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Épicure : il faut combler les désirs naturels et non les désirs vains
« Maintenant, il faut parvenir à penser que, parmi les désirs, certains sont naturels, d’autres sont
vains. Parmi les désirs naturels, certains sont nécessaires, d’autres sont simplement naturels. Parmi
les désirs nécessaires, les uns le sont pour le bonheur, d’autres pour le calme du corps, d’autres enfin
simplement pour le fait de vivre. En effet, une vision claire de ces différents désirs permet à
chaque fois de choisir ou de refuser quelque chose, en fonction de ce qu’il contribue ou non à la
santé du corps et à la sérénité de l’âme, puisque ce sont ces deux éléments qui constituent la
Épictète : un désir ne peut être vaincu que par un autre désir ou une autre
volonté
« Qui peut vaincre une tendance, sinon une autre tendance ? Qui peut vaincre un désir ou une
aversion sinon un autre désir ou une autre aversion ? Si l’on me menace de mort, dis-tu, on me
contraint ? Ce n’est pas cette menace qui te contraint d’agir, c'est l’opinion que tel ou tel acte est
préférable à la mort ; c'est donc bien encore ton jugement qui t’y oblige ; c'est la volonté qui oblige la
volonté. »
« Chaque chose, autant qu’il est en elle, s’efforce de persévérer dans son être. […] L’effort par lequel
chaque chose s’efforce de persévérer dans son être n’est rien en dehors de l’essence actuelle de cette
chose. […] L’Âme, en tant qu’elle a des idées claires et distinctes, et aussi en tant qu’elle a des idées
confuses, s’efforce de persévérer dans son être pour une durée indéfinie et a conscience de son effort.
[…] Cet effort, quand il se rapporte à l’Âme seule, est appelé Volonté ; mais, quand il se rapporte à la
fois à l’Âme et au Corps, il est appelé Appétit ; l’appétit n’est par là rien d’autre que l’essence
Spinoza, Éthique, 1677
souffrance
« La volonté, à tous les degrés de sa manifestation, du bas jusqu’en haut, manque totalement d’une fin
dernière, désire toujours, le désir étant tout son être ; désir que ne termine aucun objet
atteint, incapable d’une satisfaction dernière, et qui pour s’arrêter a besoin d’un obstacle, lancé qu’il
est par lui-même dans l’infini. […] Tout désir naît d’un manque, d’un état qui ne nous satisfait pas,
donc il est souffrance, tant qu’il n’est pas satisfait. Or, nulle satisfaction ne dure ; elle n’est que le
point de départ d’un désir nouveau. Nous voyons le désir partout arrêté, partout en lutte, donc
toujours à l’état de souffrance : pas de terme dernier à l’effort ; donc pas de mesure, pas de
terme à la souffrance. »
« Le sujet désire l’objet pace que le rival lui-même le désire. En désirant tel ou tel objet, le rival le
désigne au sujet comme désirable. Le rival est le modèle du sujet, non par tant sur le plan
superficiel des façons d’être, des idées, etc., que sur le plan plus essentiel du désir. […]. Le sujet attend
de cet autre qu'il lui dise ce qu’il faut désirer, pour acquérir cet être. Si le modèle, déjà doté semble-t-il,
d’un être supérieur désire quelque chose, il ne peut s’agir que d’un objet capable de conférer une
plénitude d’être encore plus totale. Ce n’est pas par des paroles, c'est par son propre désir que le
modèle désigne au sujet l’objet suprêmement désirable. […] le désir est essentiellement
mimétique, il se calque sur un désir modèle ; il élit le même objet que ce modèle. »
« Le besoin s’ouvre sur un monde qui est pour moi, il retourne à soi. Le besoin est le retour même,
l’anxiété du moi pour soi, égoïsme, forme originelle de l’identification, assimilation du monde en vue
de la coïncidence avec soi, en vue du bonheur. [...] À un sujet qui se définit par le souci de soi et qui
dans le bonheur accomplit son pour soi-même, nous opposons le désir de l’autre qui procède d’un
être déjà comblé et dans ce sens indépendant et qui ne désire pas pour soi […] Le désir d’autrui – la
socialité – naît dans un être à qui rien ne manque ou plus exactement il naît par-delà tout ce qui peut
lui manquer ou le satisfaire. [...] Le désirable ne comble pas mon désir mais le creuse, me
l’homme intempérant ?
« Socrate : – Considère si tu ne pourrais pas assimiler chacune de ces deux vies, la tempérante et
l’incontinente, au cas de deux hommes, dont chacun posséderait de nombreux tonneaux, l’un des
tonneaux en bon état et remplis, [...] [de] liqueurs, toutes rares et coûteuses et acquises au prix de
mille peines et de difficultés ; mais une fois ses tonneaux remplis, notre homme n’y verserait plus rien,
ne s’en inquiéterait plus et serait tranquille à cet égard. [...] Mon allégorie t’amène-t-elle à reconnaître
que la vie réglée vaut mieux que la vie déréglée, ou n’es-tu pas convaincu ? Calliclès : – Je ne le suis
pas, Socrate. L’homme aux tonneaux pleins n’a plus aucun plaisir, et c’est cela que j’appelais
tout à l’heure vivre à la façon d’une pierre, puisque, quand il les a remplis, il n’a plus ni plaisir ni
peine ; mais ce qui fait l’agrément de la vie, c’est d’y verser le plus qu’on peut. »
consciences de soi met en péril la vie de l’autre et s’expose elle-même au péril. [...] La vie n’étant pas
moins essentielle que la liberté, le combat se termine d’abord, en tant que négation unilatérale de la
manière inégale que voici : l’une des consciences de soi engagée dans le combat préfère la vie, se
conserve comme conscience de soi singulière mais renonce à être reconnue ; l’autre s’attache à
sa relation avec elle-même, et elle est reconnue par la première comme par ce qui lui est