Horizons Maghrébins - Le droit à

la mémoire

La culture berbère en deuil

M.A. Bellagh, Hafid Saïdi, Sassi Dehmani

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Bellagh M.A., Saïdi Hafid, Dehmani Sassi. La culture berbère en deuil. In: Horizons Maghrébins - Le droit à la mémoire, N°14-
15, 1989. La notion d' « Occident Musulman » / Louis Massignon homme de dialogue des cultures. pp. 229-230;

doi : https://doi.org/10.3406/horma.1989.1050

https://www.persee.fr/doc/horma_0984-2616_1989_num_14_1_1050

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 HOMMAGE A MOULOUD MAMMERI
(1917-1989)
LA CULTURE BERBERE EN DEUIL
L'équipe d'Horizons Maghrébins
vivement affectée par la mort tragique de Mouloud
MAMMERI dans la nuit du 25 au 26 Février
1989 (accident de voiture près de Ain Defla, à
200 km d'Alger), a rendu plusieurs hommages
à ce grand écrivain de l'Algérie et du Maghreb.
Ainsi des émissions spéciales ont été réalisées
pour parler de cet auteur de renom : table ronde
à Radio-Soleil (émission Tiziri) avec la
participation des membres de notre équipes (Bellagh,
Samrakandi, Saïdi, Hanoun); Biographie et
analyse de ses ouvrages sur les ondes de Radio
Occitanie (émission Tamazgha), par Bellagh et
Mohamed TAHAR, en plus de cet hommage
que nous publions, ici, signé par deux
étudiants-chercheurs algériens (Bellagh, Saïdi) et
un étudiant libyen (Sassi DEHMANI).
Horizons Maghrébins
Le droit à la Mémoire
Mouloud MAMMERI qui vit le jour le 28
Décembre 1917 à Taourirt Mimoun, nous a
brusquement quittés. Sa mort tragique sur la
route de Ain Defla nous laisse dans une
profonde tristesse.
Mais, à notre sens, Da Mouloud est
toujours vivant et il marque la sérénité et le
symbole de l'identité collective berbère.
Pour lui rendre hommage, force est de
retracer les grandes lignes et la portée de son
oeuvre en tant qu' écrivain et homme de science.
Son premier ouvrage, la Colline oubliée
(Paris, Pion, 1952), est un roman qui frappe
HORIZONS MAGHREBINS N° 14/15
par la possession et la maîtrise de la langue, qui
montre qu'il n'y a pas de difficulté de langue, ni
de difficulté tout court dans l'altérité de
l'auteur.
La place des mots, des personnages et du
pays est exacte. Pour Mouloud Mammeri il
fallait qu'on témoignât de ce qu'était la langue, de
ce qu'était la Kabylie. Ainsi, pour que ses
personnages soient justes il fallait décrire la société
kabyle à travers le quotidien.
Cet ouvrage, sans se baser sur un héros
quelconque, marque plutôt la multiplication de
personnages véhiculant la pensée d'une
collectivité authentique.
La Colline oubliée, c'est le moment de la
vie heureuse dans le groupe contrairement à la
suite de ses romans qui est l'insertion
douloureuse dans la rigueur des choses.
Mouloud Mammeri peut être considéré
comme un mélange de «paysan» kabyle et de
«notable» de la troisième République avec un
sentiment très fort de l'algérianité. A travers
son regard ethnographique, il intègre la
réhabilitation de la culture kabyle à la redynamisation
de celle-ci. Le mythe kabyle n'existe pas, la
réalité kabyle le supplante.
Dans ses autres romans tels que le
Sommeil du juste (Paris, Pion, 1955), l'opium et le
bâton (Paris, Pion, 1965), et la traversée
(Paris, Pion, 1982), l'objectif principal n'est-il pas
de montrer que la berbérité n'est pas un monde
clos, mais que celle-ci sert d'ouverture et
d'instrument pour les choses universelles?
Le problème de la berbérité ne peut se
traiter selon une logique du spécifique . Dans l'
attachement qu'il témoigne à propos de la civilisa-
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 tion Aztèque, il décrit le risque de mort d'une
civilisation. En fait, Mouloud Mammeri fait en
sorte que les Maghrébins s'approprient la
culture berbère en s' ouvrant sur la civilisaton
mondiale. Il n'y a pas de solution dans un
simple ressourceraient; nous sommes tous
interpelés autant par la mort des Aztèques que par la
problématique berbère, car elles revêtent toutes
deux une dimension universelle.
Da Mouloud, personne ne doit plus
ignorer tes qualités de rigueur morale, ta sagesse,
ton esprit d'ouverture en tant qu'homme de
science détaché de toute ambition politique ou
autre, de tout intérêt matériel.
Tout comme si Mokrane de la Colline
oubliée tu demeureras à jamais le symbole de
notre mémoire collective Tamazight.
Da Mouloud, dors en paix, ta sagesse
désormais est reconnue et nous servira toujours
de guide pour la revendication de la culture
berbère et pour l'ouverture sur l'universel.
Mohand Améziane BELLAGH
Hafid SAÏDI
Sassi DEHMANI
Toulouse, Mai 1989

L'OISEAU DES ARCS BLANCS

Sassi DEHMANI

Voilà une goûte de sang trahit les veines

et les oiseaux des arcs blancs sont en deuil.

Voilà l'encre s'immobilise

hommage au grand esprit
ô fils d'Amazigh ramasser les plumes
et le souffle des mots étouffés
le triangle du soleil s'est tu
et l'âme sur la "colline oubliée" s'est envolée
de notre vieil âge
mille fois hommage
au juste dans son grand sommeil.

(*) Poème écrit en Tamazight et traduit par

Sassi DEHMANI à la mémoire de
Mouloud MAMMERI.