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A.R.S.E.C.

/Université Lyon 2
Mémoire de DESS
"Développement culturel et direction de projet"

Présenté par
Jean-Yves Camus

Le cirque, la quadrature
du cercle

Sous la direction de
Madame Sylvia Girel docteur en sociologie

Membre du jury
Madame Isabelle Faure, responsable du DESS "Développement culturel et direction de projet"
A.R.S.E.C.
Monsieur Dominique Répécaud, directeur du Centre Culturel André Malraux, Scène Nationale
de Vandoeuvre

Date de la soutenance : septembre 2004


Remerciements

Je tiens à remercier Emmanuelle Herbuvaux pour son aide précieuse et sa patience,


Sylvia Girel pour le temps et les conseils qu'elle a bien voulu m'accorder, Isabelle Faure pour
son accueil et ses conseils ainsi que toute l'équipe de l'A.R.S.E.C., Dominique Répécaud
directeur de la Scène Nationale de Vandoeuvre et toute l'équipe qui m'a soutenu dans ma
démarche. Je dédie ce travail à mon fils Théo agé de 3 ans et demi pour sa crise de fou rire
durant la représentation de Jérome Thomas au cirque Lili.

2
Sommaire

Le cirque, la quadrature du cercle

Avant-propos p.6
Introduction générale p.7

Première partie : pour une histoire du cirque

1. Introduction p.11
2. De l'antiquité au cirque romain p.11
3. Les mouvements migratoires p.13
3.1. La culture tsigane p.15
3.2. Les troubadours p.15
4. Les notions de palquiste et de banquiste p.16
5. Les formes archicturales du cirque p.18
5.1. Le cirque, une architecture entre mobilité et statisme p.19
5.2. Les premiers cirques itinérants p.20
6. Le contenu du cirque p.22
7. Les prémisses du cirque moderne p.24
8. Conclusion de la première partie p.26

Deuxième partie : le cirque, un art protéiforme

1. Introduction p.28
2. Le cirque au regard de l'architecture p.28
3. L'évolution de l'esthétique du cirque en France p.30
4. Le cirque nouveau en France p.32
4.1. La première rupture p.32
4.2. La deuxième rupture p.33
4.3. La troisième rupture p.33
4.4. La quatrième rupture p.35
5. Le cirque et la danse p.36
6. Le cirque et le théâtre p.37
7. Le cirque et le cinéma p.38
8. Le cirque et la télévision p.40
9. Le cirque et les arts plastiques p.40
10. Écoles du cirque et formation, un rôle prépondérant pour l'image du cirque p.43
10.1. La formation circassienne p.44

3
10.2. Les écoles du cirque p.46
11. Conclusion de la deuxiéme partie p.48

Troisième partie : pour une approche des publics du cirque

1. Introduction p.51
2. Du cirque pour qui ? p.52
3. L'adhésion à une forme particulière p.55
4. Le public comme entité agissante p.57

Conclusion générale p.59

Chronologie p.63
Lexique p.65
Annexes p.67
Bibliographie p.73

4
Le cirque, la quadrature du cercle
1
«Lao TSE dit : "si tu te construis une pensée (= clown blanc), ris-en (= auguste)" »

1
François Laplantine, Alexis Nouss in, Métissage de Arcimboldo à Zombi, p.164.

5
Avant-propos

Je me souviens, lorsque j'étais enfant, de ce cirque qui s'installait en ville pour une
semaine durant sur les berges de la Creuse. Je me souviens de la déambulation des
artistes, des montreurs d'animaux, des clowns et des jongleurs. Je me souviens aussi de
tous ces regards écarquillés qu'ils provoquaient sur leur passage. Dans mes souvenirs
d'enfant, la voiture de laquelle jaillissait une musique entraînante entrecoupée d'une voix
annonçant l'heure et le lieu de la représentation, m'apparaît encore comme un véhicule aux
couleurs chatoyantes et aux pare-chocs rutilants. Ce fut là certainement ma première
rencontre avec le spectacle vivant. Puis il y eut la "piste aux étoiles". Je revois encore sur le
petit écran ce monsieur Loyal dans son extraordinaire costume rouge…
Est-ce que cette rencontre avec le monde du cirque est à l'origine de mon intérêt pour
le spectacle vivant? Exercerai-je le métier de programmateur parce qu'à un moment donné,
mes yeux se sont ouvert sur le cercle, la piste des possibles? En effet, cette rencontre a
permis de développer mon intérêt pour d'autres formes de spectacle vivant. Ma rencontre
avec la danse et en particulier avec le chorégraphe josef Nadj, m'a renvoyé à mes émotions
vécues sous le chapiteau. Il devenait évident que des relations entre les différentes formes
de créations existaient. Les toiles de Picasso me produisaient le même effet ou encore le
travail de Toulouse-Lautrec et celui de Alexander Calder … tous m'apparaissaient comme
hantées par l'image du cirque. Le cirque à développer chez moi le goût de la découverte et
de la recherche artistique ainsi que mon intérêt pour l'art en général. Au travers de ce que je
viens d'énoncer, il m'apparaît une question fondamentale à laquelle il semble important
d'apporter quelques éléments de réponse. Je formulerai cette question de la façon suivante :
"en quoi la fréquentation du cirque peut-elle amener le public à s'intéresser aux autres
formes de création artistique?". Cette question en amène d'autres : "quelles sont les
interactions entre ces différentes formes de création? Ne sommes-nous pas en face d'une
nouvelle forme émergente d'écriture théâtrale?". Ces interrogations ainsi posées, constituent
l'axe d'étude de ce travail de mémoire.

6
Introduction générale

Il apparait important pour l'introduction de définir l'objet de questionnement et


plus précisément de donner une définition du cirque. Selon l'édition de 1991 du petit
Larousse, le cirque est un nom commun du genre masculin, d'origine latine et
comporte plusieurs acceptions. Celle qui nous intéresse et que nous retiendrons
comme la plus conforme pour notre étude se définit de la manière suivante : le cirque
est une enceinte circulaire où se donnent des spectacles équestres, acrobatiques,
…, et l'entreprise qui assure ces spectacles. Résonne plus familièrement avec des
impressions de désordre et d'agitation.
Aujourd'hui cependant, le terme de cirque semble être requalifié. Il apparaît
toute une terminologie spécifique et diversifiée autour de cette appellation première.
En effet, on parle parfois de cirque contemporain, de nouveau cirque, de cirque
traditionnel, de cirque actuel ou bien encore de théâtre équestre. C'est pourquoi,
nous nous attacherons dans le cadre de notre travail à définir les différentes
terminologies qui servent à qualifier les nombreuses appellations actuelles du cirque.
Ces terminologies s'inscrivent dans des contextes historiques différents auxquels
nous ferons référence pour accéder à une meilleure compréhension de toutes ces
dimensions nouvelles. Pour bien comprendre dans quel contexte le cirque va
évoluer, nous précisons dès maintenant qu'avant 1979 le ministère de tutelle du
cirque était le ministère de l'agriculture. C'est seulement après cette date que le
ministère de la culture le prend sous sa tutelle et lui reconnaît son caractère culturel.
Autrement dit, depuis les années 80 du siècle dernier, le cirque a subi une forte
mutation. Cette mutation se traduit par plusieurs changements.
Le premier aspect fondamental de l'évolution du cirque concerne la
professionnalisation du métier de circassien. Cette volonté de professionnalisation
aboutit à la création de L'école nationale du cirque par Annie Fratellini et Pierre Etaix
d'une part et d'autre part à la création du Carré Silvia Monfort par Alexis Grüss et
Silvia Monfort, tous les deux inaugurés en 1974. Ces écoles créent une rupture
fondamentale dans le milieu circassien. La transmission des savoirs ne s'effectue
plus uniquement sur le modéle de la filiation, mais intègre aussi des individus qui
sont nés en dehors de la famille du cirque. La formation répond à un désir personnel
de maîtriser une technique (voire plusieurs), et intègre volontiers des formations à la

7
danse, au théâtre et aux différentes formes artistiques. La formation des acteurs du
cirque qui élargit leurs compétences et nourrit leurs propos a certainement permis de
répondre aux attentes d'un public nouveau (désir de nouveauté, attente de propos
artistiques, …). Mais surtout, le désir de devenir un jour cet acrobate ou ce jongleur
est désormais possible. Un nouveau rêve est né pour les "Gadjo2" …
Le deuxième aspect qui participe à l'évolution du cirque concerne l'apparition
de nouvelles formes de cirque. Cette mutation se nourrit, elle aussi des autres
formes issues de la création artistique du spectacle vivant et des cultures populaires.
Il donne alors au cirque la possibilité d'appréhender autrement son rapport à sa
propre esthétique ou plutôt à ses propres esthétiques. Nous nous retrouvons ainsi
devant une forme métissée d'art du spectacle vivant, issue de la confrontation de
plusieurs cultures, et notamment celle du nomadisme, de la transmission par filiation
et celle de l'artiste sédentaire ayant appris sa technique dans une école. Après un
temps où le cirque à pu semblé en perte d'intérêt, les chapiteaux ont recommencé
leurs rondes. Mais pas seulement, ils se sont arrêtés pour se fixer dans des murs
échappant ainsi à l'image du nomadisme et ont investi d'autres lieux de
représentation comme les Centres Dramatiques Nationaux (C.D.N.) ou les Scènes
Nationales. De la représentation sous chapiteau, les acteurs passent à des formes
très diverses de représentations, c'est-à-dire sans chapiteaux, avec des chapiteaux
de formes et de textures très différentes de l'objet traditionnel, les représentations se
font même parfois de manière frontale (le public est assis en face de l'objet comme
dans un théâtre)… Cela dit, le cirque reste un art populaire et c'est peut-être pour
cette raison qu'il puise sa capacité à attirer les foules sous son chapiteau pour faire
partager la magie de son monde et de ses esthétiques. En 2002, selon le ministre de
la culture : "le cirque est en effet la deuxième pratique culturelle des Français3". Pour
autant, est-ce que le public le considère comme un art ou tout simplement comme un
objet de divertissement? Le cirque a cette facilité et capacité à mixer les différentes
formes artistiques du spectacle vivant et des arts plastiques. Le cirque a pu véhiculer
son image au travers de réalisations cinématographiques. Il devient alors un vecteur
essentiel de ces pratiques. Il vient de la rue et en particulier du contact avec les
citoyens à l'inverse de la danse ou peut-être du théâtre et de la musique savante,
arts nobles par essence. Le métissage qui s'opère actuellement dans l'univers du

2
Terme gitan désignant l'étranger, le non-gitan, par extention celui qui ne fait pas partis du groupe.
3
Dossier de presse Année des arts du cirque 2001/2002

8
cirque nous conduit à cette deuxième question : "de quelle manière le cirque est-il
perçu par le monde du théâtre, de la danse ou de la musique ? Quelles en sont leurs
représentations ? Et quelles sont les représentations que le cirque peut avoir des
autres formes de spectacles vivants et des arts plastiques ?"
En répondant à cette question nous pourrons percevoir en quoi il est devenu
important pour ces différents univers apparemment distincts de s'interpénétrer. Il
nous semble que ces mondes sont aujourd'hui prêts à confronter leurs savoirs, leurs
techniques pour faire émerger les créations de demain. Des expériences ont déjà été
réalisées dans l'histoire du cirque. Le théâtre, la danse se sont déjà confrontés à des
écritures communes dans des espaces de représentation dédiés à l'une ou l'autre
des disciplines. En 1832 par exemple, la création de la chorégraphe Maria Taglioni
avec son ballet romantique "La Sylphide" est adaptée pour la piste. On compte aussi
parmi ces expériences "L'hipodrame", une sorte d'intermédiaire entre le théâtre et le
cirque. La chorégraphie est une écriture qui n'est pas étrangère aux arts de la piste.
Les artistes circassiens s'y réfèrent volontiers. L'espace de la piste nécessite une
écriture particulière pour que l'enchaînement des numéros se fasse de façon
harmonieuse. Cette écriture chorégraphique directement liée au déplacement des
corps est en partie dictée par un espace circonscrit qu'offre celui de la piste. De plus,
il nous semble important dans la façon dont se construit cet espace de
représentation de prendre en compte les évolutions aériennes des artistes sous le
chapiteau créant ainsi une dimension supplémentaire qui projette le spectateur dans
un univers en quatre dimensions difficiles à retranscrire de façon frontale et donc très
liée à l'espace du cirque.
Dans cette approche, et avec pour objectif de mieux cerner les différentes
interactions entre les formes de spectacles vivants, les arts plastiques et le cirque,
d'autres questions se posent : "peut-on dire qu'il y a cirque à partir du moment ou un
élément de la composition du cirque traditionnel est adopté dans l'écriture d'un
spectacle ? Peut-on alors parler de cirque en dehors de la piste de représentation?
Doit-on employer d'autres termes pour qualifier le cirque ?". Nous savons que
Bartabas pour le cirque Zingaro se défend de l'appellation de cirque et préfère celle
de "théâtre équestre".
Tout au long de ce travail, nous reviendrons sur ces questions auxquelles
nous tenterons de répondre. Notre questionnement résume l'idée selon laquelle le
cirque est devenu un art à part entière et qu'il a su à ce titre susciter l'intérêt du

9
public, des institutions et des tutelles publiques. Nous avons bien évidemment
abordé le travail de manière méthodologique.
Pour répondre à tous ces questionnements, nous avons opéré par ordre.
Dans un premier temps, nous aborderons le cirque et son évolution. À partir de
repères historiques, nous tenterons de montrer que le cirque a subi de nombreuses
influences pour parvenir à ce qu'il est aujourd'hui dans notre espace contemporain.
Puis, dans une deuxième partie, nous regarderons comment le cirque s'est nourri
des autres formes du spectacle vivant pour élargir le champ de ses compétences
artistiques.
Enfin et avant de conclure sur notre problématique initiale, nous aborderons le
concept de public et l'évolution spécifique des publics du cirque.

10
Première partie

Pour une histoire du cirque

1. Introduction

Le cirque a une histoire bien difficile à cerner. Le développement des arts du


cirque ainsi que celui de son architecture ne s'est pas construit de façon linéaire.
Nous nous trouvons alors en face d'un enchaînement de filiations diverses qui nous
amènent de fil en aiguille à l'art circassien tel que nous pouvons le connaître
aujourd'hui. Pourtant, le cirque d'aujourd'hui n'a pas une seule et même définition.
Nous aborderons plus loin dans ce chapitre les différentes appellations du cirque et
les préférences artistiques qu'elles supposent. Mais dans un premier temps le
constat est le suivant : nous sommes devant un enchevêtrement de faits historiques
qu'il nous faudra démeler pour pouvoir en reconstituer le fil conducteur. C'est ce que
nous allons essayer de faire dans cette première partie en nous attachant à la
retranscription historique de l'évolution du cirque qui ancre ses fondements dans
l'antiquité.

2. De l'antiquité au cirque romain

Les prémisses de ce que sera le cirque d'aujourd'hui apparaissent dès


l'antiquité. En effet, nous trouvons un grand nombre de références au cirque sur des
sculptures de cette époque, ou des figurines, (le plus souvent ses sculptures
représentent des acrobates ou des jongleurs), datant du IVe siècle avant Jésus-
Christ. Les premières collections de bêtes captives de l’Egypte ancienne
apparaissent dans des ménageries sacrées, puis dans les processions des
Dionysies grecques datant de moins 500 ans avant Jésus-Christ. Dans les premiers
amphithéâtres crétois sont présentées surtout des courses de chars au public. En

11
2400 avant Jésus-Christ, sur le site de Cnossos, un mur peint montre de jeunes
athlètes avec des taureaux. Nous pouvons aussi voir des mosaïques romaines
représentant "l'aurige4" du cirque antique.
Toutefois, le cirque romain ne serait pas dans la droite lignée du cirque
comme nous le connaissons. En effet à cette époque, la cruauté et la barbarie qui
étaient l'essence même des représentations publiques ont disparu des
représentations contemporaines. Nous pouvons les retrouver de façon symbolique
dans certaines représentations du cirque traditionnel et contemporain. L'évolution de
notre société a moralisé les rituels, mais les publics viennent encore chercher
l'émotion puis la poussée d'adrénaline qui l'accompagne, lorsqu'ils sont confrontés à
certains numéros, comme autrefois dans les arênes face à la mort violente du
gladiateur ou devant une éventuelle chute du trapéziste. Nous voyons ici comment le
cirque antique devient un exutoire pour le peuple et comment il pourrait encore l'être
aujourd'hui. Est-ce que cette notion d'exutoire se retrouve dans le cirque romain?
C'est ce que nous allons aborder à la suite.

À Rome, le peuple veut "du pain et des jeux". Le cirque, gratuit, devient le lieu
principal de loisir et de divertissement. Il rythme le quotidien des romains avec pour
attractions : des animaux sauvages, des gladiateurs, des courses de chars
qu'accompagnent des parades, des fanfares, des comédiens masqués, des écuyers,
des voltigeurs, des funambules, des dresseurs d’animaux... et des martyres
chrétiens. Avec la chute de l’empire romain, les jeux disparaissent eux aussi peu à
peu. L'époque romaine étant fondée sur une société du loisir et du raffinement, ceci
lui confère quelques points de similitude avec notre société actuelle, permettant ainsi
de situer le cirque traditionnel actuel dans ce même rôle que nous qualifierons
d'exutoire.
Depuis cette époque, la forme du cirque ou encore celle de l'amphithéâtre ont
été conservées. En effet, certaines caractéristiques architecturales sont encore
présentes dans les cirques du 21è m e siècle comme la forme de la piste de
représentation, la disposition des spectateurs et l'élévation en gradins. Nous avons
perdu la gratuité des spectacles comme aux "Circus Maximus" de Rome. À cette
période historique, les représentations étaient prises en charge par l'état romain.

4
Antiquité, conducteur de char dans les courses.

12
Ainsi, l'antiquité est l'époque des jongleurs, et des acrobates. Nous trouvons
aussi des traces de danseurs de corde dans des documents datés de la Chine
ancienne en 3500 avant notre ère. En Egypte, nous trouvons des jongleurs et des
"posticheurs5" comme en attestent des réalisations plastiques, peintures, mosaïques,
sculptures6. Le cirque a pourtant subi d'autres influences importantes qui participent
à des faits historiques incontournables et que nous allons aborder dès maintenant.

3. Les mouvements migratoires

Les nomades (ce qui étymologiquement signifie les pasteurs) ont une
existence au quotidien liée aux exigences des mouvements migratoires d'une
structure sociale de type tribal et ont aussi par ailleurs une volonté farouche
d'affirmer leur indépendance. Ils apparaissent menaçants lorsqu'ils n'assurent pas de
fonctions économiques utiles au territoire sur lequel ils se trouvent de façon
éphémère. Mais ils portent en eux tous les lieux qu'ils ont traversé. C'est pour ces
raisons-là qu'ils attisent la curiosité et la peur des habitants des territoires empruntés.
"Le musicien gitan, tout en conservant son identité tsigane frappe tour à tour
sur ses instruments des rythmes indiens, arabes… Le tzigane est une figure
exemplaire du nomadisme et du métissage : être soi en étant autre7".
Le cirque semble aussi prendre son ancrage dans les cultures nomades. Ces
peuples qui se déplacent portent des noms différents selon leurs provenances
géographiques, ou leurs liens historiques. Nous trouvons les bohémiens venant des
Balkans, de Prague. Ils sont les sujets du roi de Bohême et ils représentent le
passeport de ce dernier. Les gypsies ce qui signifie ethymologiquement les
égyptiens sont des nomades venant de la "petite Égypte" une région de Grèce. En
France, nous pouvons dénombrer quatre principales dénominations, les roms qui
viennent d'Europe centrale, les sintis qui viennent du Piémont en Italie, les gitans qui
viennent d'Espagne et les Manouches mot qui en tsigane signifie "les hommes"
viennent d'Allemagne et des Pays-Bas. Ces derniers forment le peuple nomade le
plus ancien établi en France. Le tsigane est en fait le terme générique qui rassemble
tous ces peuples sous le même fondement, le nomadisme. Nous retrouvons le terme

5
Synonyme de bonimenteur ou de bonisseur (voir lexique en fin de document).
6
Musée du Louvre, paris, Musée des thermes, Rome, Musée archéologique d'Héraklion.
7
F.Laplantine, A. Nouss, Métissage de Arcimboldo à Zombi, p.456.

13
de nomadisme dans les valeurs fondatrices du cirque. Il reste encore de nos jours
comme une farouche volonté de la part de certains artistes à se revendiquer de la
famille des gens du voyage. Ils ont tranformé les roulottes en camionettes ou en
camping-car. Pourtant, l'errance fait partie intégrante des valeurs qu'ils défendent. La
liberté de se déplacer et de vivre au jour le jour est le point d'ancrage de cette
philosophie. Le cirque et le théâtre se retrouvent dans ces propos. L'artiste est une
personne mobile comme le marin qui sillone les océans. C'est pour cela qu'il nous
semblait important de souligner ici cette filiation, théme que nous allons développer
dés maintenant selon leurs cultures d'appartenance.

14
3.1. La culture tsigane

Il semble que la culture Tsigane apporte quelques spécificités dans l'évolution


du cirque. L'auteur iranien, Hamza d'Ispahan, souligne dans un document daté de
950 que les nomades sont des voleurs, rebelles à l'agriculture, mais aussi des
musiciens. Nous trouvons ici une certaine similitude avec les représentations
stéréotypées de l'image du tsigane qui perdure encore à notre époque. Les tsiganes
ont choisi de s'approprier les arts du spectacle sans que l'on sache précisément vers
quelle époque. Ce que l'on comprend pourtant et que nous retiendrons, c'est que les
arts du spectacle pendant plusieurs siècles et encore aujourd'hui riment avec
nomadisme. L'intérêt pour tous ces individus est qu'ils peuvent travailler et allier des
revenus économiques aux déplacements territoriaux. C'est pour ces raisons que les
arts de la piste ont eu une place de choix dans la culture tsigane comme dans celle
des troubadours.

3.2. Les troubadours

Au moyen âge, les spectacles proposés par les troubadours ou autres


trouvères8 se déplaçaient de places en places et de châteaux en châteaux. De la
même façon, les bateleurs et les bonimenteurs allaient de villes en villages pour
présenter leurs créations.
Au XIIème siècle, les troubadours se déplaçaient eux aussi de châteaux en
villes et villages. Leurs mises en scène se composent de musique qu'accompagnent
des gestes, des mimes et des danses. Ils donnent naissance aux compagnies de
comédiens ambulants. Ces mêmes troupes ajoutent à leur talent ceux de jongleurs,
d'acrobates ou d'escamoteurs. Ils s'appellent alors les bateleurs9, ce terme aurait
pour origine le "baastel" qui est l'instrument de l'escamoteur lui permettant de réaliser
ses tours. Par extension tous les artistes de rue se firent appeler "bateleurs". La
filiation avec le cirque semble évidente avec tous ces amuseurs publiques. Ces
bateleurs, ces palquistes, ces saltimbanques, ces montreurs d'animaux et autres

8 é é
Poète lyrique de langue d'oïl aux XII et XIII siècle (petit Larousse édition 1991).
9
Les Bateleurs sont ceux qui utilisent le baastel.

15
charlatans semblent être tous réunis autour de l'appelation d'ancêtre du cirque
moderne.

Comme le laisse entendre Hugues Hotier dans son ouvrage intitulé "Cirque
communication culture"10 il nous semblait ici important de prendre en compte la
communauté nomade dans sa globalité et de ne pas tomber dans le travers de
l'exclusion des tsiganes dans le rôle qu'ils ont joué dans l'évolution et l'apparition du
cirque dans sa forme moderne. Nous savons que Bouglione est sinti de souche et
qu'il appartient à une de ces grandes familles qui ont fait et font encore tant de
choses pour le cirque. Le cirque s'est formé de manière multiple et variée. Il semble
que son évolution participe principalement à l'intégration de cultures différentes. Il
apparaît possible de le qualifier d'art porreux, d'un coté il absorbe les savoirs et d'un
autre il les rend accessibles. En effet, la diversité des voyages à travers l'Europe et le
monde, a nourri la créativité des artistes et des directeurs de chapiteaux. Il est
difficile de pouvoir affirmer dans quel sens cette filiation s'est effectuée. Cependant, il
nous est permis de penser que le cirque à un certain moment est façonné par la
culture dans laquelle il est immergé et à d'autre moment, il intègre et digère une
culture qu'il cotoie. Cette évolution s'est faite sans préjugé. L'intégration d'autres
cultures lui a permis de lutter contre les éventuels problèmes liés à la consanguinité
qui auraient pu mettre en péril son devenir. Le cirque puise sa force dans le
métissage et les idées nouvelles. Aujourd'hui, le cirque apparaît comme un art
métissé, un art mutant au développement rapide qui intégre et digére les formes
artistiques contemporaines. Il est influencé par celles-ci et les questionne à son tour.

4. Les notions de palquiste et de banquiste

Il nous semble ici intéressant de nous attarder d'avantage sur les palquistes et
les banquistes. En effet, les artistes de cirque se retrouvent volontiers dans cette
filiation. Les palquistes sont les plus anciens. Ils jouaient en plein air sur des tapis
posés à même le sol sur une place publique ou sur le trottoir. Ils attiraient le public
par des effets d'annonce spectaculaires en crachant du feu par exemple. "En fait, il y
a deux notions qui définissent le travail en palc,(un palc est un espace délimité au sol

10
Cf bibliographie p.73.

16
par un tapis par exemple ou une natte avec très peu d'accessoires et de décors) le
plein air et plus secondairement mais souvent présente, la distribution du public en
rond, autour de l'artiste11". Les banquistes sont des saltimbanques12. Et c'est de là
que provient leur nom. Sont banquistes les jongleurs, les mimes, les danseurs de
corde, les illusionnistes, les montreurs d'animaux et de marionnettes (corporation
florissante du XVIème au XVIIIème siècle). Ils vont de châteaux en forteresses, de
foires en foires, pour gagner leur pitance. À la morte-saison, certaines troupes
prennent l'habitude de retourner dans la région de Bergame en Italie devenue à
l'époque classique le principal foyer européen de formation des danseurs de corde.
Nous les retrouvons aussi en extérieur sur leurs tréteaux dans des représentations
de commedia dell' arte. Il est difficile de dater de façon précise le moment de leur
apparition, mais la forme de représentation sur tréteaux est arrivée après une forme
plus rudimentaire de représentation qui est celle des palquiste jouant à même le sol.
Il ne nous semble pas ici fondamental de définir une chronologie précise dans
l'évolution du cirque entre palquistes et banquistes, cependant, il est intéressant de
constater que les palquistes et les banquistes étaient des artistes avant-gardistes
puisque les formes de leurs représentations perdurent encore de nos jours. Il est
difficile de dater de façon précise leur avènement. Cependant, il semble que cela se
situe entre le XVème et le XVIème siècle. Ils se retrouvent par la suite sur des tréteaux
à l'entrée des chapiteaux. Leurs représentations sont courtes et spectaculaires afin
de donner envie au public d'entrer dans le cirque. Les directeurs de cirques avaient
bien compris le rôle attrayant que pouvaient avoir les saltimbanques sur le public,
une sorte de publicité vivante, des animateurs avant l'heure.

Il nous semblait important de relire et d'écrire l'histoire du cirque selon une


approche qui prend en compte l'influence les tsiganes et des autres nomades. En
effet, ils ont apporté de leur savoir-faire et ont posé en quelque sorte les bases d'une
création artistique imprégnée d'errance et de nomadisme. En cela, les gens du
cirque se sont rencontrés puis plus intimement côtoyés. Le cirque continue de se
nourrir du métissage lié aux croisements des différentes cultures qui l'ont traversé.
C'est en cela que le cirque puisse sa force et son sens de l'adaptation. Ce métissage
culturel lui a probablement permis de traverser les différentes crises rencontrées.

11
Hugues Hotier in, Cirque communication culture p.30.
12
De l'italien "saltimbanco", qui saute sur le tremplin (petit Larousse édition 1991).

17
Nous allons donc dés à présent regarder au plus près l'évolution du cirque et
plus particulièrement comment le cirque d'hier nous amène au cirque que nous
connaissons aujourd'hui. Tout d'abord, "si le cirque est un spectacle, on oublie trop
souvent qu'il est aussi un lieu13". Dans l'évolution des arts de la piste, il nous semble
important de prendre en compte d'une part les formes de la création artistique mais
aussi d'autre part, les formes architecturales des lieux de représentation. C'est ce
que nous allons développer à la suite.

5. Les formes archicturales du cirque

Les tziganes deviennent des montreurs d'animaux et leur nomadisme plus


international leur permet de toujours renouveler leurs tours, les animaux présentés et
de puiser dans le métissage leur force créatrice en choisissant toujours des animaux
qui étonnent à la fois le paysan et le bourgeois de l'époque. Ils réussissent par là
même l'exploit de contenter des milieux socioculturels très différents. Tous se
retrouvent au travers de leur espace de représentation. Celui-ci est itinérant. Il n'y a
donc pas de lieux précis pour donner le spectacle. Nous pouvons imaginer alors que
le cirque en tant qu'espace spécifique (composé par une piste, un chapiteau, etc.)
trouve ses racines dans ce que nous pourrions appeler le palc. Cela permet juste de
situer un espace de représentation pour le public. Le chapiteau n'existe pas encore
et les spectacles sont alors en plein air. Cependant, l'espace est créé et le public
peut se retrouver autour du montreur d'ours ou encore face au bonimenteur. La place
Djema'a el-Fna à Marrakech abonde encore aujourd'hui en colporteurs, ces
charmeurs de serpents et autres bonimenteurs. "Ces sauteurs, les fameux sauteurs
marocains qui triomphent sous les chapiteaux du monde entier nous laissent
entendre que le cirque a ses racines là au milieu de la liesse populaire14". Pourtant,
les lieux sont porteurs d'identité sociale et influent sur la fréquentation et le regard
que le public pose sur ces espaces de représentation.

5.1. Le cirque, une architecture entre mobilité et statisme

13
Arts de la piste, numéro spécial "cirque(e) aujourd'hui, année des arts du cirque 2001 2002 " p.62.
14
Hugues Hotier in, Cirque communication culture p.23.

18
Les premières constructions en matériaux durs furent celles d'Astley. En effet,
en 1770 à Londre, il a d'abord construit une piste circulaire entourée de bois et à ciel
ouvert. Astley, était un cavalier anglais émérite, sergent-major des 15ème dragons
légers qui après l'épopée napoléonienne tente une reconversion en mettant ses
connaissances des équidés au service de la création artistique. Son cirque n'avait
alors rien à voir avec celui des saltimbanques et des autres troubadours que nous
avons décrits plus haut. Pourtant, Astley lui aussi influencera le cirque car son
approche architecturale et esthétique perdure encore aujourd'hui. Il semble qu'Astley
fût le précurseur dans la construction d'un lieu de cirque. Regardons de plus près
comment Astley a imposé à tous ses contemporains le cirque comme un lieu dans
lequel le spectacle compose avec sa forme et plus précisément avec celle du cercle
ou de la piste.
À l'origine, en 1755, Defraine, acteur de cirque français, donnait des
représentations de "vénerie15". Ces spectacles se passent dans un espace en forme
d'amphithéâtre à ciel ouvert. Asley s'est alors largement inspiré du cirque de
Defraine. Il a cependant modifié cette approche en apportant quelques innovations
majeures. C'est pourquoi, le nom d'Astley est inscrit dans l'histoire comme la
personne ayant influencé de façon radicale les constructions de cirque et la façon
d'appréhender les représentations. En 1770, il conçut à Londres un amphithéâtre
également à ciel ouvert, composé d'une piste circulaire. Son innovation majeure est
qu'il fût le premier à adjoindre aux représentations des numéros différents que les
spectateurs n'avaient jamais eu l'occasion de voir. Les représentations dans le cirque
d'Asley se composent de voltigeurs équestres et de danseurs de cordes, de
sauteurs. Très rapidement nous retrouvons dans le cirque d'Asley des clowns et des
acrobates. En 1779, son cirque se dote d'une toiture et d'un nom, le "Astley's Royal
Amphithéâtre". Le cirque prend alors une toute autre forme. Les compétences sont
mutualisées dans un lieu fixe dans lequel les spectateurs et les acteurs sont
enfermés dans un face à face pour toute la durée de la représentation comme dans
un théâtre. Les répercutions sont nombreuses. Dans un premier temps, on constate
que le public change. Par ce fait, nous avons à faire à des publics très divers. Le
cirque d'Astley concurrence les théâtres d'alors. La noblesse et la bourgeoisie sont

15
Art de chasser avec des chiens courants des animaux sauvages, tel le cerf, le chevreuil…

19
conquises et viennent au cirque pour se divertir. Le cirque pénètre dans la cité et se
fige dans sa forme architecturale. Les spectateurs doivent se déplacer et aller dans
un lieu unique de représentation ou la place est payante. Où sont passés nos
nomades qui sillonnaient nos villes et nos campagnes apportant leurs nouvelles
trouvailles et autres animaux exotiques? Nous verrons dans le chapitre suivant
comment la forme du cercle persiste, mais devient mobile pour pouvoir à nouveaux
se déplacer à travers le monde.

5.2. Les premiers cirques itinérants

Avant de continuer notre cheminement dans l'histoire du cirque, il nous faut


nous attarder quelque peu sur les artistes de foire. En effet ils ont aussi un rôle
important dans l'évolution du cirque. Le cirque en dur d'Asley dont nous avons parlé
précédemment, est un bâtiment fixe qui ne peut se déplacer. La foire, elle est mobile
et va de villes en villes. Pour permettre cette mobilité il faut imaginer un espace qui
permet d'accueillir du public et qui disposent d'un espace de représentation. C'est
aux Etats-Unis que les premiers chapiteaux itinérants sont apparus. En 1825,
Joshuah Purdy Brown, donne dans l'état de New-York pour la première fois un
spectacle sous une tente. Il adapte un système d'habitation largement utilisé sur ce
territoire (habitation d'indien, de cow-boy) et l'utilise pour ce qu'il est, un édifice léger,
éphémère, démontable et aisément transportable. Le cirque américain devient
itinérant comme ceux des saltimbanques d'Europe centrale. Cela permet de se
déplacer dans des villes qui ne disposent pas de lieu de représentation. Ce
nomadisme renaissant permet de conquérir des nouveaux publics que constitue par
exemple une nouvelle clientèle rurale. Nous pouvons penser qu'à un moment donné,
le cirque se cristallise dans la forme en dur du bâtiment architectural d'Astley, ne
laissant ainsi que peu de place aux autres troubadours et saltimbanques.

En France, les grandes villes disposent de cirque stable. Ils étaient assez
nombreux. Ils furent construits pour la plupart entre 1850 et 1900. Aujourdhui, il ne
reste que ceux de Reims, Paris, Châlons-sur-Marne, Amiens. Cependant, il existe
une autre forme de cirque que l'on trouvait aussi dans les villes ou les campagnes.
Ces cirques sont des baraques de bois avec une piste ou une scène. Ils sont montés

20
sur le champ de foire. Les représentations ne durent que le temps des festivités
qu'occasionne la foire. Le terme de banquiste leur convient parfaitement car les
acteurs de ces cirques appelés forains présentent tout comme les banquistes d'avant
de courts spectacles pour les badauds et les promeneurs de la foire. Ces forains
deviendront plus tard des directeurs de cirque sous chapiteaux en créant leurs
propres compagnies. Devenants des institutions à part entière, les cirques ont alors
au fil du temps du modifier la forme et le contenu des spectacles. La pensée
philosophique sous jacente au propos artistique viendra nourrir les acteurs
circassiens. Pour certains, ils choisiront la provocation, l'absurde ou encore le
merveilleux et la parodie. Cependant, bien avant que cette révolution intellectuelle ne
s'opère, les représentations circassiennes sont principalement constituées de
numéros qui s'enchaînaient selon une logique plus empirique qu'esthétique. Nous
allons dès lors détailler ce qui constitue alors une représentation type du cirque
classique.

6. Le contenu du cirque

L'historien du cirque Henry Thétard, confirme dans son ouvrage "Coulisse et


secret du cirque", la filiation entre le cirque et la foire. Il cite : "ne trouvant plus, à date
fixe, le retour des attractions qu'ils affectionnent, les amateurs de tours de forces…
vont aux établissements qui leur offrent la synthèse de tout cela qui faisait la vieille
fête foraine. 16" Ainsi, certains petits métiers exposent des monstres plus ou moins
réels comme la femme à deux têtes ou l'homme serpent. Le public entre par un côté
du baraquement, déambule et ressort par un autre. Ces spectacles s'appelaient les
"entresorts". Cette forme, différente de la forme classique du cirque dans son
acception contemporaine, cependant s'y apparente comme ayant une filiation directe
avec les artistes et les futurs dirigeants ou créateurs des spectacles de cirques. En
effet, le cirque de nos jours aime encore exhiber ses monstres. Certaines
monstruosités sont cependant dissimulées. En effet, et sous prétexte de
performances physiques incroyables des numéros comme ceux de contorsionnistes
sont montrés au public. Dans les années 60 du siècle dernier, sur les champs de
foire, on pouvait voir des matchs de catch, des montreurs et des dresseurs

16
Thétard Henry in, Coulisses et secret du cirque Plon Paris 1931.

21
d'animaux divers. On trouve aussi des lutteurs et des attractions comme "le mur de la
mort" (Il s'agit d'une sorte de cylindre aux parois verticales sur lesquelles roulent des
motocyclistes). Nous trouvons aussi des jongleurs de force. Ces forains qui sont
devenus eux-mêmes des directeurs de cirque ont emmené dans le spectacle ce
qu'ils connaissaient le mieux, c'est-à-dire, les artistes de foires, le cirque offrant à ces
artistes des conditions de travail moins rudes que l'abattage (plusieurs
représentations par jour) de la maison foraine, beaucoup de ces artistes se virent
offrir des engagements par des cirques établis et prestigieux ou par ceux que
créèrent des transfuges de la foire. On entendra ici par transfuge des anciens
artistes de foires, ou de fêtes foraines qui préférèrent se rallier à des structures fixes
ou monter leurs propres structures. La principale conséquence de tout cela est que
les dompteurs, les motocyclistes dans leur sphère, les acrobates, les jongleurs de
force devinrent les artistes attitrés des spectacles circassiens. Les nains et les
géants, les monstres aux physiques ingrats se joignirent aux circassiens sortant ainsi
de l'ombre des "entresorts". Barmun Phyneas Taylor incomparable "bateleur17" du
XVIIe siècle, su tirer profit de ces étranges sujets. Né en 1810 dans le Connecticut, il
fût un imprésario et un entrepreneur de spectacles américain. Il dirigea à partir de
1871 un grand cirque itinérant. Il avait en qualité de directeur de cirque un sens aigu
des affaires, de l'innovation et de la démesure. Là ou d'autres cirques n'avaient fait
de la foire qu'un phénomène, il réussit à créer un monde particulier à partir de cet
aspect. François filiatrault, romancier, professeur de psychologie au collége de Saint-
Laurent au Québec et membre des Sceptiques du québec, attribue à Barmun
Phyneas Taylor patron du célèbre cirque américain deux phrases qui expliquaient à
ses yeux le succès de son entreprise. La première, qui affirme qu’ "à chaque minute
naît un gogo18", évoque bien sûr l’indéracinable crédulité de tout un chacun et la
seconde qui dit que pour être populaire "il faut réserver à chacun un petit quelque
chose19". Barnum nous offre un bel exemple de filiation entre le cirque et la foire et
nous montre à quel point il lui semblait important de se préoccuper du public, comme
le principal acteur de ses spectacles de cirque.

17
(ancien français, baastel, tour d'escamoteur). Personne qui fait des tours d'acrobatie, de force,
d'adresse sur les places publiques. (Petit Larousse en Couleur éd. 1991)
18
François Filiatrault, L'effet Barnum une simple curiosité ?, in Science et pseudo sciences N° 256, mars
2003.
19
François Filiatrault, L'effet Barnum une simple curiosité ?, in Science et pseudo sciences N° 256, mars
2003.

22
Il apparaît important de faire un inventaire de l'environnement qui préfigura le
cirque sans pour autant élaborer une chronologie précise. Cela nous a permis de
montrer comment le cirque a été un moyen extraordinaire d'intégrer et de socialiser
des pratiques ou des formes d'expression marginales en lui donnant en partie, ses
lettres de noblesses. Cela étant dit, nous allons maintenant aborder les moments
importants qui nous conduisent à partir du cirque d'Astley jusqu'à nos jours.

7. Les prémisses du cirque moderne

À la fin du XVIIIème siècle, le militaire anglais à la retraite, Phillip Astley,


présente pour la première fois des numéros de voltige à cheval sur une piste en plein
air. Au son d’un tambourin et de deux fifres, il exécute des démonstrations de
dressage et des équilibres périlleux sur ses chevaux. À son signal, les chevaux se
cabrent et marchent sur leurs pattes arrières ou bien se couchent sur le sol et font le
mort. Sanglé dans son magnifique costume militaire, Astley saluait le public conquis
par ce nouveau spectacle. Il connait un immense succès et l'on vient de toute
l’Angleterre pour l’admirer. Pour rendre ses spectacles encore plus attractifs, il y
ajoute bientôt des petites scènes comiques. Un cavalier, déguisé en tailleur, essaye
maladroitement de sauter sur un cheval. À chaque fois, il tombe et se retrouve le nez
dans la sciure. Son entrée sur la piste provoquait inévitablement un tonnerre de rire
et d’applaudissements : le clown était né.

Le cheval est sans conteste avec le clown la figure emblématique du cirque et


c'est Astley qui le premier su les organiser sous forme de spectacle au sein du même
établissement et dans le même temps de la représentation. Cet apport est décisif. En
effet, il permet à cette nouvelle forme de spectacle de sortir de l'exhibition
exclusivement équestre. Dans ce contexte, nous pouvons dire qu'il a inventé le
spectacle du cirque moderne.
Cette forme de spectacle se répandit de façon extrêmement rapide dans toute
l'Europe. Les directeurs de cirque avaient compris que cette nouvelle forme de
spectacle était destinée à un public comme la bourgeoisie. Le cirque "en dur" fait
office de théâtre. Il lui fut attribué pendant un certain temps le nom de "théâtre
équestre" dénomination qui fut reprise de nos jours par le dresseur de chevaux

23
Zingaro et ses spectacles équestres. La bourgeoisie s'approprie cette forme de
représentation artistique. En 1850, pourtant, un directeur de cirque connu sous le
nom de Dejean fût le premier à faire des propositions tarifaires en directions des
classes défavorisées. Ces places à tarif réduit sont alors appelées "les populaires".
Cependant, il faut bien souligner que les populaires étaient aussi les places les
moins confortables (visuellement parlant) du chapiteau.
En 1793, pour raison de guerre, Asltey est contraint de quitter la France. Celui
que nous considérons comme le père du cirque français, Antonio Franconi récupère
l'amphithéâtre Astley et le rebaptise amphithéâtre Franconi. Franconi après avoir été
un saltimbanque dresseur de canaris se retrouve directeur de cirque à Paris. Nous
pouvons dire qu'Antonio franconi fut un des pères fondateurs du cirque français en
s'inspirant de sources nouvelles qui ne portaient pas atteinte à la forme de ce
spectacle mais lui apportaient une richesse et une originalité supplémentaires.
La ménagerie foraine connut un grand succès au XIXème et au XXème siècles.
C'est probablement Henri Martin qui fut le premier dompteur. Après une carrière de
forain, il est en 1831 engagé par les frères Franconni. Les représentations de
domptage se font dans des voitures cages, mais en 1888 les allemands Wilhelm et
Karl Hagenbeck inventent la cage centrale qui permet ainsi les représentations
directement sur la piste.

Nous venons de faire l'inventaire de ce que le cirque était il y a quelque temps


déjà. Notre exposé n'a pas pour ambition d'être exhautif, cependant il donne le ton et
la coloration d'un cirque non pas entièrement révolu mais en phase de grandes
mutations.

8. Conclusion de la première partie

Le cirque, dans son acception moderne est ainsi devenu une piste circulaire
sur laquelle sont présentés des acrobates, des clowns et accessoirement des
animaux dressés. Il est né à la fin du XVIIIème siècle. Il est issu à la fois de l’académie
équestre et des pratiques saltimbanques en vigueur sur les champs de foire. Le
cirque se codifie en quelques décennies et offre à un public plutôt bourgeois des
spectacles fondés sur la diversité. Ses codes de représentation reposent sur une

24
extrême hétérogénéité des formes en matière d’art vivant. À la fois inspiré par la
danse classique et le théâtre, le cirque se situe plutôt dans l’imitation que dans la
création. C’est ici qu’est la force du cirque. Elle repose sur cette faculté
extraordinaire d’assimilation d’éléments extérieurs, pour les transformer en puissants
symboles : le rideau rouge, le tutu de l’écuyère, le chapiteau, les étoiles peintes et le
clown sont des images récurrentes que l'on retrouve dans la peinture.
Au XIXème siècle et à la première moitié du XXème, le cirque joue avec des codes
de définition ancrés dans l’antiquité et jusqu'à nos jours. Ces codes, tels que la
curiosité, la violence, la surprise, l’exotisme, la couleur sont encore prépondérants.
C’est un siècle de fondations, au cours duquel apparaît le trapèze volant inventé par
le Français Léotard. Cette révolution technique permet aux artistes de s’élancer dans
les airs et de réaliser des figures acrobatiques à une grande hauteur. Durant le siècle
dernier, apparaissent également l’Auguste, l’écuyère en tutu, le dressage des
fauves. Cependant, l’arrivée du chapiteau vers 1825 aux Etats-Unis, va bouleverser
les règles d’un jeu de plus en plus rapide : la mobilité, la rapidité d’installation d’une
salle de spectacle complète, la liberté de monter la tente au hasard des étapes et la
possibilité de travailler n’importe quand, vont remettre en cause la nécessité des
cirques en dur. Le public va lui aussi changer et devenir plus populaire, moins
exigeant sur la qualité des exercices équestres mais surtout avide de nouveautés et
d’attractions sensationnelles. L’apparition de l’exotisme, notamment, va faire des
ravages et les animaux dressés vont devenir vers 1880 un élément essentiel de la
représentation.

Le cirque s'est atomisé en une multitude de formes. Il se souvient de ces


origines mêlées et redécouvre le métissage avec un œil neuf en multipliant sur ces
pistes images et références. L'inventaire des grands moments du cirque est loin
d'être exhaustif, et l'on peut dire que cette forme de spectacle s'inscrit parfaitement
dans la société par laquelle il est produit. Nous pouvons donc le qualifier de fait de
société, même si, et nous le verrons plus loin, il a traversé une forte période de crise
dans la deuxième partie du XXème siècle.

25
Deuxième partie

Le cirque, un art protéiforme

1. Introduction

C'est à partir de la renaissance que le spectacle vivant dans sa globalité a pu


mettre en place les codes principaux qui régissent les schémas de sa création
(espace, temporalité..). C'est aussi à cette époque que les concepts architecturaux
qui permettent la construction des salles de représentations telles que nous pouvons
les fréquenter aujourd'hui apparaissent. Les théâtres à l'italienne en sont des
exemples remarquables. Le cirque a tout au long de son évolution emprunté
beaucoup aux autres formes de spectacles. Comme nous avons pu le voir
précedemment, il s'est constitué une certaine esthétique fédératrice, rassemblant
ainsi diverses formes disparates. Les nombreux mouvements migratoires des
acteurs du cirque dans une grande partie du monde occidental ont engendré cette
esthétique devenue emblématique et rend la forme originale difficilement identifiable.
L'esthétique du cirque a cependant muté tout au long du siècle dernier en s'inspirant
à la source des autres formes d'art. Ce chapitre concerne le cheminement des arts
du cirque. Nous allons dès maintenant parcourir ce chemin.

2. Le cirque au regard de l'architecture

Le cercle est la forme emblématique du cirque qu'Astley a mis en place dans


la construction de son amphithéâtre. En dépit de la force, qui se dégage d'un cercle
entouré de spectateurs, la dualité entre l'espace scénique et l'espace du spectateur
intervient relativement tôt. Dès que Charles Hugues, ancien écuyer d'Astley décide
de construire son propre établissement pour concurrencer celui de son maître, il
accole à la piste une véritable scène identique à celle d'un théâtre. La révolution est

26
d'importance, mais au regard des puristes n'emportera pas une adhésion totale. En
1782, le Royal Circus and Equestrian Philarmonic Academy de Charles Hugues
ressemble de l'extérieur à n'importe quel théâtre. Sa conception intérieure est
cependant bien différente de celle d'un théâtre ou d'un cirque car "elle obéit aux
règles de la juxtaposition et révèle l'ambiguïté de la vision du spectateur20". En effet,
nous sommes en face d'une forme de spectacle de juxtaposition. Dans cette
enceinte particulière, le spectateur se retrouve face à une scène qui lui propose de
multiples choses en même temps. Il doit alors faire un grand effort d'interprétation. Le
genre sera relativement éphémère, mais nous laisse entrevoir les prémisses d'une
collaboration certaine entre l'architecture du cirque et celle du théâtre.
Les tentatives architecturales vont se multiplier et de nombreux architectes
vont s'approprier le concept d'une salle de représentation en matériaux durs. En
1843, l'architecte Jacques Ignace Hittorf va concevoir une salle dont la particularité
est d'avoir des gradins en entonnoir. Il s'agit du Cirque des Champs-Élysées.
Auparavant les salles de cirques s'identifiaient aux théâtres à l'italienne avec une
disposition structurée en plusieurs étages de loges. Dans une logique identique à
celle des salles de théâtre, la salle du cirque est éclairée. Le lustre est central et
unique ou bien est multiplié en périphérie de la scène. En 1876, Richard Wagner à
Bayreuth révolutionne l'esthétique de la représentation théâtrale. Il condamne le
public à l'obscurité, ce qui focalise son attention sur la scène. Le cirque va privilégier
le plein feu et restera le dernier lieu où le spectateur et le décor sont visibles durant
la totalité de la représentation. Un des paradoxes de l'histoire du cirque réside dans
une errance notoire et une sédentarisation rendue obligatoire par l'édification de salle
de spectacle en dur. Paradoxe que nous retrouvons encore aujourd'hui. La difficulté
pour les compagnies actuelles est de trouver des espaces pouvant accueillir leurs
chapiteaux. Quand ces espaces existent, ils sont souvent situés à la périphérie des
cités.
Après avoir situé l'influence architecturale et l'intérêt qu'elle a suscité. Nous
allons regarder de plus près l'évolution de l'esthétique du cirque en France.

3. L'évolution de l'esthétique du cirque en France

20
Théâre aujourd'hui N°7 2001 "Le cirque contemporain la piste et la scéne", p.20

27
Pour mieux comprendre les changements notoires qui se sont opérés au sein
du mouvement circassien, nous allons maintenant focaliser notre étude sur
l'évolution du cirque en France à partir des années 70 du siècle passé. En effet, le
cirque connaît en France depuis ces années-là un profond renouvellement. Alors que
le cirque traditionnel décline artistiquement et économiquement, nous avons vu
éclore en France depuis plus d'une vingtaine d'années un large mouvement de
renouveau. "Il s'exprime au travers de quatre grandes ruptures : la disparition des
numéros de dressage d'animaux sauvages, la remise en cause de la piste et du
chapiteau, la mise en œuvre d'une nouvelle dramaturgie et la multiplication des
esthétiques porteuses de nouvelles représentations de l'homme et du monde
social21". Ces changements ont permis au cirque de s'affirmer en tant que cirque
d'auteurs et de rencontrer des publics différents. Il a su intéresser les politiques de la
culture qui lui ont permis ainsi de renouveler et de continuer sa création. Longtemps
confiné dans le cercle de la piste, le cirque s'ouvre tous azimuts. Son expansion est
géographique, mais dépend aussi de la création de nouveaux réseaux qui favorisent
le dialogue, les échanges et les métissages entre les différentes cultures
circassiennes. Le cirque dans son expansion artistique contamine la danse, le
théâtre …, autant qu'il leur emprunte. Dans l'univer des arts visuels ou encore dans
celui des arts plastiques, le cirque est présent à part entière. Par ailleurs, les
frontières sont de plus en plus poreuses entre les arts du cirque et les arts de la rue.
C'est en réalité un juste retour des choses au regard de son histoire. Les artistes
circassiens actuels sont originaires de milieux sociaux et d'univers culturels variés.
Cette multiplicité des genres se traduit dans les esthétiques et les relations au
monde que leurs spectacles nous donnent à voir.
D'un autre coté, les artistes indépendants, rebelles aux formes
institutionnelles, en porte-à-faux face au théâtre et aux formes "aseptisées" du
spectacle vivant, en marge de leurs milieux sociaux d'origine, vont dans la seconde
moitié des années 1970 renouveler le théâtre forain. Nous trouvons ici des artistes
comme Igor, le fondateur de la Volière Dromesko, Bartabas, le fondateur du théâtre
équestre Zingaro, Pierrot Bidon, le fondateur du cirque Archaos, Bernard Kudlak, le
fondateur du cirque Plume et Christian Taguet, le fondateur du cirque Baroque. Ces
artistes d'un nouveau genre se produisent dans la rue, comme les saltimbanques et

21
Jean-Michel Guy in,Théâtre aujourd'hui N°7 Le cirque contemporain, la piste et la scène, p.26.

28
les palquistes d'autrefois. Ils apprennent leur art de façon autodidacte pour certains
et pour d'autres dans les écoles de cirque récemment créées. Ils présentent alors
des spectacles mêlant le cirque et le théâtre. Les grandes enseignes des cirques
traditionnels de leur côté continuent à se produirent face aux spectacles étonnant
que nous proposent ces jeunes circassiens. À force de travail et de communication,
ralliant un public toujours plus nombreux dans les années 1980, les nouvelles formes
de spectacle gagnent en visibilité. La critique et l'institution éprouvent alors le besoin
de les rassembler sous l'appellation générique de "nouveau cirque".

4. Le cirque nouveau en France

Le nouveau cirque va créer des ruptures avec son confrère le cirque


traditionnel. Nous pouvons noter que l'adjectif "traditionnel" témoigne des tensions
exercées par l'émergence du nouveau cirque. En apportant ce qualificatif à la
résonance quelque peu péjorative, la dualité entre tradition et modernité se révèle
encore d'actualité. Pourtant, ces deux versants d'une même réalité se côtoient
encore bien souvent. Parfois, des ruptures apparaissent. Ces divergences
accentuent la dualité initiale. C'est ce que nous allons détailler dans ce qui suit.

4.1. La première rupture

Une des rupture les plus fortes est certainement la disparition des numéros
mettant en scène des animaux sauvages. Cette absence prend tout son sens quand
en 1992 le cirque Plume crée "No animo mas anima". Il présente une parodie de
numéros de dressage dans laquelle le félin est un homme et le dompteur une vamp.
La rupture est fortement revendiquée et devient comme la force fondatrice d'un
nouveau genre le "nouveau cirque". Depuis cette date, un grand nombre de
compagnies vont à leur tour mettre en scène des parodies de dressage. Il s'agit
parfois d'un clin d'œil, parfois de plagiat de la création du cirque Plume.

29
Selon le cirque traditionnel, "Les spectateurs ne conçoivent pas un spectacle
de cirque sans félins ou sans éléphant22". Cela conforte bien l'idée d'une rupture
entre les deux premières formes d'esthétique du cirque. Elles partagent les mêmes
techniques, mais leurs finalités sont fondamentalement différentes. Cependant le
cirque Plume n'a fait qu'importer une tradition déjà bien ancrée dans les pays
scandinaves ou le dressage est interdit depuis les années soixante.
Ce changement identitaire s'accompagne d'un mouvement ministériel
important. Le cirque nouveau est né en 1979 quand s'effectue un transfert de tutelle.
En effet, la gestion des cirques bascule de la tutelle du ministère de l'agriculture à
celle du ministère de la culture, confortant ainsi le choix de ne plus avoir d'animaux et
lui reconnaissant son caractère culturel. Seuls les numéros équestres furent
épargnés par la critique et la contestation. Les compagnies issues du nouveau cirque
comme le cirque Zingaro et le cirque du docteur Paradis ont remis le cheval sur la
piste.

4.2. La deuxième rupture

Une autre rupture va être la remise en question de la piste, ou du chapiteau


au profit d'autres dispositifs scéniques. Le rapport entre la scène et la salle avait déjà
été questionné. Pourtant, cette fois-ci, ce questionnement posera les bases d'un
véritable changement. Le chapiteau est conservé, mais l'espace intérieur est divisé
en deux comme au théâtre pour créer un rapport frontal entre les artistes et le public
même si nous trouvons quelques fois des rapports bi frontaux. Les spectateurs font
face de part et d'autre de la scène comme dans le spectacle Métal clown d'Archaos
ou dans Le cheval de Matéria prima. Le chapiteau disparaît et la piste demeure. Un
grand nombre de compagnie ne se produisent plus que dans des théâtres sur des
scènes rectangulaires. Cependant, il reste un nombre important de nouveaux cirques
qui continuent de tourner sous des tentes ou des chapiteaux en questionnant aussi
leurs architectures. Ainsi nous pouvons voir la Volière Dromesko sous une voûte aux
formes orientalistes ou bien encore la compagnie des Arts Sauts sous une énorme

22
Jean-Michel Guy in,Théâtre aujourd'hui N°7 Le cirque contemporain, la piste et la scène, p.32.

30
bulle. Il est donc désormais possible de faire du cirque dans n'importe quel type
d'espace.

4.3. La troisième rupture

La troisième rupture est peut-être la plus fondamentale. Elle consiste à


l'abandon de l'écriture dramatique du cirque traditionnel. Les notions fondatrices de
celle-ci sont la juxtaposition séquentielle des numéros et le crescendo émotionnel.
Dans le cirque traditionnel nous ne trouvons pas de lien logique entre chaque
numéro. Le jonglage n'appelle pas obligatoirement le funambule et celui-ci n'appelle
pas le trapéziste ou le clown. Seul monsieur Loyal ou bien encore les apparitions
répétées des clowns nous renvoient à un fil conducteur. Aujourd'hui le cirque
traditionnel tente de faire entrer dans leurs écritures dramaturgiques des liens de
continuité plus logiques. Cependant, nous noterons que ce sont dans les créations
du nouveau cirque que d'autres formes d'écritures ont été expérimentées, ce furent
en premier lieu des enchaînements de type littéraires ou théâtraux comme des
adaptations de textes. Certains critiques ont pensé ces expériences de continuité
narrative comme artificielles et même incompatibles avec la notion de numéros.
D'autres ont alors cherché des liens plus complexes et non linéaires (mise en place
d'atmosphère, de couleurs, de volumes, de mise en musique) entre chaque numéro.
C'est en partie dans des formes d'écriture plus chorégraphique que les réponses les
plus appropriées vont être trouvées.

31
4.4. La quatrième rupture

La quatrième rupture concerne l'invention et la recherche de nouvelles


esthétiques. En effet, le cirque traditionnel possède sa propre esthétique (comme les
couleurs, la musique, le décor), que l'on peut retrouver dans les fêtes de Noël, dans
les attractions de Walt Disney. Ces signes sont la combinaison du rouge et du doré.
La musique est constituée de cuivres et de tambours. Le costume de monsieur Loyal
est l'élément indispensable au décor. Le cirque n'a cependant pas le monopole de
cette esthétique, mais il en est devenu l'expression emblématique. Le nouveau
cirque va rompre avec cette esthétique sur plusieurs niveaux. Dans un premier
temps, il va rejeter l'imagerie traditionnelle comme la gravité de l'enjeu du spectacle,
pour introduire des notions et des valeurs, comme l'ironie, l'absurde. À l'esthétique
du cirque traditionnel, il va opposer une multitude d'esthétiques qui s'expriment plus
particulièrement dans les choix des musiques, des couleurs et d'univers. "Quand je
vois un jongleur dans le silence, j'entends des choses. Au cirque traditionnellement,
c'est le regard qui est mobilisé, là l'exploit est sonore. Le son est le personnage
principal. La musique n'accompagne pas. Elle est avec. 23" Au delà des différentes
ruptures observées, le cirque nouveau se construit en s'inspirant des autres
disciplines artistiques.

23
Jean-Christophe Camps, musicien du groupe Kristoff K.Roll, in arts de la piste N°27, Janvier 2003, p.31.

32
5. Le cirque et la danse

Les créations du nouveau cirque sont protéiformes, elles mixent toutes les
disciplines, du jonglage, de l'acrobatie, des chants, de la musique en passant par la
vidéo et les arts plastiques. Elles innovent en permanence et défrichent de nouveau
territoires de création. Les metteurs en scène et les chorégraphes s'intéressent alors
de près aux arts de la piste et ont ainsi contribué de façon importante à cette
dynamique. C'est sûrement grâce à leur présence dans les établissements de
formation aux arts de la piste que les choses ont pu prendre forme. Prennons
l'exemple du chorégraphe, Joseph Nadjd. La danse a toujours été présente sous les
chapiteaux comme le rapelle Jean-Pierre Siméon : "dés leur plus jeune âge, les
artistes de cirque, en même temps que l'acrobatie apprennent la danse (…). La
danse en elle-même a sa place au cirque. On y a présenté de tous temps des ballets
dont l'aspect a évolué puisque sous l'influence du cirque américain, ils sont devenus
plutôt des démonstrations de girls, intermèdes entre les numéros24". Joseph Nagdj
ne s'inscrit pas dans cette catégorie, il est avant tout un chorégraphe contemporain
qui en 1995 devient le "metteur en piste25" de la 7e promotion des élèves du
C.N.A.C.26.

Nous noterons que pour cette occasion une nouvelle catégorie est lancée par
le quotidien Libération qui emploie pour la création des élèves du C.N.A.C. et pour la
première fois le terme de "cirque contemporain". Une classification supplémentaire
vient donc ici se rajouter au terme de "cirque traditionnel", "cirque actuel" et
"nouveau cirque". Je me permettrai ici d'en rajouter une autre qui est celle de "cirque
improvisé" dénomination utilisée par Francis Albiero27 pour son nouveau travail de
recherche et de création en compagnie de divers artistes circassiens. Nous voilà en
face d'une pléthore de qualificatifs qui nous montre la difficulté de voir dans un
spectacle une même et unique forme. Cela nous démontre par là même les

24
Jean-Pierre Siméon in, "Algues, sable, coquillages et crevettes", Cheyne éditeur, Le chambon-sur-
Lignon, 1997.
25
Le terme de "mis en piste" est utilisé par Rosita Boiseau in, Théâtre aujourd'hui N°7 Le cirque
contemporain, la piste et la scène, P.124 le terme de "metteur en piste" est aussi utilisé par Laurent
Gachet in, Arts de la piste numéro spécial "cirque(s) aujourd'hui, année des arts du cirque" p. 54
26
Centre National des Arts du Cirque, à Chalon-en-Champagne.
27
Artiste circassien issue du C.N.A.C. travaillant actuellement dans la région de Nancy sur un projet de
création de cirque improvisé réunissant des artsites de toutes horizons et nommé "Chantier de cirque".

33
croissements établis entre le cirque et les différentes formes du spectacle vivant et
des arts plastiques. Pour revenir à la danse nous notons qu'un grand nombre de
chorégraphes a travaillé pour le cirque. Balanchine régla des parades pour Barnum,
Régine Chopinot, Hervé Diasnaz, Francesca Lattuada et bien d'autres encore ont
participé à de nombreuses créations. Nous remarquons que les deux disciplines
(danse et cirque) interagissent l'une sur l'autre. Le travail emblématique de Philipe
Découflé est un exemple remarquable dans ce domaine en particulier lors de sa
création pour l'ouverture des jeux olympiques d'Albertville. En effet Philippe Découflé
à été formé par l'école d'Annie Fratellini aux techniques du cirque et a su se faire
reconnaître dans les milieux de la danse contemporaine.

6. Le cirque et le théâtre

Le nouveau cirque fait exploser les frontières de l'ancien. Cette démarche


créative consiste à abandonner le concept de divertissement et à introduire le
spectacle circassien sur le chemin de l'artistique. Ainsi, la représentation est pensée
et proposée comme une œuvre artistique et non plus comme un simple lieu de
distraction. Il n'y a donc plus d'animaux sauvages. Les dispositifs de mise en scène
différent radicalement d'avec ceux antérieurs par leurs innovations et leurs originalité.
L'écriture dramaturgique s'inspire fortement des autres formes artistiques et plus
particulièrement de celle du théâtre et de la danse. Les références esthétiques se
multiplient en un fourmillement difficilement quantifiable et d'autres formes
d'expression émergent. Elles sont extrêmement diverses et variées au point qu'il
nous semble presque impossible de classer telle ou telle forme. "Le cirque cesse
ainsi d'être un genre, pour devenir un ensemble hétérogène de compétences, dans
lequel chacun a le loisir de puiser. Une telle atomisation en "arts du cirque" facilite le
rapprochement entre les différents arts du spectacle28". En effet, au théâtre le texte
est prégnant et participe fortement à l'émotion. Le corps de l'acteur peut alors
disparaître. Seule sa voie nous porte. Au cirque, le texte est absent, cependant, les
prouesses réalisées avec les corps portent l'émotion du spectacle. Ces deux formes
artistiques actuelles ont tendance à se rejoindre par l'adjonction de texte dans les

28
Jean-Michel Guy in,Théâtre aujourd'hui N°7 Le cirque contemporain, la piste et la scène, p.47.

34
spectacles circassiens et dans la prise en compte de l'importance du corps et de son
positionnement dans le théâtre. En 1920, "Meyerhold, Annekov et bien d'autres
passent à l'action et cherchent à "cirquiser" le théâtre pour réinsuffler au plateau la
force de l'émotion pendant le spectacle29". Aujourd'hui, il apparaît que ces deux
formes interagissent. Elles commencent aussi à partager les mêmes plateaux de
"théâtre".

7. Le cirque et le cinéma

Nous trouvons dans le cirque un registre de code permettant une écriture


scénique, au niveau des représentations, des systèmes de mise en lumière, de la
musique, mais qui émane aussi par la présence du corps. Ce corps qui se meut et
qui toujours prend des risques mesurés. Le cinéma n'a pas pu faire autrement que
de s'emparer de cette imagerie, de cette iconographie non pas pour en faire des
pâles copies mais au contraire pour le transfigurer sur l'écran de la projection. "Le
cirque est le lieu du populaire et du vulgaire (…) Il est aussi le lieu du truquage, du
montage, du démontage voir du désordre, le lieu ou l'illusion est visuel30". Nous
pouvons voir dans cette citation à quel point les similitudes sont pérennes entre ces
deux formes d'écriture qui semblent d'emblée plutôt éloignées. Nous le retrouvons
avec différents acteurs, comme Charlie Chaplin dans "The Circus" (1928) ou Charlot
se réfugie dans un cirque est s'essaie à divers numéros pour séduire la belle
écuyère. On frôle ici le registre de la fable sociale, au contraire dans "Freaks" en
1932 de Tod Browning, nous sommes en face de la dure réalité du règne de la
monstruosité, comme les femmes à deux têtes des baraques foraines. Tout ne
semble pas non plus tranché dans les représentations que le cinéma a pu donner du
cirque, les effets comiques ne se valent pas et ne fonctionnent pas de la même
façon. Jacques Tati ou encore Buster Keaton et Jerry Lewis fonctionnent sous le
registre de la citation, le cirque leur sert alors de base esthétique. Le cirque est alors
englouti, absorbé par le rouleau compresseur cinématographique. Mais à son tour le
cirque peut utiliser l'imagerie Hollywoodienne pour sa propre création, les parodies

29
Béatrice Picon-Vallin, directrice de recherche au c.n.r.s., dirige le laboratoire des arts du spectacle, in Le
cirque au risque de l'art, p.169.
30
Thierry Lounas in, Théâtre aujourd'hui N°7 Le cirque contemporain, la piste et la scène, p.135.

35
clownesques, les machineries infernales et les effets spéciaux servent son univers.
Le cirque prime dans le muet et le burlesque américain. Le mouvement des chevaux
d'Etienne Jules Marey dans ses chronophotographies est identique au mouvement
du cheval sur la piste. Les premiers cinématographes sont d'abord apparus dans des
cirques sous des chapiteaux. Ils firent des projections une attraction divertissante au
sein des foires et fêtes populaires.

8. Le cirque et la télévision31

L'image du cirque a été largement véhiculée par le cinéma cependant, il ne


nous faut pas oublier un support primordial qu'est la télévision aujourd'hui car elle
participe aussi à la médiatisation des arts de la piste. Elle œuvre cependant à donner
du cirque une image consensuelle, insipide. Le parti pris est celui de faire croire que
le cirque ne peut être autre chose que les représentations que les journalistes et les
rédacteurs des programmes ciblent. Cependant la télévision est un vecteur important
du cirque et de ses nouvelles formes de créations. En consultant la programmation
télévisuelle entre le 15 décembre 2003 et le 4 janvier 2004, nous dénombrons une
quantité importante de productions ayant trait directement ou indirectement au
cirque. Pour illustrer ce propos nous énumérerons en annexe ces productions en les
présentant successivement afin de les situer dans leurs contextes d'apparition. Il est
à noter que cette période correspond à la période de Noël et aux vacances scolaires.
Cette période étant très propice aux propositions de spectacle de cirques. Ils ont
pour effet de renforcer le côté festif des réunions familiales. Durant le reste de
l'année scolaire, l'émission de Patrick Sébastien "Le plus grand cabaret du monde"
participe à l'élaboration d'une image du cirque. Il est alors présenté comme un
divertissement. Patrick sébastien incarne en quelque sorte le rôle de monsieur Loyal
sans le costume d'usage contrairement à Jacques Lanzman, notre monsieur Loyal
national dans l'émission "La piste aux étoiles".

9. Le cirque et les arts plastiques

31
cf, annexes p.70.

36
Le cirque a largement marqué les arts plastiques. Son attrait réside dans les
costumes étincelants, les éclairages spectaculaires, les flonflons des orchestres et
les odeurs d'écurie et de sciure mélangées. Son attrait réside dans les voltiges à
couper le souffle des trapézistes, les facéties des clowns et des nains sans oublier
les numéros des dompteurs exigeant des nerfs d'acier. Le cirque nous provoque et
va chercher au plus profond de notre être les frissons de notre enfance. C'est une
pure fête pour les yeux, les oreilles et tous nos autres sens. Les éclairages
multicolores, les costumes à paillettes, les maquillages de théâtre, tout force le
regard et l'attention du public et le projette dans un univers imaginaire loin du
ronronnement et de la grisaille du quotidien. Il n'est pas étonnant alors, au regard de
toute cette iconographie que le cirque ait pu fasciner le dessinateur, le peintre, le
sculpteur, le graveur, ou encore le vidéaste et le photographe. Les artistes face à ce
déchaînement de forme et de couleurs ne peuvent s'empêcher d'en restituer ou d'en
interpréter les moindres aspects. Un ouvrage nous retrace une extraordinaire
exposition " La grande Parade, portraits de l'artiste en clown32". Cette exposition a eu
lieu à la Galerie nationale du Grand Palais du 11 Mars au 31 Mai 2004. Elle nous
donne à voir les œuvres de différents artistes ayant un rapport avec l'expression du
cirque, elle donna lieu à de multiples projections de film sur le cirque, des
conférences et un colloque sur "L'artiste en clown raison et signification".

Le cirque aujourd'hui, dans toutes les diverses formes n'a pas fini d'influencer
les nouvelles générations de plasticiens. Le cirque du Soleil a fait des arts plastiques
une deuxième raison d'être. Dans ses créations, les costumes sont pensés comme
des œuvres d'art à part entière. Il présente des numéros de tous les styles et de
toutes les couleurs. Les artistes sont des champions de l'extrême habillés en clown
d'avant-garde. Ils utilisent une langue parlée imaginaire, des acrobates discos. Le
cirque du soleil est comparé par certains à un "entrecroisement" digne de Disney
présentant un show total et féerique, rempli de chorégraphie, d'acrobatie et de
musique. Nous trouvons-nous en face du chapiteau du futur ou le spectacle est
calibré telle une machine de guerre pour avaler les masses de public crédule à la
recherche de l'exception? Le cirque du Soleil s'est produit en France cette année

32
cf Bibliographie p.73.

37
2004 dans trois villes, Lyon, Marseille et Lille, "les trois villes française ont été
soigneusement choisies par les services commercialisation, selon des critères
géographiques et démographiques, les habitudes culturelles et le revenu moyen par
habitant!33". il n'est pas le seul, les grands cirques de tradition où les artistes de
cabaret sont dans cette même dynamique de création plastique autour de leurs
numéros. Il nous semble évident ici que les artistes, en règle générale, prennent en
compte de façon plus ou moins importante la dimension plastique dans leurs
créations d'autant que nous nous trouvons dans une forme de création où
l'implication du corps revêt son importance et doit à ce titre répondre au critère
esthétique attendu ou se mettre en tensions face à ceux-ci.
D'un autre côté, le cirque a influencé plusieurs générations de peintres, de
photographes et de plasticiens comme nous pouvons le voir dans les œuvres de
Toulouse lautrec, Frantisek Kupka, T. Lux Feininger, Paul Mccarthy et bien d'autres
encore.34
Maintenant que nous savons à quel point les arts de la piste se sont inspirés
de toutes les autres disciplines artistiques, nous allons développer un paramètre tout
aussi important en matière d'évolution du cirque. Il s'agit en fait de la formation et de
la création d'écoles qui ont permis à des esprits novateurs d'environ extérieurs de
s'approprier la piste.

10. Écoles du cirque et formation, un rôle prépondérant pour l'image du cirque

"Rarement, sans doute, l'évolution d'un art aura été autant liée aux conditions
da sa transmission. Voilà pourquoi le cirque est aujourd'hui, aussi ouvert aux
influences que rétif aux définitions, aussi poreux à tous les alphabets artistiques que
fragile dans ses repères35".
La formation aux arts de la piste est en plein essor, mais cela semble difficile
d'allier la formation et la création. Il fut un temps ou le cirque n'était accessible qu'à
ceux qui faisaient déjà partie de cette grande famille. Aujourd'hui les écoles et les
formateurs se posent la question de la transmission. Comment enseigner un art

33 er
Gilles Médioni In, L'expressmag, édition de lyon du 1 Mars 2004.
34
Cf. bibliographie, La grande parade, portrait de l'artiste en clown.
35
Anne quentin, in dédale, pédagogies des arts de la piste & de la scène N°1, mars 2004, p.6.

38
complexe en pleine mutation tout en conservant l'exigence et la rigueur qu'imposent
les disciplines circassiennes mais aussi les autres formes d'écriture artistique.

10.1. La formation circassienne

La formation est un enjeu pour l'avenir des arts du cirque et pour leurs
développements. Plusieurs acteurs sont concernés. Nous trouvons parmi eux l'état et
ses différentes instances ministérielles, les milieux de la formation, les artistes, les
compagnies, les structures d'accueil.
Le public peut aujourd'hui s'il le désire se hisser au rang d'artiste circassien et
égaler les plus grand qui les ont un jour fait rêver sous le chapiteau. Et c'est bien en
cela que cette nouvelle manière de transmettre, en dehors de toutes filiations,
quelles soit d'ordre familial, social ou culturel, trouve son importance et son lieu d'être
dans notre société occidentale. "Je n'étais pas un enfant de la balle, mais j'avais le
désir violent de faire du cirque. J'ai passé au C.N.A.C. quatre années
mouvementées. (…). Il faut dire que nos enseignants de l'époque étaient pour
beaucoup issus du cirque traditionnel. Nous ne voulions pas de cette influence, des
paillettes, de tous ces artifices. (…). Pourtant c'est cette confrontation qui nous à
permis de nous situer, c'est comme cela qu'on a pu évoluer36". Cette rencontre et
cette formation ont permis a Johann Le Guillén d'acquérir les fondements techniques
mais aussi une ouverture aux autres formes artistiques intégrées aux enseignements
de l'école. Cette création lui confère une reconnaissance d'avant-gardiste, il
reconnaît que, grâce à l'école, il n'a jamais eut de soucis. L'école qu'elle soit
reconnue par l'état ou encore un lieu de pratique amateur est le lieu de tous les
possibles et permet alors la confrontation de son savoir, la rencontre et l'échange
avec les autres artistes et les compagnies. Mais au-delà de l'enseignement, les lieux
de diffusion dans leurs rôles de commanditaire se doivent aussi d'être des lieux de
rencontre entre les artistes et leurs formes personnelles de création afin de favoriser
les échanges et de permettre aux publics de se retrouver en face d'œuvres majeures
de la création contemporaine.

36
Johann Le Guillerm, propos receuillis par Anne Quentin in, Arts de la piste numéro spécial "cirque(s)
aujourd'hui, année des arts du cirque" p. 26.

39
Nous faisons remonter l'origine du renouveau du cirque à partir de 1974. En
effet, c'est cette année-là qu'Alexis Grus et Sylvia Monfort inaugurent leur "école au
Carré" et qu'Annie Fratellini inaugure "l'école nationale du cirque d'Annie Fratellini".
Ce sont les premières écoles en Europe occidentale. En U.R.S.S., "l'école nationale
du cirque" à Moscou avait déjà une cinquantaine d'années. Ces écoles entre autres
vont permettre de renouveler l'esprit du cirque qui périclitait dans les années
soixante-dix. L'arrivée d'acteurs nouveaux dans l'enceinte du cirque va permettre de
compenser les problèmes de consanguinité qui menaçaient la survie des groupes
ethniques. La création d'écoles ouvertes à des élèves de toutes origines remet en
cause les fondements même de la transmission des savoirs. Les codes se
définissent différemment et s'ouvrent à nouveau vers l'extérieur. Cela ne se fait pas
sans générer d'autres difficultés. Comme l'écrit le funambule Philippe Petit : "les
derniers funambules (…) préfèrent disparaître avec leurs savoirs plutôt que de
laisser les nouveaux venus cueillir les fruits de leurs arbres généalogiques37".

Malgré la résistance de certains circassiens, il existe aujourd'hui en France


plus de trois cents structures de transmission des techniques de cirques. Elles sont
en majorité amatrices. Nous comptons plusieurs dizaines d'écoles professionnelles
dont six sont qualifiées de haut niveau. Il y a l'école supérieure du cirque, installée
au C.N.A.C. de Chalon en Champagne et qui fût créé par Jack Lang en 1985 alors
ministre de la culture.

37
Philippe Petit in, Traité du funambulisme, Actes Sud, 1997.

40
10.2. Les écoles du cirque

Il nous semble intéressant ici de distinguer quatre courants majeurs qui


forment l'école du cirque actuel. Selon Antoine Billaud, Alexandra Echkenasi et
Michel Léon38, le premier courant qui incarne le cirque traditionaliste est largement
représenté par des les figures emblématiques que sont le cirque Pinder et les
cirques de la famille Bouglione. Dans le cirque traditionnel, des numéros tous aussi
spectaculaires les uns que les autres, animaux sauvages, clown, trapéziste, etc,
s'enchaînent.
C'est ainsi que l'on voit apparaître les refondateurs du cirque actuel dont la
figure emblématique est le cirque Alexis Grüss. Il est aussi le père fondateur d'une
des premières écoles de formation aux arts de la piste. La famille Grüss est issue
d'une grande famille d'écuyer, cependant Alexis se refuse d'être taxé de cirque
traditionnel et préfère le terme de cirque à l'ancienne. En 1982, le Cirque d'Alexis
Grüss est choisi par le ministère de la culture et devient le cirque national sur la
place de Paris.
Le troisième courant est dit rénovateur. Il est porté par le cirque Plume. "Les
objectifs initiaux du Cirque Plume étaient d'offrir un spectacle populaire, d'avoir un
langage ouvert au plus grand nombre, de faire du spectacle un partage, par
opposition au théâtre qui intéresse surtout un public averti39".
Le courant provocateur dont la figure emblèmatique pourrait être le cirque
Archaos créé en 1984. Le thème général est dominé par le théâtre, les histoires sans
parole dans lesquelles la balle du jongleur devient une tronçonneuse. Cette
classification pourrait être contestable cependant, elle nous donne un certain nombre
de repères qui pourraient permettre à un public néophyte de pouvoir trouver les
réponses nécessaires à une approche de ces nouvelles formes de cirque.
Nous venons de rendre compte de la diversité des formes que les arts de la
piste ont empreintés d'une part et qu'ils ont inspirés d'autre part. Il y a toujours une
nécessité institutionnelle de catégoriser et de répertorier ces courants afin de mieux
les contrôler. Cela nous amène sur le terrain de la légitimation du nouveau cirque.

38
Alexandra Echkenasi et Michel Léon, sont tous deux journalistes, Antoine Billaud, juriste est chargé de
mission au sein d'HorslesMurs, association nationale pour le développement des arts de la rue et des rats
du cirque.
39
In Droit de cité pour le cirque,édition du moniteur, 2001, p.25

41
Nous nous apercevons alors que cette légitimation par les instances culturelles
compétentes est inséparable de l'évolution esthétique des arts de la piste.

À travers ces évolutions, le cirque, retrouve une reconnaissance qu'il n'avait


plus connu depuis longtemps. Au-delà de l'apparition dans les dernières décennies
de spectacle de cirque Inclassable, un point d'orgue, l'année des arts du cirque en
2001, va en permettre une meilleure visibilité, ainsi que la prise de conscience par
les professionnels de la culture que le cirque est bien un art à part entière. Nous
pouvons penser que les aides de l'état attribuées aux structures pour permettre une
meilleure et une plus grande diffusion des spectacles sur le territoire national ont
largement participé au développement des arts du cirque. Il est fort à parier que
"l'année des arts du cirque40" est le déclencheur voire le détonateur qui a permis à un
public plus large de découvrir le cirque. Le ministère de la culture a retenu dix
mesures pour orienter l'année des arts du cirque, outre le soutien global au secteur
qui doit être renforcé41. Au total, une vingtaine de compagnies devraient êtres aidés.
Une opération nommée "jeune talents du cirque" a été créée afin de favoriser
l'éclosion de nouvelles démarches artistiques et onze pôles régionaux ont été mis en
place pour faciliter la création et la diffusion. Ils ont pour mission d'organiser des
résidences de compagnies et d'assurer une programmation régulière. Une charte
d'accueil des cirques dans les communes est éditée pour permettre aux cirques
d'installer leurs chapiteaux dans les centres villes et de bénéficier de l'aide logistique
des municipalités. Enfin, un effort important est mené en direction de la formation
avec le projet de l'Académie nationale contemporaine des arts du cirque d'Annie
Fratellini à la Plaine Saint-Denis. Nous noterons que le cirque traditionnel est le
grand absent de tous ces dispositifs. Nous pouvons toujours penser que ces
mesures ont un arrière-goût de saupoudrage. Cependant toutes les orientations qui
ont été décidées ont des objectifs pérennes et revêtent une grande importance.
L'avenir réservera au cirque le lot commun des autres formes artistiques : une lutte
sans relâche pour plus de moyens. "150 compagnies, 85 villes, 50 événements, 20
festivals concernés, 14 expositions, 3 colloques, 27 publications, 400 classes à
PAC… "1,2,3 cirque…", l'événement phare de l'année des arts du cirque n'a pas
lésiné sur la vitrine. Jamais autant d'institutions, d'écoles et de collectivités

40
Saison 2001/2002
41
Trois millions d'euros de mesures nouvelles et un million pour l'équipement.

42
territoriales n'auront été réunies autour d'un même genre dans un même temps42". Il
nous semble que le renouveau du cirque se soit exercé durant la saison 2001/2002,
"année des arts du cirque". En effet l'année des arts du cirque consacre le
mouvement né dans les années 70 et permet l'accomplissement d'une synthèse
exemplaire entre l'exigence artistique et le succès populaire."La diversité des formes,
la reconnaissance des créateurs tant en France qu'à l'étranger, l'explosion des
pratiques amateurs, la fréquentation des chapiteaux témoignent de ce renouveau43".

11. Conclusion de la deuxiéme partie

Dans la première partie, nous avons pu aborder la façon dont les arts du cirque
ont évolué. Nous sommes en face d'une évolution chaotique aux filiations diverses.
Ces évolutions participent aux différentes cultures que des peuples nomades ont
traversées ou encore à la rencontre et à l'échange qui ont influencé les artistes dans
leurs déplacements.
La toile de fond de tout cela est aussi liée à la réalité économique de subvenir
à ces besoins. Émerge alors aussi, la nécessité d'être en perpétuel mouvement pour
toujours innover dans la création et susciter la curiosité du spectateur. En effet, les
différents artistes, palquistes, banquistes, saltimbanques et autres montreurs d'ours
ont le désir prégnant de capter leurs publics. Un public qu'ils retrouvent aux fils des
ans et de leurs passages sur les places des villages, les terrains de foires… Ils
donnent leurs représentations dans la rue au plus près de la plèbe et des gens du
peuple. Les spectacles s'adressent aux crédules, aux badauds et aux curieux de tout
genre. Nous sommes en face d'un spectacle populaire. Astley construit son cirque et
sa piste couverte ses chevaux et ses idées de génie attirent les foules au sein de ce
que l'on pourrait appeler "le nouveau théâtre ". Il est novateur et le public averti des
villes s'empare rapidement de cette nouvelle forme. La nécessité économique donne
à certains des élans de créativité, le désir de structurer ces spectacles et de les
donner en un lieu unique. L'exemple de Astley leur permet de créer dans les mêmes
échelles architecturales des spectacles sous chapiteaux. Le cirque ne fait que des

42
Anne Quentin in, Arts de la piste N°27, Janvier 2003, p. 44.
43
Bernard Latarjet in, "Pour un débat national sur l'avenir du spectacle vivant", compte rendu de mission,
Avril 2004 p. 115.

43
aller-retour entre la volonté de conquérir les publics nobles, acquérir sa
reconnaissance artistique et le désir de rester accessible au plus grand nombre dans
ces chapiteaux mobiles. Si les spectacles à caractère populaire sont restés pérennes
c'est aussi que la demande était forte et que le théâtre dans les grandes villes prenait
le pas sur les autres formes de spectacle vivant.

Dans la deuxième partie, nous avons vu comment le cirque après quelques


difficultés retrouve sa force et sa vigueur. Différentes formes naissent, des écoles de
formation se créent et l'instance reconnaît le cirque comme un art à part entière. La
structure de diffusion s'empare de ces spectacles et les artistes eux-mêmes
entretiennent cette dynamique. Recherche, création, rencontre, échange, mutation
métissage, formation sont les maîtres mots de ce phénomène. Le cirque traditionnel
est délaissé par les instances, mais pas par le public. Les nouvelles formes, elles,
récupèrent des publics avertis, transfuges de la danse, du théâtre ou des arts
plastique. Ce sont les pouvoirs publics et l'état qui dans les années quatre-vingt ont
permi au nouveau cirque d'émerger. Dans un premier temps, des subventions aux
nouvelles compagnies, aux nouveaux créateurs circassiens ont permi cette
émergence. Puis, le ministère de la culture incita les scènes nationales à
programmer du nouveau cirque. La mise en place d'un prix national du cirque et une
structure de promotion des arts de la piste ont également participé à ce travail de
reconnaissance nationale. La création du cirque national (cf. ci-dessus) qui fermera
ces portes en 1986, nous montre à quel point la volonté des instances politiques est
de considérer le cirque à l'égal du théâtre ou de la danse. Les aides financières
accordées aux nouvelles compagnies leur permettent de concevoir leurs productions
dans des délais de création plus importants que pour le cirque traditionnel et
favorisent ainsi la mise en scène, la recherche ou encore la créativité. Ce qui nous
laisse penser que l'état a contribué de façon importante à installer le cirque dans un
champ artistique fort. Il semble que le nouveau cirque bénéficie de la popularité de
l'ancien et soit par là même capable de s'insérer vigoureusement dans la culture du
XXIe siècle. "Sa fonction ne serait-elle pas de permettre l'accès des humbles aux
jouissances raffinées des gens biens nés? Ou comment sophistiquer le populaire
tout en démocratisant l'excellence?44"

44
Jean-Michel Guy in,Théâtre aujourd'hui N°7 Le cirque contemporain, la piste et la scène, p.51.

44
Nous allons dès maintenant aborder la troisième et la dernière partie de ce
travail. Il s'agira de regarder comment s'est formé le public du cirque et comment il
fonctionne face aux formes nouvelles de spectacle qui lui sont proposées.

45
Troisième partie

Pour une approche des publics du cirque

1. Introduction

Le concept de public n'est pas un concept récent, cependant il peut différer


selon les cultures à l'intérieur desquelles il s'inscrit. Nous allons essayer de
comprendre comment se constitue cette entité et comment s'élabore son
fonctionnement autour des spectacles du cirque. Pour ce faire, nous allons d'abord
nous appuyer sur une enquête menée en 1992 par le Département Etude et
Prospective du ministère de la culture (D.E.P.). Puis, nous développerons l'enquête
réalisée auprés des publics de l'espace chapiteau du parc de la Villette effectuée de
1996 jusqu'en 2001. Ces études nous permettrons de mieux comprendre si notre
hypothèse de départ est valide. Nous avons postulé initialement que la fréquentation
des spectacles de cirque permettait au public de fréquenter d'autres formes de
spectacles vivants.
Nous conclurons cette partie sur un point particulier qui concerne la
responsabilité du spectateur comme citoyen agissant sur les formes de la création
artistique.
Il existe des écrits sur le public depuis l'antiquité. Ces écrits mettent en relation
directe le concept de public avec celui de représentation théâtrale. Pour certaines
fêtes dramatiques et plus particulièrement pour celles qui consistent à honorer
Dionysos, tout le monde se doit de participer. À cette obligation s'ajoute celle de se
laisser aller, le spectateur doit être actif. Il est obligatoire pour les individus de suivre
des représentations théâtrales, le peuple va se cultiver et apprendre à ne pas
confondre la représentation théâtrale et la réalité sociale. Au Vème siècle, le théâtre
devient un espace d'apprentissage de la démocratie, le spectateur exprime son
opinion sur la qualité des représentations. "L'objectif recherché d'une représentation

46
théâtrale était de contribuer à l'éducation et à l'élévation du spectateur, il devait sortir
meilleur45". Dans l'ancienne Rome, le théâtre est réservé à une élite intellectuelle et
politique. Le spectateur recherche le divertissement immédiat dans des pièces dans
lesquelles le contenu est axé sur la satire populaire et la dimension superficielle de la
vie. Le public de ce type de représentations est considéré par les politiques comme
une masse inculte. "La masse a besoin de pain et de divertissement46".

2. Du cirque pour qui ?

Il nous semble important de constater qu'aujourd'hui le cirque se porte bien.


Les chapiteaux accueillent un public toujours plus nombreux et le débordement est
tel que les salles de spectacles accueillent aussi du cirque. La demande est réelle et
en rapport direct avec l'offre des créateurs qui, pour certains, n'hésitent pas à
s'engouffrer dans ce créneau. Par ailleurs, nous constatons que le public a
régulièrement augmenté47 depuis une dizaine d'années. Aujourd'hui, nous atteignons
les quinze millions48 de spectateurs. Bien sûr la question reste entière et consiste à
déterminer qui sont ces personnes qui vont au cirque? Une enquête du D.E.P.49
effectué en 1992 concernant "la fréquentation et l'image du cirque" nous donne une
estimations de ces pratiques. Nous nous apercevons que la fréquentation du cirque
concerne près de 48% les jeunes de moins de 15 ans et près de 32% les adultes de
25 à 44 ans.
Ces évaluations correspondent pour 60% de la fréquentation à un public attiré
uniquement par les cirques traditionnels contre 14% en direction du cirque
"moderne". Les 26% restant concerne les cirques de villages. Les cirques de villages
nous semblent faire partie du cirque traditionnel, ce qui lui confère dans sa totalité
une part de marché de 86%. À partir de ces différents éléments, nous pensons ici
que les sorties des plus jeunes concernent effectivement les individus qui vont au
cirque pour se divertir. Leurs préférences vont vers les représentations divertissantes
des cirques traditionnels dans le cadre de sortie familiale. Pour les autres, plus

45
Antigone Mouchtouris in, Sociologie du public dans le champ culturel et artistique, p.11.
46
Attribué à Néron.
47
In, Arts de la piste, n°10, 1998, Jean-Michel Guy, "la fréquentation du cirque est en forte augmentation".
48
in, Arts de la piste numéro spécial "cirque(s) aujourd'hui, année des arts du cirque" p.67.
49
Graphiques en annexe p.67.

47
minoritaires, ils se partagent entre le cirque de tradition et les formes plus
contemporaines de création circassienne. Il apparait que les enfants restent les
premiers spectateurs du cirque traditionnel. Ils sont aussi ceux qui motivent le plus la
demande de spectacle auprès des adultes. Le public du cirque traditionnel est très
attaché à la forme esthétique de celui-ci contrairement au public du cirque
contemporain qui recherche l'innovation, l'audace créatrice et une nouvelle
esthétique. En ce qui concerne le cirque contemporain, Clothide Granguillot50, auteur
et photographe, nous dit que ceux-ci semblent avoir favorisé l'apparition d'un
nouveau public. Elle souligne qu'il est issu bien souvent d'un milieu aisé. Il s'agit
aalors de ce public qui boudait autrefois les chapiteaux aux profits d'autres
spectacles dont la connotation est considérée comme moins populaire. Elle affirme
que ces nouveaux spectateurs sont principalement des adultes constitués
majoritairement de femmes. Florence Lévy51, sociologue, responsable des études à
l'établissement public du parc et de la grande halle de la villette, nous confirme cette
tendance. Elle parle d'un public féminin, jeune, urbain actif et diplômé. Elle s'appuie
sur une enquête menée à l'espace chapiteau à la Villette, le lieu de la programmation
de spectacle de cirque. Nous nous appuierons sur cette enquête dans la suite de ce
document pour tenter de mettre en avant le profil des publics de cirque. Nous
soulignons ici, que toutes ces études semblent corroborer l'enquête menée par le
Département des Etudes et de la Prospective (D.E.P.) du ministère de la culture et
de la communication effectuée en 1997. Cette enquête témoigne d'une augmentation
importante de la fréquentation du cirque (de 9% à 13% soit 2 millions de spectateurs
adultes supplémentaires). Cette évolution de la fréquentation est cependant plus
sensible à Paris que dans les autres agglomérations, et s'accompagne aussi d'une
modification qualitative du profil des spectateurs. Les spectateurs de cirque
contemporain viennent avant tout à la rencontre "d'une esthétique, d'une créativité,
d'une mise en scène" et viennent aussi pour "découvrir de nouvelles formes
artistiques". Les spectateurs du cirque traditionnel motivent leur venue par leurs
désirs d'apprécier les performances des artistes et de partager ce plaisir avec leurs
enfants. Nous sommes ici en face de deux démarches fondamentalement distinctes.
La première s'apparente à celle des amateurs de formes artistiques qui effectuent
cette sortie pour eux-mêmes dans un but de découverte. L'autre implique fortement

50
In, Arts de la piste numéro spécial "cirque(s) aujourd'hui, année des arts du cirque" p. 67.
51
In, "Avant-garde, cirque!, les arts de la piste en révolution" p. 183.

48
la présence d'enfants et le partage familial de la sortie pensée comme exceptionnelle
et divertissante. Pour cette dernière, le spectacle doit comporter les éléments
fondamentaux constitutifs d'un spectacle de cirque traditionnel. Ces éléments sont :
le trapéze, les clowns, les jongleurs, monsieur Loyal, les animaux… Le cirque
contemporain draine aussi son lot d'enfants, cependant, ils ne sont pas les premiers
demandeurs. "Ils ne sont en aucun cas les destinataires privilégiés du spectacle,
mais peuvent néanmoins s'y trouver à leur place"52. Les publics de spectacles de
nouveau cirque nourrissent une curiosité pour les nouvelles formes de création qui
croisent les différentes disciplines. Il semble que ces mêmes spectateurs affirment
un goût prononcé pour le cirque non traditionnel. Nous noterons la particularité des
publics comme ceux du cirque Plume par exemple. Il s'agit de publics qui sont
sensibles à la notoriété du cirque. Ces publics semblent êtres moins avertis et
répondent plus volontiers à un appel fortement médiatique. Le "cirque du docteur
Paradis" entretient des proximités esthétiques avec le cirque traditionnel et
rassemble un public hétéroclite entre amateur de cirque traditionnel et spectateur
averti.
La pratique culturelle des spectateurs de nouveau cirque témoigne de leur
intérêt pour les autres formes de spectacle vivant et plus particulièrement pour le
théâtre. Le contenu des spectacles, leur style et l'esprit des compagnies
caractérisent de façon évidente la création du cirque contemporain. Le public ne s'y
trompe pas et nous percevons au regard des différents ouvrages spécialisés une
réelle curiosité et un engouement pour ce type de programmation. Nous pouvons
qualifier ce public de pionnier. Cela concerne un public aux caractéristiques sociales
et culturelles favorisées. Leurs pratiques semblent êtres orientées vers la découverte
d'expressions nouvelles. Cependant, nous pensons que l'avenir pourrait faire place
à un public plus diversifié. C'est ce que nous observons déjà dans des spectacles de
compagnies plus connues et médiatisées avec le cirque Plume, ou le théâtre
équestre de Zingaro.
Les comportements vis-à-vis du cirque ont aujourd'hui évolué et en partie en
raison de l'année du cirque en 2001. Cependant, il ne nous semble pas qu'un réel
changement se soit produit quant à la façon dont le public appréhende ces deux
formes de créations. Autrement dit, le cirque traditionnel continu d'attirer son propre

52
In, "Avant-garde, cirque!, les arts de la piste en révolution" p. 187.

49
public constitué principalement de familles alors que le cirque contemporain draine
des publics plus avertis qui fréquentent les autres formes de spectacles vivants.

3. L'adhésion à une forme particulière

Il apparaît que le nouveau cirque soit une pratique artistique issue du


mouvement des années 1960-70 où la volonté d'une partie des artistes était de
transformer l'expression de leur art en tentant d'élargir leur public. Ils réactivent alors
une certaine pratique des arts populaires que l'on trouve dans le cirque traditionnel.
En effet, le cirque contemporain ou les autres formes de cirque actuelles peuvent
être considérés comme un mouvement de renouveau de la forme traditionnelle. Le
cirque que l'on considère comme une forme d'expression populaire ou comme une
forme divertissante, a la volonté d'être reconnu parmi les arts du spectacle vivant
comme une discipline artistique à part entière. Comme nous l'avons souligné
précédemment, les références de ces nouvelles formes artistiques, leurs recherches
esthétiques et leurs créativités, les rapprochent du champ de la culture légitime. Il
apparaît que les caractéristiques propres à leurs productions questionnent le
cloisonnement des disciplines artistiques établies ainsi que le rapport au public
instauré.
" Les spectateurs du cirque contemporain, en revanche, ne peuvent pas être
considéré comme de nouveaux publics du point de vue de l'institution culturelle.
Leurs sorties cuturelles, dans le champ de la culture légitime sont en effet
nombreuses et fréquentes53".
Pour illustrer nos propos, nous allons aborder l'étude réalisée sur la base de
questionnaires auto-administrés par les spectateurs de dix spectacles de cirque
contemporain qui ont eu lieu à l'espace chapiteau de la Villette entre 1996 et 2000.
Cette enquête nous apprend que le public est majoritairement un public
fémimin. Deux spectateurs sur trois sont des femmes. Par ailleurs, un spectateur sur
deux a moins de trente trois ans. Il s'agit donc d'un public jeune. De plus, 60 % de ce
public a un diplôme de niveau Bac + trois en moyenne. Il semble que ce profil
s'apparente à celui du public des spectacles vivants en régle générale et se distingue

53
Florence Levy in, Le(s) public(s) de la culture, 2003, CD Rom, p. 189.

50
de façon radicale du profil plus hétérogène du public du cirque traditionnel. Il s'agit
donc d'un public déjà familiarisé à une pratique culturelle comme le théâtre, la danse,
les expositions, les concerts, etc. C'est un public curieux, désireux de découvrir les
nouvelles formes de création qui croisent différentes disciplines. C'est en cela que
réside leur intérêt pour les spectacles de cirque contemporain. Il aime le nouveau
cirque et rejette de manière explicite le cirque traditionnel. Il semble que se soit
autour de la relation avec le cirque traditionnel que leur discours se partagent sur le
statut de cette discipline. Nous avons d'un côtè ceux qui déclarent avoir toujours
aimé le cirque et qui mettent l'accent sur les points communs et la continuité entre
ces formes et d'un autre côté, nous avons ceux qui rejettent le cirque tradtionnel en
s'appuyant sur ce qui fait du cirque contemporain une création artistique plutôt qu'un
loisir destiné à la famille. Le public du cirque contemporain semble donc être un
public habitué et assidu des institutions culturelles et des innovations des arts de la
scène.
"L'émergence du cirque contemporain correspond à un phénomène de
renouvellement créatif d'une forme populaire opéré par des artistes et des
professionnels de la culture. Il remet en cause, de l'intérieur, les frontières de la
culture légitime. Les publics principalement concernés, sont donc ceux qui multiplient
les sorties culturelles et qui s'intéressent aux recherches créatives pluridisciplinaires.
La venue d'un nouveau public, dont la présence varie selon les spectacles, est
essentiellement conditionnée par l'accessibilité de ces formes54".
Il nous semble que c'est dans la formation des individus et par conséquent
des publics de demain que ces pratiques se modifieront peut-être. Un type donné
d'activités culturelles peut devenir un pôle d'attraction pour un certain public. Il nous
semble que le groupe de public alors concerné s'individualise dans sa pratique, face
à celle des autres. Nous pensons que l'adhésion à ce groupe social devient alors une
métaphore d'un phénomène social, en effet, adhérer au groupe social des individus
qui vont voir du cirque permet à l'individu de se sentir rebelle face à la société de la
culture de masse.

54
Florence Levy in, Le(s) public(s) de la culture, 2003, CD Rom, p.193.

51
4. Le public comme entité agissante

La sociologue, Antigone Moucchtouris, directrice de recherche à l'Université


Paris V Sorbonne et enseignante à l'école du Louvre, dans son ouvrage intitulé, la
"sociologie du public dans le champ culturel et artistique" nous parle du "public
spectateur" et du "témoin spectateur". Elle nous fait remarquer la spécifié
individuelle du terme spectateur. Selon l'auteur, le spectateur est un individu qui est
témoin d'un événement comme une personne qui regarde ce qui se passe. "Ce
terme spectateur désigne une entité où l'individualité ne disparaît pas car il exprime
une propriété de l'individu, tandis que le terme public n'exprime pas une qualité
propre mais plutôt une entité en train d'agir ou se trouvant dans un espace qualifié de
public, c'est-à-dire appartenant à la collectivité et supposant l'existence de liens
organiques55". Dans certaines circonstances particulières, nous pouvons en effet
observer la formation de public de façon spontanée comme le public d'un spectacle
ou les visiteurs d'un musée. En ce sens le terme de spectacle et de spectateur est
indissociable. Dans la mesure ou le spectacle est l'écriture volontaire d'une action
déterminée et mise en scène dans un espace défini, le spectateur est alors défini
comme un individu témoin agissant. D'ordinaire, le terme de témoin désigne le côté
involontaire de la posture de l'individu qui regarde, ici le témoin agissant est un
individu qui regarde volontairement. C'est pourquoi, le public spectateur est dans une
action volontaire, citoyenne et responsable dès qu'il entre dans un musée ou dès
qu'il pénètre dans une salle obscure et même lorsqu'il regarde la télévision.
Il nous semble important de souligner que le fait de se rendre à un spectacle
était une chose fondamentale dans l'antiquité grecque. En effet, le fait de suivre une
représentation était considérée comme un acte susceptible de nourrir la qualité du
jugement du citoyen et plus particulièrement son jugement politique. Il devenait plus
à même de partager les règles de vie avec les autres. Le spectacle avait une
fonction d'éducation et de formation du citoyen. Dans cette approche, être présent en
qualité de spectateur était un acte politique.

55
Antigone Mouchtouris in, Sociologie du public dans le champ culturel et artistique, p.16.

52
Sous la Rome antique, la volonté politique était d'encourager les grandes
manifestations populaires à travers desquelles le peuple pouvait se divertir sans
avoir à exprimer son opinion sur la qualité de l'œuvre. L'esprit romain est encore
perpétué de nos jours. Il nous semble en effet que la proposition de divertissement
domine dans les spectacles que l'on pourrait qualifier de populaires. En revanche, les
spectacles aux contenus plus complexes où les tensions sociales ou politiques sont
mises en scènes semblent réservés à une élite. Le cirque dans cette nouvelle forme
d'écriture semble être à même de créer une brèche entre ses deux mondes.
"La relation de l'individu, ou des individus avec la culture ou le champ
artistiques dépend de leurs tendances, de leurs aspirations sociales et des
interactions et interférences entre le pouvoir d'action dont ils disposent, ce que
propose le marché du champ culturel et les valeurs admises dans une période
donnée. Le public n'est pas un groupe construit une fois pour toutes mais un
organisme vivant qui se fait et se défait, se constituant de groupes sociaux différents
selon les périodes56".

56
Antigone Mouchtouris in, Sociologie du public dans le champ culturel et artistique, p. 117.

53
Conclusion générale

Au départ de ce travail de D.E.S.S., il s'agissait d'étudier en quoi le cirque


pouvait agir sur la formation du public. L'objet était de trouver en quoi la fréquentation
du cirque pouvait amener le public à s'interesser aux autres formes de créations
artistiques. Nous avons décidé d'orienter notre approche en tentant de faire, dans un
premier temps de ce travail, un état des lieux historiques du cirque afin de mieux
comprendre ce qu'il est devenu aujourd'hui. Nous nous sommes ainsi posé la
question de l'interaction du cirque avec les autres formes de créations afin de vérifier
si nous n'étions pas en face d'une forme émergente d'écriture théâtrale. Dans notre
démarche, nous nous sommes appuyés sur des ouvrages de la littérature ayant trait
au cirque de façon générale et spécifique. Dans une deuxiéme partie, nous avons
tenté de mettre en avant la façon dont s'est constituée une nouvelle ésthétique des
œuvres du cirque et comment les nouvelles formes de création ont pu émerger. La
troisiéme partie traite plus spécifiquement du public du cirque. Nous avons posé un
regard sur les études menées sur les publics du cirque afin d'en cerner les profils.

L'histoire du cirque nous montre comment on passe d'actes créatifs isolés,


ayant pour lien le nomadisme et la nécessité économique à une structuration
hiérarchisée, au travers de la mise en place de structure fixe ou mobile et d'une
direction désireuse de porter le projet et d'organiser l'esthétique. Nous nous trouvons
alors devant une forme esthétique ayant ces propres codes que sont la piste
circulaire, les paillettes de monsieur Loyal et son costume rouge. C'est à partir de là
que sont nés ce que nous appelons les fondamentaux du cirque (trapèze, fauve,
orchestre, jongleur, cavalier, clown…) S'il eut des tentatives de créer des ponts entre
le théâtre et le cirque, elles ne perdureront pas lors de l'avènement des grands
chapiteaux.

L'esthétique du cirque à la fin des années soixante-dix du siècle dernier, va


changer de façon fondamentale. Les artistes vont se renouveler par le biais de la
mise en place d'école permettant ainsi de sortir de la création "consanguine" et de la
transmission du savoir par filiation. Aujourd'hui nous pouvons apprendre à faire du

54
cirque. Cela va transformer le "cirque" en profondeur. Nous écrivons, ici, cirque entre
guillemet pour souligner que ce terme générique constitue deux courants
radicalement différents. Le cirque traditionnel qui continue de faire ce qu'il a toujours
su faire, c'est-à-dire, divertir les publics et le cirque contemporain qui nous propose
une vision sublimée du monde. Nous sommes alors en face d'une forme d'écriture
artistique. En effet, il nous semble que cette forme soit plus proche de la danse et du
théâtre que le cirque traditionnel, à la fois d'un point de vue esthétique mais aussi du
point de vue économique.

Les professionnels de la diffusion artistique ont longtemps considéré le cirque


comme une forme molle de la création artistique. Nous pensons que cela a
largement contribué au désintéressement du public pour cette forme artistique. 2001,
l'année des arts du cirque, marque un tournant et rend le cirque visible à coup de
subvention. Le public retrouve de l'intérêt aussi bien pour le cirque traditionnel que
pour le cirque contemporain. Nous nous trouvons encore devant deux formes
distinctes de création. Leurs contextes de réception sont différents, en effet, les
récepteurs sont différents. Ils diffèrent en fonction du message de l'émetteur.
Cependant, les publics de leurs côté, influencent la forme à laquelle ils participent.
Les créateurs désirent que le plus grand nombre adhére à leur travail. En retour, cela
influence directement la forme de leur création. Nous avons pu voir que les publics
sont différents et ne semblent pas se croiser entre le cirque traditionnel et le cirque
contemporain, exception faite des amateurs de cirque dans son ensemble et du
public familial averti bien que cela nous apparait minoritaire.

Nous pouvons donc penser que le cirque contemporain draine un public averti
qui a déjà une pratique culturelle diversifiée. Par conséquent, il est envisageable que
cette curiosité déclenche chez lui le désir de voir d'autres spectacles qu'il n'a pas
l'habitude de voir. Nous pensons aussi que le cirque est une porte d'entrée plus
accessible pour la formation des publics. Cependant, il serait utopiste de penser que
la simple fréquentation d'un spectacle de cirque suffit a amener les publics vers les
autres formes de création sans la mise en place d'un travail de médiation par les
professionnels de la diffusion. Par conséquent, nous pouvons dire que notre
hypothèse de départ n'a qu'une validité toute relative. La fréquentation du nouveau
cirque concerne des individus qui ont déjà des pratiques culturelles bien ancrées. Ce

55
sont ces habitudes culturelles qui les ont emmenés au cirque et non pas l'inverse.
Cependant, l'offre croissante de spectacles de cirque contemporain permet de
drainer des publics que nous nommerons des "badauds culturels". Cette catégorie de
public se trouve parfois au contact de formes artistiques contemporaines sans le
savoir pour autant, comme lorsqu'elle se retrouve "témoins" d'un spectacle de rue
par exemple. Ces spectateurs doutent de leurs capacités à recevoir un message
artistique actuel, pourtant ils apparaissent comme des spectateurs en devenir.

Depuis que l’irrationalité de la constante pi a été démontré, on sait, qu’il est


inutile de chercher la quadrature du cercle. En effet, construire un cercle et un carré
de même aire, est impossible. Dans le titre que nous avons proposé pour ce
mémoire, nous trouvons une simillitude avec ce que nous supposons du cirque
contemporain : une forme artistique en phase d'élaboration de sa propre écriture,
mais toujours dans cette ambiguïté de la reconnaissance de ses pairs. Nous
entendons par pair le théâtre auquel le cirque contemporain voudrait se référer.
Autrement dit, les acteurs du cirque contemporain aimeraient que leur discipline
artistique soit reconnue par les spécialistes à hauteur de la reconnaissance qui est
accordée au théâtre. Cependant le cirque ne serra jamais du théâtre et fort
heureusement. De même, le cirque contemporain n'est déjà plus tout à fait du cirque
mais tout simplement une forme novatrice de spectacle vivant. Les instances
culturelles qui légitimissent les courants artistiques et leurs formes auprés des
publics, définissent cette forme novatrice de spectacle vivant par le terme de
"nouveau cirque". Elles justifient cette appelation par l'existence d'une continuité
historique entre le cirque traditionnel et le nouveau. Pourtant, le nouveau cirque
s'inscrit et se comprend dans une société en pleine mutation. Pour illustrer
d'avantage nos propos, nous prendrons pour l'exemple l'émergence d'une nouvelle
forme d'expression artistique qui a remis en cause les frontiéres du champ artistique.
Nous parlons ici des spectacles de danse hip-hop. Les origines de cette pratique se
situent hors de la danse classique ou contemporaine, nous ne voyons pas ici de
continuité avec une forme traditionnelle. Nous nous trouvons devant l'émergence
d'une nouvelle esthétique, d'une culture qui s'exprime par la danse mais aussi par
d'autres formes d'expressions artistiques (graphitis, tag, rap…). Cette forme
artistique et culturelle a largement été critiquée, sinon évincée des scènes de
spectacle et reniée par un grand nombre de professionnels. Fort heureusement, il se

56
trouve des artistes et des professionnels suffisament engagés pour défendre ces
nouvelles formes et les légitimer. Le cirque contemporain peut être comparé à cette
forme novatrice que nous avons envisagée plus haut. Cependant, les instances de la
culture patrimonialise le cirque et l'enferme dans une appelation dont il aura du mal
a se défaire. Seul Bartabas du cirque Zingaro a réintérogé cette appelation en se
proclament "théâtre équestre". C'est dans la recherche de nouvelles appelations que
le public pourra éventuellement se diversifier.

À partir de cette étude, un certain nombre de conclusions générales ont pu


être avancées. Cependant, il nous semble que ce travail mériterait d'être prolongé. Il
nous semble tout aussi important de s'attarder davantage sur les publics de la culture
et plus particuliérement sur les publics du cirque contemporain. De la même maniére
il apparaît important de pouvoir faire un comparatif approfondis entre les différentes
études menées par le D.E.P. afin de mieux cerner le profil et l'évolution des
spectateurs du cirque contemporain et ceux du cirque traditionnel.

57
Chronologie

Vers 3500 avant J.-C. Danseurs de corde en chine, jongleurs en Egypte.


Vers 2400 avant J.-C. Athlètes et taureau à Cnossos.
Vers 2000 avant J.-C. Jonglerie en Egypte.
Vers 500 avant J.-C. Ménageries sacrées en Egypte, course de char en Crête.
Civilisation gréco-romaine Innombrable spécilités acrobatiques, prémisses architecturales du cirque.
ème
XII siécle Troubadours et comédiens ambulants.
ème ème
XVI XVIII Dévellopement de la corporation des banquistes (mimes, danseurs de corde,
illusionnistes…).
1755 Représentation de vénerie en France par Defraine.
1770 Construction d'une piste circulaire entourée de bois par Philip Astley à Londres.
1779 Philip Astley dote son cirque d'une toiture, et le baptise, "Astley's Royal Amphithéâtre", le
diamètre de la piste est ramené à 13 métres, dimension désormais universelle.
1782 Ouverture par Charles Hugues du "Royal Circus", espace hybride entre le cirque et le théâtre.
1800-1900 Engouement pour la ménagerie foraine.
1810 Naissance de Barnum Phyneas Taylor.
1825 Joshuah Purdy Brown utilise une structure de toile pour abriter les exercises équestres et
acrobatiques en Dans l'état de New-York.
1831 Les fréres Franconni engagent le premier dompteur, Henri Martin.
1843 L'architecte Jacques Ignace Hittorf va concevoir une salle dont la particularité est d'avoir des
gradins en entonnoir, il s'agit du cirque des Champs-Èlyssées à Paris.
1850-1900 Contruction des cirques stables en France ( Reims, Amiens, Paris…).
1850 Dejean propose des tarifs préférenciels pour personnes les plus déffavorisées.
1852 Ouverture du Cirque Napoléon de Louis Dejean à Paris (aujourd'hui Cirque D'hiver Bouglione).
1870 Apparition de l'auguste en Allemagne.
1876 Richard Wagner à Bayreuth condamne le public à l'obscurité.
1888 Wilhelm et Karl Hagenbeck inventent la cage centrale.
1928 Charlie Chaplin interpréte Charlot dans le film "The Circus".
1929 Représentations privées du Cirque miniature du sculpteur Alexandre calder.
1932 Sortie du film "Freaks" de Tod Browning.
1974 Ouverture des deux premiéres écoles de cirque à Paris, l'école nationale d'Annie Fratellini et
Pierre Etaix et l'école au Carré d'Alexis Grüss et Silvia Monfort.
Création du Cirque à l'Ancienne d'Alexis Grûss.
1979 Reconnaissance par l'état du cirque comme une forme artistique à part entière par le transfert de
la tutelle du ministére de l'agriculture à celui des affaires culturelles.
1982 Attribution du label Cirque national à Alexis Grüss.
1984 Création du cirque Plume, du Théâtre équestre Zingaro, d'Archaos en France et du Cirque du
Soleil au Québec.
1985 Inauguration du Centre National des Arts du Cirque (C.N.A.C.) à Châlons-sur- Marne.

58
1993 Première représentation de La Voliére Dromesko au festival d'Avignon.
Création de l'association HorsLesMurs.
1995 HorsLesMurs sort la premiére revue les "arts de la piste".
2001 Ouverture de l'année des arts du cirque.
2004 Exposition au grand Palais "La grande parade, portrait de l'artiste en clown".
2004 Le cirque du soleil se produit dans trois ville en France : Lyon, Marseille et Lille.

59
Lexique57

Auguste Clown, le comique du numéro à la différence du clown blanc


sérieux et pince sans rire.

Banque Le monde du cirque. Les banquistes sont des gens de la banque.

Banquette Mur circulaire et bas qui entoure la piste.

Barnum toile levée au-dessus de l'entrée du public ou de l'entrée des


artistes.

Boniment Discours, généralement empathique et hyperbolique, que


prononce le bonimenteur ou le bonisseur, sur la parade afin de valoriser les numéros
qui composent le spectacle auquel il invite les badauds.

Bonisseur Celui qui fait le boniment. Les gens du cirque utilisent rarement le
terme de bonimenteur qui est péjoratif.

Cage centrale Cage que l'on installe dur la piste et qui permettra la présentation
des numéros d'animaux dangereux.

Circassien Qui appartient au cirque. Le mot est indifférement nom ou


adjectif.

Cirque stable Bâtiment, généralement rond, comportant une piste et des


gradins pour le public dans lequel on donnait, à l'origine, exclusivement des spectacles
de cirque.

Clown Personnage comique qui apparut dés les début du cirque. Personnage
qui assurait des intermèdes entre les numéros.

Emporte-pièce Exercice le plus spectaculaire d'un numéro.

57
Hugues Hotier in, cirque communication culture.

60
Entresort Baraque foraine dans laquelle on expose des phénomènes ou
des animaux rares. Ainsi appelée parce que l'on entre part un côté et l'on sort par
l'autre après être passé devant l'exhibition.

Gadjo Terme gitan pour désigner l'étranger, le non gitan.

Métier Ensemble des gens du cirque, toute entreprise circassienne ou foraine :


ménagerie, loterie, cirque, manége…

Monsieur Loyal Personnage emblématique du cirque. Il présente le spectacle


et/ou en assure la régie. Il représente la direction. Quand il intervient dans les entrées
clownesques, il représente la société "normale", le standard que le clown surpasse et
que l'auguste n'atteindra jamais.

Palc Cirque en plein air, sans chapiteau, tapis posé au sol délimitant ainsi
l'espace de jeu.

Parade Endroit où les artistes de cirque donnent un aperçu du spectacle à venir.

Parapluie Petit chapiteau forain.

Voltige Ensemble d'exrcices équestres qui consistent à des acrobaties sur un


cheval, ou plusieurs chevaux, lancés au trot ou au galop.

Cirque de village Petit cirque modeste de tradition familiale qui se déplace


réguliérement pendant les périodes touristiques.

Cirque traditionnel Grand chapiteau ou cirque stable de tradition familiale avec des
moyens importants.

Cirque moderne Compagnie de cirque actuel, contemporain, nouveau, improvisé,


reconnue par les tutelles et les professionnels pour leurs qualités artistiques.

61
Structure d'âge du public du cirque
sur 100 spectateurs des 12 derniers mois…ont...

9%

48% moins de 15 ans


de 15 à 24 ans
de 25 à 44 ans
de 45 à 59 ans
32% 60 ans et plus

5% 6%

58

Taux de fréquentation du cirque selon l'âge


Sur 100 personnes de chaque classe d'âge, sont allées au cirque au cours des 12 derniers mois..ont....

10% 14%
9%
0 à 5 ans
8% 6 à 10 ans
11 à 14 ans
15 à 24 ans
25 à 34 ans
17% 4% 35 à 49 ans
50 à 64 ans
14% 65 ans et plus
24%

59

58
Source : D.E.P. études réalisée en 1992, publiée dans developpement culturel N°100, septembre 1993
59
Source : D.E.P. études réalisée en 1992, publiée dans developpement culturel N°100, septembre 1993

62
Les parts de marché du cirque
sur 100 sorties au cirque au cours des 12 derniers mois, ont bénéficié aux...

Cirques "modernes"
14%

Cirques
"traditionnels"
60%

Cirques de village
26%

Cirques "traditionnels"
Cirques de village
Cirques "modernes"

60

Un spectacle pour tous


sur 100 personnes de chaque groupe, considérent le cirque comme un spectacle...

83 84

ensemble des français

public des cirques "modernes"


depuis 1987

14 13

1 1

Pour tous Pour enfants Pour adultes


ensemble des 83 14 1
français
public des cirques 84 1 13
"modernes" depuis
1987
61

60
Source : D.E.P. études réalisée en 1992, publiée dans developpement culturel N°100, septembre 1993
61
Source : D.E.P. études réalisée en 1992, publiée dans developpement culturel N°100, septembre 1993

63
Les attraits du cirque
sur 100 personnes de chaque groupe, se déclarent tout à fait d'accord avec les opinions suivantes :

c'est une école de persévérance et de 65


public des
courage 80
cirques
"modernes"
64
c'est le témoignage d'un savoir-faire humain depuis 1987
68 ensemble des
français
60
c'est un spectacle où on ne triche pas
63

50
c'est la féerie et le merveilleux
52

50
il faut emmener les enfants au cirque
48

31
le cirque à une valeur éducative
46

33
ça remue, ça choque, ça sort des habitudes
41

23
le cirque procure les émotions les plus fortes
35

16
le cirque est un mode de vie dont on rêve
16

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90
62

L'évolution du cirque
sur 100 personnes de chaque groupe, répondent "absolument" à la question suivante : que désireriez vous trouvez dans le cirque moderne.

des n° qui se moquent du cirque traditionnel 21


7

sans chapiteau 25
8

piste pas ronde (carrée ou autre) 18


9

sans animaux du tout 22


9

sans clown classique (auguste, clown blanc) 30


9

de la provocation des scénes choc 17


10 public des
cirques
référence à la culture contemporaine 27 "modernes
10
depuis 1987
sans présentateur 35
10
ensemble
49 des français
sans animaux sauvage 13

musique rock 23
14

mise en scéne avec une histoire qui se suit 57


20

cascades, moto, stock cars camions 13


22

autres arts (danse, théâtre) 67


26

humour au deuxiéme degré 66


27
63

62
Source : D.E.P. études réalisée en 1992, publiée dans developpement culturel N°100, septembre 1993
63
Source : D.E.P. études réalisée en 1992, publiée dans developpement culturel N°100, septembre 1993

64
programmation télévisuelle entre le 15 décembre 2003 et le 4 janvier 2004 ayant
trait au cirque

Lundi 15 Décembre 2003 20.00 Voyage


Voyage en terres nomades.La magie des émotions
Documentaire de jordi Llompart (Espagne 2003 26mn)
Autour de la création de la compagnie de théatre catalane Els comédiants. La
nouvelle pièce, Bi, L'histoire de clowns occidentaux découvrant la culture chinoise,
avec une compagnie d'acrobate chinois.

Vendredi 19 Décembre 2003 22.15 ARTE


Elias, l'enfant du cirque.
Documentaire de Stella Tinbergen (Allemagne 2001 55mn)
Autour de la vie d'Ellias un enfant myopathe, dont les parents sont artistes de cirque
et ont choisi de continuer leurs métiers.

Samedi 20 Décembre 2003 16.40 France 3


9e Festival international du cirque de Massy
Enregistré depuis le chapiteau du cirque Kinos (2001 95mn)

Lundi 22 Décembre 2003 22.45 Arte


Entre ciel et scène. Les Thuranos.
Documentaire de Kerstin Stutterheim et Niels Bolbrinker (Allemagne 2003 90mn)
Autour de la vie de Konrad Thur, aujhourdui nonagénaire et effectuant encore en
duo avec son fils des exercices extraordinaires à la barre et aux anneaux. Il fut le
meilleur du monde ne se servant que d'un bras pour effectuer des figures
légendaires, avant-guerre.

Mercredi 24 Décembre 2003 20.55 France 2


Sol en cirque.
Divertissement Proposé par Anne Marcassus, présenté par Maïtena Biraben et
Guillaume Durand. Réalisation : Pascal Duchêne (France 2003 130mn)

65
Spectacle au profit de l'association "Sol en Si" pour aider les enfants touché par le
SIDA et leurs familles. Seront Présent des artistes chanteurs interprètes et des
artistes des cirques Bouglione, Phénix et Pinder. Un album de recueil de contes et
de chansons sur le thème du cirque est paru chez Warner music "Sol en Cirque"

Jeudi 25 Décembre 2003 17.30 ARTE


Le cirque de Moscou sur glace.
Enregistré au palais des sports de paris

Jeudi 25 Décembre 2003 20.40 ARTE


24e Festival mondial du cirque de demain
Proposé par Dominique Mauclair et Alain Pacherie, enregistré au Cirque d'hiver-
Bouglione. Commentaire : Coline Serreau. Réalisation : Pierre Fournier-Bidoz (2003
80mn)

Jeudi 25 Décembre 2003 22.00 ARTE


Les feux de la rampe
Film de Charlie Chaplin (Lime light, USA 1952)
En 1914 à Londres Calvero un clown autrefois adulé noie aujourd'hui sa déprime
dans l'alcool. Un jour, il sauve du suicide sa voisine, terry une jeune ballerine
paralysée, et peu à peu lui redonne goût à la vie.

Vendredi 26 Décembre 2003 22.15 ARTE


Gipsy et Maud
Documentaire de Catherine Tissier (France 2003 55mn)
Saga familiale des Gruss autour de la transmission des savoirs faires.

Samedi 27 Décembre 2003 0.20 France 3


Un rêve de cirque
Documentaire-fiction de Jean-Michel Guy, Charles Picq et les Nouveaux Nez.
Réalisation Charles Picq (France-Belgique 2002 90mn)
Entre tradition et nouvelles formes, croissements de disciplines… Un monde inventif
et étonnant.

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Samedi 27 Décembre 2003 16.25 France 3
Les étoiles du cirque de Pékin
Spectacle enregistré au cirque Phénix. Réalisation : Grégoire Saint Pierre, avec
Stéphane Freiss en maître de cérémonie (France 2003 75mn)

Mercredi 31 Décembre 2003 20.55 France 3


150 ans du cirque d'hiver Bouglione
Spectacle conçu par Joseph, Nicolas, Sampion, et Francesco Bouglione. Réalisation
: Pierre Fournier-Bidoz, enregistré le 11 décembre 2002 au CHB (France 95mn)
L'impressionnante famille, déploie son arbre généalogique, évoque son souvenir de
voyages de tournage….

Mercredi 31 Décembre 2003 22.00 ARTE


Grand cabaret
Divertissement Présentation : Désirée Nosbusch. Réalisation : Alexandre Arnz
(France-Allemagne 2003 135mn)

Vendredi 2 Janvier 2004 23.10 M6


Gary Kurtz : juste une illusion?
Divertissement. Présentation : Laurent Boyer (2003 95mn)
Autour de Gary Kurtz magicien, illusionniste, télépathe et mentaliste Québécois.

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Bibliographie

Hugue HOTIER, professeur des Universités, "Cirque, Communication, Culture",


édition originale Janvier 1995, Presses Universitaires de Bordeaux, format 15x21 cm,
255 p.,ISBN2-86781 169-4, 13,72 euros.

François LAPLANTINE, Alexis NOUSS, "Métissages de Arcimboldo à Zombi", édition


originale Octobre 2001, édition Pauvert, format 16x24 cm, 633 p., ISBN 2720214205,
44,50 euros.

Imprimerie Nationale, "Lexique des régles typographiques en usage à l'imprimerie


nationale", cinquiéme édition Juin 2002, imprimerie nationale, format 41,5x21 cm,
197 p., ISBN 2-7433-0482-0, 14 euros.

Petit Larousse en couleur, édition Larousse 1991, format 19,5x28,5 cm, 1824 p.,
ISBN 2-03-301292-1.

Guy ALLOUCHERIE, Rosita BOISSEAU, Jean-Gabriel CARASSO, François


CERVANTES, Gilles DAFACQUE, Jean DIGNE, Dominique DUPUY, Alain GAUTRE,
Christine HAMON, Emmanuelle JACQUELINE, Bernard KUDLAK, Jacques LACOQ,
Jean-Paul LEFEUVRE, Thierry LOUNAS, Sylvie MARTIN-LAHMANI, Marc
MOREIGNE, Josef NADJ, Hyacinthe REISCH, André RIOT-SARCEY, Paul RONDIN,
Christian TAGUET, Moïse TOURE, Théâtre aujourd'hui N°7, " Le cirque
contemporain, la piste et la scène", 2ème édition, 2ème semestre 2001, CNDP, Arts et
Culture, ministére de la culture et de la communication, ministére de l'éducation
nationale, format 27x21 cm, 160 p., inclus un disque compact, ISBN 2-240-00549-1,
32,78 euros.

Artpress, numéro 20, Spécial, "Le cirque au-dlà du cercle", 1999, format 22x28,5 cm,
194 p., ISSN0245-567, 95 francs.

68
Antoine BILLAUD, Alexandra ECHKENAZI, Michel LEON, "Droit de cité pour le
cirque", guide juridiques collectivités locales, édition originale Juillet 2001, édition du
Moniteur, format 16x26 cm, 145 p., ISBN 2-281-12323-5, 22 euros.

Ouvrage collectif dirigé par Emmanuel WALLON, " Le cirque au risque de l'art",
édition originale Février 2002, édition Acte sud-Papiers, collection Apprendre, format
10x19 cm, 254 p., ISBN 2-7427-3612-3, 11 euros.

Julien ROSEMBERG, sous la direction conjoint de : Jacques BONNIEL et Emmanuel


WALLON, mémoire de D.E.S.S. "développement culturel et direction de projet"
université Lyon 2/A.R.S.E.C., "Analyse de l'évaluation des oeuvres de cirque. Une
approche", Promotion 2002/2003, format 21x29,7, 176 p..

Cahier trimestriel "Dédale" N°1 Pédagogies des arts de la pistes & de la scène, 1er
trimestre 2004, Publication du centre national des arts du cirque et de l'institut de la
marionnette, format 22x28, 19 p.,ISSN en cours, 7 euros.

Arts de la piste, N° 21-22, numéro spécial, cirque(s) aujourd'hui, Année des arts du
cirque 2001-2002, Octobre 2001, édition de HorslesMurs, format 22x28,5 cm, ISSN
1269-0120-CP, 9,23 euros.

Arts de la piste, N° 27, "Musique et cirque", Janvier 2003, édition de HorslesMurs,


format 22x28,5 cm, ISSN 1269-0120-CP, 9,15 euros.

Sous la direction de Olivier DONNAT et de Paul TOLILA, "Le(s) public(s) de la


culture, édition originale Octobre 2003, Presse de Science Po, format 13,5x22 cm,
393 p. contient un CD-ROM, ISBN 2-7246-0921-2, 28 euros.

Antigone MOUCHTOURIS, "Sociologie du public dans le champ culturel et


artistique", édition originale Octobre 2003, édition de L'Harmattan, collection logiques
sociales, format 13,5x21,5 cm, 130 p., ISBN 2-7475-4303-X, 12 euros.

69
Avant-Garde, Cirque!, Les arts de la piste en révolution, ouvrage collectif dirigé par
Jean-Michel Guy, édition originale Novembre 2001, édition Autrement, collection
Mutations N°209, format 17x25 cm, 253 p., ISBN2-7467-0141-3, 19,82 euros.

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