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Bac de français 2019 Corrigé de la dissertation (séries S et ES)

« Avoir l’âme qui rêve, au bord du monde assise… », écrit Anna de Noailles.
Pensez-vous que ce vers puisse définir l’attitude du poète face au monde ? Vous vous appuierez
sur les textes du corpus, les œuvres que vous avez étudiées en classe ainsi que sur vos lectures
personnelles.

Introduction :
La contemplation des spectacles de la nature a souvent inspiré les poètes. Dans le romantisme
notamment, les auteurs y ont recherché de secrètes harmonies avec leurs états d’âme. Anna de
Noailles proposait d’ailleurs, dans « La Vie profonde » issu du recueil Le Cœur innombrable, d’«
Avoir l’âme qui rêve, au bord du monde assise… » pour définir son attitude de poétesse face au
monde. Ce comportement méditatif, détaché de la réalité immédiate, ce repli dans la « tour
d’ivoire » peut-il être considéré comme fondamental pour la création poétique ? Certes l’on
constate généralement que le poète se situe en retrait de la réalité, mais certains écrivains, depuis
la Renaissance, ont voulu s’impliquer directement dans l’actualité de leur temps. Qui plus est,
dans tous les cas, cet écart ou ce rapprochement entre mondes extérieur et intérieur a produit le
lyrisme si caractéristique de la poésie.

Développement :
1. Le poète en retrait Généralement, inspiré par le modèle antique d’une nature habitée par les
nymphes, le poète la considère avec le regard respectueux dû au sacré.

a) L’isolement amoureux
C’est souvent dans ce lieu préservé ou consolateur qu’il veut abriter ses amours. Il y recherche la
solitude pour se consacrer à l’aimée ou se recueillir sur ses sentiments. Vigny, dans « La Maison
du berger » invite Éva à venir le rejoindre dans la solitude de la montagne pour « rêver » tout à
loisir à leur passion. C’est aussi la grande tradition issue de l’Art d’aimer d’Ovide où la nature est
le refuge à la peine de cœur. Lamartine, dans « Le Lac », vient chercher consolation à la perte
d’Elvire. De même il laisse transparaître dans « La Solitude » le regret possible de ne plus être
aimé.

b) Le rêveur, le philosophe
Le poète peut suivre aussi les traces des ermites en prenant du recul par rapport à la société des
hommes pour méditer ou réfléchir à sa condition mortelle. Racan, dans les « Stances à Tirsis »
développe ce thème classique de la retraite : Agréable désert, séjour de l’innocence, Où loin des
vanités de la magnificence, Commence mon repos et finit mon tourment, Vallons, fleuves,
rochers, plaisante solitude, Si vous fûtes témoins de mon inquiétude, Soyez-le désormais de mon
contentement. Jean de Sponde contemple « le dormant de ce fleuve / Qui traîne lentement les
ondes dans la mer », il y voit l’image de nos vies qui s’écoulent trop facilement et sans relief vers
leur fin. Vigny déclame sa profession de foi stoïcienne dans les bois désolés de « La Mort du
Loup » : « Gémir, pleurer, prier est également lâche. Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
». Victor Hugo, à la fin des Contemplations, suivant la tradition romantique allemande qui avait
privilégié le rêve, nous livre avec « Ce que dit la bouche d’ombre » une vaticination sur la
métempsychose, animant de manière épique le règne minéral, végétal et animal. « Tout parle. Et
maintenant, homme, sais-tu pourquoi Tout parle ? Écoute bien. C’est que vents, ondes, flammes
Arbres, roseaux, rochers, tout vit ! Tout est plein d’âmes. » Le poète est alors celui qui prête sa
voix inspirée à ce qui balbutie en silence.

c) Le voleur de feu, le mysticisme


Dans la continuité de ce qui précède, avec Baudelaire, le spectacle de la nature n’est plus
seulement l’occasion d’une rêverie sur la condition humaine ou sur les harmonies entre le
paysage et le cœur de l’homme, mais l’occasion d’inventer « une sorcellerie évocatoire » pour
percer les mystères de la réalité. Dans « Correspondances », au moyen des équivalences fournies
par les synesthésies, il veut entrevoir ce qui se situe au-delà des simulacres trompeurs fournis par
nos sens : La Nature est un temple où de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles
; L’homme y passe à travers des forêts de symboles Qui l’observent avec des regards familiers. À
sa suite, Rimbaud déclare que « Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné
dérèglement de tous les sens. » Grâce à cette folle démarche, le poète devient « voleur de feu »
prométhéen pour ramener quelques parcelles de beauté de son voyage intrusif de l’autre côté des
apparences. Les symbolistes qui conçoivent le monde comme une réalité spirituelle ont voulu
rêver moins dangereusement en trouvant de nouveaux moyens d’expression pour dépasser la
simple représentation réaliste. Ils ont utilisé des images et des analogies pour créer des passerelles
entre le monde et leurs états d’âme ou leurs réflexions abstraites. On retrouve ces élans mystiques
chez Anna de Noailles qui veut, dans « La Vie profonde », avec cette immersion affective dans le
milieu naturel minéral et végétal, « S’élever au réel et pencher au mystère ». Enfin il faudrait
signaler la tentative hermétique de Mallarmé, sorte de mysticisme paradoxalement très
intellectuel, qui a essayé de substituer à l’univocité du langage positiviste un réseau de
connotations conceptuelles pour « chercher, induisant de symbole en symbole, la raison de la
nature et de la vie. » Ces tentatives poétiques d’ « être au monde » selon l’expression d’Heidegger
ont moins été une expérience sensible qu’une voie de connaissance.

2) Le poète impliqué qui veut changer le monde


Si certains poètes se sont tenus soigneusement à l’écart des contingences réalistes, un bon
nombre, même parmi ceux qui « s’étaient partagé depuis longtemps les provinces les plus fleuries
du domaine poétique », selon les propos de Baudelaire, ont souhaité s’impliquer dans l’actualité
brûlante de leur époque.

a) Le mage, le guide romantique


Dans la première moitié du XIXe siècle, les romantiques ont cultivé le sentiment de la nature.
Cependant quelques-uns parmi eux, tout en gardant une certaine hauteur de vue, se sont crus
obligés d’éclairer la conscience de leurs contemporains. Il s’agit de Lamartine, Vigny et surtout
Hugo. Lamartine dans son exhortation « À Némésis » défend la pureté de l’inspiration au service
de la vérité et de l’honnêteté, il promeut un lyrisme engagé qui repose sur la foi religieuse et
l’idéal de liberté. Quand la patrie est en danger, le devoir du poète est de renoncer à la futilité de
son art : « Honte à qui peut chanter pendant que Rome brûle, S’il n’a l’âme et la lyre et les yeux
de Néron ». Vigny, dans Les Poèmes antiques et modernes, glorifie « Moïse », guide inspiré du
peuple hébreu et symbole du poète moderne. Hugo, dans Les Rayons et les ombres, explicite et
théorise la « Fonction du poète », rôle prophétique de celui qui cherche à discerner l’avenir : « Le
poète en des jours impies Vient préparer des jours meilleurs ll est l’homme des utopies, Les pieds
ici, les yeux ailleurs. »
b) De la poésie épique traditionnelle à la poésie épique progressiste
Depuis l’Antiquité, la poésie épique avait rêvé l’ordre du monde en rattachant au domaine des
dieux l’histoire des peuples et de leurs dirigeants. Dans L’Énéide largement inspirée de L’Iliade,
Virgile cherche à rapporter les origines du peuple romain et à fonder la légitimité d’Auguste et de
la famille des Julii. On retrouve cet infléchissement du récit mythique à des fins politiques dans
La Franciade de Ronsard ou L’Henriade de Voltaire. Plus intéressant serait le cas de La Chanson
de Roland. Ce poème médiéval transforme une défaite infligée aux armées de Charlemagne par
les Basques, après le siège de leur capitale Pampelune, en un affrontement entre chrétiens et
Maures. Il se trouve que le monastère de Roncevaux se trouve sur la principale voie empruntée
par les pèlerins vers Saint Jacques de Compostelle et que la route vers le tombeau du saint
Matamore (tueur de Maures) est menacée par les royaumes berbères. Voilà sans doute une des
raisons de réécrire l’histoire pour occuper les soirées des marcheurs, leur donner du courage et
solliciter leurs dons. Au XIXe siècle, sous la plume de Victor Hugo, se produit un
infléchissement caractéristique. Si le registre épique est exploité de manière traditionnelle dans
Dieu ou La Fin de Satan, le poète évacue peu à peu le surnaturel au profit d’une vision
progressiste de l’histoire humaine. La Légende des siècles est cette entreprise où, en rêve, le poète
contemple le mur des siècles sur lequel apparaît la longue procession des scènes de l’histoire
humaine, passée, présente et future. Cette réécriture définie dans la Préface de la Première Série
comme « de l’histoire écoutée aux portes de la légende » cherche à discerner les progrès de
l’esprit humain accédant des ténèbres à la lumière.
c) Le dénonciateur, la satire, la polémique
Si les auteurs de la poésie épique traditionnelle ont gardé le plus souvent une certaine hauteur par
rapport au sujet traité, d’autres depuis la Renaissance n’ont pas hésité à entrer dans l’arène. Leur
art a cherché à rendre compte sans détour des horreurs ou des laideurs de leur époque. Ainsi,
Agrippa d’Aubigné a dénoncé les atrocités des guerres de religion dans Les Tragiques. Boileau se
plaint de manière triviale et grotesque des « Embarras de Paris ». Voltaire dans le « Poème sur le
désastre de Lisbonne » exprime de manière pathétique son émotion devant le cataclysme qui a
détruit la ville. Il distille aussi ses doutes au sujet des philosophies optimistes de Leibniz et Wolff.
Hugo, dans « Melancholia » dépeint l’horreur des injustices qui affectent la société de son temps :
travail des enfants, prostitution, conditions inhumaines… Dans Les Châtiments, il satirise avec
mépris l’usurpateur Napoléon III. Dans une lettre adressée à l’éditeur Pierre-Jules Hetzel, datée
du 7 septembre 1852 il écrit d’ailleurs : « J’ai pensé qu’il m’était impossible de publier en ce
moment un volume de poésie pure. Cela ferait l’effet d’un désarmement, et je suis plus armé et
plus combattant que jamais ». Au XXe siècle, la poésie « engagée » semble s’être édulcorée et
être revenue à une expression indirecte plus affective si l’on en juge à partir de « La Rose et le
réséda » d’Aragon, « Liberté » d’Éluard ou « Les Fusillés de Chateaubriand » de Cadou. La
violence paraît réservée à la chanson. Dans le face à face entre monde extérieur et intérieur, le
poète communique toujours son monde intérieur.

3. Le poète, qu’il rêve ou affronte le monde, lève toujours un coin du voile sur son univers
intérieur touché par ce qu’il regarde ou contemple.

a) Le regard nouveau
Chaque poète cherche au travers de sa sensibilité, de sa culture, des modes esthétiques de son
temps à nous partager ce qu’il voit, ce qu’il comprend et ressent. Depuis la Renaissance, la
mythologie grecque et latine a irrigué la vision de la nature. On peut penser au « Songe de Vaux »
de La Fontaine qui fait l’éloge des jardins à la française. Avec le romantisme est arrivée une autre
perception : loin de la ville mensongère, le poète entre en contact avec le divin, dans ces lieux
sauvages l’homme peut considérer sa destinée, son désir d’absolu insatisfait. Avec Nerval et
Baudelaire s’ouvre la voie de la poésie visionnaire, mais chez le second, paradoxalement aussi, la
laideur ou la beauté bizarre réintègrent l’univers poétique. La grande ville et l’environnement
industriel deviennent des sujets possibles. Apollinaire ouvre l’ère de la modernité en enchantant
la réalité la plus commune. Les surréalistes explorent les arcanes du monde intérieur de
l’inconscient… Tous les grands poètes offrent un regard original qui est leur marque de fabrique.

b) Le lyrisme ou expression des sentiments


Ce regard nouveau est accompagné de l’expression plus ou moins appuyée de sentiments ou
lyrisme. Lamartine dans « La Solitude » nous confie sa tristesse et son désenchantement, marques
du lyrisme élégiaque. Anna de Noailles et Andrée Chedid nous partagent leur étonnement devant
la vitalité et la richesse de la nature. Chaque fois que le poète « rêve », trois familles de
sentiments peuvent apparaître principalement : joie, tristesse et peur. Mais si le poète se confronte
à la réalité, nous découvrons d’autres catégories : la colère, l’indignation, l’enthousiasme.

c) La jouissance esthétique
Enfin il existe une autre espèce de réaction que peut nous livrer le poète, elle est moins sensible,
elle se rattache à l’admiration. Il s’agit de la jouissance esthétique. Cultivée pour elle-même, en
dehors de toute affectivité, elle a donné « l’art pour l’art ». Nous en retrouvons des traces dans
tous les textes du corpus. Tous les auteurs éprouvent une délectation devant le paysage qu’ils
contemplent. Lamartine, malgré sa tristesse, apprécie ces « doux tableaux », Anna de Noailles a «
l’âme qui rêve », Andrée Chedid partage avec son aînée des « rêves tenaces » tandis qu’Yves
Bonnefoy évoque lui aussi le « rêve » du « peintre » et l’« alchimie » des jeux de lumière. Cette
jouissance a même pu conduire les auteurs romantiques à cultiver leur souffrance pour en tirer du
plaisir. N’est-il pas surprenant de voir Anna de Noailles écrire « Et goûter chaudement la joie et
la douleur » ? Quant à Musset, il proclamait dans « Le Pélican » : « Les plus désespérés sont les
chants les plus beaux. Et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots ».

Conclusion : Les poètes ont pu chercher à se retirer du monde pour se consacrer à leur amour ou
pour guérir une peine de cœur. Dans la solitude ils ont contemplé l’ordre du monde et leur
condition mortelle avant que certains, à la suite de Nerval et Baudelaire, aient voulu percer les
mystères de la nature. D’autres ont trouvé indigne de leur art de se réfugier dans leur « tour
d’ivoire », aussi se sont-ils déclarés guide, mage ou prophète ; d’autres ont usé du registre épique
pour justifier l’ordre en place ou pour le faire changer. Quelques-uns ont quitté les « provinces
fleuries » pour emprunter la voie de la satire triviale ou de la dénonciation polémique. Dans ce
face-à-face avec le monde, qu’il soit mis à distance ou assumé, les poètes ont levé plus ou moins
un coin du voile sur leur univers intérieur. Ils ont fait preuve d’un regard original, ils nous ont
communiqué leurs émotions et sentiments jusqu’à nous partager une jouissance esthétique,
fondements de toute vraie poésie si elle veut nous toucher. Aujourd’hui quand la technique nous
permet d’ « Avoir l’âme qui rêve, au bord du monde assise… », de nous retirer facilement dans
un univers virtuel et factice, dans une solitude stérile, attendons-nous toujours de la poésie qu’elle
nous communique ce surplus d’humanité qui fait cruellement défaut à notre monde post-
moderne ?
Bac de français 2019 Corrigé de la dissertation (série L)
Sujet : Le sens d’une pièce de théâtre et le plaisir qu’elle nous donne reposent-ils uniquement sur
les mots ? Vous appuierez votre réflexion sur les textes du corpus, sur ceux que vous avez étudiés
en classe ainsi que sur votre expérience de spectateur.

Introduction
Pourquoi allons-nous au théâtre si ce n’est pour espérer prendre du plaisir à la représentation ?
Quelle est la source de cette jouissance attendue ? La plupart du temps, un bon sujet ; parfois
simplement l’attrait d’un nom d’auteur, d’acteur ou de dramaturge. Quelles sont donc les parts
respectives du texte et de la mise en scène pour savourer pleinement la bonne compréhension des
intentions de l’auteur ? Certes une bonne pièce de théâtre, c’est d’abord un bon texte, mais
d’autres éléments sont nécessaires à sa compréhension et au plaisir qu’elle peut nous procurer. En
dernier ressort, le sens et le plaisir passent essentiellement par une bonne diction et un jeu adapté
aux intentions de l’auteur.

Développement
1 – Une bonne pièce de théâtre, c’est d’abord un bon texte.
a. Le texte est indispensable à la compréhension du sujet.
Seuls les mots donnent les informations précises, Molière introduit la scène par une référence à
une commande de M. Jourdain : « Je voudrais bien auparavant vous faire entendre un air qu’il
vient de composer pour la sérénade que vous m’avez demandée. » Beaumarchais indique par les
propos de Figaro les mouvements de Rosine invisible « Derrière sa jalousie ». expriment les
nuances, Molière peut manifester la flagornerie et la suffisance du maître de musique par
l’accumulation des termes laudatifs et le langage ampoulé. Beaumarchais place la raillerie dans
les propos de Figaro. nous donnent accès à l’intériorité des personnages, notons en particulier le
rôle des monologues. Beaumarchais met dans la bouche du comte le manque d’assurance et
l’appréhension. Victor Hugo fait exprimer à la reine sa tristesse et sa solitude.
b. Le texte sert notre plaisir.
Le comique de mots Molière souligne la balourdise de son Bourgeois-gentilhomme : « Donnez-
moi ma robe pour mieux entendre… » Beaumarchais raille l’aveuglement amoureux : « en
amour, le cœur n’est pas difficile sur les productions de l’esprit… » Langage poétique chez
Racine, Brûlant dans Phèdre : Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ; Un trouble s’éleva dans mon
âme éperdue ; Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ; Je sentis tout mon corps, et
transir et brûler. Incantatoire dans Andromaque : Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle Qui
fut pour tout un peuple une nuit éternelle ; Figure-toi Pyrrhus, les yeux étincelants, Entrant à la
lueur de nos palais brûlants ; Sur tous mes frères morts se faisant un passage, Et de sang tout
couvert échauffant le carnage ; Songe aux cris des vainqueurs, songe aux cris des mourants, Dans
la flamme étouffés, sous le fer expirants ; Art de la formule chez Corneille, Hugo « À vaincre
sans péril, on triomphe sans gloire. » « Aux âmes bien nées, La valeur n’attend point le nombre
des années. » Le Cid « Aujourd’hui je suis reine. Autrefois, j’étais libre. » « Madame, sous vos
pieds, dans l’ombre, un homme est là « Qui vous aime, perdu dans la nuit qui le voile ; « Qui
souffre, ver de terre amoureux d’une étoile ; » Ruy Blas

2 – Mais d’autres éléments sont nécessaires à la compréhension de la pièce et au plaisir qu’elle


peut nous procurer.
a. Le jeu de l’acteur vient renforcer ou contredire ses propos. L’ignorante sottise de M. Jourdain
est renforcée lorsqu’il change d’attitude à l’égard du port de sa robe de chambre. L’apparente
déférence de Figaro à l’égard de son maître est démentie par sa raillerie ironique : « Est-ce qu’un
homme comme vous ignore quelque chose ? »
b. Les déguisements au service de la tromperie, les accessoires Dans la comédie, le déguisement
dissimule le projet de tromperie ou aide à la révélation de la vérité des êtres. Voir le théâtre de
Marivaux, La Double inconstance, Le Jeu de l’Amour et du hasard. Rôle de l’échange des habits
dans L’Île des esclaves. Importance du maniement des accessoires : robe de chambre de M.
Jourdain, guitare dans les mains du comte. Ici, il met en valeur une positon de faiblesse. Certains
accessoires deviennent des objets symboliques : la statue du commandeur dans Dom Juan de
Molière, le masque dans Lorenzaccio de Musset, la trappe et le crochet dans Ubu roi de Jarry, le
rhinocéros dans la pièce du même nom d’Ionesco…
c. Les décors, l’arrière-plan
Les décors dans leur nudité ou leur réalisme créent une ambiance. Hugo, théoricien du drame
romantique, veut, par ses didascalies précises et détaillées, des décors chargés pour mieux rendre
compte de la réalité complexe. Jean-Louis Barrault a voulu au contraire concevoir sa mise en
scène de Phèdre comme une tragédie solaire dépouillée : « Les lumières. On doit sentir
constamment la présence du soleil. L’action commence à l’aube et se termine après le coucher du
soleil. Le soleil manifestera d’autant plus intensément sa présence que la scène sera traversée de
rayons. Jamais ce qu’on appelle un « plein-feu » de théâtre ne donnera autant l’impression
brûlante du soleil que si celui-ci perce l’atmosphère par des faisceaux lumineux serrés. La
présence du soleil se manifeste avec plus de force à travers les fentes d’une persienne qu’en plein
milieu d’une plaine où tout, baigné par lui, est aplati. Que les projecteurs soient « saignants ».
[…] Phèdre est une œuvre classique, il faut être économe. Il ne faut aucun ornement ou accessoire
extérieur à l’action. »1

3 – Le sens et le plaisir passent essentiellement par une bonne diction et un jeu adapté aux
intentions de l’auteur.
a. Respecter le texte et le mettre en valeur
Bien déclamer, articuler et poser sa voix. Respecter la justesse des vers, effectuer la diérèse
quand elle est nécessaire. Prendre les bonnes intonations, mettre en valeur les patois (Molière),
les accents provinciaux ou affectés (préciosité chez Molière), emphase maîtrisée (tirade du nez
dans Cyrano de Bergerac de Rostand)…
b. Animer les jeux de scène surtout dans la comédie
Ne pas oublier que la comédie est proche de la pantomime. La farce multiplie les gestes. L’acteur
ne doit pas rester immobile. La gestuelle renforce l’expression et dynamise le spectacle. c.
Sobriété dans le registre tragique L’acteur doit éviter le pathos au profit d’une expression tendue
et vibrante. Importance des regards et de la gestuelle des mains. Conclusion Pour éprouver un
plaisir intense au théâtre, il faut d’abord un bon texte riche de sens parce que seuls les mots
peuvent porter toutes les nuances de la riche palette des sentiments humains. Mais d’autres
éléments sont plus ou moins indispensables à la représentation : à commencer par
l’incontournable jeu des acteurs, sans oublier les costumes, les accessoires, les décors et les
éclairages qui peuvent être minimisés, voire absents de l’espace scénique, par choix esthétique ou
financier. Dans tous les cas, la signification d’une pièce et le plaisir qu’elle peut procurer passent
par un ajustement de la mise en scène au projet de l’auteur dramatique. C’est affaire de culture,
d’intelligence, de fidélité et d’humilité : Il faut servir le texte théâtral et non s’en servir. 1 Jean-
Louis Barrault Mise en scène de Phèdre, Seuil, coll. « Points », 1972.
Bac de français 2019 (Liban) Corrigé de la dissertation (séries S et ES)
La poésie a-t-elle le pouvoir d’apporter une consolation aux malheurs des hommes ?
Vous appuierez votre réflexion sur les textes du corpus, sur les œuvres que vous avez étudiées en
classe et sur vos lectures personnelles.

Introduction
La poésie s’est beaucoup intéressée à l’expression des sentiments. Ce lyrisme a souvent pris la
forme de l’élégie pour chanter la tristesse et les malheurs de l’homme. Pourquoi donc les poètes
ont-ils si volontiers mis leur talent au service de ces thèmes douloureux ? Pensaient-ils pouvoir
trouver une consolation à leur peine ? Si certains thèmes caractéristiques reviennent sous la plume
des poètes, leur exploitation ne semble jamais rechercher l’apaisement que pourrait leur apporter
justement l’oubli. Bien au contraire l’élégie chante le malheur de vivre pour sa puissance
émotionnelle.

1. Quels sont les malheurs des hommes ? Quelques thèmes sont récurrents : le mal d’amour, voir
« Rappelle-toi » de Musset ou « La Chanson de Gaspard Hauser » de Verlaine la mort, « Je n’ai
plus que les os » de Ronsard, « La Ballade des pendus » de Villon, où s’exprime la peur. le
spleen, nombreux sonnets de Baudelaire, ou de Laforgue. Il s’agit de cette tendance dépressive,
de cette difficulté à accepter les limites de notre condition humaine.
2. La poésie ne peut consoler puisqu’elle ravive le souvenir. Le poète ne veut pas oublier, il veut
rester fidèle. Voir « Le lac » de Lamartine ou « À Villequier » de Victor Hugo : « L’angoisse
dans mon âme est toujours la plus forte, / Et mon cœur est soumis, mais n’est pas résigné. » Le
poète ne veut pas être consolé, le poète se sent grand parce qu’il souffre, il fait preuve
d’empathie. Voir « L’Exilé » de Marceline Desbordes-Valmore, où l’écrivain se sent sœur de
ceux qui aspirent sans le savoir à retrouver le chemin du paradis perdu. Voir « Le Pin des Landes
» de Gautier pour qui la douloureuse blessure du poète est féconde comme la sève qui s’écoule du
gemmage. Il puise des forces dans sa douleur, il rend présents les disparus : voir « L’Exil » de
Hugo où le poète trouve dans les sépultures inaccessibles à la suite du bannissement la force de
continuer le combat contre l’usurpateur. Voir « Petit pays » de Gaël Faye, où la nostalgie du pays
natal entretient le désir de se racheter.
3. Mais elle doit être au contraire un enchantement au sens magique, elle est chargée
d’apprivoiser le malheur, de le sublimer. Une clarification, mettre des mots sur les maux. Le
poète veut partager la singularité de sa fonction. Voir « Le Pélican » de Musset : Quand ils
parlent ainsi d’espérances trompées, De tristesse et d’oubli, d’amour et de malheur, Ce n’est pas
un concert à dilater le cœur ; Leurs déclamations sont comme des épées : Elles tracent dans l’air
un cercle éblouissant ; Mais il y pend toujours quelques gouttes de sang. Voir « Tristesse
d’Olympio » de Hugo qui voit dans le poète celui qui doit lutter contre l’érosion du temps qui
passe : Et là, dans cette nuit qu’aucun rayon n’étoile, L’âme, en un repli sombre où tout semble
finir, Sent quelque chose encor palpiter sous un voile… C’est toi qui dors dans l’ombre, ô sacré
souvenir ! Un antalgique, une aide pour faire le deuil, « Consolation à M. du Perrier sur la mort
de sa fille » de Malherbe, acceptation religieuse de notre condition mortelle : Vouloir ce que Dieu
veut, est la seule science Qui nous met en repos. Voir « Les Phares » de Baudelaire : Ces
malédictions, ces blasphèmes, ces plaintes, Ces extases, ces cris, ces pleurs, ces Te Deum, Sont
un écho redit par mille labyrinthes ; C’est pour les cœurs mortels un divin opium ! Un exorcisme
des peurs, une révolte contre l’inéluctable. Voir « Angoisse » de Mallarmé ou Verlaine, poèmes
dans lesquels l’élargissement métaphorique rend la peur moins laide et repoussante. La
célébration du paradoxe humain, le principe pascalien : « L’homme n’est qu’un roseau, le plus
faible de la nature ; mais c’est un roseau pensant. Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour
l’écraser : une vapeur, une goutte d’eau suffit pour le tuer. Mais quand l’univers l’écraserait,
l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que
l’univers a sur lui, l’univers n’en sait rien ». Les poètes vont donc exalter la grandeur de l’homme
qui assume son destin. Voir « Mortel sonnet » de Chassignet dont l’évocation toute baroque de la
décomposition des corps vise à rendre l’homme sage. Voir « Les Élégies majeures » où Senghor
évoque l’eschatologie dans un verbe apocalyptique pour rappeler à l’homme sa vocation : Quand
sera venu le jour de l’amour, de tes noces célestes T’accueilleront les Chérubins aux ailes de soie
bleue, te conduiront À la droite du Christ ressuscité, l’Agneau lumière de tendresse dont tu avais
si soif. Et parmi les noirs séraphins chanteront les martyrs de l’Ouganda. Et tu les accompagneras
à l’orgue, comme tu faisais à Verson Vêtu du lin blanc lavé dans le sang de l’Agneau, ton Sang.

Conclusion
La vie de l’homme est jalonnée de bien des malheurs, depuis les peines d’amour, la maladie, les
angoisses existentielles, pour s’achever dans la mort inéluctable. Aussi n’est-il pas étonnant que
les poètes se soient saisis de ces thèmes si riches d’émotions. Était-ce pour se consoler des coups
du sort ? Se plaindre peut tout au plus calmer un moment la douleur mais non pas la supprimer
quand on la rend si présente. En fait le poète veut lutter contre l’oubli par fidélité, empathie ou
révolte. Il sait que le lyrisme élégiaque saura toucher le cœur de ses lecteurs et faire recette.
Musset ouvrait son « Pélican » par ces alexandrins fameux : « Les plus désespérés sont les chants
les plus beaux, Et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots. » Plus artistiquement et pour
rester dans les métaphores aviaires, tout vrai poète recherche son chant du cygne car il est disciple
d’Orphée, il connaît le pouvoir enchanteur de la lyre qui sait apprivoiser les animaux sauvages,
voire, pour quelques instants, tenir à distance la mort. « Le plus grand mystère, écrit Malraux,
n’est pas que nous soyons jetés au hasard entre la profusion de la matière et celle des astres, c’est
que dans cette prison nous tirions de nous-mêmes des images assez puissantes pour nier notre
néant ». La poésie, comme tout art, est grande quand elle est la pathétique tentative d’échapper au
temps, de parler aux hommes au-delà de la tragique destruction de la mort, qu’elle est en quelque
sorte un désir d’éternité.
Bac de français 2018 Corrigé de la dissertation (séries S et ES) La littérature vous semble-t-elle
un moyen efficace pour émouvoir le lecteur et pour dénoncer les cruautés commises par les
hommes ? Vous appuierez votre réflexion sur les textes du corpus, sur les œuvres que vous avez
étudiées en classe et sur vos lectures personnelles.

Introduction :
Accroche : Les attentats, la crise migratoire, les violences racistes sont aujourd’hui quelques-uns
des sujets où s’expriment des sentiments forts et contrastés. C’est pourquoi on a parfois reproché
à notre époque d’être soumise à la tyrannie des émotions quand il s’agit d’aborder ces questions
d’actualité.
Copie du sujet : Dans ce concert de compassions et de haines, la littérature est-elle un moyen
efficace pour émouvoir le lecteur et pour dénoncer les cruautés commises par les hommes ?
Problématique : Est-ce que par le passé, une stratégie de persuasion a pu, à elle seule, endiguer
chez l’homme le penchant à faire souffrir autrui ? Corrélativement, le traitement littéraire de cette
stratégie a-t-il procuré une efficacité supplémentaire ?
Annonce du plan : 1re formule : Nous examinerons d’abord comment spontanément les auteurs
sont portés à retenir une stratégie qui heurte notre sensibilité. Ensuite nous analyserons les limites
d’une telle entreprise pour enfin étudier l’intérêt des écrivains à s’adresser à toutes les facultés du
lecteur. 2de formule : Si spontanément les auteurs sont portés à retenir une stratégie qui heurte
notre sensibilité, une telle entreprise trouve cependant vite ses limites, c’est pourquoi certains
écrivains ont tenté de s’adresser à toutes les facultés du lecteur.

1re partie : La stratégie du choc Les personnes sont facilement portées à réagir avec leurs tripes
aux scènes de cruauté dont elles sont témoins.
1-Faire réagir par les émotions, Les écrivains, hommes comme les autres, ressentent le même
dégoût, éprouvent le même traumatisme qu’eux devant la violence barbare. Montaigne exprime
son « déplaisir » lorsqu’il voit « poursuivre et tuer une bête innocente ». Voltaire est révolté par la
dissection d’animaux vivants. Ferdinand Bardamu, dans Voyage au bout de la nuit, ne peut
contrôler ses sphincters sous la mitraille qui hache les combattants. Ce sont bien les émotions qui
sont premières lors de tels spectacles. Pour mieux faire partager sa réaction, l’auteur littéraire
utilise souvent la fonction expressive du langage. En premier lieu, il s’inscrit dans le registre
pathétique utilisant le champ lexical de la souffrance : Montaigne crée la sympathie en évoquant
les « larmes » du cerf, Voltaire provoque notre répulsion à l’encontre de ces médecins sans cœur
qui « clouent [le chien] sur une table, et |…] le dissèquent vivant ».
2- L’écrivain peut recourir aussi aux hyperboles, à la personnalisation comme dans les textes A et
C. Voltaire utilise un raccourci brutal pour mieux nous surprendre et nous émouvoir : le chien qui
s’est inquiété de la disparition de son maître, qui lui a témoigné joyeusement son affection lors
des retrouvailles, « ce chien » est livré brutalement au scalpel des biologistes. Tous ces procédés
et quelques autres viennent renforcer artistiquement le choc des émotions primaires. Susciter
l’indignation, réveiller notre compassion Pour persuader, les auteurs en appellent aux valeurs
communes au groupe. Ainsi Montaigne s’appuie sur la « théologie », autrement dit la religion
chrétienne, et joue sur la crainte du péché pour éviter que les animaux ne soient maltraités.
Yourcenar procède de même en misant sur la nécessaire solidarité du vivant : Si les animaux
n’appartiennent pas à la « famille » humaine comme chez Montaigne, ils sont chez elle les
victimes annonciatrices des grands holocaustes humains. Comme l’auteur des Essais, elle
dénonce les mêmes dérives quand les êtres vivants ne sont plus respectés. Parfois les écrivains
veulent nous faire honte et réveiller notre conscience par la compassion. Par exemple, Hugo dans
le poème « Melancholia » tiré des Contemplations se révolte contre la cruauté du travail imposé
aux enfants par des entrepreneurs au cœur sec : « Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,
Ils travaillent. Tout est d’airain, tout est de fer. Jamais on ne s’arrête et jamais on ne joue. » Il
compte sur la réaction indignée de parents bourgeois qui ne supporteraient pas que leurs enfants
soient traités si injustement. Les hyperboles, les alliances antithétiques, les reprises, les négations
qui soulignent les privations consolident cette tentative de culpabilisation. Pour mobiliser Ces
textes vibrants emploient parfois les fonctions impressives du langage. En effet les auteurs ne se
contentent pas de réprouver les comportements inhumains, ils appellent à la mobilisation : «
Soyons subversifs. Révoltons-nous contre l’ignorance, l’indifférence, la cruauté, qui d’ailleurs ne
s’exercent si souvent contre l’homme que parce qu’elles se sont fait la main sur les bêtes » lance
Marguerite Yourcenar en utilisant deux impératifs, selon un rythme binaire affectif, qui désignent
les cibles selon un rythme ternaire plus solennel. Montaigne ne veut pas « qu’on […] se moque
de [… sa] sympathie » pour les bêtes. Voltaire apostrophe son contradicteur et lui enjoint de «
porte[r…] le même jugement sur l’homme et sur le chien qui se comportent de manière
semblable. Tous veulent agir sur leur destinataire.

Transition : Mais cette force née du recours aux émotions rencontre ses limites. Le dégoût,
l’anesthésie dans l’escalade

2e partie : Les limites


1-En premier lieu, l’accumulation des scènes pénibles peut affaiblir le propos. Ainsi dans
Candide de Voltaire, le héros éponyme subit des épreuves dont la longue suite, en forme de
catalogue des cruelles folies humaines, est invraisemblable. Si les faits rapportés sont décrits avec
un luxe de détails, c’est bien l’écœurement qui risque de se trouver au rendez-vous. Ainsi en va-t-
il dans l’œuvre de Sade qui a donné son nom à la perversion de la sensibilité. Justine ou les
Malheurs de la vertu aurait voulu prétendre à « une des plus sublimes leçons de morale », mais
une complaisance certaine à l’égard des violences faites aux femmes crée immanquablement un
rejet de la part du lecteur sain.
2-De même, à la suite du roman gothique anglais, le roman noir du XIXe siècle, produit du
romantisme frénétique dont on retrouve plus que des traces dans le Han d’Islande de Hugo fait
ses délices des tortures, des emprisonnements, des meurtres disqualifiant par son goût morbide les
tentatives de les dénoncer. Il reste d’ailleurs des vestiges de cette violence dans les romans
ultérieurs de l’auteur. La cruauté du Frollo de Notre-Dame de Paris ou celle du Lantenac de
Quatrevingt-treize est exacerbée pour stigmatiser l’obscurantisme du clergé médiéval ou la
tyrannie de l’aristocratie d’Ancien Régime. Le second personnage, par exemple, manifeste un
sens de la discipline inhumain. Dans l’épisode de la caronade, le matelot fautif et courageux est
tout à la fois décoré et fusillé par ce général inflexible et brutal. Cette rigueur sert une visée
polémique mais perd de sa force dans son invraisemblable retournement de situation. La
manipulation et la spirale de la violence
3-De plus cette surabondance d’émotions fortes crée le danger de la manipulation. En France,
certains écrits qui ont suivi la défaite de Sedan, puis le premier conflit mondial ont pu faire
supporter aux seuls Allemands la cruauté des combats. Ces « romans revanchards » populaires,
dont on peut retrouver des traces dans le 813 de Leblanc qui met aux prises Arsène Lupin et le
Kaiser Guillaume Ier, ont cultivé le genre sans retenue. Heureusement que des récits comme À
l’Ouest rien de nouveau de Remarque ou Capitaine Conan de Vercel sont venus rééquilibrer la
perception des responsabilités dans la guerre. En diabolisant l’ennemi, ces auteurs ont cultivé le
désir de revanche, faisant entrer une bonne part de la population dans la spirale de la violence.
Dépouillement, économie des moyens A contrario, la simple relation dépouillée de l’horreur
rapportée avec une économie de moyens est toujours saisissante, car elle laisse le soin à
l’imagination du lecteur de faire le reste. Ainsi les attendus du Procès de Nuremberg sont-ils plus
saisissants dans leur glaciale inhumanité que bien des récits qui abusent des atrocités.

Transition : En fait, recourir aux seules émotions, c’est s’adresser à la partie primitive de
l’homme. Une dénonciation efficace des cruautés humaines devrait s’adresser à l’homme entier,
corps et esprit, émois et raison. Ce serait ajouter la culture à la nature.

3e partie : S’adresser à l’homme entier


1-Faire appel à la raison,
Rousseau n’est pas adepte de cette démarche. Il prétend dans la préface du Discours sur l’origine
et les fondements de l’inégalité parmi les hommes que deux principes instinctifs, « notre bien-être
et la conservation de nous-mêmes » sont « antérieurs à la raison » dans la construction de la «
sociabilité ». Pourtant c’est sur cette faculté que s’appuient les autres auteurs du corpus.
Montaigne reconnaît une parenté entre homme et animal, celle de créatures ayant reçu leur
existence d’un « même maître [qui les] a logés dans ce palais pour son service ». Voltaire relève
les similitudes des comportements entre eux : faculté d’apprentissage, affection. Marguerite
Yourcenar, comme Montaigne, rappelle que la maltraitance des animaux précède de peu celle des
humains. Pour Montaigne, ce sont la chasse et les jeux du cirque romains ; pour Yourcenar ces
mauvais traitements ont conduit aux « enfants martyrs », aux « wagons plombés » et au « gibier
humain descendu d’un coup de feu », le tout magnifiquement appuyé par l’équilibre d’un rythme
ternaire. Chacun de ces auteurs reconnaît donc dans les dérives meurtrières ou génocidaires la
même origine, à savoir l’obscurcissement du respect de toute vie. Au terme de ce raisonnement,
le lecteur peut conclure que le barbare, qui se montre cruel et ne sait pas user de sa raison, perd sa
supériorité en tombant plus bas que les bêtes qu’il ne veut pas respecter.

3-Démontrer l’absurdité
L’usage de la raison peut prendre des chemins plus étonnants. Montaigne, dans les Essais, a
démontré l’absurde inutilité de la torture. En effet cette cruauté ne saurait faire progresser
l’obtention de la vérité. Soit celui qui la subit a la capacité de la supporter et par voie de
conséquence n’avouera pas. Soit inversement, celui qui ne peut la supporter avouera même
innocent. Dans tous les cas le juge ne peut se fier au silence ou aux aveux. La souffrance infligée
est donc inutile, voire injuste si c’est un innocent qui est torturé et mis à mort. Voltaire a poussé
plus loin l’art de dénoncer l’absurdité en utilisant des rapprochements abrupts. Chez lui les
atrocités sont moins horribles que niaises. La condamnation est moins émouvante mais plus
acérée. Dans Micromégas, il démythifie la guerre en en faisant une cohue informe opposant «
cent mille fous de notre espèce » à « cent mille animaux couverts d’un turban » qui se battent
pour « quelque tas de boue grand comme votre talon » que les chefs n’ont jamais vu et ne verront
jamais. Dans Candide il se sert d’un oxymoron resté célèbre, une « boucherie héroïque ». Céline,
dans Voyage au bout de la nuit, évoque les combats par une accumulation désordonnée et
apocalyptique de personnes, d’animaux, d’objets pour flétrir la guerre devenue un « abattoir
international en folie ».
4-Dénoncer par le ridicule
Si Voltaire, dans Micromégas pointait le caractère déraisonnable de l’humanité, « un assemblage
de fous, de méchants et de malheureux », certains auteurs sont allés encore plus loin dans la
forme pour dénoncer l’horreur en recourant au ridicule. Par exemple, Alfred Jarry, dans Ubu-roi,
crée un personnage bouffon à la cruauté enfantine qui a détrôné le roi et veut assouvir son avarice
en tuant les nobles riches. Son avidité meurtrière : « Ceux qui seront condamnés à mort, je les
passerai dans la trappe, ils tomberont dans les sous-sols du Pince-Porc et de la Chambre-à-Sous,
où on les décervèlera » est risible dans ses excès verbaux et la répétition mécanique du « à la
trappe » qui ponctue ses jugements.

Conclusion :
Résumé de l’argumentation : La cruauté humaine est effrayante c’est pourquoi, spontanément, les
auteurs ont recouru à une stratégie capable d’en conjurer l’horreur. Ils ont donc cherché à ébranler
la sensibilité du lecteur pour provoquer chez lui le rejet des manifestations de barbarie. Mais cette
surenchère a pu conduire à l’anesthésie des cœurs par la répétition des spectacles traumatisants,
voire au dégoût, d’autant plus que des écrivains ont marqué une complaisance certaine pour les
comportements qu’ils entendaient dénoncer. En outre la mise en scène de la brutalité a parfois
servi à manipuler des populations et nourri la spirale de la violence. C’est pourquoi d’autres
écrivains ont préféré s’adresser à toutes les facultés du lecteur. Ils ont estimé que l’appel conjoint
à la raison serait plus efficace : convaincre permettrait sans doute de laisser des marques plus
durables que les fluctuations de la seule sensibilité. Le pari a été sûrement gagné par ceux qui ont
utilisé la dérision de l’absurde ou pratiqué l’antiphrase.
Ouverture (facultative) : Ainsi, la recherche de l’efficacité dans la dénonciation des violences
humaines est affaire de goût et de mode de diffusion. À une époque où les médias audiovisuels
sont rois, il semble que le « choc » des images l’emporte largement sur le « poids des mots ». De
plus la culture de la violence verbale née de la surenchère dans la volonté de puissance a gagné
insidieusement le domaine du langage au point que, dans leurs excès, ce sont aussi les mots qui
peuvent tuer sur les réseaux sociaux. Quel est désormais le poids de la littérature dans ce combat
plus que jamais d’actualité, le respect de toute vie ?
Bac de français 2018 Corrigé de la dissertation (séries technologiques) La poésie vise-t-elle
seulement à idéaliser le quotidien ? Votre argumentation s’appuiera sur les textes du corpus, les
textes étudiés en classe et vos lectures personnelles.

Introduction :
Accroche : Spontanément, quand nous entendons le mot poésie, nous concevons à la fois une
forme et des expériences assez éloignées de notre vie quotidienne. Les poèmes gentillets appris à
l’école primaire, les grandes effusions lyriques qui ont pu nous séduire à l’adolescence, les
constructions ésotériques qui sont nées depuis la seconde moitié du XIXe siècle peuvent nous
paraître incompatibles avec la banalité et le matérialisme de nos existences. D’ailleurs lisons-nous
encore de la poésie aujourd’hui ?
Copie du sujet : C’est pourquoi nous pouvons nous demander si une telle réserve n’aurait pas ses
origines dans une poésie qui viserait seulement à idéaliser le quotidien.
Problématique : Idéaliser, c’est déformer ce que nous vivons habituellement par embellissement,
recherche de l’extraordinaire, transformation de ce que nos sens nous font expérimenter. La
poésie est-elle alors cette paire de lunettes qui permet de voir le seul beau côté de la réalité ?
Accessoirement nous trompe-t-elle en privilégiant la beauté au détriment de la vérité ?
Annonce du plan : 1re formule : Nous examinerons d’abord en quoi les poètes se sont
spontanément tournés vers les aspects les plus attirants de l’existence. Ensuite nous analyserons
comment, dans un souci de faire évoluer les conditions de vie, certains se sont focalisés sur les
comportements les moins reluisants de nos sociétés. Enfin nous verrons que, dans tous les cas de
figure, leur projet a dû puiser dans la force expressive et les fonctions poétiques du langage. 2de
formule : Si les poètes se sont spontanément tournés vers les aspects les plus attirants de
l’existence, certains se sont cependant focalisés sur les comportements les moins reluisants de nos
sociétés. Dans tous les cas de figure, en définitive leur projet a dû puiser dans la force expressive
et les fonctions poétiques du langage.

1re partie : Une idéalisation du quotidien


1-D’une manière générale, la poésie s’est spontanément tournée vers les aspects du monde
attirants.
Les « territoires fleuris » selon l’expression baudelairienne Depuis l’Antiquité, fidèle à ses
origines lyriques et sacrées comme rapportées dans le mythe d’Orphée, elle a souvent été
considérée comme une peinture, une représentation agréable de la nature. Sa mission est
d’apporter le pittoresque. La plus belle poésie serait une œuvre aux hautes couleurs, véritable
tableau de genre. De la Pléiade à Chénier, des Orientales et de la Légende des siècles à la
perfection parnassienne d’un Leconte de Lisle, notre littérature abonde en pièces finement
ciselées, riches et fortes du spectacle vivant qu’elles prétendent restituer. Plus encore, son
inspiration privilégiée a été le lyrisme amoureux. Les poètes ont célébré le charme ensorcelant de
la femme aimée, faisant passer l’alliance de leurs noms à la postérité : Pétrarque et Laure,
Ronsard et Hélène, Baudelaire et sa madone… Les textes du corpus idéalisent ces affections : si
Hugo magnifie sa petite-fille Jeanne ; Cros, son épouse et ses enfants ; Roy exalte sa muse, son «
Eurydice aux pieds nus ».
2-La poésie permet l’exaltation des sentiments, du moins donne force à leur aveu, là où le langage
ordinaire, utilitaire, est impuissant à les exprimer.
Le rêve Avec le XIXe siècle et dans la lignée du romantisme allemand, bien des poètes se sont
inspirés de leur quotidien pour asseoir leurs rêves ou pour explorer des réalités inédites de l’autre
côté du miroir. Hugo imagine l’univers merveilleux qui habite l’enfant endormie ou plutôt
projette sa culture littéraire sur les pensées informelles supposées de Jeanne. Cros songe à une vie
suspendue entre passé, dans lequel « Éternelles sont les amours / Dont [s]a mémoire est le repaire
», et avenir incertain où « [leur]s enfants seront de fiers gas ». Claude Roy mêle la femme aimée à
l’eau et au sable d’une plage dans un rêve cosmique. Gérard de Nerval, pour sa part, écrivait dans
Aurélia : « Le Rêve est une seconde vie. Je n’ai pu percer sans frémir ces portes d’ivoire ou de
corne qui nous séparent du monde invisible. » Baudelaire a cherché désespérément lui aussi la
voie de cette surnature. Son poème « Correspondances » traduit cette conception d’un monde où
la réalité illusoire doit être dépassée : « La nature est un temple où de vivants piliers / Laissent
parfois sortir de confuses paroles. » Cette voie du rêve, la promotion de l’inconscient sont
devenues finalement la norme du Surréalisme chez qui l’extraordinaire fulgurance remplace
l’ordinaire. André Breton déclarait à ce propos dans L’Amour fou que « La beauté convulsive
sera érotique-voilée, explosante-fixe, magique-circonstancielle ou ne sera pas. »
3-L’évasion
D’ailleurs quand le quotidien devient insupportable, le poète s’évade dans l’exotisme, les
souvenirs ou la quête d’un ailleurs paradisiaque. Baudelaire, dans Les Fleurs du Mal, a creusé
douloureusement cette incessante lutte entre « Spleen et Idéal ». « Moesta et errabunda » chante
ce départ « Emporte-moi, wagon ! enlève-moi, frégate ! Loin ! loin ! ici la boue est faite de nos
pleurs ! — Est-il vrai que parfois le triste cœur d’Agathe Dise : Loin des remords, des crimes, des
douleurs, Emporte-moi, wagon, enlève-moi, frégate ? » vers le « paradis parfumé » des îles
lointaines, et enfin le souvenir idéalisé du « vert paradis des amours enfantines ». Cette «
Invitation au voyage » rêve d’un ailleurs nourrissant loin de la grisaille de la grande ville « Là,
tout n’est qu’ordre et beauté, Luxe, calme et volupté. »

Transition : Pourtant la poésie n’a pas toujours cherché à ne retenir que le beau côté des choses,
les ravissements amoureux, le rêve à partir du quotidien, voire l’échappée belle dans l’espace ou
le temps.

2e partie : une dénonciation des idéaux


1-Elle a pu aussi revendiquer un intérêt certain pour les aspects les moins reluisants de notre
milieu de vie.
La poésie satirique ou correctrice Alors même qu’ils ont choisi pour un moment le côté idéal de
la vie, Hugo n’ignore pas que « Cette terre est si laide », et Charles Cros avoue que ses « vers /
[ont pu] encombrer tout l’univers / De désastres et d’incendies ». Boileau a dénoncé les laideurs
et l’inconfort de la grande ville dans « Les Embarras de Paris ». Il a exercé sa verve satirique
contre le vacarme, la cohue, la saleté, l’insécurité des lieux. Hugo dans « Melancholia »
stigmatise l’injustice de la société bourgeoise qui pousse les jeunes femmes à la prostitution, et
détruit les enfants employés dans l’enfer des ateliers.
2-L’esthétique de la laideur
Plus étonnant, des auteurs ont pu cultiver ce goût pour la laideur. Rimbaud, dans sa première
manière en forme de révolte contre les conventions parnassiennes, s’est défoulé en peignant le
portrait hideux, obscène, provoquant d’une « Vénus Anadyomène ». C’est la réécriture
répugnante de la naissance de la déesse qui, au lieu de sortir de l’écume de la mer, émerge d’un
tub crasseux pour laisser voir un corps flétri et mal soigné. Baudelaire va plus loin encore en
ambitionnant une esthétique de la laideur pour ses bien nommées Fleurs du Mal : « Des poètes
illustres s’étaient partagés depuis longtemps les provinces les plus fleuries du monde poétique. Il
m’a paru plaisant, et d’autant plus agréable que la tâche était plus difficile, d’extraire la beauté du
Mal », Il s’exprimait ainsi dans un projet de Préface, qui finalement n’a pas vu le jour. C’est ainsi
qu’il a pu choisir comme sujets « Une Charogne », les difformités de Paris, la hideur des
vieillards, tout ce qu’il fait sien et conforme à son projet : « Ô vous, soyez témoins que j’ai fait
mon devoir / Comme un parfait chimiste et comme une âme sainte. Car j’ai de chaque chose
extrait la quintessence, Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or. » Ébauche d’un épilogue
pour la deuxième édition des Fleurs du Mal

Transition : Qu’il s’agisse d’idéaliser la réalité, de la démystifier, voire de se complaire dans sa


laideur, sa simple description n’est pas suffisante pour prétendre à l’expression poétique.
3e partie : à regard neuf, langage nouveau
1-L’expression des émotions
Pour accéder à la poésie, le langage doit d’abord susciter l’émotion. Si l’émotion est absente,
nous sommes au mieux dans un constat ou une notice descriptive. Peindre la sieste de Jeanne
n’est pas suffisant. Hugo nous ouvre au registre merveilleux de la féerie. Il suscite dans nos
mémoires les délices enfantines de l’univers des contes faites de peurs et de ravissement à l’heure
où tout rentre dans l’ordre. Mieux, il nous fait contempler une nativité religieuse où s’exprime la
douce puissance divine dans l’humble abandon de l’enfant à la protection angélique. Nous
éprouvons alors le même étonnement, la même paix que devant la crèche de Noël. Quand
Baudelaire évoque sa charogne, il ne se contente pas de provoquer notre répulsion. Il pique aussi
notre curiosité par le rapprochement antithétique voulu avec sa compagne distante : « Et pourtant
vous serez semblable à cette ordure, À cette horrible infection, Étoile de mes yeux, soleil de ma
nature, Vous, mon ange et ma passion ! » Nous comprenons alors qu’il s’agit d’effrayer pour
mieux séduire celle qui se refuse. Cette version contournée du carpe diem est en fait une
célébration ironique de l’art organisateur et pérenne du poète qui a « gardé la forme et l’essence
divine / De [s]es amours décomposés ! » Émotions primaires et esthétiques concourent à rendre
ce poème inoubliable. De nouveaux rapports Cocteau définissait ainsi la poésie : « l’espace d’un
éclair nous voyons un chien, un fiacre, une maison pour la première fois. […] Elle dévoile dans
toute la force du terme. Elle montre nues, sous une lumière qui secoue la torpeur les choses
surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistraient machinalement. Mettez un lieu
commun en place. Nettoyez-le, frottez-le, éclairez-le de telle sorte qu’il frappe avec sa jeunesse et
avec la même fraîcheur, le même jet qu’il avait à sa source. Vous ferez œuvre de poète. » La
poésie est donc un regard nouveau sur des banalités, sur des spectacles que l’habitude a
neutralisés. Ainsi dans « Zone », Apollinaire nous réveille, nous surprend par sa description
inattendue, moderne, humoristique, voire ironique d’une « jolie rue dont [il a] oublié le nom
Neuve et propre du soleil elle était le clairon Les directeurs les ouvriers et les belles sténo-
dactylographes Du lundi matin au samedi soir quatre fois par jour y passent Le matin par trois
fois la sirène y gémit Une cloche rageuse y aboie vers midi Les inscriptions des enseignes et des
murailles Les plaques les avis à la façon des perroquets criaillent J’aime la grâce de cette rue
industrielle Située à Paris entre la rue Aumont-Thiéville et l’avenue des Ternes », rue qui est
d’ailleurs tout sauf terne pour reprendre le dernier mot de la description et dont la « grâce » est
peu conventionnelle. Ponge, Réda, Delerme ont cherché à leur tour à nous faire voir autrement
des objets que nous ne savons plus regarder : nourriture, fruits, bicyclette… Après les avoir lus,
nous ne pouvons plus, si nous nous y attardons un peu, appréhender de la même manière la miche
de pain, l’orange ou l’huître qui se tiennent devant nos yeux. À un regard utilitaire a succédé en
nous une approche plus esthétique et désintéressée.
2-La musicalité et les figures d’image
Ce changement est permis par quelques procédés notables. En premier lieu, le recours aux
connotations crée des réseaux souterrains entre les mots, des cheminements inhabituels propices à
des associations d’idées nouvelles. Par exemple dans le poème d’Apollinaire précité, quelques
mots attirent notre attention. La rue est le « clairon » du soleil. Il est inhabituel de qualifier la
lumière par un instrument de musique, mais les connotations peuvent changer notre appréciation.
Dans clairon il y a clair. Le clairon est un instrument guerrier. Le soleil (et le jour) ont réveillé
l’activité « industrielle » du quartier comme la diane au clairon militaire ; la rue retentit de bruits
assourdissants ; les mouvements de foule ont des allures de défilé… Le terme « sirène » dénote
un avertisseur sonore bruyant à rapprocher du clairon. Mais il connote aussi un mythe scandinave
(probablement élaboré à partir des lamantins, aux cris plaintifs). Si nous relevons que « la sirène y
gémit », nous avons une allusion possible aux chants que la tradition prête aux sirènes. Le signal
utilitaire se transforme en être merveilleux attachant. Ensuite, les figures d’image y sont plus
nombreuses. Nous pouvons y relever une métaphore, « le clairon du soleil », une comparaison, «
à la façon des perroquets ». On peut ajouter des personnifications : « la sirène y gémit », « Une
cloche rageuse y aboie », « Les plaques les avis […] criaillent ». Enfin la musicalité renforce le
sens général. La présence de nombreux sons R (allitérations) souligne la cacophonie tandis que la
rime en « ailles » renforce l’aspect douloureux de cette exubérance sonore.

Conclusion :
Résumé de l’argumentation : D’une manière générale, la poésie s’est spontanément tournée
vers les aspects du monde attirants. Il est vrai que la célébration de l’être aimé, les spectacles
grandioses offerts par la nature, les sortilèges du rêve ont beaucoup inspiré. Pourtant, surtout à
partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, des poètes ont revendiqué un intérêt certain pour les
aspects les moins reluisants de nos existences. Ils ont voulu dénoncer de mauvaises conditions de
vie, des excès ou des injustices. Au même moment, dans leur révolte contre une idéalisation
devenue conventionnelle, certains se sont targués d’élever la laideur au rang d’art, ou du moins de
concevoir un culte du « bizarre ». Si les écrivains ont trouvé leur inspiration dans des domaines si
contrastés, leur choix n’a pas suffi à produire des textes poétiques. Pour continuer de captiver par
l’idéalisation, ou pour surmonter les réticences des lecteurs à fréquenter les aspects insoutenables
de l’existence, les auteurs ont dû recourir aux fonctions poétiques de la langue : ils ont recherché
l’expressivité en convoquant les émotions, ils ont usé des connotations, des figures d’image et de
la musicalité pour amplifier notre manière de percevoir et de comprendre.
Ouverture (facultative) : Idéaliser, rapetisser et dénigrer, inverser les valeurs nous font
immanquablement penser à l’optimisme et au pessimisme. G. K. Chesterton dans Orthodoxie
affirmait : « Un optimiste est un homme qui regarde vos yeux ; un pessimiste, un homme qui
regarde vos pieds. » L’excès d’idéalisme romantique a pu décevoir ; l’idéologie réaliste a
ridiculisé les enthousiasmes ; la poésie s’est égarée dans des voies sans issue au risque de devenir
illisible. De plus, au XXe siècle les conflits mondiaux puis les dérives génocidaires des dictatures,
le matérialisme économique égoïste ambiant ont, semble-t-il, achevé l’idéalisation et engendré la
crise des valeurs. C’est pourquoi nous sommes entrés dans l’ère du doute généralisé, devenant
des infirmes affectifs. Nous attendons les écrivains qui pourront simplement nous redonner espoir
et goût pour la vie.
Bac de français 2017 Corrigé de la dissertation (séries S et ES)
Sujet : Le personnage de roman se construit-il exclusivement par son rapport à la réalité ? Vous
appuierez votre réflexion sur les textes du corpus, sur les œuvres que vous avez étudiées en classe
et sur vos lectures personnelles.
Il ne s’agit pas à proprement parler d’un corrigé mais plutôt d’une réflexion organisée sur les
rapports que le romancier entretient avec sa réalité romanesque pour faire évoluer ses
personnages.

Introduction : Marthe Robert dans Roman des origines, origine du roman écrit : « À strictement
parler, en effet, […] la réalité romanesque est fictive, ou plus exactement, c’est toujours une
réalité de roman, où des personnages de roman ont une naissance, une mort, des aventures de
roman. […] Le degré de réalité d’un roman n’est jamais chose mesurable, il ne représente que la
part d’illusion dont le romancier se plaît à jouer. » Dans ces conditions est-il légitime de se
demander si le personnage de roman se construit exclusivement par son rapport à la réalité ? En
fait la question pourrait être reformulée de la manière suivante : à l’intérieur de la fiction
romanesque, quel rôle joue la pseudo réalité dans la construction du personnage ? C’est bien cette
illusion romanesque en abyme qui doit nous intéresser ici. Quelle part d’imitation de la réalité,
dans l’illusion romanesque de principe, aide le personnage à devenir lui-même aux yeux du
lecteur l’illusion crédible d’un personnage réel ?

Développement : Considérations préalables


Dans un premier temps intéressons-nous au verbe « se construire ». S’il est un verbe pronominal
de sens réfléchi, il ne concerne que le personnage alors autonome dans son évolution
psychologique et morale au sein de la fiction romanesque. S’il est un verbe pronominal de sens
passif, il réintroduit le projet de l’auteur pour sa créature. Dans le premier cas, la focalisation se
porte, dans les données fictionnelles, sur une logique interne qui consiste à doter précisément un
personnage d’un état civil, d’une hérédité, d’un caractère qui vont conditionner son évolution.
Dans le second, la focalisation introduit un biais externe. Ces données peuvent devenir
accessoires, le personnage est alors caricatural ou symbolique. Il est un outil au service d’une
démonstration. Autant le premier cherche la vraisemblance, autant le second vise l’effet.
Quelques exemples permettront d’illustrer ces deux tendances. Chez Zola, les personnages des
Rougon Macquart sont régis de manière scientifique, selon la méthode de Claude Bernard ; des
tares originelles vont conditionner leur existence. Au contraire, Voltaire fait de son Candide une
cire vierge prête à se laisser imprimer de manière philosophique au gré de toutes les folies
humaines. La Comédie humaine balzacienne veut faire concurrence à l’état civil mais parfois
certains de ses personnages deviennent des types comme ce Père Goriot, métaphore de la
paternité. Des personnages récurrents comme les détectives des romans policiers ou les héros de
séries doivent rester fidèles à leur identité sous peine de désorienter le lecteur ou de le décevoir.
L’écrivain peut se trouver ainsi dépossédé de sa création ou contraint dans son exploitation. Les
auteurs ont donc le choix de déplacer significativement le curseur entre vraisemblance et force
expressive. D’un côté, des héros à qui leur créateur tente de donner l’épaisseur du réel, dotés
d’une psychologie complexe et qui, paradoxalement, au nom de cette vraisemblance s’effacent
parfois jusqu’à devenir dérisoires tels le Meursault de L’Étranger ou le Salavin de Duhamel dans
La Confession de minuit. De l’autre des monstres comme le Quasimodo de Notre-Dame de Paris,
des symboles comme Cimourdain, Lantenac et Gauvain dans Quatre-vingt-treize de Hugo, des
porte-paroles comme Jacques et son maître chez Diderot. Ce préalable posé, quel rôle les
écrivains donnent-ils à la réalité romanesque pour faire évoluer leurs personnages ? La réalité
exclusive Dans ce schéma, le personnage se méfie de ses rêves par peur de la désillusion
douloureuse, ou s’en défait au contact d’une réalité prégnante. La vie réelle est un monde
dangereux, cruel qu’il faut apprendre sous peine d’être broyé. C’est elle qui préside au roman
d’apprentissage. Un récit de Balzac porte un titre révélateur, Les Illusions perdues. Lucien de
Rubempré doit renoncer peu à peu à ses rêves de célébrité littéraire devant les difficultés du
monde de l’édition. Dans le Père Goriot, un autre roman d’apprentissage, Rastignac découvre
progressivement le cynisme du Faubourg Saint-Germain et la cupidité de ses voisins de la
pension Vauquer. Éclairé par le sulfureux Vautrin, il renonce à son idéal d’honnête jeune homme
pour se lancer à la conquête de la capitale. Le récit s’achève sur le fameux : « À nous deux,
maintenant ! ». Cet environnement sans pitié est le pain quotidien du héros picaresque. Il est
utilisé par les romanciers réalistes ou naturalistes pour dénoncer les conditions sociales qui
fabriquent à l’envi des médiocres, des abrutis ou des scélérats. Madame Bovary de Flaubert nous
présente une galerie provinciale oppressante où la bêtise concurrence la malhonnêteté : du pauvre
Bovary, en passant par les lâches Rodolphe, Léon, le malhonnête Lheureux, l’obtus Bournisien,
on en arrive au stupide et malfaisant Homais. La réalité oubliée ou l’évasion Cette réalité
mesquine et souvent blessante doit parfois être oubliée temporairement. Ce gommage est
nécessaire pour continuer à vivre, à supporter la solitude ou la misère. C’est ce qui arrive à
Suzanne dans Un Barrage contre le Pacifique. L’adolescente désœuvrée et livrée à elle-même erre
dans les quartiers de la ville à la recherche de son frère Joseph. L’univers enchanté du cinéma lui
offre un instant de répit dans son existence misérable. Elle peut, à la manière de Cendrillon, rêver
à une autre vie plus luxueuse et affectivement plus nourrissante. Cependant elle ne confond pas la
vie qui l’attend dehors avec l’illusion de la bluette. Les mots de la fin, « On voudrait bien être à
leur place. Ah ! comme on le voudrait », traduisent bien ce regret. Cette fuite devant le réel peut
devenir maladive ou obsessionnelle. L’Assommoir de Zola nous rapporte la déchéance de
Coupeau et Gervaise qui oublient leur mal-être dans la bonne chère puis l’alcool. Salavin, dans
La Confession de minuit de Duhamel, s’imagine marcher au bord d’un précipice sur le bord d’un
trottoir ou descendre des rapides dans son canapé. Tous ces délires lui permettent d’échapper à
l’insignifiance de sa vie de fonctionnaire renvoyé. Le rêve ou le surnaturel se mêlent
inextricablement à la vie. Le récit fantastique est fondé sur ce principe de frontières poreuses
entre la réalité triviale et le monde onirique des hallucinations. Le personnage doute de ses sens et
sombre souvent dans la folie. Le lecteur du Horla de Maupassant ne sait s’il doit croire à la réalité
des faits rapportés. Cette ambiguïté fondamentale accompagne le témoignage de la démence qui
saisit peu à peu le narrateur. Le récit justement nommé Aurélia ou le Rêve et la Vie de Nerval met
en scène un personnage qui vient d’apprendre la mort d’une femme qu’il avait « déifiée ». Le
héros vit alors des crises de folie, il est envahi de rêves qui se mêlent à la réalité. Le lecteur le voit
s’acheminer vers une mort probable, seule issue à ses doutes angoissés. L’abbé Donissan dans
Sous le Soleil de Satan de Bernanos reçoit sa sainteté de son combat sans merci contre un
adversaire invisible. L’auteur entend rendre « naturel le surnaturel ». Dans tous ces récits, les
personnages évoluent dans et par une réalité qui ne se résume pas à leur expérience sensorielle.
Le rêve se substitue à la vie. Si le héros du registre fantastique se laisse interroger par ce monde
étranger et inquiétant qui sourd des failles du réel, d’autres personnages voient dans la réalité une
source d’insatisfactions insupportables. Ils choisissent alors de nier leur existence ennuyeuse et de
la remplacer par les scintillements factices de leurs rêves. Emma Bovary est le prototype de ces
héroïnes qui se détruisent dans ce déni de la réalité au point que ce mal est depuis appelé
bovarysme. L’épouse de Charles, le médiocre gagne-petit, s’est abandonnée sans retour à
l’univers sentimental de ses lectures de jeunesse. Elle a aussi refusé sa condition économique
d’épouse de simple officier de santé pour se lancer dans des dépenses fastueuses. Enfin elle est
incapable de tirer la moindre leçon de la lâcheté de ses amants successifs. Acculée, elle croit
encore échapper à ses obligations par le suicide. Le récit de son empoisonnement à l’arsenic est
significatif de ces évasions destructrices successives. Jean des Esseintes, l’anti-héros d’À Rebours
de Huysmans, épuisé et déçu de sa vie agitée de dandy, s’est retiré du monde réel. Dans un
pavillon de Fontenay-aux-Roses il a recréé de toute pièce un univers factice. Il recherche
l’essence des plaisirs dans des jouissances esthétiques artificielles. Finalement il s’étiole dans ce
confinement et doit fuir ce succédané mortifère de l’existence véritable. Autre type de
falsificateur, Thomas l’imposteur de Cocteau. Ce jeune homme joue à mentir pour accéder à «
une antichambre des aventures ». Lors de la Première Guerre mondiale il se déguise en militaire,
prétend préparer l’école de tir, puis se fait passer pour le neveu du général de Fontenoy. Sa
supercherie convainc la princesse de Bormes, une riche ambulancière. Guillaume Thomas est
donc un personnage qui « vi[t] une moitié dans le songe », comme un « poète à l’état brut ». C’est
cependant son mensonge qui constituera sa vérité puisqu’il mourra pour avoir voulu être
conforme à son rôle d’emprunt. La réalité tempérée ou recréée La majorité des personnages
romanesques, loin de l’amalgame de la réalité avec leur monde intérieur, de son rejet, ou de son
effacement, entretiennent une attitude équilibrée à l’égard de leur environnement. Chez Proust,
les deux entités restent distinctes tout en interagissant. L’enfant connaît l’angoisse de la
séparation au moment du coucher parce que, justement, il va voir disparaître son milieu familier
et les repères qui le rassurent. Il aimerait bien oublier ses peurs réelles dans la magie du conte
illustré, mais le conte lui-même engendre d’autres peurs à la fois délicieuses et inquiétantes.
Finalement ce mélange de familiarité et d’illusion n’apaise nullement le petit homme. Il tente
donc de les contenir chacune dans leur domaine pour leur faire produire l’effet anesthésiant
attendu. Il garde son esprit critique pour analyser ses sensations et l’effet qu’elles produisent en
lui. Camus met en scène un enfant qui, lui aussi, garde la tête froide pour juger de la magie
commerciale du cinéma. D’abord il étudie les strates sociales qui se révèlent au cours de la
séance, il garde ses distances à l’égard des débordements de joie enfantine. Mais surtout il est
capable de démonter les mécanismes mercantiles qui exploitent la crédulité et la curiosité
insatiable du public, adultes compris. Les images qui défilent sur l’écran et le spectacle que donne
la salle, loin de le subjuguer, développent son jugement. Le plus remarquable, chez ces deux
auteurs, est leur propension à faire surgir un point de vue subjectif esthétique de cette
confrontation entre la réalité perçue et les illusions de la féerie. Proust se délecte avec humour de
cette immixtion de la fantasmagorie dans son environnement familier, entre synchronisation avec
la voix de la conteuse et déformation de l’image. Camus, lui, se livre à une savoureuse métaphore
surréaliste à propos de la « vieille demoiselle » qu’il sublime dans sa « sérénité immobile d’un
maigre dos en bouteille d’eau minérale capsulée d’un col de dentelle. » Les deux narrateurs ont
peut-être commencé à voir poindre leur vocation d’écrivain dans ces jeux d’images qui ont excité
en eux la fonction poétique du langage. La réflexivité Le romancier est le maître de sa création,
c’est entendu. Il intervient de manière plus ou moins déclarée dans son œuvre. C’est en particulier
ce qui différencie l’autobiographie de la fiction autobiographique. La question est alors de savoir
quelle part d’expérience personnelle l’auteur a placée dans ses personnages. Quand le narrateur se
confond-il avec l’auteur ? Entre les nécessités logiques du récit, la vraisemblance assumée, les
capacités à imaginer des psychologies différentes, les attentes supposées du lecteur, l’auteur peut
se cacher totalement derrière ses personnages ou laisser des indices de sa présence. C’est là
qu’intervient l’ironie de Stendhal ou de Flaubert qui vient corriger les excès de leurs créatures.
Mais l’auteur peut aller plus loin et jouer de sa création en analysant les rapports qu’il entretient
avec elle. Volonté de démythifier ? Réflexion sur la narratologie ? Exploration des profondeurs
du moi ? Examen du pouvoir des mots ? Le récit est alors parsemé d’interruptions métatextuelles.
Jacques le fataliste de Diderot en est un exemple fameux qui vise à détruire l’illusion
romanesque. Nous abordons ici la notion de réflexivité héritée des sciences. L’auteur pointe
l’apparente contradiction du réalisme, entre son implication personnelle de créateur dans son
sujet, et la distance qu’il doit prendre avec lui pour lui conserver son autonomie objective. Par la
réflexivité, l’auteur prend conscience du point de vue depuis lequel il observe sa création
fictionnelle. Il peut ainsi mieux définir son projet, en envisager les limites, mettre en relief ses
présupposés artistiques. Les introductions écrites par les auteurs avant leurs récits sont riches
d’enseignement à ce sujet. La Préface de Pierre et Jean de Maupassant expose clairement cette
implication subjective de l’auteur : « Chacun de nous se fait donc simplement une illusion du
monde, illusion poétique, sentimentale, joyeuse, mélancolique, sale ou lugubre suivant sa nature.
Et l’écrivain n’a d’autre mission que de reproduire fidèlement cette illusion avec tous les
procédés d’art qu’il a appris et dont il peut disposer. » Le véritable romancier y est défini comme
un artisan au savoir-faire unique.

Conclusion :
Nous sommes obligés d’accepter avec Marthe Robert que tout roman est par essence une fiction
dont les personnages n’ont pas plus d’épaisseur que l’encre qui a servi à les coucher sur le papier.
Ce postulat admis, il se trouve que nombre de ces créatures de papier savent nous rejoindre, nous
émouvoir, retenir notre attention au point que nous ne les oublions plus. Pour habiter durablement
notre imaginaire, ils doivent avoir une histoire qui nous captive. C’est dans leur évolution, leur
trajectoire que ces héros prennent une consistance marquante. Ce processus est particulièrement
soigné par les grands écrivains parce qu’ils vivent par procuration au travers de leurs créatures,
soit parce qu’ils les fabriquent avec leur expérience, soit parce qu’ils explorent des potentialités
inassouvies. Le rapport à la réalité et au rêve est fondamental dans cette construction des
personnages. En parodiant Épictète, le romancier pourrait s’adresser à son personnage dans les
termes suivants : « Ton affaire, c’est de jouer correctement le personnage qui t’a été confié ;
quant à le choisir, c’est celle d’un autre. » Ce rapport entre réalité extérieure et intérieure,
objective et subjective prend des formes extrêmement variées qui balaient un spectre depuis les
échanges jusqu’à la substitution en passant par l’exclusion, le refus ou la confusion. Cette
construction du personnage reste finalement un atout de premier plan dans le projet artistique du
vrai romancier. C’est par elle que le lecteur peut s’identifier au personnage romanesque. En
détournant malicieusement le propos de Malraux nous pouvons affirmer que « le tombeau des
héros est le cœur des vivants. »

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