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ET
STABILISATION
LE CAS DE L’ALGÉRIE
Les cahiers de la recherche sont accessibles sur le site intranet du CDEF dans
la rubrique "recherche doctrinale"
www.cdef.terre.defense.gouv.fr
2
ALAT ET STABILISATION
L'AVIATION LÉGÈRE DE L'ARMÉE DE TERRE EN ALGÉRIE
Cette étude a été réalisée sous la direction du bureau recherche de la division recherche et
retour d’expériences. Les informations rapportées n’engagent que son auteur,
Alexandre KINNEN, étudiant stagiaire au bureau recherche.
RÉPUBLIQUE FRANÇAIS E
MINISTÈRE DE LA DÉFENS E
Centre de Doctrin e
d'Emploi des Force s
Le général
Si certaines images ont marqué plus que d'autres la mémoire d e
certains évènements, ce sont indubitablement celles des commando s
sautant d'un hélicoptère ou les « bananes volantes » au-dessus d e
pitons rocheux qui symbolisent la Guerre d'Algérie .
INTRODUCTION ............................................................................................... 11
7
ALAT et stabilisation
CONCLUSION .................................................................................................... 59
GLOSSAIRE....................................................................................................... 63
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................... 67
OUVRAGES ...................................................................................................................................................... 69
ARTICLES - REVUES........................................................................................................................................ 69
DOCUMENTS OFFICIELS .................................................................................................................................. 70
SOURCES INTERNET ........................................................................................................................................ 71
ANNEXES .......................................................................................................... 73
8
Le S.N.C.A.S.E SE-3130 Alouette II ................................................................................................................ 76
Le Bell 47 ........................................................................................................................................................ 77
ANNEXE 2 - L’HÉLICOPTÈRE CARGO MOYEN ................................................................................................ 80
Le Sikorsky S-55 (H-19) l’ « éléphant joyeux »............................................................................................... 80
ANNEXE 3 - L’HÉLICOPTÈRE CARGO LOURD ................................................................................................. 81
Piasecki – Vertol H-21 « Banane Volante ».................................................................................................... 81
ANNEXE 4 – ORDRES DU COMMANDANT DE L'OPÉRATION HÉLIPORTÉE ...................................................... 83
ANNEXE 5 – OPÉRATION DORDOGNE............................................................................................................. 85
9
Introduction
INTRODUCTION
11
Introduction
Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, les forces armées françaises font face aux conflits de
décolonisation. L’Indochine (1945-1954), Madagascar (1947-1949) et l’Algérie présentent des
physionomies très différentes et qui nécessitent une grande adaptation des unités à leur environnement
opérationnel. Cela passe par l’emploi d’un outil nouveau, l’hélicoptère, qui à sa manière, fait évoluer
l’art de la guerre.
Si le premier vol d’un hélicoptère en France a lieu en 1907, son essor est considérablement plus
lent que celui de l’aviation. Il existe des
prototypes dans l’entre-deux-guerres, comme
l’autogire, utilisé par l’armée de Terre dans
ses missions d’observation aérienne. Mais des
rivalités naissent entre les armées de Terre, de
Mer et de l'Air quant à l'utilisation de cette
troisième dimension. A cela s’ajoute
l’indécision des états-majors et l’absence
d’une doctrine d’emploi interarmées. La
Seconde Guerre Mondiale voit éclore l’emploi
des hélicoptères à des fins opérationnelles
mais ce n’est qu’avec la « turbinisation » des
appareils que s’opère la révolution des
voilures tournantes. Désormais, l’hélicoptère
offre de nouvelles possibilités, et d’abord dans le domaine du transport.
Ces nouvelles capacités répondent aux nouveaux besoins nés des conflits de l’époque. Toutes les
forces armées s’intéressent à l’hélicoptère et le général Beaufre, connu pour ses réflexions sur la
stratégie militaire, déclare en 1953 : « Les hélicoptères iront en se développant. Chaque armée a
besoin de ses hélicoptères intimement mêlés à son organisation et à son combat. L’armée de Terre a
en Europe des besoins considérables à long terme. »1
Au sein de l’armée de Terre, plus précisément dans les unités d’artillerie, la question d’une aviation
légère est présente depuis les années 1930. Les missions dévolues à l’artillerie rendent plus que jamais
nécessaire l’existence de moyens propres, dans les domaines de l’identification ou de la
reconnaissance. Les unités au sol les réclament. Mais ce n’est qu’à la fin 1953 que naît l’Aviation
Légère de l’Armée de Terre (ALAT).
Cette arme s’intègre rapidement au sein de l’armée de Terre et devient un acteur essentiel dans les
modes d’action employés. Très vite, l’hélicoptère s’avère un outil indispensable et primordial au
combat.
Cette étude poursuit un cycle de travaux entamé sur la notion de stabilisation et le rôle dévolu aux
forces terrestres dans ces missions particulières2. Le cas de la Guerre d’Algérie, passé récent dont
1
Note n°428/EMIFT/4I du 10 septembre 1953, accepté par le ministre.
2
Il est possible de consulter sur les sites Internet et Intranet du CDEF ces différents travaux dans les Cahiers de la recherche doctrinale :
- La stabilisation : quelles missions pour les forces terrestres? 2004.
- Les forces terrestres en opération : quels modes d'actions face à des adversaires asymétriques, 2004.
- Les « sections administratives spécialisées (SAS) » en Algérie : un outil pour la stabilisation, 2005.
- L'emploi des forces terrestres dans les missions de stabilisation en Algérie, 2006.
- Vaincre une guérilla ? Le cas français en Algérie, 2007.
13
ALAT et stabilisation
toutes les leçons n’ont pas été tirées, illustre particulièrement l’emploi des unités de l’armée de Terre
dans leur diversité et leur complémentarité.
La conquête aéronautique débute avec la naissance de l’aérostation militaire3 et prend son véritable
essor à la fin du XIXe siècle4. La Première Guerre Mondiale favorise un développement rapide de
l’aviation tant pour se livrer à des missions de reconnaissance, que pour appuyer l’artillerie dans ses
missions d’observation.
Consacrée par la création en 1928 d’un ministère de l’Air, l’aviation militaire est confiée à l’armée
de l'Air. Un décret publié en mars 1933 rappelle ses missions :
• soutenir les forces terrestres,
• assurer la défense aérienne du territoire,
• conduire des actions autonomes.
Pourtant, l’armée de l'Air porte l’essentiel de ses efforts sur l’aviation de chasse. Pour cela, elle
commande 480 chasseurs et 471 bombardiers. Les appareils de reconnaissance et d’observation sont
moins nombreux : les besoins sont estimés à 411 avions.
3
Les premières montgolfières, développées dans les années 1780, trouvent leur usage militaire pendant les campagnes de la Révolution
française. La première compagnie d’aérostiers est créée le 2 avril 1794 afin d’observer les marches et mouvements des ennemis. Le premier
ballon à usage militaire, « L’Entreprenant », est utilisé lors de la bataille de Maubeuge, le 2 juin 1794.
4
C’est en 1892 que Clément ADER signe avec le ministère de la Guerre un projet d’appareil volant à usage militaire, capable de transporter,
en plus de son conducteur, une masse de 75 kg.
5
Général DE GAULLE : Lettres, notes et carnet II, 1919 - juin 1940.
14
Introduction
A partir de 1935, pourtant, les moyens mis à disposition de l’artillerie manquent. En 1939,
l’aviation d’observation compte 41 escadrilles de neuf avions. A titre de comparaison, en 1916, les
armées disposent de 94 escadrilles de dix avions. Cela représente une réduction d’un peu plus de la
moitié des effectifs. Daladier, alors ministre de la Défense nationale, décide d’affecter à l’artillerie une
aviation légère. Au début de l’année 1940, le Centre d’Instruction à l’Observation sur Avions et
Autogires (C.I.O.A.A.) ouvre ses portes à Sommesous. Si des pilotes sont formés, il n’en est pas
moins vrai qu’aucun moyen d’observation aérien n’est livré à l’armée de Terre entre 1939 et 1940. En
outre, en juin 1940, le décret visant à régulariser l’affectation d’une aviation d’artillerie est refusé par
le ministre de l’Air, considérant que cela va à l’encontre des dépositions de la loi de 1934.
En revanche, les Allemands – de leur côté – emploient de petits avions comme le Fieseler Storch
afin de diriger leurs tirs. Cela leur confère un avantage certain, d’autant plus que l’aviation française –
malgré son courage et ses efforts pendant la campagne de France – ne dispose pas de suffisamment de
moyens pour interdire les vols de reconnaissance ou de réglage d’artillerie au-dessus de ses lignes.
Il est donc attesté que l’artillerie doit disposer de moyens propres, alors que l’armée de l'Air s’est
révélée trop peu préparée pour les missions tant d’interdiction que dans l’appui-sol au profit des forces
terrestres.
A la Libération, l’artillerie française s’organise selon des méthodes américaines, en se dotant de
« Piper Cub L 4 » avec l’aide de spécialistes détachés de l’armée de l'Air. Au sein de chaque division,
il existe cinq sections d’avions d’observation : une sert à l’artillerie divisionnaire et les quatre autres
sont en relation avec les quatre groupes d’artillerie. Les moyens exigés par l’armée de Terre et
notamment par l’aviation d’artillerie sont supérieurs à ceux que l’armée de l'Air peut accorder. Aussi,
le 1er janvier 1944, le Centre de Formation des Sections d’Observation d’Artillerie (C.F.S.O.A.) est
créé à Lourmel qui prend l’appellation d’École de l’Aviation d’Artillerie le 1er septembre 19446.
Bénéficiant de l’expérience acquise pendant les campagnes de Normandie et de Provence, les
conditions d’emploi des « Piper Cub L 4 » évoluent. L’appareil peut contrôler un ensemble de tirs
(80% des tirs ont été réglés à partir d’avions), diriger les bombardiers qui assurent le ravitaillement
parachuté des forces avancées, connaître et renseigner la circulation routière, déceler des indices de
repli et servir de relais radio et d’évacuation sanitaire. La distinction entre les informations destinées
au commandement et les missions au profit de l’artillerie se précise de plus en plus. Pourtant, à la fin
du conflit, au mois d’avril 1945, le ministre de l’Air récupère tous les appareils, laissant ainsi l’armée
de Terre dans une situation difficile.
Après des années de négociations, le
Secrétaire d’État à la Guerre fait admettre par
le Conseil d’État le statut particulier de
« l’Aviation Légère d’Observation
d’Artillerie » (A.L.O.A). Le décret n’est
cependant signé que le 2 mars 1952, soit trois
ans et demi après la décision du ministre.
L’aviation d’artillerie, en raison d’un
manque de moyens et de sa dépendance vis-à-
vis de l’armée de l'Air, cherche à s’émanciper
6
L’École déménage à Cannes-Mandelieu en décembre 1944.
15
ALAT et stabilisation
et à étendre ses activités. A ce titre, elle prend le nom d’Aviation Légère de l’Armée de Terre (ALAT)
fin 1953. Cette initiative est l’objet de polémiques. Pour y mettre fin, le ministre de la Défense
Nationale, en accord avec le secrétaire d’État de l’Air, confirme cette appellation en décembre 1954.
L’aviation révolutionne les opérations tactiques et stratégiques militaires. Après la Seconde Guerre
Mondiale, les conflits dans lesquels l’armée française intervient sont nombreux et divers : l’Indochine
(1945-1954), Madagascar (1947-1949) et l’Algérie (1954-1962). Les terrains d’opérations présentent
de grandes différences de part leur relief, leur végétation, etc. La question du soutien aux forces et du
transport devient un enjeu de premier ordre impliquant la mobilisation d’une part importante des
forces armées. Les limites en matériels et en capacités humaines sont rapidement atteintes. Face à cette
attente, le recours à l’hélicoptère s’avère une réponse efficace.
L’expérience indochinoise
La guerre d’Indochine marque le tournant de
l’aéromobilité en France. Les états-majors français,
sous l’impulsion du médecin-général Robert,
directeur des services sanitaires en Extrême-Orient,
utilisent un nouvel appareil dans des missions de
sauvetage et de liaison : l’hélicoptère. L’intérêt et la
nécessité de se doter de tels appareils, malgré leur
coût élevé, survient en comparant son emploi avec
celui de l’avion. A l’origine, les Français évacuaient
leurs blessés avec des avions Morane 500. Or, l’avion
nécessite des infrastructures propres : une piste ou
une zone dédiée protégée sont nécessaires à son
atterrissage à proximité des zones de combats.
« La voilure tournante » offre de nouvelles
possibilités très intéressantes que l’avion léger ne
permet pas : possibilité de vol lent jusqu’au vol
stationnaire, excellente maniabilité, indépendance par
16
Introduction
rapport aux infrastructures… L’hélicoptère fait ainsi son apparition le 16 avril 1950. L’ELA7 n°52
composée de deux Hiller 360 basés à Tan Son Nhüt, près de Saïgon, s’impose rapidement dans les
années suivantes grâce à sa facilité d’exploitation sur le terrain. Une deuxième section d’hélicoptères
est créée le 1er mars 1952 au sein de l’ELA n°53 basée à Gia Lam, près d’Hanoi. La livraison de
nombreux appareils de type Hiller H 23 A et B ainsi que de Sirkorsky (H 19 B) pendant l’année 1953,
implique la création de plusieurs détachements d’hélicoptères en Centre-Annam, au Cambodge, au
Laos et dans les Hautes-Régions.
Les forces armées françaises en Indochine limitent l’emploi de l’hélicoptère aux missions
d’évacuation sanitaire et de sauvetage. Réduites dans un premier temps, ces missions se développent
malgré les grosses difficultés matérielles liées aux besoins prioritaires de la Corée comme aux
limitations budgétaires. Les résultats de la guerre d’Indochine montrent l’importance croissante des
voilures tournantes au sein de l’armée. Sur 13 000 heures de vol au total, 7 040 heures permettent
10 820 EVS8, 38 SAR9 du 16 avril 1950 – date de livraison des deux premiers appareils Hiller
UH 12A – au cessez-le-feu d’août 195410.
Il faut cependant rappeler que les hélicoptères sont alors essentiellement employé par l’armée de
l'Air. Les premiers hélicoptères de l’armée de Terre arrivent en Indochine à partir du 2 mai 1953. La
formation du personnel commence au mois d’août de la même année et la guerre se termine à l’été
1954. Les responsables ont pu juger de la potentialité de ces appareils mais n’ont pas eu le temps de
s’en servir pleinement.
Le théâtre indochinois sert donc de « banc d’essai » à la mise en place des groupements et des
techniques d’interventions héliportés, tout en permettant de mettre en évidence l’importance de
l’action aérienne.
Le contexte algérien
La guerre en Indochine à
peine terminée, les départements
français d’Algérie sont frappés
par une série d’attentats à partir
de la nuit du 1er novembre 1954.
La rébellion compte quelques
centaines d’hommes,
principalement en Grande
Kabylie, région sous-administrée,
et dans les Aurès, où la situation
est préoccupante.
7
ELA : escadrille de liaison aérienne.
8
EVS : EVacuation Sanitaires. Les aviateurs disent « EVASAN ».
9
SAR : Search and Rescue (recherche et sauvetage).
10
Médecin général Régis FORISSIER, « Le service de santé en Indochine », Revue Historique des Armées, 1989-4, p 3-16.
17
ALAT et stabilisation
La réaction des forces françaises, et notamment l’appel à l’armée, prend du temps. La majeure
partie des troupes militaires d’Algérie ont été dépêchées en renfort en Tunisie pour rétablir l’ordre à la
suite de troubles organisés par le leader nationaliste Habib Bourguiba. En ce jour de « Toussaint
Rouge », la France entre dans une nouvelle guerre, bien que le terme employé par les autorités soit
officiellement des « opérations de maintien de l’ordre ».
Très vite, tous les moyens sont mis en œuvre pour lutter contre le Front de Libération Nationale. Et
les hélicoptères apportent une plus-value non négligeable à l’armée de Terre.
18
Les opérations héliportées en Algérie
PARTIE 1
19
Les opérations héliportées en Algérie
1 – Quelques rappels
Pour comprendre la nature de ce conflit, il convient de revenir sur quelques points qui expliquent
l’intérêt des hélicoptères.
D’abord, l’étendue du territoire algérien, avec plus de 7 500 kilomètres de frontières terrestres :
1 559 kilomètres avec le Maroc, 1 376 kilomètres avec le Mali, 982 kilomètres avec la Libye, 965
kilomètres avec la Tunisie, 956 kilomètres avec le Niger, 463 kilomètres avec la Mauritanie, 42
kilomètres avec le Sahara Occidental, sans compter la frange littorale et les 1 200 kilomètres de côtes
avec la Méditerranée.
Ensuite, le relief et le climat. Le plateau du Centre-Est de l’Algérie a une altitude moyenne de 900
mètres. La chaîne de l’Aurès méridional et de l’Atlas septentrional sont séparées par un haut plateau
fertile. Le climat, variable, est caractérisé par des étés chauds, avec beaucoup de poussière, des hivers
froids peu enneigés et une brève saison pluvieuse.
Le pays vit essentiellement de son agriculture, l’industrie étant peu développée, en partie à cause
du manque d’énergie hydraulique. Les Français tentent cependant de développer ce secteur et
exploitent les ressources pétrolières du Sahara.
Sur ce territoire où un million et demi de pieds-noirs (colons d’origine européenne) et plus de huit
millions d’autochtones vivent en plus ou moins bonne harmonie, se constitue un mouvement rebelle,
le Front de Libération Nationale11 dont la branche armée, l’Armée de Libération Nationale12, compte
environ 700 combattants répartis sur deux régions montagneuses : les Aurès et le Djurdjura, les
montagnes les plus élevées de la Kabylie. Au cours de l’année 1955, ces partisans de l’indépendance
connaissent un certain nombre de ralliements, peut-être jusqu’à 20 000 membres qui agissent en
bandes armées.
En janvier 1955, seuls 80 000 militaires sont répartis sur une surface équivalante à la moitié de la
métropole française. Ces forces sont composées d’une division aéroportée, de plusieurs escadrons de
11
Front de Libération Nationale : FLN
12
Armée de Libération Nationale : ALN
21
ALAT et stabilisation
L’hélicoptère s’affirme dès lors comme un outil essentiel. En 1952, il n’y a aucun appareil en
Afrique du Nord. En 1954, son emploi se limite aux missions traditionnelles, proches de celles
confiées en Indochine, c’est-à-dire l’évacuation sanitaire, le ravitaillement de postes, la récupération
d’équipages à l’exclusion de l’assaut.
Les expériences tirées de cette dernière guerre permettent cependant de mettre au point, de
transformer, d’améliorer la doctrine d’emploi des hélicoptères. Les moyens de combat évoluent en
même temps que cet appareil aux capacités multiples, qui apporte la supériorité sur l’adversaire sur
le théâtre des opérations. Il s’avère rapidement indispensable.
13
Mme T.R. PIERPONT et M. L.J GEIER, French Army H-21 helicopter operations in Algeria, T.C par P.L N°5955, Centre Interarmées de
documentation Militaire, archives bibliothèque École Militaire, 30 pages. Le 4ème degré de longitude divise l’Algérie en deux parties à peu
près égales et forme la limite entre les zones de responsabilité « hélicoptère » de l’Armée française et des Forces Aériennes Françaises
14
François PERNOT, « Une polémique Air-Terre ; l’armée de l'Air et l’ALAT », dans Revue historique des Armées n°3, 1990, p. 149.
22
Les opérations héliportées en Algérie
possibilités qu’offrent les hélicoptères dans les opérations de maintien de l’ordre. Le ministère de la
Défense lance un programme ambitieux d’équipement avec l’achat d’appareils de tous types.
L’hélicoptère de transport se révèle l’un des moyens le plus adapté aux opérations de contre
guérilla menées en Algérie. Il possède des qualités indispensables à la réussite des missions :
maniabilité, grande mobilité tactique, vitesse, effet de surprise…
Trois catégories différentes d’hélicoptères interviennent au cours de la guerre d’Algérie : les
hélicoptères légers (Alouette II, Bell et Djinn), les hélicoptères cargos moyens (Sikorski H-19) et les
hélicoptères cargos lourds ( Piasecki – Vertol H-21)15.
Le SO 1220 Djinn est un petit monoplace à réaction, doté pour son premier vol d’un
turbogénérateur d’air Turboméca Palouste entraînant directement par éjection d’air pur, un rotor de
8,60 mètres. Ce principe a permis d’établir plusieurs records dont celui du monde d’altitude pour un
giravion de moins de 500 kg en atteignant l’altitude de 4 089 mètres.
La version biplace (SO 1221) vole la première fois le 15 décembre 1953. Les bons résultats
permettent la construction d’une première série de 25 appareils. Le Djinn est le premier hélicoptère
commandé et construit en série en France. Il est également le seul hélicoptère à réaction à avoir
obtenu la certification civile américaine. En tout, 175 SO 1221 sortent des chaînes d’assemblage, dont
une majorité pour l’ALAT.
Apprécié pour sa facilité et sa résistance mais critiqué pour ses performances moyennes et son
niveau vibratoire, le Djinn ne répond pas à l’ensemble des missions attendues d’un hélicoptère. A
partir de 1958, deux nouveaux projets de développement visent à compléter et moderniser ce modèle.
Ces projets n’aboutissent pas en raison de la disparition de la S.N.C.A.S.O.17, absorbée par la
S.N.C.A.S.E.18 pour constituer Sud Aviation, et de la mobilisation financière et humaine pour
développer et fabriquer l’Alouette 2.
15
Musée de l’ALAT : http://www.assoc.wanadoo.fr/aamalat
16
Caractéristiques techniques du S.N.C.A.S.O SO-1221 « Djinn » en annexe 1.
17
S.N.C.A.S.O (Société Nationale des Constructions Aéronautiques du Sud-Ouest) : regroupement des usines Blériot de Suresnes, de la
société des Avions Marcel Bloch de Villacoublay et Courbevoie, de la société Aéronautique du Sud-Ouest de Bordeaux-Mérignac, de
l’Usine de Construction Aéronautique de Bordeaux-Bègles, de la société Aérienne Bordelaise de Bordeaux-Bacalan et de la société Lioré et
Olivier de Rochefort.
18
S.N.C.A.S.E (Société Nationale des Constructions Aéronautiques du Sud-Est) : regroupement des sociétés Potez, CAMS, Romano et la
Société Provençale de Constructions Aéronautiques S.P.C.A.
23
ALAT et stabilisation
L’Alouette II effectue son premier vol en mars 1955. Cet hélicoptère est le premier à être propulsé
par un turbomoteur. Fabriqué par Aérospatiale, il possède de remarquables performances en vitesse
ascensionnelle et en plafond. Il peut être, entre autre, armé de quatre missiles antichars AS-11 et de
mitrailleuses 7,62.
Missions :
• évacuations sanitaires,
• transport commandement et P.C volant,
• liaisons opérationnelles et transport de passagers (1 pilote + passagers),
• observations, recherche de renseignements,
• transport de fret.
Equipements :
• sanitaire : deux civières déposées à l’extérieur de chaque côté de la cabine + 2 blessés
assis dans la cabine,
• radio V.H.F et H.F.
Le Bell 4720
19
Caractéristiques techniques du S.N.C.A.S.E SE-3130 Alouette II en annexe 1.
20
Caractéristiques techniques du Bell 47 en annexe 1.
21
V.S.V.
24
Les opérations héliportées en Algérie
Missions :
• évacuations sanitaires,
• transport commandement et P.C volant,
• liaisons opérationnelles,
• observations, recherche de renseignements,
• transport de matériel léger et peu encombrant.
Equipements :
• sanitaire : deux civières déposées à l’extérieur de chaque côté de la cabine,
• transport de petit matériel : deux paniers métalliques installés à la place des civières,
• radio V.H.F et H.F.
Le prototype du Sikorsky S-55 – version militaire du H-19 – effectue son premier vol en novembre
1949. Ses principales missions sont le transport de fret ou de troupes, voire l’évacuation sanitaire (six
blessés sur brancard). D’autres versions existent, permettant la recherche et la récupération de
personnels en mer ou en terrain ennemi. Il gagne pendant le conflit indochinois, en raison de sa
silhouette trapue, le surnom d’« Eléphant Joyeux ». Engagé au début de la guerre d'Algérie, il est vite
abandonné au bénéfice du H-21.
Le moteur est situé dans le nez de l'appareil, le rendant ainsi peu sensible aux variations de
chargement dans la cabine. Cette solution a été retenue pour sa facilité d’accès pour les mécaniciens
au sol. Le cockpit est en haut de l’appareil : les pilotes y accèdent en grimpant par les flancs. La
présence d'un amortisseur sur chacune de ses quatre jambes de train, ses pales métalliques, sa
maintenance aisée sans outillage spécialisé font du H-19A un hélicoptère de conception innovante et
avancée.
Missions :
• transport de commandos ou de passagers : 4 à 6 hommes assis, suivant les conditions
d’altitude, de distance à franchir et de température,
• évacuation sanitaire,
• transport de fret (un chargement représente approximativement une journée de vivres pour
une compagnie),
• transport de matériel sous le cargo,
• transport de matériel léger et peu encombrant.
22
Caractéristiques techniques du Sikorsky S-55 (H-19) en annexe 2.
25
ALAT et stabilisation
Equipements :
• sanitaire : 6 brancards,
• radio un poste V.H.F, un poste H.F, un radio-compas,
• vol de nuit : équipement normal,
• vol sans visibilité : autorisé de façon exceptionnelle pour la traversée de couches
nuageuses minces ;
• treuil latéral, échelle de corde.
L’hélicoptère lourd H-21 a été développé par la Piasecki Aircraft Corporation. Plus connu en
France sous le surnom de « Banane Volante » en raison de sa forme courbe, il possède un rotor à
chaque extrémité, un fuselage rectiligne et une longue section arrière inclinée formant la queue.
Appelé « WorkHorse » par les Américains, il fait son premier vol le 11 avril 1952 et conquiert
plusieurs records de vitesse et d’altitude.
Très utilisé lors de la guerre du Vietnam par l'US Army pour l'acheminement des troupes au
combat, le « WorkHorse » est armé de mitrailleuses légères sur les portes latérales. L'US Navy
l’emploie également pour des missions de recherche et de sauvetage.
Ces appareils connaissent un grand succès pendant le conflit algérien. Employés de façon intensive
par l’armée de Terre et par la Marine, ces 108 hélicoptères symbolisent le rôle dévolu aux voilures
tournantes en Algérie.
Plus l’altitude de la zone d’atterrissage est élevée, plus celle-ci doit être dégagée. Les pales du
rotor sont fragiles, par conséquent, l’appareil doit être abrité la nuit et par temps de pluie.
23
Caractéristiques techniques du Piasecki – Vertol H-21 en annexe 3.
26
Les opérations héliportées en Algérie
2 – Articulation
En 1953, le général Navarre, en concertation avec le général Beaufre, présente le « plan 100 »24. Il
s’agit de doter les forces terrestres, pour la fin 1954, d’une centaine d’hélicoptères, soit 25 appareils
légers et trois compagnies de 21 hélicoptères moyens.
L’utilité opérationnelle des hélicoptères est reconnue par l’état-major de l’armée de Terre
notamment dans le domaine des « liaisons de commandement, de la circulation routière,
d’observation d’artillerie et des reconnaissances d’itinéraires »25. La priorité essentielle est alors à
l’observation d’artillerie et l’évacuation sanitaire. Cependant, « les moyens de l’Aviation Légère, et en
particulier l’hélicoptère, doivent de plus en plus être considérés comme des véhicules de combat, de
transport et d’observation analogues à la jeep et aux véhicules de combat terrestres. Ces moyens
doivent pouvoir s’intégrer au dispositif tactique terrestre et être en mesure de vivre en parfaite
symbiose avec le combattant à terre »26.
Dès le début du conflit, l’ALOA est présente en Afrique du Nord. Trois hélicoptères arrivent en
octobre 1954 puis, au mois de novembre, deux appareils sont détachés au GAOA n°3 de Sétif afin de
le renforcer. Mais l’impulsion majeure a lieu à la fin mai 1955, quand les hélicoptères du Groupement
des Formations d’Hélicoptères de l’armée de Terre en Indochine27 arrivent en Algérie. Ils forment le
Groupe d’Hélicoptères de l’armée de Terre n°228 basé sur le terrain d’Aïn Arnat près de Sétif. Le
G.H.2 comprend deux escadrilles : la première est formée de Bell et fournit des détachements
extérieurs permanents dans le Constantinois. L’autre escadrille comprend des hélicoptères H-19, dont
deux sont prêtés à la Marine.
Les zones opérationnelles où les hélicoptères interviennent le plus fréquemment contre l’activité
rebelle se situent dans le massif des Aurès et les Nementcha (entre les villes de Batna, Khenchela,
Négrine et Biskra). Le 4 mai 1955, au mont Chelia29 dans la région des Aurès, se déroule la première
opération héliportée de l’histoire. C’est un succès ; le relief très accidenté et la rapidité de l’assaut
permettent à quelques légionnaires du 2ème BEP –appuyés par deux hélicoptères H-19 –de contrôler la
zone en onze minutes.
De son côté, l’armée de l'Air arme le Groupe mixte d’hélicoptère n°057 basé à Boufarik, soit 18
appareils employés dans la partie occidentale de l’Algérie, indépendamment de l’armée de Terre.
2. Organisation de la maintenance
L’instruction provisoire d’emploi des hélicoptères en A.F.N.30 affiche la maintenance comme une
priorité, ce qui nécessite une surveillance constante et un entretien minutieux en raison de la
complexité mécanique des hélicoptères. Certaines opérations périodiques doivent en effet être
effectuées sous abri et à l’aide d’outillage spéciaux.
C’est à Sétif, au sein du G.H.2, que s’implante la base principale de la maintenance31, de la
réparation32 et du stockage des pièces de rechange des appareils. Appelée MA/ALAT, cette unité a en
charge l’approvisionnement en pièces de rechange, comme l’entretien poussé des hélicoptères. Pour
24
Note n°428/EMIFT/4I du 10 septembre 1953, accepté par le ministre.
25
Lettre 9920/EMG.FA/G/ARMET du 5 octobre 1949. SHAT, 1 K 430.
26
Lettre au ministre n°1834/EMA/ALAT du 18 février 1952. Archives privées.
27
GFHATI.
28
G.H.2.
29
Le plus haut d’Algérie.
30
Archives du musée de l’ALAT de Dax.
31
Maintenance du 1er, 2ème , 3ème échelon et une partie du 4ème échelon.
32
Réparations 1er, 2ème et 3ème échelon.
27
ALAT et stabilisation
cela, elle possède des équipements performants dans ses ateliers et se trouve capable d’assurer la
maintenance lourde de 4ème échelon, qui autorise le démontage des ensembles principaux du H-21.
En outre, c’est aussi dans ces ateliers que sont révisés les moteurs des avions de liaison, le
montage des hélicoptères Agusta-Bell livrés par l’Italie comme le travail de tôlerie nécessaire aux
appareils aériens33.
Cette polyvalence de la base de Sétif s’explique autant par sa situation géographique favorable que
par la forte présence, dès la fin 1954, des hélicoptères dans cette région. Base principale de l’ALAT
en Algérie, c’est à Sétif que l’on fait appel pour les principales opérations aéromobiles. C’est aussi
Sétif qui fournit l’appui héliporté à toute la zone Est de l’Algérie. Tous les points compris dans la
zone où l’armée de Terre a la responsabilité des opérations héliportées, se trouvent à moins de deux
heures et demie de vol de la base principale.
Les opérations de maintenance consistent à démonter complètement, à inspecter et à réviser
chaque élément principal, puis à le remonter directement en l’absence de réparation importante. Dans
le cas où une pièce de l’élément doit-être réparée, l’élément ne doit pas être remonté mais renvoyé
aux concessionnaires, ce qui occasionne des délais et immobilise l’appareil. Les bonnes relations avec
le constructeur, dont certains ingénieurs et mécaniciens sont présents en Algérie, permettent une
livraison dans des délais très courts (une semaine), ce qui limite l’immobilisation des appareils et
participe aux bons résultats de l’armée de Terre française en terme de disponibilité du parc
d’hélicoptères.
Le 1er mai 1954, le premier Groupe d’Hélicoptères de l’armée de Terre (G.H.1) est créé à Satory,
près de Versailles, afin de former les pilotes et mécaniciens de l’armée de Terre. Sont mis à sa
disposition pour l’instruction à la navigation et la maintenance douze avions et vingt hélicoptères. En
septembre 1956, l’escadrille d’instruction du G.H.1 est délocalisée à Cherbourg-Querqueville, puis au
Luc en Provence en décembre 1956. L’effort se poursuit avec la création, le 1er août 1957, de l’école
d’application de l’aviation légère de l’armée de Terre34. Transférée à Sidi Bel Abbès, elle rejoint en
1963 Le Cannet des Maures.
La formation des pilotes s’y déroule en deux étapes35:
• une instruction au sol d’une durée de cinq semaines,
• une formation en vol sur hélicoptère léger (Hiller ou Bell) de dix semaines comprenant
cinquante heures de vol (35 h en double commandes et 15 h en solo).
La formation des pilotes d’hélicoptères légers s’achève ici. Les autres effectuent dix heures de vol
supplémentaires avant de passer à une phase de « spécialisation » sur hélicoptère moyen (S-51 ou H-
19 en fonction de l’armée) :
Des stages de vol aux instruments permettant de voler dans des conditions de mauvaises visibilités,
notamment la nuit, sont instaurés. Ceux-ci sont organisés dans l’objectif de sécuriser les vols de nuit.
Le général Redon, commandant l’ALAT, écrit en juillet 195936 :
« Déjà disponibles pour toutes missions de jour, demain vous précéderez de nuit la manœuvre des
troupes à terre.[…] Le pilote n’est complet que s’il sait tenir sa machine aux instruments. Former des
pilotes de l’ALAT au VSV, c’est se mettre au niveau normal et indispensable ».
Le lieutenant de vaisseau Bally, premier Pacha du détachement de la 31 F exprime selon lui les
qualités essentielles d’un pilote d’hélicoptère :
33
La maintenance de 5ème échelon de réparation correspondant au dépôt est effectuée par les concessionnaires des fabricants américains.
Pour le H-21 Vertol, le concessionnaire est « Héli-service », à Paris.
34
E.A.A.L.A.T
35
Carton SHAA n° C 2147
36
Correspondance du général COMALAT, 17 juillet 1959.
28
Les opérations héliportées en Algérie
« Les qualités requises pour un pilote d’hélicoptère en opération terrestre sont les mêmes que
celles exigées dans n’importe quelle forme de vol : habileté, décision rapide et juste, connaissance du
matériel, expérience, confiance raisonnée en soi »37.
Pendant les premiers mois de 1955, 23 pilotes sont formés pour un total de 465 heures de vol,
tandis que les pilotes revenus d’Indochine s’adaptent à leurs nouvelles machines. Cela permet une
mise en place opérationnelle rapide dans le déploiement des hélicoptères au combat.
Entre 1955 et 1958, le nombre d’hélicoptères décuple grâce à d’importants efforts financiers,
industriels comme dans le domaine des formations de tout le personnel.
En 1955, 21 hélicoptères sont présents en Algérie, pour des besoins exprimés à la hauteur de 224
hélicoptères (162 légers et 62 lourds)38. L’effort s’accroît ; en 1956, le parc compte 64 appareils dont
31 pour l’armée de Terre. Cela ne suffit toujours pas. Le général Salan demande39 :
« l’acquisition et la construction de 225 hélicoptères légers et des hélicoptères de combat
permettant le transport simultané d’environ 3 000 hommes. Les hélicoptères de transport d’assaut
pourraient être ainsi répartis : 100 H-21 Piesecki, 100 H-34, et 100 H-19, tel est le but à atteindre le
plus tôt possible. Les délais de pacification de l’Algérie dépendent étroitement d’une mise en œuvre
importante d’hélicoptères ».
Cette demande est appuyée par le ministre Bourgès-Maunoury40, qui s’engage à fournir à partir de
juillet 1957 un effort financier à la mesure des besoins en hélicoptères légers, puis à partir de mars
1958 pour les hélicoptères lourds41.
185
200
150 121
100 65
50 23
3
0
fin 1954 octobre-55 décembre-56 août-57 janvier-58
Plutôt favorable à la commande de H-34 en raison de son coup d’entretien plus faible que le H-21,
l’armée de Terre s’oriente finalement vers ce dernier. En effet, opérer un changement radical de
stratégie en faveur des hélicoptères lourds est difficile, voire impossible pour des industries françaises
confrontée à l’urgence du moment. L’expertise des pilotes donne raison au H-21 et le commandant
Crespin, qui commande le G.H.2, voit dans cet appareil un instrument « qui satisferait aux impératifs
du moment »42.
37
Rapport de prise de commandement du lieutenant de vaisseau BALLY, commandant la 31 F, 26 octobre 1956.
38
Note 1204/DN/C du 13 octobre 1955, SHAT, 2 R 196.
39
Lettre n°443 RM/10/3AAP du 11 juin 1956 à l’état-major des Armées.
40
Ministre de la Défense nationale du gouvernement Guy MOLLET du 1er février 1956 au 13 juin 1957.
41
Lettre au secrétaire d’État « Terre » n°6457 DN/CAB/ARM du 31 août 1956.
42
Lettre du commandant CRESPIN au général BOYER (représentant français auprès de la Mission d’Achat à Washington) du 21 novembre
1955, SHAT, 1 K 430.
29
ALAT et stabilisation
Les premières livraisons ont lieu en mars 195643 – 50 H-21 – tandis qu’une seconde commande44,
en date du mois d’août 1956 porte sur 25 appareils H-21 supplémentaires. Dans le même temps, les
armées insistent sur les avantages du H-34, suite à une série de rapports élogieux sur son emploi aux
cours d’opérations dans la région de Batna au mois de juillet 1956. 150 H-34 sont donc commandés.
Si, dans l’ensemble, le H-21 paraît plus opérationnel, notamment grâce à son train d’atterrissage, ses
portes transversales et ses performances intrinsèques, des raisons industrielles (coût et maintenance)
favorisent le H-34.
De 1956 à mai 1960, un total de 108 H-21 sont livrés à l’ALAT ; 28 seront accidentés et 14
détruits dont 4 par des tirs ennemis.
350
300
250
Nombre 200
d'appareils 150
100
50
0
01/01/1958 01/01/1961 01/01/1962
Années
43
Décision n°404 DN/CAB/ARM du 15 mars 1956, SHAT 1 K 430.
44
Décisions du ministre BOURGÈS-MAUNOURY n°5283 DN/CABARM du 2 août 1956.
45
Carton SHAT n° 6 T 593.
30
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
PARTIE 2
31
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
Les hélicoptères qui ont servi durant la guerre d’Algérie sont classés en trois catégories : légers,
cargos moyens et cargos lourds, présents dans les trois armées.
Armée de Terre :
• Groupes d’Hélicoptères.
• Pelotons Mixtes Divisionnaires.
Armée de l'Air :
• Escadres d’hélicoptères.
Marine :
• Groupe d’Hélicoptères de l’Aéronautique Navale (G.H.A.N) composé de flottilles.
L’utilisation de l’hélicoptère est défini dans le TTA 15246 :
• l’hélicotransport désigne « l’enlèvement, le transport et le posé d’effectifs ou de matériels
hors d’atteinte probable de l’adversaire »,
• l’héliportage désigne « l’intervention directe dans la lutte de commandos ou d’unités
héliportées, mis à terre sur les flancs ou les arrières de l’adversaire (à distance d’assaut
parfois) ».
Le TTA 106 reprend en partie ces définitions :
• l’hélitransport est défini par le « transport par hélicoptère de personnels ou de matériels
destinés à être déposés en zone contrôlée »,
• l’héliportage défini comme le « mouvement par hélicoptères d'éléments destinés à être
engagés dès la mise à terre. L'ensemble de l'opération comportant un héliportage est
qualifié d'opération héliportée (OHP). Elle s'inscrit indifféremment dans le cadre d'une
action aéromobile autonome ou conjuguée et nécessite des éléments de reconnaissance de
couverture et d'appui ».
2. Le binôme avion/hélicoptère
Les avions sont partie intégrante des opérations menées en Algérie. Au début de la guerre, le
GAOA n°3 est implanté à Sétif. Fort de douze avions Morane et de quelques L 18, il est cependant
vite submergé par les missions imposées. Le ministre de la Défense décide alors de renforcer
l’aviation d’observation en augmentant le nombre de GAOA. De même, on affecte à chaque division
un peloton d’avions47.
46
TTA 152, Emploi d’unités hélicoportées en AFN, approuvé par D M 4894 du 4 mai 1956.
47
Rapport du chef d’escadron RAZY au ministre de la Défense du 25 juin 1955. SHAT, 1 K 430.
33
ALAT et stabilisation
L’avion exerce pour les troupes au sol un soutien tant physique que moral. Il permet de repérer
et d’accrocher les bandes ennemies, de localiser les fuyards après un combat, de réduire les
positions adverses.
Bientôt, tous les pelotons sont dotés de L 18 pour les petites liaisons et les accompagnements de
convois, et de six avions d’armes pour toutes les missions de guerres. La répartition des avions
d’armes est la suivante :
• 7 pelotons sont équipés en L 21,
• 9 pelotons sont équipés en Nord 3400,
• 13 pelotons sont équipés en L 19.
L’ALAT compte 17 Pelotons Mixtes Avion-
Hélicoptères :
• 5 PMAH dotés de Djinn,
• 4 PMAH dotés de Bell,
• 8 PMAH dotés d’Alouette II.
Les principales missions de ces avions ont été reprises de l’Indochine et adaptées à plus grande
échelle. Elles concernent :
• la recherche de renseignement (photographies…),
• le guidage des commandos de chasse,
• l’accompagnement des troupes,
• la protection des convois,
• le réglage de l’artillerie.
Rares sont les opérations qui se déroulent sans la participation des avions d’observation. Leurs
rôles sont multiples :
• relais-radio,
• coordinateur des appuis,
• guide des unités égarées,
• observateur,
• éclaireur.
C’est le 8 mars 1956 que se déroule la première opération héliportée significative impliquant les
moyens du G.H.2. Le lieutenant-colonel Bigeard, à la tête du 3ème Régiment de Chasseurs
Parachutistes, est le maître d’œuvre de cette mission. Le but est de retrouver une compagnie du 3ème
Bataillon de tirailleurs algériens, accusée d’avoir déserté pendant la nuit après avoir assassiné ses
cadres. La mission est un succès : les parachutistes bénéficient de six H-19 et d’un Bell qui assurent la
réussite de la mission. 115 ennemis sont tués, quinze déserteurs repris et une centaine d’armes
récupérées. Les hélicoptères ont été utilisés non pas comme un véhicule commode, mais bien comme
un engin d’assaut employé de concert avec une troupe motivée.
34
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
L’hélicoptère démontre ses capacités face à la guérilla. Il paraît le mieux adapté pour accomplir les
opérations dans les conditions environnementales de l’Afrique du Nord (relief, température, vent…).
Ces appareils apportent une grande mobilité tactique, la vitesse et la surprise des troupes terrestres face
aux combattants du FLN.
Protection
Il s’agit de protéger des points sensibles que sont les infrastructures administratives, militaires et
économiques situés pour la plupart en zones urbaines et suburbaines mais aussi celles situées dans des
zones beaucoup plus isolées (centres miniers ou ruraux, barrages, relais téléphonique…) Ces points
isolés doivent pouvoir être renforcés ou dégagés en quelques heures, en tenant compte des difficultés
d’accès liées au terrain et des embuscades possibles. L’hélicoptère est à même de répondre à ce
besoin.
Contre-guérilla
Intervention
Face à un ennemi fluide, qui a pour atout la connaissance du terrain, le commandement doit contre
attaquer en très peu de temps avec les moyens adaptés. Face à des bandes qui se dispersent sitôt leur
opération achevée, la règle des gros bataillons ne vaut guère et il faut privilégier des réactions rapides
et violentes. Pour le général LORILLOT49 :
48
TTA 152, Emploi d’unités hélicoportées en AFN, approuvé par DM 4894 du 4 mai 1956.
49
Général André Martini, L’Histoire de l’Aviation Légère de l’armée de Terre 1794-2004, Paris, Lavauzelle, 2005.
35
ALAT et stabilisation
« les remarquables possibilités de ces appareils [les hélicoptères] ne prennent toute leur valeur
que s’ils interviennent sans délai dans un rayon de 5 à 15 km autour du point d’embarquement et
transportent un minimum d’effectif en une rotation soit une section allégée de 30 hommes ».
Les « hélicos » renforcent dans des délais brefs les effectifs présents au sol dans la zone des
combats et s’opposent ainsi directement à la guérilla.
Cette large utilisation de l’hélicoptère dans les espaces lacunaires50 est possible en raison de ses
caractéristiques :
• vol stationnaire ou à faible vitesse,
• capacité à décoller et à atterrir verticalement,
• peu de contraintes de terrain,
• grande manœuvrabilité,
• visibilité importante au sol.
L’hélicoptère permet de répondre efficacement à l’absence de ligne de front et à la présence
diffuse de l’adversaire. Il permet de renseigner le commandement français sur les intentions
ennemies, offrant une meilleure réaction aux troupes chargées du maintien de l’ordre.
Comme tout aéronef, l’hélicoptère dispose en relation avec son emploi de limites et de restrictions
liées à plusieurs facteurs51. Ces derniers sont en relation avec la technicité de l’appareil, le climat et le
relief et peuvent être extrêmement contraignants sur le territoire algérien :
• La météo réduit et même condamne l’utilisation de ce type d’appareil dans certaines
conditions, notamment lorsqu’il y a de la brume, de la pluie, de la neige, des tempêtes de
sable, des turbulences importantes ou des risques de givre ;
• Le poser sur une pente et le largage en vol stationnaire à faible hauteur sont possibles à
condition que la charge des appareils ait été préalablement réduite ;
50
Zone de manœuvre dans laquelle les zones de responsabilité des unités subordonnées sont disjointes et/ou qui comporte des espaces vides
de forces, générant à la fois des difficultés de contrôle dans les espaces « vides » et des opportunités de manœuvre, TTA 106.
51
Instruction sur la conduite des opérations héliportées en Algérie, Bibliothèque École Militaire.
36
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
• Selon le climat et le relief, la charge utile d’un hélicoptère est limitée. Dans un relief
accidenté, avec de fortes amplitudes thermiques, les contraintes se multiplient pouvant
limiter l'accès à certaines zones pendant certaines périodes ;
• Plus la distance à parcourir est grande, plus la quantité d’essence à emporter est importante.
Cela limite d’autant la charge utile de l’appareil ;
• L’hélicoptère ne peut se poser sans avoir repéré le terrain. Dans des conditions dégradées,
le vol est interdit (même si la formation au vol aux instruments se développe au cours de la
guerre) ;
• L’appareil est vulnérable à la défense anti-aérienne. Des tirs de mitrailleuse de 14,5 mm à
800 mètres peuvent détruire un appareil. Pour mémoire, une Alouette II volant à vitesse
normale et à basse altitude n’a un répit que de cinq minutes face à une troupe normalement
pourvue en armes automatiques ;
• L’emploi de l’hélicoptère coûte plus cher que celui des avions : les matériaux doivent être
plus résistants aux vibrations, le nombre fabriqué en plus petite série, l’essence est
spécifique et enfin la maintenance est plus complexe.
52
Notice provisoire sur l’emploi du D.I.H dans le cadre de la guerre subversive.
37
ALAT et stabilisation
La répartition des moyens aériens est organisée de manière à ce que la sécurité soit le point central
de toute intervention. Le souci est d’accroître la sûreté des opérations héliportées sans nuire à
53
Étude sur l’extension de l’ALAT, 23 août 1955, SHAT, 1 K 430.
54
Instruction du général Salan sur la conduite des opérations en Algérie, sans date, fin mars 1957.
55
Lettre au ministre n°959 RM/10/3.AAP du 1er août 1957.
56
Compte rendu d’activités du mois de juin 1957 du DIH d’El Milia. Archives du général Cannet.
38
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
l’efficacité. Pour l’héliportage d’une demi-compagnie de combat (cas le plus fréquent), des règles
doivent être appliquées57 :
• Le commandant de l’opération héliportée et l’officier OPS Air disposent d’un hélicoptère
léger de commandement et de guidage (PC volant) ou au minimum d’un avion
d’observation ;
• Le nombre minimum
d’appareils de transport lourd
mis en œuvre dans une
opération héliportée doit être
suffisant pour permettre le
transport en une rotation d’une
unité adaptée à la mission.
Cela correspond généralement
au transport de deux sections
allégées, soit 40 hommes ;
• La protection des militaires
débarqués est assurée par un
hélicoptère armé, chargé d’assurer la couverture de la zone d’atterrissage et le guidage de
la formation d’hélicoptères pendant les dernières secondes précédant le poser. Souvent, le
commandant du DIH ou son adjoint prennent place à bord de cet engin pour suivre les
premiers moments de l’opération ;
• Des neutralisations préalables et simultanées s’ajoutent au dispositif (tirs d’artillerie,
emploi de fumigènes…).
Les DIH stationnent à proximité immédiate des zones de combat et progressent en fonction des
résultats obtenus. C’est une manœuvre permettant le débordement vertical de l’adversaire.
Le nombre réduit des hélicoptères lourds ne permet pas d’en attribuer en permanence à tous les
échelons. Ce manque se traduit par la mise en place de DIH sur des bases parfois temporaires et
distinctes de la base principale de soutien. Les DIH doivent être dans la capacité d’intervenir pendant
plusieurs jours loin de leur base logistique principale.
Deux phases caractérisent leur emploi se réalise en :
• une phase de mouvement, au cours de laquelle le DIH peut transporter un renfort
directement sur les lieux de l’opération
• une phase de manœuvre, au cours de laquelle le DIH héliporte soit des troupes déjà
engagées dans l’opération, soit des réserves locales.
57
Instruction sur la conduite des opérations héliportées en Algérie, Bibliothèque École Militaire.
39
ALAT et stabilisation
Les DIH effectuent deux types de missions différentes, celles dite « normales » et celles dites
« éventuelles ».
40
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
41
ALAT et stabilisation
1. Organisation du commandement
C’est le commandant de l’ensemble de l’opération qui prend la décision d’un héliportage après avis
technique du chef du P.C.A. Il désigne par la suite un commandant de l’opération héliportée et lui fixe
sa mission.
42
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
L’équipe qui prépare les missions héliportées réunit le commandant de l’opération héliportée et un
officier détaché de l’armée de l'Air. Ils reçoivent dans la mesure du possible les conseils techniques du
commandant du DIH, du commandant de l’unité héliportée et éventuellement d’un officier observateur
de l’ALAT.
Le manuel d’ « instruction sur la conduite des opérations héliportées en Algérie » insiste sur le
respect des procédures afin de ne rien laisser au hasard. Il s’agit donc de :
• mettre en alerte les unités à transporter et la désignation des zones d’embarquement,
• choisir les aires de poser en s’appuyant sur deux considérations principales :
o tactiques :
intérêt pour la manœuvre,
isolement de l’unité héliportée qui doit pouvoir être jointe par les unités à
terre dans les délais correspondant à sa capacité de combat, compte tenu de
la mission reçue et de l’adversaire.
o techniques :
terrain,
météo.
• étudier des aires de poser de déroutement.
Enfin, il est prévu que : « La reconnaissance des zones de poser sera évitée chaque fois que
possible afin de ménager l’effet de surprise. Le choix sera effectué de préférence en fonction des
couvertures photographiques ou de la connaissance du terrain par les officiers participant à la
préparation58. »
Après cette phase de préparation, le plan de l’opération héliportée est arrêté :
• horaire des missions feu d’appui et leur point d’application,
• horaire de l’opération héliportée,
• plan de transport (fractionnement, itinéraires, délais d’acheminement, nombre de
rotations).
Les ordres de missions sont transmis sous forme de tableau par le commandant de l’opération
héliportée et l’officier Air aux commandants des unités héliportées, au commandant du DIH, ainsi
qu’aux formations aériennes chargées des neutralisations, éventuellement de l’artillerie et aux services
chargés du soutien du DIH59.
Dernier point, les commandants des unités héliportées désignent les officiers d’embarquement et
fractionnent les unités en groupes adaptés aux capacités d’emport des hélicoptères.
58
Instruction sur la conduite des opérations héliportées en Algérie.
59
Voir annexe 4.
43
ALAT et stabilisation
L’aire d’atterrissage de l’hélicoptère doit être aménagée discrètement de telle sorte que les
combattants ennemis ne soient pas en mesure de découvrir son existence. Il est important de tenir
compte de son environnement lors de son élaboration : horizontalité du sol, dégagement des abords et
facilité offerte pour sa défense.
Dans des opérations de contre-guérilla, l’hélicoptère employé en mission d’« hélicotransport »,
assure le renfort ou la relève de commandos, en limitant au maximum les fatigues et les pertes de
temps. Il est également employé pour assurer les ravitaillements en matériel, munitions et vivres, ainsi
que pour effectuer les évacuations sanitaires.
L’urgence d’une intervention peut amener le commandement à se servir de l’hélicotransport pour
déployer sur zone une unité réservée appartenant au dispositif d’intervention. Afin d’économiser le
potentiel des appareils, les moyens de transport doivent être combinés : hélicotransport, aérotransport
et voie routière. Une première rotation de l’appareil est projetée sur le lieu d’intervention dans les
délais les plus brefs tandis que le reste de l’unité fait mouvement par avion ou camion vers le point de
débarquement. Celui-ci est choisi en fonction :
• de l’adversaire, c’est à dire à la « limite de la zone de sécurité relative, au-delà de laquelle
les mesures de sûreté feraient tomber la vitesse du convoi routier dans des proportions
incompatibles avec l’urgence de l’intervention » ;
• du terrain, en prêtant attention à l’existence « d’un terrain d’aviation, des possibilités de
zones de saut ou de ravitaillement par air, et du point à partir duquel l’itinéraire s’élève en
montagne ou traverse une zone coupée et couverte propice aux embuscades » ;
• de l’itinéraire aérien optimum, c’est à dire le point de transbordement le plus facilement
atteint par l’hélicoptère et lorsque l’itinéraire routier atteint un col, un sommet ou une
vallée ;
• de la volonté de leurrer l’ennemi, en choisissant un point de transbordement sur un
itinéraire routier qui ne conduit pas au point de destination de l’unité d’intervention.
44
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
-
TTA 152, Emploi d’Unités hélicoportées en maintien de l’ordre en A.F.N.
Afin de mettre la totalité des unités sur zone, plusieurs rotations d’hélicoptères sont nécessaires. Le
facteur vitesse est essentiel pour que la manœuvre sur le terrain n’en pâtisse pas. Il faut donc limiter la
distance entre lieux d’embarquement et de débarquement des troupes.
Les hélicoptères armés sécurisent les phases critiques de l’intervention héliportée (approche,
atterrissage et dégagement).
L’utilisation de l’hélicoptère armé intervient donc en combinaison avec l’avion au cours de deux
phases coordonnées. Des règles communes d’engagements et de sécurité doivent être prises (aucun
atterrissage ne peut être effectué sur une zone battue par le feu ennemi) :
• neutralisation éventuelle de la DZ,
• marquage précis de l'Aire d’atterrissage, posé du DIH et encagement61 simultané de la zone
par l’aviation.
60
Deux exemples d’opération héliportée en annexe 5.
61
Action de feux visant à isoler des forces ennemies notamment en les coupant de leurs renforts et en interdisant leurs ravitaillements.
45
ALAT et stabilisation
4.1 Neutralisation de la DZ
Une neutralisation de la DZ et de ses alentours immédiats est effectuée lors d’une première phase
appelée « neutralisation primaire ». Celle-ci se traduit par une action combinée de tous les moyens
disponibles :
• soit l’artillerie,
• soit l’aviation (roquettes, bombes et armes de bord),
• soit l’hélicoptère armé.
Un document publié par le Groupement 101 résume le concept et l’esprit de manœuvre qui anime
les exécutants et qui va au-delà du simple transport par air62. :
« Connaissant parfaitement la zone dans laquelle il opère, les axes de déplacement habituels des
bandes, les relais et refuges dont elles disposent, souvent leur importance et leur armement, le chef
fait une hypothèse, extrapole le mouvement de l’ennemi sur le terrain et dans le temps.
Ayant choisi son terrain et son moment, il frappe.
Si la bande n’est pas au rendez-vous, il joue une deuxième hypothèse sur un autre axe ou un autre
compartiment de terrain et applique une nouvelle fois ses moyens sur le point choisi ; à moins qu’il ne
décide de retourner entièrement l’opération et de surprendre l’ennemi là même où celui-ci n’était pas
hier mais où il se trouvera peut-être aujourd’hui parce qu’il sait que l’endroit était fouillé et qu’il s’y
croyait désormais en sécurité »
Le commandant de l’opération héliportée reste libre de supprimer la neutralisation préalable, et
parfois même l’encagement, si ses renseignements lui assurent l’absence de mouvements ennemis.
Cependant, il est préférable de prévoir des moyens d’appui en alerte le cas échéant, comme la présence
de l’artillerie ou le passage de la chasse en vol à la verticale de l’objectif.
En cas de neutralisation par l’aviation, celle-ci doit être :
• très courte (durée maximale : 5 minutes) afin d’apporter le moins de retard possible à
l’exécution de la manœuvre,
• continue, jusqu’à l’atterrissage de la première vague d’hélicoptères.
Le dispositif est minuté afin que les hommes soient à terre dès la fin de la neutralisation.
Cette phase délicate de l’opération est commandée par l’officier détaché de l’armée de l'Air qui se
trouve avec le commandant de l’opération héliporté à bord du P.C volant. Cette étape requiert :
• une parfaite coordination aérienne,
• une exécution rapide des opérations qui suivent la « neutralisation primaire », c’est à dire le
marquage précis suivi de l’atterrissage immédiat du DIH protégé par l’encadrement de
zone.
La répartition des actions à mener par les différents dirigeants de l’opération est bien définie. Elle
est d’une importance extrême et demande une attention particulière de leur part.
62
Général André MARTINI, Op.Cit.
46
Conduite et mise en place des opérations héliportées dans la lutte contre la guérilla en Algérie
L’officier air désigne ou fait désigner les objectifs que les moyens aériens doivent neutraliser. Il
dispose d’avions d’observation, d’appuis feu léger, ou d’hélicoptères armés. Il coordonne la protection
aérienne jusqu’à l’arrivée du DIH sur la zone d’atterrissage, et oriente l’aviation légère dans ses
missions d’observation autour de la zone de poser choisie. Enfin, il surveille l’approche finale, le
débarquement et le dégagement des hélicoptères, dans le but de réagir rapidement et de diriger toute
action aérienne pour contrer une réaction ennemie.
Le commandant de l’opération héliportée garde un contact radio étroit avec l’unité transportée
après son débarquement et assure sa couverture aussi longtemps que nécessaire. Il dirige les variations
des feux d’artillerie et confirme la mission suivante du DIH, qui peut être une nouvelle vague, ou
l’attente en alerte à la base avancée.
Le commandant du DIH (dans l’hélicoptère leader) dirige l’ensemble en fonction des horaires et
de l’itinéraire prévu. Il assure la protection rapprochée des premiers commandos débarqués. En cas
d’imprévus, il est habilité à prendre la direction de la phase de poser. Lorsqu’il n’y a pas d’hélicoptère
armé, il dirige sa formation du premier hélicoptère cargo.
Le commandant d’unité héliportée fait assurer la protection de la zone de poser par les premiers
éléments héliportés avant d’exécuter sa mission.
Dans certains cas, les missions peuvent être annulées et modifiées en fonction des conditions
suivantes :
• Des renseignements nouveaux peuvent rendre la manœuvre prévue inutile.
• Des éléments suspects sont repérés sur la zone d’atterrissage. L’annulation ou le
changement de la mission sont sous la responsabilité du commandant de l’opération
héliportée, renseigné par l’officier air ou par le commandant du DIH.
• L’impossibilité de se poser.
Dans tous les cas, il faut :
• étudier toutes les possibilités de déroutement au cours de la préparation de la mission
héliportée, c’est-à-dire prendre en compte de nouvelles zones d’atterrissage qui permettront
le cas échéant de se poser en toute sécurité. Ces zones doivent être bien distinctes les unes
des autres ; en effet deux zones trop rapprochées peuvent connaître les mêmes contraintes
extérieures (météorologique, mais surtout sous les feux de l’adversaire).
• procéder à une reconnaissance rapide et suffisante de la nouvelle zone choisie. Celle-ci
est effectuée par le commandant héliporté et l’officier air.
• Mettre en attente la vague d’hélicoptères suivant le temps de reconnaissance. Si le
repérage prend trop de temps, le commandant de l’opération héliportée donne l’ordre de
ramener l’ensemble des hélicoptères à l’aire d’embarquement.
47
Enseignements
PARTIE 3
ENSEIGNEMENTS
49
Enseignements
Après une répartition des tâches avec l’armée de l'Air et la Marine, les moyens de l’ALAT se
focalisent essentiellement dans la région Ouest, la plus active d’Algérie. Sa base principale, située à
Aïn Arnat, près de Sétif, abrite le Groupement Héliporté n°2. A la fin août 1962, le G.H.2 a effectué
un total de 206 877 heures de vol63 :
• 37 504 heures sur Bell,
• 35 392 heures sur Alouette II,
• 30 505 heures sur H-19,
• 87 344 heures sur H-21,
• 16 132 heures d’avion.
90 000
80 000
70 000
Heures de vol
60 000
50 000
40 000
30 000
20 000
10 000
0
Bell AlouetteII H-19 H-21 avion
Ces nombreuses heures de vol ont permis de réaliser notamment 13 556 évacuations sanitaires dont
1 157 de nuit pour un total de 20 329 blessés évacués (dont 2 199 de nuit).
63
Général André MARTINI, Op.Cit.
51
ALAT et stabilisation
La guerre d’Algérie met à l’épreuve les relations entre personnels de l’armée de Terre et de l’armée
de l'Air au sujet de leurs responsabilités et de l’utilisation des moyens aériens. Pour mettre fin à cette
querelle, le ministre de la Défense Pierre Messmer décide en 1962 que64 :
• chaque armée, et non plus la section commune, finance les matériels pour lesquels elle a
exprimé des besoins organiques,
• l’armée de Terre est responsable de tous les hélicoptères légers, intermédiaires et cargos
légers qu’elle utilise,
• l’armée de l'Air et la marine sont responsables des hélicoptères qui leur sont propres,
• l’armée de l'Air est responsable des cargos moyens nécessaires à l’ensemble des forces.
Grâce au G.H.2, l’armée de Terre démontre sa capacité à intervenir dans un type de combat
nouveau avec ses moyens propres. C’est réellement au cours de cette guerre en Algérie que
l’utilisation des hélicoptères aussi bien légers, moyens que lourds se développe. Une véritable
doctrine d’emploi de la force héliportée naît, au contact, au soutien et en appui des forces terrestres
(évacuation sanitaire, support logistique, renseignement et combat). L’armement des premiers
hélicoptères, la capacité à mettre en œuvre une flotte importante d’appareils et l’apparition du vol
de nuit et sans visibilité posent les fondements de l’aéromobilité actuelle.
L’hélicoptère devient un outil fondamental pendant le conflit. A partir de 1958, plus aucune
opération d’importance n’est pensée et conçue sans l’appui des voilures tournantes. Cela oblige à une
adaptation constante afin de faciliter la mise en œuvre des hélicoptères et surtout de son personnel mis
à l’épreuve. Ces difficultés sont de natures diverses.
1. L’environnement
Le H-21 possède de nombreuses qualités tels qu’une vaste soute et une très bonne compatibilité
avec l’héliportage, cependant, l’altitude et la température deviennent très vite limitantes pour ce type
d’hélicoptère. La combinaison altitude/chaleur diminue de moitié les performances de l’hélicoptère,
essentiellement en raison de la diminution de la densité de l'Air et donc de la portance. L’altitude
d’intervention se situe en moyenne vers 1 500 mètres.
Pour limiter ces effets, le tiers ou même le quart de la soute seulement sera occupé si le piton a une
altitude élevée afin de réduire la masse d’emport, et ainsi permettre à l’appareil d’acquérir des
performances supérieures. Les qualités du pilote sont mises à rude épreuve pour permettre un meilleur
rendement.
64
DM n°629/EM/A/ORG de mars 1962. SHAT, 6 R 32.
52
Enseignements
2. La maintenance
Les H-19 ont posé un problème délicat. Livré au fur et à mesure, sans livrets techniques, le parc
vieillit avec plus ou moins de bonheur. En outre, aucun outillage spécialisé n’est fourni, ce qui oblige
les mécaniciens à des trésors d’imagination et de débrouillardise en cas de panne. La question des
pièces de rechange est un autre souci. L’importation est lente (les fournisseurs sont aux États-Unis), il
n’existe pas non plus de documentation technique qui permette au demandeur d’exprimer ses
demandes de façon précise. La solution commune tient alors à la « cannibalisation », c’est-à-dire le
prélèvement sur une partie des appareils des pièces défaillantes afin d’autoriser le maintien en
condition opérationnelle de l’autre moitié. Les inconvénients de ce procédé sont multiples : la
transformation de quelques appareils en « squelettes » provoque par la suite d’énormes difficultés pour
leur remise en service, auxquelles s’ajoute la perte de temps importante pour les mécaniciens.
Pour autant, la situation est contrastée. Le bilan des H-21 est particulièrement bon. Les études
postérieures insistent sur la disponibilité (autour de 60 %) de cet appareil. En outre, ce chiffre n’a
guère de sens puisque il y a plus d’hélicoptères que de personnels pour les faire voler. Il ne suffit donc
pas que disposer d’assez d’appareils mais au contraire, de développer l’instruction des pilotes et la
fabrication d’appareils pour répondre à ses besoins.
Ce souci de disponibilité provient du temps d'immobilisation au sol due à « l’attente de
maintenance ». En effet, la maintenance des hélicoptères est alors assurée par une seule équipe de
mécaniciens, sur la base d’un travail de huit heures par jour, six jours par semaine. En rapport, les
opérations héliportées se définissent sur la base d’une journée de douze heures et d’une semaine de
sept jours. Il y avait donc une possibilité d’augmenter le taux de disponibilité des appareils à
condition de réduire le temps d’attente et d’aménager le temps de travail. Dès 1958, les équipes au
sol pointent le manque d’équipes de mécaniciens en alternance.
Afin de satisfaire au mieux le besoin de maintenance, le manutentionnaire propose d’adapter un
système de décentralisation des bases. Les bases avancées de l’Est algérien ne se trouvent pas à plus
de deux heures et demi de vol de Sétif. Le temps de déplacement représente 10% du temps de vol total
entre chaque révision périodique. Cela reste raisonnable par rapport au prix que coûterait le transport
des outils et du matériel nécessaires jusqu’à ces bases décentrées.
Entre chaque révision périodique, les hélicoptères restent dans leurs bases. L’étude de la recherche
opérationnelle indique alors qu’un minimum de trois hélicoptères doit être stationné à chaque base
avancée, doté d’un stock normalisé de pièces de rechange.
53
ALAT et stabilisation
avant d’être commandant de bord. C’est seulement de cette manière qu’il peut connaître la réaction de
son appareil dans chaque situation, et ainsi pouvoir assurer tous types de missions.
80000 18
Nombre des heures de
70000 16
60000 14 Nombre
50000 12 d'accidents
10 pour 10000h de
vol
40000
8 vol
30000 6 Nombre
20000 d'heures de
4
10000 vol
2
0 0
Taux
d'accidents
53
54
55
56
57
58
59
19
19
19
19
19
19
19
pour 10 000h
Années de vol
4. Le matériel
Le H-21 est l’hélicoptère majoritairement présent sur les opérations et son emploi fait l’objet d’une
procédure de retour d’expérience dont on tire les enseignements.
D’abord, il s’est avéré que la communication entre les hommes, à l’intérieur de l’hélicoptère H-21
lors du transport, était très compliquée en raison du bruit ambiant. Il en résultait alors des
difficultés dans l’annonce des procédures aux hommes du commando pendant la phase de vol. Le
pilote, chef dans l’hélicoptère, donne ses directives et notamment l’ordre de débarquer suivant les
conditions opérationnelles : conditions météorologiques, feu de l’ennemi, état du terrain… En
définitive, c’est le pilote qui choisit d’atterrir ou non sur la DZ ou de privilégier plusieurs passages
afin de repérer les lieux.
65
M. ZYBERMAN, Les hélicoptères militaires français 1945-1962 Indochine-Algérie, Mémoire DEA d’histoire contemporaine, année 1986-
1987, p. 68.
54
Enseignements
D’autre part, le chef des troupes terrestres doit donner avant le débarquement les consignes de
déploiement. Afin d’effectuer cette opération, il a été envisagé d’installer un système d’intercom, qui
finalement n’a pas été adopté en raison de sa difficulté d’emploi (casques+fils) associé aux
équipements des commandos. Par la suite, un haut-parleur est placé dans la cabine.
Les trente dernières secondes précédant l’engagement de l’hélicoptère sont cruciales. La diversité
des zones de débarquement favorables pour le chef d’équipe au sol, ne l’est pas forcément pour le
pilote de l’hélicoptère. Lors de cette phase finale de vol, un effort est fait pour que le chef d’unité
terrestre et les pilotes soient toujours en contact. La communication par intercom est favorisée. Les
temps héroïques du chef de troupe terrestre dans l’embrasure de la porte du cockpit entre le pilote et le
co-pilote se hurlant à l’oreille pour discuter du point où il convient d’atterrir est révolu66.
5. L’armement
Les appareils étant trop vulnérables face à l’ennemi, les responsables du G.H.2 décident en 1957 de
faire de l’hélicoptère une plate forme de feu. Durant tout le conflit ils ont cherché, expérimenté et
amélioré des armements différents. Ils pensent au départ placer un tireur et une MI-55 sur les plateaux
porte-civières des hélicoptères d’évacuation sanitaire. Ils essayent tout compte fait de réaliser cette
idée en adaptant ceux du Bell 47 pour un tireur et son fusil-mitrailleur 24-29. Le 27 juin, le premier
vol s’effectue, un tireur sur chaque plateau de part et d’autre de l’appareil. Les essais sont satisfaisant,
mais on s’inquiète des problèmes de surcharge.
En 1956, des missiles filoguidés SS-10
d’une distance franchissable de 1 650 mètres
sont montés sur le Bell 47. Les gouvernes
sont dirigées par une manette tel « un
joystick de jeu vidéo »67. Cependant, il est
difficile d’en garder le contrôle car le tireur ne
distingue plus qu’un minuscule point
lumineux – dû à l’absence d’un système de
visée optique grossissant. Les résultats
déclarés acceptables, le concept s’adapte sur
l’Alouette II avec quatre missiles SS-10 puis
SS-11, plus stables et de portée plus longue, à
l’efficacité redoutable.
L’armement des « bananes », auquel étaient opposés les états-majors, s’effectue en trois étapes.
Le manutentionnaire aménage le train avant pour recevoir deux mitrailleuses de .30 (7,62 mm) et
deux lance-roquettes de 68 mm Matra122 à six alvéoles.
Une seconde batterie de tests cherche l’adéquation entre calibres, poids, encombrement. Finalement
on installe sous le fuselage des roquettes Matra 361 de 37 mm68, à l’emplacement initialement prévu
pour des réservoirs supplémentaires.
66
Mme T.R. PIERPONT et M. L.J GEIER, French army H-21 helicopter operations in Algeria, ouv.cit.
67
Le Fana de l’Aviation, Histoire, février 1996.
68
Lettre à l’état-major de l’armée de Terre, n°136/RM.10/3.EXP du 19 mai 1958. Musée de l’ALAT.
55
ALAT et stabilisation
Lors d’essais supplémentaires, on remplace les deux mitrailleuses de .30 par des AA 52. Cela
nécessite une customisation du train avant, puisqu’on monte sur l’hélicoptère une plate-forme dessinée
pour un avion…
Une dernière « batterie de tests » développe
un support spécifique, la SAMM 410. La
dispersion des balles est alors sensiblement
supérieure à celle des armes tirant du sol, ce
qui est considéré alors comme correct. L’effet
des roquettes permet une puissance de feu
sans commune mesure à l’époque car il
« sature » une zone étendue.
A partir du 6 juin 1958, les premiers H-21
sont dotés de ces équipements pour escorter les
DIH à la demande du général Lorillot, chef
d’état-major de l’armée. Cette requête
s’explique par « l’urgence qui s’attache à
pourvoir assurer grâce à cet armement la protection des détachements héliportés au moment le plus
délicat que constitue le poser»69. Il s’en est suivi leur installation sur les Alouette II70. La mitrailleuse
de AA52, en sabord de cet hélicoptère armé, est considérée par le commandant du peloton mixte de la
19e DI, comme d’une « très bonne efficacité tant en intervention feu qu’en accompagnement de
troupes en opérations »71. L’Alouette II remplace le H-21 dans la conduite des opérations en raison de
sa maniabilité et de sa difficulté à être atteinte par les tirs ennemis. A partir de 1958, un effort est fait
pour armer deux Alouette II par DIH.
6. La logistique
L’emploi d’avions à voilure fixe pour le transport des pièces de rechange et du personnel destiné à
l’appui des hélicoptères, est possible en raison de la forte concentration de terrains d’aviation. Ceux-ci
sont utilisés en raison de leur coût inférieur à celui des hélicoptères. Ils interviennent également
lorsque les articles à transporter sont trop lourds ou volumineux pour les hélicoptères d’appui
logistique. Les installations peuvent être envisagées dans le cadre d’une base avancée.
Les opérations menées sur hélicoptères se différencient nettement des missions sur avions. Elles
sont beaucoup plus éprouvantes nerveusement pour les hommes. Soumis à des paramètres plus
complexes, par exemple les vibrations des pales et du rotor, le bruit et la fréquence des rotations entre
chaque embarquement et débarquement mettent à l’épreuve les organismes. Les conditions de vie des
pilotes sont difficiles : réveil de bonne heure, attente de l’opération, départ et décollage, déplacement
vers la zone de débarquement accidentée ou exiguë et qui peut être également, suivant les cas, sous feu
ennemi ou non.
69
Lettre n°3176/EMA/ARMET du 10 juin 1958.
70
Directive n°2297/ALAT/BE du 16 juin 1961, signée par le général LE MASSON.
71
Compte rendu d’expérimentation du commandant du peloton mixte de la 19e DI n°4785/ALAT/19e DI.
56
Enseignements
L’expérience acquise lors des diverses opérations montre qu’il est impératif que la personne qui
commande le personnel se trouvant à bord d’un hélicoptère soit le pilote lui-même. C’est lui qui doit
donner le signal du débarquement aux hommes de troupe qu’il transporte et non le chef de troupe. En
effet, il arrive que, suite à un feu nourri de l’adversaire juste après l’atterrissage, un hélicoptère
redécolle immédiatement laissant sur place quelques hommes descendus de l’appareil, qui succombent
aux tirs ennemis.
Ensuite, une limite obligatoire du nombre de militaires embarqués pour chaque type d’hélicoptère72
est fixée. Les soldats partant pour les combats sont extrêmement chargés (vivres, munitions, armes de
poing, paquetages, casques, grenades en bandoulière, carabines…) et prennent de la place. S’ils sont
trop à l’étroit dans l’appareil, des risques de confusion – y compris de tirs accidentels – peuvent avoir
lieu. La seconde raison tient à la tension et la crainte d’avant combat qui nécessite un minimum de
rempli sur soi et de concentration, sans compter la claustrophobie liée à l’emport dans une soute
sombre et agitée.Les hélicoptères H-21 ne disposent pas de blindage. Pour les pilotes, une simple veste
pare-éclats est prévue, tandis qu’une autre est fixée sous leur siège afin de les protéger des tirs venant
du sol. Au demeurant, il n’y a eu que peu de pilotes et de passagers blessés ou tués au cours
d’opération à bord des H-21. Jusqu’en 1960, les accidents relevés sont essentiellement dus à des fautes
personnelles : défaillances physiques, psychiques, professionnelles, voire à l’indiscipline.
8. Enseignements recueillis auprès du colonel PUY MONTBRUN73
L’écart entre la théorie et la réalité pose de nombreux problèmes. Certes, les opérations héliportées
sont réalisées en respectant la doctrine d’emploi définie. Dans les missions de tous les jours,
cependant, la rapidité et la vitesse de réaction sont les facteurs décisifs. Le pilote d’un avion ou d’un
hélicoptère en vol, transmettait par radio les coordonnées des positions ennemies repérées et dans les
délais les plus brefs, les pilotes du D.I.H s’envolaient pour récupérer les commandos d’alerte et les
déplacer sur la zone désignée. Au fur et à mesure, les pilotes fonctionnaient à l’instinct et cessaient
d’analyser les cartes, se fiant à leur connaissance « par cœur » d’un terrain sur lequel ils volaient
quotidiennement. Rares étaient les opérations de grande ampleur, revenant sur les principes de bases,
comme « Jumelles » et « Pierres précieuses ».
L’armée de Terre était indépendante dans la tenue de ses fonctions et ne souhaitait pas avoir de lien
avec l’armée de l'Air.
D’un simple point de vue opérationnel, l’hélicoptère pouvait se poser partout. La qualité de
pilotage des hélicoptères faisait qu’ils pouvaient se poser sur les roues avants ou bien encore sur celles
de l’arrière, laissant toujours possible le débarquement des commandos. L’encagement au moment du
poser d’un assaut héliporté et lors de la sortie des troupes des hélicoptères était bien respecté et
appliqué. Il était essentiel pour la sécurité des hommes.
72
Limite fixée par les commandants de commandos légionnaire.
73
Entretien avec le colonel PUY MONTBRUN le 02 mai 2006.
57
Conclusion
CONCLUSION
59
Conclusion
Après ses débuts lors du conflit indochinois, l’hélicoptère s’impose pendant la guerre d’Algérie.
Outil nouveau, dont l’emploi est reconnu et assimilé très rapidement, il est conçu comme une réponse
nouvelle à des besoins sans cesse croissants. Cela se traduit très rapidement par une augmentation
réelle du nombre d’appareils et d’heures de vol : en 1954, seuls 3 hélicoptères sont présents en
Algérie. Au moment du cessez-le-feu en mars 1962, plus de 300 appareils sont engagés.
Les succès des voilures tournantes tient à la fois de leur polyvalence et de leurs spécificités.
D’abord employé comme moyen de transport et d’évacuation, l’hélicoptère se transforme peu à peu
en un outil de combat aéroterrestre. Utilisés pour leurs capacités d’observation et de guidage, certains
hélicoptères se spécialisent au fur et à mesure dans l’appui des troupes au sol qui est intégré dans la
conception même de la manœuvre.
La montée en puissance de l’hélicoptère et de son armement pendant les opérations en Algérie,
appliquée conjointement à une doctrine d’emploi spécifique qui découle de l’expérience indochinoise,
font de l’appareil un outil indispensable et polyvalent dans plusieurs domaines de la manœuvre
tactique:
• Transport tactique: Capable d’embarquer et de débarquer des unités combattantes au
plus près du combat, d’évacuer les blessés. Outil de l’économie des forces et de la
concentration des efforts.
• Logistique tactique : l’hélicoptère est un formidable moyen de s’affranchir des distances
et des contraintes du relief en permettant le ravitaillement d’unités ou de postes isolés.
• Appui direct : Les armes de bord, nécessaires dans un premier temps à la protection de
l’appareil, tendent à s’employer en appui de troupes au sol, l'hélicoptère devient alors un
outil de combat propre, dont l’armement se révèle capable d’appuyer les troupes au sol de
manière presque instantanée.
• Renseignement tactique : Les capacités des hélicoptères en terme de vol stationnaire,
l’ajout de caméras ou d’appareils photographiques embarqués permettent de renseigner le
commandement en temps réel, ce qui permet une accélération de la manœuvre tactique.
• Polyvalence : l’hélicoptère possède de grandes qualités d’adaptation et peut prendre en
compte divers paramètres de mission.
Avec la guerre d’Algérie, l’armée de Terre prend en compte le rôle majeur et les enjeux de la 3ème
dimension. L’aéromobilité devient un nouvel espacen de manœuvre où s’affirme la supériorité des
forces terrestres, capables de faire pièce à la prétendue ubiquité des combattants du FLN.
L’hélicoptère de manœuvre permet une réaction rapide aux événements ; sa vitesse de vol autorise des
liaisons rapides entre les zones d’interventions, tandis qu’il peut s’affranchir des obstacles.
Œil du chef par la possibilité de conduire d’en-haut une opération sur le terrain, l’hélicoptère
devient un moyen de lutte polyvalent contre une guérilla dont les moyens - notamment financiers et
en terme d’armement anti-aérien – ne lui permettent pas de réagir efficacement.
Cependant, les hélicoptères montrent certaines limites. Les questions de maintenance et les
problèmes liés aux vols dans des conditions météorologiques difficiles comme le poser sur des
terrains défavorables limitent parfois l’emploi des voilures tournantes. En outre, le coût des
hélicoptères par rapport à d’autres engins engage le pouvoir politique à faire des choix, que ce soit en
termes de qualité ou d’appareils commandés.
En outre, le conflit algérien montre tout l’intérêt qu’il y a à concevoir l’aéromobilité comme un
nouveau facteur opératif. L’évolution extrêmement rapide de la doctrine et de l’emploi des
hélicoptères de manœuvre, puis d’attaque, les innovations retenues et les leçons retirées livrent des
enseignements encore actuels. L’intégration de ces appareils dans la manœuvre tactique donne aux
forces terrestres un avantage tant humain que psychologique. Les mémoires des combattants se
61
ALAT et stabilisation
souviennent de l’assurance d’être rapatrié en urgence par ces médecins venus du ciel. Quant aux
troupes de manœuvres, elles gagnent la supériorité numérique locale grâce aux renforts héliportés.
Enfin, la question du commandement des unités héliportées reste ouverte. Pendant la guerre
d’Algérie, les relations entre les armées de Terre et de l'Air ne permettent pas la mise en place d’un
commandement interarmées. Les besoins de chacune sont trop différents et l’ordre des priorités rend
plus que nécessaire la constitution, au sein de chaque armée, de détachements d’hélicoptères à usage
propre. Même si, dès la fin des années 1950, le ministère de la Défense étudie les possibilités d’une
gestion commune du parc des hélicoptères afin d’optimiser les coûts de fonctionnement, cela ne
dépasse pas le stade du projet. En effet, la nature des missions et les besoins de l’armée de Terre
justifient, au sein d’un conflit où elle est la première engagée, la disponibilité de moyens aériens dans
ses rangs, véritable outil opérationnel partie intégrante de sa manœuvre tactique. C’est bien là la
volonté de Pierre Messmer, à la fin du conflit en 1962, lorsqu’il attribue à chaque armée une
responsabilité spécifique dans la gestion, l’organisation et l’emploi de leur parc d’hélicoptère74.
74
SHAT, 6 R 32, DM n°629/EM/A/ORG, Mars 1962.
62
Glossaire
GLOSSAIRE
63
Glossaire
GLOSSAIRE
A
ALOA : Aviation légère d’observation d’artillerie
ALAT : Aviation légère de l’armée de Terre
ALN : Armée de libération nationale (Algérienne)
C
CFSOA : Centre de formation des sections d’observation d’artillerie
CIOAA : Centre d’instruction à l’observation sur avions et autogires
CRS : Compagnie républicaine de sécurité
D
D.I.H : Détachement d’intervention héliportée
DZ : Drop-Zone (zones de largage ou de poser des hélicoptères)
E
EAALAT : Ecole d’application de l’aviation légère de l’armée de Terre
ELA : Escadrille de liaison aérienne
EVASAN ou EVS : Evacuation sanitaire
F
FLN : Front de libération nationale (Algérien)
G
G.A.O.A : Groupes d’aviation d’observation d’artillerie
GFHATI : Groupement des formations d’hélicoptères de l’armée de Terre en Indochine
G.H : Groupement héliporté
G.H.A.N : Groupe d’hélicoptères de l’aéronautique navale
P
P.C : Poste de commandement
PMAH : Peloton mixte d’avions et d’hélicoptères
R
RCP : Régiment de chasseurs parachutistes
S
S.A.R : Search and Rescue (recherche et sauvetage)
SNCASE : Société nationale des constructions aéronautiques du Sud-Est
SNCASO : Société nationale des constructions aéronautiques du Sud-Ouest
T
TTA : Texte toutes armes
V
VSV : Vol sans visibilité
65
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
67
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages
Articles - Revues
69
ALAT et stabilisation
Documents officiels
70
Bibliographie
Sources Internet
http://www.assoc.wanadoo.fr/aamalat
http://www.celag.fr/index.htm
http://www.fr.wikipedia.fr
http://www.globalsecurity.org/military/library/report/1995/HAG.htm
http://www.helicopassion.com
http://www.inquirer.philly.com/packages/somalia/nov16/rang16.asp
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/cote-divoire/index.shtml
http://www.suasponte.com/m_somalia.html
71
Annexes
ANNEXES
73
Annexes
Caractéristiques techniques
Généralités
Constructeur : S.N.C.A.S.O (Fr)
Premier Vol : 15 décembre 1953
Type : hélicoptère léger à usages multiples
Motorisation : 1 turbine Turboméca Palouste IV de 225 CV
Capacité : 1 pilote + 1 passager
Nombre d’appareils
150 de série
produits :
Dimensions
Longueur fuselage : 5,30 m
Hauteur : 2,60 m
Diamètre rotor : 11,00 m
Masse à vide : 379 kg
Masse maxi : 800 kg
Performances
Vitesse maxi : 110 km/h
Plafond opérationnel : 4300 m
Autonomie : 160 km
75
http://www.celag.fr/index.htm
75
ALAT et stabilisation
Caractéristiques techniques
Généralités
Constructeur : S.N.C.A.S.E, Sud Aviation puis Aérospatial (Fr)
Premier Vol : 12 mars 1955
Type : hélicoptère léger à usages multiples
Motorisation : 1 turbine Turboméca Artouste IIC6 de 350 CV
Capacité : 1 pilote + 4 passagers ou 500kg de fret
Nombre d’appareils
environ 1300
produits :
Dimensions
Longueur fuselage : 9,70 m
Longueur hors tout : 12,05 m
Hauteur : 2,75 m
Diamètre rotor : 10,20 m
Masse à vide : 890 kg
Masse maxi : 1600 kg
Performances
Vitesse maxi : 185 km/h
Plafond opérationnel : 2250 m
Autonomie : 300 km
76
L’Atlas des hélicoptères, Éditions ATLAS, mai 2002.
76
Annexes
Le Bell 4777
Caractéristiques techniques
Généralités
Constructeur : Bell Aircraft Corporation (USA)
Premier Vol : 8 décembre 1945
hélicoptère utilitaire et d’entraînement à usages
Type :
multiples
Un moteur Franklin 6V4-200-C32, 6 cylindres
Motorisation :
horizontaux opposés de 200 ch
Capacité : 1 pilote + 2 passagers
Nombre d'appareils
Plus de 5000
produits :
Dimensions
Longueur hors tout : 12.6 m
Hauteur : 2.9 m
Diamètre rotor : 10.71 m
Masse à vide : 626 kg
Masse maxi : 1 066 kg
Performances
Vitesse maxi : 145 km/h
Vitesse de croisière : 124 km/h
Plafond opérationnel : 3 322 m
Autonomie : 346 km
77
Hélicoptères militaires, Bordas, 1981.
77
Annexes
Caractéristiques techniques
Généralités
Sikorsky Aircraft (USA)
Constructeur :
sous licence par Westland (GB), SNCASE (Fr)
Premier Vol : 10 Novembre 1949
Type : hélicoptère multi-rôles
Motorisation : 1 Pratt & Whitney Wirght R-1300-3 de 700 cv
Capacité : 2 pilotes + 10 passagers
Nombre d'appareils
1280 H-19 + 547 Westland Whirlwind
produits :
Dimensions
Longueur fuselage : 12,85 m
Longueur hors tout : 19,07 m
Hauteur : 4,06 m
Diamètre rotor : 16,15 m
Masse à vide : 1994 kg
Masse maxi : 3266 kg
Performances
Vitesse maxi : 162 km/h
Vitesse croisière : 137 km/h
Plafond opérationnel : 3218 m
Autonomie : 533 km
78
Hélicoptères militaires, Bordas, 1981.
79
Annexes
Caractéristiques techniques
Généralités
Piasecki Helicopter Corporation puis Boeing
Constructeur :
Vertol Aircraft (USA) à partir de 1960
Premier Vol : 11 avril 1952
hélicoptère de transport, d’évacuation et de
Type :
sauvetage
Motorisation : 1 Wright R-1820-103 Cyclone de 1425 cv
Capacité : 2 pilotes + 20 passagers
Nombre d'appareils
environ 1000
produits :
Dimensions
Longueur fuselage : 16,00 m
Longueur hors tout : 26,20 m
Hauteur hors tout : 4,70 m
Diamètre rotors : 13,41 m
Masse à vide : 3992 kg
Masse maxi : 6804 kg
Performances
Vitesse maxi : 201 km/h
Vitesse de croisière : 158 km/h
Plafond opérationnel : 2880 m
Autonomie : 650 km
79
L’Atlas des hélicoptères, Éditions ATLAS, mai 2002, Hélicoptères militaires, Bordas, 1981.
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Annexes
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Annexes
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Annexes
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Annexes
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Annexes
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Annexes
89
Annexes
90
Annexes
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ALAT et stabilisation
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