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Introduction
Le délire est un trouble du contenu de la pensée caractérisé par la permanence d’idées délirantes. Celles-ci sont
en rapport avec une réalité propre au patient, réalité différente de la réalité commune, idées auxquelles le sujet
attache une conviction absolue, non soumise à la preuve et à la démonstration, non rectifiable par le
raisonnement.
Pour certaines populations, une évidence culturelle, religieuse ou historique peut apparaitre comme un délire
pour une autre population (Ex : l’apparition miraculeuse de Roi Mohammed V sur la lune en 1954).
NB : selon la nosographie américaine (DSM IV), le terme du trouble délirant désigne la paranoïa.
Intérêts du cours :
Sémiologie
Sept étapes précisant les caractéristiques du syndrome délirant :
Début du délire,
Thèmes délirants,
Mécanismes,
Degré de systématisation,
Mode d’extension,
Degré de conviction,
Participation émotionnelle.
Début du délire
Modes d’entrée
Aigu : « coup de tonnerre dans un ciel serein », délire d’emblée exprimé, parfois précédé par des
prodromes (bizarreries comportementales, anxiété, troubles du sommeil, tristesse, euphorie…).
Progressif : installation en quelques jours voire semaines, avec propos et comportements bizarres,
changement des habitudes, anxiété, perplexité, méfiance, irritabilité, repli sur soi, accentuation de traits
de la personnalité.
Ancienneté
Evénements importants dans la vie du sujet ou la vie familiale : échec ou succès, rupture sentimentale,
décès d’un proche, stress émotionnel, traumatisme psychique…
Contexte de puerpéralité : grossesse, accouchement, fausse couche, avortement…
Changement de vie : déménagement, départ d’un proche, nouvelle profession, voyage…
Prise médicamenteuse : corticoïdes, amphétaminiques, hormones thyroïdiennes…
Date religieuse, date historique…
Facteur organique : début d’une maladie somatique, fièvre, hyperthyroïdie…
Toxicité
Le délire peut varier au cours de la journée, c’est le cas de la bouffée délirante aigue et de la confusion où on
note un délire fluctuant à recrudescence vespérale et dans le noir.
Thèmes du délire
La thématique délirante constitue l’objet du discours, l’ensemble des idées sur lesquelles le patient porte sa
conviction délirante. Les thèmes peuvent être uniques ou associés.
Persécution
Conviction d’être en proie à un monde hostile, objet d’agressions, victime de préjudices, sujet d’allusions
malveillants, cible d’une surveillance ou d’une conspiration.
Origine :
o Floue : mondes hostiles, forces célestes, gens, pouvoir politique…
o Précise : persécuteur désigné (ex : le paranoïaque nomme telle personne comme étant à
l’origine de son préjudice), agressivité +++, indication à l’hospitalisation.
Type :
Persécution passive : traduction de la pensée à des persécutions, patient = persécuté (ex : la
paranoïa sensitive).
Persécution active (centripète) : traduction de l’intention de diriger des persécutions contre
autrui, patient = persécuteur.
Persécution méritée (centrifuge), retrouvée surtout dans la mélancolie.
Mise en évidence :
Persécution passive :
o Difficile : méfiance et rareté des propos, le patient pèse ses paroles,
o Formule indirecte ex : « vous savez tout aussi bien que moi », « ils en ont parlé à la
télévision…»
o Formule directe, certaines personnes agissent contre lui…
Persécution active :
o Expression des tendances à poursuivre les autres à son tour = idées de revendication et
de vengeance.
Mégalomanie :
Tendance à la surélévation de soi ; des idées de richesse, de puissance, de notoriété, d’avoir de multiples
projets. Ce thème est retrouvé essentiellement dans les états maniaques et dans l’atteinte organique telle la
neurosyphilis. Souvent, les thèmes de grandeur sont intriqués à ceux de persécution "on m'en veut car je suis
génial", filiation et mystique.
Influence :
Sentiment qu’a le patient d'être agi, commandé par une force extérieure à sa volonté; non seulement le sujet
n'est pas maître de ses actions ou de ses sentiments, mais ils lui sont imposés. La thématique d'influence n'a
pas de spécificité particulière mais elle rentre souvent dans le cadre d'un automatisme mental.
Mystique :
Thèmes en rapport avec les paroles des Ecritures, une mission divine à accomplir, l’existence de forces occultes
extérieures.
Damnation :
Exprimée sous formes diverses : manquer à ses devoirs, commettre des fautes, peur de la punition divine, la
crainte de l’enfer, vécue comme châtiment des fautes commises, s’observant surtout dans la mélancolie.
Possession diabolique :
Conviction d’être possédé par le diable, qui le persécute, le pousse à dire ou à faire des choses contraintes à la
religion.
Filiation :
Conviction délirante d’être issu d’une ascendance illustre, souvent royale, aristocratique, divine, célébrité.
Revendication :
Jalousie :
Sentiment de frustration, de duperie ou d’abandon à l’égard de l’amour et de la possession d’un être investi
affectivement. Le patient imagine le concurrent et l’inconduite, puis pose leur réalité comme une évidence sur
laquelle se pose toute une conduite d’inquisition et de soupçons; délires paranoïaques, délires de jalousie
alcooliques et les démences.
Erotomanie :
Illusion délirante d’être aimée, généralement par un personnage jouissant d’un prestige avec lequel le patient
n’a que des relations lointaines voire aucune. Thème rencontré dans les délires paranoïaques.
Hypochondrie :
Conviction de transformations corporelles, de présence d’êtres ou de corps étrangers dans son propre corps
(ex : conviction de présence de vers dans le cerveau avec passage à l’acte pour arrêter la souffrance). Parfois,
une altération vague de toutes les fonctions organiques, une conviction d’être atteint d’une maladie incurable,
modification d’un organe…
Négation d’organes :
Conviction délirante d’absence ou de mort d’un ou plusieurs organes de son propre corps (syndrome
mélancolique, syndrome de Cotard).
Négation
Immortalité
Enormité
Damnation
Négativisme
Auto-agressivité
Syndrome de COTARD
Auto-accusation :
Jugement défavorable sur sa propre personne : idées d’incapacité, d’indignité, de culpabilité, de corruption, de
remords, de désespoir, de tromperie. On peut avoir d’autres idées associées à l’auto-accusation : craintes de
ruine, d’accusation, de châtiment, d’emprisonnement, de supplice, de damnation, de condamnation… è
syndrome mélancolique.
Enormité :
Idées d’immortalité : le patient ne va pas mourir, son corps n’est concerné ni par la vie ni par la mort è
idées pseudo-mégalomanes car ton de gémissement sans orgueil avec idée de souffrance éternelle.
Idées d’énormités proprement dites : associant un caractère spatial à l’immortalité dans le temps :
taille gigantesque, immense, tête va toucher les étoiles… (Sd de Cotard)
Erotique :
Ces idées érotiques peuvent se manifester soit dans un contexte d’exaltation, d’excitation, de satisfaction
exagérée, exprimé avec une désinhibition comportementale, soit dans un contexte péjoratif, notamment des
idées de viol en rapport avec des hallucinations cénesthésiques génitales. Ce thème est essentiellement
spécifique de la manie et de l’hystérie.
Filiations imaginaires, scenario fantastique avec mise en scène de personnages imaginaires, d’animaux et de
créatures étranges, relation avec une vie extraterrestre…
Mécanismes
Modalités d'élaboration de la thématique délirante : hallucinatoire, interprétatif, intuitif et imaginatif.
Hallucinations
Interprétation
Caractérisée par :
L’attribution d’une explication erronée à une perception exacte traduisant ainsi une distorsion du
jugement, rigide, ne s’adaptant pas au contexte de la situation et inaccessible à la critique.
La tendance à la reconstitution, à partir de faits exacts, d’un scenario conforme au délire avec un point
de départ réel et un faux raisonnement.
Intuition
C’est une idée fausse admise sans vérification ni raisonnement logique en dehors de toute donnée objective ou
sensorielle.
Ex : Comment savez-vous que vous êtes le prophète? - Je le sais, c'est comme ça, je le sens.
Imagination
C’est une fabulation ou invention où l'imagination est au premier plan et le sujet y joue un rôle central. Elle
caractérise essentiellement les délires paraphréniques.
Délire systématisé : ordonné, plausible et compréhensible. Ce sont des idées agencées avec une
certaine cohérence et qui peuvent entraîner l'adhésion d'autrui. La thématique est souvent unique et le
mécanisme est souvent interprétatif.
Délire non systématisé : mal organisé, incohérent, flou avec un polymorphisme des thèmes et des
mécanismes et en l'absence d'enchaînement logique entre eux.
Degré d’extension
On distingue :
Participation émotionnelle
Elle dépend du degré de conviction et de l’intensité du délire. Plus la participation émotionnelle est grande, plus
il faut craindre un passage à l’acte.
Autres caractéristiques
Congruence avec l’humeur :
o Délire congruent à l’humeur : délire dont le thème va dans le même sens que la thymie (ex : idée
de ruine, syndrome de Cotard, délire de persécution, de négation dans la mélancolie ; délire de
grandeur dans la manie).
o Délire non congruent à l’humeur : le thème n’a pas de lien direct avec l’humeur triste ou
expansive.
Symptômes ou syndromes associés : doivent être recherchés systématiquement : troubles
thymiques, syndrome dissociatif, confusion, etc. ( éléments d’orientation étiologique).
Evolution : aigue, chronique (>6 mois), parfois un enkystement du délire (délire réduit sans disparition
totale).
Diagnostic différentiel
A l’exception des difficultés liées au contexte culturel et religieux ainsi qu’aux éléments de réalité, le diagnostic
différentiel du délire se pose essentiellement avec :
L’erreur : corrigible,
Mythomanie : falsification de la réalité pratiquée dans l’objectif de séduire et de se faire valoir,
Idées obsédantes : idées s’imposant au sujet qui en reconnait le caractère absurde,
Idées fixes : acceptables.
Etiologies
Tout état délirant implique :
Conclusion
Syndrome fréquent en pathologie psychiatrique.
Diagnostic étiologique d'un délire passe par une bonne analyse sémiologique.
Penser toujours à l'organicité en cas de coexistence d'éléments confusionnels.
Traitement repose essentiellement sur les neuroleptiques.