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Les leçons de l'affaire Enron

Le 2 décembre 2001, Enron, le numéro Les liaisons dangereuses ont amené certains dirigeants à afficher
un mondial du courtage en énergie, se de l’audit et du conseil des bénéfices artificiels et ainsi garder leur
déclarait en faillite et allait entraîner dans confiance. Ce faisant, ils servaient leur
son sillage une profonde remise en cause propre intérêt puisque une partie de leur
L’autre défaillance majeure mise en exer-
du mode de fonctionnement du capita- rémunération est désormais liée à
gue par l’affaire Enron est celle de l’ensem-
lisme anglo-saxon. l’évolution du cours des actions de
ble de la chaîne de l’information financière.
Très vite, il est apparu que les règles l’entreprise via les stock-options. Cette
En effet, le cabinet Andersen a certifié des
élémentaires du gouvernement d’entre- situation était donc tout à fait propice à
comptes manifestement falsifiés afin de
prise avaient été détournées au profit de focaliser l’attention de tous sur la seule
préserver ses activités de conseil auprès
quelques dirigeants. En outre, Enron cris- valorisation boursière.
d’Enron. Cette confusion des genres lui a
tallisait l’ensemble des failles des prati-
valu une condamnation judiciaire qui s’est
ques comptables qui permettaient de Au-delà d’Enron
soldée par la disparition du cabinet. La fin
répondre aux impératifs de rentabilité
d’Andersen souligne le conflit d’intérêt qui
provenant du nouveau pouvoir des Enron symbolise les travers issus de la
empêche de concilier audit et conseil au
actionnaires. croissance qu’ont connue les États-Unis
sein d’une même entité. Au-delà des audi-
durant les années 90, basée sur la déré- Les nouvelles
teurs, les banques d’affaires sont égale- logiques
Les règles comptables ment impliquées dans l’affaire Enron car glementation de nombreux secteurs, de l'entreprise
au cœur elles ont participé de fait à l’ingénierie fi- comme l’énergie ou les télécommunica- Cahiers français
de la tourmente nancière utilisée par le courtier en éner- tions, mais aussi sur une vague sans pré- n° 309
gie. De peur de perdre un client et leurs cédent d’innovations. Le capitalisme
intérêts déjà investis, elles ont préféré se anglo-saxon triomphait par sa capacité à Quels défis
Parmi les nombreuses causes de la faillite
taire, voire même conseiller les titres à générer des profits extraordinaires, les pour demain ?
d’Enron, plusieurs relèvent des malver-
l’achat par l’intermédiaire de leurs fonds d’investissement devenant les
sations classiques autour d’une entre-
analystes financiers, profession elle aussi garants d’une dynamique qui allait assurer
prise. De nombreuses dépenses ont par 69
sérieusement discréditée par le scandale l’enrichissement de tous les salariés via
exemple été enregistrées comme des
Enron. les stock-options et l’épargne salariale. Or,
investissements afin de réduire les pertes
Plus généralement, les comptables et les ce modèle de croissance, fondé sur l'ap-
et certains actifs ont été réévalués artifi-
agences de rating n’ont pas su lire dans port (incontestable) de l'internet, a suscité
ciellement. Par ailleurs, les dirigeants
les comptes d’Enron les fuites massives des choix particulièrement risqués en
d’Enron ont mené un intense lobbying
de dettes vers les SPE, alors que certains situation de forte incertitude. Même si les
auprès des parlementaires américains
transferts ou profits réalisés, notamment modes d'organisation mis en place par
afin que ceux-ci ne remettent pas en
dans les activités financières d’Enron, Enron se sont révélés opérants, à chaque
cause la déréglementation du secteur
pouvaient apparaître douteux à la seule fois qu’il a fallu faire des choix, les diri-
énergétique. La particularité de l'affaire
lecture du rapport d’activité de la firme. geants ont préféré maximiser les gains
Enron réside dans l’ampleur de l’exploi-
plutôt que s’assurer une meilleure protec-
tation de pratiques comptables légales
tion contre les risques. La cascade de
afin de passer pour une entreprise Les défaillances révélations de fraudes comptables qui ont
performante, alors même que s’accumu-
laient des pertes colossales, et ce au nez
du gouvernement suivi la faillite d’Enron, de WorldCom à
Xerox, ont fait plonger les marchés finan-
et à la barbe de tous les dispositifs de d’entreprise
ciers en jetant le doute sur les comptes
surveillance censés assurer la crédibilité
des firmes. Or, la crédibilité des informa-
de l’information comptable. Le contrôle interne a lui aussi failli, et tout
tions financières est un véritable bien
De fait, Enron, pour camoufler des inves- particulièrement celui des administrateurs
public.
tissements déficitaires ou peu rentables, qui n’ont pas exercé leur rôle de sur-
La réforme adoptée le 25 juillet 2002 aux
a créé des structures financières veillance. Un récent rapport du Sénat
États-Unis, renforçant les sanctions
appelées special purposes entities (SPE) américain a même montré que certains
contre les dirigeants malveillants et jetant
qui peuvent ne pas être consolidées au connaissaient les manipulations
les bases d’une nouvelle régulation des
bilan des entreprises. Si Enron a recouru comptables d’Enron. Les années 90 ont
activités d’audit, témoigne d’une prise de
de manière particulièrement opaque à ces été vues comme le retour des
conscience des risques. Cependant, c’est
SPE, cet instrument est utilisé actionnaires, au détriment des managers.
toute l’information financière et les règles
couramment par les entreprises Les investisseurs, par leurs exigences en
comptables qu’il s’agit de repenser. Or, si
américaines pour aménager leur bilan et terme de rentabilité et leur vigilance sur
les standards américains sont en passe
constitue donc un moyen aisé de la stratégie de la firme, étaient censés
de se généraliser, l’affaire Enron a mon-
falsification des résultats. La présentation exercer un plus grand contrôle. Ce mode
tré combien ces règles ne sont pas à
de comptes pro forma, c’est-à-dire de de gouvernance devait résoudre le conflit
comptes réajustés en fonction du périmè- même d’assurer la transparence et la cré-
d’intérêt entre managers et actionnaires
tre retenu de l’entreprise, fait également dibilité de l’information délivrée sur la
dans la conduite de la firme.
partie de ces pratiques, certes légales, L’invraisemblable faillite d’Enron a démon- situation de l’entreprise, indispensables
mais qui participent au manque de tré les limites de cette conception. Les pourtant au retour de la confiance.
transparence de l’information sur les normes de rentabilité exigées par les
résultats des firmes. marchés financiers étaient telles qu’elles Benoît Ferrandon

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