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Revue Canadienne de Géographie Tropicale

Canadian Journal of Tropical Geography


RCGT (En ligne) / CJTG (Online)
ISSN : 2292-4108
Vol. 1(1) : 22-35
laurentienne.ca/rcgt

La construction d’un territoire Bororo dans la caldeira du mont Manengouba


The construction of a Bororo territory in the Manengouba caldeira

ETAME SONE Diabe


@ 2014 RCGT-CJTG Tout droit réservé /All rights reserved

Résumé:
Les Bororos, éleveurs nomades s’installent progressivement dans la caldeira du mont Manengouba (dorsale
camerounaise) pour y mener des activités agropastorales. On constate que depuis plusieurs décennies leur nombre
va croissant et leur territorialité devient de plus en plus perceptible. Il y a lieu de s’interroger sur l’opportunité de la
construction d’un territoire Bororo dans une caldeira. La méthode de recherche utilisée repose sur les observations
de terrain. Une enquête dirigée et semi-dirigée a permis d’obtenir des données primaires sur les Bororos et les
personnes ressources. Les données secondaires ont été obtenues à partir des documents administratifs
disponibles. Le traitement des données a été à la fois manuel et numérique. Les résultats ont été présentés sous
forme de tableaux, d’histogrammes, et de diagrammes cercle. Les relevés de terrain ont été combinés aux
données statistiques pour des représentations cartographiques. L’utilisation délétère de la caldeira et ses environs
par les Bororo soulève des inquiétudes parmi les populations bakossi.

Abstract:
The Bororos, nomadic breeders settle progressively in the Manengouba Caldera that belongs to the Cameroon trend
for some agro pastoral activities. It’s has been noticed that for some decades now, their number have been
increasing and their territoriality becomes more audible. There is a ground to question the opportunity of creating a
Bororo’s territory in a Caldera. The method of research used is based on the field observations, a direct and semi-
direct investigation for primary data collection, on a very representative sample of the Bororos and resource
persons. The secondary data have been gotten from the available administrative documents. The treatment of the
data was at the same time manual and numeric. The results have been presented in tables, pictures, histograms,
and pie charts. Field observation combined with statistical data favoured cartographic representation. The harmful
use of the caldera and its surroundings by the Bororos raises concerns among Bakossi populations.

Mots clés / Keywords

Caldeira, Bororo, Territoire, Survie, Risques naturels


Caldeira, Bororo, Territory, Survive, Natural hazards.

INTRODUCTION
La question des Bororos des hautes terres de l’Ouest du Cameroun retient toujours l’attention des
scientifiques, car elle expose au grand jour la crise du nomadisme-pastoral et la tentative de
sédentarisation des Bororos en quête d’espace vital (Tazo et Haman, 2002). La présente étude porte sur
l’analyse de la nouvelle territorialité en pays Bakossi, de cette minorité ethnique traditionnellement
connue comme éleveur nomade. Cette nouvelle territorialité qui s’affirme dans l’une des caldeiras du
mont Manengouba soulève la question suivante : les Bororos peuvent-ils s’installer définitivement dans
ce fragile espace géographique à la fois riche et exposé aux risques géodynamiques internes? La volonté
manifeste de se construire un territoire dans un des espaces géographiques les plus sacrés chez les
Bakossi et les Mbos devrait dès à présent être l’objet de clarifications et d’entente mutuelle, car aux
risques géodynamiques internes s’ajoutent d’éventuels conflits ethniques liés à l’utilisation et à la gestion
des ressources naturelles.

RCJT/CJTG, Université Laurentienne/Laurentian University, Département de géographie/Geography department, Sudbury, Ontario,


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Partant des observations de terrain, d’enquêtes dirigées et semi-dirigées ainsi que de la lecture des
documents administratifs, cet article tente de cerner la territorialité bororo et ses enjeux en pays Bakossi.

Seront abordés tour à tour le cadre spatial, le cadre conceptuel, le cadre méthodologique, les facteurs de
construction de la territorialité bororo, les mécanismes de construction de la territorialité bororo, la
diversification des activités économiques et l’amélioration du niveau de vie, la construction territoriale
hypothétique et enfin les stratégies adoptées, leurs limites et les perspectives d’avenir.

CADRE SPATIAL
Le mont Manengouba, un des sommets de la dorsale camerounaise, culmine à 2411m. Il comporte deux
caldeiras (Elengoum et Ebouh ou Éboga). Cette dernière qui fait l’objet de la présente étude s’ouvre vers
Bangem en formant un demi-cercle de 4 km de diamètre. Sa superficie est de 12,56 km2 environ. Située
entre 5°00′ et 5°2′ de latitude Nord, et entre 9°48′ et 9°50′ de longitude Est, la caldeira d’Éboga se pare
de deux lacs : le lac mâle et le lac femelle. Ce vaste espace géographique représente un important
château d’eau du versant est du mont Manengouba. Les rivières Mbwe, Mekounge, Ndep, Chide y
prennent leur source. La caldeira d’Éboga jouxte les villages Muabi, Mbat, Puola, à l’Ouest et Nkack,
Muebah au Sud-Est. Bien que situés très à l’extérieur de la caldeira, les villages Mbouroukou et
Muamenam conservent des liens de sacralité avec ce lieu tellurique qui tient une place importante dans
leur mythologie (Figure 1). Le symbolisme du pic (Elengoum) et celui des deux lacs revêt une place
essentielle dans la cosmogonie Mbo -Bakossi qui fait correspondre la caldeira et ses environs à la tête de
leur peuple.

CADRE CONCEPTUEL
Deux concepts majeurs, la construction territoriale et le risque naturel sous-tendent l’ensemble de la
réflexion sur la crise du nomadisme pastoral dans les Régions administratives du Nord-ouest et de
l’Ouest. La diminution des pâturages et des troupeaux a fait prendre conscience aux Bororos de la
nécessité de changer leur mode de vie, car la poursuite d’une vie nomade dans un environnement
désormais hostile conduit à un suicide collectif. La sédentarisation s’impose alors comme une nécessité.
Ainsi, le concept de territoire délimité, construit et mis en valeur doit désormais apparaitre dans leurs
rapports à l’espace. Or, les seuls espaces géographiques encore accessibles comportent de nombreuses
difficultés et d’importants risques naturels d’où leur caractère marginal. L’un de ces espaces
géographiques est la caldeira d’Éboga, sorte d’immense cuvette d’effondrement liée au volcanisme du
mont Manengouba. Même en état de repos prolongé, ce volcan présente toujours des risques certains.
Cette certitude bien que connue des autorités camerounaises et du monde scientifique, n’inquiète pas
autant les Bororos en quête d’un espace vital. Aux risques naturels s’ajoutent les risques anthropiques
qui se présentent sous forme de déforestation, d’érosion, de pollution. L’habitude de vivre en altitude,
l’indifférence face aux risques naturels, la disponibilité d’un espace géographique non exploité aux
potentialités certaines et la nécessité absolue de satisfaire les besoins vitaux expliquent la prédominance
chez les Bororos du concept de construction territoriale sur celui de risque naturels.

CADRE MÉTHODOLOGIQUE
L’évaluation des avantages et des inconvénients de l’installation des Bororos dans la caldeira d’Éboga a
nécessité le choix d’une méthodologie bien articulée. Elle s’appuie sur la recherche documentaire au
Centre de Recherche sur les Hautes Terres (CEREHT), aux universités de Buea et de Yaoundé I ainsi que
la consultation des bases de données des différentes branches de l’administration camerounaise. La
collecte des données repose sur les travaux de terrain, des observations empiriques du phénomène
étudié et sur des travaux cartographiques. Un échantillon représentatif des chefs de ménage a été
constitué à partir des archives de la préfecture, des listes électorales et des données du recensement
démographique effectué à Bangem en 2005.

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Figure 1 : Carte de Localisation de la zone d’étude
Source: Auteur- fond de la carte Laboratoire Géomatique Université de Dschang

Un questionnaire administré aux chefs de ménage a permis d’obtenir des données sur les activités, la
production, le niveau de vie des Bororos vivant dans la caldeira d’Éboga. Une enquête semi-dirigée
réalisée auprès des Bororos et des chefs des villages voisins de la caldeira a permis d’identifier, de
déterminer l’origine des bergers migrants et les inquiétudes des Bakossi. Des clarifications sont alors
apparues dans les caractéristiques et les manifestations de la crise du nomadisme pastoral dans la
dorsale camerounaise. L’entretien réalisé en 2009 avec des personnes ressources (sous-préfet, maire de
Bangem, chef de la communauté Bororo de la caldeira, agents de la WWF, délégués des services
compétents) met en évidence l’existence d’un certain nombre d’inquiétudes. Les données ont été
compilées et traitées manuellement avant d’être informatisées. Elles ont ensuite été présentées sous
forme de tableaux statistiques et d’illustrations qui aident à mieux comprendre les facteurs de la
construction de la territorialité bororo dans la caldeira d’Éboga.

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FACTEURS DE LA CONSTRUCTION DE LA TERRITORIALITÉ BORORO
CRISE PASTORALE DANS LES RÉGIONS ADMINISTRATIVES DU NORD-OUEST ET DE L’OUEST
CAMEROUN
Les Bororos qui peuplent la caldeira d’Éboga et ses environs viennent des Régions administratives du
Nord-Ouest et de l’Ouest Cameroun. Il s’agit d’espaces géographiques très densément peuplés (+250
hab/km2) ayant un taux de croissance annuelle de 2,5% (Banque mondiale, 2001). La création de
nouveaux domaines agricoles à Banso, Santa, Bafut (Nord-Ouest) et à Santchou et Bafou (Ouest
Cameroun) a entraîné la réduction des pâturages autrefois accessibles aux Bororo. Cette réduction se
manifeste en termes de quantité et de qualité (Fotsing, 1989 ; 1995). L’expansion des surfaces
cultivables dans les Régions administratives du Nord-Ouest et de l’Ouest où la terre constitue une denrée
rare a accentué la dispute des points d’eau entre les agriculteurs et les éleveurs nomades. Afin de faire
face au rétrécissement des pacages, les bergers bororos ont malgré eux réduit la taille de leurs
troupeaux. Deux faits caractérisent cette réduction de la taille des troupeaux : 1) la vente prématurée
des bêtes; 2) la baisse de la capacité de reproduction des vaches (Pamo et al, 2007). Ainsi on ne compte
plus que 15 veaux pour 90 vaches adultes. Outre le fait de parcourir de longues distances à la recherche
de points d’eau et de pâturages, les bergers bororos se doivent de dédommager les agriculteurs dont les
exploitations ont été endommagées par leurs animaux (Tazo et Haman, 2002). La pratique de l’élevage
extensif requiert de très grands espaces géographiques ouverts de moins en moins disponibles dans les
Régions administratives du Nord-Ouest et de l’Ouest. Face aux nouvelles contraintes faites de réductions
de pacages, de conflits et de tensions sociales, les Bororos doivent non seulement se rechercher un
nouvel espace vital mais aussi envisager la sédentarisation. Ainsi migrent-ils de plus en plus vers la
caldeira d’Éboga.

ATOUTS DE LA CALDEIRA D’ÉBOGA


Vaste surface calme taillée dans les roches volcaniques très altérées, la caldeira d’Éboga s’enveloppe d’un
épais manteau végétal pendant au moins 9 mois de l’année. Fait d’un mélange de pâturins et de
feuillus. II croit dans des sols fertiles riches en constituants fins qui proviennent de l’altération poussée
des trachytes, des basaltes et des produits pyroclastiques (Zangmo, 2007). Le climat de la caldeira
d’Éboga rentre dans la catégorie du climat montagnard de type équatorial à deux saisons bien tranchées.
La saison sèche qui dure 3 à 4 mois va de novembre à mars alors que celle des pluies se suit de la mi-
mars à fin octobre. Selon le comportement de l’équateur météorologique (EM), elle peut durer 8 à 9
mois. Dans ce vaste espace géographique très bien arrosé, on enregistre 2667mm /an. L’abondance
d’eau s’y signale par la présence de lacs, de mares et de cours d’eau d’importance variable. Les
températures moyennes annuelles douces varient entre 15°C et 17°C. On impute l’absence de la mouche
tsé-tsé et l’existence de pâturages d’excellente qualité tant recherchés par les éleveurs aux contraintes
biophysiques précédentes. Leurs caractéristiques combinées à la faible présence humaine font de la
caldeira d’Éboga un espace vital idéal tant recherché par les Bororos.

MÉCANISMES DE LA CONSTRUCTION DE LA TERRITORIALITÉ BORORO


ARRIVÉE ET INSTALLATION DES BOROROS DANS LA CALDEIRA D’ÉBOGA
La lecture des données socioéconomiques indique que le premier groupe d’éleveurs bororos est arrivé
dans la caldeira d’Éboga vers les années 1950. Il ne se composait alors que de quelques familles qui
construisent de petites huttes à l’extérieur de la caldeira. Elles négocient avec astuce l’accès aux
pâturages et aux points d’eau avec le groupe Bakossi d’Élon. Plus de cinquante ans plus tard, on
dénombre 466 Bororos installés dans la caldeira et ses environs. Ils se composent de 40 familles
représentées chacune par un chef de famille.

L’analyse sociodémographique indique pour sa part que des 36 éleveurs recensés, 22 ont rejoint les
monts Manengouba entre 1950 et 2005 alors que 14 y sont nés.

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Il faut noter que 42,49% des Bororos dénombrés se constituent de jeunes de moins 14 ans. Il importe de
souligner que les Bororos pratiquent l’endogamie et qu’ils se marient très jeune. L’âge de mariage pour
les filles est 14 ans et pour les garçons 17 ans. On constate que 85% des personnes interrogées sont
mariées, 10% vivent le célibat et 5% le veuvage tandis que 38% des mariés se disent polygames. Cette
communauté pratique la monogamie à 62%. Les Bororos de la caldeira et de ses environs pratiquent
l’islam à 89%. Des 40 chefs de ménage interrogés, 55% n’ont jamais été à l’école primaire, 40% ont fait
les études primaires et 5% l’enseignement secondaire.

PROCESSUS D’APPROPRIATION TERRITORIALE


Trois étapes caractérisent l’appropriation de la caldeira et ses environs par les Bororos : 1) une
négociation stratégique avec les chefs des villages voisins ouverte avec le don d’un bœuf à chaque chef
de village et la promesse de croisement des bœufs à courtes cornes (Taurins Bos Tauri) des Bakossi avec
les bœufs à longues cornes (Zebu Bos Indus ; Bos Taurus) des Bororos (Pamo, 1989). Un tel croisement
favorise une meilleure résistance aux maladies. (2) Ils ont négocié et obtenu la division des pâturages de
versants en trois sous espaces géographiques : le sous espace géographique de Mbouroukou-
Muanenguel, celui de Muamenam et enfin celui qui englobe Mbat, Puola, Muabi et Nninong. Il ressort de
cette même entente que la caldeira demeure un pâturage collectif même si on y pratique des activités
agricoles. (3) Les arbres fruitiers plantés délimitent les territoires occupés. Toutefois, les chefs bakossi se
sont réservés le droit de revenir sur cette entente quand bon leur semblera, car le don d’un bœuf ne lui
confère aucune intemporalité.

CONSTRUCTION D’UN CADRE DE VIE


Une fois l’entente conclue, les Bororos entament la construction d’un espace vital. La commune rurale de
Bangem et quelques Organisations Non Gouvernementales (ONG) les assistent. Ainsi, à partir du front
ouvert au début des années 1950, on est passé d’un habitat fait de huttes à un habitat définitif construit
avec des matériaux durables. Au fil des années, les petits hameaux ont été transformés en trois grands
quartiers : Quartier Ahladji, Quartier Magahji et Quartier Yaya. Des infrastructures (voies d’accès, points
d’eau potable, écoles, dispensaires, mosquée) et des équipements suivent l’installation des quartiers. Il
existe cinq principaux axes dont quatre réalisées grâce à la conduite des troupeaux aux différentes zones
des pâturages. La commune de Bangem, principal acteur externe a construit la route carrossable reliant
Bangem à la caldeira. Elle a également créé en 1997 une école qui a accueilli 113 élèves en 2010 contre
96 en 2004. Des ONG comme le Center for Rural Transformation (CERUT) et la World Wild life Fund for
Nature (WWF) ont apporté leur contribution à la construction de ce territoire. Il s’agit de matériels de
construction, de trois bornes fontaines, de l’encadrement technique des Bororos dans la pratique de
l’agriculture, dans la pose des fils barbelés. Ainsi au tour des champs sont apparues des clôtures qui
donnent un paysage de pseudo bocages. La commune de Bangem projette à court et à moyen terme de
construire un marché et d’électrifier la caldeira et ses environs. Notons toutefois que seuls 2,5% des
ménages utilisent des groupes électrogènes dans cet espace géographique de mieux en mieux organisé.

ORGANISATION ET GESTION DU TERRITOIRE


La communauté bororo installée dans la caldeira et ses environs est placée sous l’autorité d’un chef
traditionnel. Chaque quartier est administré par un chef de quartier reconnu par les pouvoirs publics. Il
s’agit d’une entité administrative et territoriale appartenant à la commune rurale de Bangem. Elle jouit
des mêmes droits et prérogatives prescrites par le ministre de l’administration territoriale. Des
associations économiques et politiques participent activement à la vie de ce nouvel espace vital bororo
dont le dynamisme ne laisse personne indifférent. Deux grands partis politiques y ont pignon sur rue. Des
associations économiques comme le MBOFAMAS et le GIC BOWO, crées respectivement le 26 août 2008
et le 14 septembre 2009 y ont installé leur siège social.

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DIVERSIFICATION DES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES ET L’AMÉLIORATION DU NIVEAU DE
VIE DES BOROROS
PRATIQUE DE L’ÉLEVAGE PLUS OU MOINS INTENSIF
La disponibilité de l’eau et d’herbes fraîches pendant 9 mois sur 12 permet aux éleveurs Bororos
d’abandonner l’élevage extensif transhumant et les contraint à se tourner vers un élevage plus ou moins
intensif. Les pâturages ne se trouvent plus qu’à 3 km ou 5,5 km. Leur excellente qualité favorise la
diversification du cheptel ainsi que l’augmentation de la taille des troupeaux (Tableau 1).

Type Quartiers Nombre


d’animaux total %
Ahladji Magahji Yaya
Bœufs 1016 92 388 1496 73
Chevaux 96 19 49 164 8
Moutons 129 21 54 204 10
Chèvres 75 10 30 115 6
Ânes 6 0 2 8 1
Volaille 43 9 14 66 3
Total 1365 151 537 2053 100

Tableau 1 : Répartition de l’espèce élevée

On constate qu’entre 1970 et 2010, le nombre des troupeaux est passé de 12 à 33 alors que leur taille
qui variait entre 15 et 35 connait un bond prodigieux soit 20-250. Chaque éleveur conduit son troupeau
dans son espace géographique. Afin de limiter les risques de conflits, on érige des fils barbelés autour des
champs cultivés qui se trouvent soit proches des pâturages soit le long des voies de pacages. Les
éleveurs bororos bénéficient de l’encadrement technique des Ministères de l’Élevage, de la Pèche et de
l’Industrie Animale (MINEPIA). Ce soutien technique permet d’améliorer le rendement des troupeaux.
Ainsi a-t-on noté une augmentation annuelle de 38% du nombre de têtes de bétail entre 2003 et 2009
(Figure 2). Le lecteur voudra bien se souvenir que les Bororos pratiquent un élevage sentimental. Ils
accordent beaucoup d’attention à leurs bêtes avec lesquelles ils finissent par tisser des rapports
sentimentaux. Elles produisent le lait, aliment essentiel à l’alimentation des Bororos. Sa production et sa
commercialisation ainsi que celles des produits dérivés relèvent des obligations communautaires des
femmes et des enfants.

Ânes Volaille
Chèvres
1% 3%
6%

Moutons
10%

Cheveaux
8% Boeufs
73%

Figure 2: La répartition de l’espèce élevée dans la caldeira

La production laitière dépend de la capacité de production de l’animal, du nombre des vaches laitières, de
la taille de la famille, de leur consommation journalière et de la demande locale. Outre la
commercialisation du lait et ses produits dérivés, les Bororos vendent les peaux de moutons et de
chèvres, ce qui ajoute à leurs sources de revenus (Tableau 2).

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Leur disponibilité dépend de la fréquence des célébrations du genre Ramadan, Tabaski, Mariage ou
encore Naissance qui constituent les occasions indiquées pour abattre un animal.

Type d’animaux Nombre Prix unitaire Revenu total


vendu (FCFA) (FCFA)
Bœufs 59 350 000 20 650 000
Chevaux 32 200 000 6 400 000
Moutons 66 20 000 1 320 000
Chèvres 27 17 500 472 500
Volaille 35 1 500 52 500
Total 219 28 895 000

Tableau 2: La répartition d’espèces d’animaux vendus, prix unitaire et revenu obtenu en 2009 (FCFA)

La vente des bœufs se fait sur place ou aux marchés de Bangem, Mélong et de Santchou. Le prix d’une
espèce animale varie en fonction de la taille, du sexe, de la circonstance, de la distance parcourue, de la
période de l’année et du nombre de bêtes par espèce que l’éleveur souhaite vendre au cours de l’année.
Les animaux qui se pressentent mieux valent plus chers que d’autres. Ce fait s’explique soit par
l’importance du temps de croissance soit par le nombre total d’animaux dont l’éleveur souhaite se
départir (Figure 3).

25000000
20.650.000
20000000
Revenu en FCFA

15000000

10000000
6.400.000

5000000
1.320.000
4.725 525
0
x

es
ns
s

ille
au
uf

to

vr
oe

la
ve


ou

Vo
he
B

Types d'animaux
C
M
C

Figure 3 : Répartition des revenus par type d’élevage


Source: Tableau 2

NOUVELLE ACTIVITÉ AGRICOLE


Deux facteurs conditionnent la nouvelle activité agricole pratiquée par les Bororos. La disponibilité de sols
très fertiles et le soutien technique que le CERUT a apporté aux Bororos sans troupeaux et sans travail.
Ces derniers se sont ainsi lancés dans les cultures maraichères destinées à la consommation locale et à la
commercialisation (Tableau 3). Comme leurs exploitations se trouvent en altitude et que leur calendrier
agricole se décale un peu de celui des cultivateurs situés en contre bas, ils sèment en mars et récoltent
entre août et octobre de chaque année. Cela leur permet de produire en contre saison. Les produits de
contre saison coûtent plus chers, car ils sont rares et la demande est forte. Les Bororos livrent les
légumes de contre saison aux marchés de Mélong et de Bangem à dos de Cheval, à même la tête, ou
encore par motocyclettes et par véhicules. Voilà qu’ils tirent avantageusement profit des conditions
biophysiques de la caldeira d’Éboga.

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Quantité Quartiers et sa production en
Produits Nom (tonnes) tonnes
scientifique Ahladji Magahji Yaya
Maïs Zea Mays 8,4 2,1 3,8 2,5
Haricot Phaseolus vulgaris 6, 4 1,9 2,8 1,7
Pomme de Solanum Tuberson 41,1 6,1 25,2 9,8
terre
Tomates Lycopersicum 4,2 0,2 2.2 1,8
esculentum
Ail Allium salivum 3,.4 0,6 2 0,8
Oignon Allium cepa 7,1 1,2 3,1 2,6
Carottes Daucu Carota 4,4 0,6 2,6 1,2
Poivres Capsicum annum 2,1 0,2 1,1 0,8
Gombo Solanum Tuberson 1,3 0,2 0,8 0,3
Gingembre Zingiber Officinale 3,7 1,8 0,8 1,1
Choux Brassica Oceracea 5,1 1,1 2,5 1,5
Haricot vert Phaseolus vulgaris 2,7 0,4 1,9 0,4
Total 89.9 16,4 48.8 24,5

Tableau 3 : Évaluation de la production agricole annuelle (2009)

La nouvelle activité agricole des Bororos se distingue également par l’association élevage-agriculture
puisqu’après les récoltes, les bergers conduisent les troupeaux dans les champs où ils paissent et
fertilisent le sol par déjection.

AUTRES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES


Afin de diversifier leurs sources de revenus et pour se garantir des revenus d’appoint, les Bororos
s’adonnent à d’autres activités économiques du genre apiculture, transport, commerce de détail.
L’exploitation des ruches permet aux petits apiculteurs de produire 5 à 20 litres de miel par an alors que
les plus grands obtiennent entre 30 à 35 litres de miel par an. La vente de miel a généré en 2009 un
revenu d’appoint de 203, 120 F CFA soit environ $ 450 CAD. Le transport des marchandises et des
personnes se fait par moto-taxi qui ne se pratique que deux fois par semaine de la caldeira vers Mélong
et Bangem. Contrôlée par trois Bororos, cette activité économique rapporte 8000 CFA/jour. Fixé en
fonction de l’état de la route, de la saison et de la circonstance du déplacement, le coût du transport par
personne varie entre 1500 et 2500 CFA. Il s’agit surtout de petits commerçants exerçant dans les
hangars des marchés de Bangem et de Mélong où ils vendent les produits de la caldeira et d’autres
produits non agricoles (Photo 1). Les produits non agricoles regroupent les nattes, les casquettes et les
tambours. Si l’on regarde le tableau général des revenus financiers bororos, on constate que l’élevage et
l’agriculture génèrent 94% des recettes alors que l’apiculture, le transport et le petit commerce ne
rapportent que 5,9% de tous les revenus (Figure 4).

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Un abreuvoir

Photo 1 : Produits agro-pastoraux de la caldeira de Mont Manengouba

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Miel; 283500;
1.4% Peaux;
102000; 0.5%
Lait; 213000;
1% Transport;
1152000; 3%

Agriculture;
12011000;
27%

Elevage;
28893500;
67%

Figure 4 : Contribution des différentes activités économiques au revenu (en franc CFA) dans la caldeira en
2009

CONSTRUCTION TERRITORIALE HYPOTHÉTIQUE


La construction d’un territoire bororo dans la caldeira d’Éboga et ses environs ne constitue pas en soi un
problème. Il existe néanmoins une contradiction fondamentale entre le fait d’occuper un espace
géographique avec des encouragements des autorités administratives et la légitimation d’une installation
citoyenne dans une zone à très haut risque, identifiée impropre aux installations humaines (Photo 2).

Quartier Ahladji Quartier Magadji Quartier Yaya

Mosquée dans
De la caldeira vers Bangem le Quartier Ahladji Un point d’adduction d’eau

École primaire

Photo 2 : Aménagements spatiaux dans la caldeira des monts Manengouba


Comment comprendre et expliquer cette contradiction, qui expose les citoyens à un risque naturel certain
et l’aval que les autorités administratives marquent à cette volonté d’aménager un territoire bororo dans
la caldeira d’Éboga? Il s’agit bien là d’une hypothèque de construction territoriale bien trop lourde à
payer. Elle invite à la dissidence collective, car tous les aménagements spatiaux effectués dans la caldeira
des monts Manengouba portent en eux les germes d’une condamnation au trépas. La moindre reprise de
l’activité volcanique ne laissera que peu de chance aux acteurs de cette territorialité que l’on sait
d’avance condamnée.

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ENVIRONNEMENT NATUREL RICHE MAIS AUSTÈRE
Les Bororos installés dans la caldeira d’Éboga et ses environs font face à l’austérité en temps réel.
Incapacité d’initier des projets de développement faute de moyen financiers et techniques, les Bororos en
voie de sédentarisation jouissent de manière limitée des progrès socio-économiques enregistrés dans le
reste du pays. Les contraintes biophysiques liées au froid et aux vents violents détruisent souvent les
cultures et les constructions rappelant ainsi le caractère précaire de la présence humaine en montagne.
Malgré l’effet adoucissant de l’altitude sur les températures, les plantes subissent l’assaut des insectes,
des germes pathogènes (tomates et pommes de terre), des chenilles, des pucerons, et de nombreux
rongeurs. Les enquêtes de terrain révèlent que chaque année, les charançons, les champignons et les
rongeurs détruisent plus de 25% des récoltes stockées. Dans ce même ordre d’idée, nous avons appris
qu’une grande quantité des produits agricoles pourrit avant d’arriver sur les marchés. On doit ces pertes
aux moyens de transports rudimentaires et aux méthodes de conservation inexistante.

Les troupeaux connaissent eux-aussi leur part de problèmes. La Délégation départementale du ministère
de l’élevage et de la production animale du Koupé-Manengouba a enregistré huit (8) cas de maladie de
foie (2005 – 2009), trois cas de tuberculose (2004–2007), des tiques sur tous les animaux (2008), deux
cas de maladie de la peau en 2009 et de la fièvre de New Castle1. En deux ans, soit de 2008 à 2010 un
total de 37 cas d’animaux dévorés par des prédateurs ont été signalés (Photo 3). On a également
enregistré 24 cas de noyade de bêtes (Tableau 4).

Photo 3 : Le résultat de la relation qui existe entre la proie et le prédateur

Type Nombre Quartiers Nombre total


d’animaux d’animaux d’animaux tués
Ahladji Magahji Yaya
tués entre depuis leur arrivée
2008 et 2010 dans la caldeira et
ses environs
Bovins 5 7 1 4 12
Chèvres 3 9 0 2 11
Moutons 2 9 2 3 14

Total 10 25 3 9 37

Tableau 4 : Répartition d’animaux tués par les prédateurs 2008-2010

S’agissant des problèmes de santé publique, plusieurs cas de toux récurrente ont été relevés parmi la
majorité de la population peu importe la saison. En 2009, 35% des Bororos souffraient du mal
d’estomac, 10% de la malaria, 15% des maux de tête, 37% des problèmes de genoux et 3% du cancer
de jambe2.

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TERRITORIALITÉ ET DÉGRADATION DE L’ÉQUILIBRE BIOPHYSIQUE
Même si la caldeira et ses environs offrent d’excellents pâturages aux Bororos, elle constitue un
écosystème très fragile. Afin de répondre à certains de leurs besoins existentiels, les Bororos exploitent
les ressources naturelles disponibles dans la caldeira et ses environs. Ainsi, la recherche du bois de
chauffe et de construction induit la déforestation, bel exemple de rupture du fragile équilibre
environnemental. Combinée au surpâturage, la déforestation expose les sols aux pluies et accélère ainsi
leur érosion. Pour renouveler les pâturages, les Bororos allument des feux de brousse qui portent la
température du sol à plus de cent degrés Celsius. Sans le savoir, ces fortes températures finissent à long
terme par stériliser les sols qui s’indurent lentement. Comme les bassins-versants connaissent
d’importants déboisements, il s’en suit un changement hydrologique marqué par la diminution du débit
des cours d’eau, une intense évaporation, une diminution de la sédimentation et parfois même un
tarissement pur et simple de cours d’eau tel qu’observable à Bangem.

ESPACE MARGINAL À HAUTS RISQUES


Les monts Manengouba constituent le deuxième grand massif de la dorsale camerounaise. Les deux lacs
cratère qui s’y trouvent représentent un danger potentiel pour les populations installées à l’intérieur et à
l’extérieur de cette caldeira, car leur configuration rappelle celle du lac Nyos. La catastrophe naturelle du
lac Nyos survenue dans la nuit du 21 août 1986 a coûté 1700 vies humaines et 3500 vies bovines,
caprines et ovines dans un rayon de 25 kilomètres. Elle reste fraîche dans la mémoire collective. Les
scientifiques reconnaissent que les lacs cratères de la dorsale camerounaise peuvent émettre des gaz
létaux (Kling et al., 1987; Sigurdsson et al., 1987a, 1987b; Lockwood et al., 1988; Nana, 1991; Freeth,
1992; Evans et al., 1993; Tayileke, 1994; Watdji et al., 1994, 1998b). Outre d’éventuelles émissions de
gaz toxiques, la possibilité d’une reprise d’activités volcaniques demeure grande puisqu’un simple rejeu
des grandes failles du Manengouba suffit.

Le caractère récent des cônes adventifs de la caldeira indique que même si les monts Manengouba
dorment depuis fort longtemps, ils peuvent rentrer en activité à tout moment (Kagou, 1998 ; 2001a).
Plusieurs signes précurseurs comme de faibles tremblements, de légers mouvements de masse, des
perturbations thermiques, une température élevée de l’eau de source y ont été observés (Kagou al.,
1998 ; 2001a, 1999, 2001b ; Lee, 1994; Nkouathio, 1997 ; Zangmo, 2007). Il importe de mentionner
qu’en plus des risques naturels, l’utilisation délétère de la caldeira et ses environs mérite de retenir
l’attention. L’eau qui alimente les 15000 habitants de la ville de Bangem provient des lacs Manengouba.
Nul n’ignore que les déjections d’animaux ainsi que des produits phytosanitaires utilisés dans le
traitement des champs rejoignent les eaux des lacs soit par ruissellement soit par infiltration soit encore
par retombée. Elles ne subissent aucun traitement particulier avant d’être acheminée aux citoyens de
Bangem. Sans le savoir, ces derniers s’exposent aux éventuels ennuis de santé. Parce que les activités
agropastorales bororos exercent une pression de plus en plus grande sur les écosystèmes qu’elles ont
fini par perturber. Il devient possible d’envisager des conflits latents entre les Bororos et les Bakossi qui
ne doutent plus de l’origine des changements biophysiques qui les affectent et qu’ils associent volontiers
à la présence des Bororos dans la caldeira.

STRATÉGIES ADOPTÉES, LIMITES ET PERSPECTIVES D’AVENIR


STRATÉGIES ADOPTÉES ET LEURS LIMITES
Les Bororos de la caldeira et ses environs comprennent bien que pour faire face aux contraintes
financières, il leur faut multiplier les sources de revenus. La diversification des activités économiques
permet alors aux Bororos de résoudre plus ou moins bien leurs problèmes financiers. L’élevage,
l’agriculture, le commerce et l’apiculture font désormais partie de leurs activités quotidiennes. Le CERUT
et la Délégation départementale de l’agriculture de Bangem en leur apportant un soutien technique à
travers les traitements phytosanitaires et l’approvisionnement en matériel agricole soutiennent cet effort
de diversification.

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L’hôpital d’arrondissement de Bangem et le dispensaire de Nkack assurent les premiers soins aux
populations, alors que la Délégation départementale de l’élevage couvre 80% des soins apportés aux
bêtes. Le CERUT ravitaille les quartiers Ahladji et Magadji en eau potable alors que les habitants du
quartier Yaya se contentent encore de l’eau des rivières et des sources aux qualités douteuses. Une
école primaire disposant de bâtiments définitifs a été mise en place et elle fonctionne bien. Une route non
praticable en saison des pluies relie la caldeira à Bangem.

PERSPECTIVES D’AVENIR
Les chefs bakossi parlent de plus en plus ouvertement de revenir sur leur entente avec les Bororos.
Même si une disposition de la constitution camerounaise de 1996 recommande la protection des groupes
minoritaires et le droit de s’installer partout sur le territoire national, nombreux sont ceux qui
demandent le départ des Bororos de la caldeira, car l’article 9 de la loi N° 2004-003 du 21 avril 2004
classe la caldeira dans les zones à risques, impropres aux installations humaines. Les Bororos accepteront
à contre cœur de quitter ce territoire qu’ils ont construit péniblement au fil des années et qui leur apporte
entière satisfaction. Leur plus grand souhait c’est taire toutes velléités qui remettent leur présence en
question peu importe le risque naturel auquel ils s’exposent. Encourager le départ des Bororos de la
caldeira ferait perdre aux populations bakossi une importante source de protéines du fait que chaque
année, au moins 43 bœufs et 96 chevaux sont abattus au marché de Bangem. Ce départ entrainerait la
perte de 114 emplois à Bangem soit 19 soyer men, 16 bouchers, 64 vendeurs de nourriture, 4 bergers
et 14 petits producteurs de yaourt. En appliquant la loi ci-haut mentionnée, il sera possible de diriger les
Bororos vers un autre espace géographique disposant des mêmes atouts que ceux de la caldeira mais pas
de l’exposition aux risques naturels. Mais où trouver cet espace géographique ? Maintenir les Bororos
dans la caldeira et ses environs, mettre sur pied un système de surveillance et d’alerte efficace semble
être la solution de compromis.

CONCLUSION
Malgré les risques naturels inhérents, la caldeira du mont Manengouba offre un cadre de vie idéal aux
Bororos en enquête d’une espace vital. Dès leur arrivée dans la caldeira et ses environs, ils ont pris soin
de s’entendre avec les chefs Bakossi des villages voisins, ce qui a facilité leur installation. Nous avons
identifié et expliqué les facteurs de leur insertion spatiale ainsi que les mécanismes de la construction de
la territorialité bororo qui existe bel et bien en pays Bakossi. L’insertion bororo dans la caldeira et ses
environs constitue une réussite socioéconomique puisque la population croît et que les activités
économiques se diversifient. Cette présence bororo autrefois acceptée, pose néanmoins de plus en plus
de problèmes à cause d’une utilisation délétère des milieux biophysiques imputable aux Bororos. Sans nul
doute, elle induit des ruptures d’équilibre fortement ressenties par les populations autochtones qui voient
leurs modes de vie changer un peu trop vite. Ces derniers n’hésitent pas alors à pointer du doigt les
auteurs présumés des ruptures d’équilibre et à souhaiter leur départ. Ce souhait n’est ni bien perçu des
Bororos ni des autorités administratives qui font la sourde oreille.

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Notes

1. Rapports Annuelle 2005, 2006, 2007, 2008, and 2009. MINEPIA, Bangem.
2. Enquête de terrain, 2010.

Pour citer cet article

Référence électronique
Diabe Etam Sone, «La construction d’un territoire Bororo dans la caldeira du mont Manengouba», Revue
canadienne de géographie tropicale/Canadian journal of tropical geography [En ligne], mis en ligne le 15
mai 2014. URL: laurentienne.ca/rcgt

Auteur

ETAME SONE Diabe


Département de Géographie
Université de Dschang, Cameroun
etamesonediabe@yahoo.com

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