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LA COMMERCIALISATION
DES PRODUITS FINANCIERS
MICHEL PRADA*
L
a commercialisation des pro- blement faible, rend plus délicate la
duits financiers auprès des mesure du risque pour l’épargnant ;
épargnants est devenue, pour - en second lieu, l’offre émanant des
les régulateurs, un sujet majeur en prestataires, si elle permet une appro-
raison de la nouvelle importance de che plus patrimoniale de ces sujets,
l’orientation de l’épargne des ménages revêt un caractère global et contribue
vers les emplois à long terme (elle- à brouiller la frontière entre les pro-
même liée au développement de l’éco- duits et les secteurs (les produits de
nomie de marché et aux évolutions gestion collective tendent ainsi à se
démographiques) et en raison du déve- confondre avec les produits d’assu-
loppement de l’offre transfrontière de rance-vie) ;
produits de plus en plus sophistiqués. - enfin, l’élargissement de l’offre
Dans les pays développés, touchés transfrontière comme l’évolution de la
par le vieillissement de leur popula- structuration de l’industrie, qui favo-
tion, les ménages anticipent, en parti- rise la dissociation entre le producteur
culier, la baisse du niveau de vie liée à et le vendeur de produits financiers,
la retraite et à l’augmentation des dé- sont autant d’éléments propres à
penses de santé non prises en charge. opacifier le choix de l’investisseur et à
Cependant, investir devient pour eux créer de potentiels cas de misselling.
un exercice difficile pour plusieurs Ces évolutions s’inscrivent, en outre,
raisons : dans le contexte de l’éclatement de la
- tout d’abord, la complexité grandis- bulle Internet et des scandales qui,
sante des produits, liée en partie à la d’Enron à Parmalat, ont durablement
recherche de rendements élevés dans affecté la confiance dans les marchés.
une période de taux d’intérêt dura- Aussi bien, l’encouragement et la
Les Pays-Bas et l’Australie ont opté croiser deux types de disparités, celles
pour une réforme institutionnelle qui relatives aux secteurs et celles relatives
a permis d’assurer la comparabilité et aux pays. Si, comme on vient de le
la convergence de la réglementation voir, la réduction des disparités par
relative aux produits et aux règles de secteur est un constat partagé, le
conduite, tout en maintenant la diffé- niveau d’exigences fait l’objet de
renciation entre régulation prudentielle débats qui prennent une acuité parti-
et régulation de marché. culière en Europe.
Par-delà l’architecture institution-
nelle de la régulation qui doit prendre
en compte, notamment, la taille et LES DIFFÉRENCES
les spécificités du marché concerné, D’APPROCHE
c’est la clarté et la cohérence des mis- DES RÉGULATEURS
sions des régulateurs qui importent.
À cet égard, la solution du régulateur
financier unique, mise en œuvre, par La commercialisation des produits
exemple, en Grande-Bretagne, en Alle- financiers se heurte aussi, compte tenu
magne, ou encore au Japon, n’est pas du développement des activités
sans soulever de difficiles questions, transfrontières, aux différences existant
d’autant plus que, dans ces pays, régu- entre les marchés, notamment dans la
lation prudentielle des intermédiaires perception du niveau raisonnable de
financiers et régulation de marché ont protection des investisseurs, lequel dé-
été réunies. L’avantage du one stop shop pend de critères sociologiques liés à la
doit alors être mis en regard du risque maturité du marché et au niveau d’édu-
de possibles conflits d’intérêts et des cation des investisseurs, de même qu’à
problèmes de gouvernance que pose la la perception du risque. La différence
grande taille de telles institutions. d’approche par les régulateurs peut aussi
Au plan international, la probléma- résulter de la structuration de l’activité
tique de la disparité des réglementa- de leur place financière, selon qu’elle
tions a également été identifiée. Le Joint vise principalement à exporter des pro-
Forum1 vient ainsi d’entreprendre duits financiers et donc à attirer les
une étude sur la commercialisation prestataires de tous horizons ou bien à
des produits financiers de tous les répondre aux exigences d’un bassin
secteurs. Ces travaux visent à analyser, d’épargne important. Au sein de
dans un premier temps, les différentes l’Union européenne, il est nécessaire
approches en termes de règles de de trouver un équilibre entre la libre
conduite ainsi que les différents canaux circulation des produits et la création
par lesquels passe la commercialisation. d’un marché unique, tout en préser-
La première étape devrait être une étude vant la capacité du régulateur à édicter
comparative de l’état des lieux des dili- les règles qui lui semblent propres à
gences accomplies par les prestataires assurer la protection des épargnants,
des trois secteurs en matière d’infor- et ce, en fonction de leurs habitudes
mation des clients. en matière d’investissement et de la
Les travaux du Joint Forum vont maturité du marché.
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LES GRANDS DOSSIERS D’ÉTHIQUE FINANCIÈRE
LA RÉGULATION DES INDUSTRIES FINANCIÈRES
NOTES
1. Comité qui rassemble des représentants des organisations internationales des régulateurs, à savoir, le
Comité de Bâle, l’Association internationale des régulateurs d’assurance et l’Organisation internationale
des commissions de valeurs (OICV).
2. Cette directive étend, d’une part, le champ des produits pouvant bénéficier d’un passeport européen et vise,
d’autre part, à créer un cadre commun pour les sociétés de gestion opérant dans l’Union européenne.
3. Organisation précédant le Committee of European Securities Regulators - CESR.
4. La directive Prospectus a pour objectif d’améliorer la qualité de l’information fournie aux investisseurs par
les sociétés qui souhaitent lever des capitaux dans l’Union européenne.