Documente Academic
Documente Profesional
Documente Cultură
UNIVERSITE DE CARTHAGE
MEMOIRE
DEDICACE
« A ma chère mère qui m’a toujours soutenue dans les moments les plus difficiles.
A mes deux chers frères Nizar et Ramzi qui m’ont été d’une aide précieuse
A mon cher fils Youssef qui a illuminé ma vie depuis sa naissance et qui est une source
de bonheur infinie.
REMERCIEMENTS
C’est avec joie que je remercie tous ceux qui m’ont aidé à réaliser ce mémoire.
Je tiens à remercier mon encadreur Monsieur Mounir Graja pour ses précieux
conseils.
Ma gratitude ira à mes deux rapporteurs Monsieur Fadhel Jaoua et Madame Sana
Ben Ghodhbane d’avoir accepté le sujet de mon mémoire et pour leurs
recommandations.
Enfin mes remerciements s’adressent à tous ceux qui de près ou de loin m’ont
aidé à l’élaboration de ce travail.
AAOIFI : Accounting and Auditing Organization for Islamic and Financial Institution
SOMMAIRE
DEDICACE .............................................................................................................................................. 1
REMERCIEMENTS ................................................................................................................................... 2
LISTE DES ABREVIATIONS.................................................................................................................... 3
SOMMAIRE .............................................................................................................................................. 4
INTRODUCTION GENERALE ............................................................................................................... 6
PARTIE I : DEPOTS BANCAIRES CONVENTIONNELS ET DEPOTS BANCAIRES ISLAMIQUES :
CONVERGENCES ET POINTS DE DIVERGENCES ......................................................................... 12
CHAPITRE 1 : PRESENTATION GENERALE DU CADRE REGLEMENTAIRE DE LA FINANCE
ISLAMIQUE EN TUNISIE ................................................................................................................ 13
I. PERSPECTIVES DE LA FINANCE ISLAMIQUE EN TUNISIE ............................................ 13
II. CADRE REGLEMENTAIRE GENERAL DE LA FINANCE ISLAMIQUE EN TUNISIE ..... 15
CHAPITRE 2 : RESSOURCES ET EMPLOIS DANS LES BANQUES ISLAMIQUES ................... 19
I. PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LA FINANCE ISLAMIQUE ....................................... 19
II. LES RESSOURCES DES BANQUES ISLAMIQUES .............................................................. 24
III. LES EMPLOIS DES BANQUES ISLAMIQUES ...................................................................... 26
CHAPITRE 3 : TYPOLOGIE ET PARTICULARITES DES DEPOTS BANCAIRES ISLAMIQUES 37
I. PRESENTATION DES DEPOTS BANCAIRES DANS LES BANQUES ISLAMIQUES ...... 37
II. PARTICULARITES DES DEPOTS BANCAIRES ISLAMIQUES ............................................ 38
III. RISQUE COMMERCIAL DEPLACE ET MECANISMES DE COUVERTURE .................... 40
CHAPITRE 4 : DEPOTS BANCAIRES CONVENTIONNELS : TYPOLOGIES ET
PARTICULARITES ............................................................................................................................. 44
I. TYPOLOGIES DES DEPOTS CONVENTIONNELS ............................................................ 44
II. PARTICULARITES DES COMPTES DE DEPOTS CONVENTIONNELS ........................... 46
CHAPITRE 5 : COMPARAISON ENTRE LES DEPOTS BANCAIRES ISLAMIQUES ET LES
DEPOTS BANCAIRES CONVENTIONNELS ................................................................................ 48
I. COMPARAISON ENTRE COMPTE COURANT ET AMANA ............................................ 48
II. COMPARAISON ENTRE COMPTE D’EPARGNE ET MOUDHARABA ........................... 51
III. RISQUES SPECIFIQUES AUX DEPOTS ISLAMIQUES ........................................................ 54
INTRODUCTION GENERALE
Le concept de la finance islamique est aussi ancien que la religion elle-même,
l’industrie bancaire islamique n’a réellement décollé que dans les années soixante
avec la création de la première banque islamique en Egypte en 1963.
En Tunisie, on compte déjà deux banques islamiques : Al Baraka Bank créée en 1985
avec une licence de banque off-shore et la Banque Zitouna créée en 2010 avec une
licence de banque universelle.
Par ailleurs, les banques islamiques en Tunisie cohabitent avec les banques
conventionnelles dans un cadre réglementaire commun.
En effet, pour une banque conventionnelle, les déposants constituent des créanciers
de la banque. Leurs dépôts sont des passifs dont le remboursement et la
rémunération à un taux conventionnel constituent un engagement inconditionnel
assumé sur les fonds propres de la banque.
Alors que pour une banque islamique, les déposants ne sont pas des créanciers mais
plutôt des investisseurs qui autorisent la banque à gérer leurs fonds moyennant des
frais de gestion. Ce qui implique le partage des pertes et des profits générés par
l’utilisation des fonds.
Face à cette situation, les banques islamiques ont mis en place des mécanismes pour
la protection des déposants par la constitution de réserves : la réserve pour risque
d’investissement et la réserve de péréquation des profits.
La réserve pour risque d’investissement est constituée pour prémunir les déposants
des pertes futures éventuelles liés à leurs investissements. Tandis que la réserve de
péréquation des profits est constituée pour se couvrir contre le risque commercial
déplacé.
En Tunisie, la finance islamique est plus que jamais d’actualité. En effet, celle-ci est
désormais présentée par les pouvoirs publics comme l’un des remèdes aux
problèmes de financement de l’économie tunisienne.
Une des principales différences entre les banques islamiques et les banques
conventionnelles réside dans le fait que les comptes de dépôt portant intérêt sont
interdits par la Charia. Ce qui fait que les banques islamiques mobilisent les fonds
essentiellement à travers les comptes d’investissement (PSIA), habituellement basé
sur un contrat de partenariat moudharaba entre la banque et le client ;
alternativement, un contrat Wakalah peut être utilisé comme base.
Les bénéfices des partenaires seront partagés selon un ratio convenu. En cas de
perte, c’est le Rabb ul mal qui assume l’intégralité des pertes (le moudharib n'ayant
pas de capital dans la société pour absorber les pertes). La part des bénéfices perçus
par le moudharib (la part du moudharib) est la rémunération que le partenaire
perçoit au titre de la gestion des fonds investis par le Rabb ul mal.
Si la banque accepte le PSIA sur la base d'un contrat Wakalah, suivant lequel il agit
comme wakeel ou agent, il perçoit des frais de gestion pour la gestion des fonds de
la clientèle. Encore une fois et sous réserve de l'exception mentionnée ci-dessous, le
wakeel ne porte pas toute perte découlant de l'investissement de ces fonds.
1- Quelles sont les spécificités juridiques des contrats de dépôts ainsi que la nature
des difficultés juridiques posées par ces dépôts ?
4- Quels sont les cadres réglementaire, comptable et fiscal à mettre en place pour
garantir le bon fonctionnement des banques islamiques en matière de dépôt ?
5- Quel est l’impact des spécificités des comptes d’investissement sur les diligences
du commissaire aux comptes d’une banque islamique et son programme de
contrôle de ses comptes aussi bien au niveau de la phase intérimaire ainsi que la
phase de contrôle des comptes ?
Afin d’apporter des éléments de réponse à notre problématique, nous avons choisi
de présenter notre étude en deux parties :
Une première partie consacrée à une analyse comparative des produits bancaires
islamiques et des produits bancaires conventionnels. Cette première partie est
scindée en cinq chapitres :
La finance islamique n’est pas nouvelle en Tunisie. Celle-ci a été impliquée dans le
développement de la finance islamique depuis ses débuts.
Cette compagnie avait pour mission de piloter le business takaful dans l’Afrique du
Nord particulièrement en Algérie, Lybie, Maroc et la Tunisie.
Puis, l’année 1999 a été marquée par la création de la première société de leasing
islamique « Bayt Al Tamweel Al Saoudi Al Tounsi lil Ijara » connu sous la
dénomination « Best Lease ».
Dix ans plus tard, un bureau de représentation de la Noor Bank a été ouvert en
Tunisie.
Il a fallu attendre Mai 2009 pour que la première banque islamique tunisienne à part
entière voit le jour « La Banque Zitouna ». En effet, il s’agit de la première banque
islamique nationale (entièrement détenue par des actionnaires nationaux) dans la
Cependant, ce n’est qu’en Mars 2014 que la Gulf Finance House décide d’entamer
ce projet pour un montant de 3 billions de dollars américains, qui a été finalement
suspendu en raison de pressions financières.
En Juin 2013, Al Amana Takaful a été créée avec un capital de 10 MDT représentant
ainsi la deuxième compagnie d’assurance en Tunisie.
La loi de finance pour la gestion 2014 a institué un régime fiscal spécifique aux
sukuks islamiques et au fonds communs de sukuks confirmant ainsi la volonté du
gouvernement d’instaurer un cadre fiscal spécifique à la finance islamique.
Le paysage bancaire tunisien comprend trois banques islamiques qui sont la Banque
Zitouna, Al Baraka Bank et le bureau régional de l’Islamic Noor Bank.
Ces banques cohabitent avec les banques conventionnelles qui sont déjà dotées
d’un cadre réglementaire, juridique, fiscal et comptable qui leur est spécifique.
Cependant, le fonctionnement des banques islamiques est régi par des principes qui
diffèrent de ceux qui régissent la finance conventionnelle.
En effet, la finance islamique est régie par les règles de la Charia qui puisent leurs
origines dans les cinq sources suivantes :
Le Coran ;
La Sunna qui correspond à l’ensemble des hadiths et des actions de notre
Prophète (PBSSL) ;
Le Qyas qui correspond à une forme de raisonnement par analogie pratiqué
par les fuqahas et oulémas pour résoudre un problème de droit qui n’est pas
abordé par le Coran et la Sunna ;
L’Ijtihad qui peut être défini comme l’effort fourni afin d’extraire l’avis
juridique (Hukm Charia) qui est pratiqué par les muftis (juristes) et les
mujtahids (savants) ;
L’Ijma qui correspond à un consensus des savants sur un sujet précis et à une
période postérieure à la période prophétique. Il constitue l’une des sources
de jurisprudence islamique après le Coran et la Sunna.
L’activité des institutions financières islamiques doit être conforme à ces normes.
En pratique, les autorités monétaires tunisiennes n’ont pas encore mis en place un
cadre réglementaire juridique, fiscal et comptable complet et spécifique à la finance
islamique en Tunisie.
Sur le plan fiscal, les lois de finance pour la gestion 2012 et 2014 ont essayé de
mettre en place les premiers piliers d’un régime fiscal spécifique aux produits
islamiques.
Code de la TVA ;
Code des droits d’enregistrement.
Ce cadre général qui a été initialement conçu pour les banques conventionnelles ne
favorise pas le développement des activités des banques islamiques en Tunisie.
En effet, dans les années 30, certains savants musulmans ont tenté une approche
islamique des différents problèmes socio-économiques qui les a amenés à
s’interroger sur la légitimité de l’application de l’intérêt.
Ce n’est qu’en 1962 que le Pilgrim’s Management Fund « Tabung Hadiji » a été
institué par le gouvernement malaisien. Il était dédié à permettre aux fidèles
d’épargner pour l’accomplissement du pèlerinage à la Mecque.
De la même manière, plusieurs banques islamiques vont apparaître dans les années
70 au Moyen-Orient. Ainsi, on peut citer la Dubai Islamic Bank du Soudan (1975), la
Faysal Islamic Bank d’Egypte (1977) et la Banque Islamique de Bahreïn (1979).
Certains pays ont même décrété l’islamisation totale de leur système bancaire tel que
le Pakistan en 1979 suivi en Septembre 1983 par le Soudan et de l’Iran en Mars 1984.
Ensuite, nombreux sont les pays islamiques du Golfe et de l’Asie qui ont suivi cette
même orientation.
Cette émergence rapide de la finance islamique partout dans le monde, dans les
années 90, a créé un souci majeur de réglementation et de gestion de l’industrie
bancaire islamique. Cette conjoncture a conduit à la création de trois organisations
internationales afin d’harmoniser les pratiques bancaires islamiques :
En effet, en 1990, les premiers sukuks furent émis en Malaisie par SHELL MDS. Ce
n’est qu’en 2001 que le marché des sukuks devint international suite à l’émission par
le gouvernement du Bahreïn du premier sukuk Al-Ijara souverain et International.
Ce sont en effet ses principes qui distinguent la finance islamique par rapport à la
finance conventionnelle.
Le terme Riba vient du verbe raba, yarbou qui signifie augmenter ou accroître. Il
s’agit d’une augmentation de la richesse sans contrepartie effective.
La perte de la valeur liée à l’usage d’un bien (dans le cas de la location d’un
bien) ;
L’effort fourni pour la réalisation d’un objet (dans le cas de la vente d’un bien
produit par le vendeur) ;
Le travail accompli pour l’obtention d’un bien matériel, le risque engagé dans
sa prise en charge.
Cependant, il faut préciser que dans la religion musulmane, l’intérêt et l’usure sont
conjointement associés sous le nom Riba, alors que conventionnellement, le premier
terme signifie la somme que l’on paie pour l’usage de l’argent et le second traduit
un délit commis par celui qui prête de l’argent à un taux excessif.
1. Riba-Al-fadl : Il s’agit de tout surplus concret perçu lors d'un échange direct
entre deux choses de même nature qui se vendent au poids ou à la mesure.
Le principe de partage des profits et des pertes est le principe le plus important et le
plus caractéristique de la finance islamique.
Plusieurs produits islamiques tels que les modes de financements participatifs (par
exemple : le contrat de moudharaba) consacre ce principe.
En effet, ce principe rend nécessaire le partage des risques entre les parties
prenantes et préconise un partage aussi bien des profits et des risques.
Le maysir peut être défini comme le fait de spéculer. En effet, tout contrat ou
arrangement qui parie sur l’avenir ou dépend d’un évènement aléatoire est interdit
en Islam. On trouve le maysir dans les paris, jeux de hasard...
Selon ce principe, toute transaction financière doit être adossée à un actif réel
identifiable et tangible.
De ce fait, les investissements dans les produits dérivés tels que les contrats de
« futures » et les options sont interdits en finance islamique.
Les ressources des banques islamiques proviennent d’abord de leur capital, des
dépôts, des commissions sur les services rendus et des profits réalisés grâce aux
projets financés.
A ce titre, les dépôts des banques islamiques peuvent être de trois natures :
Les comptes courants au niveau des banques islamiques opèrent sous le principe de
wadi’a. Le terme wadi’a renvoie à un ancien concept « Al Amanah » suivant lequel
une personne se voit confier des biens par une autre personne dans le but de les
conserver.
Les dépôts à vue dans les banques islamiques présentent les caractéristiques
suivantes :
Les comptes d’épargne ont le même fonctionnement que les comptes courants
islamiques.
Les comptes d’investissement non restreints : Ce sont des fonds déposés par
leurs titulaires dans des comptes spécifiques afin qu’ils soient investis dans des
projets financés par la banque pour une période déterminée.
Les comptes d’investissement opèrent sous le mécanisme du contrat de
moudharaba. En effet, ce contrat implique deux intervenants : le Rabb ul mal
qui est le déposant apporteur des fonds et le moudharib.
La banque joue dans le cadre de ce contrat le rôle de gestionnaire de fonds
pour le compte des déposants.
Aucune restriction n’est imposée à la banque concernant la nature ou le type
des projets qui seront financés par les fonds déposés.
Ces comptes sont régis par le principe des profits et des pertes : les titulaires
de ses comptes sont rémunérés par les profits réels générés par les projets
financés par les fonds selon des taux de répartition convenus à l’avance entre
la banque et le déposant.
Dans la même logique, les pertes réalisées par les projets sont réparties
proportionnellement entre les déposants selon la contribution de chacun
d’eux.
Les comptes d’investissement restreints : Contrairement aux comptes
d’investissement non restreints, le titulaire des fonds impose des restrictions
concernant la nature et le type de l’investissement dans lequel les fonds
seront investis par le moudharib ou la durée.
Le premier partenaire est identifié comme le Rabb ul mal alors que la gestion et le
management sont la responsabilité exclusive du deuxième partenaire identifié
comme le moudharib.
Dans le cas du contrat de moudharaba, tous les actifs acquis par le moudharib sont
la seule propriété du Rabb ul mal. Le moudharib perçoit sa part dans le profit dans
le cas où la vente des actifs génère un profit.
Par ailleurs, le moudharib ne peut réclamer sa part dans les actifs eux-mêmes même
si leur valeur s’est appréciée.
Par conséquent, ces clés de répartition sont fixées d’un commun accord entre les
deux parties.
Investissement en capital
La banque Projet
Résultat
islamique d'investissement
Entrepreneur Agent
Investissement des fonds Projet
gestionnaire des fonds
avancés par la banque d'investissement
de la banque
associée à son savoir faire
Résultat
Les taux de répartition des profits générés entre les différents partenaires
doivent être déterminés et convenus à la date de conclusion du contrat ;
Les taux de répartition du profit ne doivent en aucun cas correspondre à la
proportion des fonds investis dans le capital par partenaire ;
Dans le cas où le résultat généré par la coentreprise est une perte, chaque
intervenant au niveau du partenariat supporte une perte proportionnelle au
capital investi ;
Chaque intervenant a le droit de prendre part dans la gestion et le
management de la coentreprise. Mais, ils peuvent décider que la gestion de
la coentreprise soit confiée à un d’entre eux ou à une tierce personne.
Dans cette forme de mousharaka, la banque reçoit non seulement sa part dans le
profit généré par le projet mais aussi la contrepartie de ses parts dans le capital du
projet pour qu’à la fin du projet, le déposant des fonds devienne le seul et unique
propriétaire.
2. LES PRODUITS NON REGIS PAR LE PRINCIPE DES PROFITS ET DES PERTES :
Le contrat de mourabaha est un type particulier de vente qui n‘a rien à voir avec le
financement dans son sens originel.
Dans ce type de contrat, la banque procède à l’achat d’un actif qu’elle revend à
terme à son client avec une marge bénéficiaire préétablie et consentie par les deux
parties contractantes.
Le paiement par le client peut être effectué en un seul paiement ou sous la forme de
paiements échelonnés.
L’ijara en tant que mode de financement est gouverné par certaines règles qui se
présentent comme suit :
L’actif objet du contrat doit avoir une utilité. Par conséquent, les actifs n’ayant
aucun usufruit ne peuvent être loués ;
Il est nécessaire pour la validité du contrat que l’actif loué demeure la
propriété du bailleur et que seulement l’usufruit soit transféré à l’autre partie ;
Tout actif dont l’utilisation entraîne sa consommation ne peut être loué. De
ce fait, certains actifs comme l’argent, le carburant et les vivres ne peuvent
faire l’objet d’un contrat ijara ;
Sachant que la propriété du bien loué revient au bailleur, tout passif
émergent de la propriété du bien doit être pris en charge par le bailleur. Dans
la même logique, les passifs se rapportant à l’usufruit du bien loué doivent
être pris en charge par le locataire ;
La période de location doit être prédéterminée d’une manière claire dès la
signature du contrat ;
Le locataire est tenu de payer les indemnités pour les dommages qu’il a causé
à l’actif loué résultant de son mauvais usage ou sa négligence puisque le
bailleur demeure le propriétaire du bien tout au long de la période de
location ;
L’actif loué doit être complétement et clairement identifié par les parties
contractantes ;
Le loyer doit être déterminé et convenu au moment de la signature du
contrat pour toute la période de la location. Par ailleurs, le bailleur ne peut
pas augmenter le loyer unilatéralement ;
La période de la location débute à partir de la date à laquelle l’actif en
question a été livré au locataire peu importe si le locataire ait commencé à
utiliser l’actif ou pas ;
Le contrat Ijara wa Iqtina est une forme particulière du contrat Ijara prévoyant une
option d’achat (Iqtina).
Ce contrat est similaire à l’ijara mais inclut une promesse d’achat du bien de la part
du client à la fin du contrat.
Si l’option d’achat est exercée par le locataire, le prix ne doit pas être déterminé à
l’avance. Il doit y avoir un contrat de vente séparé tenant compte de l’état du bien
et sa valeur sur le marché à ce moment.
Le contrat salam est une vente dans laquelle le vendeur s’engage à fournir des biens
spécifiques à l’acheteur à une date future à un prix de vente payé au comptant.
Le contrat Bai’salam ;
Le contrat Istisna ;
Le contrat salam a été permis par le Saint Prophète (PBSSL) dans le but de répondre
aux besoins des petits agriculteurs qui avaient besoin d’argent pour faire pousser
leurs cultures et de subvenir aux besoins de leurs familles jusqu’à la saison de la
récolte.
Le contrat salam est bénéfique pour le vendeur puisqu’il a reçu le prix de vente à
l’avance et il l’est aussi pour l’acheteur puisque le prix de vente en salam est
d’habitude inférieur au prix de vente au comptant.
Puisque la vente salam constitue une exception à la règle qui interdit les ventes à
terme, elle est par conséquent soumise à des conditions de validité strictes :
Le contrat istisna est la deuxième forme de vente où le bien est vendu à terme. Cela
se traduit par la situation suivante : un fabriquant fabrique un produit spécifique à
l’attention d’un acheteur.
Il est nécessaire pour la validité de l’istisna que le prix de vente soit convenu entre
les parties et que les spécificités du produit soient entièrement et exactement
définies entre eux.
Le contrat istisna crée une obligation morale pour le fabricant pour la fabrication
des produits. Mais il est à noter qu’avant le commencement du cycle de fabrication,
l’une des parties peut résilier le contrat après l’avoir notifié à l’autre partie
contractante.
Cependant, une fois le cycle de fabrication entamé, le contrat ne peut être résilié
unilatéralement.
L’objet du contrat istisna est toujours un produit qui doit être fabriqué tandis
que le contrat salam peut être adossé à un produit fini ou à un produit devant
être fabriqué ;
Le paiement intégral du prix à l’avance n’est pas nécessaire dans le cadre d’un
contrat istisna ;
Le contrat istisna peut être résilié unilatéralement avant que le cycle de
fabrication ne soit entamé alors que le contrat salam ne peut être résilié une
fois affecté ;
Alors que dans le contrat salam, le délai de livraison dûment fixé est une
condition indispensable pour la validité du contrat, il ne l’est pas dans le
contrat istisna.
Ce contrat correspond à la vente d’un bien avec un paiement qui sera effectué à
une date future fixe ou dans un délai déterminé. En bref, il s’agit d’une « vente à
crédit ».
La banque doit être en possession du bien objet de la vente. A cet effet, il est
suffisant que le fournisseur du bien l’ait acheté, qu’il soit réservé au nom de
la banque et qu’il soit remis à toute personne habilitée par la banque ;
La banque doit livrer les biens objet du bai’muajjal à la date et au lieu de
livraison convenus dans le contrat ;
La banque peut convenir avec l’acheteur d’un prix de vente. Ce prix de vente
peut être supérieur au prix d’achat du bien et ainsi inclure une marge
bénéficiaire. Cependant, une fois le prix convenu il ne peut être augmenté.
Tant que la banque n’a pas encore livré les biens, les risques inhérents à la
propriété des biens sont supportés par la banque.
Le qard hassan (ou prêt gracieux) est un prêt sans intérêt accordé comme un acte
de charité ou pour satisfaire des besoins de financements à court terme.
L’emprunteur est tenu de rembourser le montant principal du prêt seulement.
La plupart des banques islamiques offrent des prêts sans intérêts à leurs clients qui
sont dans le besoin.
Les sukuks sont des produits financiers ayant une échéance fixée d’avance et
adossés à un actif sous-jacent permettant de rémunérer le placement.
Les sukuks constituent une alternative à l’obligation classique qui est illicite en Islam.
Mais à la différence des obligations conventionnelles, le rendement n’est pas un taux
d’intérêt fixe et l’actif sous-jacent doit être obligatoirement licite du point de vue
Charia.
Le détenteur des sukuks reçoit une part du profit attaché au rendement de l’actif
sous-jacent.
Les porteurs des sukuks ne prêtent pas d’argent mais financent plutôt une
entreprise ;
Les porteurs de sukuks ont un droit de jouissance sur les actifs de référence
et reçoivent une rémunération sous forme de flux de bénéfices qui seront
générés par les actifs ;
On ne peut pas réellement parler de prêt et de remboursement du principal
en matière de sukuks mais plutôt :
De la cession d’actifs aux porteurs de sukuks à l’émission ;
Du rachat de l’actif par l’émetteur aux porteurs des sukuks à l’échéance
en effectuant un versement à leur profit.
Les dépôts dans les banques islamiques peuvent être de deux natures :
Les comptes de dépôt non participatifs qui correspondent aux dépôts à vue
et aux comptes d’épargne ;
Les comptes de dépôt participatifs qui sont régis par le principe de partage
des profits et des pertes ;
Cette catégorie de compte regroupe les dépôts à vue et les comptes d’épargne.
Les dépôts à vue sont des dépôts qui opèrent sous le principe de Wadi’a à la
demande. Ces déposants ne désirent pas investir leurs fonds et la banque
s’engage à restituer le montant intégral du dépôt à la demande du déposant.
Ils sont même assimilés à des « prêts » à la banque.
Les comptes d’épargne peuvent être de deux natures :
Les comptes d’épargne sans autorisation d’investissement qui suivent
les mêmes règles de fonctionnement que les dépôts à vue ;
Les comptes d’épargne avec autorisation d’investissement qui suivent
les mêmes règles de fonctionnement que les comptes d’investissement
participatifs.
Ces comptes sont spécifiques aux banques islamiques et sont régis par le principe
des 3P (partage des profits et des pertes). Ces comptes fonctionnent sous le
mécanisme de la moudharaba.
La Charia interdit aux banques islamiques de percevoir des intérêts au titre des fonds
qu’elles mettent à la disposition de leurs clientèles.
Dans cette même logique, elles ne peuvent rémunérer les dépôts clients sur la base
d’un taux de rémunération fixe.
2. LE PARTAGE DU RISQUE :
Seuls les comptes d’investissement sont régis par le principe des 3P. La banque et le
déposant sont dans une logique participative : ces deux contractants se partagent
les profits selon un ratio préétabli. En cas de pertes, Celles-ci sont supportées par les
déposants chacun à concurrence du capital investi.
La répartition des profits et des pertes varie selon le résultat généré contrairement à
la finance conventionnelle où l’entrepreneur supporte à lui seul les pertes générées
par le projet.
La finance islamique est en premier lieu une finance éthique puisant ses fondements
dans les préceptes coraniques et la jurisprudence islamique qu’est la Charia.
La finance islamique vise tout d’abord à promouvoir le bien être de l’espèce humaine
qui doit être forte matériellement et moralement.
Elle veille également à établir une équité sociale et à contrecarrer l’injustice dans les
échanges commerciaux.
Désormais, l’entrepreneur n’est plus guidé par le seul objectif de maximisation des
profits mais il adopte et s’identifie à un comportement social et moral vis-à-vis des
consommateurs, employés et société civile d’une manière générale.
4. LE RISQUE MORAL :
Les dépôts bancaires islamiques ne peuvent être utilisés ou investis dans des projets
dont l’objet est illicite du point de vue de la Charia. Par exemple : l’alcool, la viande
de porc…
Par conséquent, l’investissement des dépôts dans les banques islamiques est soumis
à des restrictions contrairement aux dépôts dans les banques conventionnelles qui
peuvent être librement investis.
Les réserves spécifiques aux dépôts bancaires islamiques qui sont la réserve de
péréquation des profits et la réserve pour risque d’investissement résultent de
l’exposition des banques islamiques à un risque qui leur est spécifique : le risque
commercial déplacé.
Les déposants peuvent donc transiter d’une banque à une autre en cas
d’insatisfaction quelconque. Par conséquent, ils peuvent retirer leurs dépôts et aller
vers des banques concurrentes (islamiques ou conventionnelles) pour un motif
principal qui est la recherche d’une rémunération plus élevée des fonds déposés.
Les banques islamiques font face à une pression commerciale qui peut se traduire
par le retrait des fonds par les déposants.
Les déposants dans les banques islamiques peuvent avoir deux principales
motivations :
Se conformer à la religion ;
Fructifier l’argent déposé.
Lorsque le rendement des projets financés par les comptes d’investissement est bas
et qu’il n’est donc pas compétitif, la banque va essayer de l’augmenter. Alors que
lorsqu’il est élevé, elle va essayer de le diminuer par le prélèvement d’une partie pour
la constitution d’une réserve.
Cette pratique constitue un biais au principe de partage des profits et des pertes qui
gouverne la finance islamique.
Le risque commercial déplacé a été défini comme suit par l’IFSB : « Displaced
Commercial Risk refers to the risk arising from assets managed on behalf of
Investment Account Holders which is effectively transferred to the Islamic Financial
Institutions (IFI) own capital because the IFI for goes part or all of its Mudarib’s share
(profit) of on such fund, when it considers this necessary as a result of commercial
pressure in order to increase the return that would otherwise be payable to
Investment Account Holder’s” (IFSB 2005; Norme 76)
L’exposition à ce risque est d’autant plus élevé que la proportion des comptes
d’investissement par rapport au total dépôts de la banque est importante.
En pratique, les banques islamiques sont amenées à lisser les taux de rendement des
comptes d’investissement pour éviter la fuite des fonds vers d’autres banques
concurrentes en recourant à deux types de réserves : la réserve de péréquation des
profits et la réserve pour risque d’investissement.
2. MECANISMES DE COUVERTURE :
La réserve de péréquation des profits est une affectation d’une partie du résultat
brut de la banque avant l’allocation des profits entre les actionnaires de la banque
et les titulaires des comptes d’investissement.
Cette réserve constitue une technique de lissage du taux de rendement des comptes
d’investissement dans les banques islamiques. Elle permet de maintenir un taux de
rendement comparable et compétitif par rapport à celui affiché par d’autres
banques islamiques ou conventionnelles sur le marché.
La réserve pour risque d’investissement est une affectation d’une partie du revenu
des contrats de moudharaba.
Cette réserve est prélevée sur les profits revenant aux titulaires des comptes
d’investissement.
Bien qu’il s’agisse également d’une technique de lissage des taux de rendement des
comptes d’investissement, cette réserve présente certaines différences par rapport à
la réserve de péréquation des profits.
Tout d’abord, le montant de cette réserve appartient aux titulaires des comptes
d’investissement et a pour vocation la résorption des pertes sur le capital investi par
les déposants.
Comptes
Sources des fonds Capital des actionnaires d'investissement
participatifs
Actif
Allocation des fonds
Répartition au prorata de la contribution au capital
PER
Revenu de la Moudharaba
Profit des actionnaires
Le tableau suivant met en exergue les principales différences entre les deux types de
réserves PER et IRR :
Le dépôt à vue est un dépôt de fonds par un agent économique sur un compte
bancaire. Ce dépôt est restituable à vue à la demande du déposant.
Le dépôt à vue peut être rémunéré par la banque selon un taux convenu avec le
déposant.
Les comptes d’épargne sont rémunérés à un taux d’intérêt annuel le TRE (Taux de
Rémunération de l’Epargne) qui est fixé par la Banque centrale de Tunisie à 3,5%
l’an.
Un dépôt à terme est un dépôt de fonds par un agent économique sur un compte
bancaire bloqué pour une durée déterminée et sans possibilité de rachat anticipé.
Selon l’article 14 de la circulaire 91-22 : « Les banques sont habilitées à ouvrir des
comptes à terme, à émettre des bons de caisse nominatifs ainsi que tout autre
produit financier. Il est interdit aux banques de procéder au remboursement anticipé
Les dépôts à terme peuvent être de deux natures : les comptes à terme et les bons
de caisse. Ils présentent les caractéristiques suivantes :
Les banques conventionnelles assurent une rémunération fixe sous la forme d’un
taux d’intérêt pour les déposants des différentes natures de dépôts.
S’il s’agit d’un dépôt à vue ou de tout placement en dinars d’une durée
inférieure à 3 mois, la rémunération ne doit pas excéder 2% ;
S’il s’agit d’un compte d’épargne, il doit être rémunéré au TRE ;
S’il s’agit d’un dépôt à terme, le taux de rendement est librement fixé et résulte
d’un commun accord entre la banque et le déposant.
Le moudharib ne garantit
pas la restitution du
capital investi en cas de
perte sauf s’il est
démontré que cette perte
résulte de sa négligence
et/ou de sa mauvaise
gestion.
La circulaire 86-42 du
1/12/1986 pour les
comptes spéciaux
d’épargne ;
L’article 31 de la loi 82-
Contrat de dépôt
91 du 13/12/1982 et
l’arrêté du Ministre des
Finances du
2/04/1984 pour les
comptes d’épargne
pour la promotion des
projets ;
La circulaire 92-07 du
21/04/1992 pour les
comptes d’épargne
emprunts obligataires.
Les banques islamiques sont exposées aux mêmes risques encourus par les banques
conventionnelles à savoir le risque de crédit, le risque de marché, le risque
opérationnel, le risque de liquidité, …
Nous allons essayer dans cette section de présenter les risques spécifiques auxquels
les banques islamiques sont exposées.
1. RISQUE DE CREDIT :
Le risque de crédit est défini par la circulaire aux établissements de crédit n° 2006-19
relative au contrôle interne comme suit : « Le risque de crédit s’entend du risque
encouru en cas de défaillance d’une contrepartie ou de contreparties considérées
comme un même bénéficiaire au sens de la réglementation en vigueur. »
Ce risque est d’autant plus amplifié par l’asymétrie d’information qui frappe la
banque qui ignore les profits et la performance réellement réalisés par le projet
financé. D’autant plus que la banque en sa qualité de Rabb ul mal n’est pas en
position de s’assurer que le moudharib gère convenablement le projet financé.
2. LE RISQUE DE MARCHE :
Le risque de marché est défini par la circulaire 2006-19 comme suit : « On entend
par risque de marché, les risques de pertes qui peuvent résulter :
Des fluctuations des prix sur les titres de transaction et de placements tels que
définis par les normes comptables et sur tout autre instrument financier prévu
par la réglementation en vigueur ;
A priori, il peut nous sembler que les banques islamiques ne sont pas exposées à ce
risque du fait qu’elles n’utilisent pas les taux d’intérêt et ne traitent pas avec l’intérêt.
Cela peut nous amener à s’interroger si les fluctuations des taux d’intérêt ont
réellement un impact sur les banques islamiques ?
Donc, toute évolution à la hausse du taux du marché monétaire (TMM) et des taux
de rendements conventionnels qui constituent des taux de référence a des
conséquences pour les banques islamiques.
3. LE RISQUE DE LIQUIDITE :
Le risque de liquidité est défini par la circulaire 2006-19 comme suit : « Le risque de
liquidité s’entend comme le risque pour l’établissement de crédit et la banque non
résidente de ne pas pouvoir s’acquitter, dans des conditions normales, de leurs
engagements à leur échéance. »
Alors que les banques conventionnelles trouvent plus d’aisance à gérer ce risque,
les banques islamiques sont plus exposées à ce risque pour les raisons suivantes :
La prise en compte de tous ses facteurs amplifie l’exposition des banques islamiques
au risque d’illiquidité.
4. LE RISQUE OPERATIONNEL :
Le risque opérationnel est défini par la circulaire 2006-19 comme suit : « Le risque
opérationnel se définit comme étant le risque de pertes résultant de créances ou de
défaillance attribuables à la conception de l’organisation et à la mise en œuvre des
procédures, aux erreurs humaines ou techniques ainsi qu’aux événements
extérieurs. La définition inclut entre autres le risque juridique mais exclut les risques
stratégiques et de réputation. »
L’exposition à ce risque est d’autant plus forte et importante en raison de ce qui suit :
Ce risque peut être défini comme le risque que les opérations de la banque islamique
transgressent les préceptes de la Charia (par exemple : investissement dans des
activités illicites, gharar, perception d’intérêts…).
Par ailleurs, les contrats des différents produits islamiques ne sont pas standardisés
et sont conçus dans chaque pays selon son appréhension de la Charia.
Pour éviter un mouvement de retrait des fonds par les déposants en tant que
réaction à l’insuffisance de rendement, les banques se trouvent obligées de
constituer la réserve PER pour pouvoir ajuster les taux de rendements réels. Cette
réserve est en réalité un mécanisme de lissage des rendements.
7. LE RISQUE FIDUCIAIRE :
Le risque fiduciaire est le risque que les déposants tiennent la banque pour
responsable du faible taux de rémunération des dépôts.
Ce risque peut être également causé par une violation de la banque des préceptes
de la Charia lors de l’exécution du contrat.
Ce cadre juridique réserve une place étroite à l’activité des banques islamiques et ne
tient pas compte de leurs spécificités et de l’exigence de la conformité à la Charia.
Il s’agit de la première entorse faite par la loi relative aux établissements de crédit
aux banques islamiques. En effet, l’article 3 de la loi 2001-65 ne prend pas en compte
la particularité des comptes d’investissement qui sont gouvernés par le mécanisme
de la moudharaba qui se base sur le principe du partage des profits et des pertes.
Par conséquent, la banque n’a pas l’obligation de restituer les dépôts qu’elle reçoit
au titre des comptes d’investissement.
D’autre part, le même article de la loi 2001-65 stipule que : « … les fonds que toute
personne recueille d’un tiers à titre de dépôt ou autrement avec le droit d’en
disposer pour les besoins de l’exercice de son activité professionnelle… »
Or, il existe un type de compte d’investissement dans les banques islamiques dont
celles-ci ne peuvent pas en disposer librement pour leur propre compte : il s’agit des
comptes d’investissement restreints où les titulaires des comptes imposent des
restrictions concernant la nature et le domaine de l’investissement de ses fonds.
Cette situation constitue une exception à la « règle » énoncée par cet article qui
donne le droit à la banque de disposer des fonds pour son propre compte.
Dans le même contexte, les infractions à la Charia ne constituent pas des motifs de
sanctions prévus par la loi 2001-65.
Par ailleurs, une autre problématique peut être évoquée comme suit : La banque
islamique gère les dépôts participatifs régis par le principe des 3P et les autres dépôts
à savoir les comptes courants et les comptes d’épargne qui ne sont pas rémunérés.
Celle-ci peut être tentée d’investir les dépôts non participatifs au titre desquels
l’intégralité des profits revient à la banque dans les projets les plus rentables et
d’investir les dépôts participatifs dans des projets moins rentables sachant que la
perte du capital investi est totalement supportée par les titulaires des comptes
d’investissement.
L’aléa moral qui se manifeste fortement dans les banques islamiques ne trouve pas
dans les textes de la loi 2001-65 des mécanismes de supervision et de contrôle
permettant son atténuation et par conséquent contribuant à la protection et à la
sauvegarde des intérêts des déposants.
Le contrat de moudharaba est donc un contrat bâti sur une relation de proximité et
de confiance entre la banque et le déposant.
Les articles du code des sociétés commerciales prévoient deux catégories d’associés
dans une société en commandite :
Les associés commanditaires qui sont des bailleurs de fonds qui ne sont tenus
qu’à concurrence de leurs apports ;
Or, dans une opération de moudharaba le déposant ou le Rabb ul mal n’a pas la
qualité d’actionnaire du fait qu’il ne jouit pas des droits des actionnaires
essentiellement le droit de vote.
Société en commandite
Elément de comparaison Moudharaba
simple
Société en commandite
Elément de comparaison Moudharaba
simple
L’article 1205 du COC stipule que : « Le gérant peut se charger des affaires d’autres
personnes pourvu qu’il les tienne distinctes les unes des autres et s’il n’y a pas
préjudice pour les intérêts du premier bailleur. Il doit en tout cas donner avis à ce
dernier. »
Dans ce cas, cet article constitue une limite aux opportunités d’investissement de la
banque.
Cet article renvoie principalement aux dispositions de l’article 1136 du COC qui
stipule ce qui suit : « Tout mandataire doit rendre compte au mandant de sa gestion,
lui présenter le compte détaillé de ses dépenses et de ses recouvrements, avec toutes
les justifications que comporte l’usage ou la nature de l’affaire et lui faire raison de
tout ce qu’il a reçu par suite ou à l’occasion du mandat. »
Il faut tout d’abord rappeler que ces dispositions ne peuvent pas s’appliquer dans le
cadre du contrat de moudharaba puisque le titulaire du compte d’investissement a
la qualité d’un bailleur de fonds et n’a pas la qualité d’actionnaire et n’a en aucun
D’autre part, cette situation est à l’origine d’une asymétrie d’information dans le
contrat de moudharaba du fait que les titulaires de comptes d’investissement ne
prennent pas part à la gestion des fonds qui sont exposés à des risques élevés
comme le risque de marché, le risque de non-conformité à la Charia…
Les banques évoluent en Tunisie, état de droit positif, dans un cadre juridique
constitué essentiellement par la loi 2001-65 du 10/07/2001 relative aux
établissements de crédits, le code des obligations et des contrats et les circulaires de
la Banque Centrale de Tunisie.
Les concepts reconnus en droit tunisien et plus particulièrement par la loi 2001-65
sont ceux « d’établissement de crédit », « établissement financier » et « banque ».
L’article 2 de la loi 2001-65 relative aux établissements de crédit stipule que « Sont
considérés comme dépôts reçus du public au sens de la loi, les fonds que toute
personne recueille d’un tiers à titre de dépôt ou autrement avec le droit d’en
disposer pour les besoins de l’exercice de son activité professionnelle mais à charge
pour elle de les restituer à leurs titulaires. »
Par conséquent, les acteurs économiques peuvent contracter tout contrat tant que
celui-ci n’est pas expressément interdit par une loi spécifique.
La difficulté qui se pose pour le contrat de dépôt dans les banques islamiques est
que ce contrat doit non seulement obéir au référentiel du droit positif tunisien mais
aussi au « droit musulman » qui lui impose des contraintes et des exigences qui lui
sont propres et qui peuvent constituer des limites à la liberté contractuelle.
Donc, la difficulté qui se présente pour un contrat de dépôt islamique est la pluralité
des référentiels normatifs auxquels il doit se conformer.
En effet, le droit musulman n’est pas un droit positif. Il ne constitue pas également
une source du droit positif.
Une norme de droit positif qui est en contradiction ou incompatible avec une
norme de droit musulman ;
Absence d’une norme de droit positif traitant d’un aspect particulier du
contrat et donc comment combler cette lacune alors que l’article 243 du code
des obligations et des contrats renvoie à la loi, l’usage et la nature des choses
pour combler ses lacunes ;
Le contrat de dépôt dans une banque islamique rejoint le contrat de dépôt usité
dans les banques conventionnelles dans l’obligation de restitution des fonds
déposés. En d’autres termes, le déposant ne court pas de risque de perte résultant
d’un quelconque aléa.
Le dépôt ne peut être rémunéré par des intérêts dans une banque islamique
en vertu du principe de l’interdiction du Riba ;
Le compte de dépôt ne jouit pas de la faculté de découvert. Il ne peut être
débité qu’à concurrence de la provision existante.
Les contrats de dépôts participatifs font face à d’autres problématiques qui vont être
exposées dans les sections suivantes.
Le contrat de dépôt participatif est un contrat propre aux banques islamiques qui
est plus attractif pour les déposants qui ont droit à une partie des profits réalisés par
la banque au titre des projets financés par ses fonds.
Les dépôts participatifs non restreints sont des fonds déposés par leurs titulaires dans
des comptes spécifiques afin qu’ils soient investis dans des projets financés par la
banque pour une période déterminée.
Le contrat de dépôt participatif non restreint peut être logé en droit tunisien dans la
catégorie des contrats de commande qui sont régis par les articles 1195 à 1225 du
code des obligations et des contrats.
Les articles 1195 à 1225 du code des obligations et des contrats déterminent les
conditions de formation, les effets et l’extinction du contrat de commande.
« Il n’est pas défendu au gérant de trafiquer pour son compte personnel avec
ses capitaux, mais il doit tenir distincte sa caisse particulière de celle de la
commande, s’il n’y a usage ou convention contraire. » (article 1204 du code
des obligations et des contrats).
L’article précité traite des rapports du gérant avec plusieurs bailleurs de fonds et
stipule que la banque peut gérer plusieurs affaires à condition de les tenir distinctes
les unes des autres.
Cet article pose des contraintes aux banques islamiques qui collectent des fonds
auprès d’une multitude de bailleurs pour ensuite les investir dans des projets.
De plus, les fonds remis par un déposant ne sont pas le plus souvent suffisants pour
financer un projet.
Par conséquent, les articles 1204 et 1205 du code des obligations et des contrats
« handicapent » le mélange des fonds déposés par plusieurs bailleurs de fonds.
Ce sont des fonds déposés par leurs titulaires afin qu’ils soient investis dans des
projets financés par la banque pour une période déterminée.
Ces dépôts se distinguent par le fait que le titulaire des fonds impose des restrictions
concernant la nature, le type de l’investissement et sa durée.
En effet, l’article 1218 du code des obligations et des contrats qui énonce les motifs
de nullité du contrat de commande évoque dans son alinéa 6 ce qui suit : « Le
contrat de commande est nul comme tel :… 6) Lorsque la faculté d’action du gérant
est restreinte à certains cas déterminés : par exemple s’il n’est autorisé à traiter
qu’avec certaines personnes ou dans un certain lieu ou pendant un certain temps
de l’année ».
Les articles 601 à 608 du Code de commerce déterminent les droits et les obligations
du commissionnaire.
La protection des déposants n’est pas assurée dans les banques islamiques pour les
titulaires des comptes d’investissement.
Pour essayer de trouver une solution pour « garantir » la restitution des fonds des
comptes d’investissements, l’on peut penser en premier lieu à la souscription d’une
police d’assurance auprès d’une société de Takaful.
La banque islamique y aura recours en cas de perte partielle ou totale des fonds
investis revenant aux titulaires de comptes d’investissement.
Mais n’est-ce pas là une remise en cause totale et une entorse au principe de partage
des profits et des pertes qui régit le fonctionnement des comptes d’investissement ?
Cette position est d’autant plus confortée par la norme charaique n°13 qui stipule
ce qui suit concernant les garanties en matière de contrat de moudharaba : « The
capital provider is permitted to obtain guarantees from the Mudarib that are
adequate and forceable. This is circumscribed with a condition that the capital
provider will not enforce these guarantees except in case of misconduct, neglience
or breach of contract on the part of Mudarib. »
Il faut donc penser à renforcer la protection des déposants plutôt que de chercher
à garantir les fonds.
Par conséquent, il est primordial de veiller à instaurer des mécanismes qui réduisent
l’asymétrie d’information qui les affectent.
Donc au lieu de chercher à garantir les fonds investis peut-être faut-il chercher une
solution qui puisse ramener les actionnaires de la banque et les titulaires de comptes
d’investissement sur un même pied d’égalité en termes de droit d’information et
d’investigation concernant l’utilisation des fonds et par conséquent en termes
d’exposition aux risques.
Il faudra tout de même s’inspirer des textes actuels du code des OPCVM traitant des
fonds communs de placement en valeurs mobilières pour les rendre conformes aux
exigences de la Charia et aux principes sous-tendant la finance islamique.
Néanmoins, les crises financières connues par l’économie mondiale ont démontré
la nécessité de préserver la stabilité financière des banques islamiques et d’assurer
la protection de leurs déposants au même titre que les banques conventionnelles.
Au même titre que les banques conventionnelles, les banques islamiques sont
exposées au risque de liquidité et peuvent se trouver en situation d’illiquidité bien
qu’elles soient encore solvables.
Dans cette situation, la Banque Centrale doit intervenir pour jouer son rôle de
prêteur en dernier ressort en fournissant une liquidité temporaire afin de renforcer
la confiance du marché et prévenir toute défaillance du système bancaire.
confiance au grand public et évite une panique en cas de rumeur ou de faillite réelle
de la banque.
Pour ce faire, il faudra instaurer des règles claires et bien définies pour le
fonctionnement du mécanisme du prêteur en dernier ressort tout en veillant au
respect de l’exigence de la conformité à la Charia.
La Tunisie est un pays ayant un système bancaire mixte où cohabitent des banques
conventionnelles et des banques islamiques, donc il faudrait instaurer un système
qui puisse fournir la protection séparée pour les dépôts islamiques tout en étant
conforme à la Charia.
Dans une banque conventionnelle, les comptes de dépôts sont rémunérés par des
intérêts.
Aux termes de l’article 34 du code de l’IRPP et de l’IS, les intérêts des dépôts des
sommes d’argent appartiennent à la catégorie des revenus des capitaux mobiliers
et sont soumis à une retenue à la source au taux de 20%.
Alors que dans une banque islamique, les titulaires de comptes d’investissement ne
perçoivent pas des intérêts mais plutôt une partie des profits générés par les projets
financés.
La qualification fiscale de ses revenus pose problème : ces revenus peuvent-ils être
considérés comme des revenus de capitaux mobiliers ou des revenus de valeurs
mobilières ou appartiennent-ils à une autre catégorie de revenus prévue par le cadre
fiscal en vigueur ?
On entend par capitaux mobiliers les placements à intérêt. Or, les profits de
moudharaba ne peuvent être qualifiés d’intérêt, l’interdiction de l’intérêt étant l’un
des principes qui sous-tendent la finance islamique.
Par conséquent, les profits distribués aux titulaires des comptes d’investissement ne
peuvent être considérés comme des revenus de capitaux mobiliers.
En ce qui concerne la catégorie des revenus des valeurs mobilières, il faut tout
d’abord rappeler ce qu’on entend par valeurs mobilières.
Les valeurs mobilières sont les titres de propriété du capital qui peuvent être des
actions de sociétés anonymes ou des parts de sociétés à responsabilité limitée.
De ce fait, les banques sont soumises d’une manière systématique à l’impôt sur les
sociétés.
La question qui se pose concerne le régime fiscal des profits découlant des
opérations de moudharaba revenant à la banque en tant que moudharib : est-ce
que ces profits sont imposables et doivent par conséquent être inclus dans la
détermination du résultat fiscal ou sont-ils exonérés de l’impôt sur les sociétés ?
Certes, le premier constat à relever est que le législateur tunisien est demeuré muet
en ce qui concerne le régime fiscal des opérations de moudharaba que ce soit pour
la détermination du profit que pour le caractère imposable de ces profits chez le
moudharib en dépit de sa volonté d’instaurer un régime fiscal spécifique à la finance
islamique qui s’est manifesté à travers la loi de finance pour la gestion 2012 et la loi
de finance pour la gestion 2014.
يبقى البنك مطالبا بتسجيل محاصيل، يشرفني إعالمكم أنه في غياب تشريع جبائي خاص بعملية المضاربة،” جوابا
بعنوان العملية المذكورة ضمن قاعدة الضريبة على الشركات تحتسب على أساس هامش الربح المعمول به في إطار
.“ عمليات التمويل التي يقوم بها
Cette prise de position ayant pour objectif de combler une lacune est l’une des
formes variables que peut prendre la doctrine administrative.
En effet, la doctrine administrative d’une manière générale n’a pas de force juridique
contraignante comparable à celle conférée aux sources formelles de légalité.
administrative n’a pas de force juridique sans pour autant nier ou perdre son intérêt
pratique.
On peut ainsi admettre à priori que le régime d’imposition des intérêts des crédits
bancaires est applicable aux profits dégagés par l’opération de la moudharaba. Mais
à la seule différence que seule la partie des profits revenant à la banque islamique
en tant que moudharib doit être intégré au niveau du résultat imposable.
Alors que les profits distribués aux déposants titulaires des comptes d’investissement
constituent des charges pour la banque islamique.
La réserve PER est une réserve spécifique et typique des banques islamiques par
rapport aux banques conventionnelles. Cette réserve et prélevée du résultat brut de
la banque avant l’allocation des profits entre les actionnaires de la banque et les
titulaires des comptes d’investissement.
Elle est retenue durant les exercices qui atteignent un taux de rendement supérieur
à celui des investissements comparables sur le marché. Cette réserve n’est autre
qu’une technique de lissage du résultat des banques islamiques qui permet de lisser
un taux de rendement positif mais faible.
Le premier constat à dresser est que le législateur tunisien est resté muet concernant
le régime fiscal de cette réserve.
La réserve PER n’est pas prévue dans la liste des déductions admises. Donc, à priori
elle ne peut être déduite du résultat imposable et doit faire l’objet d’une
réintégration.
Le droit fiscal tunisien a traité des régimes fiscaux de deux natures de réserves :
D’un point de vue fiscal, « les bénéfices » de réévaluation ne sont pas des profits
imposables parce qu’ils ne correspondent pas à un enrichissement certain de
l’entreprise.
Réserve de réévaluation
Elément de comparaison Réserve PER
libre
La constatation de la La constatation de la
réserve PER ne donne lieu réserve de réévaluation
Aspect n°2 à aucun changement au donne lieu à la
niveau de la valeur des revalorisation des
immobilisations. immobilisations.
Donc, la réserve PER ne peut être assimilée à une réserve de réévaluation libre. Par
conséquent, on ne peut lui réserver le même régime fiscal de la réserve de
réévaluation qui prévoit son exonération de l’impôt.
Par conséquent, nous concluons qu’aucun des régimes fiscaux prévus pour les
réserves admises fiscalement n’est adapté à la réserve PER.
Elle doit donc être réintégrée pour la détermination du résultat fiscal parce qu’il
s’agit d’une réserve ayant le caractère imposable.
La réserve IRR (Investment Risk Reserve) est également une réserve spécifique et
typique des banques islamiques.
Cette réserve est prélevée du revenu de la moudharaba revenant aux titulaires des
comptes d’investissement. Elle est donc retenue sur le revenu de la moudharaba
après calcul de la rémunération de la banque en tant que moudharib.
Cette réserve permet de résorber les pertes du capital investi alors que la réserve PER
permettra de ramener le taux de rendement effectif réalisé au taux de rendement
d’investissements comparables sur le marché en d’autres termes le taux benchmark.
De même que pour la réserve PER, le législateur tunisien est resté muet concernant
le régime fiscal de la réserve IRR.
Par ailleurs, la réserve IRR ne répond pas à la définition d’une provision. En effet, la
banque islamique n’a aucune obligation juridique de restituer le capital investi aux
titulaires de comptes d’investissement.
D’autant plus que la réserve IRR constituée peut couvrir partiellement ou totalement
les pertes éventuelles.
Par conséquent, nous concluons que la réserve IRR n’est pas admise en déduction
pour la détermination du résultat fiscal. Elle doit être réintégrée dans le résultat fiscal
parce qu’elle est imposable.
Il faut tout d’abord préciser que le régime fiscal des revenus des opérations de
moudharaba n’a pas été prévu par le législateur tunisien dans les lois de finance
pour la gestion 2012 et 2014.
Cet article précise que les opérations soumises à la TVA sont celles « revêtant le
caractère industriel, artisanal ou relevant d’une profession libérale ainsi que les
opérations commerciales autres que les ventes ».
Les opérations commerciales autres que les ventes regroupent essentiellement les
prestations de service et toute opération commerciale par nature à l’exception des
activités de vente en l’état.
Parmi les opérations commerciales autres que les ventes figurent les services et
prestations de banque, les opérations de leasing, les prestations de services….
Mais le tableau A dans son point 39 liste les intérêts bancaires débiteurs parmi les
opérations exonérées de la TVA.
Cette volonté du législateur tunisien d’exonérer les revenus des divers techniques
de financements islamiques s’est manifestée à travers l’ajout de l’alinéa 39 bis au
Nous sommes donc face à un vide en matière de droit fiscal en ce qui concerne la
moudharaba.
De cette manière, les banques islamiques sont traitées fiscalement sur le même pied
d’égalité que les banques conventionnelles et leur capacité à drainer les fonds du
public ne sera pas altérée.
D’une manière générale, l’ampleur et la difficulté des modifications portant sur les
textes fiscaux dépendent d’un facteur principal qui est le suivant :
Si le droit fiscal du pays est basé sur la taxation d’une transaction en se basant
sur la réalité économique de celle-ci, les modifications ou les adaptations des
textes fiscaux seront simples ;
En effet, il suffit de décomposer une transaction de finance islamique en ses
différents constituants pour identifier le composant qui représente un coût
de financement et adapter l’imposition en conséquence.
Par contre, si le droit fiscal du pays privilégie la taxation sur la base de la forme
juridique d’une transaction plutôt que sa réalité économique, il serait plus
Cette convention énonce ce qui suit : « Les transactions et événements doivent être
enregistrés et présentés en accord avec leur substance économique et non
seulement leur forme juridique. »
Or, le résultat fiscal imposable est une résultante directe du résultat comptable
moyennant des retraitements.
Par conséquent, les transactions comptabilisées suivant leur réalité économique sont
systématiquement imposées sur cette base.
Nous allons tout d’abord exposer brièvement la démarche suivie par certains pays
pour adapter leur législation fiscale aux produits islamiques et les principaux
changements opérés.
Nos critères de sélection des pays dont la législation fiscale au titre des impôts directs
et indirects sera exposée se présentent comme suit :
1. Nous avons choisi les pays n’ayant pas décrété l’islamisation de leur
système bancaire mais plutôt les pays où il y a une cohabitation entre
les banques conventionnelles et les banques islamiques.
2. Ces pays sont soit des pionniers dans la mise en place des produits
bancaires islamiques ou sont déjà à un stade très avancé du processus
d’adaptation de leurs législations fiscales à la finance islamique.
La Grande Bretagne ;
La France ;
La Malaisie ;
Le Maroc.
Le Royaume-Uni a introduit La Malaisie est un pays pionnier La France n’a pas jugé Le Maroc a commencé la
une législation fiscale afin dans la finance islamique. opportun de recourir à des commercialisation des produits
d’assurer que les produits de la modifications de sa législation islamiques qualifiés également
Fort de son expérience d’une
finance islamique soient traités fiscale et a établi des directives de « produits alternatifs » à
quarantaine d’années, la
d’une manière fiscalement qui expliquent le traitement partir de l’année 2007.
Malaisie a instauré un
neutre par rapport aux fiscal des produits de finance
environnement fiscal assurant Mais même après plusieurs
produits conventionnels. islamique.
une attractivité et un années de lancement,
Certaines définitions ont été traitement comparable de la Par exemple, les mêmes règles l’encours des produits
introduites mais aucune finance islamique à la finance fiscales ont été appliquées aux alternatifs reste mineur par
mention à la Charia n’a été conventionnelle. produits de finance islamique rapport à l’encours des
faite. qui s’apparentent à des titres produits conventionnels.
L’approche de la Malaisie
de créance.
D’une manière générale, le traduisait une volonté de Les produits alternatifs et plus
traitement fiscal adopté est bannir toute discrimination En ce qui concerne le contrat particulièrement les contrats
similaire au traitement des fiscale entre les banques de moudharaba, aucune de moudharaba ont rencontré
intérêts. conventionnelles et les directive spécifique des contraintes fiscales qui ont
banques islamiques. déterminant le régime fiscal freiné leur évolution.
En ce qui concerne la TVA, des A partir de 2005, la Malaisie a applicable au contrat de Aucune disposition ou
directives d’interprétation connu une croissance notable moudharaba n’a été établi. incitation fiscale n’est prévue
relatives à plusieurs produits de la finance islamique et le au titre du contrat de
Dans un projet de directive
islamiques ont été publiées. gouvernement malaisien a élaboré en 2010, les autorités moudharaba au niveau du
appuient décidé des exonérations fiscales ont indiqué que le Code Général des Impôts (CGI).
Ces directives
fortement la législation fiscale fiscales en 2007 au profit des traitement fiscal du contrat de Les contraintes fiscales
banques islamiques pour moudharaba était différent peuvent être résumées comme
existante et la jurisprudence.
promouvoir son statut de selon qu’il soit lié à un fonds suit :
Les autorités fiscales de la
leader international en matière
d’investissement ou à un
Grande Bretagne ont La non neutralité de la
de finance islamique. compte d’investissement.
également fourni des règles et TVA dont le taux a été
L’impôt sur les sociétés frappe
des interprétations sur lesquels Bien que cette instruction n’ait abaissé uniquement pour
les revenus perçus ou
les contribuables peuvent jamais été publiée, cette la mourabaha alors que
provenant de la Malaisie aussi
compter pour faciliter l’accès à distinction est restée en tous les autres produits
bien pour les établissements vigueur de telle sorte que le
ses produits. alternatifs demeurent
résidents que pour les revenu de la moudharaba lié à
Pour assurer la neutralité soumis à un taux
établissements non résidents. un compte d’investissement discriminatoire par rapport
fiscale, des changements se
sont imposées pour le droit de Les parts de profits sont traitées devrait suivre le même régime aux produits
comme des intérêts. fiscal que les intérêts. conventionnels ;
timbre et la taxe de propriété.
Les résultats de cette étude comparative sommaire montrent que les pays leaders
en matière de recours et de développement de la législation pour l’expansion des
produits islamiques nous amènent à conclure que pour atteindre une neutralité
fiscale qui élimine les éventuelles discriminations, il faut assimiler le traitement fiscal
des revenus de la moudharaba au traitement fiscal des intérêts bancaires que ce soit
en matière d’impôt direct ou en matière d’impôt indirect.
En d’autres termes, la Tunisie n’a pas besoin d’instaurer une législation fiscale
spécifique à la moudharaba mais plutôt d’introduire ou d’opérer des aménagements
des textes fiscaux déjà existants.
En effet, pour les produits islamiques basés sur le principe de partage des profits et
des pertes, les méthodes de comptabilisation ainsi que la détermination du profit
posent des difficultés qui résultent essentiellement de l’inadaptation de la
normalisation comptable nationale aux spécificités de ses produits.
Des normes comptables spécifiques ont été établies par l’AAOIFI pour les produits
islamiques mais elles n’ont été adoptées que dans quelques pays.
La Tunisie fait partie des pays où l’application de ses normes n’est pas obligatoire et
où les banques islamiques doivent tant bien que mal préparer leurs états financiers
par rapport au cadre conceptuel national et aux normes comptables tunisiennes
NCT 21 à NCT 25.
Pour donner une image fidèle et une lecture meilleure des états financiers d’une
banque islamique, les normes de l’AAOIFI prévoient des états spécifiques.
Les états financiers présentés par une banque islamique comporte des états
spécifiques à l’activité de celle-ci qui se détaillent comme suit :
Nous allons exposer les principales spécificités des états financiers des banques
islamiques par rapport à ceux des banques conventionnelles en mettant l’accent sur
les différences relatives aux comptes d’investissement et les fonds de réserves y
relatifs.
A. BILAN :
Le tableau ci-dessous illustre les principales différences entre le bilan d’une banque
islamique et le bilan d’une banque conventionnelle :
Bilan-Banque islamique
Bilan-Banque
(Modèle proposé par Remarques pertinentes
conventionnelle
l’AAOIFI)
Mourabaha
Moudharaba
Crédits à la clientèle :
Moucharaka
- Crédits moyen et Le financement moudharaba qui
est un mode de financement
Istisna’a long terme
participatif régi par le principe de
- Crédits de
partage des profits et des pertes
Salam
gestion ne trouve pas d’équivalent dans
- Crédits leasing le portefeuille des crédits dans
Ijara muntahia Bittamlik
- Crédits aux une banque conventionnelle.
Stocks
Bilan-Banque islamique
Bilan-Banque
(Modèle proposé par Remarques pertinentes
conventionnelle
l’AAOIFI)
Capital Capital
Réserves Réserves
Les comptes d’investissement n’ont pas d’équivalent dans les bilans des
banques conventionnelles ;
Les comptes d’investissement restreints sont présentés dans un état
spécifique aux banques islamiques « le tableau de variation dans les
investissements restreints » qui peut être assimilé à un état hors bilan vu que
cette nature de comptes d’investissement ne constituent pas un passif pour
la banque islamique et que leurs investissements ne constituent pas des actifs.
B. ETAT DE RESULTAT :
La particularité des produits dans les banques islamiques c’est qu’ils doivent être des
revenus conformes à la Charia et par conséquent provenant d’activités licites.
Le tableau suivant illustre les principales différences entre l’état de résultat d’une
banque islamique et celui d’une banque conventionnelle par rubrique.
PR2-Commissions
Revenus sur les autres
financements et PR3-Gains sur portefeuille
investissements titres commercial et
opérations financières
PR4-Revenus du portefeuille
d’investissement
Total Total
Total Total
propres de la banque
Quote-part de la banque en
tant que moudharib sur les
CIPR
Zakat Néant
Les banques islamiques en Tunisie sont soumises aux mêmes normes comptables
que les banques conventionnelles.
Les normes comptables tunisiennes NCT 21 à NCT 25 ne tiennent pas compte des
particularités de la finance islamique et ne prévoient pas de notes spécifiques pour
les banques islamiques particulièrement en ce qui concerne les comptes
d’investissement.
De plus, les normes comptables de l’AAOIFI n’ont pas été adoptées par la Tunisie et
par conséquent leur application n’est pas obligatoire.
Cette norme détaille les notes aux états financiers nécessaires en distinguant entre
celles relatives aux comptes d’investissement restreints et ceux non restreints.
Le rôle des banques islamiques dans l’économie est différent du rôle des
banques conventionnelles. En effet, parmi les grands objectifs de l’activité
économique en finance islamique figurent l’augmentation de la richesse,
l’augmentation de l’emploi et la distribution équitable des richesses et des
revenus ;
La nature des rapports entretenus entre une banque islamique et ses clients
est différente de la nature de relation entretenue avec une banque
conventionnelle. Les banques islamiques mobilisent leurs ressources sous
forme de comptes d’investissement qui fonctionnent selon le principe de
partage des profits et des pertes.
Tous ses motifs font que les objectifs poursuivis par la comptabilité financière en
finance islamique sont différents de ceux poursuivis en finance conventionnelle.
Actuellement, ce cadre semble inadapté dans certains de ses aspects aux banques
islamiques et devrait être complété par des normes comptables spécifiques aux
banques islamiques.
D’autant plus qu’en Islam, chaque musulman doit calculer sa richesse une fois par
an pour déterminer le montant de la zakat à payer.
Selon ce concept, les profits générés par les investissements durant une année ou
un exercice comptable sont calculés sans liquidation des investissements. Ils sont
considérés comme de nouveaux investissements l’année suivante.
Selon l’AAOIFI, la valeur actualisée des cash-flows futurs est la méthode la plus
appropriée pour évaluer les actifs financés par les actionnaires et les titulaires des
comptes d’investissement. Cette position de l’AAOIFI est justifiée par la nécessité
d’assurer une répartition équitable des profits des investissements dans le groupe
des titulaires des comptes d’investissement ayant fourni des fonds à différentes
étapes de la vie des investissements mais également entre les titulaires des comptes
d’investissements et les actionnaires de la banque.
Il se trouve que cette méthode d’évaluation n’est pas actuellement adoptée par
l’AAOIFI en raison du manque des moyens adéquats pour mettre en application
cette méthode afin qu’elle produise une information fiable et adéquate.
Selon cette convention, le coût historique (ou valeur d’origine) sert de base pour la
comptabilisation des postes d’actifs ou de passifs. Les biens et les services acquis par
l’entité sont en règle générale comptabilisés à leur coût de transaction soit le
montant effectivement payé ou dû. (Cadre conceptuel de la comptabilité)
Selon cette convention, la substance des opérations et autres événements n’est pas
toujours cohérente avec ce qui ressort du montage juridique apparent.
Pour que l’information représente d’une manière fiable les transactions et autres
événements qu’elle vise à représenter, il est nécessaire qu’ils soient enregistrés et
présentés en accord avec leur substance et leur réalité économique et non pas
seulement selon leur forme juridique (Cadre conceptuel de la comptabilité).
Par ailleurs, le fonds et la forme d’une transaction financière sont tout aussi
importants et fortement pris en considération par la Charia. En effet, ces deux
composantes doivent être plutôt compatibles et complémentaires et non
contradictoires.
Cette convention établit que les états financiers doivent fournir toutes les
informations nécessaires pour ne pas induire en erreur les lecteurs.
Les besoins en information des parties prenantes dans les banques islamiques
diffèrent par rapport aux banques conventionnelles en raison des motifs suivants :
Les comptes d’investissement qu’ils soient restreints ou non restreints n’ont pas
d’équivalent dans les banques conventionnelles. De ce fait, aucune norme
comptable bancaire ne traite de leurs règles de présentation, de comptabilisation et
ceci est également valable pour les fonds de réserves y relatifs.
En effet, ces comptes ne peuvent être présentés en passifs au même titre que les
dépôts de la clientèle dans les bilans des banques conventionnelles. Ceci s’explique
par le fait que ces comptes sont régis par le principe de partage des profits et des
pertes et que la banque islamique n’a pas l’obligation de restituer ses dépôts à leurs
titulaires en cas de perte.
En effet, la banque islamique combine ses fonds avec les fonds de ses déposants
(comptes courants, comptes d’épargne et comptes d’investissement) pour le
financement de projets objet du contrat de moudharaba.
Se pose donc la question de l’allocation des coûts entre la banque islamique et les
titulaires des comptes d’investissement. Tout d’abord, les financements entraînent
deux natures de charges : les charges directes et les charges indirectes
essentiellement les charges administratives.
Les normes comptables actuelles ne prévoient pas de méthode déterminée qui fixe
les règles d’allocation des charges pour éviter toute minoration de la part des profits
attribuables aux titulaires des comptes d’investissement par la banque.
Les réserves PER et IRR sont spécifiques aux banques islamiques et plus
particulièrement aux comptes d’investissement gouvernés par le mécanisme de la
moudharaba.
L’état de résultat prévu par la norme NCT 21 ne reflète pas la particularité des
revenus générés par les comptes d’investissement.
Ces comptes sont régis par le principe de partage des profits et des pertes et par
conséquent les résultats générés doivent être répartis entre la banque islamique en
tant que moudharib et les déposants titulaires de ces comptes.
L’état de résultat tel qu’il est prévu par la norme comptable NCT 21 ne permet pas
une compréhension du résultat de la banque islamique et ne privilégie pas une
analyse pertinente de la performance au titre des comptes d’investissement eu
égard aux règles régissant leurs fonctionnement et à l’exigence de la conformité à
la Charia.
De même qu’il ne distingue pas entre la quote-part des profits revenant à la banque
et la quote-part revenant aux titulaires des comptes d’investissement.
Les utilisateurs des états financiers dans les banques islamiques ont des exigences
en informations uniques et spécifiques par rapport à l’industrie de la finance
conventionnelle.
En effet, les parties prenantes dans une banque islamique n’ont pas seulement
besoin d’informations leur permettant d’évaluer la capacité de la banque à
maintenir et à fructifier le capital investi mais aussi de s’assurer de ce qui suit :
Les banques islamiques mobilisent et traitent les fonds du public au même titre que
les banques conventionnelles. Les fonds détenus par la banque peuvent même
dépasser son propre capital.
La mise en place d’un système adéquat de gestion des risques et d’un système de
contrôle interne approprié est nécessaire pour l’instauration d’un tel
environnement.
Par ailleurs, le principe de partage des profits et des pertes qui est un principe
spécifique et unique aux banques islamiques, l’obligation de se conformer à la
Charia ainsi que la particularité des produits islamiques font que ces systèmes
revêtent davantage d’importance.
Nous allons examiner les mécanismes internes et externes de contrôle au sein d’une
banque islamique tout en mettant en exergue leurs missions et contributions pour
le contrôle des comptes d’investissement et la maîtrise des risques spécifiques qui en
découlent.
1. L’AUDIT INTERNE :
L’audit interne a été défini par l’IIA (Institute of Internal Auditors) comme suit :
« L’audit interne est une activité indépendante et objective qui donne à une
organisation une assurance sur le degré de maîtrise de ses opérations, lui apporte
ses conseils pour les améliorer, et contribue à créer de la valeur ajoutée.
Il aide cette organisation à atteindre ses objectifs en évaluant, par une approche
systématique et méthodique, ses processus de management des risques, de
contrôle, et de gouvernement d’entreprise et en faisant des propositions pour
renforcer leur efficacité. »
A l’issue des contrôles opérés, l’auditeur interne prépare un rapport dans lequel il
consigne les insuffisances relevées et donne des recommandations pour concevoir
et améliorer les contrôles concernés.
Tout d’abord, il faut souligner que l’auditeur interne dans une banque islamique doit
avoir une bonne connaissance des activités bancaires islamiques et des problèmes
spécifiques rencontrées par ses banques.
Il doit également avoir la capacité d’identifier les risques encourus dans les
opérations bancaires islamiques pour pouvoir y remédier et proposer des mesures
correctives si nécessaires.
En ce qui concerne les comptes d’investissement qui sont plus risqués, l’auditeur
interne doit s’assurer de la conception et de la mise en application des procédures
de contrôles pour prévenir l’arbitraire dans les décisions d’investissement, la
mauvaise gestion, l’exposition excessive aux risques et d’assurer une gestion
prudente.
Ceci est dû au fait que les déposants ne disposent pas de moyens leur permettant
de sauvegarder leurs intérêts : d’une part, ils ne peuvent pas avoir leurs propres
représentants au sein des conseils d’administration au même titre que les
actionnaires puisque ce sont des partenaires temporaires et qu’ils peuvent retirer
leurs dépôts à tout moment sans aucune contrainte. D’autre part, la création
d’entités spécialisées dans la garantie des dépôts n’est pas permise parce que ça va
à l’encontre du principe de partage des profits et des pertes.
Rappelons que le risque fiduciaire est le risque que la banque ait fait preuve de
négligence ou de mauvaise gestion lors de l’exécution du contrat de moudharaba.
Alors que le risque commercial déplacé correspond au fait que la banque ne puisse
pas faire face à la concurrence des autres banques qu’elles soient islamiques ou
conventionnelles.
Les banques islamiques doivent se conformer aux préceptes de la Charia. A cet effet,
elles sont dotées de leur propre comité de la Charia.
Le comité Charia est une structure qui caractérise l’organisation interne d’une
banque islamique par rapport aux banques conventionnelles.
Son rôle ne se limite pas à s’assurer de la conformité à la Charia mais il doit intervenir
au niveau du dispositif du contrôle interne. En effet, cet organe a un rôle de
contrôleur interne qui a un droit de regard sur l’ensemble des activités bancaires.
La Banque Centrale est l’autorité de contrôle et de supervision aussi bien pour les
banques islamiques que les banques conventionnelles.
En tant que telle, la Banque Centrale doit remplir les fonctions suivantes :
En sus de la certification des états financiers, les commissaires aux comptes ont un
rôle important qui consiste à dynamiser et à améliorer l’efficacité des contrôles
internes de plusieurs manières :
La réglementation actuelle doit prévoir des amendements qui portent sur le rôle de
l’auditeur externe dans la fourniture d’une assurance que les banques islamiques
n’ont pas transgressé les préceptes de la Charia.
Dans le cadre de sa mission, le comité Charia établit des rapports annuels afin de
confirmer le caractère Charia compatible des opérations réalisées par la banque.
L’auditeur externe est l’un des utilisateurs de ces rapports qui lui permettent
d’asseoir convenablement son évaluation du risque de non-conformité à la Charia
auquel la banque est exposée.
Ces rapports ont un impact direct sur les diligences mises en œuvre par l’auditeur
externe en identifiant :
Les produits et les charges générés par des transactions financières ou des
produits jugés non conformes à la Charia. En effet, ces produits et charges
doivent être exclus du résultat de la banque et doivent être présentés dans
un compte d’attente en vue de leur liquidation ;
Bien que l’auditeur externe et le comité Charia aient des objectifs d’audit différents
de par la nature de l’audit exercé et de la différence des référentiels utilisés, ils se
rejoignent en tant que deux mécanismes externes de contrôle complémentaires
ayant pour finalité d’assurer la protection des déposants et de leurs intérêts.
La norme GSIFI n°2 de l’AAOIFI « Shari’a Review » détermine les étapes de mise en
œuvre du contrôle Charia qui se déroule en trois étapes :
Les procédures de contrôle doivent être planifiées pour qu’elles soient réalisées
d’une manière efficiente et efficace.
Le programme d’audit doit être développé d’une manière adéquate de telle façon à
développer une compréhension des opérations de la banque islamique en termes
de volumétrie, emplacements...
Le programme d’audit « religieux » du comité Charia a été élaboré par nos soins en
se référant à la norme charaique n°13 « Mudaraba » de l’IFSB.
A notre avis, les critères d’échantillonnage devant être pris en compte par le comité
Charia dans sa revue se présentent comme suit :
dans l’un de ses aspects et ayant donné lieu à l’émission d’un avis de ce même
comité.
Vérifier que le moudharib n’a pas utilisé les fonds des investisseurs pour
faire un don ou pour accorder un prêt à autrui sans le consentement des
investisseurs de fonds ;
Vérifier que le moudharib n’a pas acheté des biens ou actifs dans le cadre
de l’opération de moudharaba à un prix supérieur à celui du marché ;
Vérifier que le moudharib n’a pas procédé à la vente de biens ou d’actifs
dans le cadre de l’opération de moudharaba à un prix inférieur au prix du
marché ;
Vérifier que les honoraires ou frais supportés par le moudharib, suite à son
recours à un sous-traitant ou à une partie tierce pour l’exécution des
travaux ou des activités rentrant dans le cadre de ses responsabilités de
gestion des fonds, n’ont pas été prélevés sur les fonds investis mais plutôt
sur les fonds propres du moudharib ;
Vérifier, dans le cas où le moudharib prétend à des dépenses minimales de
vie quotidienne accordées par l’investisseur des fonds en vertu du contrat,
que les dépenses effectives ne dépassent pas le montant énoncé et
approuvé dans le contrat ;
Vérifier, dans le cas où les dépenses minimales de vie quotidienne n’ont
pas été prévues par le contrat, que leur montant effectif présente un
caractère raisonnable par rapport à l’usage et la coutume.
L’objet du rapport ;
La nature du travail effectué ;
Le rappel des obligations du management vis-à-vis de la réglementation
islamique ;
La confirmation que le comité Charia a réalisé les travaux de revue d’une
manière appropriée ;
Le paragraphe d’opinion doit exprimer l’opinion du comité concernant la
conformité des modèles de contrats et de la documentation y relative par
rapport aux principes et règles de la Charia.
Si le comité Charia relève des cas de violation des fatwas, règles et principes
de la Charia ainsi que des directives issues par ce même comité, ces violations
doivent être reportées dans l’opinion relative aux principaux aspects :
a. La conformité des contrats et des transactions à la Charia ;
b. La répartition des profits et des pertes relative aux comptes
d’investissement est conforme aux règles et aux principes de la Charia ;
c. Les revenus de source illicite ont été liquidés au profit d’œuvres de
bienfaisance/caritatives ;
d. Le calcul de la Zakat a été effectué en conformité aux règles et
principes de la Charia.
La période couverte par la revue et la date de la fin de la revue effectuée ;
La date du rapport qui ne doit pas être antérieure à la date d’approbation des
états financiers par le management ;
La signature de tous les membres du comité.
Les sections qui suivront vont traiter des diligences spécifiques à mettre en œuvre
par le CAC pour le contrôle des comptes d’investissement que ce soit en matière
d’évaluation du contrôle interne qu’en matière de contrôle des comptes.
Lors de son intervention au sein d’une banque islamique, le CAC doit tenir compte
dans ses travaux des risques et enjeux spécifiques au sein de cette catégorie de
banque.
L’objectif des tests sur les procédures est l’évaluation de l’efficacité et de la fiabilité
des procédures de contrôle interne. Ce qui permet au CAC d’évaluer le risque de
non contrôle qui est une composante du risque d’audit.
B. DILIGENCES SPECIFIQUES :
Pour dresser une évaluation appropriée et adéquate, l’auditeur doit réaliser les
contrôles suivants :
S’assurer que le processus d’évaluation des risques par l’entité est dûment
formalisé d’une manière concise et précise à travers l’existence d’un manuel
de contrôle interne et des notes de procédures détaillant les natures , les
niveaux et la matérialisation du contrôle ainsi que tout autre outil permettant
l’appréhension et l’application des mécanismes de contrôles prévus.
S’assurer que les manuels et les procédures prévus pour les contrôles relatifs
aux comptes d’investissement tiennent compte des risques spécifiques à la
détention de ses dépôts, de la récurrence des opérations de moudharaba et
du risque de non conformité à la Charia.
S’assurer du caractère opérationnel des structures de contrôles et des
contrôles mis en place constatés par des rapports périodiques qui remontent
les insuffisances constatées dans le fonctionnement des comptes
d’investissement, les projets financés, l’existence de transactions prohibées et
par conséquent de produits et de charges illicites ainsi que tout autre cas
survenu de non-conformité à la Charia.
Nous allons détailler encore plus les diligences de l’auditeur externe pour
l’évaluation des contrôles relatifs aux comptes d’investissement par niveau de
contrôle :
Vérifier l’existence de limites de prise de risques par nature de risque, leur suivi
et la prévention des dépassements ;
Vérifier que la banque effectue un suivi et une justification des comptes
comptables relatifs aux comptes d’investissement, des comptes relatifs aux
transactions prohibées et des comptes de la Zakat ;
Vérifier l’existence et la réalisation de contrôles et de travaux de justifications
au titre des opérations manuelles qui touchent les comptes d’investissement,
la répartition des profits et la détermination des réserves y afférentes.
L’auditeur externe doit vérifier l’existence du contrôle de 2ème niveau et évaluer son
efficacité :
Vérifier l’existence d’un contrôle de 2ème niveau dûment matérialisé qui porte
sur les journées comptables : les écritures comptables sont dûment justifiées
et une piste d’audit est clairement établie ;
Vérifier que les paramètres du système d’information en particulier ceux
relatifs à la détermination du résultat de la banque, la répartition des profits
et des pertes entre les déposants et la banque sont verrouillés et nécessitent
un niveau d’habilitation supérieur et des autorisations ponctuelles pour y
apporter des modifications ;
Vérifier l’existence d’habilitations strictes au niveau du système d’information
pour la création et la suppression de comptes comptables ;
Vérifier qu’il y a un suivi des comptes non mouvementés d’une manière
générale ;
Vérifier que les comptes comptables relatifs au résultat de la banque ne
logent pas des produits et des charges relatifs à des transactions prohibées.
En effet, tout produit illicite doit être logé dans un compte d’attente en vue
de sa liquidation ;
Vérifier que les provisions PER et IRR comptabilisées par la banque présentent
un caractère suffisant et pertinent par rapport au risque de perte relatif au
projet financé.
Il doit juger du caractère adéquat des travaux accomplis par l’expert par
rapport à ses besoins.
DOSSIER
Réf DA
Date
CONCLUSIONS :
A. DILIGENCES SPECIFIQUES :
Après avoir évalué le risque d’anomalies significatives au niveau des états financiers,
l’auditeur planifie et met en œuvre des contrôles substantifs pour pouvoir répondre
aux risques identifiés.
DOSSIER
Réf DA
Date
Réaliser les contrôles substantifs au titre des Dégager les anomalies Réf DP
comptes d’investissement significatives pour les corriger
TESTS ECART
REF
Observations
CONTROLES SUBSTANTIFS FT
OUI/NON Significati
N/A f/NS
TESTS ECART
REF
Observations
CONTROLES SUBSTANTIFS FT
OUI/NON Significati
N/A f/NS
CONCLUSIONS :
CONCLUSION GENERALE
Les défis rencontrés par les banques islamiques sont de natures juridiques,
comptables et fiscales suite à la détention des comptes d’investissement.
Tout d’abord, les défis juridiques peuvent être résumés dans l’inadaptation du cadre
juridique actuel au contrat de moudharaba dont principalement la garantie de
restitution des dépôts en vigueur dans le système bancaire conventionnel et la
liberté de disposer des fonds des déposants qui va à l’encontre des comptes
d’investissement restreints.
De même, il y a lieu de signaler que le code des obligations et des contrats traite du
contrat de moudharaba mais accuse des insuffisances.
Ensuite, les textes fiscaux en Tunisie ne traitent pas du régime d’imposition des
revenus de la moudharaba aussi bien entre les mains du déposant que dans le
tableau de détermination du résultat fiscal de la banque.
De même, aucun traitement spécifique n’est prévu pour les réserves PER et IRR
typiques et uniques aux banques islamiques.
Enfin, le cadre conceptuel comptable ainsi que les normes comptables bancaires
présentent des divergences par rapport aux normes comptables islamiques
instaurées par l’AAOIFI qui consistent principalement dans des divergences dans la
Mais une remarque d’ordre générale qui a trait à tous les domaines doit être
soulignée et qui consiste dans le fait que tous ses cadres ignorent la dimension
éthique et religieuse de la finance islamique.
En effet, la conformité aux préceptes de la Charia qui est une obligation qui pèse sur
les banques islamiques et qui doit être reflétée dans ses états financiers est
totalement absente aussi bien dans le cadre juridique, fiscal et comptable.
Tous ses défis auxquels les banques islamiques font face et en particulier la
moudharaba et les comptes d’investissement ne font que mettre à la charge des
commissaires aux comptes de ses banques davantage de responsabilités et de
diligences supplémentaires à mettre en œuvre.
Le commissaire aux comptes doit par conséquent tenir compte des nouveaux
risques spécifiques aux comptes d’investissement tel que le risque de non-
conformité à la Charia, le risque fiduciaire et le risque commercial déplacé depuis la
phase de la planification de la mission jusqu’à la rédaction du rapport d’audit au titre
des états financiers.
D’autant plus que celui-ci doit acquérir des connaissances en Charia même dans le
cas où il juge qu’il doit recourir à un expert en la matière.
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages
Revues et articles
Sites Web
www.aaoifi.com
www.iifm.net
www.ifac.org
www.labanqueislamique.fr
www.aef.asso.fr
www.bct.gov.tn
www.procomptable.com
www.profiscal.com
Financial Accounting Standard n°6 : Equity of Investment account holders and their
equivalent
ISA 200 : Objectifs et principes généraux en matière d’audit des états financiers
ISA 250 : Prise en considération des textes législatifs et réglementaires dans un audit
des états financiers
ISA 330 : Procédure à mettre en œuvre par l’auditeur en fonction de son évaluation
du risque
DEDICACE ............................................................................................................................................... 1
REMERCIEMENTS ................................................................................................................................... 2
LISTE DES ABREVIATIONS.................................................................................................................... 3
SOMMAIRE .............................................................................................................................................. 4
INTRODUCTION GENERALE ............................................................................................................... 6
PARTIE I : DEPOTS BANCAIRES CONVENTIONNELS ET DEPOTS BANCAIRES ISLAMIQUES :
CONVERGENCES ET POINTS DE DIVERGENCES ......................................................................... 12
CHAPITRE 1 : PRESENTATION GENERALE DU CADRE REGLEMENTAIRE DE LA FINANCE
ISLAMIQUE EN TUNISIE ................................................................................................................ 13
I. PERSPECTIVES DE LA FINANCE ISLAMIQUE EN TUNISIE ............................................ 13
II. CADRE REGLEMENTAIRE GENERAL DE LA FINANCE ISLAMIQUE EN TUNISIE ..... 15
CHAPITRE 2 : RESSOURCES ET EMPLOIS DANS LES BANQUES ISLAMIQUES ................... 19
I. PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LA FINANCE ISLAMIQUE ....................................... 19
1. GENESE ET HISTOIRE DE LA FINANCE ISLAMIQUE .....................................................19
2. PRINCIPES DE LA FINANCE ISLAMIQUE ..........................................................................21
2.1 LA PROHIBITION DU RIBA ...............................................................................................................21
2.2 LE PARTAGE DES PROFITS ET DES PERTES .................................................................................22
2.3 LE PRINCIPE DE PROHIBITION DU GHARAR ET DU MAYSIR ................................................22
2.4 LE PRINCIPE DE LA DISTRIBUTION DU ZAKAT ..........................................................................23
2.5 LE PRINCIPE DE PROHIBITION DU HARAM ................................................................................24
2.6 LE PRINCIPE DE L’ASSET BACKING OU DE L’ADOSSEMENT A UN ACTIF TANGIBLE ...24
II. LES RESSOURCES DES BANQUES ISLAMIQUES .............................................................. 24
1. LES DEPOTS A VUE .................................................................................................................24
2. LES COMPTES D’EPARGNE ...................................................................................................25
3. LES COMPTES D’INVESTISSEMENT ....................................................................................26
III. LES EMPLOIS DES BANQUES ISLAMIQUES ...................................................................... 26
1. LES PRODUITS REGIS PAR LE PRINCIPE DES PROFITS ET DES PERTES ....................26
1.1 LE CONTRAT DE MOUDHARABA .................................................................................................26
1.2 LE CONTRAT DE MOUSHARAKA ...................................................................................................29
1.3 LE CONTRAT DE MOUSHARAKA DIMINUE .................................................................................29
2. LES PRODUITS NON REGIS PAR LE PRINCIPE DES PROFITS ET DES PERTES .........30
2.1 LE CONTRAT DE MOURABAHA ......................................................................................................30
2.2 LE CONTRAT IJARA .............................................................................................................................31