Sunteți pe pagina 1din 165

1

UNIVERSITE CATHOLIQUE DE BUKAVU


U.C.B.
BP 162. BUKAVU/ SUD-KIVU
R.D.C.

FACULTE DE DROIT

DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE DE LA R.D.C.


SUR SES RICHESSES ET SES RESSOURCES
NATURELLES: ExamEn dE l’article 09 de la
constitution du 18/02/2006

Par :

Guillain Alphonse Cirhuza KOKO

Mémoire de fin du 2nd Cycle, présenté en vue de l’obtention


du Diplôme de Licence en Droit.
Option : Droit public
Directeur : Séverin MUGANGU MATABARO
Professeur Ordinaire
Rapporteur : Arnold NYALUMA
Chef des travaux.

Année académique: 2005-2006


2

I
EPIGRAPHE.

‘‘Sentez et voyez combien l`Eternel est bon ! Heureux l`homme qui


cherche en lui son refuge.
Craignez le Seigneur, vous ses Saints, car rien ne manque à ceux
qui le craignent. Les lionceaux éprouvent la disette et la faim, mais rien ne
manque à ceux qui cherchent l`Eternel, à lui gloire et louange !’’(Psaume34 :8-
10)

Guillain Alphonse CIRHUZA KOKO.


3

II

A l`Eternel, Dieu pour sa fidélité ;


Au cœur immaculé de Marie ;
A mes vénérables parents : mon père Alphonse MASUMBUKO
et ma mère Joséphine SARABUYE ;

A tous mes enseignants ;


A mon grand frère, G.Birindwa LUNJA, à mes grandes et petites sœurs ;
A mes nièces, neveux, cousins et cousines ;
A tous mes amis, connaissances ;
A tous les nôtres, présents et à venir ;

Je dédie ce travail
4

. III.

REMERCIEMENTS.

Ce travail, avouons-le, n`est pas seulement le fruit de notre effort personnel. Il a, à


certains égards, bénéficié du concours d`autres personnes. Nous tenons sincèrement à leur
exprimer ici notre profonde gratitude.

Il s`agit en premier lieu du Tout Puissant et Bon Dieu, à la fois pour son amour, ses
nombreuses bénédictions et sa protection.

Nous citons également, et ce à juste titre, le Professeur Séverin MUGANGU,


directeur du présent mémoire, qui malgré ses multiples occupations a daigné accepter de diriger
ce travail. Ses pertinentes remarques et suggestions nous ont été très utiles.

Ensuite,nous demeurons très reconnaissants à l`égard de nos vénérables parents :


mon Père Alphonse MASUMBUKO MASTAKI et à ma Mère Joséphine SARABUYE, pour tant
d`amour, de sacrifices et dévouements consentis par eux, pour faire de nous un Homme averti,
digne,instruit, responsable et sage !

Ces mêmes remerciements s`adressent à l’assistant Arnold NYALUMA pour ses


précieux conseils et l`attention qu`il a daigné apporté à ce travail.
De tout cœur, nous tenons également à remercier d`une manière très spéciale,
monsieur Dieudonné MUNDI et tous les membres de l`AUCAM pour l`appui financier, combien
important, tout au long de notre second cycle, à l`UCB.
Nos chaleureux remerciements s`adressent aussi à tous nos enseignants et au personnel de
l`U.C.B. Il s`agit des professeurs J.C.MUBALAMA, Moise CIFENDE, Bernard DUBUISSON,
Pierre d`ARGENT, Evariste BOSHAB, Gaston KALAMBAY, feu IMBAMBO L., BOMPAKA K.,
MIDAGU…au chargé des cours Me Thomas LWANGO, Me Idesbld BYABUZE, Wenceslas
BUSANE, KADIEBWE, aux assistants J.P. MULUME, Richie RUKEBA, Thierry MUGISHO,
J.S.MULENGEZI, sans oublier le chef du personnel BUSHENYULA. Nos sincères
remerciements s`adressent également aux abbés J.P.KATWANI, BUKUNGUTA,Paul
KADUNDU et la sœur Pascasie R.,…

On ne saurait également manquer de remercier nos sœurs Joëlle MASUMBUKO,


FAIDA, BINTU, MULANGALA, BINJA, ANUARITE, MUGOLI, ALLIANCE, MARTHE, OLGA,
MAMIE, etc.
A nos frères Guillaume BIRINDWA L., Blaise BULONZA, Eloi NAKA, Julien KOKO, Vital
AKONKWA, Michael KAMOLE, Rodrigue MATARA et Robert BYAMUNGU
Aux familles NTAMUSHIGO, SARABUYE, MATARA, Deo MUTABESHA, KAJANGU
Paul, BISHWEKA,… Nous pensons en outre à tous nos amis :SAFA Christophe et Guillaine
MATABARO, à Romain KISIBO N, Blaise MASTAKI,Christophe MAMBOLEO,Da ANNY et
GERVAIS, Géry SELE,Willy OMBENI, Paulin POLEPOLE, Patrick EKOFO, Robert
KITUMAINI, NGUNZ et Jeff KABERA, Jonas, Joyce K.RAMS, Hubert et JAMS, Crispin C. et
NSARAZA, Dr MANNIX et ZARICK, ADE,Justin MASTAKI et NTWALI, ADOLPHE, Tony B.,
Pacifique, Ernest, Murielle etc. A tous les amis du Léo et du Lions-club.
Enfin à tous nos cousins, amis, collègues et autres connaissances, qui de près ou de loin ont
contribués à l`heureuse réalisation du présent travail !
5

IV.

SIGLES ET ABREVIATUIONS

A.C.P. : Etats d`Afrique Caraïbe et Pacifique.


A.C.T. : Acte Constitutionnel de Transition.
A.G./ONU :Assemblée Générale des Nations Unies.
A.F.D.L. : Alliances des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo.
A.P.R. : Armée Patriotique Rwandaise.
A.I.E. : Agence Internationale de l`Energie Atomique.
AL. : Alinéa.
A.P.D. : Aide Publique au Développement.
Art. : Article.
ANAPI : Agence National pour la Promotion des Investissements.
A.M.R.: African Mineral Resources.
B.I.T.: Bureau International du Travail.
B.I.R.D. : Banque Internationale pour la reconstruction et le Développement
C.A. : Cour d`Appel.
C.N.U.C.E.D. : Conférence des Nations Unies pour le Commerce l`Economie et le
Développement.
C.S.J. : Cour Suprême de Justice
C.I.J. : Cour Internationale de Justice.
C.P.J.I. : Cour Permanente de Justice Internationale
C.S.K.:Comité Spécial de Katanga.
Coll.: Collection
C.: Contre
C.C.I.: Chambre de Commerce Internationale.
C.C.C.I.: Compagnie du Congo pour le Commerce et l`Industrie.
C.D.I.: Commission de Droit International
Cf. /cfr: Confer
C.F.L.: Compagnie de Chemins de fer du Congo Supérieur aux grands lacs.
Chap.: Chapitre
C.C.C.: Code Civil Congolais.
COBELMINES : Compagnie Belge d`Entreprises Minières.
C.I.R.D.I. : Centre International des Règlements des différends relatifs aux investissements.
C.N.K.I. : Comité National du Katanga.
E.I.C. : Etat Indépendant du Congo.
Elis. : Elisabethville.
E.C.U.P. : Expropriation pour Cause d`Utilité Publique.
Ed./éd. : Edition/édition
Et al. : Et alii(et les autres)etc. :et cetera.
Fac. : Faculté
FORMIRIERE : Société Internationale Forestière et Minière du Congo.
J.I.D.C.C. : Bulletin des Juridictions Indigènes et de Droit Coutumier Congolais.
J.O.RDC : Journal Officiel de la RDC.
J.O.Z. : Journal officiel du Zaïre.
Rés. : Résolution.
R.C.D. : Rassemblement Congolais pour la Démocratie.
R.D.C. : République Démocratique du Congo.
O.M.C. : Organisation Mondiale du Commerce.
6

INTRODUCTION GENERALE

1. Problématique.

L’article 9 de la constitution1 du 18/02/2006 dispose


que : “ l’État exerce une souveraineté permanente notamment sur le sol, le
sous-sol, les eaux et les forêts, les espaces aérien, maritime, lacustre et fluvial,
la mer territoriale congolaise, le plateau continental. Les modalités de gestion
et de concession sont déterminées par une loi”.

De prime abord, nous relevons que cet article consacre le


principe de la souveraineté permanente de la R.D.C. sur ses richesses et ses
ressources naturelles, qui a été maintes fois proclamé par les résolutions de
l’ONU.2 (1803, 1515, 1304, 1314). Ce principe est à la fois une norme
impérative qualifiée de jus cogens et un élément fondamental du droit des
peuples à disposer d’eux-mêmes. Il devient ainsi inscrit dans le droit positif
congolais, pour réglementer l’exploitation des ressources naturelles qui est
devenue source de conflit en RDC, comme les 2 guerres nous l’ont démontrées.
Il s’agit là d’une innovation que comporte le premier alinéa de cet article 9. Car
au cours des recherches que nous avons menées dans le cadre de ce travail, en
parcourant et en examinant toutes les constitutions 3 que la R.D.C. a déjà
connues (constitutions antérieures), il n’ y a nulle part où nous avons retrouvé
pareille disposition. Mais alors, qu’est-ce que cela peut bien vouloir signifier ?
Il s’agit-là d’un ensemble des droits ou des prérogatives reconnus à l’État
congolais, d’exercer un contrôle permanent sur les activités économiques se
déroulant sur l’ensemble de son territoire.

1
Selon la CEI, il y a eu un taux de participation de 61,97% dont le «oui» a recueillit 84, 31% des suffrages , contre
15,69 % pour le « non » et 38,03 %de votes blancs ou nuls.
2
Guy FEUER et Hervé CASSAN, Droit International du Développement, 2ème édition, Précis Dalloz, 1991,617pp.
3
Journal Officiel de la R.D.C., Recueil des textes constitutionnels de la R.D.C., Kinshasa, 1999.
7

Cette disposition trouve sa justification dans le souci du


législateur congolais à vouloir protéger4, en tout temps (temps de paix ou
temps de guerre), la souveraineté de l’État sur ses richesses et ses ressources
naturelles. Son intention n’est autre que d’éviter aux générations à venir de
connaître le pire que l’État a connu lors de la guerre de 1998 à 2003.

C’est une base juridique octroyée à la R.D.C. pour lutter contre les
atteintes portées sur ses richesses et ses ressources naturelles, en tout temps
et de lutter contre les atteintes à sa souveraineté économique, qui découlent
des contrats léonins et autres arrangements abusifs et inéquitables, conclus
en temps de guerres de rebellions et d’y remédier.

Il est important de préciser que, l’idée générale sur laquelle repose


l’ensemble de la théorie dudit principe est que :
- tout État dont les richesses et les ressources naturelles se trouvent entre les
mains étrangères doit pouvoir recouvrer l’intégralité des droits normalement
attachés à sa souveraineté.
- Par une extension naturelle de cette idée, on ajoute qu’un État souverain,
la R.D.C. en l’occurrence, ne peut être contraint de céder contre son gré,
à des étrangers les droits qu’il détient normalement sur les richesses
situées sur son territoire5.

Sur le plan juridique, ce principe a évolué dans deux directions:


son champ d’application n’a cessé de s’étendre pour atteindre non
seulement, le droit des espaces terrestres et maritimes, mais aussi le droit des
investissements et le droit des sociétés transnationales. Sa valeur juridique a
été progressivement admise, bien qu’elle n’ait cessé de donner lieu à des vives
controverses entre pays développés et ceux en développement6.

4
Bruno MBIANGU KAKESE, Travaux préparatoires de la constitution de la 3 ème République: débats et discussions
autour de l’art.9, inédit, Kinshasa, 2005, p.3.
5
Dominique ROSENBERG, La souveraineté permanente des États sur ses richesses et ses ressources naturelles,
LGDJ, Paris, 1983, p.123.
6
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p.216.
8

Une précision mérite d’être apportée ici, c’est celle de distinguer


le titulaire de l’exercice du droit de souveraineté. A l’article sous examen, le
législateur parle de l’État. Tandis que les résolutions 626 (VII) 1952 et celle
1803, on rencontre7 indistinctement les expressions droits des peuples, droits
des nations ou encore droits des États d’exercer leur souveraineté. L’emploi
simultané de ces termes ne résulte cependant pas d’une simple confusion de
langage. Il vient de la conception même que l’on se fait du droit de
souveraineté, la « summa potestas ».

Nous retenons donc que la souveraineté dont question ici,


appartient au peuple qui en confie l’exercice à l’Etat congolais.

Quant à l’épithète “ permanente” collée au mot souveraineté, ce


n’est même ni par un effet du hasard, ni une invention de la part du législateur
congolais, car ce principe a existé depuis 1952 et c’est seulement à partir de
la résolution 1314 que cette épithète apparaît et sera utilisée.
Il signifie “ inaliénable”, qu’on ne peut vendre ou qui ne peut s’interrompre ni
en temps de paix ni en temps de guerre. Ce qualificatif marque à la fois
l’essence et la portée du droit revendiqué8.

Déclarer cette souveraineté permanente et inaliénable signifie


d’une part, qu’aucune aliénation ou concession n’est valable sans le
consentement de l’État congolais qui est ici l’État territorial. D’autre part, que
cet État, la R.D.C. en l’occurrence a à tout instant, le droit de reprendre le
contrôle de richesses et ressources aliénées.

Dans cette perspective, il ne peut y avoir aliénation qu’à titre


précaire. C’est-à-dire toujours révocable dès lors que le gouvernement
considère qu’elles ne répondent plus aux intérêts du pays, intérêts dont il est
à la fois le juge et le gérant9.

7
D. ROSENBERG, op. cit., p .123.
8
Dominique ROSENBERG, op. cit., p.124 à 222.
9
Bruno MBIANGU KAKIESSE, op. cit., p.3.
9

On touche ici au cœur du problème aux yeux de nombreux


gouvernements, dans les pays du Tiers-Monde en général, et à ceux du
gouvernement congolais en particulier. La détention par des étrangers du
droit de propriété sur des richesses considérées comme nationales constitue
une atteinte à la souveraineté de l’État10.
Cela est d’autant plus vrai que la résolution 1803(XVII) insiste
avec force sur le fait que :
1. Le droit de souveraineté permanente de peuple et des nations sur leurs
richesses et leurs ressources naturelles doit s’exercer dans l’intérêt du
développement national et du bien être de la population de l’État intéressé.
2. La prospection, la mise en valeur et la disposition de ces ressources ainsi
que l’importation des capitaux étrangers, nécessaires à ces fins devraient être
conformes aux règles et conditions que le peuple et les nations considèrent en
toute liberté comme nécessaire ou souhaitable pour ce qui est d’autoriser, de
limiter ou d’interdire ces activités.
3. Dans le cas ou une autorisation11 sera accordée, les capitaux importés et
les revenus qui en proviennent seront régis par les termes de cette
autorisation, par la loi nationale en vigueur et par le droit international. Les
bénéfices obtenus devront être répartis dans la proportion librement convenue
dans chaque cas entre les investisseurs et l’État, étant entendu qu’on veillera
à ne pas restreindre pour un motif quelconque, le droit de souveraineté dudit
État sur ses richesses et ses ressources naturelles.
4. La nationalisation, l’expropriation ou la réquisition devront se fonder sur
des raisons ou des motifs d’utilité publique, de sécurité ou d’intérêt national,
reconnu comme primant les simples intérêts particuliers ou privés tant
nationaux qu’étrangers. Dans ce cas, le propriétaire recevra une indemnisation
adéquate, conformément aux règles en vigueur dans l’État qui prend ces
mesures dans l’exercice de sa souveraineté et en conformité au droit
international. Dans tous les cas où la question de l’indemnisation donnerait
lieu à une controverse, les voies de recours nationales de l’État qui prend
lesdites mesures devront être épuisées.

10
Joe VERHOEVEN, Droit International Public, Larcier, Bruxelles 2000.P.1234.
11
Alain PELLET et Eric DAVID, Code du Droit International Public, Larcier, Bruxelles, 2002
10

Toutes fois, sur accord des États souverains et autres parties intéressées, le
différend devrait être soumis à l’arbitrage ou à un règlement judiciaire
international.
5. L’exercice libre et profitable de la souveraineté des peuples et des nations
sur leurs richesses et ressources naturelles doit être encouragé par le respect
mutuel des États, fondés sur leur égalité souveraine.
6. La coopération internationale en vue du développement économique des
pays en voie de développement, qu’elle prenne la forme d’investissement des
capitaux publics ou privés, d’échanges des marchandises ou services,
d’assistance technique ou d’échanges des données scientifiques, doit favoriser
le développement national indépendant de ces pays et se fonder sur le respect
de leur souveraineté sur leur richesse et leurs ressources naturelles.
7. La violation des droits souverains des peuples et des nations sur leurs
richesses et leurs ressources naturelles va à l’encontre de l’esprit et du
principe de la charte12 des Nations Unies et gêne le développement de la
coopération internationale et le maintien de la paix.
8. Les accords relatifs aux investissements étrangers, librement conclus par
les États souverains ou entre des tels États seront respectés de bonne foi ; les
États et les Organisations Internationales doivent respecter strictement et
consciencieusement la souveraineté des Peuples et des Nations sur leurs
richesses et leur ressources naturelles, conformément à la charte et aux
principes énoncés dans la présente résolution13.

Cependant, force est de constater que la réalité observée sur le


terrain semble pratiquement s’écarter de la théorie ci-haut évoquée.
Faute d’une vulgarisation suffisante et efficace de la constitution, on l’a
vu lors du référendum constitutionnel, il existe une controverse
d’opinion14 sur la portée et le sens même de l’article 9 de ladite
constitution.

12
Art.2. Charte de l’ONU, Cfr. Eric David et Alain PELLET, op. cit., p 946 et 947. 1194 séances plénières,
14/12/1962.
13
Résolution 1803(XVII) sur la proclamation du principe de la Souveraineté Permanente. Cette Résolution a été
adoptée par 87 voix dont la Belgique, contre 2, avec 12 abstentions et 9 non-votants.
14
Remarquons ici que ce qui pose problème pour beaucoup, c’est le changement de l’ancienne formulation à
l’alinéa 1er de l’art.9, l’alinéa 2ème est resté inchangé.
11

Pour les uns, l’article 9 est contraire à la loi du 20/7/73, car il abolit le
monopole de l’État congolais sur son sol et son sous-sol, en consacrant
ainsi la privatisation15 de la propriété foncière ; pour les autres ils
reprochent à l’article 9 d’être une astuce, un lifting juridique par lequel on
veut vendre le sol, le sous-sol et autres richesses et ressources naturelles
de l’État congolais, aux étrangers (firmes internationales, États puissants,
…) en rendant la R.D.C. un territoire d’exploitation.
Les droits souverains des peuples sont violés, car les revenus tirés des
exploitations de ressources naturelles ne profitent ni pour le bien être
de la population, ni pour le développement de la RDC.
Au mépris des codes miniers, fonciers, forestiers, …les groupes rebelles
ont pillé et exploité illégalement les ressources naturelles16, qu’elles
soient minérales, écologiques, agropastorales, industrielles, financières
ou humaines. Ils sont à la base des pratiques mafieuses dont les trafics
d’armes, blanchissements d’argents sale, fabrication de la fausse
monnaie et criminalisent ainsi l’économie congolaise.
Selon le rapport de la commission LUTUNDULA, il s’est passé au cours
de cinq dernières années des transactions et accords commerciaux,
économiques et autres sur les concessions minières, forestières et
foncières comportant des clauses léonines17, attentatoires à la
souveraineté nationale.

Face à un tableau paradoxal ci-haut décrit, un certain nombre


de questions se posent avec acuité :
- Quel rapport juridique existe-t-il entre la loi dite BAKAJIKA, l’art.53 de la loi
du 20/07/73 et l’article 9 de l’actuelle constitution ?
Autrement dit, la substitution aux concepts “ propriété ” et « plénitude des
droits » de celui de “ souveraineté permanente ” implique–t-elle une
complémentarité, une contradiction ou une équivalence ?
- Quelles sont les modalités d’exercice de la souveraineté permanente et en cas
de violation de ce principe, comment établir le mécanisme de responsabilité ?

15
Séverin MUGANGU, La gestion foncière rurale au Zaïre, reformes juridiques et pratiques foncières locales, cas
du Bushi : thèse de doctorat, Louvain-la-Neuve, Belgique,1995.
16
http : //www.un.int/drcongo/rapport1.htm considérations du gouvernement sur les rapport du panels.
17
Extrait du rapport publié par la commission LUTUNDULA
12

Quelle en est la sanction, la procédure ainsi que la juridiction compétente à


saisir pour trancher le litige ?

Voilà autant de questions auxquelles nous nous proposons de


répondre au cours du présent travail.

2. Hypothèses

La formulation actuelle de l’article 9, al.1er ne contredit ni la loi


BAKAJIKA, ni l’article 53 de la loi du 20/07/73, ni même l’article 34 de
l’actuelle constitution, qui consacre le droit à la propriété privée et le
réglemente. Elle est la plus complète, la plus exhaustive et appropriée par le
fait qu’elle prend en compte tous les compartiments du domaine public foncier,
lacustre, fluvial, aérien et maritime. La nature du droit de l’État sort du secteur
étroit du droit privé, pour escalader les cimes des prérogatives des puissances
publiques.

Le concept de “ souveraineté ” recadre parfaitement l’étendue et


la nature des prérogatives de l’État sur tout son domaine public naturel. En
tout cas, mieux que la notion de propriété souvent fustigée pour sa pauvreté,
ses lacunes et son absence de prise en compte de la complexité du patrimoine
foncier de l’État, qui ne se limite pas qu’au sol et au sous-sol. La propriété est
un simple concept de droit privé18, qui ne rend pas compte des aspects propres
à l’espace aérien, maritime ou au plateau continental, … Ici on ne parle pas
techniquement du droit de propriété mais de l’exercice de la souveraineté. Le
concept de la ‘‘souveraineté permanente’’ recadre parfaitement l’étendue et la
nature des prérogatives de l’Etat sur tout son domaine public naturel, en tout
cas, mieux que la notion privatiste de ‘‘propriété’’.

Les modalités d’exercice de la souveraineté permanente par


lesquelles la R.D.C. peut recouvrir ses richesses extorquées sont : la
nationalisation, la radicalisation, l’expropriation pour cause d’utilité publique,

18
Séverin MUGANGU, op. cit., p.145.
13

etc. Mais au surplus, comme le principe de la souveraineté permanente relève


du jus cogens19, l’État congolais peut attraire en justice tant ses nationaux
(près des juridictions internes) que d’autres pays voisins (près la C.I.J.) qui ont
violé ce sacré principe et pillés ses ressources naturelles, en vue d’obtenir une
réparation adéquate. Et comme il s’est avéré que l’exploitation des ressources
naturelles en RDC, est une source de conflit, on songerait également à
consolider la paix par la bonne gouvernance, une gestion rationnelle de ses
ressources et à une bonne politique de coopération internationale entre la
RDC et ses pays voisins qui, sans cesse, convoitent ses richesses.

3. Méthodologie

L’utilisation des méthodes et techniques de recherches répond à


une double nécessité, à savoir la collecte et le traitement des données ainsi
que la rationalisation de procédure, en vue d’atteindre le résultat escompté.
C’est ainsi que dans le cadre du présent travail, nous allons faire usage de la
méthode juridique.

La méthode juridique accorde la prépondérance aux textes


internationaux et nationaux et son objet normatif dans le cadre de notre
investigation. Ainsi, nous avons procédé à une analyse des règles
internationales, pour mieux connaître la protection particulière accordée au
principe de la souveraineté permanente sur les ressources naturelles, tel que
consacré par cette nouvelle constitution.

La méthode exégétique20 nous permettra d’analyser les textes


tant nationaux qu’internationaux pour comprendre l’évolution du régime
juridique foncier, des espaces aériens, maritimes, conformément au principe de
la souveraineté permanente.

19
Car la résolution 1803, à son alinéa 7, on précise qu’il est conforme aux buts et aux principes de la charte des
Nations Unies. Ce qui revient à dire que violer le principe de la souveraineté implique directement violation de la
charte de l’ONU.
20
Véronique VILLIEUX et alii., A la découverte de la recherche et des chercheurs, Paris Dalloz, 2001, p.24.
14

En outre, nous avons fait la recherche sur la législation


congolaise afin de vérifier si les normes résultant des textes internationaux de
protection des ressources naturelles ont été intégrées dans le droit interne. Il a
donc fallu une démarche quelque peu comparative entre deux ordres
juridiques.

La technique documentaire nous a permis de consulter avec


intérêt, d’une part les textes légaux, les traités internationaux relatifs à notre
sujet et d’autre part la doctrine : ouvrages, articles, rapports, et documents
ayant trait à notre sujet, pour une recherche des faits significatifs.
Enfin nous avons trouvé, grâce à cette technique, la
jurisprudence nationale aussi bien internationale, qui nous a aidé à répondre
à certaines questions tranchées par la Cour Internationale de Justice.

La technique d’interview21 pour sa part, nous a permis de


recueillir par entretien certaines données auprès des praticiens du droit. Ces
personnes nous ont non seulement permis d’avoir accès à certains dossiers en
rapport avec notre travail, mais aussi nous ont fait part des positions
soutenues par eux, à ce sujet.

4. Choix et intérêt du sujet

L’intérêt qui a guidé notre choix est à la fois certain et


indéniable. Il se situe ainsi au triple plan, à savoir : scientifique, pédagogique
et social.
- Sur le plan pédagogique, le présent travail est un exercice de combinaison
et de rencontre de plusieurs branches du droit dont, le Droit International
Public, Relations économiques Internationales, Droit des Organisations
Internationales, Droit de Biens, Droit Constitutionnel,
– Sur le plan social22, l’objet du présent travail est d’une importance
capitale pour la population du monde entier, celle des pays du Tiers-Monde et

21
Marie Anne COMENDET, Méthode de travail scientifique, Paris, Mont chrestiens, 1998, p.12.
22
François DEPELTEAU, La démarche d’une recherche en sciences humaines, De BOECK, Paris, France, 1998,
p.45.
15

celle de la R.D.C. en particulier. En effet, nous pensons qu’il est utile et


impérieux que la population, soucieuse de son bien être sache comment
s’effectuent la gestion et la répartition de ses ressources naturelles pour le
développement de son État, surtout que c’est elle qui souffre toujours des
atrocités des guerres menées ça et là.

Voilà pourquoi nous disons, partant de cela, qu’il intéresse cette


population à plus d’un titre. Parce que celle-ci en a été considérablement
affectée.
L’apport du présent travail à la science juridique consiste
notamment dans l’explication de l’écart entre les notions de propriété et de
souveraineté.

Les techniques et principes juridiques de protection des


ressources naturelles, les règles de révision de contrats léonins. Ainsi, sa
pertinence tient au fait qu’il rejoint le débat houleux sur l’actuelle
constitution : la substitution du concept propriété par celui de souveraineté
permanente, d’autre part au fait qu’il s’efforce de trouver une explication à
l’article sous examen, selon l’esprit de la résolution 1803.

Aussi, ce travail nous semble davantage intéressant dans la


mesure où il se propose de donner des solutions pour rendre effective et
efficace le respect de l’application du principe de la souveraineté permanente.

Un tel thème ne peut aboutir au résultat escompté que s’il est


accompagné d’une méthodologie appropriée, étant entendue qu’il est à cheval
entre le Droit International et le Droit interne.

5. Délimitation du sujet

Délimiter un sujet consiste à le situer dans le temps et dans


l’espace23. Sur le plan spatial, notre étude ne concernera que la RDC. Mais il

23
François DEPELTEAU, op. cit.p.44.
16

demeure évident que le principe de souveraineté permanente étant un principe


de droit international, il concernera aussi tous les États (en voie de
développement et ceux développés).

Sur le plan temporel, nous allons remonter à l’origine de ce


principe (résolution 1803 (XVII) 1952), pour comprendre l’essence et la portée
de ce principe, ainsi que les multiples violations qui se sont produites dans le
monde (affaire du Timor Oriental, du Sahara, RDC contre Uganda). Toutes fois,
pour des raisons d’enrichissement du sujet, nous n’ hésiterons pas de quitter
le cadre spatio-temporel que nous venons de tracer, pour puiser dans le passé,
soit sous d’autres espaces des données à même de rendre plus compréhensible
notre travail.

Quant au corps des règles, les principaux textes à analyser, dont


nous ferons usage ici sont : la résolution 1803, les codes d’investissements,
code forestier, code foncier, maritime, minier, …

6. Subdivision du travail

Outre l’introduction et la conclusion générale, le présent travail


s’articule en deux chapitres.

Le premier chapitre est intitulé clarification conceptuelle et


comprend cinq sections : de la souveraineté permanente (section 1ère),
distinction entre souveraineté permanente et la plénitude des droits fonciers,
miniers et forestiers (section 2ème), distinction entre souveraineté permanente et
l’article 53 de la loi du 20/07/1973 (section 3ème), distinction entre
souveraineté permanente et domanialité (section 4ème) et distinction entre
souveraineté permanente et ses notions voisines (section 5ème). Une conclusion
partielle mettra fin à ce premier chapitre.

Pour sa part, le second chapitre comporte trois sections :


mécanismes de contrôle (section 1ère), régime juridique et modalités d’exercice
17

de la souveraineté permanente (section 2ème) et enfin la violation du principe de


la souveraineté permanente (section 3ème).
18

CHAPITRE Ier : CLARIFICATION CONCEPTUELLE

Le droit, disait Remy CABRILLAC, constitue une science24 dont la


rigueur repose sur la précision de langage (…). Un terme juridique employé à la
place d’un autre terme du langage courant peut emporter des conséquences
aussi fondamentales qu’indésirables. Cette impeccable citation est pleinement
justifiée à l’égard de l’article 9, objet du présent travail. Il dispose : “ L’État
exerce une souveraineté permanente notamment sur le sol, le sous-sol, les
eaux et les forêts, sur les espaces aérien, fluvial, lacustre, et maritime
congolais ainsi que sur la mer territoriale congolaise et sur le plateau
continental. Les modalités de gestion et de concession du domaine de l’Etat
visé à l’alinéa précédent sont déterminées par la loi”.

Pour procéder à son examen, deux problèmes essentiels vont


nous préoccuper tout au long de ce chapitre, d’ une part l’analyse de l’alinéa
1er dudit article, (qui pose le principe de la souveraineté permanente..), d’autre
part l’analyse du second alinéa, (qui prévoit que les modalité25s de gestion et
de concession du domaine public de l’Etat…).

En effet, une analyse minutieuse et combinée de ces deux


alinéas révèle ici une inadéquation des termes, voire même une lacune causée
par l’emploi des termes “ modalités de gestion et de concession du domaine
public…” à l’alinéa 2ème, précédé de l’expression “ l’Etat exerce une
souveraineté permanente… ” à l’alinéa 1er. Il semble y avoir dans l’esprit du
législateur, une confusion entre les termes souveraineté et propriété ; si bien
que l’on ne sait plus déterminer exactement avec l’art.9 de cette nouvelle
constitution, si le sol, le sous-sol et les mines demeurent une propriété
inaliénable, exclusive et imprescriptible de l’Etat Congolais ou non. C’est là le
nœud du problème.

24
Remy CABRILLAC, Dictionnaire du vocabulaire juridique, 2ème édition, Litec, Paris, 2004, p VII, (in avant
propos).
25
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit. p22.
19

D’où, pour replacer les mots à leurs juste place, de manière à en


avoir une idée précise, claire et nette, il nous paraît mieux indiqué de préciser
en 1er lieu le sens et la portée du principe de la souveraineté permanente
(section1ère), ensuite confronter cette notion face à la loi BAKAJIKA (section
2ème), à la loi du 20 juillet 1973(section3), mais également avec la notion de
suzeraineté et celle de domanialité, (section 4 et 5). Enfin, nous distinguerons
ce principe de ses notions voisines, avant de proposer une nouvelle formulation
dudit article, dans une conclusion partielle de ce chapitre. Tout ceci dans le
but de les clarifier et de savoir si ces notions s’équivalent ou peuvent être
employées l’une à la place de l’autre.

Section 1ère : DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE

Comme nous l’avons annoncé dès le début de ce travail, l’alinéa


1er de l’article sous examen consacre le principe de la souveraineté
permanente des Etats sur leurs ressources naturelles. Ce principe a été
proclamé deux fois par les résolutions1803 (V) et la résolution 3281 sur les
droits et devoirs économiques des Etats. Il convient donc, dans la présente
section, de pouvoir dégager le sens et analyser ce principe à travers son
évolution, son contenu (§1), ses caractères (§2), son étendue (§3) ainsi que ses
notions voisines. En procédant de la sorte, notre objectif n’est rien d’autre que
de savoir le sens que le législateur congolais entend donner à l’article 9.

§ 1. Évolution et contenu du principe


I. Evolution d’ensemble
I.1. Origine
La théorie de la souveraineté permanente des Etats sur leurs
richesses et ressources naturelles est d’origine latino-américaine.
C’est le Chili qui, en 1952, a amorcé le débat dans le cadre des Nations Unies.
Par la suite, on a vu se développer toute une argumentation touchant aux
problèmes politiques, économiques et juridiques relatifs à cette notion.
20

Dans un premier temps, ce principe a été façonné dans un cadre


historique précis, notamment celui de la décolonisation et ayant une finalité
bien précise. Les pays du tiers monde ont ensuite cherché à faire admettre la
notion par les pays développés en acceptant divers compromis au sein de
l’O.N.U. Une commission chargée de l’étude de ce principe fut institué par
l’A.G. et abouti à la proclamation de la résolution 1803(XVII).

I.2. Étapes marquant l’évolution du principe.

Dans l’ensemble, cette évolution traduit le souci de “ des


internationaliser” les compétences économiques de l’État. Souci tactiquement
compréhensible : les États en développement comme les Etats socialistes de
l'époque cherchent à définir leur place dans les relations internationales, par
opposition aux Etats qui dominent aujourd'hui les rapports économiques
internationaux. Pour ce faire, il leur paraît opportun de supprimer les
limitations, imposées par un Droit International Public d'origine européenne,
à leur droit de réglementation interne et à une utilisation discrétionnaire de
leurs richesses naturelles. Ils sont parfois rejoints dans cette entreprise par
des Etats développés qui y voient le moyen soit de résister plus efficacement à
la domination américaine, soit de dégager les règles d'une nouvelle discipline
économique spécifique aux relations entre pays développés (exploitation de
l'idée de dualité des normes).

Les principales étapes sont marquées par l'adoption des textes


suivants :
- Le 1er texte important est la résolution 626 (VI) de 1952 qui, bien que les
Etats "occidentaux" se soient abstenus lors de son adaptation, paraît
rétrospectivement bien anodine : elle insiste sur la "nécessité de maintenir le
courant des capitaux dans des conditions de sécurité et dans une
atmosphère de confiance mutuelle et de coopération entre les États".
L'intérêt de cette résolution tient à l'habitude qui s'est prise depuis lors, de
réaffirmer régulièrement le principe de la souveraineté sur les ressources
nationales. Et donc, dans un 1er temps, les pays du Tiers-monde ont
cherché à faire admettre la notion par les pays développés en acceptant divers
21

compromis, note HERVE Cassan26 dans son ouvrage très célèbre cité
précédemment.

- La 2èmeétape, est marquée par l'adoption de la résolution 1803 (XVII) de1962.


Elle correspond à une phase de compromis entre les synthèses défendues par
les États occidentaux, ceux des pays socialistes et du Tiers Monde, en
particulier. Le droit de nationaliser la propriété étrangère y est affirmé
clairement, mais son exercice est entouré de certaines restrictions.
- La 3ème phase, quant à elle est ponctuée de durcissements successifs du
Tiers Monde et trouve un point d'aboutissement dans la charte de droits et
devoirs économiques des États de 1974. En son article 2, §II, il rappelle que
"chaque État détient et exerce librement une souveraineté entière et
permanente sur toutes ses richesses, ses ressources naturelles et activités
économiques y compris la possession, le droit de les utiliser et d'en disposer".
L’ONU a adopté en tout plus de 80 résolutions concernant ce principe et a
créée une commission chargée de son étude qu’elle a chargée de procéder à
une enquête approfondie concernant la situation du droit de souveraineté
permanente sur les richesses et les ressources naturelles.

Depuis cette période, la situation est plus complexe. Les pays


développés ont accepté l'insertion de ce principe dans le droit positif, mais ils
contestent vigoureusement les conséquences externes que certains pays en
développement veulent en tirer dans l'exercice de leur politique, notamment
en matière de nationalisation.

II. Contenu du concept de “ la Souveraineté Permanente ”

La constitution de la 3ème République ne fait que consacrer le


principe de la Souveraineté Permanente dans le droit positif (interne)
congolais, à son art.9 alinéa 1er, mais ne définie, ni le sens ni la portée de ce
dernier.

26
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 23.
22

Il n'existe non plus, aucune loi ou jurisprudence ( ) dans le


droit positif congolais qui définisse ce principe. D'où alors, face à ce vide il
nous parait nécessaire d`appliquer le réflexe du juriste, ainsi, nous avons
recouru à la fois aux travaux préparatoires du parlement, ainsi qu'à la doctrine
juridique internationale, pour combler cette lacune, en vue de réaliser une
analyse minutieuse de notre travail et en dégager le sens, qui mettra fin à toute
controverse autour de cet article. Cela étant, nous analyserons donc tour à
tour les titulaires, l'objet et les caractères de cette souveraineté, pour en avoir
une idée générale et pertinente.

II.1. Notion de la souveraineté permanente27 selon les travaux


préparatoires
Ces travaux ont été réalisés par le sénat et la discussion eut
lieu au sein du parlement de transition, les deux chambres réunies. Le
Président de cette commission est : Bruno MBIANGU KAKESE.
D'après la commission chargée de l'examen de l'art ; 9 de la
constitution, "…"le principe repose sur la sécurisation de la souveraineté de
l'État, quelles que soient les circonstances, en temps de paix ou de guerre,
l’Etat doit avoir le contrôle politique, économique, financier et social sur toute
l'étendue de son territoire.

Cette permanence de sa souveraineté vient à juste titre protéger,


verrouiller la souveraineté de l'État. En ce sens où, il (l'État) devrait demander
réparation au cas où un préjudice serait constaté pendant une période des
troubles et des guerres.

L'esprit de cet article intervient après que l'État central ait été
bradé par des seigneurs de guerre qui avaient occupé et divisé le pays en
plusieurs structures politico-économico-judiciaire, la volonté manifeste
d'instituer un contrôle sur toute l'étendue du pays en vue d'ériger un système
de blocage contre les expériences qui ont consacrées une souveraineté à
chaque seigneur de guerre28.

27
Travaux préparatoires de la commission chargée de la rédaction de l’art.9 de la constitution du 18/02/2005.Cette
commission fut dirigée par Bruno MBIANGU KAKIESSE.
23

II.2. Notion de la souveraineté permanente selon la doctrine

Quant à l’idée générale développée par la doctrine, elle se


résume en ceci: tout Etat dont les richesses et les ressources naturelles ont
été extorquées ou se trouvent entre des mains étrangères doit pouvoir
recouvrer l'intégralité des droits normalement attachés à sa souveraineté. Par
une extension naturelle de cette idée, on ajoute qu'un Etat souverain ne peut
être contraint contre son gré de céder à des étrangers les droits qu'il détient
normalement sur les richesses situées sur son territoire. C'est là l'une des
applications principales de ce que le langage idéologique en usage au Tiers-
monde et aux Nations Unies a pu appelé " la lutte contre l'impérialisme et le
néo-colonialisme".
- Qui est le titulaire du droit de la souveraineté permanente ?
Deux ambiguïtés subsistent ici : le premier est juridique, son bénéfice ne
devrait revenir qu'aux Etats. Certains textes, et en particulier la charte de
droits et devoirs économiques (rés. 3281 (XXIX) de 1974) semblent bien en
réserver l'exercice aux Etats ou aux ‘‘pays’’, mais l’autre ambiguïté, qui est le
second nous révèle que des nombreux autres documents considèrent qu'il
s'agit-là ‘‘d'un élément fondamental du droit de peuple et de nations à disposer
d'eux-mêmes’’
Par exemple l'art.1er, paragraphe 2 de deux pactes de droits de l'homme de
1988 qui dispose : " pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent
disposer librement de leurs ressources et de leur richesses naturelles.

Il apparaît donc que la souveraineté sur les richesses et les


ressources naturelles appartient à l'Etat qui l'exerce au nom du peuple à
partir du moment où celui-ci est constitué en Nation ou en Etat. Mais aussi au
peuple sous domination coloniale ou soumis au régime d’apartheid ou de
discrimination raciale, peuple sous colonie, peuple autochtone. La
communauté internationale veille sur leurs, intérêts en attendant leur
accession à l'indépendance.

28
Rapport de la commission Lutundula
24

- Ratione materiae, l'objet de la Souveraineté Permanente est très


étendue29. Il s’agit notamment :
1° L’objet primordial : les premières résolutions de N.U. visent exclusivement
les richesses et ressources naturelles.
2° Depuis 1974 l’A.G. y adjoint les activités économiques.
3°L'expression recouvre aujourd'hui30 tant, les richesses, ressources minérales
et agricoles que les activités d'exploration, d'exploitation, de transformation et
de commercialisation des richesses étendues sur le territoire où l’Etat exerce
sa souveraineté.
4° Les investissements privés étrangers.
5° Les sociétés transnationales.

Il convient de préciser aussi que parmi les droits qui découlent


de la souveraineté économique de l'Etat figurent celui de réglementer les
investissements étrangers dans les limites de sa juridiction nationale, de
réglementer et de surveiller les activités des sociétés transnationales dans les
mêmes limites et de nationaliser, d'exproprier ou de transférer la propriété des
biens étrangers situés sur son territoire.

En pratique, les investissements étrangers ainsi que l'acquisition


d'immeubles sis sur le territoire national sont plus ou moins réglementés
suivant les Etats. La loi Néerlandaise, par exemple, ne semble pas limiter
l'acquisition par des étrangers d'immeubles situés aux Pays-Bas. Il en va
autrement en Suisse.

§ 2. Étendue de l'exercice de cette Souveraineté Permanente

Nous envisageons ici le territoire, espace31 sur lequel s'exerce


cette souveraineté et ses limites, car les richesses et ressources naturelles se
situent sur ces territoires. C’est pourquoi la constitution, précisément son

29
Dominique ROSENBERG, op. cit. p.128.
30
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p.78.
31
Jean COMBACAUD, op. cit., p.567.
25

article 9 précise qu’il s’agit de tout le territoire, c'est-à-dire espace aérien,


maritime et terrestre. Où doit –t-elle s’exercer ?

Sur ce point, jurisprudence et doctrine sont toutes unanimes à


affirmer que l’Etat exerce (une souveraineté) des pouvoirs souverains à l'égard
de toutes choses, toutes situations et de tous les individus se trouvant sur
son territoire. C'est ce qu'exprime les termes latins jus imperium et jus
dominium (pour illustrer l’idée de deux aspects de la souveraineté).

A titre illustratif, la doctrine canadienne représentée par Claude


EMANUELI (professeur à la faculté de Droit de l’université d'Ottawa, dans un
rapport général sur la maîtrise du sol32 ; l'a si bien exprimé en ces termes: " le
principe de la Souveraineté Permanente sur les ressources naturelles et les
activités économiques s'applique aussi bien aux ressources minérales qu'aux
ressources agricoles, aux activités d'exploration, d'exploitation, de gestion, de
conservation, de transformation et de commercialisation des ressources
naturelles". Celles-ci peuvent être comprises dans le territoire terrestre de
l’Etat, mais aussi sur son territoire maritime, son plateau continental, sa zone
de pêche exclusive ou sa zone économique exclusive.

Jusqu'où l'Etat est censé exercer sa Souveraineté Permanente?


Autrement dit, quelles sont ses limites spatiales, car elles ne sauraient être
indéfinies ou illimitées, sous réserve des droits des Etats tiers et du
patrimoine commun de l’humanité.

La souveraineté territoriale implique que l'Etat dispose de droits


souverains et exclusifs sur l'ensemble de son territoire. Or, le territoire de l'Etat
est composé de l'espace aérien, maritime et terrestre. Il s'agira avant tout du
contrôle effectif que l'Etat exerce sur son territoire terrestre.

I. Espace terrestre (compétences territoriales)


‘‘L’Etat exerce une Souveraineté Permanente sur le sol, le sous-
sol, les forêts,..’’

32
Franck MODERNE et alii. La maîtrise du sol, rapport de synthèse, PUF, Paris, 1995, pp. 3 à 69.
26

Pour des raisons de précision et de concision, nous allons


englober ici le sol, sous-sol et les forêts. Les compétences territoriales de l’Etat
s'étendent à l'ensemble de son territoire terrestre auquel sont assimilées les
eaux douces.
L'Etat exerce des pouvoirs souverains à l'égard de toutes les
choses et de tous les individus qui se trouvent sur son territoire terrestre de
même qu'à l'égard de toutes les activités qui s'y déroulent. Il dispose
notamment d'une souveraineté permanente sur les ressources naturelles
présentées à l'intérieur de son territoire et sur les activités économiques qui y
ont lieu. Le principe de la souveraineté économique de l'Etat se trouve
expressément mentionné à l'art. 2 §1 de la charte des droits et devoirs
économiques des Etats (1974). Selon cet article : chaque État détient et exerce
librement une souveraineté entière et permanente sur toutes ses richesses,
ressources naturelles et activités économiques, y compris la possession et le
droit de les utiliser et d'en disposer.

Cependant, il faudra également considérer les autres espaces à


l'égard desquels l'État possède des droits souverains.

II. Espace maritime et Espace aérien


Le territoire de l'État en tant qu'espace sur lequel il exerce sa
souveraineté est composé des espaces maritime, arien et terrestre.
Compte tenu de notre thème et par souci de nous conformer aux prescrits
légaux de l’art. 9, nous envisageons avant tout d'analyser le contrôle effectif
que l'État exerce sur son territoire: que sont le sol, le sous-sol, les forêts et les
eaux intérieurs, le plateau continental, ainsi que sur toute l’étendue du pays.

§ 3. Caractères de cette souveraineté

La souveraineté permanente présente les caractères suivant:


inaliénable, exclusive, imprescriptible, permanente, indivisible, non susceptible
d’appropriation privative, insaisissable.
27

I. Le caractère économique33
La souveraineté permanente est une souveraineté
économique34. En effet, la plénitude des compétences de l'Etat sur son
territoire se traduit par sa "souveraineté permanente sur ses ressources
naturelles et ses activités économiques’’. Une double mise au point
terminologique s'impose. D'une part, il faut noter que cette expression, comme
celle, courante aussi, de "souveraineté économique" est une simple convention
de langage, et qu'elle ne prétend pas amorcer une dissociation des différents
éléments de la souveraineté étatique. En réalité, la souveraineté ne se divise
pas, elle n'est le critère de l'Etat que dans toute sa plénitude: il serait abusif
et maladroit de distinguer souveraineté politique, souveraineté économique ou
tous les autres aspects de la souveraineté.

La souveraineté économique regroupe tout simplement


l'ensemble des compétences économiques des États qui découlent de leur
souveraineté. C'est un concept descriptif, au même titre que l'expression "
souveraineté territoriale" elle -même.

Mais, d'autre part, c'est précisément pour marquer que ces


compétences sont extrêmement larges, peu limitées par le droit international,
que celles-ci sont regroupées sous le vocable de "souveraineté". C'est pour
renforcer ce caractère presque absolu que les résolutions des Nations unies
qualifient la souveraineté économique de permanente, entière et inaliénable".
Les États en développement entendent signifier par ces adjectifs que toute
renonciation aux droits que l'État tient de sa souveraineté en matière
économique est précaire et révocable. Il est vrai que la souveraineté politique
est un vain mot si les États ne possèdent pas des moyens concrets de
l'exercer.

Dans le monde contemporain, il n'est pas d'indépendance sans


maîtrise de l'activité économique. C'est ce qui explique l'accent mis à l'heure

33
Dominique ROSENBERG, op. cit., p.121.
34
Patrick DAILLIER et Alain PELLET, op.cit. p.1035 et s.
28

actuelle sur la composante économique de la souveraineté, surtout par les


États en développement, peu convaincus de pouvoir tirer parti de l’
interdépendance économique, ils insistent sur le droit des États de contrôler
l'ensemble des activités économiques menées sur leur territoires.

II. Le caractère permanent et inaliénable de cette souveraineté


L'épithète permanente collée au mot souveraineté "apparaît dès
la résolution 1314 (XII) et sera régulièrement utilisée à partir de là. Ce
qualificatif marque à la fois l'essence et la portée du droit revendiqué. En
effet, dire que la souveraineté sur les ressources naturelles est permanente,
signifie qu'elle est inaliénable. L'inaliénabilité se trouve proclamée par la
résolution 1803 (XVII) et par la plus part de textes ultérieurs. Ce que l'on
vise par-dessus tout, ce sont soit les aliénations effectuées par la puissance
métropolitaine durant l'ère coloniale et dont les bénéficiaires demandent le
maintien au nom de la théorie du respect des droits acquis ; soit celles qui
ont été extorquées à des gouvernements faibles au profit des ressortissants
d'États économiquement puissants.

III. Le caractère de conformité aux buts et principes des N.U.


Les résolutions prévoient des moyens de sanction permettant de
faire respecter les compétences souveraines des États. On citera à ce propos
deux dispositions importantes, entre lesquelles se remarque une différence de
ton caractéristique de l'évolution de la théorie. En 1962, la résolution
1803(XVII) présente un paragraphe 7 ainsi libellé : "la violation des droits
souverains des peuples et des Nations sur leurs richesses et ressources
naturelles va à l'encontre de l'esprit et des principes de la charte des N.U. et
gène le développement de la coopération Internationale et le maintien de la
paix".

Dix ans plus tard, la IIIèmeC.N.U.C.E.D. qualifie de violation


flagrante des principes des Nations Unies, toutes mesures de pression
politique et économique de nature à porter atteinte au droit de tout le pays, de
disposer librement de ses ressources naturelles (Rés. 46 (III). Aussi l'ONU
recommande-t-elle à ses membres de s'abstenir de toute pression ou action de
29

contrainte pendant et à travers le libre exercice par l'État de son droit de


souveraineté sur ses ressources naturelles. Il s'agit-là d'un principe important,
en lequel il faut voir, comme le précise plusieurs résolutions, une application
du principe de non intervention, proclamé par la charte de N.U. et par la
déclaration du 24/10/1970 sur les relations amicales et la coopération entre
les États. Ce principe est lui-même le corollaire de la souveraineté et de
l'égalité.

IV. La souveraineté a le caractère d’un pouvoir illimité et exclusif


La souveraineté est la source de tout pouvoir qu'exercent les
organes d'un État dans le droit positif d’un État. Elle a son siège dans tous
les citoyens et dans chacun d'eux. La souveraineté n'est pas susceptible
d'appropriation privative, aucune partie du peuple, aucun individu ou organe
au sein de l’Etat ne peut s’en attribuer le monopole. Seul l’Etat en détient
l’exclusivité. Elle a, en outre, un caractère unique et indivisible. La
souveraineté est une et indivisible35: elle appartient à la nation toute entière ;
aucune section du peuple, aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice".

V. Non susceptible d’appropriation


Elle ne peut devenir pour qui que ce soit, un objet
d’appropriation. L'Etat est le seul titulaire légitime de la souveraineté Il
subsiste encore cette conséquence qu'en France aucun organe étatique n'est, à
proprement parler souverain : le peuple n'est pas maître de puissance
souveraine, car il ne fait qu'élire ses représentants ; le parlement ne l'est pas
davantage, bien qu'il soit incontestablement l'organe suprême car il n'est
composé que des membres relativement éphémères… mais précisément le but
de cette combinaison constitutionnelle est d'empêcher que l'un quelconque
des éléments composant cet organe complexe puisse acquérir une maîtrise
complète et se rendre à lui seul souverain.

35
Raymond CARRE de MALBERG, Introduction générale à l’étude de État, T.I, Paris, 1945, p. 33.
30

Section 2ème : DISTINCTION ENTRE SOUVERAINETE


PERMANENTE ET LA PLENITUDE DES
DROITS FONCIERS, MINIERS ET FORESTIERS

“Celui qui voudra s’en tenir au présent, à l’actuel, ne comprendra


pas l’actuel ”. Cette remarque de Michelet est pleinement justifiée à l’égard du
droit foncier congolais qui est inséparable de son histoire. Telle est la raison
pour laquelle on ne saurait distinguer la souveraineté permanente de la loi
dite, BAKAJIKA, sans évoquer l’évolution du régime foncier36 congolais : avant
l’E.I.C., sous l’E.I.C., pendant la période coloniale et post coloniale.

§ 1. EVOLUTION DU REGIME FONCIER CONGOLAIS.


I. Période du régime foncier coloniale.
Cette évolution du régime foncier congolais sera analysée à
travers quatre périodes : 1. Le régime foncier coutumier (avant l’E.I.C.), 2.
Sous l’E.I.C., 3. Sous le Congo Belge, 4. Et du Zaïre.

I.1. Le régime foncier de l’Etat Indépendant du Congo


Le professeur S. Mugangu écrit, à propos de l’occupation
européenne du sol africain avant 1876, que certaines théories de droit
international antérieur au XVIIIe siècle considérait l’Afrique, terre inconnue
comme une res nullius. S’ y installait qui voulait sans qu’aucun titre juridique
soit nécessaire. Les premiers établissements portugais sur les deux faces du
continent africain s'étant probablement constitués ainsi37.

Au jour même de la notification aux puissances de la


constitution de l’E.I.C., l’administrateur général au Congo prit une ordonnance
relative à l’occupation des terres à travers tout le nouveau territoire.

36
Mbemba MULOPO M., “ Nouveau Régime foncier Zaïrois et l’expropriation pour cause d’utilité publique ”,in
Annales de la faculté de Droit, UNIKIN, 1974.
37
Séverin MUGANGU M., op. cit., p. 37.
31

En effet par cette ordonnance l’administrateur général a voulu


marquer d’une part une rupture entre l’ancien et le nouveau régime en
ordonnant qu’à partir de la présente proclamation, aucun contrat ni
convention passés avec des indigènes pour l’occupation à un titre quelconque
des parties du sol “ ne sera reconnu par le gouvernement et ne sera protégé
par lui ”. Les droits ne pouvant naître qu’en se conformant aux règles du
nouvel Etat38.

Si l’objet du premier acte fut de cristalliser les droits acquis à


l’époque antérieure au 1er juillet 1885, ce même acte attribue à l’Etat toutes
les terres vacantes et interdit leur occupation sans titre. Ainsi, pour le Pr.
Kalambay, dans le premier temps l’E.I.C. reconnut trois sortes de terres :
a. les terres occupées par les autochtones et dont le régime fut soumis à la
coutume.
b. Les terres en possession de non indigènes. En effet, avant la constitution
de l’E.I.C., des non-indignes hollandais, portugais et anglais occupaient
le sol en vertu des contrats passés avec des indigènes : ces contrats
furent reconnus valables en exécution du décret du 22 août 1885 et
ces terres furent enregistrées et soumises à la législation de l’ Etat.
c. Tout le reste des terres forma le domaine de l’Etat et une partie
constitua le domaine privé. Ce reste c’était les terres vacantes.

Si les non indigènes avaient, à partir de cette ordonnance la


faculté de disposer de leur propriété foncière entre vifs ou pour cause de
mort et entre eux, ils ne voulaient plus acquérir un quelconque droit réel ni
sur les terres appartenant aux communautés traditionnelles, ni sur celles
faisant partie du domaine de l’État sans autorisation de celui-ci. Par cette
disposition, l’Etat se voulait être à même de contrôler toute l’occupation du
sol sur l’ensemble de son territoire.

Mais les terres occupées par les indigènes furent réduites ; l’Etat
s’appropria de toutes les parties de terres qu’ils n’exploitaient pas, dans un

38
Gaston Kalambay, Régime foncier et immobilier, PUZ, Kinshasa, 1989, pp. 5 à 25.
32

but commercial. Le gouverneur général en exécution du décret du 5 décembre


1892, avait pris un arrêté invitant les commissaires des districts et les chefs
d’expéditions à délimiter les droits des indigènes sur les terres occupées par
eux (…) c’est à dire délimitées en fait à des portions de terres habitées des
droits des indigènes ; “ ce n’est pas un usufruit, une propriété mais un droit
d’occupation ”39.

Dans le droit dont la Belgique a doté son ancienne colonie, le


droit consacré à l’amélioration des conditions des vies des autochtones est
relativement mince par rapport aux droits économiques (…), le droit colonial
n’étant pas un droit de développement40 ; la théorie des biens vacants fut
utilisée comme instrument de la politique du gouvernement colonial pour
mieux exploiter les ressources du Congo (comme dans tous les autres pays
colonisés). Et l’Etat entra en conflit avec les sociétés commerciales dans le
premier temps mais la solution de ce conflit fut réalisée au détriment de la
population. La non observation des intérêts de chaque groupe fut en fait la
cause de la chute de l’E.I.C.

En conclusion, comme nous venons de le voir, on ne peut pas parler


de la souveraineté permanente sous l’E.I.C., pour plusieurs raisons,
notamment :
1°Ici, le souverain c’est le roi et non l’Etat. L’E.I.C. est une propriété privée, un
bien propre du roi, le seul souverain. Il ne devait en rendre les comptes à
personne.
2°Les droits souverains de la population prônés par l’art. 9, étaient méprisés,
méconnus au profit des intérêts du roi. Cela fut d’ailleurs la cause de la chute
de l’E.I.C. : les intérêts de la population n’étaient pas pris en compte.
3°Rien n’était fait pour l’intérêt de la population ou pour le développement du
pays; toutes les activités économiques et les revenus tirés de leur contrôle
étaient versés dans le compte du roi. Ce qui est pratiquement contraire au
principe de la souveraineté permanente, selon l’esprit de la résolution 1803,
qui place l’intérêt de la population au premier rang.

39
Gaston KALAMBAY, op. cit., p. 25.
40
Idem, p. 27.
33

Toutes ces raisons ci-haut évoquées prouvent à suffisance que la notion de


souveraineté permanente ne saurait être envisagée ici.

I.2. Le régime foncier du Congo – Belge


Dans le traité de cession du 18 novembre 1907 la Belgique
réitère sa volonté de pouvoir respecter les droits acquis parce que “ sa
majesté le Roi souverain déclare céder à la Belgique la souveraineté des
territoires composant l’E.I.C., tous les droits et obligations qui y sont attachés,
l'Etat belge déclare accepter cette cession et faire sienne les obligations de
l’E.I.C. (…), et s’engage à respecter les conditions au Congo, ainsi que des
droits acquis légalement reconnus à des tiers indigènes et non indigènes ”41.

Par rapport au principe de la souveraineté permanente, ici non


plus on ne saurait l’évoquer pour la simple et belle raison que “ souveraineté ”
est inconciliable à la colonisation. Ajoutons aussi le fait que la cession de la
souveraineté de l’E.I.C. s’est effectuée sans consultation populaire, moins
encore consentement du peuple congolais, tel que l’exige l’art. 214 de la
constitution ; ce qui est également contraire à la charte des Nations Unies, et
aux autres résolutions de l’ONU. Sous cette période, trois textes ont régi le
domaine foncier du Congo qu’il convient de rappeler dans les lignes qui
suivent :

2.1. La charte coloniale (loi) du 18 octobre 1908)


L’article 5 de la charte coloniale assigne au gouvernement
(colonial) entre autre mission l’amélioration des conditions matérielles
d’existence (…) et le développement de la propriété. Et l’art. 15 de la même
charte traite des règles relatives aux diverses sortes de concessions ; toute
la politique coloniale trouvant sa source dans cet article qui constitue le
régime provisoire en matière de concession et de cession des biens
domaniaux. Lacunaire, entre autres reproches qu’on lui fit, le “ rapport
annuel ” de 1922 préconise une nouvelle modification de l’art. 15 de la charte
coloniale de manière à limiter la totalisation.

41
Art. 7 du traité du 18 novembre 1907 relatif à la cession de l’EIC à la Belgique.
34

Rappelons aussi que cette cession et ces concessions se faisaient selon la


volonté du législateur belge plutôt que par celle du peuple congolais.

2.2. Le décret du 20 juillet 1907 sur l’emphytéose et l’usufruit


Ce décret vint organiser ces deux droits réels énumérés à
l'art.1eralinéa 2ème du décret du 31 juillet 1912, parce que d’abord bien
organisé, l’emphytéose peut suffire dans la plupart des cas à assurer la mise
en valeur des terres domaniales incultes ; il ne sera plus nécessaire de
recourir toujours et nécessairement au système des grandes concessions en
pleine propriété. Ce serait une faute que la colonie continuât de se dépouiller
définitivement des terres qui lui appartiennent comme bien sans maître, et ne
conservât de son immense domaine qu’une faible portion pour les temps à
venir.
Dans le système de l’emphytéose, dont la durée est
essentiellement à trois générations, la colonie retrouvera un jour ses terres
avec une valeur considérable et sans y avoir fait aucune mise de fonds42.

Ensuite, (…) “ quant à la matière de la superficie, il convient de la


régler sans retard, afin d’apporter au principe de la cession consacrée en
termes absolus. L’organisation de la superficie sera particulièrement utile
dans la colonie pour la concession d’exploitation des forêts et des autres
produits naturels du sol ”.

2.3. Le décret du 31 mars 1934


Le travail de délimitation des terres indigènes, par son coût et
son inutilité fut condamné en 1927. Mais la colonisation exigeait que l’ Etat
colonie continue à accorder des concessions et cessions avec la garantie à
leurs titulaires de ne pas être inquiétés dans l’exercice de leurs droits. Dès
lors une procédure nouvelle était nécessaire ; le législateur de 1934
subordonna à une enquête toute demande de cession ou de concession.

42
Rapport du conseil colonial cité par Gaston Kalambay, op. cit. p. 123.
35

Ce décret du 31 mai 1934 permit par un texte légal de


renoncer officiellement à la délimitation systématique des terres indigènes, et
indirectement de déterminer les terres vacantes, car l’enquête ne devra
désormais s’effectuer qu’en cas de demande de cession ou de concession
des terres rurales.

2.4. Les pouvoirs concédants


L’article 15 de la charte coloniale était en principe applicable à
tout le domaine privé appartenant à la colonie. Or pendant cette période
coloniale, pour le territoire colonial Belge on dénombre quatre pouvoirs
concédants :
- le Congo –Belge
- le comité spécial du Katanga (C.S.K.)
- la compagnie de chemins de fer du Congo supérieur aux Grands Lacs
africain (CFL).
- Comité national du Kivu (C.N.K.I.).

Chacun de ces pouvoirs concédants avait une zone dans laquelle


il avait un droit de céder ou de concéder une portion des terres. Et à ce
propos, les terres qui furent concédées n’ étaient pas vacantes mais bien
occupées par les indigènes. A titre d’exemple, l’administration faussa les
enquêtes pour faire entrer les terres dans le domaine du C.N.K.I. Le caractère
indigène ou domanial d’une terre établi par un procès verbal dressé par
l’administrateur ou même un agent territorial, lequel ne faisait l’objet
d’aucun contrôle.

Mais malgré l’existence des divers pouvoirs concédant, nous


pouvons dire que l’article 15 de la charte coloniale a été appliqué sur
tout le territoire colonial d’une part et d’autre part les pouvoirs concédant
ont disparu à la veille de l’indépendance. Au 30 juin 1960, seul l’Etat
congolais était l’unique propriétaire de tout le domaine privé et pouvait en
disposer librement.
36

II. Période du régime foncier post-coloniale


Pour Kalambay, le régime foncier pendant cette période post-
coloniale a connu deux phases fortement caractérisées.

En effet, dans la première phase qui se situe dans la première


décade de l’indépendance, le régime foncier est dominé par la conception du
droit colonial car le législateur de cette période, tout en recherchant
l’indépendance économique, a le souci permanent de maintenir ces textes
légaux antérieurs à l’indépendance.

La deuxième phase débute avec la décennie connue. En effet,


dans la loi fondamentale (décret du 19 juin 1960), on remarque des
positions tranchées du législateur ; positons qui aboutissent à la rupture avec
l’ancien régime foncier ; laquelle rupture étant consacrée par la loi du 20
juillet 1973.

II.1. La loi BAKAJIKA (1ère décade de l’indépendance)


La constitution du 1er août 1964 invitait le législateur à régler
souverainement par la loi nationale le régime juridique des cessions et
concessions foncières faites avant le 30 juin 1960.

Et l’ordonnance – loi n° 66/343 du 7 juin 1966 communément


appelée loi BAKAJIKA, assurait à la RDC la plénitude de ses droits de propriété
sur son domaine et la pleine souveraineté dans la concession des droits
fonciers forestiers et miniers sur toute l’étendu de son territoire, (…) tous les
textes législatifs antérieurs ayant pour objet l’exploitation, la gestion du sol et
du sous-sol congolais et qui sont contraires à l’esprit de l’ordonnance loi
précitée étaient abrogées. Dans l’exposé des motifs, il est dit que “ la
souveraineté de notre pays s’accommode mal des privilèges exorbitants
concédés par la législation coloniale ” et le Congo doit pouvoir exiger la
plénitude de ses droits de propriété, de ses pouvoirs concédant… il doit
disposer librement de son patrimoine ”.
37

Cette ordonnance43 prise en vertu de l’article 43 alinéa 3 de la


constitution de 1964 annule toutes les cessions et concessions accordées
successivement par l’E.I.C., le Congo Belge, le CSK, le CNKI et la CFL.

La loi BAKAJIKA voulait constituer pour l’Etat congolais une loi


de régulation de cession ou de concession acquises avant l’indépendance.
Mais, à part la remise en question de cessions et de concessions accordées
avant le 30 juin 1960 n’a pas porté atteinte à la conception du droit foncier
colonial.

II.2. Portée de la loi BAKAJIKA


Cette loi avait 3 articles dont :
L’art.1er stipule : la R.D.C. reprend la pleine et libre disposition de tous ses
droits fonciers, forestiers, et miniers concédés ou cédés avant le 30 /06/1960
en propriété ou en participation à des tiers, personnes morales ou physiques.
L’art.2ème renchérit : “ la R.D.C. procédera souverainement à la répartition des
droits d’exploitation ou de gestion de ses ressources naturelles forestières et
minières ”
L’art.3ème : “ tous les textes législatifs ou réglementaires antérieures, ayant
pour objet : l’exploitation, la gestion du sol ou du sous sol congolais et qui sont
contraires à l’esprit de la présente ordonnance-loi sont abrogés.

Ce point sera consacré à l’étude des concepts de ‘‘plénitude des


droits fonciers’’, d’une part, et d’autre part à celui de ‘‘ de la pleine
souveraineté ’’. Après en avoir explicité la portée, on verra quelle incidence ces
deux concepts ont sur les droits cédés ou concédés sur le sol par l’autorité
coloniale.

2.1. Explication du concept « plénitude des droits fonciers »

Cette expression se trouve consacrée par l’Ordonnance–Loi n°66-


343 du 7 juin 1966, dite communément Loi BAKAJIKA44. Il dispose en son

43
Gaston KALAMBAY et Ndeshyo RURIHOSE “ Enseignement de droit et de développement” in Annales de la
Faculté de Droit, UNIKIN, 1976.
38

article 1er : « La R.D.C. reprend la pleine et libre disposition de tous ses droits
fonciers, forestiers et miniers concédés ou cédés avant le 30 juin 1960 en
propriété ou en participation à des tiers, personnes morales ou physiques ».
En d’autres mots, en perdant la propriété du sol, le propriétaire voit son droit
réel de propriété des constructions, se transformer en droit de créance sur
l’Etat. Ainsi bien, la loi dite « BAKAJIKA » n’eut-elle pu décider autrement sans
porter gravement atteinte au principe général du droit qui prescrit
l’enrichissement sans cause.

1.1. Quelle est donc la portée de cette disposition?


Dans la terminologie en usage dans les affaires foncières, le mot
cession est l’octroi d’un droit de propriété tandis que la concession se limite à
octroyer un droit de jouissance bail, emphytéose, occupation provisoire,
superficie, concession gratuite, etc.
Dans une terminologie plus générale le mot concession signifie tout
acte par lequel l’Etat consent un droit de jouissance sur son domaine, sans
distinguer entre le domaine public et le domaine privé.
Dire que l’Etat reprend la pleine et libre disposition45 de tous ses
droits fonciers …cédés avant le 30 juin, revient à dire qu’il reprendre toutes les
propriétés privées reconnues et protégées par les textes législatifs d’avant cette
date. En effet, aux termes de l’article 14, Livre II du Code Civil la propriété est
le droit de disposer d’une chose d’une manière absolue et exclusive. Le droit de
disposition constitue l’essence même du droit de propriété et les mots « pleine
et libre disposition » repris à l’article 1er de l’Ordonnance–Loi n°66-343 eussent
aussi bien pu être remplacés par les mots « pleine propriété».

1.2. Limites de la disposition

Une première limitation se pose dans le temps, sont uniquement visés


les droits cédés ou concédés avant le 30/06/1960. Il s’ensuit que les droits
fonciers valablement cédés ou concédés, après le 30/06/1960, conformément à

44
Du nom de son initiateur, le député national Isaac Gérard BAKAJIKA-KANGOMBE, auteur de la loi qui porte
son nom.
45
Gaston KALAMBAY, op.cit., pp.43 à 47.
39

l’ancienne Loi Fondamentale ou à la constitution, sont couverts par la garantie


inscrite à l’article 43 de la constitution : « Les droits de propriété, qu’ils aient
été acquis en vertu du droit coutumier ou du droit écrit, sont garantis
conformément aux lois nationales. Nul ne peut être privé de ses biens meubles
ou immeubles justement acquis en une région quelconque du territoire de la
République que pour des motifs d’intérêt général et en vertu d’une loi nationale
prévoyant le versement préalable d’une indemnité équitable ainsi que le droit
pour l’intéressé de saisir, en cas de contestation, les tribunaux de l’ordre
judicaire pour qu’ils se prononcent sur ses droits et fixent le montant de
l’indemnité ». Cette loi nationale est pour l’instant le Décret du 24 juillet 1956
sur l’expropriation pour cause d’utilité publique. L’Ordonnance-Loi n°66-343
n’eut donc pu disposer pour une époque se situant après le 30/06/1960, sans
aller à l’encontre des garanties constitutionnelles.
Une deuxième limitation résulte de l’objet sur lequel a porté la
cession ou la concession, à savoir le sol. L’Etat colonial a cédé ou concédé des
terres mais non les constructions, plantations ou autres améliorations
quelconques qui y ont été faites. La R.D.C. reprend ce qui a été cédé ou
concédé, et non ce que le concessionnaire y a incorporé. (Discussions des
théoriciens.)

Pour nous, en reprenant la propriété du sol, la R.D.C. reprend par


le fait même la propriété des constructions, plantations, etc.…qui s’y trouvent,
et ce en vertu du principe de l’accession46. Mais cela ne signifie en aucune
façon que le propriétaire évincé perd tous droits sur ces constructions. Il se
trouve en effet, dans la situation du possesseur de bonne foi, dont le cas est
ainsi prévu par l’article 24 du Code Civil II : « Lorsque les constructions
ouvrages ou plantations ont été faits par un possesseur47 de bonne foi, avec
des matériaux ou des végétaux lui appartenant, le propriétaire du fonds ne
peut en exiger la suppression ; il doit rembourser au possesseur, soit la valeur
des matériaux ou des végétaux et prix de mains d’œuvre, soit la plus value qui
en est résultée pour le fonds ».

46
Cfr : article 22 du Code Civil congolais, Livre II
47
Gaston KALAMBAY, op.cit. p.44.
40

2.2. Explication du concept ‘‘ pleine souveraineté ’’

S’agissant du concept « pleine souveraineté dans la concession et


la cession des droits fonciers, forestiers, et miniers sur toute l’étendue de son
territoire » dont il est question ici, c’est l’article 3 de la loi n° 66-343 du
7/06/1966, dite Loi BAKAJIKA qui le consacre, à l’instar du concept
précédemment étudié.
Il dispose : « la RDC procédera souverainement à la répartition des droits
d’exploitation ou de gestion de ses ressources naturelles, forestière, et
minières ».
L’idée que voulait exprimer le législateur de cette loi est de
concrétiser le vœu de rompre avec la main mise étrangère dans la gestion du
patrimoine foncier, minier et forestier congolais. Il faut mettre fin à l’ingérence
de la main étrangère, car il n’ y a pas d’indépendance politique sans
indépendance économique. Cette fois-ci, ce sont les congolais eux-mêmes et
non les étrangers (colonisateur) qui vont décider de la gestion des ressources
situées sur le domaine de l’Etat. En effet, il a été démontré plus haut que l’Etat
n’était pas maître de son sol, certaines puissances gèrent à leur profit et au
détriment de la population, l’essentiel de notre potentiel économique. Le
gouvernement colonial, sans l’aval du peuple congolais distribua aux colons,
comme bon lui semble, des terres sous formes de concessions et de cessions.
Pire encore, ils passèrent un contrat d’exploitation qui devait, suivant les
documents officiels consultés, prendre fin en l’an 2300, leur donnant la totale
et entière liberté d’administrer ces terres, comme si la RDC était incapable de
s’autodéterminer, et donc de se diriger seul, car il est un Etat souverain .

Bref, comme il est dit dans l’exposé des motifs, la souveraineté de


notre pays s’accommode mal avec les prérogatives exorbitantes concédées par
la législation coloniale aux intérêts étrangers, qui font fi de nos aspirations les
plus légitimes. A notre humble avis, la ‘‘pleine souveraineté’’, implique aussi
l’indépendance économique qui signifie ainsi, que les grandes décisions qui
concernent l’activité économique soient prises au Congo et en fonction des
options déterminées par le Gouvernement. C’est pourquoi il faudrait veiller à
41

une large participation des congolais et du gouvernement à la gestion des


activités économiques exercées jusqu’ à cette époque-là, par les étrangers.
D’où la reprise offensive de droits des congolais sur les richesses de leur sol et
sous-sol aux termes de la loi BAKAJIKA, nous parait mieux indiquée pour
atteindre ce résultat.

2.3. Incidences de ces deux concepts sur les droits cédés ou


concédés par l’autorité coloniale

Les personnes physiques ou morales visées à l’article1er


pourront poursuivre leurs activités jusqu’à la notification de la décision par les
ministres des terres, mines et énergie et de l’agriculture comme prévu à l’article
4.

L’Ordonnance d’exécution invitait tous les bénéficiaires de


cessions ou de concessions à introduire des nouvelles demandes de cessions
ou de concessions dans un délai déterminé. Le dossier de la demande devrait
contenir les renseignements susceptibles de permettre aux autorités
compétentes de juger des conditions présentes d’exploitation48 des concessions
ainsi que les objectifs d’avenir des exploitants. Pour la réattribution des
concessions à leurs anciens titulaires, les autorités dont il est question ci-haut
devaient tenir compte de la mise en valeur suivant que le terrain était situé
dans la zone urbaine ou dans la zone rurale soumise à un plan rural
d’aménagement.
En résumé, les critères de l’appréciation de la mise en valeur étaient ceux qui
étaient prévus par l’article 30 de l’arrêté ministériel du 25/02/1943.

De l’examen du dossier, trois solutions étaient possibles : ou bien


la mise en valeur est prévue par les critères d’évaluation ; dans ce cas, il y a
réattribution du terrain, ou bien, la mise en valeur est partielle ; dans ce cas,
l’Etat reprend la partie non mise en valeur, ou bien la mise en valeur est
insuffisante ou nulle, l’Etat reprend tout le terrain. C’est ce qu’aussi semble

48
Gaston KALAMBAY, op.cit.p.47.
42

nous dire dans ses commentaires, M. HERBOTS : « il semble qu’il ne faut y


avoir qu’une faculté : l’Etat n’est pas obligé de redevenir pleinement
propriétaire. Il ne fera usage de cette faculté que si le cessionnaire ou le
concessionnaire n’a pas usé de son droit dans l’intérêt du pays (ainsi s’il n’a
fait que conserver les terres dans un but spéculatif) ou s’il a abandonné son
bien ».
. Les textes disent que l’Etat reprend la pleine et libre disposition de
tous ses droits fonciers, forestiers, et miniers concédés ou cédés avant le
30/06/1960. En d’autres termes, l’Etat reprend ce qui a été cédé ou concédé
par la Colonie, c'est-à-dire le sol. Quel est, dès lors, le sort des constructions,
plantations ou autres améliorations quelconques faites par le cessionnaire ou
le concessionnaire ?

Le problème ne se pose pas quand il y a réattribution intégrale


du terrain cédé ou concédé. Au contraire, il se pose dans d’autres cas. En
reprenant la propriété du sol, en tout ou en partie, l’Etat devient, en vertu du
principe de l’accession immobilière, propriétaire de tout ce qui a été incorporé
au sol repris et l’Etat a l’obligation dans ce cas d’indemniser le cessionnaire
ou le concessionnaire qui doit être considéré comme un possesseur de bonne
foi construisant sur un terrain appartenant à autrui.

Si l’on observe la superficie totale des terres cédés et concédés


au 31/12/1959 à celle des terres dont la cession ou la concession a été
confirmée ou non dans le Moniteur congolais, on constate que la superficie de
1959 est de loin supérieure au total des droits confirmés ou infirmés. Nous
pensons avec le professeur Gaston KALAMBAY, que l’inefficacité de
l’application de la Loi BAKAJIKA résidait dans le manque de formation des
conservateurs des titres fonciers et dans la perte des documents pouvant
servir de pièces de contrôle des cessions et des concessions.

On peut en conclure que la loi BAKAJIKA voulait constituer pour


l’Etat une loi de régulation de cessions ou de concessions acquises avant
l’indépendance par le nouvel Etat. Par cette opération, si la loi BAKAJIKA avait
été bien appliquée, elle aurait permis à l’Etat d’effectuer un inventaire
43

complet des terres cédées et concédés, de connaître leur superficie, leur


destination, et de constater, sur base des doubles des certificats
d’enregistrements gardés dans les conservations des titres fonciers, celles qui
ont été abandonnés et qui, par conséquent, retourneraient à l’Etat. A part la
mise en question des cessions et concessions accordées avant le 30/06/1960,
la loi BAKAJIKA n’a pas porté atteinte à la conception du droit foncier colonial.

§ 2. Comparaison : Loi BAKAJIKA face à la Souveraineté permanente


La loi BAKAJIKA présente autant de ressemblances que des
dissemblances avec le principe de la souveraineté permanente. Il suffit de lire
son exposé de motif et d’en comprendre la ratio legis, pour s’en convaincre.
Examinons tout d’abord les ressemblances (3.1.) par la suite la dissemblance
(3.2.).

I. Ressemblance
La loi BAKAJIKA constitue un mécanisme49 de contrôle du
principe de la souveraineté permanente. On serait même amené à affirmer
qu’elle est une application du principe de la souveraineté permanente.

Chronologiquement, il n’est pas douteux de dire que les idées


tiers-mondistes de ce temps là, qui ont conduit l’ONU à proclamer ce principe
aient eu une incidence50 positive sur le législateur de la loi BAKAJIKA.
Voici leurs traits communs:
- Non seulement la ratio legis est la même, mais aussi on y retrouve beaucoup
des termes et d’idées de la résolution 1803.
- Pris pour des raisons d’indépendance économique contre la main mise
étrangère dans l’économie de du pays, leur contexte d’élaboration paraît être le
même : partout c’est la lutte contre l’ingérence étrangère dans l’économie du
pays qui est au centre de la philosophie de ces deux textes.
- Mais aussi le contexte est le même partout. En effet, sous la loi BAKAJIKA,
on venait de sortir d’un contexte de guerre, où les richesses du pays sont

49
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p.238.
50
Résolution 1803 et résolution 3281.
44

gelées par les étrangers, et la population n’y trouvait pas son compte. Il fallait
donc faire en sorte qu’elle puisse jouir de ses richesses. Sous l’art.9 de la
constitution, on venait d’un contexte de la guerre d’agression causée par la
convoitise des richesses du pays, par les pays puissants en complicité avec les
pays voisins, qui ont pillés les richesses et ressources naturelles du pays. Les
richesses du pays profitent plus aux étrangers qu’à la population qui croupit
dans la misère. Pour ce faire, il faut protéger, en temps de paix comme en
temps de guerre, les richesses et ressources du pays contre les agresseurs
étrangers, par un mécanisme juridique international et national, qu’est la
souveraineté permanente.
- Les deux poursuivent le but d’améliorer les conditions de vie de la population
et l’intérêt du développement du pays titulaire de l’exercice de la souveraineté,
la R.D.C. en l’occurrence ici.
- La loi BAKAJIKA a procédée à l’annulation des cessions et concessions de
ceux qui abusaient de leur propriété au détriment de l’Etat. Elle a donc
consistée en une radicalisation, qui est une technique apparentée à la
nationalisation51 ; or la nationalisation elle-même est un mécanisme de
contrôle institué par le principe de la souveraineté permanente. C’est même
une application directe de ce principe, bref, un mécanisme de contrôle
institué par ce principe.

Toutes fois, cette ressemblance n’est pas à exagérer, car il


subsistent quelques différences entre ces deux notions que nous allons voir
dans les lignes qui suivent.

II. Dissemblance
- L’expression “ souveraineté ” employée par la loi BAKAJIKA n’est pas collée à
l’épithète permanente qu’on retrouve dans la résolution 1803.
- La loi BAKAJIKA n’était pas consacrée par la constitution comme c’est le cas
de l’art.9, mais plutôt par une loi ordinaire52. C’est l’Ordonnance-loi du 7 juin
1966.

51
Patrick DAILLIER et Alain PELLET, op. cit., p. 965.
52
C’est le député BAKAJIKA qui l’avait proposée, mais elle fut mal appliquée par un fonctionnaire peu outillé,
d’où elle fut abrogée par la loi de 1971. Nous sommes ici à une période vers la rupture du régime colonial.
45

- Elle ne traite que de la propriété foncière et donc à ce titre elle fait référence à
l’espace terrestre, sans faire allusion à l’espace maritime, aérien ou au plateau
continental comme c’est le cas avec l’art.9. Il s’agit-là d’une innovation
importante apportée par l’art.9 de ladite constitution.
- Par rapport à la précision sur la propriété foncière, le législateur à l’art. 9 est
resté silencieux, il ne s’est pas prononcé et son silence est à la base de
plusieurs controverses ; tandis que la loi BAKAJIKA est claire et assure à la
R.D.C. la plénitude de ses droits de propriété sur son domaine et la pleine
souveraineté dans la concession des droits fonciers, forestiers et miniers sur
toute l’étendue de son territoire.

Le seul problème que n’a pas résolu la loi BAKAJIKA consiste à


ne pas préciser que cette propriété de l’Etat53 sur son sol était inaliénable,
exclusive et imprescriptible54. C’est ce qu’a fait la loi de 1971 que nous allons
examiner dans le point suivant.

La mauvaise application de cette loi par un personnel non


outillé, poussera à son abrogation.

III. La rupture avec le régime colonial sous la loi BAKAJIKA renforcée.


La constitution ci haut évoquée connut plusieurs révisions dont
celle du 31 mars 1971, au cours de laquelle l’assemblée nationale adopta une
nouvelle disposition à insérer à la constitution et dont l’article 14 bis était
libellé comme suit : “ le sol et le sous-sol zaïrois ainsi que leur produits
naturels appartiennent à l’Etat. Et sur la base de ce nouveau texte
constitutionnel, l’Assemblée Nationale vota une loi abrogeant la loi dite
BAKAJIKA.
Un comité de rédaction fut institué dont la mission fut de
traduire les options nouvelles en texte de droit positif et la proposition des lois
de 399 articles fut adoptée le 9 juin 1973, en séance plénière55 du conseil
législatif national et fut promulguée le 20 juillet 1973 dont l’article 53 consacra

53
Cfr. Article 53 de la loi du 20/07/73.
54
R. Carré de MALBERG, op. cit., p. 32.
55
Gaston KALAMBAY L, op. cit., p.65.
46

l’appropriation du sol et du sous-sol zaïrois à l’Etat en stipulant : “ le sol est la


propriété exclusive, inaliénable.

L’expression “ pleine souveraineté ” utilisée par la loi BAKAJIKA


prouve à suffisance que la R.D.C. entendait déjà exercer sa souveraineté
permanente, du moins théoriquement à cette époque ; car la R.D.C. était déjà
devenue indépendante. La ratio legis du législateur de cette loi est caractérisée
par le souci d’indépendance économique. Comme c’est le cas pour l’art.9 avec
le principe de la souveraineté permanente qui y est consacré.
47

Section 3ème. DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE FACE A


L’ARTICLE 53 DE LA LOI DU 20/07/1973

La question fondamentale à laquelle nous allons répondre ici,


consiste à savoir, si l’article 9, abroge-t-il ou pas l’article 53 de la loi du
20/07/73. S’agit-il d’une avancée ou d’un recul ? Quelle est sa spécificité par
rapport à d’autres textes légaux déjà connus ? Voilà décrit l’objet de cette
section.

Il est à noter que loi du 20 juillet 1973, marque la rupture


définitive avec le régime colonial et est intervenue à un moment où se
manifestent les premiers signes du déclin de l’Etat. Le volontarisme de la loi
BAKAJIKA et des actes législatifs et réglementaires pris dans le sillage de celle-
ci n’opérera en réalité qu’à l’égard des exploitants étrangers installés par la
colonie. Pour sa part, l’art 9 de la constitution est intervenu au moment où la
R.D.C. venait de la guerre d’agression qui a balkanisée le pays et occasionnée
le pillage de ses richesses et ses ressources naturelles.

Quelle est la nécessité et la raison d’être de ce changement ?


Avant d’y arriver, il convient de rappeler que la présente loi a été élaborée
conformément aux arts. 14,14 bis et 46 de la constitution, aux directives et
aux options fixées par le bureau politique. Ainsi, en attribuant à l’Etat le sol
comme sa propriété exclusive, inaliénable et en abolissant définitivement
l’appropriation privative du sol et du sous-sol congolais, ce qui est contraire à
l’article 34 de l’actuelle constitution, le nouveau régime foncier et immobilier a
cessé de poursuivre l’évolution du régime foncier colonial en faisant de l’Etat le
seul et unique propriétaire foncier.

Le 1er paragraphe de l’exposé des motifs de la loi foncière nous


donne à la fois le cadre constitutionnel et philosophique dans lequel cette loi a
été élaborée. Si les arts.14 et 14 bis sont à la base de la loi foncière, il est utile
de rappeler que ces deux articles ont été maintenus lors de la révision de la
constitution en date du 15/8/1974. En effet, l’art.14bis est devenue dans la
48

constitution révisée l’art.11 et placé dans les titres 1er traitant “ du territoire et
de la souveraineté de la République ” ; tandis que l’art.14 devenu art.22 est
resté dans le titre 2 traitant “ des droits fondamentaux et devoirs du citoyens ”.
Le déplacement de l’art .14 bis du Titre 2 au Titre 1er est plein de signification
dans le cadre de la présente analyse, car la R.D.C. a en même temps sur le sol
congolais : et les droits souverains territoriaux et les droits de propriétés.
L’art.46 de la constitution du 24/7/1967 fixe le domaine de la loi. En effet,
l’alinéa 2 de cet article dispose : ‘‘ la loi fixe les principes fondamentaux du
régime de la propriété, des droits et des obligations civiles et commerciales ”.
Ce rappel permettra de comprendre, d’analyser et d’interpréter l’art.53 de la loi
du 20/07/1973, en comparaison avec l’art.9 de la constitution de la 3ème
République et d’en tirer les conséquences juridiques qui s’imposent.

Toutefois, il convient d’avouer que cette différence n’est pas aisée


à établir, en raison de l’ambiguïté du terme “ souveraineté ” qui n’implique pas
forcément la propriété, et d’autre part ne la prohibe pas.

§ I. ETENDUE DU DROIT DE LA PROPRIETE DE L’ETAT SUR LE SOL


La loi du 20 juillet 1973 répondait (…) au souci de voir le conseil
législatif national “ terminer l’élaboration de la loi en fixant les modalités du
régime foncier et minier ” et a été élaboré aussi conformément aux options
fixées (par le bureau politique du MPR) et dont l’impact est tel qu’il a paru
opportun de mettre d’ores et déjà les dispositions du Code Civil livre II en
harmonie avec les options définies par les instances supérieures du Parti. Par
ailleurs, le droit de propriété dans son acception générale a été maintenu. Bien
qu’il y ait lieu de considérer que son champ d’application ait été réduit56.

Selon les prescrits de l’article 6 de la loi du 20 juillet 1973, “ le


sol et le sous-sol sont immeubles par nature ”, lesquels font partie soit du
domaine public ou soit du domaine privé de l’Etat. Par voie de conséquence,
les immeubles par nature, notamment le sol, appartiennent soit au domaine
public, soit au domaine privé de l’Etat. Le droit de propriété de l’Etat congolais

56
Préambule de la loi du 20 juillet 1973.
49

sur son sol du domaine public lui donne droit à tout ce qu’il produit et s’étend
à tout ce qui s’y unit et s’y incorpore soit naturellement, soit artificiellement
(sans préjudice aux droits résultant des autorisations de voiries et des permis
de stationnement).

De même, le droit de propriété de l’Etat congolais sur le sol du


domaine privé lui donne aussi droit à tout ce qu’il produit et s’étend à tout ce
qui s’y unit et s’y incorpore soit naturellement, soit artificiellement qu’il n’est
pas régulièrement concédé.

En matière foncière, l’appropriation privative du sol a été abolie,


le sol étant devenu propriété inaliénable de l’Etat. (Dérogation à l’article 34 de
la const.) Et le droit de propriété tel qu’ il est défini ne peut plus porter que sur
les immeubles par nature. Les autres droits réels ne peuvent plus s’analyser
comme des démembrements de la propriété mais des droits ayant leur
existence propre sans référence au droit de propriété dont ils étaient des
simples accessoires.

Cette option ci-haut évoquée a exigée la suppression de l’article


16 du décret de 1912 qui posait en présomption légale le rapport du principal à
l’accessoire entre le sol et les biens incorporés. Cette présomption qui n’était
plus que relative après le décret du 28 mars 1949 qui admettait la propriété
des immeubles envisagée séparément du sol, doit disparaître dans les
nouveaux textes.

Néanmoins, le principe de l’accession relative reste maintenu


dans l’article 21, étant entendu que le terme “ immobilier ” ne concerne que les
immeubles par destination à l’exclusion des immeubles par nature ; tant il est
vrai que dans la deuxième partie de la loi, il est fait une distinction entre les
droits immobiliers qui sont ceux qui portent sur des immeubles autres que les
immeubles par nature. Si les règles posées dans le régime immobilier sont
sommaires et concernent uniquement les droits immobiliers de l’Etat, c’est
pour assurer à la gestion de ces droits, la souplesse nécessaire qu’exige la
mutation rapide de la valeur de ces droits essentiellement économique.
50

Toutefois, les droits immobiliers des particuliers sont entre autre


régis par les règles posées dans le régime général des biens. Comme la
propriété du sol emporte celle du dessous et du dessus, dans toute la
profondeur et la hauteur utiles à son exercice, l’Etat peut aussi s’opposer à ce
que sa propriété soit surplombée et a le droit de se faire justice lui-même en
démolissant ou en coupant tout ce qui empiète sur son domaine. Il peut aussi
faire des fouilles et les fruits lui reviennent.

Mais, le sous-sol (mines auxquels sont assimilés les gisements


de pétrole) font l’objet d’un régime spécial distinct de celui du droit foncier et
immobilier.
La construction du dogme selon lequel, l’Etat est à même de
bien gérer en bon père de famille les espaces et les ressources pour l’intérêt de
tous57 se traduit par l’article 53 de la loi du 20 juillet 1973 qui s’apparente
ainsi étroitement au principe de la souveraineté permanente.

Plutôt que de libéraliser ou de privatiser le sol pour que les


producteurs puissent investir, l’essentiel est qu’ils disposent des droits
reconnus et stables. Cette sécurisation pouvant passer par des multiples
formes notamment les concessions foncières qui sont les seuls droits fonciers
reconnus aux particuliers dans notre pays. Une politique de privatisation, à la
manière de l’article 34, n’a de chance de réussir que dans les contextes
spécifiques où l’individualisation des droits a déjà atteint un degré important.
D’où la nécessité d’une intervention (volontariste) de l’Etat qui doit construire
un cadre juridique et administratif qui lui convient.

§ 2. COMPARAISON
I. De prime abord, nous relevons que l’article 9 consacrant le principe
de la souveraineté permanente est plus riche, plus complet et plus exhaustif
par rapport à d’autres textes légaux et en l’occurrence l’article 53 avec lequel
nous le distinguons ici. C’est que, contrairement à l’art. 53 qui ne traite que du

57
Gaston KALAMBAY, op. cit., pp. 40 et 58.
51

sol, sous-sol, l’article 9 quant à lui traite à la fois de l’espace terrestre,


maritime, aérien, voir le plateau continental. C’est en cela qu’il est plus
exhaustif et plus complet. Il est important de noter aussi que, l’article 9 ne
supprime pas le monopole de la propriété foncière de l’État Congolais, au
contraire il le maintient et le renforce par les différents mécanismes de
contrôles institués par le principe de la souveraineté permanente. Et donc,
l’article 9 complète l’article 53, mais ne le contredit pas, il maintient l’État
comme seul et unique propriétaire du sol, sous sol, mines,…L’article 34 ne
trouve pas son application ici, car les particuliers ne peuvent pas détenir le
droit de la propriété sur le sol ou le sous-sol, quand bien même le droit à la
propriété privée est consacré. L’État lui-même ne peut pas disposer de son
droit de propriété dont il est le seul titulaire, car elle et inaliénable.

II. En outre, il convient de préciser que tout propriétaire n’est pas


souverain et inversement tout souverain n’est pas propriétaire. Dans le cas de
cet article 9, l’État est à la fois propriétaire et souverain. Pour comprendre cela,
partons de l’exemple de l’Etat avec son territoire, au sujet de la nature
juridique, du lien qui unit l’Etat à son territoire58. De quelle nature est ce droit
particulier de l’Etat sur son territoire ? Ayant pour objet une chose, le
territoire, on l’appellerait à tort droit de souveraineté (imperium), parce que la
souveraineté, qui est autorité ne peut s’exercer que sur des personnes et non
sur des choses. L’expression souveraineté territoriale renferme une
équivoque59 : toute souveraineté est personnelle ; elle n’est territoriale qu’en
tant qu’elle vise les personnes se trouvant sur l’étendue de son territoire.
Affectant le territoire même, le droit de l’Etat ne saurait donc être qu’un droit
de domaine (dominium), qui se traduira, par exemple, par le droit
d’expropriation pour cause d’utilité publique ou le droit de dévastation aux fins
de la défense nationale (théorie dite du territoire objet). Cette sorte de droit réel
éminent n’est pourtant pas un droit de propriété. Il ne se confond ni avec le
droit de l’Etat sur son domaine privé, ni même sur le domaine public. D’une
part, le droit de l’Etat sur le territoire est à la fois général et limité dans son
objet : il frappe le territoire tout entier, alors que la propriété, même publique,

58
Carré de MALBERG, op. cit., T. I, n°2 , p.3.
59
Jean DABIN, Doctrine générale de l’État, n°2, p. 28.
52

n’atteint que des parcelles déterminées du territoire ; il ne comporte pas


plénitude et exclusivité des pouvoirs, qui restent en principe au propriétaire
sous-jacent, mais seulement certaines facultés déterminées d’utilisation.

III. Une différence de nature est la troisième à établir ici, entre ces deux
concepts :
-Tout d’abord, la propriété est un concept de droit privé et relève des rapports
ou du lien juridique entre une personne et un bien ou une chose. La propriété
poursuit le but de satisfaire les intérêts privés, égoïstes, plutôt que de satisfaire
l’intérêt général. Tandis que la souveraineté est un concept de droit public, un
attribut essentiel de l’Etat.
-En outre, la propriété, en tant que droit absolu est susceptible d’appropriation
privative, elle peut avoir pour titulaire soit une personne morale, soit une
personne physique, selon les prescrits de l’article 34. Ce qui n’est pas le cas
pour la souveraineté qui n’est qu’une caractéristique, mieux un attribut de
l’Etat et qui ne peut se concevoir que dans l’Etat. Car, nous dit Carré de
Malberg, il ne peut y avoir dans un même Etat deux souverains.
-La propriété peut se démembrer, ou être fractionnée pour produire soit
l’emphytéose, la superficie, l’usufruit, la copropriété. Pour sa part ,la
souveraineté en tant que attribut essentiel de l’Etat, est une et indivisible,
LEFUR le dit mieux, en soutenant que l’unité et l’indivisibilité de la
souveraineté est liée à l’unité et à l’indivisibilité de l’Etat même, car diviser la
souveraineté revient à diviser l’Etat .
-Un autre élément de différence entre les deux articles en comparaison ici, se
révèle dans la philosophie ou l’esprit qui ont animés le législateur dans leur
élaboration. La philosophie qui domine ces deux lois, c’est la philosophie de
l’indépendance économique de la R.D.C.

En effet, dans les deux cas, c’est le souci profond de mettre fin à
l’ingérence de la main étrangère dans l’exploitation et la gestion des richesses
et des ressources économiques du pays. Il faut mettre fin à la colonisation
sous toutes ses formes et ses aspects, surtout l’aspect économique.
Car, il ne saurait exister d’indépendance politique sans indépendance
économique.
53

Pour la loi du 20/07/1973, en attribuant à l’Etat le sol et le


sous-sol, comme sa propriété inaliénable et exclusive, on a aboli par
conséquent l’appropriation privative du sol, qui est une exception à l’article 34.
Le nouveau régime foncier et immobilier60 a cessé de poursuivre l’ évolution du
régime foncier colonial qui a plus profité aux étrangers qu’aux congolais.
D’ailleurs c’est à cette conclusion que le rédacteur de l’exposé des motifs est
arrivé. Nous le citons : “ le régime foncier immobilier constitue une rupture
définitive et radicale avec le régime légal des terres de l’époque coloniale.
Rupture, mais pas refus de s’inspirer de certaines solutions spécifiques
pratiquées par le régime colonial, notamment en matière d’emphytéose.
Rupture aussi, mais en respectant, dans une mesure compatible avec l’intérêt
général, les droits acquis ”.

Quant à l’art.9, qui consacre le principe de la souveraineté


permanente, l’intention du législateur issu du contexte de guerre d’agression
qui a balkanisé le pays, consiste à mettre fin aux pillages et à l’exploitation
illégales de ses richesses et ses ressources naturelles et d’éviter la
balkanisation du pays en tout temps. Il s’est révélé impérieux, voire nécessaire
de doter le pays d’ un instrument juridique pouvant lui permettre d’assurer la
protection et le contrôle, sur son territoire, de toutes les activités économiques.
La convoitise des richesses et ressources naturelles de la R.D.C. par ses neuf
pays voisins a toujours été à la base de l’insécurité et du pillage systématique
et autres crimes économiques en R.D.C. Il s’agit d’une nouvelle forme de
priver à la R.D.C. de son indépendance économique et de le maintenir sous le
joug néocolonial, commandité par certains pays occidentaux en complicités
avec les pays voisins de la R.D.C. (Rwanda, Uganda et Burundi qui ont
systématiquement pillé le pays. Des nombreux crimes économiques ont été
commis dans tous les secteurs de la vie de l’Etat au détriment de la
population).

IV. D’autres différences se situent au niveau des caractères que les deux
concepts présentent. Il découle de l’article 53 de la loi du 20 juillet 1973 ; loi

60
Gaston KALAMBAY, op. cit., p.65.
54

portant régime général des biens, régime fonciers et immobiliers et régimes de


sûretés, que la propriété foncière est à distinguer à la fois de la propriété privée
dont est question à l’article 34, et de la propriété immobilière, et semble
énumérer tous les caractères dont est revêtue la propriété foncière.

Cette énumération étant incomplète, il nous faudra recourir,


tant à la constitution qu’aux travaux préparatoires de la loi du 20 juillet 1973
pour la compléter.
De cette opération, il ressort que le droit de propriété de l’État
est un droit universel, absolu, perpétuel et exclusif, portant sur le sol, qui est
inaliénable, imprescriptible et intransmissible. Pour sa part, la souveraineté est
aussi inaliénable, une et indivisible61, imprescriptible portant sur l’ensemble
du territoire et non seulement sur le sol.
Quel est donc le sens des caractères que chacun de ces concepts regorge ?

IV.1. Du droit universel


Par la combinaison de l’article 10 de la constitution révisée et de
l’article 53 de la loi du 20 juillet 1973, on peut déduire que le droit de propriété
de l’État congolais est universel ; et ce à partir des termes “ le sol et le sous-sol
zaïrois ” et de la place de cet article dans la constitution.

Les droits de l’État s’étendent sur toutes les terres comprises


dans les limites des frontières nationales. Toutes les terres sont désormais
sans exception soumises à l’État à titre de propriété avec cette conséquence
que la notion de terres vacantes ou sans maîtres devient sans aucun objet62.

Dans le rapport du 20 mai, on peut lire que “ le sol, le sous-sol


et leurs ressources naturelles appartiennent à l’Etat ; il n’existera donc plus
des catégories de “ terres domaniales ” opposées à celles des terres

61
On se référera ici aux caractères de la souveraineté permanente que nous avons traité au Ier chapitre, section Ière.
62
Gaston KALAMBAY, op. cit., p. 59.
55

coutumières, car toute terre vacante est désormais domaniale ”63. Par ce
caractère toute la terre du pays appartient à l’Etat et à lui tout seul64.

Quant au caractère universel de la souveraineté permanente, on


entend que ce droit confère exclusivement à l’Etat seul des pouvoirs souverains
d’exercer un contrôle permanent sur tout l’ensemble de son territoire, sans
exception. C’est à dire les espaces terrestre, maritime et aérien. Se trouvant
placée dans l’universalité nationale, elle ne saurait être localisée, par voie de
division ou de fractionnement, dans les nationaux individuellement. Elle est en
plus, à cet effet, indivisible.

IV.2. Du droit exclusif


Autant pour le droit de la souveraineté permanente que pour le
droit de la propriété inaliénable se caractère se vérifie au profit du seul Etat
Congolais.
En effet, l’article 9 qui consacre ce principe en attribue l’exercice
exclusif à l’Etat seul65. Aucune partie du peuple, aucun individu ou organe au
sein de l’Etat ne peut détenir ce droit concurremment avec l’Etat. Tant à
l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Etat, il n’existe aucun sujet de droit interne ou
international qui puisse l’exercer avec lui. Seul l’Etat congolais exerce cette
souveraineté.

De même en déclarant qu’en matière foncière, toute


appropriation individuelle du sol est abolie, le législateur consacre l’exclusivité
des droits de l’Etat sur le sol et le sous-sol. Ce qui s’oppose à l’art. 34 de la
Constitution qui consacre le droit à la propriété privée. Le droit congolais
n’admet plus comme sujet des droits à la propriété du sol ni les personnes
physiques, ni les personnes morales. L’Etat ne peut partager ses droits à titre
de copropriétaire, ni les démembrer.

63
Lwango T., op.cit, inédit, p. 60.
64
Idem, p.63.
65
Raymond CARRE de MALBERG, op. cit., p.176.
56

La loi, elle même, interdit totalement et à jamais que ce droit soit


accessible à toute personne autre que l’Etat. Dans la compréhension actuelle
de ce texte, même les personnes morales de droit public, fussent-elles des
subdivisions géographiques de l’état ne peuvent pas accéder à la propriété
foncière, elles ne peuvent accéder qu’à la concession foncière66. Ceux qui
soutiennent qu’une portion de terre de l’Etat sera vendue et donc être partagée
avec l’Etat se trouvent désarmés. Voilà donc qu’il devient inutile de continuer
avec les polémiques autour de cet article. Car en effet, il ne faut pas confondre
l’article 9 de l’article 34. Tout devient clarifié.

IV.3. Du droit absolu


Le droit de la souveraineté permanente est absolu, celui de la
propriété inaliénable et exclusive l’est également.

Le caractère absolu du droit de propriété de l’Etat congolais sur


le sol et le sous-sol, dont il est le seul titulaire, se dégage de plusieurs
dispositions de la loi du 20 juillet 1973.

En effet, en tant que propriétaire foncier, en vertu de l’article 58


de la loi précitée, l’Etat détermine la destination des terres concédées et fait
respecter cette destination pendant la durée du droit de jouissance.

L’intervention de l’Etat est prévue d’abord au stade de


concession, ensuite pendant la jouissance notamment lorsqu’il s’avère
nécessaire d’en vérifier ou d’en restaurer la régularité.

L’intervention au stade de la concession est anormale étant


donné qu’il s’agit de concéder des biens dont l’Etat à la charge et la garde. Il en
sera ainsi lorsque la non occupation et l’interruption de l’exploitation
constitutives de l’abandon sont établies ou lorsque l’intérêt général exige une
reprise des terres.

66
Thomas LWANGO, op.cit, inédit, p. 63.
57

Les droits de jouissance à terme accordés par l’Etat sont


renouvelables, cependant le renouvellement n’est pas automatique. Le titulaire
du droit (de jouissance) pourrait être astreint à des conditions nouvelles au
moment du renouvellement.

Le droit de l’Etat en tant que propriétaire foncier est absolu,


emportant pour l’état congolais, le droit de jouir et de disposer du sol et du
sous-sol conformément à la loi. Ce droit de propriété étant opposable à tous
par la volonté même du législateur, déroge aux prescrits de l’article 34 de
l’actuelle Constitution.

IV.4. De la propriété inaliénable


La souveraineté permanente de la R.D.C. qui est consacrée par
l’art. 9 est inaliénable. Tout acte, toute disposition constitutionnelle, qui
tendrait à faire acquérir personnellement la souveraineté à un homme ou à une
assemblée, serait radicalement nul, et vu comme inconciliable avec le principe
que la nation seule est souveraine. Quand encore tous les citoyens seraient à
un moment donné unanimes à consentir une transmission ou une délégation
de ce genre67, ils demeureraient impuissants à réaliser une telle aliénation.
Car, non seulement le droit de la souveraineté permanente n’appartient pas
aux citoyens eux-mêmes, et ceux-ci n’ont pas le pouvoir d’en disposer ; mais, à
bien dire, il ne réside même pas dans la collectivité indivisible qu’ils concourent
à former, à chacun des moments successifs de la vie nationale. La raison en
est que la collectivité nationale, en qui est contenu la souveraineté, n’est pas
seulement constituée par la génération présente des citoyens ; elle comprend,
d’une façon indéfinie, la succession ininterrompue des générations nationales,
présentes et futures. Il en résulte qu’en aucun moment de son histoire, la
nation ne peut être enchaînée pour l’avenir ; la génération actuelle ne peut
prétendre imposer ses volontés aux générations prochaines. Tout ceci est la
condamnation de la doctrine créée par Napoléon, qui prétendrait concilier le
césarisme avec la souveraineté nationale, en fondant l’empire sur le plébiscite
par lequel les citoyens étaient censés déléguer à l’empereur la souveraineté

67
R. Carré de MALBERG, op. cit., T. I, p.176.
58

populaire (déclaration des droits du 24/06/1793, art. 28 : “ une génération ne


peut assujettir à ses lois les générations futures”.
Le caractère d’inaliénabilité de la propriété foncière de l’Etat
congolais vient surtout de ce que le domaine foncier est collectif parce que,
comme l’écrit MALINGREAU “ qui dit bien collectif dit bien inaliénable ”68.

Subsidiairement, une conception philosophique et métaphysique tente de


justifier ce caractère d’inaliénabilité. En effet, pour cette conception, on dit que
les collectivités traditionnelles n’ont sur leur domaine que le droit d’usufruit et
que leurs ancêtres seuls ont gardé la nue-propriété ; ils ont dans leur
patrimoine des morts le droit d’aliéner ; ou parce qu’encore une assemblée
réunissant les vivants et les morts à la fois, et la descendance nécessaire pour
disposer du domaine collectif est impossible à réunir.

Mais ce caractère vient de ce que le domaine foncier a été déclaré


tel par le législateur et ce pour permettre à l’État d’avoir les mains libres dans
sa politique économique. Et en attribuant la propriété inaliénable du sol et du
sous-sol à l’État, le législateur a en effet supprimé la propriété foncière de droit
civil, le dominium et l’imperium étant confondus69.

Le sol est donc hors commerce ; il cesse d’être l’objet de vente,


de donation et d’hypothèque ; l’État ne pouvant consentir qu’un droit de
jouissance moyennant un prix qualifié de redevance ou de loyer. C’est pourquoi
le régime de la propriété foncière déroge à l’article 34 de la Constitution. Par ce
caractère, le sol congolais est donc incessible parce que le mot incessibilité est
pratiquement synonyme d’inaliénabilité70.

IV.5. Du droit imprescriptible


Le droit de la souveraineté permanente est imprescriptible, en
ce sens que la nation, qui en est seul titulaire, ne peut en être dépouillé par
l’effet d’une possession adverse, si prolongée soit-elle. Le principe est que ce

68
Gaston KALAMBAY, op. cit., p. 63.
69
Séverin MUGANGU, op- cit, p. 149.
70
Pierre GUICHO, Jacques BICHOT, Michel LEMARTIN, Dictionnaire de Droit, économie et gestion, 1ère édition,
Paris, l’Hermès, 1994, p. 376.
59

qui est aliénable est prescriptible et les choses inaliénables sont


imprescriptibles conformément à l’article 620 du code civil Livre III qui dispose
qu’ "on ne peut prescrire le domaine des choses qui ne sont point dans le
commerce ”. Le sol étant hors commerce, personne ne peut donc acquérir un
droit sur une portion par usucapion et l’État ne peut perdre son droit sur une
portion du sol par prescription extinctive. C’est ici où se situe le véritable point
de divergence entre l’article 34 d’une part et de l’autre l’article 9 et l’article 53.

Cette imprescriptibilité est absolue et permanente par la volonté


du législateur. Il en découle qu’admettre la prescriptible du droit de propriété
de l’Etat sur le sol et le sous-sol, c’est admettre indirectement qu’une personne
puisse partager avec l’Etat son droit de propriété foncière ou celui de
souveraineté permanente le cas échéant.

L’octroi et la reconnaissance des droits de jouissance par l’Etat


congolais sur son sol ne sont donc que des actes de simple tolérance. Ceux-ci
avec ceux de pure faculté, note Patrice Jourdain ne peuvent conduire à
l’usucapion ; le propriétaire n’a cessé d’exercer son droit, il l’a exercé en
donnant son accord et le bénéficiaire a agi conformément à la volonté du
titulaire du droit71, l’occupation des terres du domaine de l’Etat par les
communautés locales n’est ni constitutive de droit ni constitué en droit, les
occupants ne pouvant se vanter de l’usucapion sur ces terres72.

Le droit de propriété de l’Etat sur le sol et le sous-sol est donc


perpétuel parce qu’il a vocation de durer autant que son objet et il est exclu
que l’Etat n’ait pas exercé son droit pendant un laps de temps qui l’éteindra.

IV.6. Du droit intransmissible


Ce caractère est partagé à la fois par la souveraineté et la
propriété inaliénable, exclusive consacrée par la loi du 20/07/1973, qui les
distinguent également de l’article 34.

71
Patrice JOURDAIN, Les biens, Paris, Dalloz, 1993, p. 128.
72
Séverin MUGANGU, op. cit., p. 149.
60

En effet, l’Etat est perpétuel et identique à lui même et par


conséquent l’Etat ne peut jamais perdre son aptitude à être titulaire des droits
ou perdre son aptitude à posséder un patrimoine et l’attribut d’être souverain.
Sinon, il cesse d’être un Etat au sens du droit international et constitutionnel.
De ce fait, pour les particuliers, il est exclu d’acquérir soit à titre universel, soit
pour un particulier d’être constitué en légataire universel, soit encore
d’acquérir à titre particulier des droits de propriété foncière ou d’exercer la
souveraineté.

La loi ne fait pas seulement de l’Etat congolais le seul


propriétaire foncier à la date du 20 juillet 1973 mais aussi, elle consacre et
protège cette situation pour l’avenir et à jamais.

La propriété peut donc être triturée, limitée ou exclue, en


fonction des objectifs que les planificateurs veulent atteindre. La propriété ne
s’impose pas à eux parce qu’elle est dominée par l’intérêt général et c’est cet
intérêt général qui permet de morceler les prérogatives laissées au propriétaire
selon les souhaits des planificateurs73.

Il en est de même de la souveraineté, c’est un droit


intransmissible dans le sens où c’est un droit propre et essentiellement
étatique. En aucun cas, l’Etat ne peut transmettre sa souveraineté à une autre
personne ni morale ni physique. Si non il cesserait d’être un “ Etat ”, car il
n’est pas d’Etat sans souveraineté et cela tant pour le présent que pour
l’avenir, seul l’Etat congolais exercera sa souveraineté et ne saurait en aucun
cas la transmettre à qui que ce soit.

Pour l’Etat congolais, les caractères de sa propriété foncière par


la nature et l’importance des choses qui en font l’objet, confère au propriétaire
certains droits qui ne se trouvent pas dans la propriété classique et qui
constituent par suite des attributs spéciaux à ces genres de propriété.

73
Christian MOULY, “Place de la propriété parmi les droits de l’homme ”, in le Droit de propriété et
l’environnement, Paris, Dalloz, 1997, p. 35.
61

Section 4ème : DISTINCTION ENTRE SOUVERAINETE


PERMANENTE ET LA DOMANIALITE

Il est très embarrassant d’être exhaustif à ce propos, car la


matière à traiter est vaste. Raison pour laquelle ce travail se limitera à fixer les
idées maîtresses sur les points les plus importants qui distinguent la
souveraineté permanente de la domanialité.

§ 1. Notion
I. Définition
La domanialité est le caractère des biens composant le domaine de
l’Etat et surtout le domaine public74. Il s’agit du caractère à lui conféré par
notre système juridique. En analyse juridique, la domanialité vient de la
possibilité reconnue à la puissance publique d’avoir un patrimoine. Les biens
domaniaux sont justement les biens dont est constitué le patrimoine de l’Etat,
en ce compris les entités territoriales et les services publics. De Page les appelle
“ biens nationaux ” pour désigner “ la domanialité ” entant que construction
juridique où le droit fait intervenir sa fiction.
Pour sa part, la souveraineté se définit comme l’autorité suprême
dans les limites d’un territoire déterminé. Ainsi, l’exercice de la souveraineté
est subordonné à la possession d’un territoire qui en constitue l’assise
matérielle.

Le terme “ domaine ” est d’origine latine et provient de


“dominium”, l’espace sur lequel s’exercent des droits possessifs exprimant
l’idée de maîtrise.
On entend par le domaine de l’Etat75, l’ensemble des biens
mobiliers, immobiliers et fonciers détenus, utilisés et consommés par les
collectivités administratives. Le domaine de l’Etat qui sera l’objet d’analyse
dans le présent titre est le domaine foncier et immobilier. Il couvre tout l’espace
du territoire congolais, soit une superficie de 2.345.000Km², environ 235

74
André de LAUBADERE, Manuel de droit administratif, 10ème éd., Paris, LGDJ, 1976, p.299.
75
Gaston KALAMBAY, Domaine de l’Etat, syllabus, L1droit, 2004-2005, U.C.B., p.3 et suivants.
62

millions d’hectares, dont 227millions de terres fermes et 8 millions de terres


submergées, et ce, depuis 31/12/1971.

II. Aperçu général

Le domaine étant l’ensemble des biens et droits immobiliers et


mobiliers appartenant aux personnes publiques, nous pouvons affirmer avec
Gérard CORNU que la domanialité est le régime juridique applicable aux biens
composant le domaine. Ce terme est également employé dans
l’expression : “ domanialité publique” et pour qualifier l’ensemble des règles
spéciales aux quelles sont soumis les biens composant le domaine public :
l’affectation, l’inaliénabilité, l’insaisissabilité, et l’imprescriptibilité, sont des
modes d’utilisations que nous examinerons plus loin.

En définitive, on entend par “ domanialité publique le régime


applicable à certains des biens appartenant aux personnes publiques76, biens
constituant leur “ domaine public77” et dont le régime juridique exorbitant du
droit commun est commandé par le souci de leur assurer une protection
particulière à la fois contre les tiers et contre l’administration.

De cette ébauche faite sur la définition et l’aperçu général de la


domanialité, il nous semble maintenant nécessaire d’établir une distinction
beaucoup plus large entre souveraineté permanente et domanialité.

§ 2. Comparaison
I. Distinction entre Souveraineté permanente et domanialité.
Le premier élément de différence qui distingue la souveraineté de
la domanialité réside dans la détermination de la nature juridique ou du lien
juridique qui unit l’Etat à son territoire. En effet, l’Etat tire de son titre deux

76
Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, Paris, 2001, p. 306.
77
Sur ce que le régime de la domanialité n’est nullement l’apanage des seules collectivités territoriales (l’Etat,
province, communes) et concerne tout autant les biens des services publics décentralisés (régies, Etablissements
publics, associations de droit public) même de ceux qui revêtent un caractère commercial et industriel et quelque
soit leur forme juridique.
63

sortes de pouvoir correspondant à la double nature de son territoire, à la fois


étendue et chose.
Il est en premier lieu un objet concret, un bien propre à un
usage, par l’Etat lui-même ou par des tiers ; de ce point de vue l’Etat a sur lui
des pouvoirs de nature “ réelle ”, comme on dit d’un propriétaire qu’il a un droit
réel sur son bien ; ce n’est pas à dire que l’Etat soit propriétaire de son
territoire, car la propriété est légalement une institution de droit privé interne
dérivée et ne peut être créée que par l’Etat lui-même. Il a un dominium, un
pouvoir domanial, qui l’habilite à déterminer la condition légale de chaque
portion du territoire et à exercer sur lui des pouvoirs purement matériels. C’est
là un premier élément de différence.

En second lieu, le territoire est une étendue abstraite, à


l’intérieur de laquelle se meuvent des personnes ; l’Etat exerce sur ces
personnes un pouvoir d’un tout autre ordre, l’imperium, c’est à dire un pouvoir
de les régir ; pouvoir qui n’a rien de “ réel ” car il n’intéresse pas le territoire en
tant que chose, et qui n’a aucun équivalent en droit privé ; à vraie dire il ne
s’exerce pas sur le territoire mais plutôt, sur des personnes qui sont à
l’intérieur du territoire.
C’est là, la différence essentielle de ces deux concepts que nous
allons expliciter davantage, pour en faire ressortir d’autres qui ne ressortent
pas facilement. Le pouvoir domanial est une autorité sur le territoire, et le
pouvoir “ impérial ” une autorité à raison du territoire (ratione loci) ; ils
entretiennent des rapports étroits et l’analyse ne permet pas toujours de les
dissocier.

I.1. Pouvoirs dans le territoire étendue


– Formes et manifestations. : L’Etat a compétence pour régir les personnes et
les objets qui sont sur son territoire ou qui y accèdent, et les situations qui
sont rattachées spatiale ment à son territoire. On ne s’attardera pas ici à cette
affirmation, qu’ on a développée au titre de la condition internationale des
personnes et des biens ; qu’il suffise ici de rappeler que la
“ compétence internationale” est l’aptitude, reconnue à l’Etat par le droit
international, à régir légalement des personnes, des objets et des situations,
64

dès lors qu’ils se trouvent sur , ou ont des rapports avec son territoire ; celui-
ci, s’il n’est pas le seul support de l’autorité de l’Etat, est certainement le plus
important parce que c’est sur son territoire que l’Etat jouit du pouvoir le plus
effectif.

L’autorité de l’Etat sur son territoire s’exerce sous la forme


normative ou sous la forme opérationnelle. Son pouvoir normatif consiste à
faire des normes juridiques concernant les personnes, biens et situations qui y
sont soumis : soit des règles, soit des normes individuelles : les règles en
particulier résultent du droit interne, mais aussi des traités que l’État peut
conclure avec d’autres, en raison précisément de la compétence qui lui est
reconnue pour régir son territoire. Quant à son pouvoir opérationnel, il se
manifeste dans des actions matérielles, c’est à dire ne comportant un aspect
physique. Il n’importe pas ici de savoir si d’autres personnes que l’État
territorial peuvent légalement exercer ces pouvoirs normatifs et opérationnels,
mais seulement de constater qu’ils lui sont en tout cas reconnus.
– Degrés. -L’imperium de l’Etat sur son territoire comporte des degrés qui
concernent tant sa compétence que l’usage qu’il en fait. D’abord sa
compétence elle-même n’est pas toujours exclusive, puisque d’autres Etats
peuvent dans une certaine mesure exercer la leur sur son territoire, chacun
pour son compte. Mais surtout les pouvoirs dont dispose l’Etat à l’intérieur de
la compétence exclusive qui lui reste reconnue dans un grand nombre de
domaines concernant son territoire ne sont pas absolus, soit que l’Etat ait
accepté de les limiter conventionnellement dans l’intérêt de certains autres
Etats, soit que les limitations coutumières de son pouvoir discrétionnaire aient
été dégagées dans l’intérêt de la communauté internationale.

Cela est particulièrement vrai dans les cas des communications


internationales : pour autant que des parties de son territoire(espace maritime
et aérien territoriaux) sont des supports de moyens de communication, le droit
international limite le pouvoir de réglementation de l’Etat ; certes, aucune
organisation internationale n’en use à sa place et il garde donc bien une
compétence exclusive, mais il ne peut lui-même user de son pouvoir de
réglementation que dans les limites résultant des règles internationales et doit
65

tenir compte de ce que les autres Etats et leurs ressortissants ont un intérêt
légitime à utiliser son territoire ; c’est ce qui conduit parfois à parler
de “ servitudes internationales ”constituées sur ces parties de territoire.

De façon générale, l’appartenance d’un espace au territoire de


l’Etat, si elle modifie le type de compétence qu’il y exerce, ne lui vaut pas
nécessairement un capital de pouvoir important ; au contraire celui-ci ne cesse
de s’amenuiser à mesure qu’on s’éloigne des espaces territoriaux “ purs ” vers
les “ espaces d’intérêt international ”, et notamment vers ceux qui se trouvent à
la périphérie du territoire étatique.

I.2. Pouvoirs sur le territoire-chose


L’Etat tire de son dominium et de son imperium le pouvoir de
déterminer le régime foncier des éléments de son territoire. Il peut soit faire de
l’ensemble de l’espace territorial le domaine de l’Etat, soit organiser un régime
d’appropriation privée permettant de constituer des situations juridiques de
propriétaires au profit des particuliers ; c’est là un choix politique interne
auquel le droit international général est indifférent. C’est la raison d’être de
l’article 34 de l’actuelle constitution.

2.1. Régime de la propriété privée


Dans les parties du territoire sur lesquelles des droits de
propriété sont constitués dans le chef de particuliers, notamment étrangers,
ils trouvent leur base dans le droit public interne et, on le sait, l’Etat peut
toujours y porter atteinte en vertu de son pouvoir éminent, à moins qu’il se le
soit internationalement interdit.

2.2. Régime de la domanialité


Dans les parties qui appartiennent à son domaine, il est loisible
à l’Etat, au moins au regard du droit international, de s’en réserver
l’exploitation, ou au contraire d’accorder à des particuliers, notamment
étrangers, un accès aux ressources qu’elles renferment, des conditions qu’il
détermine librement et qu’il peut modifier de même, sous réserve bien sur
d’engagements internationaux contraires.
66

Des formules très variées peuvent être imaginées, notamment


pour l’exploitation des ressources vivantes de la mer et des ressources
minérales, terrestres et marines, dans la seule limite du principe de “
souveraineté permanente de l’État sur ses ressources naturelles ”.(supra,
section 1ère).

La différence essentielle qui distingue souveraineté et


domanialité se situe dans la nature juridique du territoire. Mais comment se
définie le territoire ? On appelle “ territoire ”, l’ensemble des espaces sur
lesquels un Etat particulier dispose d’un dominium exclusif et dans lesquels il
dispose, en principe sur les sujets internes, d’un imperium exclusif ou
concurrent, que leur rattachement spatial suffit à fonder. Ces pouvoirs
résultent d’un titre légal comportant l’appropriation de l’espace par l’Etat.

En droit international comme en droit interne, en droit public


comme en droit privé, tout espace peut être appréhendé de deux manières,
comme étendue et comme chose, et se prête respectivement à deux sortes de
pouvoirs, personnels et réels. C’est de cette distinction fondamentale qu’on
doit partir pour identifier les deux genres entre lesquels se répartit l’espace.

1°L’espace comme étendue :


A ce titre il s’entend comme, un espace lieu d’exercice d’un
imperium. La première fonction de la division de l’espace est de : offrir un
critère qui permette de déterminer en quels lieux un Etat peut et en quels lieu
il ne peut pas déployer sur une personne, un objet, une situation, …, des
pouvoirs dont la base légale se trouve dans sa compétence sur le site de l’être
qu’il veut soumettre à ses normes ou à qui il entend les appliquer. Les
pouvoirs que les uns et les autres peuvent éventuellement détenir ici ou là sont
donc des pouvoirs “ personnels ”, que leurs titulaires exercent non pas sur
l’espace lui-même mais dans l’espace , à l’égard des personnes soumises à
leurs normes et à leurs opérations d’exécution. Ils se rattachent à l’imperium
des Etats, c’est à dire à leur autorité sur les sujets internes soumis à leurs
67

compétence, et appartiennent par là à une forme de relation légale que le droit


privé ignore et qui est propre au droit public, interne et international.

Toujours comme étendue, il s’entend comme un imperium et


appropriation de l’espace. Parce qu’ils sont personnels, de tels pouvoirs ne
supposent pas nécessairement que l’Etat ait sur l’espace où il les exercent un
titre légal “ réel ”, parent de la propriété privée ou de la domanialité publique et
comportant une appropriation. A vraie dire, l’espace étendue ne s’y prête pas
parce qu’il n’y a rien à s’approprier : l’étendue est abstraite elle n’a pas plus de
consistance matérielle que le “ ressort ” d’un organe administratif ou d’un
tribunal, et les mots d’ “ appropriation territoriale ” dans ce premier sens ne
sont qu’une métaphore destinée à exprimer la volonté de l’Etat d’exercer, dans
les lieux qu’il revendique comme propres, des pouvoirs exclusifs et en général
moins étroitement encadrés par le droit international, qui lui sont refusés
dans les espaces qui ne lui appartiennent pas. Mais même dans ces derniers,
on le sait, l’Etat dispose sur les personnes de pouvoirs fondés sur une
compétence extraterritoriale ; c’est bien dire que leur existence, sinon leurs
degrés et leurs modalités d’exercice, ne dépend en aucune manière d’un titre
d’appropriation.

D’ailleurs, quoique ce soit exceptionnel, la compétence


territoriale elle-même peut être reconnue à un Etat dans un espace qui n’est
pas proprement le sien et sur lequel il n’a pas de “ titre ” territorial.

2° L’espace comme chose


Il s’entend comme espace, objet d’un dominium. Mais les
espaces peuvent être aussi envisagés dans une perspective, qui nous est
jusqu’à présent inconnue parce qu’elle ne concerne pas l’autorité sur les
personnes mais la possession des choses. L’étendue abstraite et immatérielle
qu’on avait en vue jusqu’à maintenant cède ici la place à un objet concret, fait
de matière et sur lequel peuvent être constitués des “ pouvoirs réels ”, ceux
qu’exerce un sujet de droit sur une chose, qui en font un bien et qui,
contrairement aux précédents, ne sont pas propres au droit public.
68

Des tels pouvoirs sont reconnus à l’Etat dans l’ordre sous les
espèces de la domanialité, statut des choses correspondant dans la sphère
publique au statut de propriété dans la sphère privée : pouvoirs domaniaux, ou
dominium, qui ne comportent pas de relation personnelle entre leur détenteur
et d’autres personnes comme le fait l’imperium, mais seulement un rapport
d’appartenance entre une chose et son détenteur, objectivement opposable aux
autres personnes. Or des tels pouvoirs sont aussi reconnus à l’Etat dans
l’ordre international, mais seulement sur son “ territoire ”, et c’est pourquoi la
question de l’appropriation, encore relativement secondaire quand il s’agit de
l’espace étendue, passe au premier plan dans le cas de l’espace-chose.
Toujours entendu de l’espace chose, dominium et appropriation de l’espace : -
L’espace78 est à la fois une chose et le contenant d’autres choses, les fruits et
les produits ; l’une comme les autres peuvent faire l’objet de deux types de
statut, d’appropriation ou de non appropriation. S’agissant d’abord de l’espace
lui-même, son appropriation par un Etat en fait un élément de son “ territoire ”
et lui confère les pouvoirs domaniaux internationaux qui sont afférents à cette
qualité ; en particulier il lui appartiendra d’en user pour déterminer le statut
interne, privé ou public des fonds appartenant à son territoire ; mais c’est dans
l’exercice de son imperium qu’il fixera les conditions d’accès à ceux de ses
fonds qu’il maintiendra dans son domaine et dont il lui appartiendra de
déterminer le mode d’exploitation.

Si au contraire l’espace n’est pas incorporé au territoire d’un État,


c’est qu’il n’est pas légalement appropriable. En effet, on le verra, aucun de ces
espaces n’a plus aujourd’hui le statut de chose sans maître (res nullius),
susceptible d’appropriation, mais n’appartenant encore à personne ; tous sont
des choses communes (res communes) fermées à la constitution de titres
territoriaux mais aptes à être utilisées par tous. Dans ces conditions, l’exercice
d’un dominium79 est exclu mais non celui de l’imperium des États qui, dans le
cadre de leurs compétences extraterritoriales, définissent les conditions d’accès
à l’espace international et à ses ressources.

78
Jean COMBACAUD, Droit International Public, Paris, p.123.
79
Idem. p. 124.
69

Quant à ces dernières, qui tant qu’elles reposent encore dans


l’espace international, sont elles-mêmes des choses sans maîtres (à moins
qu’un statut international spécial ne les aient soustraites à une exploitation
sous un régime national : cas de la zone internationale du fond des mers), leur
statut une fois qu’elles en auront été tirées dépendra lui aussi de l’usage de
leur imperium par les États de qui relèvent les personnes dont l’activité en fait
des fruits ou des produits.

L’art. 9 de la constitution nous permet de ne pas tergiverser


quant à la question de savoir le lieu où doit s’exercer cette souveraineté de
l’État. Il précise très clairement que c’est sur le sol, sous sol, espace aérien,
maritime et le plateau continental. Or tous ces espaces constituent
parfaitement le domaine de l’État. Et donc on comprend par là, que la
souveraineté de l ‘État a une assise territoriale sur laquelle elle doit s’exercer.

A l’article 9 de la loi n° 73 – 021 du 20 juillet 1973 portant


régime des biens, régime foncier et immobilier et régime de sûretés, il est
stipulé que “ les particuliers ont la libre disposition des biens qui leur
appartiennent sauf les modifications établies par la loi ”. Ce que nous dit aussi
l’article 34 de la constitution. Et “ les biens qui n’appartiennent pas à des
particuliers ne sont administrés et ne peuvent être aliénés que dans les formes
et suivant les règles qui leur sont particulières ”.

Cet article distingue en effet, les biens appartenant aux


particuliers et les biens n’appartenant pas à des particuliers.
Mais la doctrine distingue les biens appartenant aux particuliers et ceux du
domaine de l’État80. Les biens domaniaux sont ceux qui appartiennent à la
puissance publique81, c’est-à-dire à l’État ou à ses subdivisions.

II. Rapport entre la Souveraineté permanente et le domaine éminent


du droit du droit médiéval.

80
Jean COMBACAUD, op. cit., p. 125.
81
Ibidem.
70

La notion de la souveraineté permanente se ressemble à bien


d’égards à celle du domaine éminent82, à tel point que leur distinction n’est pas
toujours aisée à établir. On se rappellera que dans l’ancien droit, il était
reconnu aux seigneurs un pouvoir auquel le droit de propriété était
subordonné et qui s’étendait à l’ensemble des biens fonds situés dans les
limites de son territoire. C’est ce qu’on appelle : domaine éminent.

Le domaine éminent du prince pouvait être défini comme le droit


dont était investie l’autorité souveraine d’affecter, par priorité, les immeubles
l’usage commun, de régler le régime des biens immeubles publics ou privés,
d’organiser et de limiter l’usage de ces biens d’intérêt général et enfin de
recueillir sous forme d’impôts une partie des fruits que produisent les biens.
La notion de domaine éminent englobait dès lors l’ensemble des droits directs
que le prince exerçait sur les terres faisant partie de sa seigneurie.

Compte tenu du domaine éminent, la propriété immobilière


privée n’existait que dans les limites prévues et selon les modalités déterminées
par l’autorité publique de plus, elle ne s’étendait pas au delà des avantages
matériels qu’un particulier peut retirer de la propriété exclusive d’un fonds.
Elle ne conférait au propriétaire aucun droit de nature politique mais
seulement des droits d’ordre économique, c’est ce qui va s’appeler le domaine
utile.

Le domaine utile ou domaine de propriété pouvait donc se définir


comme le droit privatif d’user et de disposer d’un immeuble ainsi que de
recueillir tous les fruits de nature économique qu’il peut produire dans les
limites compatibles avec l’exercice du domaine éminent. Bien qu’abolie par la
Révolution Française, le régime foncier de l’ancien droit ne paraît plus
aujourd’hui étrange. Il est évident cependant, que la reforme a changé.

C’est ici que se révèle plus les points de ressemblances entre


la souveraineté permanente et Domaine éminent du droit médiéval. Car,

Séverin MUGANGU, Domaine de l’État, urbanisme et aménagement du territoire, syllabus, inédit, L1 Droit,
82

UCB, 1999-2000, p.69


71

le titulaire du domaine éminent n’est plus le prince mais l’État qui est aussi
titulaire de la souveraineté permanente. L’exercice de ce pouvoir ne se
concrétise plus de la même manière, mais il s’agit toujours du même pouvoir
auquel le Domaine de propriété est subordonné. Cette survivance du domaine
éminent n’est pas en définitive fondamentalement différent du système mis en
place dans les pays où le sol est nationalisé, comme la R.D.C., l’ex-URSS,…
Dans ces pays, la propriété privée du sol a disparu. Dans les pays qui n’ont pas
nationalisé le sol, les particuliers ne sont titulaires que du domaine utile. Que
ce domaine utile résulte d’une concession perpétuelle ou d’un droit de
propriété qui n’a plus d’absolue que de nom, cela change peu, nous révèle le
professeur MUGANGU S.

§ 3. COMPOSITION
Le domaine de l’État comprend le domaine public et le domaine
privé. La distinction de deux domaines est caractérisée par son origine
moderne et doctrinale étant donné qu’elle n’existait pas sous l’Ancien
Régime français, sous la révolution. L’ancien régime connaissait un régime
de la couronne, dont le roi en qualité de souverain était le propriétaire et qui
formait un tout unique83.

En ce qui concerne la RDC, l’époque léopoldienne fut


caractérisée par une domanialité particulière. Pour le roi, Léopold II, toutes
les terres congolaises font partie du domaine et ce domaine royal est une
propriété privée. Plusieurs décrets interviendront pour affirmer ce double
caractère84.

Le domaine privé comme le domaine publique appartiennent à


l’État ou à telle autre collectivité publique mais leur distinction reste
fondamentale, constitue la première base de la théorie du domaine et cette
distinction se pose sur le caractère de nécessité.

I. LE DOMAINE PUBLIC

83
Séverin MUGANGU, op. cit., p. 70.
84
Thomas LWANGO, Cours de Droit civil des biens, G2 Droit, UCB, 1996 – 1997, inédit.
72

L’article 10 de la loi précédemment citée souligne que ”les biens


de l’État qui sont affectés à un usage ou à un service public sont hors
commerce, tant qu’ils ne sont pas régulièrement désaffectés ”.

Le domaine public renferme la catégorie la plus importante


des biens hors commerce ; des biens appartenant à la nation et qui de plus
ne pourraient point appartenir à des particuliers. Cet article range dans le
domaine public non seulement les biens qui sont affectés à un usage
public, mais encore ceux qui sont affectés à un service public et c’est sans
distinguer entre les meubles et les immeubles. Cette disposition présente
donc un intérêt évident lorsqu’elle dispose que les biens du domaine public
sont comme tels hors commerce, c’est-à-dire inaliénable et imprescriptible.
Ces biens étant en effet employés à un service d’intérêt général.

I.1. Composition
En ce qui concerne le critère de la domanialité publique M.A.
FLAMME (85) suggère entre autre :
1. Le domaine public comprend tous les biens qui ne sont pas susceptibles
d’appropriation.
2. Le domaine public ne comprend que les biens mis hors commerce par la
loi.
L’indisponibilité étant une exception, ainsi pour avoir la qualification des
biens publics, les biens doivent être expressément ou moyennant un texte
légal mis hors du commerce. Toutefois, la formule de l’arrêt de la cour de
cassation française du 2 octobre 1924 est importante pour des raisons à la
fois logiques et pratiques parce qu’elle fournit une excellente raison de mise
hors commerce même en l’absence d’un texte.
A travers cette formulation, les éléments suivants sont mis en évidence :
- le domaine public suppose une affectation
-cette affectation doit émaner des pouvoirs publics (un simple particulier ne
pouvant, en principe, mettre un bien hors commerce).

85
M.A. FLAMME, Droit administratif, T II n° 413-432, Bruxelles, Brûlant, 1989, cité par François Tulkens ;
“ Le domaine public et la protection de l’environnement ” in Quel avenir pour le droit de l’environnement,
Bruxelles, BURPRESS, 1995, p. 136.
73

-Cette affectation consiste à livrer une chose à l’usage du public, à la faire


échapper à l’emprise des particuliers. A cet effet, un texte n’est pas nécessaire,
la destination de la chose emporte pareille conséquence.
3. Le domaine public se compose des biens consacrés par l’autorité
compétente à l’usage du public.
4. Le domaine public comprend les biens affectés à un service public.
Toutefois, il est reproché à ce critère d’être à la fois trop large et trop étroit.
Large par ce que d’une part il n’y aurait aucun intérêt à rendre
imprescriptible, par exemple, les locaux d’un ministère ou d’une maison
communale lorsque ceux-ci sont simplement loués par l’Etat, d’autre part,
parce que la notion du service public est indéfinie et rend le critère peu
maniable et décisive. Trop étroit parce que ce critère tend à éliminer du
domaine public les biens affectés à l’usage du public en ne prenant en compte
que les biens affectés au service public de l’Etat.
5. Le domaine public comprend tous les biens affectés à l’usage public et a
pour l’autorité compétente l’utilité générale86.
Par ailleurs les éléments du domaine public peuvent être classés comme
suite :
a. Le domaine public maritime, fluvial et lacustre ; les rivages de la mer
appartiennent indiscutablement au domaine public. Et la question se pose
en ce qui concerne les eaux territoriales, la mer territoriale et la mer
adjacente aux côtes sur laquelle l’Etat riverain peut, du rivage même,
employer la force armée et exercer ainsi un pouvoir qui lui est nécessaire
pour ce territoire et ses côtes, assurer la sécurité de ses habitants et
sauvegarder ses intérêts fluviaux et commerciaux.
- les lits de tout lac et de celui de tout cours d’ eau navigable, flottable ou
non, font aussi partie du domaine public de l’Etat conformément aux
prescrits de la loi du 09 août 1893.
- Les ouvrages d’art accessoires tels les écluses, les barrages et les
élévateurs électriques.
- les bords des lacs, rivières, fleuves navigables ou flottables appartiennent
à l’Etat.

86
Séverin MUGANGU, Cours de droit civil des biens, syllabus, inédit, G2 Droit, UCB, 1998 – 1999, p. 27.
74

- les ports publics maritimes et fluviaux, les bateaux des commissaires


maritimes et du service hydrographique, …
b. Les Voies de communication par terre et par air et leurs dépendances
- les routes publiques, qui sont classées d’intérêt général.
- les chemins de fer d’intérêt général font partie du domaine public. Non
seulement les voies mais toutes les dépenses nécessaires à l’ exploitation
du chemin de fer, appareil d’aiguillage et de signalisation, quais et places
de stationnement, les magasins, les ateliers, les immeubles affectés au
logement du personnel dont la présence permanente près de la voie est
nécessaire.
- Dans les circonscriptions urbaines, les avenues et les monuments qui les
ornent, …
- Les plaines d’ aviation ainsi que les constructions y afférentes ; aérogares,
hangars… et les habitations réservées au personnel sont situés sur le terrain
d’ aviation.
c. Le domaine public militaire : La législation congolaise, en la matière, suit
les principes du droit Belge. Et l’article 540 du code civil Belge consacre l‘
énumération suivante :
- Fossés, remparts, places de guerre et forteresse, l’art. 541 ajoute que les
terrains et les fortifications qui n’ ont pas été désaffectées continuent à
appartenir au domaine public de l’Etat.
- les routes et les chemins de fer stratégiques.
- les immeubles affectés au service de l’armée mais constituant les éléments
de défense.
-Les objets mobiliers qui sont nécessairement attachés à la défense nationale
(ex : Grenade, fusil, ...).
d. Les installations et bâtiments administratifs : La jurisprudence belge et
française n’intègre que les immeubles affectés à l’usage immédiat et direct du
public. Néanmoins, il résulte du rapport du conseil colonial qu’en étendant la
définition du domaine public aux biens affectés au service public, le législateur
a voulu y faire entrer tous les biens employés par l’Etat à une utilité publique,
tels les archives de l’administration publique et les bureaux.
Pour le Professeur MUGANGU, la conception du droit congolais est donc large
et aucun doute n’est donc possible pour les bureaux aux différents échelons
75

de l’administration, les hôpitaux et labos, écoles, prisons, palais de justice,


cimetières, postes et parcs.
e. Les mines : Sous l’E.I.C., l’article 1 du décret du 8 juin 1888 disposait que
“l’ aliénation par l’Etat des terres qui lui appartiennent, et l’enregistrement des
terres effectués conformément aux dispositions sur le régime foncier, ne
confèrent aux acquéreurs et aux propriétaires de ces terres aucun droit de
propriété ni d’exploitation sur les richesses minérales que le sol peut
renfermer. Ces richesses minérales demeurent la propriété de l’Etat. La
législation minière de 1937 dispose que les mines constituent une propriété
distincte de la propriété du sol et appartient à la colonie (l’Etat).
Au Congo, la mine est inaliénable. Il n’y a que la concession qui peut faire
l’objet des transactions privées. Et c’est dans la législation actuelle que
l’affectation des mines du domaine public est manifeste. La loi dite
“ BAKAJIKA ” disposant que le sol et le sous-sol (mines) sont la propriété
exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’Etat ” (87).

I.2. Protection juridique du domaine public


Nous allons souligner l’inaliénable et l’imprescriptibilité d’une
part et la protection pénale d’autre part.

2.1. L’inaliénabilité des biens du domaine public de l’état


Il ressort des dispositions, l’article 10 de la loi dite “ foncière ”
que “ les biens de l’Etat qui sont affectés à l’usage ou à un service public sont
hors commerce ”.

Le régime juridique applicable au domaine public comprend


deux principes essentiels parce que : le domaine public est inaliénable, en
conséquence imprescriptible et non susceptible d’expropriation pour cause
d’utilité publique.

1°. Le domaine public est inaliénable

87
Séverin MUGANGU, op. cit., inédit, p.23.
76

En effet, les biens du domaine public ne peuvent être vendus,


ni échangés. Leur vente serait nulle de plein droit. Le principe ‘‘possession
vaut titre’’ n’est pas applicable aux choses mobilières appartenant au domaine
public. Même un acquéreur de bonne foi peut être contraint à tout moment
de les restituer. A cet effet, même si l’objet a été acheté dans une vente
publique, l’acquéreur devra restituer sans prétendre au remboursement du
prix. Ceci apparaît comme une conséquence du fait que “ les biens du
domaine public appartiennent à l’Etat, ainsi un particulier ne pourrait soit par
titre, soit par usucapion acquérir des droits sur eux.

En effet, en attribuant à un particulier le droit d’user de tout ou


partie de la route, la destination de cette route ne serait-elle pas mise en péril ?
… les biens du domaine public ne peuvent non plus être loués” 88.

“ Le domaine public ne peut être grevé de servitude, il ne peut non plus être
soumis à la servitude de passage. De même l’incorporation d’un bien dans le
domaine public fait tomber toutes les servitudes dont le bien serait affecté et
contraire à sa destinée.

Quant à la mitoyenneté, le particulier ne pourra rendre mitoyen


le mur continu de l’immeuble domanial, mais l’Etat pourra lui ériger une
mitoyenneté. Les biens du domaine public ne peuvent être hypothéqués.

2°. Le domaine public est imprescriptible.


L’article 620 du code civil congolais livre III dispose “ on ne
peut prescrire le domaine des choses qui ne sont point dans le commerce ”.

2.2. Protection pénale du domaine public


La protection pénale du domaine public est assortie des
sanctions spéciales, originales ; elle est assurée par une police spéciale, la
police de conservation qui prévoit les contraventions de voirie.

1°La police de conservation89

88
Idem. p. 24.
89
Idem. p. 27.
77

C’est une police spéciale qui renferme l’ensemble de dispositions


législatives et régulières destinées à préserver l’intégrité matérielle de
certaines dépendances du domaine public et l’usage auquel elles sont
affectées.
Il convient de distinguer la police de conservation des mesures
administratives destinées à assurer la conservation du domaine public mais
ne constituent pas nécessairement des mesures de conservation.
Seules méritent cette qualification celles comportant des sanctions pénales
particulièrement prévues par un texte.

L’administration dispose donc, d’un pouvoir de plein droit de


conservation qui lui permet d’édicter toutes les mesures réglementaires ou
individuelles pour préserver l’intégrité de l’ensemble des biens faisant partie du
domaine public.
La police de conservation ne peut s’exercer qu’à l’égard des biens
domaniaux qui bénéficient de la protection pénale du régime de la
contravention des voiries. En outre, la police de conservation crée des
obligations à la charge des autorités administratives chargées de la mettre en
œuvre. Ces autorités sont notamment tenues de faire usage des pouvoirs que
leur confèrent les textes pour faire cesser la situation irrégulière qui
compromettait l’usage normal du domaine public.

2°La police de la conservation se distingue également de la police d’ordre


public. Cette dernière étant définie comme le pouvoir reconnu à certaines
autorités administratives de prendre des mesures assorties des sanctions
pénales afin d’assurer la sécurité, la tranquillité et la salubrité publique. Cette
police s’exerce sur l’ensemble des dépendances du domaine public et a été
confiée soit à des autorités de police générale, soit à des autorités de police
spéciale.
La distinction entre la police de la conservation et la police
d’ordre public apparaît plus nettement au plan des sanctions applicables. Les
infractions à la police de conservation constituent les contraventions des
voiries alors que les violations de règlement de police d’ordre public sont de
78

contraventions de police sanctionnées par le code pénal à défaut des


dispositions spéciales.
La contravention de voirie est un fait susceptible de compromettre
l’intégrité matérielle des biens du domaine public ou de nuire à l’usage auquel
ces biens sont destinés. Et elle peut être de grande ou de petite voirie

II. LE DOMAINE PRIVE DE L’ETAT


Celui-ci ne se distingue des propriétés particulières que par la
personne du propriétaire et par certaines règles protectrices que l’importance
de cette personne impose. Au demeurant, le domaine privé de l’Etat est soumis
aux règles générales de la propriété90.

 Composition du domaine privé de l’Etat


Il se compose principalement des biens 91 suivants :
1. Toutes les terres qui ne sont pas affectés à un usage public ou à un service
public.
2. Les immeubles, notamment ceux destinés au personnel de l’Etat.
3. Titres et actions représentant les emprunts des pouvoirs publics et les
participations dans le capital des sociétés.
4. Les biens sans maître au sens de l’article 12 de la loi du 20 juillet 1973.
Le Professeur MUGANGU souligne que le principe de l’article 12 a été repris
de l’article 529 du C.C. Belge, en droit belge, les biens sans maître visent
exclusivement les immeubles. Il s’agit principalement des immeubles
abandonnés, enregistrés aux noms des propriétaires disparus ou d’une
personne morale dissoute. Les immeubles en déshérence sont également
des biens sans maîtres au sens de l’article 12 de la loi du 20 juillet 1973.
5. Les choses perdues ou abandonnées92, épaves : toute chose perdue ou
égarée dont on ne connaît pas le propriétaire. Aucune législation,
cependant, n’a encore traité des épaves fluviales ou maritimes ; quant aux
choses abandonnées et aux épaves terrestres, l’arrêté ministériel du 16 juin

90
Séverin MUGANGU, op.cit, inédit, pp. 20 à 43.
91
Gaston KALAMABAY, op. cit., p. 62.
92
Séverin MUGANGU., op. cit, p.128.
79

1926 prévoit la vente aux enchères un an après leur remise à


l’administrateur territorial.
6. Les biens acquis par expropriation pour cause d’utilité publique. Ces biens
tombent dans le domaine privé avant d’être affectés dans le domaine public.
7. Les biens obtenus au moyen des modes habituels d’acquérir la propriété.
La composition du domaine privé n’est pas limitativement définie par la loi
“ foncière ” (loi du 20 juillet 1973), comme celle du domaine public n’est
qu’exemplative93.

III. MODES D’ACQUISITION DES BIENS DOMANIAUX


Pour les Etats comme pour les particuliers, point de propriété
sans acquisition. Mais les modes d’acquérir les biens nationaux sont nombreux
et différent aussi pour la plupart des modes d’acquisition du droit commun.
Ces modes sont :
- la nationalisation (qui est prévu aussi par la Résolution 1803);
- l’expropriation pour cause d’utilité publique (ce mode l’est également);
- l’acquisition à titre onéreux ;
- la déshérence successorale ;
- les choses perdues et sans maître ;
- confiscations spéciales ;
- aides et dons ;
- biens vacants ;
- l’usucapion.

IV. PARTICULARITE DES BIENS DU DOMAINE


Les biens du domaine public sont hors commerce et tiennent
leur statut en raison du fait qu’ils sont affectés à l’usage public ou à un service
public et pour cette raison, ils sont inaliénables, incessibles et insaisissables.
“ En principe, il ne sont pas susceptibles de transmission puisque une
personne de droit public est censée ne jamais disparaître ou mourir ”94.

93
Thomas LWANGO, Cours de Droit civil des biens, inédit, UCB, G2 Droit, 1996-1997, p. 62.
94
Idem. p. 63.
80

“ Toute fois ils peuvent faire objet d’une concession réglementée par le droit
administratif, c’est le cas des autorisations de voirie et des permis de
stationnement95 ”.
Il y a lieu de mentionner les aisances de voirie et la possibilité
laissée au propriétaire riverain de la voie publique de laisser couler les eaux de
son toit sur la voie publique.
Ce qui implique que la puissance publique peut accorder des
droits “ très limités96 ” sur le domaine public.
Les biens du domaine privé sont dans le commerce, cessible mais :
- ils demeurent insaisissables ;
- leur cession n’est jamais à titre gratuit ;
- cette cession est toujours soumise à des formalités.

 Maintien en vigueur du régime colonial


L’article 2 de la loi fondamentale dispose : “ les lois, décrets et
ordonnances législatives, leurs mesures d’exécution ainsi que toutes les
dispositions réglementaires existantes au 30 juin 1960 restent en vigueur tant
qu’ils ne seront expressément abrogés.
Ni le Pouvoir central, ni le Pouvoir Provincial n’ont pris, pendant
la période allant du 30 juin 1960 au 1er août 1964, un texte abrogeant les
textes coloniaux relatifs aux régimes fonciers.

Le 1er août 1964, la RDC a une nouvelle constitution. Et l’article


43 en son alinéa 4 dispose que “ …une loi nationale réglera souverainement le
régime juridique des cessions et des concessions foncières faites avant le 30
juin 1960 ” ; lors du colloque du “ foncier et minier ” tenu à Élisabethville du
10 au 18 novembre 1964, le ministre des terres, mines et énergie du
gouvernement central, concluant qu’il ne semblait pas douteux q’une réforme
du régime foncier soit souhaitable et que cette réforme constitue une des
tâches primordiales du gouvernement central … ” et imprescriptible de l’Etat ”.

95
Séverin MUGANGU, op.cit, inédit, pp. 21 à 29.
96
Séverin MUGANGU, op.cit, inédit, pp. 21 à 29.
81

Section 5ème : DE LA DISTINCTION ENTRE SUZERAINETE ET


SOUVERAINETE PERMANENTE
§ 1. Notion :
Le suzerain était celui qui, ayant conféré le fief, avait droit à l’aide du
vassal. Du reste, le même seigneur pouvait être suzerain pour certains fiefs
(ceux qu’il avait conférés), et vassal pour d’autres (ceux qu’il avait reçus).

Ainsi, les rois de France et d’Angleterre ont eu à diverses reprises


des liens de vassalité croisés. Ce type de relations, au départ limitées à
l’aristocratie guerrière, où le roi, suzerain des suzerains, attribue des fiefs à
ses fidèles pour protéger plus efficacement son domaine, s’est étendu à
l’ensemble de la société, les serfs, personnes attachées à la terre du seigneur,
ayant un rapport de vassal à suzerain avec leur seigneur. La féodalité désigne
alors une société caractérisée par la hiérarchie des personnes et des terres, le
morcellement des terres et de l’autorité, la domination de la classe
combattante.

§ 2. Divergences entre Suzeraineté et souveraineté permanente


La notion de souveraineté permanente, consacrée par l’art.9 et
sous analyse ici, diffère à bien d’égards de celle de la suzeraineté, par les traits
ci-après :

- L’expression de souveraineté, en tant qu’attribut essentiel et caractéristique


de l’Etat ne peut être partagée, divisée ou détenue par aucune autre personne
ni morale ni physique, au sein d’un même Etat. C’est le caractère exclusif de la
souveraineté que nous avons évoqué supra97.

- La souveraineté, exprimée par l’expression suzeraineté est susceptible


d’appropriation privative, car dans la féodalité, il y avait plusieurs souverains
ou suzerains subordonnés tous au roi suzerain des suzerains, qui leur assurait
protection. C’est une qualité détenue à la fois par le roi et ses petits sujets ou
seigneur, c’est donc un attribut personnel et non étatique, comme c’est le cas

97
Nous allons nous référer à la 1ère section de ce chapitre, sur les caractères de la souveraineté.
82

dans l’autre hypothèse ; ce qui ne peut en aucun cas se concevoir dans la


souveraineté permanente. Seul et uniquement l’Etat, peut être souverain. C’est
un attribut essentiel de l’Etat qui permet de le caractériser et de l’identifier des
autres sujets de droit.
Toujours dans ce cadre, les suzerains avaient chacun sa terre et rendaient des
comptes en payant même des rançons au suzerain des suzerains, roi. Cette
pratique est incompatible avec la notion de souveraineté qui est un pouvoir de
domination suprême, au dessus de tout autre pouvoir. Le souverain ne peut
ni dépendre de qui que ce soit, ni rendre de comptes à personne, sinon qu’il
n’est lié que par sa propre volonté98, et donc à sa propre loi.

Section 6ème : SOUVERAINETE PERMANENTE ET SES


NOTIONS VOISINES

Le principe de la souveraineté permanente entretient des


rapports étroits avec certains autres principes importants du droit
international avec lesquels il faut se garder de faire toute confusion. Il s’agit :
du principe de non ingérence99 dans les affaires intérieur d’un Etat, droit des
peuples à disposer d’eux mêmes (§1) et du patrimoine commun de l’humanité
(§2). Dans les lignes qui suivent, nous nous proposons de confronter chacun
d’eux avec le principe de la souveraineté permanente. C’est aussi le moment
privilégié de distinguer l’article 9 de l’article 34 de la constitution qui consacre
le droit à la propriété privée dans cette constitution(§3).

§ 1. Souveraineté permanente et Droit du peuple à disposer de lui-même


La question à résoudre ici, consiste à savoir s’il existe des liens
juridiques à établir entre souveraineté économique et droit des peuples ?

En effet, les résolutions relatives à la souveraineté permanente


sur les ressources naturelles100 parlent indistinctement du “ droit des
peuples ”, des “ nations ”, ou du droit des “ Etats ”, ou encore du “ droit des

98
Pierre d’ARGENT, Droit International Public, inédits, Bukavu, G3Droit/UCB, 2003-2004
99
Claude EMMANUELLI et alii. op. cit. p. 68.
100
Dominique ROSENBERG, op. cit. p.330.
83

pays insuffisamment développés ”de disposer librement de leurs richesses


naturelles. Ces expressions se rencontrent parfois successivement dans le
même texte (Rés.626 (VII) du 21décembre1952). L’emploi simultané de ces
termes ne résulte cependant pas d’une confusion de langage. Il vient de la
conception même que l’on se fait du droit de souveraineté. D’abord comme une
application directe du droit de peuples à disposer d’eux-mêmes, ensuite un
droit appartenant aux Etats.

I. Une application directe de droit des peuples à disposer d’eux-mêmes


En effet, la souveraineté sur les ressources naturelles est une
application directe du droit de peuples à disposer d’eux-mêmes. C’est de ce
postulat qu’il faut partir si l’on veut comprendre pourquoi les résolutions
désignent souvent les peuples ou les nations comme titulaire de la
souveraineté.
On touche ici à un domaine101 dans lequel la susceptibilité des
pays en développement est très ombrageuse. Dans son acception classique le
droit de peuples à disposer d’eux mêmes n’avait pas de portée juridique. Il ne
comportait pas non plus de considérations économiques. L’évolution qui s’est
produite depuis 1945 a fondamentalement transformé les données du
problème. On admet aujourd’hui que ce principe a pénétré dans le droit
positif102 et que tout peuple soumis à une domination étrangère peut
revendiquer le droit de s’en libérer. Par ailleurs, l’autodétermination a débordée
du domaine purement politique dans lequel elle se cantonnait et elle s’étend
désormais à toute la sphère de la vie économique.

Cette évolution trouve son fondement dans les articles 1§2 et 55


de la charte des Nations Unies ou le droit de peuple à disposer d’eux mêmes se
trouve présenter comme un but que doivent viser les Nations Unies. Ce n’est
évidemment pas cette formulation103 qui permet de reconnaître un droit au
droit d’autodétermination un caractère juridique, mais la pratique subséquente
de l’O.N.U. et des Etats membres en matière de décolonisation. Abstraction

101
Dominique ROSENBERG, op. cit., p.331..
102
Ibidem.
103
Ibidem.
84

faite de quelques situations délicates comme celle qui règne en Afrique


Australe, on peut dire qu’à l’heure actuelle presque tous les membres de
l’O.N.U. reconnaissent le droit des territoires coloniaux d’accéder à
l’indépendance et de parfaire celle-ci. C’est admettre par là le droit à la
souveraineté sur les ressources naturelles. Il existe donc un lien direct entre le
droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et la souveraineté sur les ressources
naturelles. Ce lien apparaît dans des nombreuses résolutions.

Dans la résolution 1314 (XIII) du 12 décembre 1958, il est dit


expressément que le droit des peuples et des nations à disposer d’eux-mêmes
comprend un droit de souveraineté permanente sur leurs richesses et leurs
ressources naturelles. Cette résolution visait les pactes internationaux relatifs
aux droits de l’homme, alors en voie d’élaboration. Depuis lors, ces pactes ont
été adoptés par l’Assemblée générale (Rés.2200 (XXI) du 16 décembre 1966) et
ils sont entrés en vigueur au premier trimestre de 1976. Or, ils contiennent
chacun un article 1er qui affirme que tous les peuples ont le droit de disposer
d’eux mêmes et que pour pouvoir atteindre les fins qui découlent de ce droit,
c’est à dire déterminer librement leur statut politique et assurer librement leur
développement économique, social et culturel, ils peuvent disposer
souverainement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles. La
résolution 1803(XVII) présente la souveraineté sur les richesses naturelles
comme un ‘‘élément fondamental ” du droit des peuples à disposer d’eux-
mêmes.

Elle déclare en outre que le “ droit de souveraineté des peuples


et des nations sur leurs richesses et leurs ressources naturelles doit s’exercer
dans l’intérêt du développement national et du bien être de la population104 de
l’Etat intéressé ” : ainsi au droit des peuples s’ajoute aussi leur intérêt. De son
coté, la 1ère C.N.U.C.E.D. a affirmé que tout pays a le droit souverain de “ de
disposer librement de ses ressources naturelles dans l’intérêt du
développement économique et du bien être de sa population ”. Ces affirmations

104
Guy FEUER. et Hervé CASSAN, Op. Cit. p. 235.
85

se retrouvent dans les textes ultérieurs, par exemple dans la résolution


2692(XXV).

II. Un droit appartenant aux Etats


L’Assemblée générale et le conseil économique et social ont
toujours présenté, en même temps, la souveraineté sur les ressources
naturelles comme un droit appartenant aux États (voir par exemple les
rés.1515, 3202, 3281).

Il y a donc dualité de formulation et on pourrait alors craindre la


confusion ou l’ambiguïté. Mais que la double référence à l’Etat colonisateur,
politiquement elle revenait à la population du territoire colonisé. On procédait
donc à une affirmation105 de type conservatoire.

On réservait en quelque sorte, contre l’emprise des métropoles


et de leurs citoyens, les droits des peuples et des territoires appelés à former
un jour des Etats indépendants. C’est ce qui explique que dans les textes plus
récents, notamment la déclaration du 1er mai 1974 Rés.3201(S-VI) et la charte
des droits et devoirs économiques des Etats, il ne soit plus question que du
droit de souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles.

On considère en effet, que la décolonisation est pratiquement


achevée et que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes fait l’objet d’une
reconnaissance quasi-universelle.

La construction s’éclaire ainsi d’elle-même. La souveraineté sur


les ressources naturelles se fonde sur le droit des peuples à disposer d’eux-
mêmes, comme tous les éléments de l’indépendance nationale. Cette
indépendance s’incarne dans la souveraineté de l’Etat autorité juridiquement
constituée pour gérer les intérêts de la population106. C'est donc l’Etat qui est

105
Idem, p. 236.
106
Idem, p. 237.
86

apte à exercer toute action tendant à la conquête ou à la récupération du


contrôle sur les richesses de la nation.

§ 2. Souveraineté permanente et patrimoine commun de l’humanité


La prise en charge par le droit de l’idée d’Humanité est plus
ancienne qu’on ne le croit ordinairement. Les pays du Tiers monde ont vite
compris l’intérêt qu’il y avait pour eux à se saisir de cette notion et à
l’orienter dans le sens de leurs objectifs. Pour eux, le patrimoine commun de
l’Humanité doit jouer le même rôle que celui de la souveraineté économique
dans l’ordre interne. En effet, la volonté de ces pays est d’empêcher que les
pays industrialisés puissent exploiter à leur seul profit des ressources et
richesses dont ils estiment devoir être les premiers. La question à résoudre ici
consiste à savoir s’il existe des liens juridiques à établir entre souveraineté
économique et patrimoine commun de l’humanité. En effet il désigne un
ensemble de richesses et de ressources qui appartiennent à l’humanité tout
entière. Aucun État, aucun autre sujet de droit international ou national ne
peut en revendiquer la propriété. C’est le point de discorde qui a toujours
opposé les pays du G8, plus particulièrement les Etats-Unis, des autres pays
en voie de développement. Cette réalité se résume dans la proposition classique
que la souveraineté appartient au peuple et que c’est l’Etat qui l’exerce au nom
de ce dernier.

Si l’on a fait référence à la souveraineté des peuples sur leurs


ressources naturelles, notamment dans les premières résolutions, c’est à la fois
dans une intention idéologique et parce qu’à l’époque, la décolonisation
n’étant pas achevée, des nombreuses populations n’étaient pas encore
organisées en Etats indépendants. On entendait donc marquer que si
juridiquement la souveraineté appartenait encore à ses bénéficiaires. Dans
cette perspective, l’internationalisation positive que permet l’affectation des
ressources et richesses en question à l’Humanité tout entière peut susciter, sur
le plan collectif, les mécanismes de contrôle107 allant dans le même sens que

107
Guy FEUEUR et Hervé CASSAN, op. cit., p. 455.
87

ceux qu’ils ont institués à titre individuel sur leur propre territoire. Il en est
ainsi parce qu’aux yeux des pays en développement, les fins de l’Humanité se
confondent avec les revendications du Tiers Monde.

En effet, si le procédé majoritaire ne peut, à l’évidence engendrer


des règles obligatoires dans l’ordre international, il peut permettre une
identification du plus grand nombre à l’Humanité tout entière. Il résulte de
cela que la gestion108 des biens entrant dans le patrimoine commun de
l’Humanité s’opèrera selon le principe de répartition équitable.
Cela signifie que l’affectation d’un bien à l’Humanité implique inéluctablement
l’octroi d’un traitement différencié et plus favorable aux pays en
développement.

Cette notion109, on le sait, a été invoquée dans des nombreuses enceintes


internationales à propos de questions telles que la technologie, l’alimentation,
la culture. Elle suscite, on le sait aussi, une méfiance de plus en plus grande
de la part des pays développés et c’est ce qui explique que sa mise en œuvre
risque d’être fort aléatoire. Il est donc inutile d’y insister davantage. On devra
cependant se garder de sous-estimer les effets que pourrait produire une telle
notion, si elle devenait d’utilisation courante en droit international du
développement.

§ 3. La souveraineté permanente et l’article 34 de la constitution.


La souveraineté est un droit étatique, non susceptible
d’appropriation privative et ne peut être attribuée ou exercée que par l’État,
avons-nous dit, parlant de la comparaison entre propriété et souveraineté.
Nous avons également noté que cet article 9 sous examen ici, ne s’opposait en
rien à l’article 53 qui consacre l’exclusivité et l’inaliénabilité de la propriété
foncière de l’État congolais. Bien au contraire il le complète. Le fait pour l’Etat
congolais d’exercer sa souveraineté permanente n’entame en rien l’exercice, ni
la jouissance ou la détention du droit de propriété privée dont l’article 34 en

108
Ibidem
109
Ibidem.
88

fixe les modalités. D’où, à notre humble avis, les articles 9 et 34 se complètent
plus qu’ils ne se contredisent. Pour bien s’en rendre compte, il suffit
d’analyser les libellés de chacun d’eux pour mieux s’en convaincre.

L’article 34 dispose : “ La propriété privée est sacrée. L’État


garantit le droit à la propriété individuelle ou collective, acquis conformément
à la loi ou à la coutume. Il encourage et veille à la sécurité des investissements
privés, d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité
octroyée dans les conditions fixées par la loi. Nul ne peut être saisi en ses
biens qu’en vertu d’une décision prise par une autorité judiciaire compétente”.
Dans ces libellés, il résulte que deux (notions essentielles) droits fondamentaux
se trouvent consacrés par le présent article, à savoir :

1°le droit à la propriété privée ou collective et


2°l’expropriation pour cause d’utilité publique.
Cette propriété privée qui est protégée par l’État ne s’applique pas
au sol, au sous – sol, mines,… qui sont la propriété inaliénable et exclusive de
l’État congolais. L’article 34 de la constitution ne s’applique pas aux biens
domaniaux, parce qu’ils sont hors commerce, imprescriptibles et inaliénables.
Ils ne peuvent non plus faire objet d’expropriation, dont la notion est évoquée
par l’article 34. Comme pour la souveraineté permanente, la propriété foncière
aussi est un droit exclusif et propre à l’État Congolais. Il ne se conçoit que
dans l’État et ne peut être détenu que par lui.
Pour sa part, le principe de la souveraineté permanente consacré
par l’article 9, souligne aussi en son alinéa 4 la protection de ces 2 droits
fondamentaux, à savoir le droit à la propriété privée, l’investissement et
l’expropriation pour cause d’utilité publique.
Retenons donc que le droit à la propriété privée reste maintenu sous
la présente constitution autant que celui de la propriété foncière. Pour des plus
amples détails de cette matière, on pourra se référer au chapitre deuxième du
présent travail qui traite du contenu de l’article 34.
89

CONCLUSION PARTIELLE

Sur base de l’analyse que nous venons d’effectuer ci haut, la


construction vient de s’éclairer d’elle-même. Il convient donc, au terme de ce 1er
chapitre, de donner la portée de chacun de deux alinéas pour comprendre
globalement le vrai sens de l’article sous examen. Quelle est donc la place110
réservée à la propriété foncière, sous l’article 9 de l’actuelle constitution? Reste
–t-elle maintenue ou pas ? Ou, dirait-on aussi, qu’en est-il de la place accordée
à la propriété privée111 avec l’avènement de cette nouvelle constitution ?

Abordant le premier chapitre, intitulé : clarification


conceptuelle112, nous avons constaté que cet article pose le problème de
confusion entre les termes propriété et souveraineté. D’où, il a été question de
confronter, mieux de distinguer la notion de souveraineté permanente à celle
de la plénitude des droits fonciers, miniers et forestiers consacrée par la loi
BAKAJIKA (sect. 2ème) ensuite à l’article 53 de la loi du 20/07/1973 consacrant
la propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’Etat Congolais (sect.3,
par après à la domanialité (sect.4ère)et à celle de la suzeraineté (sect. 5ème). Tout
ceci dans le but de savoir le sens et la portée de l’art. 9 en examinant les
rapports qui existent entre ces notions et voir si elles peuvent s’équivaloir ou
s’interpénétrer et dire la même chose.

Bref, il fallait préalablement résoudre ce problème en le rendant


claire, sans ambiguïté, ni confusion, pour faire cesser toutes les polémiques et
controverses autour de cet article. C’est pourquoi, nous avons pertinemment
démontré que l’expression de souveraineté permanente n’était en rien différente
de celle de la propriété exclusive et de ces autres textes légaux évoqués ci haut.
Bien au contraire la souveraineté évoquée à l’art.9 les complète, les englobe,
car elle est plus large et complet en prenant en compte toute l’étendue, tous les
compartiments du territoire congolais (espace terrestre, maritime et aérien).

110
L’article 9 face à l’article 34 de la constitution et les articles 53 et 9 de la loi foncière du 20/7/73.
111
Voir article 34 de la constitution.
112
On a à faire ici à deux concepts clés : souveraineté et propriété. Tout propriétaire n’est pas souverain ou tout
souverain n’est pas nécessairement propriétaire.
90

Dans l’esprit du législateur congolais, en consacrant ce principe


dans le droit positif congolais, il entend protéger les générations présentes et à
venir contre les atteintes et convoitises des Etats étrangers sur les richesses et
ressources naturelles de la R.D.C.

En analysant plus profondément cet article, nous avons constaté


qu’il manque un hiatus, servant d’intermédiaire entre le premier et le second
alinéa, pour que cet article soit complet. Pour ce faire, nous avons estimé que
cet hiatus consisterait à préciser et déterminer la place de la propriété
foncière de l’Etat. D’où elle devrait être formulée ainsi : le sol, sous-sol, les
mines sont la propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’Etat. En
répondant de la sorte, nous venons ainsi de confirmer notre première
hypothèse.

Comment pouvons-nous justifier les termes “ modalités de


gestion et de concession du domaine de l’Etat” employés à l’alinéa 2ème ?
Premièrement, il nous permet de confirmer que la propriété113 n’est pas
supprimée, par l’article 9. Et sur quoi repose cette affirmation ?

En effet, dans la terminologie en usage dans les affaires


foncières, le mot cession s’oppose à concession ; la cession est l’octroi d’un
droit de propriété tandis que la concession se limite à octroyer un droit de
jouissance d’un bien sans en avoir la disposition et donc la propriété. Il peut
s’agir d’un bail, d’une emphytéose, d’une occupation provisoire, de la
superficie, ou d’une concession gratuite, etc.

En outre, dans une terminologie plus générale le mot concession


signifie tout acte par lequel l’Etat consent un droit de jouissance sur son
domaine, sans distinguer entre le domaine public et le domaine privé.

Dire que l’Etat reprend la pleine et libre disposition de ses droits


fonciers cédés avant le 30/06/1960, revient à reprendre toutes les propriétés

113
Henri De PAGE, op. cit. p. 67.
91

privées reconnues et protégées par les textes législatifs d’avant cette date. En
effet, aux termes de l’article 14, livre 2ème du Code Civil congolais la propriété
est le droit de disposer d’une chose d’une manière absolue et exclusive. Le droit
de disposition114 constitue l’essence même du droit de propriété et les mots
“ pleine et libre disposition ” repris à l’article 1er de l’Ordonnance–Loi n°66-343
eussent aussi bien pu être remplacés par les mots “ pleine propriété”. Et donc
le droit à la propriété privée reste d’application et compatible avec la notion de
la souveraineté permanente mais bien entendue, exception faite au sol, sous-
sol, mines, forets, bref aux biens du domaine de l’État.

Les particuliers (personnes physique ou morales congolais ou


étrangers), avons-nous dits, n’ont droit, qu’à la jouissance d’une concession
ordinaire ou perpétuelle selon les cas. Une des spécificités de l’article 9
consiste à reconnaître le droit en faveur de l’État congolais d’exercer un
contrôle sur toute l’étendue de son territoire (espace maritime, aérien
terrestre…) en tout temps, (en temps de guerre comme en temps de paix) mais
aussi de recouvrer toutes les richesses qui lui ont été extorquées ou pillées, au
besoin de saisir les juridictions internationales, en cas de violation de sa
souveraineté permanente, par tout sujet de droit.

114
Henri De PAGE, op. cit. p.67.
92

CHAPITRE IIème : REGIME JURIDIQUE, MECANISMES


DE CONTROLE ET MODALITES DE
MISE EN OEUVRE DU PRINCIPE DE
LA SOUVERAINETE PERMANENTE

Nous allons analyser ce chapitre à travers trois sections, d’une


part les différents mécanismes de contrôles institués par le principe de la
souveraineté permanente(section1ère), d’autre part les différentes modalités115
d’exercice du principe de la souveraineté permanente ainsi que leur régime
juridique .Cependant on ne manquera pas d’évoquer les cas de violation de ce
principe en nous servant des quelques exemples tirés de la jurisprudence
internationale(section3) telles, l’affaire RDC contre UGANDA, l’affaire de l’île de
Palma, …

Section 1ère : MECANISMES DE CONTROLE

Tous les mécanismes116 de contrôles que l’Etat est censé exercer


sur son territoire se sont cristallisés autour du principe de la souveraineté
permanente. Dans la présente section, notre tache va consister à les examiner
tous en portant un accent plus particulier sur la nationalisation et les
expropriations. Car, se souviendra-t-on, l’Etat n’a pas sur son territoire un titre
de propriété, mais plutôt il devient propriétaire par le mécanisme de
nationalisation ou d’expropriation. Telle est la raison pour laquelle on insistera
sur ces deux mécanismes.

§ 1. Nationalisation et expropriation.
Ces deux notions ont toutes les mêmes bases juridiques, à
savoir l’article 34 et la résolution1803. Nous aborderons tour à tour la
nationalisation, l’expropriation pour cause d’utilité publique ensuite on pourra
distinguer ces deux notions entre elles et d’avec leurs notions voisines.

115
Rapports annuels PNUD-ONU : évolution des activités économiques mondiales1996, p36-65.
116
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 345.
93

I. Notion
La nationalisation117 consiste en un transfert, décidé
autoritairement, de propriétés privées à l’Etat ou à une collectivité publique
pour des raisons d’intérêt public. Pour le professeur MUGANGU S., c’est la
manière la plus radicale et à première vue, la plus simple d’acquérir une terre,
par l’État.
Trois critères doivent être réunis pour que l’on puisse parler de
nationalisation s’ils viennent à manquer, on est en présence d’un phénomène
différent :
- En premier lieu, le transfert de propriété doit être décidé automatiquement.
- Mais il existe d’autres modes d’acquisition, par les collectivités publiques,
de biens appartenant à des personnes Privées. L’Etat peut recourir à l’achat,
soit dans des conditions commerciales normales soit en combinant l’usage
de prérogatives118 de puissances publique119 et le recours aux mécanismes
du droit privé, mais la cession se fait par contrat et non à la suite d’une
décision unilatérale de l’Etat, qui constitue l’un des critères de la
nationalisation (même si le montant de l’indemnité est ensuite négocié, ce
qui ne change rien à la nature de l’opération).
- Pour que l’on puisse parler de nationalisation, il faut, en deuxième lieu, que
le bénéficiaire du transfert de propriété soit l’Etat ou une autre collectivité
publique. Il peut arriver, par ailleurs, que l’Etat oblige un propriétaire
étranger à transférer les avoirs qu’il détient sur son territoire à des
personnes privées ayant sa nationalité. Une telle décision répond à certains
des objectifs poursuivis par les nationalisations des propriétés étrangères,
mais non à celui de socialisation de la vie économique. Ce mode de
transfert autoritaire des propriétés étrangères a été utilisé par certains pays
du Tiers-Monde adhérant aux principes de l’économie capitaliste libérale
(Brésil, Corée du Sud, Côte-d’Ivoire, Maroc).
- Enfin, la nationalisation consacrée par la résolution 1803(XVII) est inspirée
des motifs politiques, économiques ou sociaux de caractère général et ceci

117
Voir les différents procédés des marchés publics.
118
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 346.
119
Idem, p.347.
94

permet de la distinguer de la confiscation dont le mobile est punitif : il


s’agit alors de sanctionner le propriétaire évincé.

En revanche, la transposition au plan international de la


distinction parfois effectuée en droit interne, entre nationalisation et
expropriation n’entraîne aucune différence de régime juridique (cfr. art. 2 §2
de la charte des droits et devoirs économiques des Etats).

La nationalisation n’a d’incidence internationale que dans deux


hypothèses : si elle porte sur des biens et intérêts appartenant à des
propriétaires étrangers et situés sur le territoire de l’Etat qui nationalise, ou
elle vise des biens appartenant à des nationaux mais situés en territoire
étranger. Dans le premier cas, la compétence territoriale de l’Etat nationalisant
se heurte à la compétence personnelle de l’Etat dont le propriétaire a la
nationalité ; dans le second, c’est l’inverse qui se produit. Des difficiles
problèmes de droit international, tant public que privé surgissent alors (qui ne
se posent pas lorsque l’Etat nationalise des biens appartenant à ses nationaux
et situés sur son propre territoire), les principes de la plénitude et de
l’exclusivité des compétences étatiques trouvent pleinement application,

II. Le droit de nationaliser ou de privatiser


La souveraineté (imperium120) n’implique pas forcement la
propriété (dominium121), du moins ne la prohibe-t-elle pas. Corollaire direct du
principe de l’exclusivité de la compétence territoriale et élément de la
souveraineté permanente sur les ressources naturelles et les activités
économiques, le droit de nationaliser les propriétés étrangères situées sur le
territoire national ne peut être mis en doute et n’est aujourd’hui nié par
personne.

II.1. Controverse sur le droit de nationaliser


Il existe plusieurs controverses juridiques à ce sujet. Le droit
des Etats de nationaliser les biens étrangers ne fait l’objet actuellement

120
Dominique ROSENBERG, op. cit. p. 222.
121
Idem, p. 223.
95

d’aucune contestation. Mais le consensus ne va pas plus loin. Il existe des


sérieuses oppositions entre pays développés et pays en développement sur le
fondement, les limites et les conditions d’exercice de ce droit.

II.2. Conditions d’exercice du droit de nationaliser


Tout en reconnaissant pleinement le droit de l ‘État de
nationaliser, le droit international subordonne122 la validité de son exercice à
trois conditions :
1°- la nationalisation devait répondre à un motif d’intérêt public,
2°- ne pas être discriminatoire,
3°- être accompagnée d’une indemnité.

Sans être abandonnées, les deux premières sont, aujourd’hui,


interprétées de manière très large. La résolution 1803(XVII) de l’assemblée
générale qui, malgré son ancienneté, est souvent considérée comme traduisant
le droit positif du fait des conditions de son adoption, dispose : “ la
nationalisation, l’expropriation et la réquisition devront se fonder sur des
raisons ou des motifs d’utilité publique, de sécurité ou d’intérêt national,
reconnus comme primant les simples intérêts des particuliers ou privés, tant
nationaux qu’étrangers ”.

Bien que certaines sentences123 postérieures aient affirmé que


“ le droit international ne s’occupe pas des mobiles ” (voir sentence Liamco,
12/04/1997, Rev. Arb. 1980, p. 163 et Texaco-Calasiatic, préc. J.D.I. 1977,
p.372), cette condition ne paraît pas devoir être répudiée ; cependant elle a
perdu toute autonomie et l’intérêt public souverainement apprécié par l’Etat
qui nationalise, se confond largement avec les exigences du développement.

Il convient maintenant de distinguer l’expropriation de certaines


notions voisines que sont :
 La réquisition,
 la confiscation, la nationalisation,
 l’emprise, voie de fait et l’alignement.

122
Dominique ROSENBERG, op. cit., p.224.
123
Idem, p. 227.
96

§ 2. Expropriation et ses notions voisines


I. Expropriation et réquisition.
L’article 34 de la nouvelle constitution de la RDC, constitue la
base juridique du droit de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Tandis
que la résolution 1803(XVII) consacre à la fois le droit de nationaliser,
d’expropriation et de la réquisition.
La réquisition est une mesure d’exécution forcée qui permet à
l’administration d’entrer en possession des biens matériels appartenant à des
particuliers, alors que l’expropriation est un acte d’acquisition forcée d’un
immeuble par l’administration124. La réquisition peut porter aussi bien sur
les immeubles que sur les meubles. Les réquisitions portant sur des
immeubles ne peuvent concerner que leur usage et en aucun cas leur
propriété. Elles ne peuvent donc être que temporaires, toute réquisition
destinée à durer indéfiniment étant irrégulière.

A l’inverse, les réquisitions portant sur des meubles peuvent


porter soit sur l’usage du meuble soit sur sa propriété. En d’autres termes, la
réquisition peut être un mode de cession forcée des meubles ; elle ne peut être
un mode de cession forcée des immeubles. C’est ce qui la distingue de
l’expropriation où les solutions sont radicalement livrées, car l’expropriation
permet la cession forcée des immeubles et des droits réels immobiliers mais
non les biens meubles 125.

En outre, la réquisition étant une atteinte à la propriété privée


justifiée par l’intérêt de la nation, elle donne lieu en contrepartie au payement
au profit de la victime d’une indemnité juste et égale au manque à gagner126.
L’indemnisation de la victime de la réquisition intervient après la réquisition,
alors que celle de la victime de l’expropriation intervient après la décision
d’expropriation mais avant le transfert de propriété.

124
YUMA BIABA, Cours de Doit administratif, U.C.B., 1995 – 19996, inédit, p. 34.
125
Christian MOULY, Le Droit de propriété et l’environnement, PUF, Paris 1998, p.332.
126
YUMA BIABA, op. cit., p. 35.
97

Enfin, la différence entre ces deux notions peut se situer aussi


au niveau des autorités compétentes. La réquisition civile est de la
compétence de l’administrateur du territoire concerné ou bourgmestre de la
commune ; la réquisition militaire ou policière relève en temps normal de
l’activité civile, cependant, en temps de guerre ou en temps des troubles
graves et immédiats, elle relève de l’autorité militaire ou de la police selon le
cas notamment en cas de trahison (article 431) et de détournement des
deniers (article 441 et 443)127.

II. Expropriation et nationalisation


Ces deux notions comportent aussi bien des ressemblances que
des différences, on ne s’étonnera même pas de voir que tous ont les mêmes
bases juridiques, que sont l’article 34 de la constitution et la résolution
1803(XVII).

S’agissant des ressemblances, on peut dire que dans les deux


cas :
- on a affaire à un mode de cession forcée des biens qui s’opère dans le
respect de la loi,
- il ne peut y avoir cession forcée que lorsque la nécessité publique,
légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une
juste et préalable indemnité128.

Quant à ce qui est des différences, nous pouvons noter que les
différences essentielles entre ces deux notions concernent d’une part les biens
susceptibles d’être expropriés ou nationalisés et d’autre part, les raisons de ce
faire – étant entendu que, dans les deux cas, il s’agit des raisons d’intérêt
général ou d’utilité publique. Les nationalisations portent sur des entreprises
et, dans la mesure où ces entreprises sont les plus souvent des sociétés par
action, ce sont généralement les actions qui sont transférées à la puissance
publique, les nationalisations portent donc au premier chef sur les biens

127
NYABIRUNGU Mwene SONGA, Droit pénal général zaïrois, 2ème édition. Kinshasa, Droit et Société, DES,
cité par Justin MUSHAGALUSA, “ L’expropriation pour cause d’utilité publique en droit congolais :application à
l’extension du PNKB ”, Mémoire, UCB, 1998-1999, p. 45.
128
Ibidem
98

meubles même si, en pratique, la nationalisation des actions emporte


indirectement le transfert à la puissance publique des immeubles possédés par
les sociétés nationalisées.
Au surplus, ces entreprises nationalisées continuent à exercer
leurs activités industrielles et commerciales mais, cette fois-ci, non plus au
service d’intérêts privés mais au service de l’intérêt général. En revanche, les
expropriations correspondent, non à des cessions forcées de meubles, mais à
des cessions forcées qui portent directement sur des immeubles ou sur des
droits réels immobiliers. Par ailleurs, une fois l’immeuble cédé, il change le
plus souvent radicalement d’affectation129.
Qu’en est-il de l’expropriation, emprise, et voie de fait ?

III. Expropriation, emprise et voie de fait


Cette étude sera subdivisée en quatre points : l’emprise (1°), la
voie de fait (2°), la différence entre l’emprise irrégulière et la voie de fait (3°) et le
rattachement de ces notions avec l’expropriation (4°).

III.1 Emprise
Par emprise, on entend toute prise de possession par
l’Administration, à titre provisoire ou définitif, d’une propriété immobilière
privée130. Il ne s’agit pas seulement d’une atteinte extérieure à la propriété,
mais d’une mainmise de l’Administration sur l’immeuble, qui élimine le
propriétaire et le prive de l’utilisation de son bien. Celui-ci doit être un
immeuble : la possession d’un bien meuble peut donner lieu à la théorie de
l’emprise, comme c’est le cas aussi en matière d’expropriation131.

Pour qu’il y ait emprise, il faut que deux conditions soient


réunies, il faut d’abord qu’il y ait une véritable dépossession, c’est-à-dire une
main mise sur la propriété. Il n’y a donc pas emprise tant que
l’Administration reste sur son fonds, ne pénètre pas sur la propriété privée,
ne l’atteint que du dehors sans mettre la main sur elle : il faut en second lieu

129
Justin MUSHAGALUSA, op. cit.,p. 45.
130
Jean RIVERO et Jean WALINE, Droit administratif, 16ème éd., Paris, Dalloz, 1996, p.155.
131
Voir Georges VEDEL et Pierre DELVOLE, Le système français de protection des administrés contre
l’administration, Paris, Sirey, 1991, p. 255.
99

que, l’atteinte ait été portée à la propriété immobilière ou à un droit réel


fortement protégé, comme c’est le cas, en France, pour les droits du titulaire
d’une concession funéraire dans un cimetière communal132. L’emprise ainsi
définie peut être soit régulière soit irrégulière.

Elle est régulière lorsqu’elle est effectuée en vertu des pouvoirs


attribués par la loi à l’administration, c’est-à-dire lorsque la dépossession
immobilière a été prévue par un texte résulte d’une procédure légale. Il en est
ainsi par exemple de l’expropriation pour cause d’utilité publique, de
l’occupation temporaire, de la réquisition immobilière.

Elle est irrégulière lorsqu’elle est réalisée en violation des textes,


c’est-à-dire si elle ne se fonde pas sur un titre légal ; dans ce cas
l’indemnisation relève en principe, et même en l’absence des textes, du juge
judiciaire, en sa qualité de “ gardien de la propriété ”. L’emprise irrégulière est
soumise à un régime juridique spécial contenu dans deux points.

1.1. Eléments de l’emprise irrégulière


L’emprise, par elle-même, suppose de la part de
l’Administration, une prise de possession d’un immeuble : un simple trouble
de jouissance sans dépossession n’est pas constitutif d’emprise.
-L’emprise est irrégulière dès que le titre qui la fonde est entaché d’une
illégalité ; il n’est pas nécessaire que cette illégalité présente la gravité requise
dans la théorie de la voie de fait133.

1.2. Conséquences de l’emprise irrégulière


Du point de vue de la compétence, la différence entre l’emprise
irrégulière et celle régulière réside dans le fait que le juge judiciaire exerce
sans texte, dans le premier cas, la compétence que les textes lui accordent le
plus souvent dans le second, c’est-à-dire la fixation de l’indemnité destinée à
réparer l’ensemble des conséquences dommageables de la dépossession. Le

132
ONG et alii.., Les grands arrêts la jurisprudence administrative, 10è éd., Paris, Sirey, 1969, p. 401.
133
Jean RIVERO et Jean WALINE, op. cit. p. 156.
100

juge ne peut pas faire cesser l’emprise par voie d’injonction, mais seulement
condamne l’Administration à une indemnité134.
Comme le dit Jean-François LACHAUME135., la voie de fait,
institution jurisprudentielle par excellence, est le résultat d’une atteinte
particulièrement grave, portée par l’Administration, aux droits fondamentaux
des citoyens (libertés publiques essentielles et droit de propriété) et
“ insusceptible se rattacher à un pouvoir légal ” Dans ce cas, l’Administration,
dans ses prérogatives, a porté gravement atteinte aux libertés et aux
propriétés. Elle est alors considérée, vu le degré de l’irrégularité, comme
s’écartant de l’accomplissement de sa fonction. Son agissement n’apparaît plus
comme l’exercice irrégulier d’une de ses attributions, mais comme un pur fait
matériel, dénué de toute justification juridique. Elle ne peut plus, dès lors, se
prévaloir du principe de la séparation et de la compétence administrative :
l’acte a perdu tout caractère administratif, il est dénaturé, et c’est au judiciaire
qu’il appartient par conséquent d’assurer la protection du particulier136.

Comme le notent Louis TROTABAS et Paul ISOART137, l’illégalité


est tellement manifeste qu’elle dénature l’acte, d’où l’expression “ voie de fait ”
opposée à voie de droit. Quant à ses éléments, nous retiendrons trois qui
doivent être réunis :
- Une opération matérielle138 : l’existence d’une décision ne suffit pas à
constituer une voie de fait ; il faut que l’Administration soit passée à
l’exécution, ou tout au moins menace d’y passer ;
- Une atteinte portée par cette opération à la propriété immobilière ou
mobilière, ou à une liberté fondamentale ;
- Un vice juridique assez grave pour dénaturer l’opération139 ; une simple
illégalité ne suffit pas à lui faire perdre son caractère administratif. En
pratique, l’irrégularité soit dans la décision exécutée, soit dans l’opération
d’exécution elle-même : la voie de fait résulte soit dans l’exécution d’une

134
Jean RIVERO et Jean WALINE, op. cit. p. 156 et Jean – Michel de FORGES, Droit administratif, Paris, PUF,
1995, p. 142.
135
Idem. p. 156.
136
Ibidem.
137
Ibidem.
138
Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 129.
139
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 274.
101

décision manifestement irrégulière, soit de l’exécution manifestement


irrégulière d’une décision (cas du recours à l’exécution forcée sans respecter les
conditions.140
Il a été admis que, lorsque la voie de fait résulte d’un acte
inexistant, le juge administratif saisi, a qualité, au même titre que le juge
judiciaire pour constater cette inexistence.141

Notons aussi que son régime contentieux est assez complexe :


- La voie de fait peut être constatée indifféremment par les deux ordres de
juridiction, ce qui s’explique assez bien par la théorie de l’inexistence, au
moins quant il y a lieu d’appliquer cette théorie ;
- En revanche, seule la juridiction de l’ordre judiciaire peut réparer les
conséquences dommageables de la voie de fait et y mettre fin.

On considère en effet que, eu égard à la gravité des agissements


de l’Administration, c’est un cas où, exceptionnellement, le juge judiciaire peut
adresser des injonctions à l’Administration, et particulièrement lui enjoindre
d’y mettre fin142.

III.2. Différence entre emprise irrégulière et voie de fait


Si la voie de fait n’existe que lorsque l’opération administrative
qui porte atteinte aux droits des individus revêt les vices d’une particulière
gravité que l’on a indiqués plus haut, l’emprise irrégulière, quant à elle, est
réalisée dès lors que le titre en vertu duquel l’Administration a porté atteinte à
la propriété immobilière est irrégulière, même si cette irrégularité ne
correspond pas au degré de gravité exigé pour la voie de fait ; la conséquence
est qu’il peut y avoir, selon le cas, cumul ou non-cumul de l’emprise et de la
voie de fait. Le cumul se produit lorsque les conditions de l’emprise et celles
de la voie de fait sont simultanément réunies. Par exemple toute voie de fait
entraînant une dépossession de la propriété immobilière constitue
nécessairement une emprise.

140
Séverin MUGANGU, op. cit., p. 23.
141
T.C., 27 juin 1966, Guignon, A.J., 1966, p. 547, cité par Jean RIVERO ET Jean WALINE, op. cit., p. 155.
142
T.C., 17 JUIN 1948, Manufacture des velours et peluches et Société VELVETIA, Rec. 153 cité par Jean-Michel
de FORGES, op. cit., p. 245.
102

Mais il peut y avoir des cas où emprise et voie de fait ne se


cumulent pas. Il y a par exemple voie de fait sans emprise lorsque le droit lésé
par la voie de fait est autre que la propriété immobilière. De même il peut y
avoir emprise sans voie de fait lorsque, comme dans l’exemple donné plus
haut, la prise de possession de la propriété immobilière est simplement
entachée de certains vices dont la gravité n’ en va pas jusqu’à constituer la voie
de fait.
La théorie de l’emprise irrégulière est ainsi très différente de celle
de la voie de fait à un triple point de vue :
- Champ d’application : alors que l’emprise ne concerne que la propriété
immobilière, la voie de fait, quant à elle, peut consister soit dans une
atteinte à toutes sortes de propriété, soit même aux libertés fondamentales.
- Degré de l’illégalité qu’elles requièrent : il s’agit d’une illégalité simple pour
l’emprise et d’un vice très grave pour la voie de fait.
- Etendue de la compétence judiciaire : en cas de voie de fait, les tribunaux
judiciaires ont une compétence et des pouvoirs plus larges qu’en cas de
simple emprise143.

III.3. Rattachement de ces notions avec l’expropriation


On a vu que l’emprise régulière peut être soit une expropriation
pour cause d’utilité publique, soit une réquisition résultant d’une procédure
légale.
On a constaté aussi que l’expropriation pour cause d’utilité
publique comme l’emprise régulière ou irrégulière portent sur la propriété
immobilière.

On peut finalement relever, à la suite de Maurice– André FLAMME,


qu’il est hélas fréquent que l’autorité publique prenne possession des biens
appartenant à des particuliers, jugés nécessaires à des travaux publics, avant
même que l’arrêté royal autorisant l’expropriant intervienne. Il s’agit là,
manifestement, d’une “ voie de fait ” mais la perpétration de celle-ci ne fait pas

143
Jean RIVERO et Jean WALINE, op. cit., p. 174.
103

obstacle à ce que la procédure d’expropriation soit entamée à posteriori et


régularise la situation144.

IV. Expropriation et alignement


La procédure d’alignement n’est pas organisée par le législateur
congolais. Nous ferons recours à la doctrine française pour cette étude.

L’alignement est défini en France comme la limite fixée entre la


voie publique et les propriétés limitrophes, soit qu’elle résulte de l’état de
possession actuel, soit qu’elle ait été prescrite pour l’avenir par l’autorité
administrative : soit d’opérer le bornage d’une voie publique existante, soit de
pouvoir à son élargissement ou à son redressement145.

Cette délimitation des voies publiques réalisée par l’alignement


comporte un régime juridique tout à fait différent de celui qui, en droit civil,
régit la délimitation des propriétés privées entre elles et qui porte le nom de
bornage. Alors que le bornage résulte d’un accord entre deux propriétaires ou à
défaut d’accord d’un jugement (action en bornage) et n’a pour objet que de
constater les limites existantes de deux fonds, l’alignement se présente d’une
part comme un acte administratif unilatéral et d’autre part, il n’a pas toujours
un effet déclaratif de constatation ; il peut avoir aussi un effet attributif de
propriété146.

La procédure d’alignement comporte deux opérations, à savoir le


plan général d’alignement et l’alignement individuel.

Le plan général d’alignement détermine d’une manière générale


les limites d’une voie ou d’un ensemble de voies. C’est ce plan qui entraîne les
effets exorbitants du droit commun de la procédure d’alignement.

144
Maurice – André FLAMME, Droit administratif, T. II, Bruxelles, Bruylant, 1989, p. 866.
145
Idem, p. 1087.
146
André de LAUBADERE et al., op. cit., p. 310.
104

On retiendra aussi que l’Administration peut bien délimiter


unilatéralement la voie mais elle ne peut en fixer à son gré les limites : elle doit
se borner à constater les limites existantes147.
Comme l’indiquent André de LAUBADERE et les autres, le plan
général d’alignement a pour objet de fixer les limites d’ensemble d’une voie ou
d’un groupe de voies publiques. C’est un acte administratif unilatéral.
L’alignement peut être, selon les mêmes auteurs, simplement déclaratif
lorsqu’il se borne à constater les limites existantes. Il peut aussi et cela son
caractère attributif servir à l’Administration pour élargir une voie148.

§ 3. Réglementation d’investissements privées et étrangers


des sociétés transnationales.
La nécessité de contrôler les investissements privés étrangers ne
s’est fait sentir que progressivement dans les pays du Tiers Monde. En RDC,
l’article 34 de la constitution consacre cette notion.

Dans l’immédiat après–guerre et plus encore lors de la


décolonisation, les pays en développement ont d’abord cherché à attirer des
capitaux étrangers en prenant des mesures incitatives. En effet durant cette
période, l’idéologie dominante était que le manque de capitaux constituait le
frein principal, au développement. C’est qu’à l’époque, l’investissement privé
étranger était considéré non seulement comme le meilleur pourvoyeur de
capitaux, mais encore comme meilleur véhicule de l’esprit d’entreprise et de la
technologie. Les pays en développement étaient donc invités à créer un climat
favorable aux investissements étrangers en adoptant des réglementations
libérales et en prenant des mesures d’encouragement telles que des
exonérations fiscales ou des subventions.

Toutefois, un fort courant s’est dégagé très rapidement au sein


même du Tiers Monde dans le sens d’une méfiance de plus en plus profonde à
l’égard du capital privé étranger. On en est cependant arrivé peu à peu à une
attitude intermédiaire plus raisonnée, faisant prévaloir une vision réaliste des

147
André de LAUBADERE et al., op. cit. p. 311.
148
Ibidem
105

rapports économiques internationaux sur les présupposés purement


idéologiques. La difficulté de contrôler ces capitaux est cependant plus grande
qu’on ne le pense. La raison principale en est que la majeure partie des
investissements privés étrangers est le fait des sociétés transnationales. Dans
cette perspective, les investissements sont surtout constitués des prêts ou des
participations au capital des filiales de la part des sociétés mères situées dans
les pays industrialisés. Il y a ainsi un déséquilibre entre la rapidité avec
laquelle circulent les capitaux et la lenteur qui caractérise les procédures
juridiques de contrôle.

C’est pourquoi nous allons traiter d’une part des


investissements privés étrangers d’autres part des investissements des sociétés
transnationales. Mais avant d’en arriver là, voyons d’abord comment se définie
l’investissement.

I. Notion et définition
Les contrôles que les pays en développement entendent mettre
en œuvre se heurtent à la difficulté qu’il y a aujourd’hui à définir
l’investissement privé étranger. Le problème est en effet de savoir s’il consiste
uniquement en un apport de capitaux entraînant la maîtrise financière de
l’entreprise ou s’il doit comprendre aussi des apports complémentaires tels que
la technologie, les conseils en marketing ou et les techniques de gestion. Le
choix entre ces deux approches n’est pas sans conséquences sur le plan
juridique, comme on le verra plus loin.

La plupart de conventions bilatérales d’investissements


contiennent à l’heure actuelle une définition extensive de l’investissement, qui
se présente souvent sous une forme énumérative.
On peut en donner l’exemple suivant : “ Pour l’application de la présente
convention :
1. le terme “ investissements ” désigne les avoirs149 de toute nature et plus
particulièrement, mais non exclusivement : 1.les biens meubles et immeubles

149
Bertin GILLES, L’investissement international, P.U.F., Kinshasa, 1975, p. 67.
106

ainsi que tous les autres droits réels tels que les hypothèques, privilèges ou
cautionnements ;
2. Les actions, titres et obligations dans des sociétés ou participations à la
propriété de ces sociétés ;
3. Les créances et droits à toutes prestations en vertu d’un contrat qui ont
une valeur financière ou économique ;
4. Les droits d’auteur, les droits de propriété industrielle (tels que brevets
d’invention, licences, marques déposées, modèles industriels), les procédés
techniques, les noms déposés et la clientèle ;
5. Les concessions industrielles et commerciales accordées par la loi ou en
vertu d’un contrat, notamment les concessions : les concessions relatives à la
prospection, la culture, l’extraction, ou l’exploitation de richesses naturelles, y
compris celles qui se situent dans les zones maritimes relevant de la juridiction
de l’une des parties ” (Convention France – Srilanka du 10/04/1980).

II. Réglementation nationale


Nous avons déjà vu, dans le chapitre précédent, que l’objet de la
souveraineté permanente est très étendu. L’expression recouvre non
seulement les ressources et richesses naturelles, les activités économiques,
d’exploitation, d’exploration, etc. mais aussi les investissements. Pour preuve,
les résolutions 1803(XVII) sur la souveraineté permanente et celle de la charte
des droits et devoirs économiques les prévoient expressément. L’alinéa 6 de la
résolution 1803(XVII) précise : “ … qu’elle prenne la forme d’investissements de
capitaux publics ou privés, d’échange de marchandises ou de services …”
L’article 2, paragraphe 2 de la charte des droits et devoirs des États renchérit à
son tour en ces termes : “ Chaque État a le droit : a)de réglementer les
investissements étrangers dans les limites de sa juridiction nationale et
d’exercer sur eux son autorité en conformité avec ses lois et règlements et
conformément à ses priorités et objectifs nationaux. Aucun État ne sera
contraint d’accorder un traitement privilégié à des investissements étrangers”.

En R.D.C., c’est la loi n°004-2004 du 21/2/2002 portant code


des investissements qui régit cette matière. Depuis le 5/6/2002, il existe un
décret n°065/2002 portant statuts, organisation et fonctionnement de l’Agence
107

nationale pour la promotion des investissements, en sigle “ ANAPI”. Précisons


en outre que dans le cadre de règlement des litiges, c’est la convention du
8/3/1965 pour le règlement de différends relatifs aux investissements entre
États et ressortissants d’autres États.

III. Les Réglementations bilatérales


Ces réglementations150 figurent dans des conventions passées
entre pays développés exportateurs des capitaux et pays en développement
importateurs de capitaux. Elles ont pris différentes formes151, selon l’époque et
les pays concernés, dont voici les traits :
- La première catégorie est constituée par les conventions d’établissement au
sens classique du terme. Il s’agit là essentiellement des traités d’amitiés, de
commerce et de navigation qui réglementent le statut des personnes
physiques et morales, leur sécurité et celle de leur biens, l’exercice de leur
profession et de leurs affaires, leurs droits de propriété immobilière et
mobilière, ainsi que les modes de règlement de différends. Ces traités
prévoient également l’assimilation du national de l’État d’origine et du
national de l’État d’accueil.
- Entrent dans une 2ème catégorie les “ Investment Guaranty Treaties ”
conclus aujourd’hui par les États-Unis avec la quasi-totalité des pays en
développement. Ces traités ont pour objectif essentiel d’élargir le cadre
institutionnel du système d’assurance pour les investissements américains.
Ils contiennent 3 sortes de dispositions, visant respectivement le droit pour
le pays importateur d’examiner le projet d’investissement, la garantie
accordée par le gouvernement des États-Unis à un investissement sous
réserve de son acceptation par les pays d’accueil et enfin, la reconnaissance
au profit de l’État américain du droit de se substituer à son ressortissant
dans tous les cas où il serait conduit à indemniser l’investisseur victime
d’une mesure de dépossession152. Ce type de traités favorise
incontestablement l’État d’origine au détriment du contrôle exercé par
l’État d’accueil.

150
Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 230.
151
Ibidem.
152
Ibidem.
108

Pour pallier ses inconvénients, un compromis, mieux un


équilibre à été trouvé entre les États d’accueil qui prônent pour leur droit
national devant régir ces investissements et les États investisseurs qui prônent
pour le droit international. Les obligations ainsi souscrites s’articulent autour
du principe du traitement juste, équitable et non discriminatoire, dont le
principal corollaire est le libre transfert des produits de l’investissement.

IV. Réglementations régionales


Parmi les réglementations régionales, on retiendra ici deux
exemples les plus révélateurs :
- une réglementation édifiée par des pays en développement, celle du Groupe
andin ;
- une réglementation négociée entre certains pays développés et certains pays
en développement, qui prend place dans la convention de Lomé IV.

V. Réglementation Universelle
Une nécessité de mesures de contrôles internationales à
l’échelon universel s’est vite fait sentir .Depuis long temps, il semble que tous
les partenaires soient d’accord sur l’utilité d’une régulation universellement
acceptée des activités des sociétés transnationales.

Les milieux d’affaires et les syndicats ont marqué leur intérêt


pour une telle entreprise. Les organisations privées et les sociétés
transnationales elles-mêmes ont élaborées des directives mettant l’accent sur
le devoir des investisseurs de prendre en considération les objectifs de
développement des pays hôtes, ainsi que sur les droits des sociétés opérant à
l’étranger. Ainsi, le guide de la chambre de commerce Internationale, adoptée
en 1972, s’adresse aux investisseurs et aux gouvernements des pays d’origine
et des États d’accueil et considère que des règles claires et stables
contribueraient à améliorer le climat des investissements. Ce document153
souligne aussi la nécessité pour les États d’accueils de se référer au droit
international et demande en contre partie aux sociétés transnationales de

153
Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 232.
109

respecter les objectifs économiques et sociaux des pays dans lesquels elles
opèrent.
Dans le même esprit154, plusieurs sociétés transnationales ont
rédigé des directives, parfois appelées “ codes de conduite privés ”. Le
mouvement syndical, quant à lui, est très actif dans ce domaine depuis les
années soixante et milite en faveur d’une réglementation internationale. Dans
sa “ charte des demandes syndicales tendant au contrôle législatif des sociétés
multinationales ”, adoptée à Mexico en 1975, la C.I.S.L a prôné la conclusion,
sous les auspices de l’ONU, d’un traité multilatéral général et la création d’une
nouvelle Institution spécialisée chargée de surveiller l’application de ce traité.
Les Organisations Internationales ont répondu à cette attente de façon diverse.
D’abord en élaborant des réglementations partielles, ensuite en tentant de
préparer un code de conduite générale, plus récemment en mettant sur pied
une Agence Multilatérale de Garantie des Investissements (A.M.G.I).

§ 4. Les Entreprises conjointes et autres formes d’associations


contractuelles
Les pays en développement ont progressivement affiné les
contrôles qu’ils exercent sur les activités étrangères se déroulant sur leur
territoire, à travers non seulement par la nationalisation155, mais également
d’autres mécanismes de contrôles. Pour ce faire, ils ont implicitement opéré
une distinction entre la participation au capital, la participation aux organes
de direction des sociétés et la participation à la simple gestion d’activités
économiques. Dans la pratique, cela a donné naissance à une grande diversité
de contrats. Certains de ces contrats ont abouti à la constitution d’entreprises
(joints ventures).D’autres ne concernent que les modalités d’association des
entreprises privées à la politique de développement de l’État d’accueil.

I. Les contrats d’entreprises conjointes (contrats de joints ventures)


La notion d’entreprise conjointe : Comprise dans la perspective
des relations Nord –Sud, l’entreprise conjointe représente une tentative pour
organiser sous une forme juridique adéquate la collaboration technique,

154
Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 232.
155
Ibidem.
110

financière ou commerciale entre une entreprise publique ou privée d’un pays


en développement. Il s’agit là, en réalité, d’un terme générique pouvant
recouvrir des formes juridiques diverses. Mais la formule peut être appliquée à
toutes les structures permettant de placer l’investissement étranger sous le
contrôle total ou partiel de l’État d’accueil. On comprend donc l’intérêt que ce
procédé a pu susciter dans les pays en développement.

II. De la concession à l’Entreprise conjointe


Les entreprises conjointes constituent par rapport au régime de la
concession, un progrès considérable dans la recherche par les pays du Tiers
Monde d’un contrôle effectif des activités économiques étrangères se déroulant
sur leur territoire.
En effet, l’entreprise conjointe se distingue de la concession par deux traits
essentiels :
- La différence capitale entre les deux formules est que dans les cas de
l’entreprise conjointe, l’Etat détient un titre légal de propriété sur
l’entreprise et sa production, alors que dans le cas de la concession156
traditionnelle, c’était la société étrangère qui devenait propriétaire de la
totalité de la production au lieu même de l’exploitation. C’est ce que
confirme l’arrêt du 15/02/1973, rendu par la Cour de Syracuse (Italie) à
propos des nationalisations de la British Petroleum par la Libye157.
- La détention par l’Etat de la propriété d’une part majoritaire de l’entreprise
lui confère non seulement un certain pourcentage de la production, mais
également un rôle effectif dans le contrôle de la gestion de l’entreprise. En
effet, une participation majoritaire au capital devrait conduire à une
position majoritaire dans les organes de direction et de gestion de
l’entreprise concernée.

II.1. Intérêt de l’entreprise conjointe


Elle a 4 avantages, que sont :

156
Guy FEUER. et Hervé CASSAN, op. cit., p. 334
157
Ibidem.
111

1°. L’intérêt essentiel de l’entreprise conjointe vient de ce qu’elle permet à la


fois l’exercice de la souveraineté permanente sur les ressources naturelles et
les activités économiques158 ainsi que le maintien sur place de l’investissement
étranger. La formule de l’entreprise conjointe est suffisamment malléable pour
que l’Etat d’accueil puisse équilibrer comme il l’entend ces deux exigences en
fonction de son niveau de développement, de ses besoins en capitaux, et en
technologie, de ses priorités nationales, du secteur concerné et des objectifs
visés par les sociétés étrangères. Cette souplesse dans le contrôle se vérifie
dans tous les éléments de la structure de l’entreprise conjointe, qu’il s’agisse de
la détermination des partenaires, des modes de répartition du capital ou de la
distribution des pouvoirs de décision et de gestion.
2°. La détermination des partenaires : Il existe des formules extrêmement
variées permettant d’associer dans la même entreprise des partenaires locaux
et étrangers :
- en ce qui concerne les partenaires locaux, il peut s’agir tout d’abord des
organismes publics de l’Etat d’accueil ou même de l’Etat lui même.
- en ce qui concerne les partenaires étrangers, là encore il peut s’agir du
gouvernement, des organismes publics institutions financières ou sociétés
privées (qui sont ses partenaires naturels), les institutions internationales
comme la Banque Mondiale, S.F.I. (25% de participation au capital).
3°. Les modes de répartition du capital :
La manière dont le capital est réparti lors de la constitution d’une entreprise
conjointe constitue un autre avantage pour ce dernier. Car, les modalités sont
fonction des exigences des cocontractants et des contraintes de la loi nationale
de l’Etat d’accueil. On peut en citer 3 modalités :
- participation majoritaire ;
- participation égale ;
- participation minoritaire.
4°. La distribution des pouvoirs de gestion et de décision : en règle générale, la
distribution du pouvoir est liée à la répartition du capital. Néanmoins, les
contrats159 peuvent prévoir un grand nombre de modalités particulières.

158
Dominique ROSENBERG, op. cit., p.234
159
Ibidem
112

Tels sont les 4 avantages que présente cette forme. Voyons à


présent ses inconvénients (limites).
II.2.Limites du procédé
Quels que soient les avantages évidents de l’entreprise
conjointes pour ceux qui y recourent, cette formule juridique ne suffit pas en
elle-même à garantir un contrôle absolu des Etats sur leurs activités
économiques. Cette formule en effet, comporte plusieurs inconvénients, dont :
- la prise de contrôle effective peut n’être que très lente,
- diverses procédures peuvent entraver le contrôle,
- enfin, le procédé de l’entreprise conjointe peut perpétuer la présence
étrangère dans les activités économiques nationales.

III. Régime traditionnel de la concession


Dans le passé, l’exploitation160 des ressources naturelles et
principalement les ressources minières s’est faite par voie de concession.
En théorie, ce type de contrat respecte les droits souverains de l’Etat, qui peut
manifester ses prérogatives de puissance publique et donc y faire insérer des
clauses exorbitantes du droit commun. En pratique, dans les rapports entre
sociétés transnationales et pays en développement, il n’en n’a pas été ainsi
pour plusieurs raisons qui tenaient d’une part à l’inexistence ou aux lacunes
du droit interne, d’autre part à la puissance et au pouvoir des négociations
des sociétés transnationales, enfin au fait que les Etats d’origine de ces
sociétés appuyaient fortement celle-ci.

§ 4. Autres Contrats d’Association (Diversité des contrats d’association)


Certains pays en développement et plus spécialement les pays
producteurs de pétrole, qui sont économiquement en mesure d’exclure
totalement le capital étranger, mais qui restent techniquement tributaires des
sociétés étrangères, ont imaginé d’autres formules juridiques leur permettant
de faire face à cette situation, en plaçant leurs relations avec ces sociétés sur
un plan purement contractuel excluant toute propriété étrangère des
entreprises qui exploitent leurs ressources naturelles.

160
Guy FEUEUR et Hervé CASSAN, op. cit., p. 332.
113

Dans la pratique, ces contrats extrêmement fréquents, peuvent prendre des


noms divers sans pour autant correspondre à des catégories juridiques
différentes :
- contrats de service ;
- contrats d’entreprise ;
- contrats d’exploitation ;
- contrats de “ risques ” ;
- contrats d’opération161 ;
- contrats de partage de production ;
- contrats de gestion ;
- contrats d’assistance technique ;
- contrats de coopération industrielle ;
- etc.

D’autre part, nombre d’entre eux contiennent des


stipulations162 identiques ou des clauses dont l’originalité ne s’explique que
par la spécificité du secteur concerné. Il est toutefois possible de distinguer :
Contrat de service, contrat de partage de production et contrat de transfert de
technologie.

161
Guy FEUR. et Hervé CASSAN, op. cit., p.300.
162
Dominique ROSENBERG, op. cit., p.236.
114

Section 2ème. DU REGIME JURIDIQUE ET DES MODALITES


D’EXERCICE DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE

Il convient, dans la présente section, de passer en revue les


différentes législations163 congolaises en vigueur, sur les différents domaines de
l’Etat visé à l’alinéa 2 de l’article 9 sous examen, en vue de voir si le régime
juridique en place est conforme au principe de la souveraineté permanente ou
non.
D’où, il sera question d’analyser le régime juridique du principe
de la souveraineté permanente164 à travers : ses modalités d’exercices, (§1er) et
les différents régimes juridiques du domaine de l’État (§2).

§ 1. Les modalités d’exercice de la souveraineté permanente des Etats


sur leurs ressources naturelles
I. Objectif général
L’objectif général qui commande les modalités d’exercice de la
souveraineté sur les ressources naturelles a été énoncé dès les premières
résolutions165. La formulation la plus nette apparaît dans la résolution
1803(XVII)qui déclare : “ le droit de la souveraineté permanente des peuples et
des nations sur leurs ressources naturelles doit s’exercer dans l’intérêt du
développement national et du bien de la population de l’Etat intéressé”.

Plusieurs résolutions ultérieures166 affinent cet énoncé.


C’est ainsi par exemple, que la résolution 2158 (XXI) rappelle que les
ressources naturelles des pays en développement sont à la base de leur
développement économique en général et de leur progrès industriel en
particulier et que, limitées et épuisables, leur exploitation rationnelle
conditionne le développement, tant dans le présent que dans l’avenir. La
résolution 2692 (XXV) montre le lien entre les conditions d’exploitation des

163
Gaston KALAMBAY, op. cit., pp. 29 à 112.
164
Cfr. Résolution 1803.
165
Ibidem
166
Dominique ROSENBERG, op. cit., p.246.
115

ressources naturelles et le financement167 du développement. C’est donc au


nom des intérêts de sa population que l’Etat doit ou est supposé agir.

II. L’action de l’Etat


Les résolutions de l’O.N.U. contiennent diverses dispositions
relatives aux modalités d’exercice de la souveraineté sur les ressources
naturelles. Cette souveraineté appartenant juridiquement à l’Etat, c’est à lui
qu’il revient de la mettre en œuvre : telle est l’idée générale.

Mais les pays développés et les pays en développement se sont


opposés sur le point de savoir si le contrôle d’un Etat sur ses activités exercées
par les étrangers sur son territoire devait s’effectuer exclusivement selon le
droit interne ou s’il devait relever, au moins pour partie, du droit international.

Les premiers textes adoptés par les Nations Unies se montraient


favorables à l’intervention du droit international, plus ou moins conjugué à la
loi nationale. En 1960, la résolution 1515 (XV) recommande le respect du droit
souverain de chaque Etat de disposer de ses richesses et de ses ressources
naturelles conformément aux droits et devoirs économiques des Etats en droit
international. Ces droits et devoirs168 doivent s’exercer dans les deux sens : les
États tiers doivent respecter internationalement la souveraineté de l’État
détenteur des ressources en question, mais celui-ci doit respecter les droits des
États et des particuliers étrangers selon les règles et standards ordinairement
reçus en droit international. La raison profonde d’une telle recommandation
est qu’à l’époque on considérait depuis longtemps la résolution 626 (VII), que la
souveraineté sur les ressources naturelles ne devait pas gêner les mouvements
des capitaux à destination des pays en développement, et ceci tant dans
l’intérêt des pays importateurs que dans celui des pays exportateurs.

La résolution 1803 (XVII) présente une construction équilibrée


dans laquelle primauté est donnée à la compétence interne pourvu qu’elle ne

167
Ibidem
168
Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 206.
116

s’exerce pas en contradiction avec le droit international. Progressivement, s’est


amorcée une réaction tendant à donner une primauté de plus en plus
marquée, voire, l’exclusivité, à la compétence nationale. Ici l’évolution de la
doctrine des Nations Unies est allée de pair avec celle de la pratique des
États de plus en plus enclins à réglementer restrictivement les investissements
privés étrangers et à procéder à des nationalisations.

En 1978, la résolution 3171(XXVIII) affirmait avec force que


c’est le principe de la compétence exclusive de l’État. L’année suivante, cette
solution a été reprise par la charte des droits et devoirs économiques des États.
Mais l’opposition absolue des pays industrialisés à voir ainsi évoluer le
problème a donné un coup d’arrêt au discours tenu en ces termes par le Tiers
Monde dans l’enceinte des Nations Unies. Il est significatif que depuis 1974
aucune résolution soutenant ces thèses n’ait été adoptée par l’Organisation.

III. La coopération internationale


Depuis les premières résolutions, les Nations Unies ne
reconnaissent pas seulement, en matière de richesses et ressources naturelles
un droit de contrôle aux États détenteurs. Elles préconisent également la mise
sur pied d’une coopération internationale en ce domaine. Cette coopération169
doit s’exercer, d’une part avec les États, d’autre part avec les Organisations
internationales.

En ce qui concerne la coopération avec les États, les résolutions


insistent à la fois sur la coopération avec les pays développés et sur la
coopération entre pays en développement.

Par ailleurs, elles ont prévu l’intervention des Organisations


internationales dans le domaine des ressources naturelles. Cette intervention
apparaît d’abord sous la forme d’une mission d’étude impartie à l’O.N.U. En
application de la résolution 1314 (XII) et de la résolution 1720 (XVI) qui lui fait
suite, le secrétariat a préparé de nombreux rapports et documents de travail,
et notamment celui qui porte le titre d’ “ État de la question de la souveraineté

169
Dominique ROSENBERG, op. cit., p,248.
117

permanente sur les richesses et ressources naturelles ”, et qui contient des


renseignements précieux.

Mais l’O.N.U. a voulu aller au-delà de cette mission et elle a dû


apporter une aide aux États pour la mise en valeur et l’utilisation de leurs
ressources naturelles. La résolution 2158(XXI) prie le secrétaire général de
coordonner les activités du secrétariat avec celles d’autres organes et
programmes des Nations Unies et de prendre toutes mesures utiles pour
faciliter l’intégration de l’exploitation des ressources naturelles des pays en
développement dans des programmes de développement économique accéléré.

§ 2. Régime juridique conforme au principe de la souveraineté


permanente
L’État tire de son dominium et de son imperium le pouvoir de
déterminer le régime foncier des éléments de son territoire et plus
particulièrement les modalités de gestion et de concession de son domaine.
C'est là un choix politique interne, qui trouve sa base dans le droit public
interne et, on le sait, le droit international général est indifférent quant à ce.
Quel est le régime juridique du domaine public sur lequel l’État exerce sa
souveraineté permanente ? Telle est la question fondamentale qui mérite d’être
posée et à laquelle nous allons tenter de répondre tout au long de ce
paragraphe.

I. Le domaine (ou espace) terrestre


‘‘L’État exerce une souveraineté permanente sur sol, sous-sol,
les eaux et les forets, … ’’170.

Nous allons examiner ici successivement le régime juridique du


sol, sous-sol, les eaux et les forêts. Le domaine terrestre171 comprend :-la voirie
ordinaire ou terrestre et les voiries spéciales.

170
Article 9 de la constitution de 18 février 2006.
171
Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 248.
118

I.1. Le régime du sol et du sous-sol

Pour ce qui est de la base juridique, la matière est traitée par la


loi du 20/07/1973 qui restera toujours d’application sous cette nouvelle
constitution. (Voir le détail de ce régime au premier chapitre du présent
travail).

L’Etat demeure le seul propriétaire du sol, sous-sol et des mines


y contenus. Un régime de concession perpétuelle172 est accordé aux congolais
personnes physiques et la concession ordinaire à l ‘égard des personnes
morales de droit congolais et à l’égard des étrangers.

I.2. Le régime forestier


2.1. Base juridique
Le droit applicable173 aux forêts trouve sa base juridique dans la
loi 011-2002 du 29 août 2002 portant code forestier. Elle est accompagnée de
règlements d’exécution portant sur la création d’une société forestière174, les
conseils consultatifs provinciaux des forêts175 ? La procédure de transaction en
matière forestière, le cadastre, la procédure d’établissement d’un plan
d’aménagement forestier, l’exploitation forestière et sur la détermination
d’essences forestières protégées.
La loi n°011-2002 du 29/08/2002 portant code forestier consacre l’État
comme propriétaire en ces:
“ Les forêts constituent la propriété de l’État,… ”
“Leur exploitation et leur utilisation par les personnes physiques ou morales de
droit privé ou de droit public sont régies par les dispositions de la présente loi
et ses mesures d’exécution. ” (art. 7).
C’est cette loi qui remplace le décret du 11 avril 1948 portant régime forestier
au Congo Belge tel que modifié par l’ordonnance loi n°52-413 du 4 octobre
1959.

172
Rapport économique de la RDC, 1999, p.74.
173
Loi 011-2002 portant Code forestier.
174
Ordonnance 81-068 du 16 mai 1981.
175
Arrêté ministériel /MIN/AF .F . E.T./259/2002 du 3octobre 2002.
119

2.2. Les forêts visés et leur classement


Selon la loi portant code forestier, les forêts sont :
- les terrains recouverts d’une formation végétale à base d’arbres ou
d’arbustes aptes à fournir des produits forestiers, abriter la faune sauvage
et exercer un effet direct et indirect sur le sol, le climat ou le régime des
eaux.
- les terrains qui, supportant précédemment un couvert végétal arboré ou
arbustif, ont été coupés à blanc ou incendiés et font l’objet d’opérations de
régénération naturelle ou de reboisement.
Par extension, sont assimilées aux forêts, les terres réservées pour être
recouvertes d’essences ligneuses soit pour la régénération forestière, soit pour
la protection du sol.(article 1er ).

En ce qui concerne leur propriétaire, l’article 7, alinéa 1er


dispose que “ les forêts constituent la propriété de l’État”. L’article 8, alinéa 1er,
quant à lui dispose que : “ les forêts naturelles ou plantées comprises dans les
terres régulièrement concédées en vertu de la législation foncière
appartiennent à leurs concessionnaires ”. L’article 9, alinéa 1er dispose enfin
que “ les arbres situés dans un village ou son environnement immédiat ou
dans un champ collectif ou individuel sont la propriété collective du village ou
celle de la personne à laquelle revient le champ”.

Les forêts classées font partie du domaine public de l’État. Ces


forêts sont : “ les réserves naturelles intégrales ; les forêts situées dans les
parcs nationaux ; les jardins botaniques et zoologiques ; les réserves de faune
et les domaines de chasse ; les réserves de biosphère ; les forêts récréatives ;
les arboreta ; les forêts urbaines ; les secteurs sauvegardés”.
La loi ajoute aux forêts classées les périmètres de reboisement appartenant à
l’Etat ou à des entités décentralisées (aricle12) et se fixe l’objectif176 que les
forêts classées doivent représenter au moins 15 % de la superficie totale du
territoire national (article14).

176
Voir article 13 de la loi 011-2002 portant code forestier.
120

Des forêts seront en outre classées lorsqu’elles sont nécessaires à : ‘‘ la


protection des pentes contre l’érosion ; la protection des sources et des cours
d’eau ; la conservation de la diversité biologique ; la conservation des sols ; la
salubrité publique et l’amélioration du cadre de vie ; la protection de
l’environnement humain ; et en général, toute autre fin jugée utile par
l’administration chargée des forêts ” (art. 13).

Les forêts protégées font partie du domaine privé de l’Etat et


constituent le domaine forestier protégé. Les produits forestiers qui en
découlent, sauf ceux provenant de la culture des particuliers, appartiennent à
l’État (article 20). Elles sont susceptibles de concession. Les communautés
locales peuvent, à leur demande, obtenir une concession sur tout ou partie
des forêts protégées parmi les forêts régulièrement possédées en vertu de la
coutume. L’attribution est à titre gratuit (article 22).

2.3. Les institutions de gestion et d’administration


Les institutions qui interviennent dans la gestion des forêts sont
le ministère ayant dans ses attributions la gestion des forêts(art.24), le
cadastre forestier (art. 28), le conseil consultatif national(art.30), et les conseils
provinciaux des forêts et les associations et organisations non
gouvernementales agréées (art.134).

2.4. Les éléments du régime forestier


L’on peut noter parmi les plus saillants, l’organisation des droits
d’usage, l’organisation des mesures de protection ; l’inventaire, l’aménagement
et la reconstitution des forêts; l’organisation de la concession forestière ;
l’organisation de l’exploitation forestière ; la fiscalité forestière et le régime
pénal.
Cependant par souci de ne pas trop s’écarter de notre sujet
d’analyse, nous allons singulièrement nous atteler sur l’organisation de la
concession forestière.

2.5 Régime de concession forestière


121

La concession177 forestière fait l’objet des articles 82 à 85. Elle


confère un droit d’exploitation de la superficie de forêt concédée. L’obtention de
la concession est soumise à deux conditions essentielles à savoir être
domiciliée en R.D.C. pour une personne physique ou être constituée
conformément à la loi et avoir son siège social en R.D.C. pour les personnes
morales d’une part et de l’autre, le dépôt d’un cautionnement dont le but
est : “ … de garantir le paiement de toutes les indemnités si les travaux sont
de nature à causer un dommage ou s’il est à craindre que ses ressources ne
soient pas suffisantes pour faire face à sa responsabilité ” (art.82 fine).

La concession s’attribue par voie d’adjudication et,


exceptionnellement, de gré à gré. Une enquête publique est effectuée
préalablement à toute, concession dans le but de s’assurer de l’existence ou
non des droits des tiers sur la superficie à concéder. L’attribution est
constatée dans un contrat. Ce contrat comprend deux parties à savoir d’une
part les droits et obligations des parties et de l’autre un cahier des charges
fixant les obligations spécifiques incombant au concessionnaire. L’on remarque
la volonté claire du législateur d’accorder à la concession forestière un rôle
important dans le développement socio-économique des communautés locales.

En effet, il dispose que les clauses générales178 du cahier des


charges concernent les conditions techniques relatives à l’exploitation tandis
que les clauses particulières concernent, outre les charges financières et les
obligations d’installation industrielle, une clause particulière relative à la
réalisation d’infrastructures socio-économiques au profit des communautés
locales, spécialement : - la construction, l’aménagement des routes ; - la
réfection, l’équipement des installations hospitalières et scolaires ; - les
facilités en matière de transport des personnes et des biens (article 89, alinéa
3, c.)
Le contrat de concession est signé par le ministre pour le compte
de l’État. Il requiert toutefois l’approbation par décret du président de la
république lorsque les ou la forêt à concéder dépassent une superficie de totale

177
Voir article 13 de la loi 011-2002 portant code forestier de la RDC
178
Voir les rapports Annuels PNUD-ONU, op. cit, p :36-65.
122

de 300 000 ha et par une loi lorsque la superficie dépasse 400 000 ha (article
92). La loi édicte des mesures générales de protection des forêts consistant en
l’interdiction d’un certain nombre d’activités nuisibles notamment l’exploitation
illicite, la surexploitation illicite, la surexploitation, le surpâturage, les
incendies, les brûlis, les défrichements et les déboisement abusifs. Les mesures
de protection peuvent s’étendre mêmes aux zones forestières concédées.

Le code forestier de 2002 assure une véritable actualisation du


droit forestier179 tient le plus souvent compte de l’évolution du droit
international de l’environnement et des intérêts des particuliers. Il nous
semble en revanche qu’il ne met pas en place un régime suffisamment incitatif
de la protection de l’environnement.

I.3. Le régime minier


Le décret du 24/09/1937 établit une distinction nette entre la
propriété du sol et celle des richesses minérales qu’il renferme. Le sol
appartient à son propriétaire tandis que les mines appartiennent à l’État et
constituent un domaine public particulier. L’État pouvait donc attribuer les
mines à d’autres personnes que le propriétaire du sol. Il a partagé les zones
minières à quelques compagnies à chartes qui sont allés à se considérer
comme des véritables propriétaires des richesses minières. La constitution du
1er/08/1964 donne le pouvoir au législateur de transférer à l’État certains
droits de propriété moyennant une indemnité équitable pour les motifs
d’intérêts général.
L’ordonnance-loi n°66-343 du 07/06/1966 appelée
communément “ loi BAKAJIKA ” affirme que la République reprend la pleine et
libre disposition de tous ses droits fonciers, forestiers et miniers concédés ou
cédés avant le 30/06/1960 en propriété ou en participation à des tiers
personnes morales ou physiques. Et l’article14 bis de la constitution du
31/12/1971 déclare l’État propriétaire du sol et du sous-sol ainsi que de leurs
produits naturels ; il n’est plus question de parler des relations entre les
titulaires de droit minier et les propriétaires du sol autres que l’État.

179
La loi de 2002 abroge en effet le décret de 1949 sur le régime forestier.
123

L’ordonnance-loi n°67-231 du 11/05/1967 supprime les


monopoles qu’avaient certaines sociétés dans la recherche et l’exploitation des
mines et prévoit deux régimes miniers :
1°. Le régime minier de droit commun qui prévoit 3 démarches de l’éventuel
titulaire des droits miniers. Il introduit une :
- demande d’autorisation personnelle de prospection,
- demande de permis de recherche et
- demande de permis d’exploitation (5 ans renouvelables trois fois) et de la
concession (30 ans renouvelables deux fois).
En plus de ces différents permis, le code minier a créée un permis spécial : le
permis d’exploitation artisanale. Ce permis180 a pour but de favoriser
l’accession des nationaux à l’exploitation des mines, et de ramener à l’égalité
les exploitations clandestines. Ce permis est uniquement réservé aux
nationaux et aux coopératives artisanales minières.
2°. Le régime minier conventionnel est une faculté spéciale accordée à
l’État de concéder, par convention, le droit exclusif de recherche, le permis
d’exploitation et une concession sur une ou plusieurs zones déterminées. La
convention lie l’État et une personne morale nécessairement.

En R.D.C., le régime minier actuel s’applique à la prospection, la


recherche, l’exploitation, le traitement, le transport et la commercialisation des
substances minérales. Les hydrocarbures font l’objet des législations
particulières. Le code minier consacrant le libéralisme, le rôle de l’État est
essentiellement limité à la promotion et à la régulation du secteur minier. Il
peut cependant au travers des organismes spécialisés, se livrer à l’investigation
du sol ou du sous-sol dans le seul but d’améliorer la connaissance géologique
du pays ou à des fins scientifiques qui ne requièrent pas l’obtention d’un droit
minier ou de carrières. Lorsque l’État se livre seul ou en association avec les
tiers à une activité minière, les personnes morales publiques ainsi que les
organismes spécialisés créées à cet effet sont traités sur un même pied d’égalité
que les investisseurs privés s’adonnent à cette même activité.

180
Voir la convention de Montego Bay.
124

S’agissant d’autres modalités de gestion et de concessions du


domaine de l’État dans ce secteur, la loi n°007 du 11juillet 2002 portant code
minier dispose :
- “ Les gîtes des substances minérales, y compris les gîtes artificiels, les eaux
souterraines et les gîtes géothermique se trouvent sur la surface du sol ou
renfermés dans le sous-sol ou dans les cours d’eau du territoire national sont
la propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’État.
- “ Toutefois, les titulaires de droit minier ou de carrières d’exploitation
acquièrent la propriété des produits marchands en vertu de leur droit”.
- ‘‘La propriété des gîtes des substances minérales, y compris les eaux
souterraines et les gîtes géométriques, dont question à l’alinéa 1er du présent
article, constitue un droit immobilier distinct séparé des droits découlant
d’une concession foncière. En aucune manière le concessionnaire foncier ne
peut se prévaloir de son titre, pour revendiquer un droit de propriété
quelconque sur les gîtes des substances minérales, y compris les eaux
souterraines et les gîtes géothermiques que renfermerait sa concession”.

II. Le domaine (ou espace) maritime


Le domaine maritime comprend les rivages de la mer, les ports
maritimes et leurs aménagements, des phares, des balises et de toutes les
installations destinées à faciliter la navigation maritime. Nous allons évoquer
successivement le régime juridique fluvial, lacustre, de la mer territoriale et du
plateau continental Congolais.
II.1. Le régime juridique fluvial181
Le domaine fluvial comprend l’ensemble des cours d’eau
navigable et flottable, et non navigables ni flottables ainsi que les ouvrages
publics construits sur les voies navigables, des lacs.

II.2. Le régime juridique lacustre182


Les lacs sont des grandes nappes naturelles d’eau stagnantes
qui sont formées d’eau douce. Le fait qu’ils présentent un intérêt économique

181
Voir l’Ordonnance Loi du 14/03/1966.
182
Ibidem
125

pour deux ou plusieurs États implique la nécessité d’une législation efficace


pouvant réglementer ce secteur important regorgeant des ressources
naturelles.
En RDC, c’est la loi du 14/03/1966, dite Ordonnance Loi 66-96,
portant Code de navigation fluviale et lacustre qui est d’application. Cette loi
réglemente le transport des personnes et des marchandises, ainsi que
l’exploitation des gaz, pétrole et autres ressources naturelles lacustres et
fluviales. S’agissant de la chasse, c’est la loi 82-002, du 28/05/1982, portant
réglementation de la chasse qui est d’application. Par contre, la pêche est régie
par le décret du 12/7/1932, portant réglementation des concessions des
pêches.

II.3. Le régime juridique de la mer territoriale Congolaise


3.1. Principe de la souveraineté de l’État côtier183
La mer territoriale est constituée par la zone maritime adjacente
aux eaux intérieurs (ou, le cas échéant, aux eaux archipélagiques sur laquelle
s’étend la souveraineté de l’État. L’article 2 de la Convention de Montego Bay,
qui reprend les termes de la convention de Genève sur la mer territoriale
(art .1 et 2) précise : “ … cette souveraineté s’étend à l’espace aérien au-
dessus de la mer territoriale, ainsi qu’au fond de cette mer et à son sous-sol”.
Il en résulte que l’État côtier y exerce des compétences exclusives tant au point
de vue économique (pêche, exploitation des ressources minérales) qu’en
matière de police (navigation, douane, santé publique, protection de
l’environnement, sécurité184). En ce sens, la mer territoriale185 s’intègre dans le
territoire de l’État.
Cependant, le droit international impose à l’État le respect des
droits reconnus aux États tiers, au delà de ceux admis dans les eaux
intérieurs. Pour cette raison, des auteurs soutiennent que seuls ces eaux sont
assimilables au territoire à l’exclusion de la mer territoriale qu’ils considèrent
comme un élément de la haute mer, sur lequel l’État riverain n’exerce pas des
droits de souveraineté, mais détient seulement des compétences déterminées

183
Patrick DAILLIER et Alain PELLET, op. cit., p. 1161.
184
C.I.J., arrêt du 27/06/1986, activités militaires au Nicaragua, Rec. de 1986, p.111 et suivant
185
Ibidem
126

qui lui sont expressément attribués par le droit international. Cette opinion
restrictive est entièrement ignorée par le droit positif. Les navires publics
étrangers doivent donc interrompre des compétences exercées légitimement en
haute mer ou dans la zone économique exclusive à l’égard des navires battant
leur propre pavillon ou un pavillon tiers (droit de poursuite : droit
d’arraisonnement) lorsque ces navires pénètrent dans la mer territoriale d’un
État autre que celui du pavillon du navire poursuivant.

3.2. Droit de passage inoffensif


1°. Principe
La limitation que le droit international coutumier impose à
l’État côtier découle du droit de passage inoffensif des navires étrangers dans
sa mer territoriale. Déjà codifié par le statut de Barcelone de 1921(art; 2), ce
droit est aujourd’hui réglementé par les articles 14 à 23 de la première
convention de Genève et les articles 17 à 32 de la convention de Montego Bay.
D’après l’article 17 de celle-ci, les navires de tous les États, qu’ils possèdent ou
non un littoral maritime, jouissent de ce droit. Aucune discrimination186 n’est
faite entre navires d’États et navires privés, navire de commerce et navires de
guerre.
Le passage est défini comme étant “ le fait de naviguer dans la
mer territoriale aux fins de traverser sans entrer dans les eaux intérieurs ” ou
de se rendre dans celles-ci ou de les quitter (art.18, §1). Il doit, en principe, être
“ continu et rapide ” mais le stoppage et le mouillage constituent des droits
pour le navire de passage à condition de qu’ils soient des “ incidents ordinaires
de navigation ” ou soient justifiés par la force majeur ou une situation de
détresse ou encore qu’ils aient pour but de porter secours à des personnes, des
navires ou des aéronefs en danger (art.18 § 2).

Aux termes des articles 16, § 3, de la Convention de 1958 et 25,


§ 3, de celle de 1982, l’État côtier peut suspendre le passage inoffensif des
navires étrangers, mais cette suspension doit être temporaire et dûment
publiée, ne porter que sur des zones déterminées de sa mer territoriale, être

186
Convention de Genève, 1982, art 25, §1.
127

établie sans discrimination et être “ indispensable ”pour assurer sa sécurité (la


convention de Montego Bay précise : entre autres pour lui permettre de
procéder à des exercices d’armes ”.

2°. Règles applicables aux différentes catégories de navires


Conformément à une règle coutumière bien établie, “ l’État
côtier peut prendre, dans sa mer territoriale, les mesures nécessaires pour
empêcher tout passage qui n’est pas inoffensif 187”. Ces mesures sont
cependant différentes selon qu’il s’agit des navires marchands ou des navires
d’États utilisés à des fins non commerciales.

L’État côtier dispose à l’égard des premiers des pouvoirs plus


limités que dans ses eaux intérieurs, mais encore très considérables.
Reprenant presque en tous points les règles prévues par celle de Genève (art.19
à 21), la Convention de Montego Bay fait une distinction entre l’exercice des
Juridictions pénale et civile.

L’État côtier se trouve beaucoup plus démuni à l’égard des


infractions commises par un navire d’État utilisé à des fins non
commerciales188 qui bénéficient des immunités de l’État étranger (art. 32) et
qu’il ne peut ni arraisonner ni dérouter. Toutefois, reprenant les dispositions
de 1958, la Convention de Montego Bay précise que : “ si un navire de guerre –
la convention le dissociant ici des autres navires d’État, peut être pour
restreindre au maximum une dérogation aux pouvoirs habituels du
souverain territorial justifiée surtout par le souci de prévenir un incident
militaire–ne respecte pas les lois et règlements de l’État côtier relatif au
passage dans la mer territoriale et passe outre à la demande qui lui est faite
de s’y conformer, l’État côtier peut exiger que ce navire quitte immédiatement
la mer territoriale” (Article 30).

D’autre part, la convention précise que l’État du pavillon est


responsable des dommages que ces navires peuvent causer à l’État côtier du

187
Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op. cit., p. 1163 et 773
188
Ibidem.
128

fait de l’inobservation des lois et règlements de celui-ci ou du droit


international. Ceci n’est qu’une application des règles générales relatives à la
responsabilité internationale de l’État du fait du fonctionnement de ses
services publics189.

III. Le régime juridique du plateau continental (congolais)

La Convention de Montego Bay dans ses articles 77 à 82 et 85,


qui définissent l’équilibre général du régime de Plateau Continental, n’apporte
pas d’innovation sensible par rapport à celle de 1958 (art. 2 à 5 et 7).

III.1. Les droits souverains de l’État côtier sur son plateau continental
Les droits de l’État côtier sur son plateau Continental sont
“ souverains ”, exclusifs – l’essentiel des ressources naturelles n’étant pas
“ renouvelables ” –, inhérents et fonctionnels. Ils s’exercent sur le plateau lui-
même et non pas seulement sur les ressources qu’il contient et “ sont exclusifs
en ce sens que si l’État côtier n’explore pas le plateau continental ou n’en
exploite pas les ressources naturelles, nul ne peut entreprendre des telles
activités sans son consentement exprès ”.

En particulier, l’État côtier a le droit exclusif d’autoriser ou de


réglementer les forages et d’exploiter le sous-sol en creusant les galeries.
Seules les règles concernant la recherche scientifique tempèrent quelque peu
cette exclusivité ; elles sont identiques à celles applicables dans la zone
économique exclusive. On notera, à ce propos, que l’ordonnance de la C.I.J. du
11 septembre 1976 a rejeté une demande de mesures conservatoires, dans le
litige entre Grèce et la Turquie sur le Plateau Continental190 de la mer Égée.
La Cour a estimé que la preuve n’avait pas été apportée d’un préjudice
irréparable causé par les missions d’explorations d’un navire océanographique
turc.

189
Alain PELLET.et Patrick DAILLIER, op. cit., p. 1163 et 773.
190
Idem, p. 1192.
129

Le caractère inhérent de ces droits tient au fait qu’ils sont


“ indépendants de l’occupation effective ou fictive, aussi bien que de toute
proclamation de droit expresse191” ils existent donc “ ipso facto et ab initio192 ”
Les droits de l’État côtier sur son plateau continental sont à certains égards
différents de ceux lui appartenant dans sa zone économique exclusive ; celle-ci
doit faire l’objet d’une proclamation expresse et l’État côtier a l’obligation
d’autoriser d’autres États à y exploiter un éventuel “ reliquat ” de ressources,
ce qui n’est pas le cas pour celles du Plateau continental.

Pour étendus qu’ils soient, les droits de l’État côtier n’en sont
pas moins fonctionnels. Ils sont limités aux fins de l’exploration du plateau
continental et de l’exploitation de ses ressources naturelles193. Celles-ci
incluent les : “ les ressources minérales et autres ressources non biologiques
des fonds marins et de leur sous-sol, ainsi que les organismes vivants qui
appartiennent aux espèces sédentaires, c’est à dire les organismes qui, au
stade où ils peuvent être pêchés, sont soit immobiles sur le fonds ou au-
dessous du fond, soit incapables de se déplacer autrement qu’en restant
constamment en contact avec le fond sous-sol ”.

En outre, l’État côtier a le droit exclusif qui n’est pas qualifié de


“ souverain ”-de construire, sur son plateau continental, comme dans sa zone
économique exclusive, des îles artificielles, installations et autres ouvrages, et
d’établir autour d’eux des “ zones de sécurité ” d’un rayon de 500m au
maximum.

III.2. Limites aux droits de l’État côtier sur son plateau continental
Les limites aux droits de l’État côtier tiennent d’une part aux
droits et libertés appartenant aux autres États et, d’autre part, à des exigences
– limitées – de solidarité internationale. De plus, si l’État côtier est partie au
traité du 11 février 1971 relatif à la dénucléarisation des fonds marins, il lui

191
Conventions de 1958, art. 2 et de 1982, art. 77, §3. Cité par Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op.cit., p.
1192.
192
C.I.J., arrêt du 20 février 1969, Plateau Continental de la mer du Nord, Rec.1969, p.22.
193
Convention de 1958, art. 2, § 1 et de 1982, art. 77, § 1).
130

est interdit de placer ou de laisser placer des armes nucléaires et d’autres


armes de destruction massive dans ou sur son plateau continental.

1°. Les droits reconnus à l’État côtier sur son plateau continental ne portent
pas atteinte au régime des eaux sur-jacentes en tant que zone économique
exclusive ou haute mer, ni à celui de l’espace aérien situé au-dessus de ces
eaux. C’est dire que les autres Etats y bénéficient d’une entière liberté de
navigation et de survol à laquelle l’exercice de ses propres droits par l’État
côtier ne doit pas porter atteinte et qu’il ne peut gêner “ de manière
injustifiable ” (art. 5, §1 et 78, §2).
Les exigences de la protection de l’environnement marin ont cependant conduit
à autoriser l’État côtier à porter atteinte à ces libertés traditionnelles (v.art.208
de la Convention de Montego Bay).
En outre, traditionnellement, tous les États ont le droit de poser des câbles et
des pipelines sous-marins sur le plateau continental (art.4 de la convention
de 1958), sous la seule réserve des “ mesures raisonnables ”que peut prendre
l’État côtier pour l’exercice de ses propres droits et la maîtrise de la pollution.
L’article 79 de la convention de Montego Bay précise cependant que le tracé de
pipelines doit être agrée par lui.

2°. En second lieu, en contre partie de l’extension considérable du plateau


continental, et pour atténuer son caractère choquant au regard du concept de
patrimoine commun de l’humanité, l’article 82 de la Convention de Montego
Bay prévoit de faire exception au principe des droits exclusifs de l’État côtier
sur le produit de l’exploitation.
Plus exactement, il s’agit d’une application timide du droit au développement :
l’extraction des ressources non biologiques du plateau continental, au delà de
200 milles, donnerait lieu à un renversement, compris selon l’année
d’exploitation, entre 1 et 7 % de la valeur ou du volume de la production, à
l’autorité internationale des fonds marins. Cette obligation194 ne serait pas
imposée à certains pays en développement. Il appartiendrait à l’autorité de
répartir ces contributions, en espèces ou en nature “ entre les États partis

194
Voir la convention de Montego Bay, art.80.
131

selon des critères de partage équitable, compte tenu des intérêts de besoin des
États en développement, en particulier195 des États en développement les
moins avancés ou sous littoral”.

IV. Le domaine (ou espace) aérien


IV.1. Espace aérien national
1.1. Souveraineté de l’État sous-jacent
L’article 1er de la Convention de Paris196 de 1919 adopte, en
termes catégoriques, la solution de la souveraineté que prônaient Von Liszt et
Westlake, en opposition à la thèse soutenue par : “ Les hautes parties
contractantes reconnaissent que chaque puissance a la souveraineté complète
et exclusive sur l’espace atmosphérique au-dessus de son territoire ”. La
convention de Chicago de 1944 reconduit le principe. Les deux conventions ont
pris soin de préciser que le territoire de l’État comprend ses “ eaux territoriales
adjacentes ”. Ce qui est confirmé par l’article 2, § 2 de la Convention de
Montego Bay de 1982.

1.2. Les règles applicables à la navigation aérienne


Les règles applicables à la navigation aérienne, y compris au
dessus de la mer territoriale, sont cependant tout à fait différentes de celles qui
régissent la navigation maritime. En particulier, il n’existe pas des normes
coutumières autorisant de plein droit le survol du territoire de l’Etat, qui
pourrait être assimilée au principe du libre passage inoffensif. La seule
exception concerne le passage en transit dans certains détroits
internationaux, il en résulte que, sauf engagement conventionnel contraire,
l’Etat est libre de réglementer et même d’interdire le survol de son territoire et
que tout survol non autorisé constitue une atteinte à la souveraineté
territoriale de l’Etat sous-jacent (cfr. Activités militaires et paramilitaires au
Nicaragua). La violation de l’espace aérien national par un aéronef étranger
autorise l’Etat survolé à l’intercepter et à exiger l’atterrissage. Toutes fois, à
l’égard des aéronefs civils, il ne jouit pas d’un pouvoir illimité de riposte197 ;

195
Ibidem.
196
Convention de Chicago sur l’aviation civile.
197
Ibidem.
132

celle-ci doit être raisonnable et ne pas mettre en danger la vie des personnes se
trouvant à bord.

IV.2. L’espace aérien International


Le régime de la navigation aérienne internationale198 étant établi,
il faut veiller à sa correcte application et poursuivre l’effort d’uniformisation des
normes et des procédures qu’exigent les besoins de la sécurité et de la
technique.
Au niveau International, ces taches ne peuvent être remplies que
par une Organisation internationale permanente qu’est l’OACI qui a remplacée
la CINA. Le principe d’application ici est la liberté de l’air, mais une liberté
contrôlée.
Au niveau national, en RDC, c’est l’ordonnance n°62-32, du
8/10/1955, relative à la navigation aérienne qui est d’application. Quant à
l’aviation civile, il existe une ordonnance n°66-194 du 30 /3/1966 qui régit le
conseil supérieur de l’aviation civile. Il convient de noter, en outre qu’au
niveau des services aériens, deux lois régissent cette matière. Il s’agit de :
1°. L’0rdonnance-loi N°78 –009 du b29/3/78 portant réglementation des
conditions générales d’exploitation des services aériens ;
2°. L’arreté-Ministériel 002/CABIMINECI/2001 fixant les tarifs intérieurs du
secteur de transport aérien en RDC.

198
O-L 62-321, du 8/10/1955 relative à la navigation aérienne.
133

Section 3ème. DE LA VIOLATION DU PRINCIPE DE LA


SOUVERAINETE PERMANENTE

Dans la présente section, notre tache consistera à étudier le


régime de sanction en cas de violation de la souveraineté permanente, et
d’autre part à critiquer l’arrêt rendu par la C.I.J. dans l’affaire des activités
armées en R.D.C, opposant celle-ci à l’Uganda. S’agissant du régime de
sanction dudit principe, en cas de sa violation, nous allons en premier lieu
examiner la nature de l’obligation violée, en présenter le régime de
responsabilité, la juridiction compétente, ainsi que la procédure y afférente, et
enfin ça sera le genre de sanction applicable. Quant à la critique à apporter, il
s’agira de savoir pourquoi le juge n’a-t-il pas condamné l’Uganda sur base de
ce principe sous examen, alors que tous les éléments et faits étaient réunis
(c’est à dire violations flagrantes des droits souverains des peuples congolais) ?

Les alinéas 4 et 7 de la résolution 1803 traitent de la nature de


l’obligation violée et du régime de la violation de la souveraineté permanente,
en précisant à la fois le genre d’obligation violée et le tribunal compétent pour
trancher le litige.

§ 1. Nature de l’obligation violée (Violation grave d’une obligation


découlant des normes impératives)
On se rappellera que, la violation d’une obligation internationale
constitue un fait internationalement illicite. Or, tout fait internationalement
illicite d’un État ou d’un autre sujet de droit international engage sa
responsabilité internationale. Ceci dit, une question mérite cependant d’être
posée, celle de savoir où peut-on classer la violation du principe de la
souveraineté permanente ?

En effet, tel qu’il avait été adopté en première lecture, le projet de


la C.D.I. retenait deux catégories différentes de violations du droit
international : le “ délit” et le “ crime ”international dont la définition199 était

199
Joe VERHOEVEN, op. cit., p.865.
134

donnée dans l’article19, paragraphe 2 : “ Le fait illicite qui résulte d’une


violation par un État, d’une obligation si essentielle pour la sauvegarde
d’intérêts fondamentaux de la communauté internationale, que sa violation est
reconnue comme un crime par cette communauté dans son ensemble constitue
un crime international’’. Le 3ème§ de cette disposition fournissait une liste des
crimes internationaux : l’agression, le maintien par la force d’une domination
coloniale, l’esclavage, le génocide, l’apartheid, l’atteinte grave à l’environnement
humain, en particulier. Tous les autres faits internationalement illicites étaient
qualifiés de “ délits ” aux termes du paragraphe 4 de ce même article19”.
On voit clairement que le principe de la souveraineté
permanente n’est pas nommément cité par cette liste, sans en connaître la
raison. Devant cette lacune, nous estimons pour notre part, qu’il fait partie de
la catégorie des règles de “maintien par la force d’une domination coloniale ”
entendue par là, la colonisation sous toutes ses formes et tous ses aspects ; et
surtout l’aspect politique et économique.
Cependant, bien qu’elle eut, à l’origine été adoptée à l’unanimité
par la C.D.I., cette distinction a suscitée des vives critiques, tant de la part de
la doctrine que de certains États, en particulier les grands occidentaux. Il lui
était notamment reproché :
- d’introduire un vocabulaire pénaliste dans les mécanismes de responsabilité
“ civile ”;
- de reposer sur des appréciations entièrement subjectives en l’absence de
critères clairs permettant de déterminer l’existence d’un crime ; et
- de ne pas avoir de conséquences pratiques significatives.
En outre, les exemples figurant au 3ème § de l’article 19 ont été
jugés non sans raison, discutables, souvent très “ daté ” et, en tout état de
cause, il n’était pas approprié d’inclure, dans un projet de codification une liste
d’exemples non limitatives.

A la suite de débats difficiles200 et parfois houleux, tant au sein


de la 6ème Commission de l’A.G. (compétente en matière juridique) que de la
C.D.I., celle-ci a abandonné toute allusion à d’éventuels degrés d’illicéité dans

200
Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op. cit. p. 1163 et 773.
135

la 1ère partie du projet définitivement adopté en 2001, consacré au “ fait


internationalement illicite ”. En revanche, la distinction réapparaît dans la 2ème
partie du projet relative au “ contenu de la responsabilité internationale de
l’État ” dont le chapitre 3 esquisse le régime juridique applicable aux
“ violations graves d’obligations découlant de normes impératives du droit
international ”, périphrase un peu laborieuse qui se substitue au mot “ crime ”
du projet précédent tout en reprenant pour l’essentiel, les dispositions qui en
tiraient les conséquences201 et en ménageant la possibilité d’évolutions futures.
Grâce à cette substitution, la connotation abusivement “ pénaliste” du projet
de 1996 disparaît du second qui ne mentionne pas davantage le “ délit ”, ce qui
devrait désarmer une partie des critiques.

Au surplus, les exemples qui figureraient malencontreusement


dans l’ancien article 19 sont relégués dans le commentaire de l ‘article 40 et un
effort est fait pour préciser la définition de ces “violations graves ”.
L’appellation même de celles-ci renvoie aux “ normes impératives du droit
international ”, c’est à dire au jus cogens, dont la définition est maintenant
acquise. C’est pourquoi, tous les auteurs sont unanimes et s’accordent à
reconnaître que le droit de la souveraineté permanente est un jus cogens, car il
fait partie des “ normes impératives”, et au surplus, sa violation entraîne une
violation grave d’obligation découlant des normes impératives. L’alinéa 4 de la
résolution 1803 (XVII) l’a si bien exprimé en des termes claires et précis, il
dispose : “ La violation des droits souverains des peuples et des nations sur
leurs richesses et ressources naturelles va à l’encontre de l’esprit et des
principes de la charte des Nations Unies et gêne le développement de la
coopération internationale et le maintien de la paix ”.

Deux éléments doivent donc être réunis : un comportement qui,


comme on vient de le signaler, peut être une action, une abstention ou une
omission, et sa contrariété avec une règle internationale de caractère
coutumier ou conventionnel.

201
Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op. cit. p. 1163 et 773.
136

§ 2. Attribution à un sujet de droit international (qui peut violer le


principe de la souveraineté permanente ?)
Avant d’attribuer à un sujet de droit international une
quelconque responsabilité, il faudra au préalable assurer la détermination de
l’illicéité et la nature de l’obligation violée. Or, il y a violation d’une obligation
internationale par un État, lorsqu’un fait dudit État n’est pas conforme à ce qui
est requis de lui, en vertu de cette obligation, qu’elle que soit l’origine ou la
nature de celle-ci (article 12 du projet de la C.D.I.)

Le principe de la souveraineté permanente peut être violé tantôt


par un État, tantôt par une Organisation Internationale à vocation
économique surtout, ou même par une société transnationale. Deux
conséquences découlent de cela :
- d’ une part, le fait internationalement illicite est attribuable à l’État ;
- d’ autre part, le fait internationalement illicite est attribuable à l’Organisation
internationale à vocation économique, ou à une société supranationale. Nous
avons donc à faire à deux régimes de responsabilité différentes, d’un coté
responsabilité des États, de l’autre coté responsabilité des O.I. à vocation
économique et des Sociétés transnationales.

I. Attribution à un Etat.
L’attribution à l’État est très largement admise, dès lors que le
comportement dénoncé émane de personnes ou d’organes sous son autorité
effective. Le droit international confirme, par ce biais, que les habilitations
juridiques internes ne sont que des faits pour les autres sujets de droit
international. Le fait illicite est toujours attribué à l’État, ou à l’Organisation
internationale, au nom duquel agit l’auteur de l’acte202 ou du comportement
illicite. Il peut s’agir d’un organe individuel, depuis les gouvernants et les plus
hauts fonctionnaires jusqu’à l’agent le plus subalterne. De même, aucune
distinction n’est à établir entre les autorités centralisées et les autorités
décentralisées, entre celles qui sont spécialement en charge des relations
extérieurs de l’État (Chef de l’État, Chef de gouvernement, Ministres des

202
Dominique ROSENBERG, op. cit., p.273.
137

affaires étrangères et agents diplomatiques), et les autres, non plus qu’en


fonction du caractère législatif, exécutif, administratif ou juridictionnel des
activités de l’agent.

D’autres faits de l’État peuvent engager la responsabilité de


l’Etat et entraînant ipso facto, la violation203 du principe de la souveraineté
permanente ; il s’agit de : faits des démembrements de l’État, faits des
particuliers et faits d’insurrection.

II. Attribution à une Organisation Internationale


à vocation économique
Dans d’autres cas, la violation du principe de la souveraineté
permanente peut être due par le fait d’une ou de plusieurs Organisations
internationales. Bon nombre d’entre elles se livrent plus dans l’exploitation et
le pillage des matières premières et ressources naturelles. Dans ce cas, comme
les États, les Organisations Internationales voient leur responsabilité
internationale engagée du fait des comportements illicites, qui leur sont
imputables.

Il n’y a là qu’une conséquence nécessaire de leur personnalité


juridique. Certains États ne sont pas favorables à cette solution et préfèrent
rechercher la responsabilité des États membres. Le régime de cette
responsabilité suit, dans ses règles générales, celui de la responsabilité de
l’État. La transposition a été d’autant plus naturelle qu’il s’agissait de règles
coutumières et que ces règles visaient souvent à protéger les intérêts de
particuliers. Sa mise en œuvre est rendue délicate, dans les faits, par l’absence
de procédures de règlement préétablies. Il peut s’agir directement des faits des
organes et agents de l’Organisation Internationale agissant dans le cadre de
leurs compétences ; ou soit des faits d’organes et d’agents incompétents, soit
enfin des faits des États agissant pour le compte des O.I.

203
Ibidem.
138

§ 3. Circonstances excluant l’illicéité


La notion de circonstance204 excluant l’ illicéité correspond à ce
que l’on appelle, en droit interne, les causes exonératoires de responsabilité.
L’expression “circonstance excluant l’illicéité” paraît cependant plus exacte à
deux points de vue. D’une part, elle présente l’avantage d’éviter une confusion
entre, d’un coté, la responsabilité et, de l’autre son fait générateur : les
circonstances dont il s’agit concernent celui-ci, pas celle-là même si, par
ricochet, elles la font disparaître. D’autre part, elle marque bien que c’est l’un
des deux éléments constitutifs du fait internationalement illicite205, la violation
d’une obligation (constitutive de l’illicéité) qui, seul, se trouve en quelque sorte
neutralisé ; l’attribution du comportement à l’État ou à l’organisation
internationale intéressés n’en est nullement modifiée.

En outre, il faut bien comprendre que ces circonstances


excluent l’illicéité d’un comportement déterminé ; mais elles laissent
pleinement subsister l’obligation violée à la charge de l’auteur du manquement:
si les circonstances le permettent (et si l’obligation s’y prête), celui-ci devra s’en
acquitter à nouveau. Comme le précise l’article 26 du projet de la CDI, aucune
circonstance ne saurait exclure “ l’illicéité de tout fait de l’État qui n’est pas
conforme à une obligation découlant d’une norme impérative du droit
international général ”.

La liste des circonstances excluant l’illicéité n’est pas facile à


établir. La C.D.I. en a retenue six : le consentement de l’Etat victime ; la
légitime défense ; les contre-mesures ; la force majeure ; la détresse et l’état
de nécessité (article 20 à 26 du projet).

D’autres circonstances sont étrangères206 à la victime et excluent


de ce fait toute responsabilité. Il s’agit entre autre de la force majeure. Ainsi,
un État qui commet un acte illicite ne saurait invoquer sa souveraineté pour

204
Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op. cit. p. 920 et s.
205
Ibidem.
206
Dominique ROSENBERG, op.cit., pp.134 à 178.
139

s’exonérer de sa responsabilité. Ce serait nier l’existence même du droit


international.

§ 4. Mécanisme général de la responsabilité


(Conséquences du fait internationalement illicite)
Sous réserve de l’existence éventuelle d’une responsabilité sans
manquement en droit international, la responsabilité peut être définie comme
la situation créée par la survenance d’un fait internationalement illicite. Il en
résulte une nouvelle relation juridique entre l’État ou l’Organisation
Internationale auteur de ce fait et un ou plusieurs autres sujets du droit
international. Toute règle de droit international se décompose en une
obligation majeure, qui est de la respecter, et une obligation mineure,
consistant à corriger les effets de son non-respect. Tel est le contenu même de
la responsabilité dans tout système juridique. C’est le même qui s’applique à
l’égard du principe de la souveraineté permanente.

Le mécanisme général de la responsabilité applicable est très


clair : pas de responsabilité internationale sans préjudice ou dommage. La
responsabilité peut être définie comme la situation créée par la survenance
d’un fait internationalement illicite. Ce fait doit produire un préjudice
juridique, condition nécessaire de l’existence de la responsabilité. Il en résulte
une nouvelle relation juridique entre l’État ou l’Organisation internationale
auteur de ce fait et un ou plusieurs autres sujets du droit international. Toute
règle de droit international se décompose en une obligation majeure, qui est de
la respecter, et une obligation mineure, consistant à corriger les effets de son
non-respect. Tel est le contenu207 même de la responsabilité dans tout système
juridique qui s’applique également en cas de violation du principe de la
souveraineté permanente.

I. Le préjudice
L’article 31, §2, du projet d’articles de la C.D.I. reflète
indiscutablement le droit positif quand il définit le préjudice en ces termes : “ le

207
Voir le code de la C.D.I.
140

préjudice comprend tout dommage, tant matériel que moral résultant du fait
internationalement illicite de l’État ”. Du même coup se trouve confirmée la
synonymie des mots “ dommage et préjudice”.

En cas de violation de la souveraineté permanente, un État subit


plusieurs dommages à la fois liés à ses ressources naturelles ainsi qu’à toutes
sortes des richesses dudit État victime. Cependant, ce principe obéit à un
régime particulier des violations graves d’obligations découlant de normes
impératives du droit international général.

II. Contenu de la responsabilité internationale


II.1. Exécution de l’obligation, cessation et non-répétition
Le fait internationalement illicite dont il est question ici,
demeure la violation du principe de la souveraineté permanente. C’est une
atteinte à la sécurité des rapports juridiques comme le stipule si bien la
résolution 3281 (XXIX) du 12/12/1974 sur la charte des droits et devoirs
économiques d’un Etat. Comme tout système juridique, le droit international,
malgré son caractère faiblement “exécutoire ” (par opposition à “ obligatoire ”,
ce qu’il est comme tout ordre juridique) s’efforce d’en limiter les effets
perturbateurs. Et d’abord en réaffirmant la persistance de l’obligation
violée : “ Les conséquences juridiques d’un fait internationalement
juridiques208… n’affectent pas le maintien du devoir de l’État responsable
d’exécuter l’obligation violée” (art. 29 du projet de la C.D.I.).

Aux termes de l’art. 30 du projet de la C.D.I., l’État responsable


du fait internationalement illicite a également “ l’obligation :
1°. d’y mettre fin si ce fait continue ;
2°. d’offrir des assurances et des garanties de non répétition appropriées si ces
circonstances l’exigent”.

La cessation du fait internationalement illicite qui se prolonge ou


se répète dans le temps ne soulève pas les mêmes problèmes. Elle est la

208
Dominique ROSENBERG op.cit, p. 278.
141

première et la plus évidente conséquence de l’obligation générale incombant à


l’État ou à l’Organisation internationale responsable d’éliminer les
conséquences de son fait internationalement illicite, principe qui guide
également le droit applicable en matière de réparation

II.2. L’obligation de réparer.


L’article 31du projet d’articles de la C.D.I. précise que “ l’Etat
responsable est tenu de réparer intégralement le préjudice causé par le fait
internationalement illicite”. A coté de l’obligation de réparer, caractéristique de
la responsabilité, existe une faculté de réparer à titre gracieux.

II.3. Modalités de la réparation


Comme l’indique clairement le projet de la C.D.I209., “ la
réparation intégrale du préjudice causé par le fait internationalement illicite
prend la forme de restitution, d’indemnisation, et de satisfaction, séparément
ou conjointement ”.

3.1. Remise des choses en l’état ou restitutio in integrum


L’objectif premier de la réparation est d’effacer toutes les
conséquences du fait internationalement illicite210. Il en résulte que, chaque
fois que cela est possible, il convient de privilégier la restitutio integrum qui
vise à la remise des choses dans l’état antérieur au fait internationalement
illicite, par rapport aux autres formes de réparation. Celle-ci constitue donc la
modalité de principe de la réparation. En cas de préjudice matériel, quand
l’acte juridique a déjà produit des effets irréversibles ou lorsqu’un acte matériel
a causé un dommage définitif, la remise des choses en l’état n’est plus
concevable et il faut chercher une autre modalité de réparation.

3.2. Réparation par équivalence : indemnisation

209
Patrick Daillier et Alain PELLET, op. cit.p.895
210
Ibidem
142

Toujours dans l’affaire211 de l’usine de Chorzow, la C.P.J.I. a


reconnu que “ c’est un principe de droit international que la réparation d’un
dommage peut consister en une indemnité”.

En effet, si la restitutio in integrum constitue le mode de


réparation privilégié, celle-ci se révèle le plus souvent difficile et le paiement
d’une indemnité est dans la pratique la modalité de réparation la plus
courante. C’est que, comme le dit Grotius212, l’argent est la mesure de la valeur
des choses, de fait, l’indemnisation est la forme la plus fréquente de réparation.

3.3. La satisfaction
Dans certains cas, l’indemnisation est inadéquate pour réparer
un préjudice purement moral ; la réparation la mieux adaptée est, elle aussi,
purement morale : c’est la satisfaction. Il s’agit par exemple des regrets
exprimés ou des excuses présentées par l’État responsable, ou encore, dans
certains cas, d’actes symboliques comme le salut au drapeau, etc.

§ 5. Mise en œuvre de la responsabilité


Qui est titulaire du droit d’invoquer la responsabilité, en cas de
la violation de la souveraineté permanente ? Dans la très grande majorité des
cas, seul l’État lésé, celui qui a subi un préjudice, immédiat ou médiat, est en
droit d’invoquer la responsabilité de l’auteur de la violation de la souveraineté
permanente.
La Société internationale est marquée par un degré poussé de
décentralisation ; contrairement à ce qui se passe dans l’État, il n’y existe pas
d’autorité centrale pouvant déclencher des poursuites contre un État ou une
Organisation internationale auquel un fait internationalement illicite peut être
attribué. Sans doute, les Nations Unies sont–elles dotées de pouvoirs coercitifs
qui, en dernière analyse, peuvent être utilisés pour obliger un État à exécuter
les obligations qui lui incombent en matière de responsabilité ; et certaines
organisations régionales (O.E.A.,Union Africaine) peuvent contribuer à cette

211
Joe VERHOEVEN, op. cit. p.722.
212
Alain PELLET ET Patrick DAILLIER, op. cit., p. 798 et s.
143

mission213. Mais celle-ci ne s’inscrit pas dans le cadre du droit de la


responsabilité : il s’agit de maintenir la paix et la sécurité internationales,
même si à cette occasion, la cessation d’un fait internationalement illicite ou la
réparation de ses conséquences dommageables peuvent être exigées,
notamment par le conseil de sécurité agissant dans le cadre du chapitre VII de
la charte. L’article 48 du projet de la C.D.I. va plus loin encore en admettant
que “ tout État autre qu’un État lésé est en droit d’invoquer la responsabilité
d’un autre État si … (b) l’obligation violée est due à la communauté…’’.

I.Les modalités d’invocation de la responsabilité


Les procédures de mise en œuvre214 de la responsabilité
internationale d’un État ou d’une organisation internationale, en cas de
violation de la souveraineté permanente ne présentent aucune particularité par
rapport aux mécanismes usuels des relations entre États. Elles passent en
général par le canal des missions diplomatiques des États concernés et le
règlement des divergences qui peuvent opposer l’État responsable et celui ou
ceux qui invoquent sa responsabilité doivent être résolues par des moyens
pacifiques (règlement pacifique de différends dont les négociations
diplomatiques sont les plus usuels), si le négociations échouent, le différends
peut être soumis à un organe juridictionnel ou arbitral.

II. Règlement pacifique des différends internationaux


Le règlement de différend215 dû à la violation du principe de la
souveraineté permanente est complexe et fait intervenir à la fois les deux
grandes catégories de modes de règlement de différends, en combinant le
critère de la portée juridique de la solution et son fondement, en opportunité
ou en droit. Cela parce que tout conflit international est à la fois politique et
juridique, seule la pondération des aspects politiques et juridiques varie. D’où
on a successivement :
II.1. Le règlement non juridictionnel
Il s’agit de :

213
Joe VERHOEVEN, op.cit., p.769.
214
Joe VERHOEVEN, op.cit., p.769.
215
Patrick DAILLIER et Alain PELLET, Op. Cit. p.830-935.
144

1°. procédés inter étatiques : négociations diplomatiques ; intervention des


tiers (bons offices, médiation, enquête internationale, conciliation
internationale) ;
2°. règlement non juridictionnel dans le cadre des O.I.

II.2. Le règlement juridictionnel


L’alinéa 4 de la résolution 1803 (XVII )sur la souveraineté
permanente prévoit expressément ce mode de règlement en ces
termes : “…dans tout cas où la question de l’indemnisation donnerait lieu à
une controverse, les voies de recours nationales devront être épuisées …
Toutes fois, sur accord des États souverains, et autres parties intéressées, le
différend devrait être soumis à l’arbitrage ou à un règlement judiciaire
international”. Voilà donc les deux procédés de règlement prévus par la
résolution 1803. Selon le mot d’un délégué à la conférence de la Haye de 1907,
l’arbitrage est la confiance, le règlement juridictionnel l’obéissance. Cela étant,
le mode de règlement juridictionnel est constitué de deux procédés que sont le
recours à l’arbitrage et le règlement par une juridiction permanente.
Examinons d’abord l’arbitrage et le règlement judiciaire ensuite.

2.1. Le règlement arbitral


‘‘L’arbitrage international à pour objet les règlements des litiges
entre les états par les juges de leurs choix et sur base du respect du droit’’216
comme tout acte juridictionnel, la sentence arbitrale est dotée de l’autorité de
la chose jugée dont le fondement est à recherché soit dans la souveraineté
étatique, soit dans le fait d’être rendue sur base du droit.
Le recours à l’arbitrage217 implique l’engagement de se soumettre de bonne foi
à la sentence. La résolution 1803 (XVII) sur la souveraineté permanente, litera
4, reconnaît expressément l’arbitrage comme mode de règlement de litige en
ces termes : “…Dans tous les cas où la question de l’indemnisation sera
soulevé, le différend devrait être soumis à l’arbitrage ou à un règlement
judiciaire international”. Rappelons aussi que le recours à l’arbitrage implique

216
Patrick DAILLIER et Alain PELLET, op. cit. p.867 - 885.
217
Voir l’alinéa 4 de la résolution 1803, où l’arbitrage est proposé parmi les modes de règlement de différend
institués par cette résolution.
145

le droit de refuser d’être attrait devant un tiers. Elle implique tout autant le
droit de faire exception à ce refus par un engagement conventionnel. Ce
consentement à l’arbitrage doit être suffisamment clair et précis pour
constituer une véritable obligation juridique internationale. D’où il est tantôt
facultatif, tantôt obligatoire.

2.2. Le Règlement par une juridiction permanente


La Cour Internationale de Justice (C.I.J.) constitue l’organe
judiciaire principal des Nations Unies. Compte tenue de la nature juridique218
du principe de la souveraineté permanente, qui est un jus cogens, les litiges en
cas de sa violation sont portés devant la Cour Internationale de Justice,
comme cela est bien prévue par la résolution 1803(XVII) en son litera 4.

On se rappellera aussi que cette même résolution stipule que la


violation de ce sacré principe entraîne la violation de la charte de l’O.N.U. et
gêne la coopération et le maintien de la paix et de la sécurité internationale. Le
conseil de sécurité joue donc à son tour un rôle important en cas de violation
de ce sacré principe. C’est à lui que revient la tache de constater que cette
violation de la souveraineté permanente constitue ou non un cas de rupture ou
de menace contre la paix, de le qualifier et de prendre des mesures qu’il juge
nécessaire pour rétablir la paix dans la zone troublée.

III. Cas pratique : Affaire des activités militaires et paramilitaires


opposant la RDC à l’Uganda
III.1. Prétention de la partie demanderesse
La R.D.C. soutient que l’exploitation illégale et le pillage de ses
ressources naturelles constituent des violations par l’Ouganda, de “ la
souveraineté et de l’intégrité territoriale de la R.D.C., et plus particulièrement
de la souveraineté de la R.D.C. sur ses ressources naturelles ”. A cet égard, la
R.D.C. se réclame du droit des États sur leurs ressources naturelles et
mentionne la résolution 1803(XVII) relative à la souveraineté permanente sur
les ressources naturelles adoptée par l’A.G. des Nations Unies le 14/12/19622,

218
Synthèse de l’additif au mémoire N°S/221/1156 du gouvernement sur le pillage en R.D.C.
146

la déclaration sur l’établissement d’un nouvel ordre économique international


contenue dans la résolution 3201(S.VI) adoptée par l’A.G. le 1er mai 1974, et la
charte des droits et devoirs économiques des États adoptés par l’A.G. des
Nations Unies dans sa résolution 3281(XXIX) du 12/12/1974.

La R.D.C. affirme que l’Ouganda est en tout état de cause


responsable des actes de pillage219 et d’exploitation illégale de ses ressources
commis par des officiers et soldats des UPDF, qui ont qualité d’organe220 de la
République Ougandaise. D’après elle, il importe peu que les membres de
l’armée Ougandaise se soient ou non conformés à des ordres officiels de leur
gouvernement, ou qu’ils aient agi à titre officiel ou privé.

S’agissant du devoir de vigilance, la R.D.C. prétend que


l’obligation de respecter la souveraineté des États sur leurs ressources
naturelles implique que tout État prenne les mesures appropriées221 pour que
ses forces armées, ses ressortissants ou les groupes qu’il contrôle ne se livrent
pas à l’exploitation illégale des ressources sur le territoire d’un autre État. La
RDC, affirme que toutes les activités d’exploitation de ressources naturelles
menées par des entreprises et ressortissants Ougandais ou des mouvements
rebelles soutenus par l’Ouganda constituent des actes d’exploitation illégale de
ses ressources naturelles par des membres des forces armées ougandaises, par
des entreprises privées et des ressortissants ougandais, ou par les
mouvements rebelles congolais qu’il contrôlait et soutenait, manquant ainsi à
son devoir de vigilance.
La RDC fait valoir que, en se livrant à l’exploitation illégale et au
pillage des ressources naturelles congolaises, l’Ouganda a également violé les
obligations qui s’imposaient à lui, en tant que puissance occupante, en vertu
du jus in bello222. Selon la RDC, “ le détail des règles du droit des conflits
armés relatives à l’exploitation des ressources naturelles doit être examiné au
regard du principe fondamental de la souveraineté permanente sur les

219
Voir rapport panel
220
Ibidem
221
Rapport des commissions ‘’porter’’ et ‘’panels’’
222
Cour Internationale de Justice, Rôle général N°16 du 19/12/2005, 100p.publié par www.cij-icj.org
147

ressources naturelles ”, lequel, de l’avis de la RDC, reste d’application en


toutes circonstances, notamment en temps de conflit armé et d’occupation.

III.2. Prétention de la partie défenderesse


L’Ouganda nie pour sa part d’avoir violé le principe de la
souveraineté permanente du peuple congolais sur ses ressources naturelles. Il
soutient que ce principe “ façonné dans un cadre historique précis (notamment
celui de la décolonisation) et ayant une finalité bien précise ”, ne saurait être
applicable dans le contexte de la présente affaire. L’Ouganda affirme que des
actes individuels commis à titre privé par des membres de ses forces armées et
au mépris d’ordres et d’instructions ne permettent pas de lui imputer une
violation de la souveraineté permanente du peuple congolais sur ses
ressources naturelles.

III.3. Décision de la Cour


La Cour considère qu’elle ne peut retenir l’affirmation du
demandeur selon laquelle l’Ouganda aurait violé le principe de la souveraineté
permanente (de la RDC) sur ses ressources naturelles. La Cour rappelle que, le
principe de la souveraineté permanente sur les ressources naturelles a été
énoncé dans les résolutions 1803(XVII) adoptée par l’A.G. des Nations Unies le
14/12/1962, puis a été développé dans la déclaration concernant
l’instauration d’un nouvel ordre économique international contenue223 dans la
résolution 3201 (S.VI) adoptée par l’A.G. le 1er mai 1974, et la charte des droits
et devoirs économiques des États adoptés par l’A.G. des Nations Unies dans sa
résolution 3281 (XXIX) du 12/12/1974.

Tout en reconnaissant l’importance224 de ce principe, qui revêt


le caractère d’un principe de droit international coutumier, la Cour relève que
rien dans ces résolutions de l’A.G. ne laisse entendre qu’elles soient applicables
au cas particulier du pillage et de l’exploitation de certaines ressources
naturelles par des membres de l’armée d’un État intervenant militairement sur

223
Arrêt rendue sur l’Affaire des activités militaires et para militaire être RDC c Uganda, pp. 48 à 57, publié par
www.cij-icj.org.
224
Arrêt rendue sur l’Affaire des activités militaires et para militaire être RDC c Uganda, pp. 48 à 57, publié par
www.cij-icj.org.
148

le territoire d’un autre État, ce qui est l’objet du troisième chef de conclusions
de la RDC. La Cour n’estime pas que ce principe s’applique à ce type 225 de
situation.
La Cour conclut qu’elle dispose de suffisamment d’éléments de
preuve crédibles pour considérer que l’Ouganda a engagé sa responsabilité
internationale à raison des actes de pillages et d’exploitation des ressources
naturelles de la RDC commis par des membres des UPDF226 sur le territoire de
la RDC, de la violation de son devoir227 de vigilance s’agissant de ces actes et
du manquement des obligations lui incombant, en tant que puissance
occupante de l’Ituri, en vertu de l’article 43 de du règlement de la Haye de
1907, quant à l’ensemble des actes de pillage et d’exploitation des ressources
naturelles commis dans le territoire occupé.

III.4. Bref commentaire sur ce cas


Pour notre part, nous pensons que l’adage ‘’curria non novit jus’’
s’applique dans ce cas précis. Le juge ne sait pas appliquer la loi, car il n’a pas
tenu compte de l’évolution du principe de la souveraineté permanente pour se
rendre compte que son objet s’est étendu.

En effet, il ne s’agit plus seulement d’un principe de la


décolonisation, mais bien plus son objet s’est étendu, incluant : 1° un pouvoir
de contrôle sur les intérêts économiques étrangers, 2° un pouvoir de
réglementer l’investissement, de réglementer et de surveiller les activités des
sociétés transnationales dans les limites de sa juridiction nationale
l’investissement, 3° un droit de nationaliser, d’exproprier ou de transférer la
propriété des biens étrangers, ...

225
Ibidem.
226
Arrêt rendue sur l’Affaire des activités militaires et para militaire être RDC c Uganda, pp. 48 à 57, publié par
www.cij-icj.org.
227
Voir le Rapport commission Lutundula, secrétariat général de l’Assemblée Nationale congolaise, Kinshasa.
149

CONCLUSION GENERALE

Au terme du présent travail, qui a consisté à examiner l’article 9


de la constitution de la 3ème république en R.D.C., il convient de rappeler que
dans l’introduction de cette étude, nous articulions notre problématique
autour de l’apparente contradiction ou similitude entre, d’un coté l’art.9 et de
l’autre coté la loi BAKAJIKA, l’article 53 de la loi du 20/07/73, et l’article 34 de
la nouvelle constitution.

Nous avons par ailleurs souligné, la nécessité de connaître les


mécanismes juridiques par lesquels l’État peut recourir pour recouvrir les
ressources naturelles, qui lui ont été extorquées et pillées, en vue de satisfaire
le bien être de la population et le développement du pays. Cet état de choses
engendre des récriminations entraînant parfois des conflits228 qui opposent la
R.D.C. à ses agresseurs ou à ceux qui pillent ses richesses229, (individus
congolais, étrangers et autres États belligérants). D’où en définitive, nous en
venions à nous demander si la communauté internationale, ayant perçu ce
phénomène avait prévu des mécanismes juridiques propres à rétablir l’équilibre
des intérêts antagonistes, en cas de violation de ce principe.

C’est pourquoi, d’entrée de jeu, nous avons estimé que la


formulation de l’article 9, où l’on emploi l’expression de souveraineté
permanente n’était en rien contraire à l’art. 53 de la loi du 20/7/73 sur la
propriété inaliénable et exclusive de l’État, et à ces autres textes légaux
évoqués ci haut. Bien au contraire, la souveraineté évoquée à l’art. 9 les
complète, les englobe, car elle est plus large et complet, en prenant en compte
toute l’étendue, tous les compartiments du territoire congolais (espace
terrestre, maritime et aérien). Dans l’esprit du législateur congolais, en
consacrant ce principe dans le droit positif congolais, il entend protéger les

228
Mémoire additif du gouvernement congolais adressé au secrétaire général des Nations Unies, sur le pillage et
l’exploitation illégale des ressources de la RDC
229
On fait allusion ici à toutes les firmes internationales, aux hommes d’affaires congolais et étrangers, aux pays
puissants, …qui soutiennent et financent la guerre en RDC, en vue de perpétrer les crimes économiques et le pillage
des ressources naturelles de la R.D.C. cfr. : Rapports panel
150

générations présentes et à venir contre les atteintes et convoitises des Etats


étrangers sur les richesses et ressources naturelles de la R.D.C.

En outre, les ressources naturelles étant épuisables et un


important outil au service du développement économique, une gestion saine et
efficace s’avère non seulement nécessaire, mais également impérative pour
satisfaire le bien être de la population et le développement du pays, selon
l’esprit de la résolution 1803(XVII). A ce propos, les différents mécanismes de
contrôles institués par le principe de la souveraineté permanente constituent
un levier et un bouclier très efficace pour mettre fin au pillage230 des
ressources naturelles de la RDC. Celle-ci devra attraire en justice tous ceux
qui ont violés ledit principe et pillés ses ressources naturelles en saisissant la
C.I.J. en vue d’obtenir réparation pour tous les préjudices subis.

Le développement de l’Afrique dépend en gros de celui de la


RDC. Pour cela on doit favoriser la coopération internationale pour le
développement économique dans les pays des grands lacs, en procédant par
les investissements, en vue de promouvoir la paix dans cette région231 tant
meurtrie par les guerres. Cela étant, notre analyse s’est subdivisée en deux
chapitres ; dont le premier a porté sur la clarification conceptuelle et le second,
sur le régime juridique, mécanismes de contrôles et modalités d’exercice de la
souveraineté permanente.

Abordant le premier chapitre, intitulé : clarification conceptuelle,


nous avons constaté que cet article pose le problème de confusion entre les
termes propriété et souveraineté. D’où, il a été question de confronter, mieux
de distinguer la notion de souveraineté permanente consacrée par l’article 9, à
la notion de la plénitude des droits fonciers, miniers, et forestiers face ainsi à la
Loi dite BAKAJIKA(sect. 1ère), à celle de la domanialité et de domaine éminent
de droit médiéval, à celle de la suzeraineté (sect. 2ème), face à la loi BAKAJIKA
(sect. 3ème) et enfin à l’article 53 de la loi du 20/07/1973 consacrant la

230
Cfr Rapport panel des Nations Unies.
231
Nous avons à cet effet recouru aux principes de la vie internationale, dont: la vocation internationale de la RDC,
à la politique d’ouverture et au principe de bon voisinage.
151

propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’Etat Congolais (sect.


4ème) et enfin à l’article 34 de la constitution. Tout ceci dans le but de savoir le
sens et la portée de l’ art.9 en examinant les rapports qui existent entre ces
notions et voir si elles peuvent s’équivaloir ou s’interpénétrer et dire la même
chose.

Bref, il fallait préalablement résoudre ce problème sémantique en


le rendant claire, sans ambiguïté, ni confusion, pour faire cesser toutes les
polémiques et controverses autour de cet article.
Dans l’esprit du législateur congolais, en consacrant ce principe dans le droit
positif congolais, il entend protéger les générations présentes et à venir contre
les atteintes et convoitises des Etats étrangers sur les richesses et ressources
naturelles de la R.D.C. Quelle est donc la place de la propriété foncière sous
cette nouvelle constitution ?

En analysant plus profondément cet article, nous avons constaté


qu’il y a un hiatus, servant d’intermédiaire entre le 1er et le 2ème alinéa, pour
que cet article soit complet. Pour ce faire, nous avons estimé que cet hiatus
consisterai à préciser et déterminer la place de la propriété foncière de l’Etat
.D’où elle devrait être formulée ainsi : le sol, sous-sol, les mines sont la
propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’Etat. En distinguant
l’article 9 de l’article 34 de la constitution, on a démontré que ces deux articles
se recouvrent, mais ne s’opposent pas. Car l’article 9 n’a ni la prétention232 de
supprimer la propriété individuelle et collective acquise conformément à la loi
ou à la coutume, ni de supprimer le monopole de la propriété foncière de l’Etat.
Nous retenons donc, que l’État demeure toujours le seul et unique propriétaire
du sol, sous-sol, forêt, mines,… En répondant de la sorte, notre première
hypothèse se trouve ainsi confirmée à un degré largement fort.

Poursuivant notre analyse, dans le second chapitre, intitulé : du


régime juridique et des modalités d’exercice de la souveraineté permanente, il
s’est agi de mener un examen minutieux tout d’abord sur les différents

Dans la résolution 1803, et l’article 34 on retrouve le droit à la propriété privée et l’expropriation pour cause
232

d’utilité publique.
152

mécanismes de contrôles prévus par ledit principe(section1ère), ensuite les


modalités d’exercice et le régime juridique du principe sous examen( section
2ème) et enfin le cas de la violation de ce principe à la fois par les Etats, les
Organisation Internationales, les personnes privées et autres sujets, tant du
droit interne ou du droit international( section 3ème).

Il y a lieu de préciser que, dans l’étude des mécanismes de


contrôles, nous avons mis un accent particulier sur la nationalisation en le
distinguant de ses aspects et de ses notions voisines telles que : l’expropriation
pour cause d’utilité publique, la radicalisation, la réquisition, l’alignement,…
Ici aussi, nous avons mis en exergue ces notions aux prescrits de l’article 34 de
l’actuelle constitution, qui consacre le droit à la propriété privée et collective,
sous réserves des prescrits légaux. Contrairement à ce qui se dit, la propriété
privée dont il est question à l’art.34 ne s’applique pas au sol, au sous-sol, aux
mines qui restent une propriété exclusive, inaliénable de l’État Congolais.
L’article 53 de la loi du 20/07/73 est donc une limite, disons mieux, une
exception à l’article 34 de la constitution. Nous avons, par la suite, mentionné
d’autres mécanismes de contrôles tels que la réglementation
d’investissement233 privé et étranger des sociétés transnationales, ainsi que les
Entreprises conjointes, dits autrement “ contrats de joints ventures ” et autres
formes d’associations contractuelles.

S’agissant du régime juridique et des modalités d’exercice de la


souveraineté permanente, nous avons démontré, comme l’exige l’alinéa 2ème de
la résolution 1803 (XVII), que la souveraineté permanente doit s’exercer dans
l’objectif de l’intérêt général, pour le bien être de la population et le
développement du pays titulaire de l’exercice de cette souveraineté. D’où alors,
il était question que l’action de l’Etat congolais commence par réglementer
toutes les activités économiques se déroulant non plus seulement sur l’espace
terrestre, mais cette fois-ci, sur l’espace maritime et aérien, voire- même le
plateau continental, couvrant l’exclusivité du territoire congolais. Notre
deuxième hypothèse se retrouve également confirmée, à cet effet.

233
Loi N°004-2004 du 21/2/2002 portant code des investissements.
153

En définitive, nous avons abordé la 3ème section qui traite de la


violation du principe sous examen, avec comme cas pratique, l’affaire R.D.C.
contre Uganda. A ce propos, nous avons pu établir que, eu égard à la nature
du principe sous examen, qui est un jus cogens, sa violation constitue une
violation d’obligations impératives graves du droit international. Par-là aussi,
notre troisième hypothèse se trouve également confirmée.

En relevant les grands constats, nous pouvons dire que les


innovations qui résultent de l’article sous examen ici, par rapport à la
législation précédente, comportent beaucoup d’aspects novateurs qui sont de
nature à assurer aux générations futures une stabilité. Tel est justement le
mérite de cet article, le législateur congolais innove en intégrant cette fois
l’espace maritime, aérien et terrestre du territoire congolais ainsi que le plateau
continental. Pour ce faire, le terme propriété du droit privé ne paraît plus dès
lors approprié pour réglementer le lien juridique de l’État et son territoire et
appréhender les cimes des prérogatives de l’État sur son domaine public et
privé.

Toutefois, il convient de préciser que seul l’État congolais demeure


propriétaire du sol, sous sol, et mines comme cela fut le cas naguère avec la loi
dite ‘‘BAKAJIKA’’ et la loi du 20/07/1973. Cette notion de propriété dont
question ici est radicalement différente de celle de la propriété privée consacrée
par l’article 34 de la constitution. C’est même une exception à l’article 34. Les
pouvoirs publics sont seulement chargés de leur gestion administrative ou de
leur garde. En aucun cas ils n’en sont le propriétaire. C’est même la raison
pour laquelle nous disons que l’art.09 de ladite constitution ne contredit en
rien la conception du monopole de l’État sur son sol, sous sol, mines, etc.
prônée par la loi BAKAJIKA et celle du 20/07/73, car l’intention du législateur
est de rendre l’État propriétaire foncier maintenant et à jamais.

Malgré la persistance des risques politiques, la RDC, véritable


scandale géologique, est très convoitée à la fois par ses pays voisins, des
milices des hommes armés, et de l’autre coté par les investisseurs qui
154

négocient et concluent des marchés de ses ressources minières. Un futur


gouvernement234 congolais pourra-t-il redresser la situation, répudier
unilatéralement une partie des contrats léonins, mettre fin au pillage et à
l’exploitation illégale des ressources naturelles en restaurant la paix et la
sécurité entre la R.D.C. et ses voisins sans engager sa responsabilité
internationale ? Les pratiques actuelles compromettent déjà cette perspective.

Soulignons en dernière analyse que, cette piste complémentaire à


la présente étude, nous a été suggérée par notre étude. Mais nous ne pouvions
malheureusement pas l’aborder, notre recherche étant forcément délimitée
pour des multiples raisons. Notre vœu demeure que des recherches futures
réaffirment l’évolution et la marche inexorable de la science, comblent nos
insuffisances et aident le législateur congolais à légiférer toujours dans le
sens d’un meilleur équilibre entre la protection des investissements, des
ressources naturelles d’un coté et, de l’autre celle de l’intérêt général, c’est à
dire une vraie croissance économique et un développement durable pour notre
pays, la R.D.C.

234
Le défi majeur que ce gouvernement doit relever consistera en premier lieu à arrêter le pillage des ressources
naturelles, en passant par la pacification de tout le pays, ensuite revisiter les contrats dits léonins ; le revenu issu de
cette opération sera réparti et utilisé pour le bien être de la population et le développement du pays.
155

BIBLIOGRAPHIE

I. Textes des lois, instruments juridiques internationaux et nationaux


I.1. Instruments juridiques internationaux
1. Résolution 626 (VII) A.G. du 21/12/1952, Exploitation des richesses
naturelles
2. Résolution 1314 (XIII) A.G. du 12/12/1958, Droit des peuples et des
Nations à disposer d’eux-mêmes.
3. Résolution 1803 (XVII) : sur le principe de la souveraineté permanente des
États sur leurs ressources naturelles.
4. Résolution 3171 (XXVIII) A.G. du 17/12/1973, Souveraineté sur les
ressources naturelles.
5. Résolution 3201 (S-VI) du 1er Mai 1974, Déclaration relative à un nouvel
ordre économique international.
6. Résolution 3202 (S-VI) A.G. du 1er Mai 1974, Programme d’action à un
nouvel ordre économique international.
7. Résolution 3281 (XXIX) A.G. du 12/12/1974, Charte des droits et devoirs
économiques des États.

I.2. Instruments juridiques nationaux (législation interne)


1. Constitutions
1. J.O.R.D.C., Constitution de la République Démocratique du Congo du 18
Février 2005.
2. J.O.R.D.C., N°spécial, 5/04/2003, Constitution de la Transition.
3. J.O.R.D.C., Compilations des textes constitutionnels de la RDC : de la
Charte coloniale à l’Acte constitutionnel de la Transition.
2) Codes
1. J.O.Z., Loi n°73/021 du 20/07/1973 mis à jour au 1er /08/1980.
2. J.O.R.D.C., Loi N°007/2002 portant Code minier, 43ème Année, du 15
Juillet2002.
3. Loi O11-2002, du 29 août 2002, portant code forestier.
4. J.O.R.D.C., Loi n°004-2004 du 21 février 2002 portant code des
Investissements.
156

5. J.O.Z., Loi 66-96, du 1er juin 1982, portant code de navigation fluviale et
lacustre.
6. P. PIRON et J. DEVOS, Codes et Lois du Congo Belge, Bruxelles, Larciers,
1959.
3) Lois
4) Jurisprudences

II. OUVRAGES
1. BAKANDEJA wa Mpungu, Le Droit du commerce international, les peurs
justifiées de l’Afrique face à la mondialisation des marchés, Afrique
Editions/De Boeck Université, Kinshasa-Bruxelles, 2001, 174p.
2. BEAUD Michel, L’art de la thèse, La Découverte, Paris, 2001, 200p.
3. BENCHICKH Madjid, Droit International du sous-développement, Office des
publications universitaires, Alger, 1983.
4. BONGOY Mpekesa, Investissements mixtes au Zaïre, joints ventures pour
une période de transition, P.U.Z., Kinshasa, 1975.
5. BUABUA wa Kayembe, Droit économique congolais, Édition Universitaire
africaine, Kinshasa, 2000.
6. BURDEAU Georges, Manuel de Droit Constitutionnel, Paris, 1997, 825p.
7. CARRE de MALBERG Raymond, Introduction générale à l’étude de l’État,
T.1 et 2, Paris, 1945.
8. CARREAUD.et alii : Droit international économique, Dalloz, Paris, Paris,
1990, p.725
9. COMBACAUD Jean, Droit International Public, Paris 1998.
10. DABIN Jean, Doctrine générale de l’État, Paris1956.
11. DELAUBADERE André, Manuel de Droit Administratif, 10ème édition, Paris,
LGDJ, 1976, 299p.
12. DEPAGE Henri, Traité élémentaire de droit civil belge, T. I, Bruyllant,
Bruxelles, 1962.
13. DUVERGER Maurice, Droit Constitutionnel, LGDJ, Paris, 1995.
14. FEUEUR Guy et CASSAN Hervé, Droit Économique International,
L.G.D.J.1990.
15. FLAMME André, Droit administratif, T. II, Bruxelles, Bruyllant, 1989.
16. GILLES Bertin, L’investissement international, P.U.F., Kinshasa, 1975.
157

17. JADOT Benoît, OST François (s.dir), Élaborer la loi aujourd’hui mission
impossible, FUSL, Bruxelles, 1999, 253p.
18. JOURDAIN Patrice, Les Biens, Dalloz, Paris, 1995, 440p.
19. KALAMBAY Gaston, Droit civil, Régime foncier et immobilier, P.U.Z.,
Kinshasa, 1989.
20. LWANGO Thomas, Essai sur la législation économique du régime Mobutu,
Ed. Imprideco, Kinshasa, s.d.209p.
21. M.A.LAFLAMME, Droit Administratif, T.II, Bruyllant, Bruxelles, 1989.
22. MASAMBA Makela, Droit économique, cadre juridique de développement au
Zaïre, Kinshasa, 1995.
23. MASAMBA MAKELA, Droit économique, cadre juridique de développement
au Zaïre, Kinshasa, 1995.
24. MOULY Christian, Le Droit de propriété et l’environnement, Dalloz, Paris,
1997
25. MUGANGU M. Séverin, La gestion foncière rurale au Zaïre, réformes
juridiques et pratiques foncières locales ; cas du Bushi. U.C.L. ,1997.
26. Nguyen Quoc Dinh et alii, Droit International Public, L.G.D.J., Paris 2000,
7ème édition, écrit par Alain PELLET et Patrick DAILLIER, 1510p.
27. RIVERO Jean et WALINE Jean, Droit administratif, 16ème édition, Dalloz,
Paris, 1996.
28. ROSENBERG Dominique, Le principe de la souveraineté permanente des
États sur leurs richesses et leurs ressources naturelles, L.G.D.J., Paris,
1983, 359p.
29. TOURET Denis, Droit Administratif, 1991, Paris, France, 224p.
30. VEDEL Georges et DELVOLE Pierre, Le système français de protection des
administrés contre l’administration, Sirey, Paris, 1969.
31. VERHOEVEN Joe, Droit International Public, Larcier, Bruxelles, 2000.
32. YABILI Yalala Asani, Code de la zaïrianisation, Mwanga Hebdo,
Lubumbashi, s.d. 135p.

III. ANALES, ARTICLES, NOTES DE COURS, SYLLABUS, REVUES


ET AUTRES PUBLICATIONS
1. D’ARGENT Pierre, Droit International Public, Notes de cours, inédits,
G3droit/U.C.B., 2003-2004.
158

2. KALAMBAY Gaston, Domaine de l’État, syllabus, L1droit/UCB, 2004-2005,


98p.
3. KALMBAY Gaston, “ La nouvelle loi Zaïroise sur l’expropriation pour cause
d’utilité publique” in Penant, n°764, 1979, pp.164-187.
4. LEROY Etienne, L’Espace et le foncier, article paru dans Intercoopérant,
APREFA et Université Paris1, paris France, 1990.
5. MANGA Euleuter, Relations Économiques Internationales, Notes de cours,
inédits, L2 droit/U.C.B.,2005-2006.
6. MUGANGU Séverin, Domaine de l’État, Urbanisme et Aménagement du
territoire, L1 droit/U.C.B., 1999-2000.
7. MUGANGU Séverin, Droit civil : les Biens, notes des cours, T.1.,
G2droit/U.C.B., 1999-2000, 99p.
8. MUSHAGALUSA Justin, “ L’Expropriation pour cause d’Utilité Publique en
Droit congolais : application à l’extension du parc national de Kahuzi-
Biega ” travail de mémoire, L2 droit/UCB, 1998-1999, 138p.

IV. SUPPORT ELECTRONIQUE


-www.arso.org
–www.cij-icj.org
-www.hri.ca
-www.unhchr.ch
-www.docip.org
-www.lepotentiel.com
-www.er.uqam.ca
-www.congoforum.be
-www.cetim.ch
-www.fao.org
-www.idest-paris.org
2

V. DICTIONNAIRES ET ENCYCLOPEDIES
1. CABRILLAC Remy (s.d.), Dictionnaire du vocabulaire juridique, Litec,
paris, 2004, 399p.
2. CORNU Gérard, Vocabulaire juridique, Paris, France, 2003.
3. SALMON Jean, Dictionnaire de Droit International Public, Bruyllant
/A.U.F. Bruxelles, Belgique, 2001,1198p.
3

TABLE DES MATIERES

. Épigraphe ………………………………………………………………………… I
. Dédicace ….………………………………………………………………….…… II
. Remerciements ………………………………………………………………….. III
. Sigles et abréviations ………………………………………………………….. V

INTRODUCTION GENERALE ….………………………..…………………… 1


1. Problématique ……………………………………………………….………… 1
2. Hypothèse ………………………………………………………………………. 7
3. Méthodologie …………………………………………………………………… 8
4. Choix et intérêt du sujet …………………………………………………….. 9
5. Délimitation spatio-temporelle .……………………………………………. 11
6. Subdivision du travail .……………………………………………………..… 12

Chapitre Ier : CLARIFICATION CONCEPTUELLE ……………………..… 12


Section 1ère. De la souveraineté permanente .………………………….. 13
§1. Évolution et contenu du principe ………………………………………... 13
I. Evolution d’ensemble …………………………………………………………. 13
I.1. Origine.……………………………………………………………………….. 13
I.2. Etapes marquant l’évolution du principe ………………………………. 14
II. Contenu du concept de souveraineté permanente …………………….. 15
II.1. Notion de la S.P. selon les travaux préparatoires……………………. 16
II.2. Notion de S.P. selon la doctrine .………………………………………… 17
§ 2. Étendue de l’exercice de la souveraineté ………………………………. 18
I. Espace terrestre ………………………………………………………………… 19
II. Espace maritime et espace aérien ………………………………………… 21
§ 3. Caractères de la souveraineté permanente ………….………………. 20
I. Caractère économique ………………………………………………………… 21
II. Caractère permanent et inaliénable ……………………………………… 22
III. Caractère de conformité aux buts et principes des N.U. ………....... 23
IV. Caractère d’un pouvoir illimité et exclusif ……………………………… 23
V. Non susceptible d’appropriation ….………………………………………. 24
4

Section 2ème. Distinction entre la souveraineté permanente


et la plénitude des droits fonciers, miniers et forestiers ………… 24
§1. Évolution du régime foncier congolais ……………..………………… 24
I. Période du régime foncier colonial ……..…………………………….…… 24
I.1. Régime foncier de l’E.I.C. …………………………………………… ……. 24
I.2. Régime foncier du Congo – Belge ……………………………………….. 27
II. Période du régime foncier post-coloniale ………………………….……. 30
II.1. La loi BAKAJIKA..………………………………….……………………. .. 30
II.2. Portée de la loi BAKAJIKA ……………………………………………….. 31
2.1. Explication du concept ‘‘plénitude des droits’’……………………… 31
2.2. Explication du concept ‘‘pleine souveraineté’’………………………... 34
2.3. Incidence de ces deux concepts ………………………………………. 35
§ 2. Loi BAKAJIKA face à la S.P. …………………………………………….. 37
I. Ressemblance ………………………………….…………………………..…. 37
II. Dissemblance ……………………………………………………….…….…… 38
III. Rupture avec le régime colonial sous la loi BAKAJIKA renforcée … 39
Section 3ème. De la souveraineté permanente face à l’art. 53
de la loi du 20/07/1973 ………………………………….. 41
§1. Etendue du droit de la propriété de l’État sur le sol ……………….. 42
§2. Comparaison …………………………………….………………………….. 44
Section 4ème. Distinction entre la souveraineté permanente
et la domanialité …………..………………….………..…. 55
§1. Notion ………….…………………………………………………….………… 55
I. Définition …………..…………………………………………………………… 55
II. Aperçu général….……………………………………………………………… 56
§2. Comparaison .………………………………………………………….……. 56
I. Distinction entre souveraineté permanente et domanialité …………. 56
I.1. Pouvoirs dans le territoire étendue …………………………………….. 57
I.2. Pouvoirs sur le territoire – chose ……………………………………….. 59
II. Rapport entre la souveraineté permanente et le domaine éminent
du droit médiéval ………………………………………………..……….…. 63
§3. Composition ………………………………………………………………….. 65
5

I. Le domaine public ….………………………………………………………… 65


I.1. Composition …………………………………………………………………. 66
I.2. Protection juridique du domaine public ………………………………. 69
II. Domaine privé de l’État .…………………………………………….…….. 72
III. Modes d’acquisition des biens domaniaux .…………………………… 73
IV. Particularité des biens domaniaux ……………………………………… 73
Section 5ème. Distinction entre souveraineté permanente et la
suzeraineté …..……………………………………….……… 75
§1. Notion ………………………….………………………………………….…… 75
§2. Divergences …………………………………………………………….…….. 75
Section 6ème. Distinction entre souveraineté permanente et ses
notions voisines .……………………………………………… 76
§1. Souveraineté permanente et droits des peuples à disposer
d’eux-mêmes …………………………………………………………..……… 76
I. Une application du directe du droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes ..……………………………………………………………. 77
II. Un droit appartenant aux États …………………………………………… 79
§2. Souveraineté permanente et patrimoine commun de l’humanité …. 80
§3.La souveraineté permanente et l’art. 34 de la Constitution ;……….. 81
CONCLUSION PARTIELLE …………………………………………………….. 83

Chapitre IIème : REGIME JURIDIQUE, MECANISMES DE


CONTRÔLE ET MODALITES DE MISE EN ŒUVRE DU
PRINCIPE DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE ……………………. 86
Section 1ère. Mécanismes de contrôle …………………………………… 86
§1. Nationalisation et expropriation ………………………..……………… 86
I. Notion …………………………………………………………………………… 87
II. Le droit de nationaliser ou de privatiser ……………………………….. 88
II.1. Controverse sur le droit de nationaliser ……………………………… 89
II.2. Conditions d’exercice du droit de nationaliser ……………………… 89
§2. Expropriation et ses notions voisines ………………………………… 90
I. Expropriation et réquisition ………………………………………………… 90
II. Expropriation et nationalisation .…………………………………………. 91
6

III. Expropriation, emprise et voie de fait ….……………………………….. 92


III.1. Emprise ……………………………………………………………………… 92
III.2. Différence entre emprise irrégulière et voie de fait ………………… 96
III.3. Rattachement de ces notions avec l’expropriation ………………… 96
IV. Expropriation et alignement ……………………………………………… 97

§3. Réglementation des investissements privés et étrangers des


sociétés transnationales ……………………………..……….…… .. 98
I. Notion et définition ………………………………………………………….. 99
II. Réglementation nationale ……………………………………………….… 100
III. Réglementations bilatérales ……………………………………………… 102
IV. Réglementations régionales ………………………………………………. 102
V. Réglementation universelle ……………………………………………….. 102
§4. Entreprises conjointes et autres formes d’associations
contractuelles …………………………………………………………………
I. Les contrats d’entreprises conjointes (contrats de joints ventures) ... 103
II. De la concession à l’entreprise conjointe ………………………………… 103
II.1. Intérêt de l’entreprise conjointe ………………………………………….. 104
II.2. Limites du procédé ………………………………………………………….. 106
III. Régime traditionnel de la concession …………………………………….. 106
§4. Autres contrats d’association ………………………………………………. 107
Section 2ème. Du régime juridique et des modalités d’exercice
de la souveraineté permanente …………………..………. 108
§1. Les modalités d’exercice de la souveraineté permanente des États sur
leurs ressources naturelles ………………..…………………………………… 108
I. Objectif général ……………………………………..…………………………… 108
II. L’action de l’État ……………………………………………………………….. 109
III. La coopération internationale …………………………..…………………. 110
§2. Régime juridique conforme au principe de la souveraineté
permanente..………………………………………………………………… 111
I. Domaine (ou espace) terrestre ………………………………………………. 111
I.1. Le régime du sol et du sous – sol ………………………………………… 112
I.2. Le régime forestier …………………………………………………………… 112
7

I.3. Le régime minier ……………………………………………………………… 116


II. Domaine (ou espace) maritime .……………………………………………… 118
II.1.Régime juridique fluvial .…………………………………………………… 118
II.2. Régime juridique lacustre ………………………………………………… 118
II.3. Régime juridique de la mer territoriale ………………………………… 119
III. Régime juridique du plateau continental ……………………………… 122
III.1. Les droits souverains de l’État côtier sur son plateau
continental .……………………………………………………………….. 122
III.2. Limites aux droits de l’État côtier sur son plateau continental ... 124
IV. Le domaine (ou espace) aérien ……………………………………………. 125
IV.1. Espace aérien national …………………………………………………… 126
IV.2. Espace aérien international …..………………………………………... 126
Section 3ème. De la violation du principe de la souveraineté
permanente ……………………..……………………….…... 127
§1. Nature de l’obligation violée ……………………………………………… 127
§2. Attribution à un sujet de droit international …………………..……. 130
I. Attribution à un État.………………………………………………………. 131
II. Attribution à une Organisation Internationale à vocation
économique ……………………………………………………………………… 132
§3. Circonstances excluant l’illicéité …………………………………..…… 132
§4. Mécanisme général de la responsabilité ……………………..……….. 133
I. Le préjudice ……………………………………………………………………. 133
II. Contenu de la responsabilité internationale ………………………….. 134
II.1. Exécution de l’obligation, cessation et non – répétition ………….. 134
II.2. L’obligation de réparer ……………………………………………………. 135
II.3. Modalités de la réparation ……………………………………………….. 135
§5. Mise en œuvre de la responsabilité ……………………………………… 136
I. Les modalités d’invocation de la responsabilité ………………………… 137
II. Règlement pacifique des différends internationaux …………………. 137
II.1. Le règlement non juridictionnel ……………………………………….. 137
II.2. Le règlement juridictionnel ……………………………………………… 138
III. Cas pratique : Affaire des activités militaires et paramilitaires
opposant la RDC à l’Uganda ..…………………………………………… 139
8

III.1. Prétention de la partie demanderesse ………………………………… 139


III.2. Prétention de la partie défenderesse ………………………………….. 140
III.3. Décision de le Cour ……………………………………………………… 141
III.4. Bref commentaire sur ce cas..…………………………..…………….. 142

CONCLUSION GENERALE .……………………………………………….…... 143

BIBLIOGRAPHIE ……………………….…………………………..…………... 149

TABLE DES MATIERES ………………………………..………………….… 147

S-ar putea să vă placă și