Documente Academic
Documente Profesional
Documente Cultură
SOMMAIRE
Régis Caruso
Théorie et enseignement de l’antithèse rhétorique en Grèce depuis
FA S C I C U L E 1
l’époque classique jusqu’aux débuts de la période byzantine...................... 7
Marco Donato DE
PHILOLOGIE
Philon lecteur de l’Éryxias ?........................................................................... 69
Lorenzo Ferroni, Luca Gili
Non-existent but potentially actual. Aristotle on plenitude (Met. Θ 3-4,
1047b1-6)........................................................................................................ 81
Isabelle de Meyer
L’étymologie du mot grec θεός « dieu ».......................................................... 115
Jordi Pià Comella DE LITTÉRATURE ET D’HISTOIRE ANCIENNES
Prière et « appropriation » des dogmes dans le stoïcisme impérial romain. 139
Benoît Sans
Polybe, Tite-Live et la « bataille de l’Èbre » (Pol. 11, 31-33 ; Liv. 28, 31,
5-34, 12).......................................................................................................... 165
Gerd Van Riel
Le manuscrit Parisinus Coislin. 322 (sigle C) du Commentaire sur le
REVUE DE PHILOLOGIE
Timée de Proclus : la copie d’une recension byzantine................................. 191
TOME 90
2016
FASCICULE 1
TOME 90
ISSN 0035-1652
ISBN 978-2-252-04133-8
KLINCKSIECK
PHILOLOGIE
DE LITTÉRATURE ET D’HISTOIRE ANCIENNES
PHILOLOGIE
DE LITTÉRATURE ET D’HISTOIRE ANCIENNES
TROISIÈME SÉRIE
ET
Ph. HOFFMANN Ph. MOREAU
DIRECTEUR D’ÉTUDES PROFESSEUR ÉMÉRITE
À L’ÉCOLE PRATIQUE À L’UNIVERSITÉ
DES HAUTES ÉTUDES DE PARIS EST CRÉTEIL
ANNÉE ET TOME XC
FASC. 1
(151 de la collection)
e
PARIS
KLINCKSIECK
ISBN 978-2-252-04133-8
© Klincksieck, 2018
la présence, dans la bibliothèque de Philon, d’une édition intégrale de l’œuvre de Platon (voir
D. Lincicum, « Philo’s Library », op. cit. [n. 1], p. 113-114) ; si l’Éryxias était connu de Philon,
il est vraisemblable que ce dialogue faisait déjà partie de cette édition. Mais de quelle édition
s’agit-il ? À Alexandrie une organisation des dialogues en trilogies était proposée par Aristophane
de Byzance (D.L. III 61-62, l. 673-679 Dorandi), mais il est difficile de savoir s’il s’agissait d’une
véritable édition ; nous trouvons aussi les traces d’une activité d’Aristarque portant sur les dialogues.
Sur ces questions voir A. Carlini, Studi sulla tradizione antica e medievale del Fedone, Rome, 1972,
p. 3-30 ; F. Aronadio, op. cit. [n. 3], p. 15-16 et F. Schironi, « Plato at Alexandria : Aristophanes,
Aristarchus and the “Philological Edition” of a Philosopher », CQ, 55, 2005, p. 423-434. En outre,
le problème des rapports de Philon avec la tradition philologique alexandrine est encore débattu :
voir B. Wyss, « Philon und die Philologen », Biblische Notizen, 148, 2011, p. 67-83 et F. Siegert,
« Philon et la philologie alexandrine. Aux origines du fondamentalisme biblique », dans S. Inowlocki,
B. Decharneux (éds.), Philon d’Alexandrie. Un penseur à l’intersection des cultures gréco-romaine,
orientale, juive et chrétienne, Turnhout, 2011, p. 393-402.
5. Plant. 140-177. Le rôle de transition du De plantatione, avec une première section qui déve‑
loppe le thème du De cultivatione et une seconde qui introduit le De ebrietate, est bien souligné par
J. Pouilloux (éd.), Philon. De plantatione, Paris, 1963, p. 12-13. Ces traités étaient conçus par Philon
comme les parties d’un même discours (voir A. C. Geljon, D. T. Runia (éds.), Philo of Alexandria.
On Cultivation, Leyde/Boston, 2013, p. 1-3), ce qui explique l’extravagance du sujet de la seconde
partie si l’on considère le titre du traité ; voir le jugement de F.H. Colson, G. H. Whitaker (éds.),
Philo, III, Londres/New York, 1930, p. 207 (« the second part should be entitled περὶ μέθης, for it
deals with the vine only with respect to its fruit »).
6. La distinction est explicite en Plant. 173 : εἰ δ’ ὥσπερ ἐν δικαστηρίῳ μὴ μόνον ταῖς ἐντέχνοις
ἀποδείξεσιν, ἀλλὰ καὶ ταῖς ἀτέχνοις λεγομέναις χρηστέον (« Si, comme devant un tribunal, il
faut faire usage non seulement des démonstrations conformes aux règles de l’art, mais aussi de
celles qui, dit-on, échappent à ses règles »). Schéma synthétique chez I. Heinemann, (éd.) Philos
Werke. Vierter Teil, Breslau, 1923, p. 150-151.
7. Pour le problème de texte, qui n’affecte pas notre argument, voir D.T. Runia, « The Text of
the Platonic Citations in Philo of Alexandria », dans M. Joyal (éd.), Studies in Plato and the Platonic
Tradition, Aldershot/Brookfield, 1997, p. 267-268.
8. Traduction de J. Pouilloux, op. cit. [n. 3], légèrement modifiée.
9. P. Wendland (éd.), Philonis Alexandrini opera quae supersunt. Vol. II, Berlin, 1897, p. 168.
La note est reprise par I. Heinemann, op. cit. [n. 6], p. 186, n. 2 et le parallèle est enregistré par
W. Theiler, « Sachweiser zu Philo », dans L. Cohn, I. Heinemann, M. Adler, W. Theiler (éds.),
Philo von Alexandria. Die Werke in Deutscher Übersetzung, Berlin, 1964, p. 391. Aucune mention,
cependant, n’en est faite chez T.H. Billings, The Platonism of Philo Judaeus, Chicago, 1919 (voir A.C.
Geljon, D.T. Runia, « An Index Locorum to Billings, “The Platonism of Philo Judaeus” », StudPhilon,
7, 1995, p. 169-185). Le passage est cité dans l’étude des citations de Platon chez Philon proposée
par D.T. Runia, « The Text », op. cit. [n. 7], p. 267-268, qui manifeste quelques doutes, considérant
que « this time we have, it seems, a very loose allusion » et concluant que « the distance from the Platonic
model is in fact still quite large ». Après le catalogue de Lincicum, des notes sur l’allusion se trouvent
chez G.E. Sterling, « The Jewish Philosophy. Reading Moses via Hellenistic Philosophy According to
Philo », dans T. Seland (éd.), Reading Philo : a Handbook to Philo of Alexandria, Grand Rapids (MI)/
11. Aucun des autres ὁμολογουμένως νοθευόμενοι n’est présent dans l’index de Lincicum,
n’y figurent pas non plus les écrits suspectés par les Anciens, comme les Anterastai (mis en doute
par Thrasylle : D.L. IX 37, l. 35 Dorandi), l’Hipparque (suspect chez Élien, VH 8, 2), le Second
Alcibiade (attribué à Xénophon chez Athénée, XI 506c4-5). Pour ce qui concerne les Lettres, la
seule citée est la septième, que les savants tendent à attribuer à Platon (mais voir les arguments
contraires de M. Burnyeat, M. Frede, The Seventh Platonic Letter. A Seminar. Edited by D. Scott,
Oxford, 2015). L’allusion, repérée dans le fragment De Deo (4), n’est d’ailleurs pas sûre ; voir
F. Siegert « Le fragment philonien De Deo », in C. Lévy (éd.), Philon d’Alexandrie et le langage de la
philosophie, Turnhout, 1998, p. 198.
12. Par erreur, la référence renvoie à une inexistante page 221c du Cratyle chez F.H. Colson,
G.H. Whitaker (éds), Philo, II, Londres/New York, 1929, p. 500, et, telle quelle, elle est reproduite
chez D. Lincicum, « A Preliminary Index », op. cit. [n. 1], p. 156.
13. Pour un traitement général des problèmes relatifs aux citations de Platon chez Philon, voir
D. T. Runia, « The Text », op. cit. [n. 7], p. 286-288.
14. Nous pourrions comparer à ce cas l’attribution explicite à Platon des excerpta de l’Éryxias
préservés par Stobée : voir à ce sujet R. M. Piccione, « Gli pseudoplatonica nella tradizione dei
florilegi », dans K. Döring, M. Erler, S. Schorn (éds.), Pseudoplatonica, op. cit. [n. 4], p. 199.
15. Voir la notice de M. Narcy, « Prodicos de Céos », dans R. Goulet (éd.), Dictionnaire des
philosophes antiques. V : de Paccius à Rutilius Rufus, Paris, 2012, p. 1692-1693. Prodicos joue un
rôle similaire dans l’Axiochos, un dialogue probablement tardif, dans lequel le personnage se fait
le porte-parole de doctrines d’ascendance clairement épicurienne (Ax. 369c2-8 ; sur le sujet voir
A. Lohmar, « Sterblichkeit, Annihilation und die Furcht vor dem Tod : das Problem des Axiochos
und die Irrelevanz der epikureischen Thanatologie », dans Irmgard Männlein-Robert (éd.), Ps.
Platon. Über den Tod, Tübingen, 2012, p. 155-181) ; la tentative récente de fonder sur le λόγος du
sophiste dans l’Axiochos une reconstruction des Saisons de Prodicos, opérée par R. Mayhew (éd.)
Prodicus the Sophist. Texts, Translations, and Commentary, Oxford/New York, 2011 p. xxi-xxiii,
n’est pas convaincante. Des morceaux des deux dialogues sont insérés par Diels dans les dubia (DK
84 B 8 = Erx. 397c6-e10 ; B 9 = Ax. 366b5-c8). De l’Éryxias Mayhew tire deux fragments (T 86
= Erx. 397c6-e10 ; T 87 = Erx. 398c4-399a5) dont il remet fortement en doute l’authenticité, en
admettant les avoir insérés « for the sake of completeness » (p. 224) ; on mentionnera aussi la récente
édition d’André Laks et Glenn W. Most, qui placent les passages de l’Éryxias et de l’Axiochos dans
une section nommée « Later Reflections of Plato’s Portrait of Prodicus » : cf. A. Laks, G. W. Most
(éds.), Early Greek Philosophers VIII : Sophists, Part 1, Cambridge (Ma.)/Londres, 2016, p. 463-465.
Les voix discordantes n’ont pas manqué, comme W. Nestle, « Die Horen des Prodikos », Hermes,
71, 1936, p. 151-170, qui voudrait reconstruire les Ὧραι justement à partir de l’Éryxias – mais
principalement de sections du dialogue dans lesquelles Prodicos n’apparaît pas –, ou G.B. Kerferd,
« The “Relativism” of Prodicus », BRL, 37, 1954, p. 249-256, qui tente d’insérer la position relati‑
viste dans le cadre général de la pensée du sophiste. Aujourd’hui, les savants tendent à considérer
plutôt la fortune de Prodicos dans les deux dialogues comme une forme de réception de l’usage du
personnage par Platon. Le fait que Philon connaisse et paraphrase largement (Sacr. 21-45) le récit
attribué à Prodicos sur Héraclès « au carrefour » n’est d’aucune importance pour notre question :
il est plus probable qu’il lui est parvenu par l’intermédiaire du deuxième livre des Mémorables
de Xénophon, une œuvre qu’il évoque même ailleurs (cf. D. Lincicum, « A Preliminary Index »,
op. cit. [n. 1], p. 160-161).
16. Une influence de l’Euthydème sur l’auteur de l’Éryxias est admise par les savants. En parti‑
culier, l’argumentation de Critias en Erx. 396e4-397b7 est un élargissement de Euthd. 281b4-e2 ; en
outre, l’échelle des biens à travers laquelle Socrate parvient à affirmer que les plus savants parmi
les hommes sont aussi les plus riches (Erx. 393a7-394a5) suit les degrés qui, dans l’Euthydème,
remontent des biens matériels jusqu’à la σοφία (Euthd. 278e3-279c2). Dans la même section l’au‑
teur de l’Éryxias réemploie le « jeu » sur la double signification de εὖ πράττειν (Erx. 393e7-11 ;
cf. Euthd. 278e3-6 et 281b8-c3). De l’Euthydème provient aussi l’élément comique qui caractérise
les entrées brusques d’Éryxias (394a6) et Critias (395e6-7) et la représentation d’un Socrate
amené à éviter la dégradation du dialogue vers la λοιδορία (Erx. 397b9-c6 ; cf. Euthd. 288b3-4).
17. Une présence du stoïcisme dans l’Éryxias est soutenue par K.H. Hagen, Observationum
oeconomico-politicarum in Aeschinis dialogum qui Eryxias inscribitur, partes I-II, diss. Königsberg,
1822 : les arguments de celui-ci ont conduit les savants à s’interroger sur l’orientation philosophique
de l’auteur, un stoïcien (O. Schrohl, De Eryxia qui fertur Platonis, diss. Univ. Göttingen, 1901),
un éclectique (J. Souilhé (éd.), Platon. Œuvres complètes. Tome XIII – 3e partie. Dialogues apocryphes :
Du juste, De la vertu, Démodocos, Sisyphe, Éryxias, Axiochos, Définitions, Paris, 1930, p. 84-88), ou
un académicien engagé dans la polémique anti-stoïcienne (D. E. Eichholz, « The Pseudo-Platonic
Dialogue Eryxias », CQ, 29, 1935, p. 129-149 ; G. Gartmann, Der pseudoplatonische Dialog Eryxias,
diss. Univ. Bonn 1949, p. 75-89). Récemment, toutefois, les études ont mis au jour l’origine socra‑
tique et platonicienne des formulations présentes dans le dialogue : voir F. Aronadio (éd.), op. cit.
[n. 3], p. 69-73. Pour les précédents socratiques de la formulation stoïcienne des ἀδιάφορα voir,
outre l’Euthydème, le Charmide (161a2-b2) et la doctrine générale sur les ὄντα dans le Gorgias
(467e23) ; sur ces questions cf. F. Alesse, La Stoa e la tradizione socratica, Naples, 2000, p. 323-
331 et F. Trabattoni, « Socrate conteso : Platone e gli stoici », dans F. De Luise, A. Stavru (éds),
Socratica III. Studies on Socrates, the Socratics and the Ancient Socratic Literature, Sankt Augustin,
2013, p. 114-116.
18. Pour la doxographie stoïcienne contenue dans le septième livre de Diogène Laërce, je
renvoie à D. E. Hahm, « Diogenes Laertius VII : On the Stoics », ANRW II 36.6, p. 4145-65.
19. Au moins à partir de H. von Arnim, Quellenstudien zu Philo von Alexandria, Berlin, 1888,
p. 102-103 : « die Form, in welcher das Problem der Untersuchung : εἰ μεθυσθήσεται ὁ σοφός
aufgestellt wird, hat stoischen Charakter ».
20. Les passages sont recueillis dans la collection de von Arnim (Plant. 154 = SVF III 712 ;
Plant. 176 = SVF I 229, avec Sénèque), qui toutefois reconnaît dans le De plantatione l’influence
d’une source éclectique (H. von Arnim, Quellenstudien, op. cit. [n. 19], p. 134-140). Sur le problème,
est une source stoïcienne, ou au moins une source qui connaît les dévelop‑
pements de la quaestio dans la Stoa, il semble naturel de se demander si l’ou‑
verture de l’argumentation vers un discours général sur les indifférents n’est
pas un mouvement qui renvoie à la source elle-même, comme les exemples
choisis – parfaitement à leur place parmi les ἀδιάφορα codifiés dans les ré‑
pertoires traditionnels – semblent le montrer. Outre la richesse, la réputation
elle aussi est un composant récurrent dans les catalogues antiques : elle se
trouve parmi les indifférents dans les listes de Diogène (vii 104, ll. 744-748
Dorandi = SVF iii 119 ; vii 102, ll. 724-730 Dorandi = SVF iii 117), dans les
fragments de Zénon (Stob. Ecl. ii 57, 18 W. = SVF i 190) et d’Ariston (Sen.
Ep. xv 94, 8 = SVF i 359, 29-34 ; la traduction latine est ici honores). La δόξα
est insérée, avec le πλοῦτος, dans les προηγμένα stoïciens au cœur des
témoignages de Sextus Empiricus (M. xi 63 = SVF iii 122, 35-38), Diogène
Laërce (vii 106, ll. 769-770 Dorandi = SVF iii 127, 5-6) et Cicéron (Fin. iii 51
= SVF iii 129, 29-35 ; δόξα est ici traduit par gloria). Richesse et réputation
sont donc bien représentées parmi les choses auxquelles la doctrine stoï‑
cienne reconnaît canoniquement une valeur dépendant de la nature de qui
vient en contact avec eux : il s’agit d’exemples que Philon aurait pu trouver
dans la même source stoïcienne qu’il suivait pour le reste de l’argumenta‑
tion 21. Enfin, pour la juxtaposition de μέθη et χρήματα, il y a un parallèle
généralement négligé 22. Il s’agit d’un fragment des ὁμοιώματα d’Ariston de
Chios préservé par Stobée (Flor. iv 31d 110 = SVF i 397) où l’exemple de
l’οἶνος est employé pour illustrer les effets de la richesse :
en dialogue avec la reconstruction de von Arnim, voir Th. Bénatouïl, Faire usage : la pratique du
stoïcisme, Paris, 2006, p. 280-320 et C. Lévy, « Philo’s Ethics », dans A. Kamesar (éd.), The Cambridge
Companion to Philo, New York, 2009, p. 162 (« the presentation of the arguments brought forward
(…) attests to Philo’s in-depth knowledge of the discussions taking place within Stoicism »). Pour une
comparaison entre les positions de Philon et Sénèque et le syllogisme de Zénon, voir Th. E. Phillips,
« “Will the Wise Person Get Drunk ?” The Background of the Human Wisdom in Luke 7 : 35 and
Matthew 11:19 », JBL, 127/2, 2008, p. 387-394 ; pour les rapports entre la pensée philonienne
sur le plaisir et la doctrine stoïcienne, cf. A. Le Boulluec, La réflexion de Philon sur le plaisir, dans
C. Lévy (éd.), Philon d’Alexandrie, op. cit. [n. 11], p. 147-151.
21. Il est peut-être significatif d’observer que, dans le catalogue des œuvres de Sphairos conservé
par Diogène Laërce, les traités περὶ πλούτου et περὶ δόξης sont proches (D.L. VII 178, ll. 42-43
Dorandi = SVF I 620, 12-13). Un περὶ δόξης figure aussi parmi les œuvres attribuées à Cléanthe
(D.L. VII 175, l. 117 Dorandi = SVF I 481, 22) ; sur la δόξα comme indifferens Cléanthe avait
aussi écrit des vers connus par Clément d’Alexandrie (Strom. V 3, 17 = SVF I 559 et Strom. V 14,
110 = SVF I 560 ; voir N. Festa (éd.), I frammenti degli stoici antichi, Vol. II : Aristone, Apollofane,
Erillo, Dionigi d’Eraclea, Persèo, Cleante, Sfero, Bari, 1935, p. 172-173). Dans l’Hymne à Zeus,
parmi les raisons de la ruine des hommes δύσμοροι qui ne suivent pas le λόγος, sont citées en
séquence δόξα et κερδοσύνη (SVF I 537, 23-24), voir J. C. Thom (éd.), Cleanthes’ Hymn to Zeus,
Tübingen, 2006, p. 130-138.
22. Le seul à le citer à ce propos est Th. Bénatouil, op. cit. [n. 20], p. 300-303.
23. L’usage du vin était aussi le thème d’un écrit d’Antisthène dont on conserve le titre περὶ
οἴνου χρήσεως (SSR V A 41, l. 64 = D.L. VII 18, l. 224 Dorandi) ; cf. S. Prince (éd.), Antisthenes
of Athens. Texts Translations and Commentary, Ann Arbor 2015, p. 158.
24. Sur les ὁμοιώματα et leur attribution, voir A. M. Ioppolo, Aristone di Chio e lo stoicismo
antico, Naples, 1980, p. 50-52 et 308-312.
25. Dans l’Éryxias le jeu étymologique est explicite et exploité par l’auteur avec une certaine
tendance au maniérisme : cf. Erx. 401b7-8 (λοιπὸν ἂν εἴη σκέψασθαι τὰ πρὸς τίνα χρείαν
χρήσιμα χρῆσθαι χρήματά ἐστιν : « il reste à examiner à quoi servent vraiment les choses qui sont
utiles ») et surtout 402c8-d1 (καὶ ὅτι τῶν χρησιμωτάτων ἐστὶν πρὸς τοῦτο χρήματα τὰ χρήσιμα :
« et que les richesses font partie des choses qui sont les plus utiles pour cela »).
26. Comme on le trouve chez D. Lincicum, « A Preliminary Index », op. cit. [n.1], p. 156.
27. Voir F.H. Colson (éd.), Philo. VII, Londres/Cambridge (Mass.), 1937, p. 615-616. L’origine
du motif est identifiée par I. Perysinakis, « Hesiod’s Treatment of Wealth », Métis 1, 1986, p. 98-100
dans l’image d’Hésiode (Thgn. 969-974), Πλοῦτος qui erre sur terre et en mer donnant ὄλβος à celui
qui, par hasard, tombe sur lui (τῷ δὲ τυχόντι) ; pour une étude sur les τόποι liés à la richesse dans
la poésie archaïque et classique, voir S. Coin-Longeray, Poésie de la richesse et de la pauvreté. Étude
du vocabulaire de la richesse et de la pauvreté dans la poésie grecque antique, d’Homère à Aristophane :
ἄφενος, ὄλβος, πλοῦτος, πενία, πτωχός, Saint-Étienne, 2014, p. 102-136.
Marco Donato – Philon lecteur de l’Éryxias ? Marco Donato – Filone lettore dell’Erissia?
(p. 69-79) (p. 69-79)
en est fait (397e3-12). En vérité, il n’est pas del dialogo, dal momento che l’argomento di
nécessaire d’imaginer un souvenir précis du Filone si colloca agevolmente sullo sfondo
dialogue pseudo-platonicien, parce que l’argu- della tradizione stoica e della dottrina degli
ment de Philon dépend plutôt de la doctrine indifferenti.
des indifférents dans la tradition stoïcienne.
Lorenzo Ferroni, Luca Gili – Non existant, Lorenzo Ferroni, Luca Gili – Non-existent but
mais potentiellement en acte. Aristote potentially actual. Aristotle on plenitude
sur le Principe de Plénitude (Mét. Θ 3-4, (Met. Θ 3-4, 1047b1-6) (p. 81-114)
1047b1-6) (p. 81-114)
Isabelle de Meyer – L’étymologie du mot grec Isabelle de Meyer – The etymology of the
θεός « dieu » (p. 115-138) Greek word θεός “god” (p. 115-138)
Après avoir brièvement discuté toutes First, I will give and discuss a short over-
les théories avancées sur l’étymologie du view of all the proposed theories for the etymo
mot grec θεός, une analyse morphologique logy of the Greek word θεός. Next, a detailed
approfondie indique que θεός vient de i.-e. morphological analysis will show that θεός
*dhh1-s-ó-s : un nom thématisé par un suffixe comes from Indo-European *dhh1-s-ó-s : a the-
possessif *-ó- ajouté à un thème en -s- athé- matic possessive derivative in *-ó-, formed on
matique – dont l’absence d’un suffixe au an athematic s-stem – in which the absence
degré o indique plutôt un neutre protéro of a suffix in the o-grade points to a neuter
dynamique –, dérivé de la racine verbale i.-e. proterodynamic stem – , derived from the Indo-
*dheh1- « poser, placer ». Sémantiquement, un European verbal root *dheh1- “to put, to place”.
développement a eu lieu à partir de « poser, A semantic development took place from “to
placer », à « ce qui est posé / bâti ; ce qui est put, to place”, to “what has been put/built; what
posé / bâti dans un lieu sacré ; divin ; sacré », has been put/built in a sacred place; divine;
à « ce qui est caractérisé par ce qui est posé sacred”, to “what has been characterised by
/ bâti dans un lieu sacré ; par le divin ; par what has been put/built in a sacred place; by
le sacré ». Cette désignation souligne, en the divine; by the sacred”. This connotation,
remplaçant le mot classique pour « dieu », replacing the classical word for “god” i.e. a
c’est-à-dire un dérivé de i.-e. *dyew-, l’oppo- derivation of Indo-European *dyew-, empha-
sition entre les dieux et les hommes. Fina- sizes the opposition between the gods and the
lement le thème *dheh1-s indique l’existence humans. Finally, the stem *dheh1-s reflects the
d’un thème religieux commun aux proto- existence of a common religious Proto-Indo-
indoeuropéens : « le (lieu) sacré », qui jouait European stem: “the sacred (place)”, that played
un rôle primordial dans l’approche religieuse a primordial role in the religious approach of
des indoeuropéens. the Indo-Europeans.
Jordi Pià Comella – Prière et « appropria- Jordi Pià Comella – Prayer and internali
tion » des dogmes dans le stoïcisme impé- zation of dogmas in Roman Imperial stoi-
rial romain (p. 139-164) cism (p. 139-164)
Si les stoïciens impériaux ne considèrent Imperial stoics see neither their doctrine
pas leur doctrine comme une vérité révélée et as sacred truths nor their masters as wise men;
sacrée, ils confèrent cependant une dimension nevertheless, Stoic ascetism does involve a re-
religieuse à l’ascèse morale : conscients que ligious dimension and prayers were used for
la simple reprise des arguments théoriques psychagogic purposes by authors who were
de leur école n’est pas suffisante pour assu- conscious that theoretical arguments alone
rer la conversion de leur public, ils recourent could not convert their audience. This article
à la prière comme un moyen psychagogique aims to show that the religious celebration of
puissant. Cet article tente de montrer que la God, which appears rarely in Seneca and oc-
célébration religieuse du Dieu cosmique, em- casionally in Epictetus, is so pervasive in the
bryonnaire chez Sénèque, ponctuelle chez work of Marcus Aurelius that the continuous
Épictète, tend à se disséminer dans les Pensées, meditation of stoic principles sounds like an
si bien que chez Marc Aurèle la rumination hymn to the glory of God.
permanente des principes stoïciens s’appa-
rente à un chant continu à la gloire du logos
divin.
Benoît Sans – Polybe, Tite-Live et la « bataille Benoît Sans – Polybius, Livy and the “Ebro
de l’Èbre » (Pol. 11, 31-33 ; Liv. 28, 31, battle” (Pol. 11, 31 – 33 ; Liv. 28, 31, 5 –
5-34, 12) (p. 165-190) 34, 12) (p. 165-190)
Cet article consiste en une étude compa- This paper is a comparative study, from
rée, sur le plan rhétorique, des récits fournis a rhetorical point of view, of the narratives
par Polybe et Tite-Live pour l’épisode de la that Polybius and Livy provide for “the Ebro
« bataille de l’Èbre » (Pol. 11, 31-33 ; Liv. 28, Battle” (Pol. 11, 31-33; Liv. 28, 31, 5-34, 12)
31, 5-34, 12) lors de la reconquête de l’Es- during Scipio’s recapture of Spain (Second
pagne par Scipion durant la seconde guerre Punic War). The study unveils the conclusions
punique. Il s’attache à dégager les conclusions towards which each author guides his readers
vers lesquelles tendent les deux représenta- and the strategies that are used to persuade
tions de l’événement et les procédés utilisés them.
pour y faire adhérer le lecteur.
Gerd Van Riel – Le manuscrit Parisinus Gerd Van Riel – Manuscript Paris. Coislin.
Coislin. 322 (sigle C) du Commentaire sur 322 (Siglum C) of Proclus’ Commentary
le Timée de Proclus : la copie d’une recen- on Plato’s Timaeus : a Copy of a Byzantine
sion byzantine (p. 191-223) Recension of the Text (p. 191-223)
Le manuscrit Parisinus Coislin. 322 (sigle C The ms. Parisinus Coislin. 322 (siglum C
de l’édition d’E. Diehl) a toujours été consi- in the Diehl edition) has always been consi
déré comme le meilleur témoin du texte du dered as the best witness to the text of Proclus’
Commentaire sur le Timée de Proclus. Il est Commentary on the Timaeus. Its status is thought
censé être le seul représentant d’une famille to be that of a single representative of a sepa
à part, remontant à une translittération, voire rate family in the transmission of the text,
à une édition tardo-antique du texte, dif- deriving from a separate transliteration or
férente de, mais en tout cas supérieure à la even a late antique edition, over against all
deuxième famille, laquelle regroupe tous les the other manuscript witnesses of Proclus’ In
autres témoins de la tradition manuscrite. Un Timaeum, which belong to a “second family” of
examen détaillé de toutes les variantes tex- inferior quality. However, a careful analysis of
tuelles montre pourtant à l’évidence que le all textual variants contained by ms. C reveals
prestige attribué au manuscrit C ne peut être that the prestigious position of the manuscript
défendu. Il n’est pas le représentant d’une fa- is untenable. It does not belong to a separate
mille séparée, ni un témoin privilégié du texte family, nor is it a privileged witness to the
de Proclus. Toutes les variantes s’expliquent text. All of its variant readings can be shown
comme des réactions au texte transmis par les to be reactions to the text transmitted by the
témoins de la « deuxième famille », comme on members of the “second family”. They are to
la nomme, ce qui a pour conséquence que la be seen as conjectures rather than as more
grande majorité des variantes sont des conjec- authentic readings. Hence, the ms. Coislin 322
tures. Le Coislin. 322 n’est donc pas un témoin is not a precious witness to the text of Proclus.
précieux du texte. C’est une copie d’une re- It is a copy of a byzantine recension, probably
cension byzantine, probablement réalisée par made by George Pachymeres.
Georges Pachymère.
Régis Caruso
Théorie et enseignement de l’antithèse rhétorique en Grèce depuis
FA S C I C U L E 1
l’époque classique jusqu’aux débuts de la période byzantine...................... 7
Marco Donato DE
PHILOLOGIE
Philon lecteur de l’Éryxias ?........................................................................... 69
Lorenzo Ferroni, Luca Gili
Non-existent but potentially actual. Aristotle on plenitude (Met. Θ 3-4,
1047b1-6)........................................................................................................ 81
Isabelle de Meyer
L’étymologie du mot grec θεός « dieu ».......................................................... 115
Jordi Pià Comella DE LITTÉRATURE ET D’HISTOIRE ANCIENNES
Prière et « appropriation » des dogmes dans le stoïcisme impérial romain. 139
Benoît Sans
Polybe, Tite-Live et la « bataille de l’Èbre » (Pol. 11, 31-33 ; Liv. 28, 31,
5-34, 12).......................................................................................................... 165
Gerd Van Riel
Le manuscrit Parisinus Coislin. 322 (sigle C) du Commentaire sur le
REVUE DE PHILOLOGIE
Timée de Proclus : la copie d’une recension byzantine................................. 191
TOME 90
2016
FASCICULE 1
TOME 90
ISSN 0035-1652
ISBN 978-2-252-04133-8
KLINCKSIECK