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Lecture : Jeu de mots et festin de grands.

Le festin offert par monsieur le préfet avait été des plus copieux et on imaginait sans peine ce
qu’allait être celui organisé par Monsieur le Ministre à la maison-mère à la veille de Noël : des tables
richement garnies de poulets rôtis bien dorés, de moutons entiers en méchoui, de pigeons à
l’étouffée, de lapins brochés, de lions… non pardon, pas de lions car chez nous tous les lions sont
rouges de colère ; et puis si on les tue, ils cessent de rugir le mbarawacc1 des héros ; de toutes
façons, pour « anthropo2 » qu’on soit, on ne mange pas de l’oncle. Adieu donc bonne chère en chair
de lion !

Pourtant, le jour dit, les jardins du palais grouillent d’un monde bariolé, cosmopolite et
cosmopolitique, d’hommes et de femmes dans tous leurs atours3. Des fonctionnaires, écrivains,
officiers et intellectuels tirés à quatre épingles-y côtoient un monseigneur en robe blanche, des
imams à larges boubous empesés4 et des griots des grands jours, des femmes en vert, des femmes en
jaune, des femmes en rouge et d’autres en vert-jaune-rouge symbolisant la nation en marche.

Certains ont dans leurs sacs ou sous leurs boubous des sachets en plastique où ils fourreront, tout à
l’heure, en secret, pâtisseries, gigots d’agneau et poulets entiers pour la famille.

Les éclats de rires, les plaisanteries, les brins de causettes donnent un vrai tohu-bohu. On se jauge5,
on se juge ; les uns sont là pour qu’on les voie, les autres pour prier Monsieur le Ministre de tenir une
vieille promesse ou tout simplement afin de demander une aide pour la construction ou
l’achèvement du toit d’une maison dont ils ignoraient l’emplacement.

A neuf heures, on commence à s’inquiéter : pas de nappes brodées, pas de serveurs en livrées, pas
même l’odeur envoûtante de nos si bons mets. On bavarde moins fort, puis plus du tout ; on consulte
les montres, les yeux profonds, le ventre creux ; on cesse de circuler et le lieu devient comme un
jardin de spectres.

A dix heures, enfin un griot aperçoit une silhouette bien connue, frappe sur le petit tam-tam caché
dans son boubou, sous son aisselle, et annonce l’arrivée du président. On se tient droit, on rectifie sa
cravate, on corrige le pli du vêtement sur l’épaule et le silence se fait.

Il est fâché, Monsieur le président, mais il n’en fait rien paraître devant ce parterre de « panthéons6
de notre civilisation » : tout sont des Africains, ses frères, ses plus-que frères. Alors le président parle
d’une voix maudiriez mais reans

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