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Est-on propriétaire de son corps ?

(intro)

Confronté à la question de savoir si l’on est propriétaire de son corps, notons d’emblée que le
problème qui nous occupe revêt un caractère éminemment juridique. Certes, l’expression selon
laquelle nous serions « propriétaire de notre corps » suppose un dualisme : celui qui l’énonce se pense
séparé de son corps, l’objectivise pour y voir sa propriété. Mais il ne s’agit pas ici de traiter de la
nature et de la légitimité de cette objectivation, ramenant alors notre sujet au problème classique : « A-
t-on un corps ou est-on un corps ? » En effet, peut-être suis-je mon corps, reste que l’ « illusion »
(permanente) qu’il m’est extérieur, que ce ne sont pas des organes qui énoncent qu’ils sont un corps,
demeure, et ainsi je peux revendiquer des droits sur mon corps comme si je l’avais. A l’inverse, peut-
être suis-je essentiellement une res cogitans, qu’en conséquence « j’ai » un corps autre que moi-
même, cela n’est pas suffisant pour que je reconnaisse des droits sur celui-ci. Au contraire, chez
Descartes par exemple, c’est précisément parce que corps et âme renvoient à deux substances
distinctes qu’aucun pouvoir direct de l’âme sur le corps, aucune souveraine législation de l’âme sur le
corps, ne peut être admise – les « esprits animaux » se mouvant par eux-mêmes.

Le problème abordé maintenant positivement, la question serait de savoir si l’on a des droits
sur son propre corps de telle sorte que celui-ci s’apparente à une propriété. Si je veux lever la main, je
ne traite pas mon corps comme une propriété et je n’ai aucun droit à faire valoir pour exécuter mon
geste, car ce dernier ne fait intervenir aucune personne tierce, et par conséquent ne relève pas du droit.
Si par contre je compte donner l’un de mes reins, autrui (le receveur) est impliqué dans mon action et
celle-ci peut alors être jugée illégale. Si elle l’est, quel argument opposerai-je pour ma défense ?
L’essentiel sera de rappeler : « C’est mon corps ». Autrement dit : « L’Etat n’a pas à intervenir sur ce
qui m’appartient de façon exclusive ». Telle est la logique de celui qui affirme être propriétaire de son
corps. Elle ne manque pas d’être paradoxale. En effet, il s’agit de prouver que j’ai des droits
fondamentaux sur mon corps en arguant que mon corps n’est pas du domaine du droit, car par essence
privé. Le corps serait le seul bien dont je suis maître exclusivement et vis-à-vis duquel personne ne
pourrait donc légiférer hormis moi-même ; certes, mais à condition que le corps délimite une sphère
privée, hermétique à toute relation à autrui. Or notre exemple détruit cette condition : dans le cas du
don d’organes, mon corps concerne autant moi-même qu’une personne tierce.

Pour résumer, si je me porte propriétaire de mon corps, ce corps ne sera bientôt (au moins
temporairement) plus « mon corps » ; si je me porte propriétaire de mon corps, alors la tentative d’en
faire une propriété échouera puisque le droit n’a aucun sens dans la relation de soi à soi. Cette aporie
ne vient-elle pas du présupposé selon lequel mon corps incarnerait ma sphère privée ? Faut-il nier
toute publicité du corps ? N’est-ce pas parce que notre corps est à la fois ce que nous sommes et ce qui
se donne aux autres que nous pouvons en faire un objet de droit ?

Si nous essaierons dans un premier temps de penser le corps comme ce qui préexiste à tout
état social et demande donc à être défendu face aux coercitions institutionnelles, nous devrons voir par
la suite qu’il n’est pas naturel de se sentir propriétaire de son corps mais qu’un tel « repli sur soi
juridique » relève d’un symptôme individualiste historiquement déterminé. Demeurera alors la
question de savoir si, la nature sociale (et hétéro-déterminée) de l’homme étant retrouvée, nous ne
pouvons pas d’autant mieux se sentir propriétaire de notre corps.

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