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Gilles Le Blanc
• Pourtant les bénéfices des fusions sont difficiles à mettre en évidence empiriquement. Dans de
nombreux cas, ils semblent même négatifs (destruction de valeur) : «paradoxe» des fusions
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Plan
1. Définitions et faits stylisés
– Définitions et ordres de grandeur
– La vague de fusions des années 1990 et ses caractéristiques
– Des bénéfices controversés
– Le cas des fusions transfrontalières
• Instruments possibles de fusion : accord amical négocié entre les directions et soumis aux
actionnaires, offre de rachat des actions en bourse (OPA, OPE) amicale ou hostile,
acquisitions négociée d'actifs ou d’éléments d'une firme...
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1.1 Observation empirique : les "vagues" de fusions
Source : Barkoulas J., Baum C., Chakraborty A. (2001) "Waves and Persistence in Merger
and Acquisition Activity", Economics Letters, n° 70, pp.237-243. 5
1.1 Etudes empiriques : deux principaux résultats
• On observe une alternance entre des périodes d'intense activité de fusions et de relative
stabilité : phénomène de "vagues". Aux Etats-Unis, avant la phase actuelle, quatre pics
d’activité remarquables au cours du 20ème siècle :
– 1895-1904 "merger for monopoly" (ex. des fusions organisées par JP Morgan entre les douze
principaux producteurs d'acier pour former US Steel). Création de General Electric, Du Pont,
Eastman Kodak, American Tobacoo.
– 1916-1929 après la législation antitrust, la vague des "mergers to oligopoly", consolidation et
expansion du marché (GM, IBM, Union Carbide)
– 1955-1970 fusions de type conglomérat, diversification, acquisition de technologies (ITT)
– 1980 vague touchant tous les secteurs et s'internationalisant, recours au mécanisme de LBO (effet
levier de la dette) pour financer les fusions. Opérations hostiles (BP, RJR Nabisco)
• Rôle central des Etats-Unis mais dimension internationale accrue depuis 1980
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1.2 Caractéristiques de la "vague" des années 2000
Opérations majoritairement horizontales, visent la consolidation dans un secteur, une
industrie ou une région, ayant de plus en plus souvent une dimension internationale,
surtout financées par échanges d'actions
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1.3 Des résultats statistiques mitigés… voire négatifs
Mergers Performance Measures
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1.3 Des bénéfices controversés (suite)
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1.4 Le cas des fusions transfrontalières
• Une croissance de 50% de la valeur des fusions transnationales en 2000
• Un rôle central joué par l’Union Européenne (les firmes européennes ont réalisé la moitié des
acquisitions mondiales de firmes étrangères, contre un quart pour les entreprises américaines)
• Désormais le poids des fusions transfrontalières dépasse celui des opérations domestiques
dans la plupart des pays européens.
• Principaux acteurs : UK, France, USA, Allemagne, et Secteurs : télécoms et média (un tiers
des opérations en 2000), finances, informatique-électronique
• Motivations spécifiques :
– un mode d’entrée rapide et efficace sur un marché étranger
– opportunités ouvertes par les récentes politiques économiques et réglementaires (accord libre-
échange, libéralisation des utilities, programmes de privatisation...)
– l’intégration régionale économique et politique (construction du marché unique)
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2. Motivation économique des fusions
L’analyse économique avance de nombreuses causes / explications possibles aux fusions :
• Une efficacité accrue (en raison d’économie d’échelle ou de “synergies” d’ensemble entre les
entreprises fusionnées),
• La discipline du marché (élimine par la fusion une direction incompétente et une firme
inefficace),
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2.1 Revue des interprétations économiques des fusions
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2.1 Interprétations économiques des fusions : pouvoir de marché
• Comment évaluer alors les effets de la fusion sur les firmes participantes ?
• Qu'est-ce qui manque au raisonnement ? Le moyen de rendre compte des avantages tirés de
la fusion par les firmes impliquées : notion de "synergies"
• Une façon simple de le représenter est de considérer que la firme issue de la fusion a acquis
un leardership sur ses rivales dans l'industrie, par exemple s'engager sur un volume de
production qui s'imposera ensuite comme une donnée à ses concurrents (modèle de
Stackelberg).
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2.1 Complément : le duopole de Stackelberg
La firme 1 sait que sa concurrente décidera du volume de production en prenant le sien comme une donnée. Elle peut en tirer
un avantage stratégique, en influençant à son bénéfice le comportement de la firme 2 et fixer son volume de production en
tenant compte de la réaction prévisible de cette dernière.
La firme 1 choisit le volume qui maximise ses profits en intégrant la courbe de réaction de 2 : ce qui la conduit à produire plus
qu'à l'équilibre de Cournot.
La firme leader au sens de Stackelberg augmente sa production et ses profits en manipulant à son dépends le volume de la
firme suiveuse.
Equilibre de Cournot
q1
Courbe de réaction de
la firme 1
Quantité produite
q*2 q2 par la firme 2 15
2.1 Interprétations économiques des fusions : pouvoir de marché
• Dans un modèle de compétition de type Stackelberg, la fusion va permettre aux deux firmes
d'accroître leurs profits tandis que celui des autres firmes qui n'ont pas fusionné diminue
(résultat général s'il y a plus de quatre firmes). Définit une incitation à fusionner : jouer le rôle
de leader de l'industrie.
• Possibilité d'étendre ce cadre analytique avec plusieurs leaders et suiveurs dans l'industrie.
Concurrence à la Cournot entre le premier groupe, puis les seconds répondent à leur volume
de production collective comme dans le modèle simple de Stackelberg. Ouvre à la possibilité
d'une série de fusions (vagues) créant un groupe de firmes leaders (de nouvelles fusions sont
profitables tant que le nombre des leaders ne dépasse pas un certain point, un tiers du total)
• Au delà de ces effets de marché prix-quantité, recherche de synergies (souvent citées comme
la justification et la motivation principale d'une fusion)
– Lors de l'annonce de la fusion fin 1998 des deux géants de la pharmacie et l'agroalimentaire Hoechst
et Rhône-Poulenc pour former Aventis, la direction a chiffré les synergies attendues à 1,2 milliards
d'euros entre 2000 et 2002.
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2.1 Dimension sectorielle des fusions
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2.2 Interprétations économiques des fusions : les "synergies"
• Principales synergies avancées : gains d'efficacité, réduction des coûts
– taille accrue : économies d'échelle (ex. achats fournisseurs), évite la duplication des coûts fixes
(publicité, R&D, administratifs)
– diversification (du risque, sécurité et opportunités d'emploi, protection de la réputation et du capital
informationnel de la firme)
– éléments financiers (redéploiement du capital avec un financement interne moins coûteux, capacité
d'endettement accrue, fiscalité)
• Autres interprétations :
– opérations "purement" stratégiques : une règle de décision type "minimax regret" combinée à une
attitude défensive du management permet d'expliquer comment le mouvement d'une firme peut
susciter des stratégies d'imitation débouchant sur une série, une vague de fusions.
– correction d'inefficacités managériales (relation d'agence actionnaire-dirigeants)
– moyen d'acquérir des actifs sous-évalués (arbitrage financier)
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2.3 Approche stratégique des fusions
Bower, 2001 : Etude d'un échantillon de 1036 fusions réalisées entre 1997 et 1999 et d'une valeur supérieure à 500
m$. Construit une typologie des stratégies poursuivies.
Overcapacity M&A Eliminate capacity, gain market Need to rationalize quickly, values 37%
share, improve operations’ differences, fight between management
efficiency for control in a merger of equals
Geographic roll-up Geographical expansion Impose processes and values from the 9%
M&A acquirer
Product or Market Extend a company’s product line Cultural and governmental differences, 36%
extension M&A or international coverage lack of understanding of markets
Industry convergence Build positions in a new Opportunities selection, adjust the right 4%
M&A emerging industry level of integration
• Interprétation : mauvaise évaluation des firmes cibles, des acquéreurs et de leurs combinaisons
par le marché. Offre des opportunités d’arbitrages profitables.
• On considère 2 firmes avec un capital K et K1 et une valorisation boursière par unité de capital
égale à Q et Q1, mesurant (imparfaitement) l’appréciation de la firme par les investisseurs (on
pose Q<Q1).
• Si les firmes fusionnent, l’évaluation par unité de capital devient s Q1 + (1-s) Q s mesure les
synergies attendues de la fusion telles qu’anticipées et appréciées par le marché.
• s*=K1/(K+K1) est le point de "synergies zéro" : la combinaison issue de la fusion est évaluée
seulement en fonction des tailles relatives des firmes. Si s>s*, des synergies positives sont
attendues et le marché accorde (relativement) plus de poids à la firme ayant la valorisation
unitaire la plus élevée.
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2.4 Une interprétation financière (Schleifer, Vishny, 2001)
• Hypothèse forte : à long terme, tous les actifs valent q par unité de capital (vise à donner une
interprétation strictement boursière à court terme des fusions).
• L'acquéreur (firme 1) paye P = pQ1 + (1-p)Q par unité de capital de la firme acquise (p=0 pas de
"premium", p=s valeur CT des entités fusionnées)
• Evaluation des gains de l’opération pour les participants (retour en valeur absolue). Effets à court
terme de la fusion :
– Retour global (K+K1) (s-s*) (Q1-Q)
– Retour pour la cible Kp(Q1-Q)
– Retour pour l ’acquéreur (Q1-Q) [K1(s-1) + K (s-p)]
– si s>1 (marché boursier "euphorique"), l'acquéreur bénéficie d'un effet de levier (réévaluation vers
le haut de son stock initial de capital et effet synergie améliorant la valeur à court terme du capital
de la cible)
– seule logique pour une acquisition payée en cash : forte sous-évaluation de la cible
– à long terme, on a une redistribution entre les actionnaires de long terme de l'acquéreur et de la
cible. Cas des acquisitions par échange d'actions : quand le prix payé (premium) est inférieur à la
valeur jointe des deux firmes (p<s), il existe une opportunité d'arbitrage offerte aux actionnaires de
l'acquéreur pour redistribuer à leur profit une fraction de la richesse des actionnaires de la cible (car
ils ont accru relativement leur contrôle du capital physique)
– application : acquisition défensive par des firmes aux actions surévaluées (AOL-Time Warner en
2000) : les utilise pour acheter des actifs
– Permet d’expliquer les vagues de fusions lors de niveaux boursiers élevés et principalement payées
par échanges d'action
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