Sunteți pe pagina 1din 4

Notre commentaire portera sur un passage de Fantasio d’Alfred de Musset.

Qualifiée de « comédie »
par le dramaturge, cette pièce est extraite du recueil Un spectacle dans un fauteuil, publié en 1834.
Plus précisément, nous étudierons le monologue de Fantasio à la scène III du deuxième acte. Fantasio
a décidé de prendre la place de St-Jean, le défunt bouffon, à la cour du roi de Bavière. Cette décision,
dont il se réjouit qu’elle soit irréfléchie, lui a fait rencontrer la princesse Elsbeth qui s’apprête à
devenir reine. Elle vient de faire l’expérience des premières balivernes de Fantasio à la cour. Peu de
temps après s’être quittés, Fantasio revient seul sur scène pour nous faire part de sa nouvelle vie de
bouffon. De façon général, la forme du monologue est souvent l’opportunité de révéler quelque chose
de décisif au spectateur. Notre commentaire s’interrogera donc sur la fonction de ce monologue. Le
spectateur est en droit d’attendre une certaine relance de l’intrigue, ou du moins une explication au
manque évident d’intrigue et d’actions depuis le début de la pièce. Est-ce le cas  ? Que nous révèle
Fantasio ? Dans un premier temps, nous verrons en quoi cette scène est comique et nous présente un
Fantasio bohème et ironique. Puis nous nous demanderons si Fantasio n’est pas un personnage plus
ambivalent, dont la personnalité serait, elle aussi, en partie travestie. Enfin, nous verrons en quoi ce
que nous apprenons du personnage de Fantasio peut nous aider à comprendre la fonction d’un
monologue peu conventionnel.

Tout d’abord, Fantasio nous informe qu’il est enchanté de sa première journée de travail à la cour. Il
commence en effet par s’exclamer : « Quel métier délicieux que celui de bouffon ! ». Le spectateur le
voyant couché sur un tapis, l’effet comique est immédiat : ce métier n’a pas l’air très intense et c’est
sûrement pour cela qu’il plaît à Fantasio. En effet, il ne semble contraint en rien, si ce n’est porter son
costume (l.16/17). Fantasio, qui se plaignait de n’exercer « aucune profession » à la scène II de l’acte
I, a enfin un métier dont il va nous faire l’éloge. Ce métier plaît sûrement à Fantasio dans la mesure où
il ne semble pas en être un. En effet, ce métier ne lui donne apparemment aucune responsabilité. Si
l’on doit attendre d’un bouffon qu’il fasse des « balivernes » (l.13), Fantasio ne voit là aucune
contrainte. Au contraire, de part son caractère joueur et moqueur, il n’aurait cessé de faire le bouffon
que si quelqu’un était là pour l’en « empêcher » (l.14/15). Ainsi, son métier permet à sa liberté et à sa
créativité de s’exprimer pleinement. Sa cervelle, qui était auparavant « délabrée » (I,2), est désormais
« à l’aise » (l.13).

De plus, si Fantasio se satisfait d’être « reçu, choyé, enregistré » (l.6) à la cour, et que cela lui permet
de se moquer de ses créanciers qui ne pourront pas le retrouver (l.19/20), il se satisfait également
d’être « oublié ». Fantasio exprime cela dans une même phrase : « […] me voilà reçu, choyé,
enregistré, et, ce qu’il y a de mieux encore, oublié ». Le spectateur, qui ne s’attend pas à ce que l’on
fasse l’éloge d’être oublié, est dérouté. Il est d’autant plus dérouté et amusé qu’il entend dire deux
choses apparemment contradictoires dans un même flot de paroles. En effet, si Fantasio est « reçu,
choyé, enregistré », c’est qu’il est pour le moins remarqué, donc surtout pas « oublié ». Fantasio tient
la contradiction : il nous explique que c’est justement parce qu’il est « enregistré » qu’il est devenu un
habitué et qu’on a fini par l’oublier. Il affirme : « je vais et viens dans ce palais comme si je l’avais
habité toute ma vie ». De plus, le Roi ne fait pas attention à lui, celui-ci ne voit en Fantasio qu’un
nouveau St-Jean. Si l’on peut s’attendre à ce qu’un bouffon soit mécontent du manque de respect et
d’attention qu’on lui accorde, Fantasio s’en réjouit. Le spectateur peut s’en amuser, a fortiori quand
Fantasio va jusqu’à lui présenter un paradoxal amour de l’irrespect : il est fier d’être un « animal
domestique du roi de Bavière » (l.15), de n’être pas plus que son « épagneul » ou sa « pintade » (l.18).
Le spectateur apprend donc que Fantasio se réjoui de pouvoir se fondre dans le décor, de devenir un
spectateur de la pièce. Il n’agira pas : il est devenu une chose parmi les autres, changeante et
insignifiante.
Enfin, Fantasio aperçoit la princesse en pleurs et commence à s’apitoyer sur son sort. Les nombreuses
phrases exclamatives expriment sa consternation : « […] elle se sacrifie en silence ; que le hasard est
capricieux ! » (l.39/40). Comment expliquer ce changement brusque de ton et de situation ? Fantasio
éprouve-t-il vraiment de l’empathie à l’égard de la princesse dont il s’est plutôt moqué il y a quelques
instants ? Nous pouvons faire l’hypothèse que Fantasio est ironique. La voir en pleurs n’est qu’un
autre produit du hasard : « il faut que je me grise, que je rencontre l’enterrement de St-Jean, que je
prenne son costume et sa place, que je fasse enfin la plus grande folie de la terre, pour venir voir
tomber, à travers cette glace, les deux seules larmes que cette enfant versera peut-être sur son triste
voile de fiancée ! ». Fantasio ne fait ici que dresser un constat. Le « pour » n’implique aucun
finalisme, Fantasio ne croyant sûrement pas que c’est son destin qu’il a amené là. Aussi, à quoi bon
aller aider la princesse quand la folie vaut parfois mieux que la « saine raison » ? (l.4). Fantasio ne
croit sûrement pas qu’il a un quelconque rôle à jouer, il est simplement spectateur des « caprices » du
hasard. Le fait qu’il ne voie pas directement la princesse, mais à travers une glace, pourrait d’ailleurs
nous indiquer que Fantasio ne reste qu’un observateur de la pièce, toujours à distance. Ainsi, nous
sommes tentés de dire que Fantasio prend également ses propres sentiments à distance, et l’on peut
douter de l’implication émotionnelle de Fantasio.

Cela dit, notre raisonnement pourrait être exactement inverse. Il se pourrait qu’apparaisse, dans cette
deuxième partie du monologue, une seconde face de la personnalité de Fantasio qui irait jusqu’à nous
faire douter de la première. Peut-être apercevons-nous la personnalité d’un Fantasio sans masque, sans
déguisement, face à la misère de la condition humaine dont il était affligé à la scène 2 du premier acte.
Si le hasard est la mesure de toutes choses, il peut cependant aussi bien conduire au bonheur qu’à la
misère. En effet, Fantasio était « gris », « croit »-il (l.2), lorsqu’il a pris la décision de se présenter au
palais, il s’est donc laissé porter par le hasard. Dans la première partie du monologue, Fantasio se
satisfait que le hasard l’ait amené là, sans qu’il ne l’ait jamais réellement voulu. Elsbeth, elle aussi, n’a
pas voulu se marier avec le prince de Mantoue, mais cela ne la satisfait pas. Fantasio constate donc
amèrement, en observant Elsbeth, que le hasard, quelque que soient ses résultats, n’est pas là pour
faire plaisir, n’est pas là pour quoi que ce soit. Ainsi l’on retrouverait le Fantasio de la scène 2 du
premier acte, consterné par la vanité de l’existence et par l’impossibilité de communiquer la
profondeur de notre être. En effet, n’est-ce pas ce « monde intérieur » (I,2) incommunicable
qu’aperçoit Fantasio dans ce miroir ? Ce qu’Elsbeth ne montrera jamais, ce qu’Elsbeth sacrifiera pour
sauver une apparence, un rôle social ?

En outre, nous pourrions penser qu’Elsbeth est un véritable alter ego de Fantasio. En effet, nous
savions déjà qu’Elsbeth était rêveuse, et désormais nous la connaissons toute aussi mélancolique que
Fantasio dans la 2ème scène de l’acte I. Ainsi le miroir que tient Fantasio lui ferait aussi entrevoir sa
propre personne. Fantasio aussi, d’une certaine manière, se « sacrifie » puisqu’il n’est heureux qu’en
refusant d’être lui-même, qu’en se déguisant. Nous pourrions d’ailleurs penser qu’il ne croit pas qu’un
« soi-même » existe. Sa bouffonnerie ne pourrait être justement qu’un déguisement, qu’un masque,
cachant le désespoir dont il nous a fait part plus tôt dans la pièce. Pour échapper à la vanité du monde,
à la mauvaise foi de tout rôle social, son seul moyen est d’échapper au monde lui-même en se faisant
« oublié ». En étant oublié, il s’oublie lui-même et sa misère. Sa satisfaction d’être enfin devenu «  ce
monsieur qui passe » (I, 2), c’est-à-dire personne en particulier, ne peut être qu’amère. Voir le malheur
que tente vainement de dissimuler Elsbeth, rappellerait à Fantasio que, lui aussi, est caché sous son
déguisement. Peut-être se rend-il compte déjà, comme il nous l’avouera à la toute fin de la pièce, que
le métier de bouffon qu’il vient de célébrer n’est pas fait pour lui, ne pouvant faire véritablement
aucun métier.

Dans cette scène, Fantasio nous apparaît plus que jamais comme un personnage ambivalent, dont il est
difficile de cerner la personnalité. Le spectateur ne sait quoi penser de l’authenticité des émotions de
Fantasio, et peut-être encore moins de la fonction de ce monologue. Au théâtre, le monologue est
souvent l’occasion de révéler une vérité au spectateur. Le personnage se retrouvant seul, une certaine
connivence s’installe avec le public : il l’informe des relations qu’il entretient avec les autres
personnages, il relance l’intrigue… Or ce monologue ne semble apporter aucune information
concernant l’action de la pièce. Nous savions déjà que la princesse était triste mais prête à se sacrifier.
De même, nous nous doutions déjà que Fantasio serait heureux de pouvoir « faire des balivernes » à la
cour du roi. En revanche, nous étions en droit de voir s’esquisser une histoire d’amour entre Fantasio
et Elsbeth. Pourtant, nous apprenons que le personnage principal de la pièce ne veut surtout pas avoir
de responsabilité, que cela soit envers le roi (qui ne le remarque pas) ou envers ses créanciers. Il ne
compte pas agir, c’est-à-dire tenir un rôle dans la pièce : il tient uniquement à se faire « oublié », n’a
peut-être « d’autre dessein que celui de dormir » sur le gazon (l.30). Le principal protagoniste devient
ainsi spectateur de sa propre pièce. L’unique utilité de son travestissement, dont on pouvait attendre
une série d’aventures, est de lui permettre de devenir inutile. Ainsi, la pièce pourrait se terminer sur
cette scène, aussi bien qu’elle pourrait n’avoir jamais commencé. Ce monologue, comme à la scène 2
de l’acte I, ne serait qu’une simple discussion (cette fois-ci avec le public) et non un véritable dialogue
de théâtre conventionnel, c’est-à-dire un dialogue qui nous apporte des éléments de l’intrigue, qui
permet à l’action de se déroulait.

Fantasio, ce personnage imprévisible, permet ainsi de faire la critique d’un théâtre trop prévisible et
conventionnel. Fantasio refuse de devenir « un écolier de rhétorique » comme l’a pu être le prince de
Mantoue séduisant la princesse. Il se moque ainsi du mélodrame surfait qui se veut romantique.
L’intrigue est grossièrement rappelé par Fantasio : « cette petite fille est sans doute romanesque ; il lui
est cruel d’épouser un homme qu’elle ne connaît pas. Cependant elle se sacrifie en silence […]  ». Le
public n’est pas dupe : ce n’est pas la véritable intrigue de la pièce. Cette intrigue est trop
conventionnelle pour être prise au sérieux. De même, comme nous l’avons vu plus tôt, le spectateur
est en droit de douter des exclamations de Fantasio. S’il était véritablement affecté par l’histoire peu
originale de cette princesse, oserait-il l’appeler « Pauvre petite » ? Oserait-il comparait une princesse à
une « brebis à qui on met un ruban rose au cou pour la mener à la boucherie  » ? Encore une fois,
l’image est trop extravagante pour être prise au sérieux. Pour cesser de définir cette scène par ce
qu’elle n’est pas, nous pourrions dire qu’elle semble, elle aussi, se laisser porter par le hasard des
circonstances. Elle laisse libre cours à la création imaginaire (phantasia) en se situant dans
l’improvisation perpétuelle, dans une oscillation permanente qui donne à la pièce son caractère
onirique.

Le lecteur/spectateur ne sait comment interpréter les paroles de Fantasio. Joue-t-il ? Feint-il ? Est-il
moqueur ou affligé ? De même, le sens de la pièce entière peut nous échapper. La pièce semblait
d’abord centrée sur l’histoire d’une princesse qui refuserait un mariage d’intérêts (I, 1), jusqu’à ce que
la princesse affiche finalement sa détermination à se sacrifier (II,1). Un peu plus tard, nous étions en
droit d’attendre une histoire d’amour entre Fantasio et Elsbeth (II,1), mais la scène étudiée nous
apprend que le seul dessein de Fantasio est de se faire « oublié ». Nous n’avons donc d’autres choix
que d’accepter le caractère éthéré et indéterminé de la pièce, tout comme Fantasio accepte la versatilité
de toutes choses. Ainsi, nous sommes aussi invités à prendre de la distance vis-à-vis de la pièce : si
nous étions habitués à croire ce que l’on voit, cette pièce nous apprend que l’on veut souvent voir ce
que l’on croit, ce qui nous convient, ce à quoi l’on s’attend. C’est pour cette raison que Fantasio nous
embarrasse : nous n’avons rien à attendre quand tout est imprévu. Alors un axe de lecture s’offre à
nous, peut-être : considérer l’absence d’intrigue comme l’objet même d’un théâtre expérimental. Mais
n’est-ce pas encore une vaine tentative d’expliquer une pièce qui fuit toute définition ?

S-ar putea să vă placă și