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Dès que les aliments entrent en contact avec des surfaces de travail, les
microorganismes omniprésents cherchent à y proliférer. à cause de la porosité et du
vieillissement des surfaces et, parfois, de la présence du Biofilm qui leur fournit un
refuge, les bactéries et autres contaminants donnent du fil à retordre aux industriels
soucieux de garantir une parfaite innocuité alimentaire. Heureusement, des
méthodes de nettoyage et de désinfection appropriées parviennent à déloger les
visiteurs importuns jusque dans leurs repaires les plus secrets.
Le dépôt organique qui se forme sur les surfaces en contact avec les aliments est un
amalgame de graisses, de matières azotées, de protéines, de sels minéraux et de
débris d'aliments. Pour éviter que ce dépôt ne devienne rapidement le siège d'une
prolifération de bactéries, de levures ou de moisissures, il est indispensable d'établir
des procédures de nettoyage et de désinfection en fonction des denrées
transformées et des matériaux en cause. En somme, il s'agit de respecter les étapes
suivantes :
LE GRAND MÉNAGE
Pour être efficace, un bon nettoyage doit être régulier et faire appel à des détersifs
qui, en mouillant la surface à nettoyer, en détacheront la souillure grâce à
l'abaissement des tensions de surfaces entre les deux composants, qui sont en
général hydrophobes. Ces détersifs devront tour à tour émulsionner la matière
grasse, défloculer (mettre en suspension) les matières azotées (protéines),
séquestrer les sels précipitables de certains métaux (Ca, Mg) présents dans les eaux
dures, en plus de dissoudre les dépôts minéraux. Règle générale, une surface
présentant des souillures de nature minérale se prête bien à un détergent acide,
alors qu'on utilise plutôt des détergents alcalins pour des souillures organiques.
Cette dernière recette est toutefois inutilisable sur les autres métaux trop facilement
corrodés, dont l'aluminium. De fait, si on veut entretenir adéquatement les surfaces, il
faut veiller à conserver leur intégrité. Les métaux ferreux (acier, acier inoxydable,
fonte) ne sont pas attaqués par les produits alcalins, alors qu'ils le sont par les acides
forts, d'où la nécessité dans ce dernier cas d'employer des inhibiteurs de corrosion.
Par contre, les métaux légers (aluminium et ses alliages, zinc, etc.) sont violemment
attaqués par les produits fortement alcalins ou acides. On doit donc utiliser des
produits moins alcalins tout en prohibant ceux qui sont de nature acide. Quant aux
matières plastiques, elles sont souvent sensibles aux solvants et aux oxydants, et
elles sont colorées par les produits iodés.
L'activité de tous ces détergents sera directement modulée par l'action mécanique
des fluides et par la température. Par exemple, l'élimination du dépôt minéral sur
l'acier inoxydable avec des solutions acides est optimale à 70 oC. De fait, l'eau
chaude elle-même constitue déjà un « détergent » puisqu'elle peut favoriser les
réactions de saponification et d'hydrolyse, ramollir les graisses et fluidifier les huiles.
Cependant, plusieurs facteurs tels que la coagulation de certaines souillures
protéiques (pensez au jaune d'oeuf cuit entre les dents d'une fourchette !), la
résistance thermique des matériaux et le coût de l'énergie limitent le recours aux
températures élevées.
LE COUP DE GRâCE
Or, même après un nettoyage bien fait, il peut rester de la matière organique sur les
surfaces plus difficiles d'accès. De plus, selon les connaissances actuelles, aucun
produit chimique ne possède à la fois toutes les caractéristiques d'un bon
désinfectant, c'est-à-dire qui soit stable, soluble, à large spectre, létal (mortel) à faible
concentration pour tout microorganisme, non affecté par la présence de matière
organique, actif à la température de la pièce, etc. Il faut donc choisir le meilleur
produit pour une situation donnée.
Il faut également se fier aux moyens physiques de désinfection. Parmi ceux-ci, les
plus couramment utilisés mettent en oeuvre l'action stérilisante de la chaleur sous
forme de chaleur humide, de vapeur ou d'eau chaude.
La désinfection à l'eau chaude constitue quant à elle la méthode par excellence pour
détruire la plupart des germes à l'état végétatif. Pour s'assurer de détruire les spores,
les parties démontables du matériel et les petites pièces doivent être plongées dans
un bac ou un réservoir rempli d'eau à la température de désinfection (80°C) pendant
10 minutes. La pasteurisation et la chaleur sèche peuvent aussi être utilisées pour
désinfecter.
La désinfection chimique s'effectue surtout par des composés halogénés tels que le
chlore et l'iode, alcalins comme l'hydroxyde de sodium ou d'ammonium, acides,
phénoliques comme l'acétate de chlorhexidine, les aldéhydes du type
glutaraldéhyde, les ampholytes (qui peuvent se comporter soit en acide, soit en
base), les surfactants et les composés gazeux tels que l'oxyde d'éthylène.
Parmi les composés halogénés, le chlore (sous forme d'hypochlorite de sodium) ainsi
que l'iode sont les plus couramment utilisés. Non toxique pour l'humain aux
concentrations d'emploi, le chlore possède une activité germicide rapide. Par contre,
puisqu'il se fixe facilement aux dépôts azotés, son pouvoir diminue grandement en
présence de matières organiques.
Seul, l'iode est un produit instable, à faible solubilité dans l'eau. Cependant, des
substances tensioactives peuvent le solubiliser et le supporter. Ces « iodophores »
pénètrent facilement à l'intérieur des souillures et présentent une activité bactéricide
intéressante, même à une température inférieure à 40°C. Ils inactivent rapidement
les formes végétatives, mais leur activité sporocide est lente. à l'inverse du chlore,
les iodophores ne se fixent que très peu aux dépôts, qui ne réduisent donc pas leur
activité bactéricide. Puisque les iodophores sont inactivés à un pH supérieur à 6, ils
sont incompatibles avec les détersifs alcalins.
Les composés d'ammonium quaternaire combinent une activité bactéricide avec une
action détersive et se montrent plus actifs contre les bactéries Gram-positives que
contre les Gram-négatives. Alors que les bactéries lactiques sont très facilement
détruites, les coliformes et les bacilles leur résistent. On comprend facilement
pourquoi leur emploi est fortement déconseillé dans l'industrie laitière. De surcroît,
leurs pouvoirs mouillants et moussants rendent difficile le rinçage des surfaces.
Désinfectants
Hypochlorite Iode Ammonium quaternaire
(QAC)
Température (°C) 20 20 4 20 20 4 20 20 4
de la surface
Température (°C) 20 4 4 20 4 4 20 4 4
de la solution
désinfectante
Type de surface Concentration (parties par million)
Acier inoxydable 130 250 450 30 55 65 425 950 1 400
Verre 115 300 300 30 65 50 425 800 700
Plastique >10 0 >10 000 >10 >450 >1 000 >800 >10 000 >10 000 >10 000
00 000
Caoutchouc 450 600 600 300 350 300 1800 950 1 400
Enfin, d'autres agents chimiques de désinfection tels que l'oxyde d'éthylène (gaz à
large spectre d'activité possédant une action pénétrante sur le caoutchouc et les
plastiques) et les amphotères (possédant une activité bactéricide et mouillante
notable) peuvent aussi être préconisés pour la désinfection.
Longtemps, les recherches menées sur le pouvoir bactéricide des agents chimiques
de désinfection faisaient appel au test en milieu liquide, où les bactéries en
suspension étaient mises en contact avec différentes concentrations de
désinfectants. Ceci n'est pas suffisant, car les essais en suspension ne semblent pas
fournir de données reproductibles qui correspondent aux conditions in vivo. En
pratique industrielle, il a été démontré que la nature des surfaces à désinfecter joue
réellement un rôle important sur l'efficacité des désinfectants. C'est la raison pour
laquelle une équipe du Centre recherche et de développement sur les aliments
(CRDA) a choisi de se servir de différentes surfaces lors de l'évaluation en
laboratoire de l'efficacité des désinfectants, car un produit qui est efficace sur une
surface ne l'est pas forcément pour une autre. Ces recherches indiquent qu'une
surface de plastique ou de caoutchouc serait plus difficile à désinfecter qu'une
surface de type acier inoxydable ou verre. Ainsi, des concentrations de 2 à 40 fois
plus élevées sont nécessaires pour désinfecter des surfaces poreuses (caoutchouc
et polypropylène) par rapport à celles de type rugueux (acier inoxydable et verre). La
porosité des surfaces, leur composition ainsi que leur tension superficielle sont en
cause.