idées qui fournissent leur énergie aux
lJ lli détache les processus sociaux d'urbanisation de la ville machines de développement social 24 » , est défini par son
.r dl: la région localement fixées» et qui nous fait passer échelle sociétale, virtuellement mondiale, et par la crois­
d n « localisme ancestral aux royaumes sans frontières des sance exponentielle des interactions qu'il favorise. Le
cosmopolites I~ », Webber ne cessera de décrire le double constat apparaît d'autant plus aisé et évident à Webber
proce ssus qui assure aux individus une participation crois­ qu e, selon une tradition américaine bien établie, il envi­
sante à des commUnautés d'intérêts spécifiques en même sage la ville avant tout en termes d'échanges et de solida­
temps que leur insertion dans un réseau global qui se mon­
rités d'intérêts. En effet, de The Post-City Age (1968) à The
dialise : « Tout un chacun est virtuellement engagé dans
10)'s of Atttomobility 25 (1991), il ne se lasse pas de répéter
un réseau unique de communication 19. »
que, dans le contexte américain, « les villes existent seu­
La déspatialisation des rappOrts sociaux est rendue
lement parce que l'agglomération spatiale réduit les coûts
d'autant plus facile que, dans nos sociétés, « l'informa_
de l'interaction 26 », que « c'est le désir de meilleures
rion se substitue au travail et aux matières premières
co m m unications qui, au départ, a conduit les gens à la
comme ressource primaire 20 » , Webber ajoute, non sans ville 27 », Il déclare que « la ville, avec ses concentrations
optimisme: « Le savoir est un type de ressource particu­ d' individus et de bâtiments, n'eut guère d'attrait pour les
lier dans la mesure où il postule une capacité infinie immigrants nulle part, ni à aucun moment. C'était seule­
me nt la possibilité de contacts, d'être intégré dans une

10
11
" " " Il "C Il r"ai ne '1 ui séduisait 28.• /1 n 'hésite ra même pas à
anin llcr que" la recherche de connexions peu COôteuses «lurions qu'on leur apporte ne sont-elles ni vraies ni
c xr en fait la seule raison POur laquelle on n'a jamais luusscs , mais bonnes ou mauvaises. », « Le but de l'urba­
"""srr" it des villes... Sans ces raisons économiques, il n'y 1I11l 1e..: (pIonner) n'est pas de découvrir la vérité, mais
all",i, l'as de villes. Et si les coûts d'interconnexion ne rl' umé l iorer certaines des conditions du monde où vivent
d illli" " aic nt pas en fonction de la densité, jamais on d(' ~ humains 33 ».
" a"rait édifié les New York, Londres, Tokyo ou même O n ne peut mieux dénoncer les illusions toujours
' , fiS Angeles de ce monde 29. »
vivaces répercutées par les écrits de Le Corbusier sur « les
" ""r Melvin Web ber, la « révolution du développe_ plans vrais» et les « solutions scientifiques» de l'urba­
1I1e..:1It IIrbain » ne peut manquer d'entraîner une révolu­ uisrne. Webber ajoute en outre, marquant ainsi la dimen­
,io" '01idaire des disciplines de planification. E t c'est ion morale et les responsabilités des urbanistes: « Le
précis"'nent dans sa conception de la tâche et du rôle du planificateur n'est pas autorisé à se tromper 34. » Et c'est
p"' ''i lieate ur que se manifeste l'évolution de sa pensée. hien là en quoi il diffère du scientifique dont K. Popper a
li 'III e/i'is, avanr d 'en marquer les étapes, il faut en souli­ mo ntr é que ses solutions sont des hypothèses appelant
: 1I<:r la dimension épistémologique, d'une remarquable une réfutation.
"T"",té. Dans l'euphorie scientiste des années soixante, Tout en assumant cette opposition, Melvin Webber
d (0 , ai, III ériroire d'a ffi rrne r, comme Web ber n'a ja mais n' en fait pas moins appel, lui aussi, à des hypothèses sur
('('ssé de le faire, que le « city-P/aJtning » n'est pas et ne lesq ue lles il fonde sa conception de la planification
/ WII / pas être une science. En effet, il distingue d'emblée urbaine et de l'urbaniste (urban pIonner). Ces hypothèses
' ""b " rhaines et planification urhaine. Les premières sc confondent avec la prospective qu'il construit à partir
" /" v<: nt des mêllles méthodes et appellent les mêmes
de son observation du domaine urbain et, comme on
p/(\(';I/I /ions qUe l'ensemble des sciences dites humaines.
l'imagine, du procès de délocalisation en cours. Mais les
";,, ' " va"dl<:, l'idée d'un aménagement scientifique" est
violentes émeutes urbaines survenues aux États-Unis
1111 III1 r:l ge..:... Ses objets excluent l'expertise technique 30. »
durant les années soixante devaient changer le regard
S''''.s dollt<:, le langage des réseaux sYstémiques com­
porté par Webber sur le futur de la société américaine si
l''''''" '""" aide-t-il à les penser, mais chaque prohlème bien qu'on doit distinguer deux phases dans sa réflexion
' p" /s s" " ,èvcn t n'est que le symptôme d'Un problème et ses écrits.
,,,, ,, l "0fi '" d, en foui dans Un so Us-système supérie ur .lJ.• La première, à laquelle appartient l'Urbain sans lieu ni
\"",.,0"" t dit, « les types de prohlèmes '1 ue rraite le pla­
(/J/(""te/~
bornes, est caractérisée par une approche optimiste,
""'( ':II<: llf - les problèmes sociétaux _ SOnt, globale et universaliste de la société en devenir. L'urba­
1'.11 (' :iSc llee , différents de ceux que traitent le savant et niste est conçu comme un éducateur. Sa double tâche
.11 1.'/ ,f oll 1c al/ssi certaines catégories d'ingénieurs... Les consiste à favoriser, à tous les niveaux, la prise de
l "0''''''''''.' soda ux ne son t jamais résol us .12.,. « Aussi les conscience des transformations urbaines en cours et à
promouvoir leur généralisation: ainsi tous les groupes
12
13

~ : II I.'"
", ' i ll /\ • . p riv ilège , pourront accéder à la société
'" / '. " , 1<' '/,'1, 1<''1 1is ée des résea ux de eommuniea tion. dom p illl if de 1968, dans un contexte urbain où
1. , , l,,,·,, ct les groupes éeonomiquemenr favorisés Il 11 11 1 lice économ iq ue est menacée et où les conflits
/II/l'II pr<":llli<..: rs citoyens et bénéficiaires. La nou­
1 1/ 1 0' 1 I II X sc multiplie nt, l'attention de Webber se déplace
" Il, l""hlé" ,ari '1 ue de l'urbaniste n'est pl us direc. " 1" p auvre t é et le pluralisme de la société américaine.
" ", . u 1i,'c ,1 l' espace. Nous gagnerions aujourd 'bui à Il 11 1.1111 <": la deuxième phase de sa carrière par une auto­
0

/l'' ,, ~ ' olppd<:,. J'avertissemen t de


Webber: « Nous avons 1I111 J1IC rad icale de ses théories universalistes et opère un

" '" 1" ., d, cn,he r des solurions locales à des problèmes 1/ 1IlIIl"ll em e nt copernicien. Le développement des
./"'" /,., '·""sc., ne Sont pas d'origine locale et ne Som pas Il 'I l . I II X tech niq ues n'est plus conçu comme l'instrument

" •• , pl dl/ cs d'l In traitement municipal... Pas plus la cri­ .III r unsc nsus et de l'intégration, mais comme le moyen,

""".rI" , dc /" n<c '1 ue la pa uvreté. le Chômage. les pll l i r les minorités, d'affirmer et d'affiner leurs diffé­

' "",II,, dis""eiées. les émeutes raciales. la drogue. les '1II C CS. « La conception unitaire du bien public est un
" , ri "1,, , ""·"'a/es. la délinquance juvénile.... aucune de 11I .lchron isme 37 » ; « le consensus apparent, au nom
.." .,il, ,,l''gies sociales" caractéristiques de la ville .luq uc ] on pouvait autrefois envisager de traiter les pro­
' " '". "lpo";lill<..: ne peut y trouver ses causes ou ses hl cmcs de distribution, est érodé par la prise de
" " " d, ' . 0" ne pCUt inventer des traitements locaux à ru nscie uce croissante du pluralisme de la nation et de la
/, • , '." , d" n, les origines ne Sont pas d 'ordre local .15 » Il i lfé rc nciation des valeurs qui accompagne celle des
1 . " '" ,," ,h/ème. pOUr Webber. concerne l'intégration publ ics 3H », Sans complaisance, Webber dénonce l'erreur
,l, · ", "" 1"'.' min oritaircs et défavorisés au sein de de s prévisions annonçant « une culture partagée de façon
Il ' .\ IOllj ollrs plus complexes mais relevant néan­ homogè ne , au sein de laquelle la plupart des individus
", "'" . ,/,,,,, sy.SI-ème unique... La procbaine étape de la
partage raie nt les mêmes valeurs et croyances, se fixeraient
,,/ "" 1" .u i" " ,/e /' urbanisation devra être guidée par
de s objectifs communs, présenteraient des styles de vie
/ "l" d,' dé"d oppemem sélectif, par la formUlation de
se m blab les et se comporteraient de façon similaire 39 » ,
"'''J'' /III /1 cs l:t<..: tiq lies en accord aVec les stratégies des ti­

1 Au contraire, « les sociétés de grande échelle du monde


" , 1 1 1I1I «I-:"<..:r les groupes retardataires dans la société

il occidental deviennent toujours plus hétérogènes à mesure


o q u ' e lles se différencient, comprenant des milliers de
'" 1. "'" ""'" cm l' raine .16 » Il voit alors poindre aux

l , " '. I l,,;s nue société urbaine de grande écbell (high


groupes minoritaires dont chacun se fédère autour d'inté­
e

l ""i ' '' ;'-c. homogénéisée par le parrage de valeurs rê ts, de systèmes de valeurs et de préférences stylistiques
' " ' O/lIII ' Il'''' (s<..: rvices c t savoirs), qui intégrera ses diversi­ communs par lesquels il se distingue des autres
'"1 J'''''''''''''' .'e s différences locales cr manifestera ses groupes 40 »,
/, " ' '' , """ vc llcs dans la diSSémination. à travers Le lecteur peut se demander si la mondialisation des
l , " "" ",,,1,/,· réseaux techniques de communication sera bien un ins­
0/"", Ollii . ,/" 'ctriroire. d'établissements de petites
trument de différenciation et si elle ne risque pas plutôt
d'engendrer une société mondiale à deux vitesses. En

14
15

' XII':lPO/a1l1 les analyses menées par Henri Coing 41 dans


1<" "" n'e xte lIIoins avancé du Paris d'il y a treme ans, on 1 1 cs r conçue comme « un sous-ensemble de politiques

\'il ('lille/Ilit :1 une perspective moins optimiste que celle .10111 la fonction essentielle est d'améliorer les processus

de 1:1 n éalivité conçue par Webber. Pour celui-ci, « à uus-jac e n ts aux débats et aux décisions publiques 46 » ,
1I1l".'i/lr(; l/1I(; le volume même de l'information et du savoir 1'111.'1 préciséme nt, elle se caractérise par « son analyse et
t1 1 1~',1 11 (; 1I 1 (; ct que les progrès techniques multiplient 1 111 évaluation continues des mesures alternatives, des fina­

l'<-ven'ail de nos options, à mesure que se développe la III (:.'1 alte rnatives, des résultats alternatifs, des redistribu­
l'ollsei(;II C(; de nos libertés de choix, de différenciation et 111111.'1 ct, bien sûr, des réactions alternatives précédant
dl' lls dé vialioll par rappOrt aux normes, de nouvelles varia­ 1',II,tion. Dans un tel contexte, la planification est fonda­
I io e/(;viellncnt possibles... Les groupes SOnt conduits à uu-nra le m e n t un style cognitif et non un champ substantif,
' ' ' l' ' oil" (;r des choix, à en inventer de nouveaux, l'irrégula_ 1101\ un ensemble de savoirs techniques et, en aucun cas, un
III (\ cl l; S P(;fJl1lHations culturelles devient la règle 42, » nsc mble de buts substantivés isuôstansioe) concernant le
(JI/oi Ijll'il en soit, cette réinterprétation de l'évolUtion lo ~:em e nt , le développement économique, le bien-être...
" '~ I'I .'i(l('ié tés occidentales consacre un changement ( ;'es t une façon particulière de penser la pluralité des
d '(I1" 'IjIl(; pour l'urbaniste: « Nous avions appris à con si­ bes oins individuels et collectifs et en même temps une
d l~"e l les processus sociaux comme les liens qui inté­ .rpproche spécifique concernant les moyens de satisfaire ces
' /.lit' /Il (ks systèmes OUverts à l'intérieur de vastes beso ins différents et compétitifs 47, »
1 (~se a 1/x de systèmes interconnectés, de telle SOrte que C e changement de paradigme urbanistique n'entraîne
1' f/ II /P II ! des uns devenait l'input des autres... Nous ce pe ndant pas une prospective très différente de l'aména­
' '' l1 ll1 les maintenant au contraire sensibilisés aux ondes .cment spatial et des établissements humains. L'érosion
~1\ lIé l'ée s et répercutées par chaque action tendant à du localisme demeure l'horizon des dernières publications
"(~s ll ll dre un problème particulier concernant un nœud
1':1/' iClIlil,;r du réseau 43. »
de Web be r. Sans doute insiste-t-il seulement davantage
III" la très grande diversité des nouvelles formes disper­
1);1/1.'1 lin univers urbain ainsi relativisé, où le cas de
.. éc s (patterns) d'urbanisation 48 et d'agglomérations appe­
dlil l/lIl,; communauté redevient unique, un nouveau rôle
lées à se développer dans le cadre des communautés de
éd ' " ir an planificateur. Transposant le concept d'advocacy
grand e échelle, Et sans doute admet-il que certains
NmmiJiK oN à l'échelle de la société (urbaine) tour emière,
gro upes exprimeront leur différence en demeurant atta­
I\'fclvill olldrc, Wcbber en fait un médiateur dont la tâche consiste
.h és à des localités. Mais, de toute façon, les nouveaux
:) 1'6 le moins mal possible, les conflits des intérêts étab lisse me nts auront des dimensions réduites, dont la
(écnnnllliq ucs, professionnels, culturels...), souvem an<ago­ de nsité des réseaux techniques permet d'affirmer qu'elles
lIisl l,;S, qui définissent les différentes communautés ou n'i nd uiront pas « une perte de la richesse culturelle 49 »,
grollpes sociaux. Dès 1969 45, il propose aux urbanistes le Enfin, le processus de différenciation se traduira par une
IlOlIVcau paradigme de « planification permissive ». Cell att en tion croissante portée aux perfectionnements de la
e­ de me ure individuelle, promise à une quasi-autonomie 50,

16
17
Au-delà de ces indications générales, Webber ne
s'étend guère sur les formes spatiales à venir de l'urbain. III ' Il' 1\ voir apparaître dans la presse certains thèmes aux­
Son activité concrète de praticien a été consacrée à la pla­ l'l ' 1'1 les textes de Webber confèrent leur légitime
nification des transpOrts qui constitue l'une des deux IlI lpl(,lIf. j 'en retiendrai deux exemples récents: la créa­
dimensions fondamentales de la nouvelle urbanité. II ttll (" II déc embre 1995 d'un magazine consacré au télé­

A cause de sa souplesse et de la liberté individuelle Il rv.iil et un article du journal le Monde 54, interprétant
qu'elle permet, il accorde une adhésion sans réserve au l " 1111Il e révélateurs d'une mutation sociétale un ensemble

développement de l'automobile. Néanmoins, dans le .l, l'nils obse rvés à l'issue des grèves de novembre­
cadre de la planification permissive, il s'est efforcé d'éla­01 . ( c ruhrc 1995.
borer des stratégies très innovantes qui, en approchant Mais s' il nous permet de mieux appréhender notre
paradoxalement l'automobile sous la catégorie du trans­ p'llpre évolut ion, le travail de Webber peut, d'autre part,
POrt en commun, permettrait une distribution égalitaire Ill" III comme une mise en garde. Il propose de l'avenir une
de ses services aux groupes sociaux défavorisés 51. t1llorie ct une vision qui pourraient devenir nôtres demain
1 don t les problèmes et les dangers nous apparaissent

""
uuourd'hui d'autant plus clairement que nous n'y sommes
"" ""
1'.I:l encore immergés, bref, il ouvre un questionnement.
On a remarqué que si, dans sa pratique concrète,
En 1951, lors de la Dellxième Semaine sociologiqlle, sous­ Wchb c r s'est attaché à la planification des transports,
titrée « Civilisation urbaine et civilisation rurale en
I'am énage rn e n t de l'espace à l'échelle de proximité ne
France », Fernand Braudel conseillait aux sociologues et
l'mille, en revanche, guère l'intéresser. Il ne nous donne
aux historiens de regarder les villes d'Amérique pour
.ucu ne indication précise quant à la configuration des
mieux comprendre les nôtres. L'œuvre de Melvin Webber
pet its établissements urbains à venir. Sans doute irnprévi­
tend effectivement au lecteur français un miroir grossis­
ihlc, est-elle, pour autant, négligeable? Il importerait de
sant qui révèle des processus rendus mal visibles par la
'interroger sur le statut de la contiguïté spatiale. Peut-on
présence massive d'établissements urbains séculaires et
pens er l'urbanité de façon immatérielle, hors de toute
plus encore occultés par nos habitudes mentales et nos
localité 55 ? Davantage, la vie sociale peut-elle s'affranchir
traditions: le décalage entre les deux Continents tient
de toute organisation spatiale régulée? Autrement dit, le
moins aux faits qu'au regard porté sur eux 52.
moment ne serait-il pas venu de réfléchir à nouveau à la
Pour le lecteur français d'aujourd'hui, les analyses et défi nition que donnait Max Weber de la ville occidentale
les idées de Webber présentent un double intérêt. D'Une tradi tionnelle, au sens qu'il accordait à sa détermination
parr, elles nous aident à ouvrir les yeux sur la mutation de spatiale, mais aussi à sa dimension juridique? N'est-il pas
l'urbain dont la prise de conscience demeure aujourd'hui en effet singulièrement réducteur de définir l'urbain en
l'apanage de milieux spécialisés 53. On commence seule­ te rmes d'interactivité 56 et de conflits ou de rapports
d'int érêts ? Sans doute est-ce là une constante de la pen­
18
19
sée libérale américaine, à l'œuvre dans les travaux « écolo­
gistes » de l'École de Chicago et de McKenzie, Comme Remarques sur la terminologie
dans leur réactualisation sophistiquée chez Rawls.
Semblable définition, dont la scène française est à l'évi­
dence menacée, ne laisse-t-elle pas échapper la transcen_
dance fondatrice des institutions? ( :1"llains termes du texte américain présentent une difficulté per­
1I1 ,111l· 1I1\.: de traduction, soit parce qu'ils n'ont pas de strict équivalent
Faisant retour à la première question, on se demandera Il Ir ,111I,:ais, soit à cause de leur polysémie, soit parce que Melvin

alors si l'institutionnalisation (de la société), dont l'indivi­ \VI Ith\.:r ne les utilise pas toujours avec la rigueur nécessaire, soit
111111 pour ces trois raisons à la fois. Il en est ainsi, en particulier, des
dualisme et la permissivité des sociétés techniciennes
111111' suivants qui reviennent à de nombreuses reprises dans le texte,
actuelles montrent bien la fragilité, n'est pas inséparable 1111 1'1111 constatera (dans certains cas, on a indiqué entre parenthèses le
d'un fondement spatial. Quelle en serait la nature dès lors I l 1I 11 \.: américain correspondant à la traduction) qu'ils ont été traduits
qu'il ne peut plus s'agir d'enracinement? Telle est l'inter­ .l, la ço n différente selon les contextes :
rogation que les analyses de Melvin Webber devraient Srttteme nt, qui a le sens général d'établissement humain, est souvent
1IIIIisé comme synonyme d'agglomération, terme qui n'est pratique­
nous conduire à placer au cœur de toute réflexion sur
1111' 11 1jamais utilisé par Webber. Celui-ci emploie en revanche parfois
l'aménagement du territoire autant qUe Sur le destin IJt,j/,1r.l!,al e, plutôt d'a illeurs pour désigner la concentration des centres­
anthropologique de notre civilisation. vil les.
Place, qui, dans le contexte de la géographie humaine est syno­
Françoise Choay d 'endroit, de lieu, est, lui aussi, utilisé par Webber pour dési­
II VII I\.:
:lIer l'agglomération urbaine. Dans tous les cas de son emploi, il est
lié il la localité . On a cherché à en donner chaque fois la traduction la
moins vague - et à éviter, dans la mesure du possible, des expres­
sions comme « lieu urbain» qui passent difficilement en français et
risqu ent d'entraîner des contresens.
Pattern est un mot polysémique d'autant plus délicat à traduire
'Ill 'il désigne des régularités aussi bien physiques et spatiales
'III 'immatérielles et mentales. Il est, selon les contextes, traduit par
structure, forme, modèle, configuration, mode et schéma. Il arrive
que, dan s la même page, Webber l'utilise selon trois de ces accep­
tions différentes.
Commtl1lity est l'équivalent français de communauté, qui a lui­
même évolué dan s ses usages français puisqu'il en arrive aujourd'hui
à désigner des réalités antithétiques: communautés religieuses, carac­
té risées par l'intens ité de leur lien social ; communautés urbaines,
don t l'unité est d 'ordre géographique et administratif. Dans les
études urbaines anglo-saxonnes, community joue en quelque sorte, par
rapport à la dimension spatiale, le même rôle que la cioitas des Latins
par rapport à l'urbs. Son sens est alors très proche de celui de com­
mune dans son acception originelle. Dans l'usage courant, il désigne

21

souvent des agglomérations suburbaines ou des quartiers de grandes


villes, caractérisés par une identité et une cohésion sociale fortes. Son
se ris est aussi parfois très proche de celui de collectivité locale. On a
cependant choisi de le traduire, le plus souvent, par communauté,
pour rester fidèle à la notion de Gemeinsdiaft. dont Max Weber avait
fait une des caractéristiques de la ville traditionnelle, et que son tra­
ducteur français, Henri Mendras, avait traduite par communauté. Il
n'en est pas moins vrai que la communauté d'intérêts contemporaine NOTES

décrite par Webber n'est pas non plus assimilable à la Gemeinsclraft et


que notre parti n'est pas pleinement satisfaisant.
Par ailleurs , les termes planning et ptanner ont posé un autre type de
problème qui concerne l'approche professionnelle de la ville et ses dif­ Titre grammaticalement incorrect dans sa volonté de subvertir

férences (traduites dans la terminologie) en France et aux États-Unis. les idées reçues, il est intraduisible en français de façon littérale.

Le terme urùanism n'avait pas cours aux États-Unis à l'époque où the Ali mieux dirait-on « le lieu urbain et le domaine urbain sans

Urban Place and the Nonplace Urban Realm a été écrit. D'une façon géné­ lie u » , La formule « l'urbain sans lieu ni bornes » nous a semblé

rale, alors que nous considérons l'urbanisme ou l'aménagement comme


l'Onscrve r la force de l'idée de Webber.
une discipline unitaire dotée de deux dimensions, théorique et pra­ • O rder and Diversity : Community Without Propinquity », in
tique, les Américains distinguent d'une part les urban studies (études et 1.. Wing (ed.), Cities and Space, Johns Hopkins Press, Baltimore,
théories fond ées sur diverses disciplines) et d'autre part l'organisation o

et la planification concrète des processus urbains (urban planning) à 1%3.

• T he Post-City Age », Dœdalus, Journal of the American Academy


diverses échelles (regional, mampolitan, city-planning). Quant à l'urban 11/ Science, numéro spécial, « The Conscience of the City »,
design. il est du ressort de l'architecte, et Webber n 'en parle pas. Ces auto mne 1968. Nous traduisons « l'ère d'après les villes », plutôt
distinctions ne sont pas spécifiées dans la pratique française. On a gardé q uc « l'ère post-urbaine », parce que, Webber le montre bien,
la terminologie française (urbaniste-urbanisme) chaque fois que le sens ville n'est pas synonyme d'urbain. On peut même désigner les
le permettait ct, dans les autres cas, utilisé les termes, peu en usage en processuS d'urbanisation qui oblitèrent aujourd'hui la ville tradi­
France, de planification et planificateur. tionne lle comme la traduction au sol de la civilisation de l'urbain.
Il faut enfin signaler la propension de Melvin Webber à créer des Dès 1968, dans le volume 11 des Cahiers de l'lA URP, sur les
néologismes dont ni la nécessité ni le sens ne sont toujours évidents « Modèles de localisation ». Cf. ensuite en particulier Méthodes
tprocessuat, ldeational, nucleation...) que le lecteur nous pardonnera quantitatives etespace urbain, Masson, Paris, 1973.
d'avoir repris littéralement quand leur signification ne s'imposait pas. Walter Isard, Methods 0/ Regional Analysis : an IntroducfÏoTI to
F.C. Regional Science, MIT Press, Cambridge, Mas s., 1960; traduction
française : Dunod, Paris, 1972.
Richard L . Meier, A Communication Theory 0/Urban Growth, MIT
Il Press, Cambridge, Mass. , 1962; traduction française : Croissance
urbaine et théorie des communications, PUF, Paris, 1972, préfacé par
P. Merlin. J.W. Forrester, Urban dynamics, Organization
Development Council, Cambridge, Mass. , 1969. Une traduction
partielle d'articles de Forresrer a été publiée par M . Stern dans
les Cahiers de l'lA URP, vol. 23, mai 1971.

23

7 Voir notamment les travaux de E. Goffman, H. Gans, M. Fried,


H.S. PerJoff et, plus récemment, ceux de R. Senerr, " « T he Post-City Age ", op. cit., p. 1096. Cf. « Urbanization and
8 The Deoth and Life of Great Americon Cities, Knopf, New York ,
1961. (:om mu nications » (op. cit.) : « Les villes se développent seule­
III <: nr parce que la proximité signifie des coûts de transport et de
9 The Imageofthe City, MIT Press, Cambridge, Mass., 1963. Sa tra­ rnm rnun icatic ns plus faibles pour les spécialistes indépendants
duction, l'Image de la vil/e, Dunod, Paris, 1973, a fait date en qu i so nt contraints d 'interagir fréquemment ou intensément»
France et entraîné celle d'Une partie des autres ouvrages de (p. 297).
l'auteur.
u Urbanization and Communications ", ibidem, p. 301.
10 «The Post-City Age », op. cit., p. 1092-1093. ,H Ibidem, p. 302.
lIOn oublie trop souvent que TheClliture ofCities (1938) et The City "/ « The [oys of Automobility », op. cit., p. 276.
in History (1961) ne SOnt que la suite et le développement de II ., A Different Paradigm for Planning », in R.w. Burchell (ed.),
Technics and Civilizotion (1931).
Planning Tùeory in the 1980's, a Search for Future Directions, the
12 Josiah Strong, TWet1tielh Centllry Cities, Baker and Taylor, New C e nt e r for Urban Policy Research, Rutgers, 1978, p. 152-153.
York, 1898.
Il Ibidem, p. 155.
13 «Prefatory Remarks ; the Theory of the City », in Max Weber, IL « D ile m mas in a General Theory of Planning» (avec H.W.j.
The City, Tronsloted and Edited by Don Mortindole and Gertmd Rin el), Policy Science, 4, Elzevier, Amsterdam, 1973, p. 160.
Net,witth, the Free Press of Glencoe, New York, 1958; cité dans Il Ibidem, p. 167.
l'édition Collier Books, 1%2. L a traduction française du petit 14 Ibidem, p. 166.
livre de Max Weber par Henri Mendras a été publiée (avec une 1 « The Po st-City Age », op. cit., p. 1093.
préface de Julien Freund) seulement en 1982 (Aubier, Paris), Il , Ibidem, p. 1108.
soit quarante-deux ans après sa parution en allemand. « Dilemmas... ", op. cit. , p. 168. Cf. , dans le même sens : « L'idée
14 «Urbanization and Communications », in G. Gerbner, P. Gross , d 'un plan unitaire prétendant s'adresser à l'ensemble de la col­
W.R. Melody (eds), CommtmicotiollS Technology and Social Po/icy : lectivité repose sur une fiction. » (<< A Different Paradigm ", op.
Underst01lding theNew CulturalRevolution, 1973, p. 294. cit., p. 157.)
15 «RevolUtion in Urban Development », in L. Taylor (ed.), IH Ibidem, p. 156.
Housing: Symbol, Stotus, Sile..., Rizzoli, New York, 1982. .W Ibidem, p. 167.
16 Ln Planète 011 vil/age, éditions de l'Aube, 1992. Cf. Melvin 10 Ibidem.
Webber, « The Post-City Age », op. cit., p. 1077. 11 Henri Coing, Urbanisation et Chatlgement social, Éditions
17 « T he Post-City Age », ibidem, p. 1064.

18 Ibidem, p. 1092-1093.
ouvrières, Paris, 1967.
42 « Dilemmas... » , op. at.
19 « Urban ization and Communications », op. cit., p. 294. 43 Ibidem, p. 159.
20 Ibidem, p. 293.

21 Ibidem.
44 Cf., notamment, Robert Goodman, After the Planners, MIT Press,
Cambridge, Mass., 1971.
22 « The Post-City Age », op. cit., p. 1077.
45 Dans « Planning in an Environment of Change ", the Town-
23 Ibidem, p. 1092. Cette « large scole » est Souvent aussi qualifiée de
PlanningReoie», n" 39 140, Liverpool, janvier 1969.
« higlt scole », qui traduit sa supériorité qualitative au regard des
46 « A Different Paradigm ", op. cit., p. 156.
sociétés traditionnelles.
24 Ibidem, p. 1096. 47 Ibidem, p. 158.
48 HOUSÙIg .. Symbol, Status, Site..., op. cit., p. 65.
25 «The Joys of Automobility -. in M. Wachs, M. Crawford (eds), 49 Ibidem.
TheCar andtheCity, University of Michigan Press, 1991. 50 Ibidem.
51 Outre « The joys of Automobility " , op. cit., voir « T he Marriage

24
25
of Autos and Transit ", Access, Research at the University of
Oalifomia Transportation Center, n? 51, automne 1994. Ce titre
peut être traduit: « L'automobile comme transport en com­
mun ", transit désignant en l'occurrence les transports en com­
mun, en particulier métropolitains et régionaux. En [ait, l'idée selon laquelle nous
52 On le constate lorsqu'au cours de la Semaine sociologique évoquée nous trouvons constamment en un lieu
plus haut, la perspicacité de Georges Friedmann lui permet détenniné est attribuable à l'heureuse
- pour longtemps le premier en France - de dénoncer la disso­ immobilité de la plupart des grands
lution de la ville traditionnelle et le conduit à souhaiter le ban­ objets que l'on trouve à la suiface de
nissement du mot ville et son remplacement par l'expression la terre. L 'idée de « lieu » est une
« zone urbanisée" pour désigner les nouveaux espaces privés de grossière approximation pratique : il
limites, « dont le dénominateur commun [est] le genre de vie n'y a CIl elle rien de logiquement néces­
urbain : celui d'hommes conditionnés par le milieu technique ", saire et elle ne peut être conçue de
Villes et Campagnes..., actes de la Deuxième Semaine de sociologie,
A. Colin, Paris, 1953, p. 408. manière précise.
Bertrand Russell
53 Cf. les travaux du GOR 903 « Réseaux" et , en particulier, ceux
de G. Dupuy et D. Pumain, et les recherches du LATTS.
54 A. Lebaube, « Après la grève ",17 janvier 1996.
55 Le problème est abordé de façon différente mais dans le même
esprit par Pierre Veltz, dans son article « Économie et territoire:
les relations non-marchandes au cœur du développement ",
Annates des Ponts et Chaussées, n? 77, 1996, et dans son ouvrage :
Mondialisation, Villes et Territoires: l'économie d'archipel, PUF,
Paris, 1996.
56 Même s'il s'agit d'échanges de savoirs, tels que Webber a l'occa­
sion de les décrire .
1
CONCEPTIONS DU LIEU URBAIN

Le récent déluge de travaux sur les prétendues ten­


d III Ç C S et implications de la croissance métropolitaine n'a
II I re laissé de place à un débat sur la nature même du

ph (~ll omè n e en question. Le fait n'est pas surprenant car


1h.ique groupe d'observateurs étudie les communautés
" Il' Iropolitaines selon l'optique de sa discipline ou de sa
l'lo!"cssion, et chacun voit les choses à sa façon, Les obser­
\ 11 ions des uns peuvent sembler aux autres fastidieuses,
u oublan tes ou fascinantes; mais, de toute façon, elles
1 run t difficilement intégrables dans leurs systèmes
1lIllçcptuels.
Si l' expé rience de l'enquête interdisciplinaire prati­
' 1 1l(~C dans d'autres champs demeure ici pertinente, nous
oru rn es assurés néanmoins qu'il nous faut une idée direc­
1I Il ' C simple, ainsi qu'un langage commun qui, au départ,

III rme tte de traiter de manière synoptique les quelques


.lunc nsions majeures du phénomène observé. Cette
neccssi t é s'impose particulièrement dans le cas de la pla­
rulicatio n métropolitaine naissante qui, à l'exemple de la
planification urbaine, tend à se focaliser sur la petite
.rhc lle de certains aspects purement physiques, statiques

29

et locaux de l'urbanisation. Mais, à terme, on peur


s'attendre à voir émerger un cadre de référence macrosco­ Il I II ' IIS sc passent dans les localités en expansion mais elles
pique, qui concerne uniquement les grandes échelles du .. udcnt toujours davantage à transcender les lieux où
développement urbain plutôt que ses petites compo­ 1\ (' III les gens. Ceux qui participent à cette communica­

santes. Et l'on peut même espérer que l'urbanisme, en 111111 dis persée dans l'espace sont, dans une certaine

tant qu'activité politique, orientée vers le bien-être social, 1111 sure, les membres de communautés urbaines non

puisse identifier et traiter les processus critiques de la I II «Iules, dont les formes spatiales sont largement plus dis­

communauté urbaine spatiale qui affectent directemem 1" rs écs que nous sommes prêts à le reconnaître.
les qualités fondamentales de la vie urbaine. l'our s'en rendre compte, il nous faudra des lunettes
Cet essai voudrait apporter sa contribution à une 01 '1111 genre particulier, dont nous ferons usage dans la troi-

conception des communautés urbaines qui servirait à éla­ Il 'IlIe partie. Mais, auparavant, essayons de voir d'abord la
borer des politiques métropolitaines. Il concerne les pro­ ville sous son aspect traditionnel, puis, dans la deuxième
cessus métropolitains dont il cherche à identifier la forme poli" 1ic, de clarifier notre terminologie et de systématiser
iform) spatiale adéquate (substantive) : il dresse donc un uutrc appréhension de la ville traditionnelle.
portrait dynamique de la forme métropolitaine en action
(gérondif) 1.
'S concepts de ville et de région comme lieux
En me focalisant sur les interdépendances fonction­
nelles - liaisons interactives -, je me propose de traiter Dans les études urbaines (urban sciences) comme en
les collectivités urbaines comme des processus fonctionnels. urbanisme (urban planning), la conception dominante de
En recherchant les configurations spatiales des canaux de l'aire métropolitaine et de la ville les considère chacune
f «mme un lieu doté d'unité. Les chercheurs qui ont étu­
communications et de transports, celles des bâtiments et
des activités, j'entends traiter leurs corrélats processueJs
dié la distribution spatiale des établissements urbains
(processuaf) comme un phénomène de forme strocturelle, un
(urban settlements) à structure nodale ont donné la défini­
arrangement statique. En traitant simultanément le pro­
r ion la plus claire de l'idée de lieu (cette conception est

cessus et la forme, je voudrais aboutir à une conception


d'ailleurs probablement aussi ancienne que l'urbanisation
plus claire de l'ensemble des communautés urbaines en d ie-mê me 3) : un tel établissement, quelle que soit sa
tant que processus strocturés dons l'espace 2. dime nsion, est conçu comme un segment de terrain urba­
Au cœur des processus structurels urbains se trouvent nisé sur lequel des bâtiments et d'autres équipements
les rappOrts sociaux -la conduite des affaires, les échanges physiques sont implantés à proximité les uns des autres et
d'informations, le tissu complexe des interactions _ qui (Ji) la population poursuit des activités plus fortement

permettent aux citadins d'entrer en COntact et de satisfaire liée s et dépendantes les unes des autres qu'elles ne le
les interdépendances qui conditionnent leurs moyens sont d'autres activités implantées dans d'autres agglomé­
d'existence et leur bien-être. Une grande part de ces inter­ rati ons. Chaque établissement est entouré par un terri­
toi re non urbanisé où prédominent champs cultivés,

30
31

de la côte atlantique, autrefois séparés les uns des autres,


pâturages, forêts ou étendues d'eau. Ainsi l'établissement
c mblent sur le point de fusionner, un vif intérêt se mani­
urbain (urban settlementï - village, ville, aire métropoli­
feste en faveur d'une nouvelle catégorie taxonomique. Le
taine - est une entité physiquement distincte, visuelle­
d ébat ne semble pas porter sur l'émergence d'un phéno­
ment identifiable. On observe aussi bien sûr d'autres
mene nouveau, mais bien sur sa désignation.
caractéristiques, non visuelles et non physiques, car un
L a plupart des affirmations courantes, concernant la
établissement urbain est aussi le lieu du commerce, de la
:lt ruc t ure (pattern) physique du fusionnement des sols
production et des échanges humains de toute sorte; les
urbanisés, dérivent de l'idée qu'une aire métropolitaine
habitants y ont des styles de vie différents de ceux des
est un objet physique. Les cartes des zones récemment
habitants de lieux « non-urbains »,
urb anisées permettent de se rendre compte qu'il se passe
Une agglomération est appelée village, ville ou métro­
quelq ue chose de nouveau, en grande partie parce que les
pole selon l'importance de sa population. Cette popula­
anci e nnes cartes montraient des zones discontinues d'éta­
tion est mesurée conformément à certaines conventions
hlis se m e nts physiques à structure nodale, alors que les

concernant les limites physiques qui la séparent de popu­


lIouvelles montrent de vastes agglomérations physiques et

lations implantées dans d'autres agglomérations (disso­ la naissance de bandes urbanisées s'étirant sur plusieurs

ciées par des terrains non urbanisés) et d'autres critères


centaines de miles. Il s'agit bien là d'une nouvelle échelle

liés au droit foncier ainsi qu'à l'intensité des interactions.


mo rphologiq ue qui pourrait effectivement conduire à des

Il est généralement reconnu que les périmètres adminis­


ap proches urbanistiques différentes de celles exigées par

tratifs ne constituent pas des bases pertinentes pour défi­ les formes (jorms) nodales. Cependant, l'émergence de

nir les aires urbaines, puisqu'ils ne fournissent pas


g;ra n d es formes urbaines physiquement contiguës ne

d'indicateurs importants quant à la configuration physique


re fl ète pas nécessairement les changements opérés, tant

de l'agglomération ou aux activités qui s'y déroulent. Mais


dans l'organisation fonctionnelle des villes qui fusionnent

il est, de toute évidence, moins reconnu que les limites


physiq ue me nt que dans les processus à l'œuvre en leur

physiques ne constituent pas nécessairement un critère


se in . Il se pourrait bien que la nouvelle échelle de ces

d'urbanité.
form es physiques reflète des types (patterns) de liaison
Au cours de l'histoire naturelle 4 du développement
sp atiale aussi anciens que ceux de l'Amérique coloniale.
urbain, villages, villes et métropoles se sont agrandis physi­
D ans cette conce ption étroite de la surface visible du sys­
quement au point de fusionner les uns avec les autres 5.
tè m e m étropolitain, on a peut-être omis de reconnaître
C'est pourquoi nous avons étendu notre taxonomie en y
que les relations sociales se sont développées bien au-delà \\'\
intégrant la catégorie « aire métropolitaine ", qui équivaut à
un type d'agglomération (settlement) de même nature, bien de s nœuds urbains.

Une approche importante de la notion d- I~ • .

que plus vaste. Limites physiques et périmètres administra­ qui considère l'unité urbaine comme un 'lové...... wl"'J
tifs sont considérés comme partie intégrante de la définition
de ces entités. Et tandis qu'aujourd'hui les établissements
régional, assigne à chaque lieu le rerriroire i _. . _v~ .,...

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