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MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT MINISTRY OF HIGHER EDUCATION

SUPÉRIEUR *******
******* UNIVERSITY OF NGAOUNDERE
UNIVERSITÉ DE NGAOUNDÉRÉ *******
******* FACULTYOF ARTS, LETTERS AND
FACULTÉ DES ARTS, LETTRES SOCIALS SCIENCES
ET SCIENCES HUMAINES *******
*******

DÉPARTEMENT DE FRANÇAIS
Unité de Formation Doctorale de Lettres d’Expression Française (UFD/LEF)

Laboratoire Langues, Dynamiques et Usages (LADYRUS)

ANALYSE SÉMANTIQUE D’UN OUVRAGE


LEXICOGRAPHIQUE INTERLINGUISTIQUE : CAS
DU DICTIONNAIRE TUPURI-FRANÇAIS-ANGLAIS DE
SUZANNE RUELLAND

Mémoire de Master ès Sciences du langage

Option : SÉMANTIQUE

Souténu par Fulbert TAÏWE

Sous la direction de M. Théophile CALAÏNA, Maître de Conférences, Université de


Ngaoundéré

Membres du Jury

Présidente : Mme Léonie METANGMO-TATOU , Maître de Conférences

Examinateur : M. Cyrille Cristal ENGON ONDOUA, Chargé de Cours

Directeur : M. Théophile CALAÏNA, Maître de Conférences

Ngaoundéré (Cameroun) 2017

i
DÉDICACE

Mon aimable père, DA’AYANG Joseph ;


Ma tendre mère, ASTA Marthe.

ii
REMERCIEMENTS

Ce mémoire correspond à l‟aboutissement d‟un objectif qui me semblait, il y a encore


quelques mois, absolument inaccessible. Il concrétise de nombreux mois de réflexion et de
travail, et je dois à cet effet remercier des personnes sans lesquelles ce travail n‟allait voir les
jours. Je tiens en premier lieu à remercier le Pr Théophile CALAÏNA pour avoir accepté de
diriger ce mémoire. Pour sa détermination à être disponible en toutes circonstances, pour les
nombreuses discussions qui m‟ont éclairé, orienté, poussé à aller plus loin dans ma réflexion.
Je dis sincèrement merci à tous mes enseignants du département de français pour
les connaissances et conseils qu‟ils n‟ont cessé de me prodiguer tout au long de ma
formation.
Je suis également extrêmement redevable au Pr Lynne FRANJIÉ (de l‟Université
Stendhal-Grenoble 3) et au Dr Jean Paul BALGA (de l‟Université de Maroua) pour leurs
soutiens multiformes.
À tous les personnels du Laboratoire Langues Dynamiques et Usages (LADYRUS),
qui m‟ont accueilli et permis d‟effectuer ce travail dans une ambiance aussi conviviale que
stimulante, qui n‟ont eu de cesse de répondre à toutes mes sollicitations et n‟ont ménagé
aucun effort pour me montrer les différentes techniques de recherches avec les nouvelles
technologies.
Mes remerciements vont également au révérend pasteur Bernard DJAGJING,
traducteur tupuri, qui m‟a outillé des ouvrages sur le tupuri, m‟a prodigué des conseils
techniques sur la traduction tupuri-français et m‟a associé au comité de traduction de la
langue tupuri.
Ma gratitude va de même à tous ceux qui ont accepté de relire ce travail avec
compétence et patience. Leurs interrogations, leurs critiques, leurs réflexions et leurs
propositions nous ont sans doute permis, dans certains cas, de pousser plus loin notre
recherche et, dans d'autres cas, de corriger, de redresser ou d'amplifier des présentations. Nous
aimerions plus particulièrement remercier Mme RHOUSGOU MENWA HERMINE, MM.
Bienvenu DOMBA, Philippe AYANAWA et Dr. HAYATOU DJOULDE pour leurs aides
précieuses.
Je ne pourrais pas terminer mes propos sans exprimer explicitement ma
reconnaissance à mes camarades de promotion qui ont chacun joué un rôle important dans la
réalisation de ce travail en nous encourageant, en me fournissant des documents, etc.

iii
SOMMAIRE

DÉDICACE .................................................................................................................... ii
REMERCIEMENTS ...................................................................................................... iii
SOMMAIRE .................................................................................................................. iv
RÉSUMÉ ........................................................................................................................ v
ABSTRACT ................................................................................................................... vi
ABRÉVIATIONS ET SIGNES CONVENTIONNELS ............................................... vii
LISTE DES FIGURES ................................................................................................ viii
ÉPIGRAPHE................................................................................................................... 1
INTRODUCTION GÉNÉRALE .................................................................................... 2
CHAPITRE I : ETHNOGRAPHIE ET ASPECTS LINGUISTIQUES TUPURI ........ 17
CHAPITRE II : ANALYSE DE LA DÉFINITION LEXICOGRAPHIQUE(DL)
BILINGUE TUPURI-FRANÇAIS DANS LE DITFA ................................................ 42
CHAPITRE III : POLYSEMIE ET HOMONYMIE TUPURI-FRANÇAIS DANS LE
DITFA ........................................................................................................................... 68
CHAPITRE IV : LA RELATION SYNONYMIQUE ET SON TRAITEMENT EN
CONTEXTE BILINGUE TUPURI-FRANÇAIS DANS LE DITFA .......................... 95
CHAPITRE V : PROBLÈME DE TRAITEMENT SÉMANTIQUE DANS LE DITFA
SUGGESTION D‟UNE MÉTALANGUE POUR UNE VERSION AMÉLIORÉE DU
DICTIONNAIRE TUPURI-FRANÇAIS ................................................................... 117
CONCLUSION GÉNÉRALE ..................................................................................... 142
BIBLIOGRAPHIE ...................................................................................................... 148
ANNEXES .................................................................................................................. 159
TABLE DES MATIERES .......................................................................................... 165

iv
RÉSUMÉ

Cette étude est consacrée d‟abord à l‟analyse sémantique des unités lexicales du
DITFA, elle inventorie ensuite les problèmes de traitement du sens des adresses qui se
posent dans ce dictionnaire (particulièrement ceux dans la paire de langues tupuri-français), et
propose enfin un modèle de traitement lexicographique de la zone sémantique qui vise à
satisfaire les besoins de l„usager francophone et du locuteur du tupuri en matière de traduction
et de production d'énoncés en tupuri. À travers l'analyse sémantique de ces unités lexicales
tupuri et françaises dans le DITFA, nous examinons, plus précisément, quelques types
d‟unités d‟analyse en lien avec la mise en correspondance du tupuri et du français, à savoir :
la définition lexicographique bilingue, le traitement de la polysémie et homonymie en
contexte bilingue, ainsi que l‟analyse des relations synonymiques. L'accent est mis sur
l‟intérêt de la définition dans les dictionnaires bilingues pour résoudre la problématique de la
polysémie et de l‟équivalence interlangue, sur l'importance d'une description rigoureuse et
systématique de la combinatoire sémantique et lexicale des lexies et sur la mise en évidence
des divergences interlinguistiques (sémantiques, lexicales, syntaxiques, dialectales etc.) qui
peuvent poser problème pour l 'usager, notamment dans une perspective d'encodage et de
décodage. L'étude aboutit à la réalisation d'une base de données lexicographique bilingue
biunivoque tupuri-français et français-tupuri. Fondée sur les principes de la lexicologie
explicative et combinatoire, cette base de données est conçue en vue d'illustrer concrètement
le traitement lexicographique que nous préconisons dans notre travail.
Mots clés : Analyse sémantique, interlinguistique, définition lexicographique,
polysémie, homonymie, synonymie, DITFA.

v
ABSTRACT

This study is devoted first of all to the semantic analysis of the lexical units of
DITFA, it then lists the problems of processing the meaning of the addresses that arise in this
dictionary (especially those in the Tupuri-French language pair), and proposes and finally, a
lexicographic treatment model of the semantic zone that aims to satisfy the needs of the
French-speaking user and the speaker of tupuri in the translation and production of utterances
in tupuri. Through the semantic analysis of these lexical units‟ tupuri and French in the
DITFA, we examine, more precisely, some types of units‟ analysis related to the mapping of
tupuri and French, namely: the lexicographic definition bilingual, the treatment of polysemy
and homonymy in a bilingual context, as well as the analysis of synonymic relationships.
Emphasis is placed on the interest of definition in bilingual dictionaries to solve the problem
of polysemy and inter-language equivalence, on the importance of a rigorous and systematic
description of the semantic and lexical combinatorics of lexicons and on highlighting
interlinguistic divergences (semantic, lexical, syntactic, dialectal, etc.) that can pose a
problem for the user, especially in an encoding and decoding perspective. The study results in
the production of a bilingual lexicographic database, one-to-one, tupuri-french and tupuri-
french. Based on the principles of explanatory and combinatorial lexicology, this database is
designed to concretely illustrate the lexicographic treatment we advocate in our work.
Key words: Semantic analysis, interlinguistics, lexicographic definition, polysemy,
homonymy, synonymy, DITFA.

vi
ABRÉVIATIONS ET SIGNES CONVENTIONNELS

A : Actant

ASém : Actant sémantique

DEC : Dictionnaire Explicatif et Combinatoire

DITFA : Dictionnaire tupuri-français-anglais

DL : Définition lexicographique

L : Lexie

LA : Langue d‟arrivée

LC : Langue cible

LD : Langue de départ

LS : Langue sourcencipe d‟explicitation et d‟adéquation

PAE : Principe d‟adéquation et d‟explicitation

PNT : Principe de non-tautologie

PSem : Prédicat sémantique

S : Sème

Sé : Signifié

(S1 +S2 +S3 +…Sx) : Équation sémique permettant de ressortir tous les sèmes d‟un lexème
(c‟est égale à son sémème)

SD : synonymie directe

ST : Liens synonymiques de traduction

↷ : A pour correspondant ou équivalent (x) dans la langue cible

⊃;⊂ : inclusion ensembliste (X⊃Y signifie (l‟ensemble X inclut


l'ensemble Y comme son sous-ensemble))

* : phrase jugée sémantiquement inacceptable.

vii
LISTE DES FIGURES

Figure 1: carte de localisation du pays tupuri dans la rÉgion de l'extrÊme-nord


(CAMEROUN) ................................................................................................... 23
FIGURE 2: ÉQUATION D'UN PRÉDICAT SÉMANTIQUE .......................... 59
Figure 3: Définition schématique de la polysémie .............................................. 72
Figure 4 : Définition schématique de l'homonymie ............................................ 73
Figure 5 : Équation sémique................................................................................ 83
Figure 6 : L'intersection sémique (TUTESCU) .................................................. 84
Figure 7 : Les deux hypothèses de structuration de la polysémie lexicale (source:
Guillaume JACKET et al, 2005: 9)..................................................................... 86
Figure 8 : Équation d‟une relation de synonymie (HATON) ............................. 97

viii
ÉPIGRAPHE

« Le lexicographe n’est pas un sémanticien : il n’analyse pas des


significations ; s’il était capable de le faire, la sémantique serait
achevée dans son principe. Le linguiste […] est mal venu de
reprocher au lexicographe d’ignorer ou de pousser, pour les
nécessités pratiques, les problèmes théoriques de l’analyse du
contenu. »1

1
Paul FABRE & Christian BAYLON, (1989), La sémantique, Fernand Nathan, Paris, p.238

1
INTRODUCTION GÉNÉRALE

2
1. Présentation du sujet

Le dictionnaire est souvent une source d‟émerveillement en raison de sa taille et de


son contenu. Autant de mots réunis dans un seul ouvrage appellent à l‟admiration. D‟aucuns
estiment que s‟il existe un type d‟ouvrage digne de figurer dans une bibliothèque c‟est bien
les dictionnaires.
Le dictionnaire interlinguistique ne déroge pas à la règle et ne suscite pas moins de
réaction parce qu‟il offre notamment l‟expérience du contact des langues. Malgré les critiques
des spécialistes concernant son contenu, tous admettent qu‟il s‟agit là d‟un instrument bien
ancré dans la culture des deux langues mises en exergue. Dans le concert des utilisateurs, les
utilisateurs occupent une place à part, en raison du regard particulier qu‟ils portent sur les
dictionnaires en général et de l‟usage spécifique qu‟ils en font selon les textes et les contextes
(Lynne FRANJIÉ, 2009).
Les lexicographes se sont parfois intéressés aux traductions dans les dictionnaires
interlinguistiques, mais ils l‟ont fait de façon incidente et sans adopter un regard proprement
traductologique (transfert de sens). Chez les traducteurs, le dictionnaire interlinguistique
possède un statut ambigu utile ni aussi satisfaisant qu‟un dictionnaire intralinguistique aux
vertus sémantique et définitoire avérées. Il y a donc là un champ d‟étude à peine défriché et
rarement interrogé qu‟il faut explorer. Raison pour laquelle nous voulons investir dans
l‟ « analyse sémantique d’un ouvrage lexicographique interlinguistique : Cas du Dictionnaire
tupuri-français-anglais de Suzanne Ruelland ».
Jusqu‟à une date récente, l‟étude du sens était considérée comme étant en linguistique,
un élément insignifiant selon une certaine conception naïve. Or, le sens dissimulé sous son
enveloppe signifiante, ne se voit pas mais se trouve être d‟une importance capitale.
Le mot « sémantique » est dérivé du grec sémantico qui veut dire « signifié » ; lui-
même formé à partir de sêmainô ; c‟est-à-dire « signifier » et indiquer au sêma « signe de
marque ». Selon Michel BREAL2, auteur du premier traité de sémantique, la sémantique est la
« science des significations » c‟est-à-dire «l‟étude du langage du point de vue du sens ».Elle
étudie donc la structure interne des lexèmes.

2
MICHEL BREAL, Essai de sémantique (science des significations), Hachette, Paris, 1883

3
POTTIER, (1974 :64-65) présente les niveaux d‟étude sémantique fondamentaux de la
complexité des signes. À savoir : la sémantique schématique (énoncé) ; la sémantique globale
(le texte) ; la sémantique analytique (morphème). La sémantique analytique ou l‟analyse
sémique ou encore l‟analyse sémantique est une partie de la sémantique lexicale qui « se
préoccupe de l‟analyse en sèmes ou traits minimaux de significations » (Ibid.p.65.). Elle
consiste à faire ressortir les sèmes ; les sémèmes ; les sémantèmes ; les classèmes et les
virtuèmes des lexèmes, souvent dans le but d‟établir les relations sémantiques entre eux. C‟est
la méthode classique employée pour la définition en générale et celle lexicographique en
particulier.
À George MOUNIN d‟ajouter dans Dictionnaire de la linguistique, lorsqu‟il définit la
sémantique comme une « partie de la linguistique qui étudie le sens ou le Sé des unités
lexicales, tantôt en relation avec leur signifiant (lexicologie, lexicographie), tantôt en eux
même».Il s‟agit ici d‟étudier les relations de sens entre les lexèmes d‟une langue ou l‟étude
des propriétés sémantique intrinsèques d‟un lexème.
Appliquée à un dictionnaire, l’analyse sémantique consiste à étudier la zone
sémantique des adresses ou des mots-vedettes; les différents sens et acceptions (polysémie) ;
les rapprochements (synonyme) et l‟éloignement (antonymie) ou encore l‟inclusion des sens
d‟une adresse à l‟intérieur d‟une autre (hyperonyme et hyponyme). La microstructure d‟un
dictionnaire ou l‟étude portée sur une entrée nous présente plusieurs éléments de linguistique
permettant une appréhension globale et une analyse complète d‟une adresse. Ils sont entre
autres : La zone phonologique ; la zone sémantique ; la zone de combinatoire syntaxique ; la
zone de combinatoire lexicale ; la zone d‟exemples et la zone phraséologique (Igor
A. MEL‟ČUk /André CLAS/ Alain POLGUERE ; 1995 : 69-153). La sémantique et la
lexicologie s‟imbriquent dans le cadre de l‟analyse componentielle qui vise à réduire la
signification de l‟unité lexicale à des traits sémantiques non susceptibles de réalisation
indépendante (DUBOIS et al, 2007 :282). Fondamentalement, en sémantique lexicale, la
question reste la définition de l‟unité linguistique que l‟on prendra comme base de l‟analyse.
Bref, il s‟agit d‟analyser le sens et son transfert d‟une langue à une autre dans un ouvrage
lexicographique.
L‟«ouvrage lexicographique » est une expression composée de « ouvrage » qui est
un texte scientifique, technique (ROBERT Illustré, 2013) et de l‟adjectif « lexicographique »
dérivé de lexicographie. La lexicographie est un recensement ou assemblage et étude des

2
mots d‟une langue en vue de l‟élaboration de recueils (lexique, dictionnaires, vocabulaire). La
lexicographie selon MOUNIN G. (1974 :202) est une :

Discipline au sens large, dont l‟objet est l‟élaboration des dictionnaires de


langue. Le travail du lexicographe comporte un recensement des formes (qui sont
les entrées du dictionnaire, et comprennent les lexies et les morphèmes
grammaticaux à l‟exclusion généralement des désinences) et la présentation de
renseignements (catégories, possibilités combinatoires) sémantiques
(définitions), éventuellement historiques (étymologie) – accompagnés de
fragment (exemples) illustrant les renseignements par un contexte.

La lexicographie est donc l‟ensemble des lois qui gouvernent la confection d‟un
dictionnaire. Pour tout dire, l’ouvrage lexicographique sera donc perçu comme un
dictionnaire.
Issu du latin médiéval dictionnarius et lui-même dérivé du latin classique dictio »
action de dire, propos, mode d‟expression » avec l‟ajout d‟un suffixe en –arium. Le
dictionnaire3 est un : « Recueil contenant des mots, des expressions d‟une langue, présentés
dans un ordre convenu, et qui donne des définitions et des informations sur eux. »
On employait d‟ailleurs de manière synonymique les termes : vocabulaire et de
lexique pour désigner ce type d‟ouvrage. Les différences entre dictionnaire, vocabulaire et
lexique resteront ambiguës jusqu‟au XVIIe siècle. Voici par exemple la définition proposée
par le lexicographe Antoine FURETIÈRE dans son Dictionnaire Universel, publié en
1690 : « Recueil fait en matière de catalogue de tous les mots d‟une ou plusieurs sciences 4 »
Si la première partie de la définition s‟applique bien aux dictionnaires qui, par une
organisation méthodique de leur nomenclature, visent une relative exhaustivité du lexique (le
terme étant compris cette fois-ci comme un ensemble de mots), la deuxième partie concerne
plutôt les vocabulaires et les lexiques en tant que recueils de mots spécialisés. Par ailleurs,
cette définition ne nous renseigne guère sur l‟intérêt qu‟il y a à compiler les mots d‟une
langue. Il est évident que plus les dictionnaires se développent pour aboutir à des outils
performatifs destinés à résoudre diverses questions que l‟on se pose sur les mots, plus les
définitions les concernant seront adaptées à leur complexité et à leur variété.
En voici une autre plus complète donnée par un dictionnaire de linguistique5 :

3
Le Robert illustré, 2013.
4
A. Furetière, Dictionnaire Universel, contenant généralement tous les mots français tant vieux que moderne, et
les mots de toutes les sciences et des arts, La Haye Rotterdam, Amout et Reinier, 1690.
5
DUBOIS. J.et al, Dictionnaire de linguistique, Larousse-Bordas, 2007.

3
Le dictionnaire est un objet culturel qui présente le lexique d‟une (ou plusieurs)
langue sous forme alphabétique, fournissant sur chaque terme un certain nombre
d‟informations (prononciation, étymologie, catégorie grammaticale, définition,
construction, exemples d‟emploi, synonymes, idiotismes ; ces informations
visent à permettre au locuteur d‟une langue à traduire d‟une langue à une autre
ou de combler les lacunes qui ne lui permettaient pas de comprendre un texte
dans sa propre langue.

Cette définition a l‟avantage d‟englober à la fois les dictionnaires intralinguistiques


et interlinguistiques et de nous montrer clairement leur utilité. Selon la classification classique
proposée par QUÉMADA, on distingue des dictionnaires de choses et des dictionnaires de
mots ou des dictionnaires de langue entre des dictionnaires monolingues et bilingues. Nous
nous intéresserons ici au dictionnaire interliguistique faisant l‟objet de notre étude.
A. CLAS déclare que « les dictionnaires interlinguistiques sont ceux qui ont les
entrées dans une langue source et les équivalents dans une langue cible (dictionnaires
bilingues) ou dans plusieurs langues (dictionnaires plurilingues) ». Ils servent non seulement
pour la traduction mais aussi pour la communication écrite parce que l‟article en langue cible
est un équivalent de l‟entrée en langue source6.
Jean Claude Boulanger (2000 :90), qui a mené des études historiques sur les
dictionnaires bilingues propose la définition suivante :

Sera considéré comme dictionnaire bilingue, tout répertoire mettant en


correspondance des mots de deux langues différentes ou de deux dialectes ou de
deux variétés contemporaines de la même langue ou des mots de deux états
diachroniques de la même langue

Il ressort de cette définition que les dictionnaires bilingues sont tributaires de la


nature du couple de « langue » qu‟ils mettent en relation. L‟étude portée sur un dictionnaire
bilingue représente une forme de regard sur deux cultures, deux langues. Derrière un
dictionnaire se trouve, en effet, une langue, une communauté linguistique, une civilisation.
Les dictionnaires bilingues sont d‟autant plus riches d‟intérêt qu‟ils embrassent au minimum
deux cultures. Il ne s‟agit plus simplement de traduire pour comprendre, mais davantage et
surtout d‟apprendre. Cette action participe incontestablement à la diffusion des langues et
aussi à leur standardisation. Le dictionnaire bilingue n‟est pas seulement un instrument de
diffusion, c‟est aussi un instrument de conservation quand il s‟agit de sauver une langue rare

6
NATHALIA CAMPOS MARTIN. M., (2009), « Lexicographie et traduction (1) : les différents types de
dictionnaires : classement et typologie », Université de Málaga, G.I. HUM 767.

4
ou en voie d‟extinction. Dans le cas des langues minoritaires, le dictionnaire bilingue est un
objet culturel important parce qu‟il contribue à l‟affirmation identitaire d‟une communauté.
Cet outil, extraordinaire au service d‟une langue, d‟une culture et d‟un peuple s‟avère
donc un objet complexe à réaliser, qui appelle multiples réflexions et analyses linguistiques
poussées. Il faut une étude minutieuse et rigoureusement menée dans les deux cultures des
deux langues en contacts afin de rendre efficacement compte des équivalences du sens de
chaque entrée choisie dudit dictionnaire. Raison donc pour laquelle nous avons jugé
intéressant de mener des recherches sur l‟analyse sémantique d‟un dictionnaire.

2. Présentation du corpus
Le corpus que nous avons choisi est le Dictionnaire tupuri-français-anglais de
Suzanne RUELLAND, publié aux Editions Peeters/Selaf. Il fut accueilli avec beaucoup
d‟intérêt. Ce travail répondait à une forte attente et fut apprécié pour la richesse de ses
renseignements. C‟est un dictionnaire de 342 pages et 3000 entrées environs. C‟est le résultat
de l‟effort de plusieurs personnes ayant étudié la culture et la langue tupuri.
C‟est un dictionnaire trilingue, c‟est-à-dire, fait appel à trois langues qui sont ici le
tupuri, le français et l‟anglais. Le tupuri est la langue d‟entrée, langue source ; le français et
l‟anglais, les langues cibles. Il s‟agit d‟un dictionnaire monodirectionnel (Henry BÉJOINT et
Philippe THOIRON, 1996 :46).
Le dictionnaire se présente comme suit : À l‟entrée en matière, une carte de
localisation de la zone Cameroun-Tchad fortement peuplée par les Tupuri suivie des
abréviations et symboles permettant de faciliter l‟utilisation dudit ouvrage aux usagers.
Ensuite, un avant-propos (avec la liste des personnes ayant contribué pour la réalisation de ce
dictionnaire) suivie d‟une partie introductive de l‟auteure où elle donne un aperçu général sur
le peuple et la langue tupuri. Et enfin la structure de l‟adresse ou entrée de dictionnaire et les
pages annexes.
Il se structure en deux parties. La première s‟intéresse à la microstructure, c'est-à-dire
à l'organisation d'un seul article de dictionnaire, organisation qui se répète de façon
systématique pour tous les articles. La deuxième concerne la macrostructure, c'est-à-dire
l'organisation de l'ensemble du dictionnaire à partir des articles qu'il comprend.
La microstructure de ce dictionnaire trilingue comprend en général : Tout d‟abord, la
tête de l'article. On aura l'adresse suivie de sa catégorie grammaticale et d'autres informations
grammaticales (comme la flexion); l'adresse est souvent accompagnée de ses variantes

5
graphiques, mais nous observons ici l‟absence du bloc phonétique. Ensuite, les traductions ou
équivalents de l'adresse ; si l'adresse correspond à un élément polysémique, les équivalents
sont numérotés ou divisés par un moyen typographique et l'entrée contiendra des indicateurs,
des abréviations qui indiquent le champ sémantique, etc., pour aider l'utilisateur à choisir la
bonne traduction. En fin, les exemples, les collocations, les combinaisons phraséologiques,
c'est-à-dire la partie où l'on montre le mot-vedette dans des contextes d'usage.
Nous ne nous limiterons dans ce dictionnaire qu‟à l‟analyse de la partie tupuri-français
pour maintenir la perspective bilingue.

3. Motivations
La motivation consiste à justifier, apporter les éclaircissements sur les mobiles au
choix de notre sujet. Il est question d‟indiquer les raisons qui m‟ont poussées à choisir ce
sujet. L‟histoire de mes préoccupations commence au sein du comité de développement de la
langue tupuri, il y a exactement aujourd‟hui cinq ans. J‟ai pris part à une réunion dudit comité
où il y avait un débat houleux sur le problème que pose le Dictionnaire tupuri-français-
anglais de Suzanne RUELLAND qui servait de base pour la traduction tupuri-français et
français-tupuri. En effet, pour les natifs, tous les sens des unités lexicales n‟étaient pas
spécifiés dans ce dictionnaire. La description des entrées est partielle. Le comité a nourri
l‟idée de confectionner un nouveau dictionnaire. Mais la tâche n‟était pas facile. C‟est pour
cette raison que j‟ai pensé dès mon inscription en MASTER II, investir sur l‟analyse
linguistique du dictionnaire existant et plus précisément sous sa facette sémantique afin de
déceler les problèmes décriés et proposer par la suite des palliatifs.

La motivation d‟ordre scientifique nait d‟un manquement ou d‟un vide scientifique. La


raison du choix scientifique montre qu‟il y a des lacunes scientifiques à combler pour apporter
une contribution à l‟avancement des sciences. Etant donné que mon sujet est un travail de
recherche orientée vers l’analyse sémantique d‟un discours lexicographique tupuri-français, il
peut se justifier par le besoin de contribuer à la réalisation d‟un dictionnaire qui mettra en
évidence des données réelles, qualitatives et vérifiables pouvant servir à d'autres recherches
ultérieures ; l‟évolution de la linguistique à travers la description de ce parler majoritaire à
l‟Extrême-Nord du Cameroun, un peu dans les autres régions du pays et au Tchad; le désir
d‟adhérer et de participer à la réalisation des objectifs que se fixe le comité de développement
de la langue tupuri.

6
4. Problèmatique
La question du sens des lexèmes fait l‟objet d‟un débat traductologique de longue
date, mais une problématisation s‟avère nécessaire afin de rendre compte de la complexité que
ce concept en rapport avec le transfert de sens recouvre et de ses conséquences sur le plan de
la pratique traduisante. La clarté du sens des unités lexicales dans une langue comme dans une
autre est capitale pour l‟apprentissage et l‟intercompréhension entre les locuteurs natifs ou
non des deux langues mises en exergue. S‟il est vrai qu‟il existe un ouvrage lexicographique
dans la langue tupuri, il faut tout de même reconnaitre que les définitions et la rubrique
sémantique que propose celui-ci ne satisfont pas non seulement les apprenants de la langue,
mais aussi et surtout les traducteurs professionnels exerçant dans le tupuri et le français.
Le présent travail nous offre l‟opportunité de réfléchir sur la question générale
suivante : Quels sont les unités sémantiques que l‟on retrouve dans la zone sémantique des
entrées que propose le Dictionnaire tupuri-français-anglais (DITFA) de Suzanne
RUELLAND ou comment y est structuré le sens ?
Cette préoccupation globale se décline en deux questions secondaires : Rendent-elles
suffisamment compte du sens des lexèmes choisis ou y trouve-t-on des lacunes ? Quelles
suggestions proposer pour les améliorer ?
Ainsi délimitée, ces questions de recherches nous amènent à émettre des hypothèses
qui constituent la matière de notre travail.

5. Hypothèses
Hypothèse principale
Dans le DITFA, les unités d‟analyse de la zone sémantique des entrées sont : les
définitions, les polysémes et les synonymes.

Hypothèses secondaires
Le traitement des définitions, des entrées polysémiques/homonymes et le traitement de
la synonymie que propose le DITFA ne permettent pas de rendre compte du sémantisme de
chaque lexème.
Les unités d‟analyse sémantique sont perfectibles.

7
6. Objectifs
Objectif principal :
Le tupuri étant la langue objet et le français la langue sujet, nous nous trouvons face à
la nécessité d‟analyser à l‟aide des concepts du français ; et cela pose un défi majeur qui est
l‟objectif principal de notre travail. Il s‟agit d‟avoir un lexique ou une terminologie capable de
rendre parfaitement compte de la sémantique du lexique tupuri, pour proposer en langue
étrangère des équivalents ou gloses culturelles ainsi que des définitions pour la description de
l‟expérience culturelle et la structuration du réel du peuple tupuri qui sont forcement
différents.

Objectifs spécifiques :
Le présent travail se donne pour tâche d‟analyser et de décrire le sens des lexèmes que
propose l‟auteure du DIFTA à travers la définition lexicographique, le traitement de la
pluralité de sens, de l‟homonymie et de la synonymie dans une perspective bilingue dans
l‟optique d‟inventorier les problèmes liés à la description du sens des unités lexicales pour
enfin les résoudre.

7. État de la question
Nous ne saurions être le premier à mener nos investigations sur ce sujet. La
thématique du traitement de la sémantique dans les dictionnaires bilingues a nourri la
réflexion des chercheurs à produire des travaux. Plus encore, la langue tupuri a fait l‟objet
d‟étude de plusieurs travaux scientifiques. C‟est ce qui nous amène à donner raison à J.C.
Kaufman (2007 : 38) lorsqu‟il affirme : « […] aucun sujet n‟est radicalement neuf, et aucun
chercheur ne peut prétendre pouvoir se passer du capital des connaissances acquises dans
un domaine ». Pour tout dire, tout sujet entretient des liens plus ou moins transversaux avec
d‟autres travaux antérieurs.
À cet effet, maints travaux ont été effectués sur l‟étude des dictionnaires monolingues
en général et les dictionnaires bilingues en particulier. Les premières études sur les ouvrages
lexicographiques datent de 1960 avec Bernard QUEMADA (1967) lorsqu‟il publie Les
dictionnaires du français moderne. Études sur leur histoire, leurs types et leurs méthodes,
Didier, Paris. Dans cet ouvrage, il fait une étude diachronique des dictionnaires de langue
française, donne une typologie de dictionnaires (dictionnaire de langue, encyclopédique,

8
spécialisé…) pour enfin indiquer une méthode scientifique d‟élaboration des dictionnaires.
Suivra Josette REY-DEBOVE en 1971 avec l‟Étude linguistique et sémiotique des
dictionnaires français contemporains, publié dans Mouton, La Haye-Paris. Ces études sont
menées sur les dictionnaires monolingues.
Quelques années plus tard certains chercheurs vont investir pour analyser et donner
des procédées pour le traitement des entrées de dictionnaires. L‟article de MEL‟CUK IGOR
Alain (1982) propose trois principes de description sémantique des unités lexicales dans un
dictionnaire explicatif et combinatoire. Alain REY (1990), lui, va consacrer un article pour le
traitement de la définition dans les dictionnaires, publié dans les Actes du Colloque sur la
définition organisée par le Centre d’études du lexique, Larousse, Paris.
En dehors des articles et des travaux sur les dictionnaires monolingues, Henry
BEJOINT et Philippe THOIRON, (1996), consacrent un ouvrage qui traite de la question de
l‟équivalence, de la variété des dictionnaires bilingues et de l'utilisation d'un corpus dans la
rédaction du dictionnaire bilingue.
Les travaux de Lynne FRANJIÉ et surtout sa thèse soutenue en 2003 : Étude
sémantique et traductologique de verbes arabes dans les dictionnaires bilingues, le Larousse
arabe-français et le H. Wehr arabe-anglais, Thèse de Doctorat, Université Lumière-Lyon 2,
s‟avère être le premier travail scientifique sur les questions de traduction du sens dans les
dictionnaires bilingues. On peut comprendre le fond de son travail à travers ce résumé qu‟elle
nous propose :
Ce travail consiste en une étude descriptive du traitement des verbes arabes dans les
dictionnaires bilingues dans une optique sémantique et traductologique. À partir
d'une analyse contrastive détaillée de deux dictionnaires. *…+La première partie de ce
travail porte sur une étude de la microstructure et de la macrostructure des deux
dictionnaires bilingues supports du travail. L'observation des entrées verbales a
permis notamment de déterminer la méthode - distributionnelle ou
transformationnelle - adoptée par chacun des dictionnaires. Dans la deuxième partie,
une étude sémantique du sens verbal est menée à travers différentes méthodes
d'analyse purement sémantiques, formelles ou alliant les deux ainsi qu'à travers les
relations structurales entre les verbes. La troisième partie est consacrée à une
réflexion sur l'approche traductologique en œuvre dans les deux dictionnaires
bilingues visant essentiellement à déterminer les types d'équivalences proposées
pour les verbes.

En 2009, elle publie un ouvrage intitulé : La traduction dans les dictionnaires


bilingues, paru aux éditions Le manuscrit, Paris. Un ouvrage qui s‟inspire des éléments traités
dans sa thèse et de quelques-uns de ses articles et surtout celui qui apparut en 2008 à
l‟Université Stendhal-Grenoble 3 sur « Le casse-tête des dictionnaires bilingues pour
traducteurs : le cas des dictionnaires arabes bilingues ».

9
BOUCHADHAKH insistera en 2008 sur la question de pluralité de sens et les
équivalences dans les ouvrages lexicographiques bilingues dans son article intitulé : « La
définition dans les dictionnaires bilingues : Problèmes de polysémie et d‟équivalence inter
langues », Université de Sherbrooke.
Les travaux précédents pour la plupart ont été effectués sur les langues indo-
européennes. Quel est l‟état actuel des travaux scientifiques effectués sur les langues
africaines et notament la langue tupuri ?
Nous faisons ici allusion aux travaux de RUELLAND Suzanne avec ses multiples
articles sur la langue tupuri et surtout sa thèse de Doctorat soutenue en 1992 à Paris. Elle fait
une Description du parler tupuri de Mindaoré, Mayo Kebbi (Tchad): Phonologie,
Morphologie et Syntaxe. Elle y aborde, de façon globale, l‟aspect des phonèmes tupuri, les
parties du discours et leurs combinaisons dans la phrase. Elle se servira donc d‟une approche
fonctionnelle pour réaliser cette description.
Bien avant cette thèse, Suzanne RUELLAND a contribué énormément à la confection
d‟unouvrage lexicographique : le Dictionnaire tupuri-français-anglais, Édition
PEETERS/SELAF, 1988 dont nous avons fait la présentation en amont (cf. 2) Présentation du
corpus). De même que Piergiorgio CAPPELLETTI, en 1996 se servira des travaux de
Ruelland pour confectionner le Dictionnaire toupouri-français (inédit) de 5000 entrées
environs et 220 pages. La richesse de celui-ci se situe au niveau de la description détaillée
des entrées en rapport avec la culture tupuri en plus des équivalences qu‟il propose.
Emmanuel GORBA, dans son Mémoire de Maîtrise, et dont le sujet de recherche est :
Problématique de l’implantation de la langue tupuri en milieu urbain: le cas de Garoua,
soutenu à Ngaoundéré en 2000, aborde dans une partie de son travail (à la suite de
RUELLAND), la complexité de la langue tupuri comme cause qui ralentie l‟implantation de
la langue tupuri dans la ville de Garoua. Il arrive à la conclusion selon laquelle, l‟inexistence
des articles et des flexions (verbales) en tupuri et le problème des lexèmes polysémiques et
homonymiques rendent complexe l‟apprentissage de cette langue.
André DJAKBE, a travaillé sur la Problématique de la communication en français
dans le domaine de la santé au Cameroun: le cas des zones rurales en milieu tupuri. Mémoire
en vue de l‟obtention du Diplôme d‟Études Approfondies, Ngaoundéré, 2007. Pour lui, la
syntaxe tupuri est différente de celle française lorsqu‟elle est traduite littéralement. Il faut
ainsi une modification morphosyntaxique en français, pour que l‟énoncé ait son sens. Il
consacre un chapitre pour inventorier le lexique des termes du domaine biomédical en usant
des éléments de la culture pour désigner les realia culturels.

10
En 2010, KOLYANG Dina Taiwe, dans son ouvrage Parlons Tpuri: Cameroun et
Tchad, fait une description de la langue à base des données fournies par RUELLAND. Dans
son ouvrage, il évoque l‟existence de deux dialectes majeurs de la langue tupuri en insistant
sur leurs écarts sémantiques.
Jean Paul BALGA, dans sa thèse de Doctorat soutenue en 2012, dont le titre est : Le
français en contact avec le tupuri à Maroua (Cameroun): phonologie, morphosyntaxe et
imaginaires linguistiques, aborde, comme ses prédécesseurs, la morphosyntaxe du tupuri.
Cependant, cette dite langue n‟est pas étudiée seule, mais en contact avec le français. Ainsi, il
mène sa réflexion sur la structure formelle du lexique, sur le fonctionnement de la
composition et de l‟abrègement (dans le processus de cohabitation des langues tupuri et
française), et sur la diglossie fonctionnelle résultant des attitudes linguistiques, l‟alternance
codique (intraphrastique, interphrastique et extraphrastique).
Hermine RHOUSGOU MENWA, dans son mémoire de Master en langue et
linguistique, intitulé Essai d’analyse morphosyntaxique du tupuri : Genre, nombre, et
fonctions soutenu en 2013 à l‟université de Ngaoundéré, fait une analyse approfondie de la
classe nominale en tupuri en insistant sur le genre, le nombre, et les fonctions que les noms
peuvent prendre dans la syntaxe tupuri. Elle apporte de même sa modeste contribution dans
la distinction des marques du pluriel des substantifs dans la langue tupuri.
En fin, il faut de même mentionner qu‟à une date très récente, Gisèle KOBADA a fait
une étude approfondie sur les éléments suprasegmentaux dans son mémoire de Master
soutenu en 2016 où elle fait une distinction entre les quatre tons qui existent en tupuri. Elle
mentionne que dans la langue tupuri, il existe des lexèmes qui modifient, changent de contenu
sémantique en fonction de la hauteur du ton. Il s‟agit des homotones.
Tous ces travaux, pour la plupart, insistent plus sur la structure de surface de la langue.
C‟est-à-dire l‟aspect phonologique, morphologique et syntaxique. Le terrain des travaux en
sémantique structurale appliquée aux langues naturelles (africaines) et les travaux relatifs à la
description des dictionnaires reste donc non défriché.

8. Cadre théorique
Le cadre théorique oriente et délimite le domaine intellectuel ou disciplinaire dans
lequel s‟inscrit la recherche. Une fois spécifié, des démarches propres doivent être adoptées
pour l‟atteinte des objectifs.

11
Notre recherche s‟inscrit dans le cadre théorique de la sémantique qui est une
discipline linguistique ayant pour objet l‟étude du sens des mots en contexte et hors contexte.
C‟est une composante de la linguistique descriptive qui s‟occupe du signifié. Le mot
sémantique comme souligné ci-haut, a été inventé à la fin du XIXe siècle par le linguiste
français BREAL Michel. Les phénomènes sémantiques sont divisés en deux grandes
catégories, à savoir les sémantiques lexicale et grammaticale. Les théories pour lesquelles le
sens de la phrase résulte du sens de ses mots, et où l‟on tente d‟associer aux mots lexicaux une
représentation conceptuelle qui en décrit le sens sont regroupées dans la première catégorie.
Dans la sémantique grammaticale, sont regroupées les théories (sémantique générative de
GALMICHE M., 1975) pour lesquelles le sens d‟une phrase résulte des relations entre les
mots qui la composent. On y interprète les relations sémantiques. C‟est dans le cadre de
l‟idée de la décomposition sémantique que s‟inscrit la sémantique componentielle. Dès les
années soixante, KATZ et FODOR (1963) développent en suivant la grammaire
chomskyenne, le premier modèle de l‟analyse componentielle aux USA. « L‟analyse
componentielle : analyse en composants (anglais components) ou marqueurs sémantiques
(hiérarchiques) ». Une autre version de l‟analyse componentielle se développe en Europe avec
GREIMAS (1966), Hjelmslev (1971), POTTIER (1987), RASTIER (1987et 1994). On y parle
de figures du contenu, de traits sémantiques (semantics features) ou sèmes. Parlant justement
de l‟analyse sémique TOURATIER (2004 :42) souligne :
Il n‟en reste pas moins que le principe de définition qui consiste à comparer les
objets étudiés en dégageant ce qu‟il peut y avoir de commun et de différent
entre eux est un principe logique et méthodologique qui n‟est nullement propre à
la phonologie, mais qui sous-tend toute entreprise définitoire ou classificatrice .

Ainsi la sémantique a connu plusieurs approches théoriques (Théophile CALAÏNA :


7
2017) : La théorie de la sémantique interprétative est une sémantique cognitive qui se
propose une démarche plus rigoureuse d‟analyse. Pour la sémantique interprétative de
RASTIER (1987), le sens ne peut s‟appréhender que dans l‟interprétation du sujet qui ne peut
être pris isolement. Avec François RASTIER , la démarche interprétative se fera par
paliers qui sont; le niveau microsémantique (sémèmes, sèmes), le niveau mésosémantique
(taxèmes, classèmes, sémantèmes) et le niveau macrosémantique. Le niveau
macrosémantique est le niveau discursif, phrastique ou énonciatif.

7
CALAÏNA T., (2017), Sémantique, notes de cours (ML 332), Master II, Sciences du
langage, inédit, Université de N‟Gaoundéré.

12
Cette grille d‟analyse peut être appliquée à l‟étude de la synonymie et à la
polysémie. Les concepts de sème, sémème, sémantème…, sont redevables à GREIMAS
(1966). En 1994, François RASTIER inclut la polysémie dans l‟analyse sémique où il
oppose sèmes génériques (qui caractérisent la classe sémantique) et sèmes spécifiques (qui
distinguent dans la classe les différentes unités lexicales). Mais comme le souligne
RASTIER (1987:214), « pour la sémantique dite «interprétative», la structure syntaxique
est le point de départ de l'interprétation sémantique». Ce qui constitue pour nous une
limite dans la mesure où nous ne nous intéressons qu'aux unités lexicales. Christophe
SCHWARZE (2001), dans Introduction à la sémantique lexicale, propose sur la base des
travaux de ses prédécesseurs, une analyse sémantique du lexique et dont nous en faisons
usage pour la description de notre corpus. Dans le cadre de la définition lexicographique,
Paolo FRASSI (2011) ; VÉZINA R. et al (2009) ; Uriel WEINREICH et Josette REY-
DEBOVE (1970) nous seront d‟un apport indéniable.
Selon DELPLANQUE (1986: 695), la théorie de la sémantique interprétative se
propose de « rendre compte de la synonymie, de la paraphrase, de l‟ambiguïté, de
l‟antonymie et de l‟hyponymie en même temps [...] ». La théorie sémantique du prototype
traite aussi des dénominations et favorise, selon BAYLON (1994), le dégroupement des
polysèmes, des lexèmes homonymiques et synonymiques au niveau lexicographique. Les
problèmes d‟équivalence de sens sont traités par Henry BEJOINT et Philippe THOIRON
(1996) et Lynne FRANJIÉ (2003, 2008, 2009) qui ont mené des études sur le transfert de sens
d‟une langue à une autre.
Puisque nous sommes dans un contexte bilingue tupuri-français, cela nous amène
à convoquer la traductologie comme cadre théorique. En effet, la discipline qui a la traduction
pour objet d‟étude est apparue dans la seconde moitié du XXe siècle, mais elle a reçu
plusieurs appellations éphémères (science de la traduction, translatologie, etc.) pour devenir la
« Traductologie » en français et « Translation Studies» en anglais. Son champ d‟étude a été
rigoureusement défini, pour la première fois, par James Holmes (1972) dans un article intitulé
« The Name and Nature of Translation Studies ». Dans cet article, Holmes distingue deux
grandes branches : la « traductologie théorique » et la « traductologie appliquée ». La
première (théorique) a pour objet la description des phénomènes de traduction, la définition
des principes explicatifs et la théorisation des pratiques traductionnelles ; la deuxième
(appliquée) vise la mise en œuvre des principes et des théories pour la formation des

13
traducteurs, le développement d‟outils d‟aide à la traduction ou encore la critique des
traductions.
Pour résoudre le problème d‟équivalence de sens dans le dictionnaire bilingue
tupuri-français, quelques solutions sont proposées à la lumière des théories modernes et
contemporaines. Pour ce faire, Lynne FRANJIÉ (2009) est indiquée pour répondre et donner
quelques pistes de solutions à ces problèmes de traduction sémantiques de la langue tupuri
vers le français. Nous suggérons ensuite le modèle de la zone sémantique du DEC de Igor
Alain MEL‟CUK; André CLAS ; Alain POLGUERE, (1995).

9. Démarche méthodologique
Le balisage du cadre méthodologique constitue un volet essentiel dans la
compréhension des résultats d‟un travail de recherche. Il sera ici question de la méthode de
collecte et de l‟analyse des données sémantiques sur lesquelles nous envisageons investir.
Lorsqu‟on décide de travailler sur la sémantique lexicale d‟une langue naturelle, l‟on
doit nécessairement disposer d‟une base de données textuelle. Pour le français par exemple, il
existe des dictionnaires de langue française qui donnent pour chaque lexie suffisamment
d‟informations et les différentes acceptions. Dans une perspective traductologique, un
dictionnaire interliguistique est incontournable. Comme indiqué ci-haut, notre corpus est le
Dictionnaire tupuri-français-anglais de Suzanne RUELLAND. Nous nous inscrivons dans
une perspective bilingue, par conséquent notre corpus est circonscrit dans la macrostructure
des adresses tupuri-français. Plus encore dans la microstructure nous nous limiterons à la zone
sémantique proprement dite.
Le corpus ainsi délimité nous procédons ensuite aux activités de lecture. Une première
lecture guidée du dictionnaire nous a permis de comprendre l‟organisation structurelle de la
zone sémantique et des équivalences de sens tupuri-français. La deuxième lecture nous a
ensuite permis d‟identifier et d‟inventorier les insuffisances dans la description du sens des
lexèmes en vue de leur classement selon les unités d‟analyse suivantes : définition des
entrées; structuration de la pluralité des sens suggérés par des lexèmes polysémiques et le
traitement des homonymes ; le traitement des rapprochements sémantiques (synonymie) ;
l‟établissement des équivalences de sens et leurs transfert vers le français.
La deuxième phase est celle du dépouillement en profondeur du corpus recueilli. En
plus de cela ; nous ferons appel aux deux méthodes employées en sémantique lexicale : Les
méthodes de découverte. Les méthodes de découverte consistent en l‟observation du

14
comportement des lexèmes dans les textes y compris dans les situations artificiellement
créées ; et l‟observation de leur aptitude à désigner des objets ou des situations, réelles ou
imaginaires ; des tests et des techniques de reformulation, ou celui de la paraphrase (cas des
synonymes). C‟est le lieu de déconstruire le lexème ou le terme-objet de ses contenus
sémantiques. Il s‟agit ici d‟utiliser comme grilles d‟analyse, l‟analyse sémique (GREIMAS,
POTTIER) ou componentielle (RASTIER) du lexème (l‟analyse quitte du sème vers le
sémantème en passant par l‟extraction du sémème et du classème) et la méthode
sémasiologique 8 . Ceci dans le but de doter ces lexèmes des sens manquants pour un
processus de désambiguïsation du lexique tupuri et son transfert en français.
Il n‟est pas fortuit de parler de l‟étiquetage de nos différentes illustrations. Nos
différents exemples seront codés de la manière suivante : les exemples sont numérotés en
chiffre arabe du premier au dernier. Les lettres majuscules A à Z indiquent l‟ordre
alphabétique où se situe l‟adresse. Cette lettre est précédée du numéro de page du dictionnaire
(1 à 342) qui constitue l‟ensemble de notre corpus.

10. Intérêts
Ce travail contribuera d‟abord dans la perspective du développement des langues
africaines ainsi que la diffusion de la culture africaine , ensuite, arrimer le peuple tupuri au
contexte de mondialisation qui voudrait faire du monde un village planétaire, intégrant en son
sein les éléments culturels positifs de chaque peuple. Or il apparaît incontestable que
l‟instrument par excellence de véhicule d‟une culture est la langue. Nous entendons ainsi
mettre à la disposition des locuteurs et apprenants du tupuri un outil qui permettra la
production des ouvrages lexicographiques bilingues, la traduction des textes, des contes, des
récits, et des proverbes qui projetteront la vision du monde de ce peuple à l‟extérieur, en fin,
lutter pour la sauvegarde du patrimoine culturel du peuple. Ce travail permettra à base des
analyses que nous aurons faite, à traduire fidèlement les sens suggérés par les lexies de la
langue tupuri vers le français. Nous souhaitons confectionner une version améliorée du
dictionnaire bilingue bidirectionnel tupuri-français et ressortir une grammaire de la langue
sur la base de ce travail et des travaux antérieurs. Une recherche orientée vers le domaine de
la sémantique et de la traduction dans un dictionnaire pourrait non seulement contribuer à la
description de la langue, mais aussi et surtout à amoindrir les incompréhensions causées par le
sens des lexies. Notre travail de recherche peut révolutionner l‟expérience professionnelle des

8
Si le sémanticien prend pour point de départ l‟expression (signifiant) pour essayer de définir toutes les
corrélations qui se relient au plan du contenu, il applique la méthode sémasiologique.

15
travailleurs de la langue (traducteurs, enseignants, chercheurs) et leur permettre de connaître
des résultats meilleurs.

11. Plan du travail


Ce mémoire est structuré en cinq chapitres. Le premier chapitre donne une vue
d‟ensemble sur l‟ethnographie et les aspects linguistiques tupuri. Cette présentation permet au
lecteur d‟entrée de jeux de reconnaitre, les origines ; la situation géographique et
l‟organisation sociopolitique du peuple tupuri. De même, nous présentons brièvement la
langue avec ses spécificités phonologique, lexicale et sémantique découlant de ses variétés
dialectales. Le deuxième chapitre analyse la définition lexicographique dans une perspective
bilingue dans le DITFA. Le troisième chapitre traite du phénomène de polysémie et
d‟homonymie tupuri-français dans le DITFA. Ce qui nous permet de différencier la
polysémie de l‟homonymie afin de voir leurs traductions dans la langue cible qui est ici le
français. La relation de synonymie en contexte bilingue sera traitée au quatrième chapitre où
nous explorerons la typologie des synonymes, la différenciation, la structure synonymique et
le système de renvois lexicaux. Le cinquième chapitre est consacré dans un premier temps à
un inventaire des problèmes posés dans le traitement du sens des entrées et leurs équivalents,
dans un second temps, nous envisageons quelques pistes de solution en vue d‟améliorer ce
trésor de la langue.

16
CHAPITRE I : ETHNOGRAPHIE ET
ASPECTS LINGUISTIQUES TUPURI

17
Dans ce chapitre d‟ouverture, il est important de faire une présentation générale de
l‟ethnie et de la langue tupuri. Ces deux notions sont assez souvent coextensives, mais c‟est
loin d‟être une règle générale. D‟autant que la notion d‟ethnie est bien plus difficile à saisir et
à définir de façon opératoire que celle de langue. Elle est à notre avis incontournable pour
deux raisons majeures : Elle permet à nos lecteurs d‟avoir une lecture globale sur la culture
tupuri en leur fournissant des réponses aux différentes interrogations suivantes : Qui sont les
Tupuri? D‟où viennent-ils ? Où habitent-ils ? Comment vivent-ils ? (CAPPELLETTI, 19969 ).
Pour mieux traduire une langue et la faire connaitre sans la trahir, il faut nécessairement
connaitre et maitriser la culture de la langue source (qui est le tupuri), de la langue cible (qui
est le français) et connaitre profondément les subtilités des deux langues mise en exergue. Il
faut préciser que pour bâtir ce chapitre nous nous sommes inspirés des travaux de BALGA10
et KOYANG11. Toutefois, certaines origines oubliées et des données mises à jour relèvent
essentiellement de nos propres investigations.

I-Ethnographie du tupuri

L‟ethnographie est perçue comme une étude descriptive des sciences, des mœurs, des
coutumes des peuples, de leur organisation économique et sociale. C‟est aussi et surtout dans
ce contexte la science de l‟ethnie. Le terme ethnie12a : « En sociolinguistique une extension
beaucoup plus large, pour désigner toute communauté dont les membres partagent une même
origine géographique et culturelle ».

Utilisé tout premièrement en rapport avec différenciation de communautés


socioculturelles surtout africaines (parfois avec une charge péjorative), ces ethnies considèrent
pour la plupart que leurs langues au même titre que leurs pratiques culturelles et
traditionnelles propres constituent le ciment sur lequel se fonde l‟individualisation même de
cette société. Pour Georges MOUNIN (1963 :236), lorsqu‟on entreprend l‟analyse des deux
langues différentes dans un but de traduction, il faut « Remplir deux conditions dont chacune

9
CAPPELLETTI P.G (1996)., Dictionnaire Tupuri-français, Mission Catholique de Guidiguis.

Il présente à l‟introduction de son ouvrage, l‟histoire du peuple Tupuri


10
BALGA J.P., (2012),« Le français en contact avec le tupuri à Maroua (Cameroun) : phonologie,
morphosyntaxe et imaginaire linguistique », thèse de Doctorat Ph. D., Université de N‟Gaoundéré
11
KOLYANG D.T. (2010), Parlons tpuri, Paris, l‟Harmattan.
12
MOREAU M.L, (1997), Sociolinguistique: Concepts de base, Mardaga p .142

18
est nécessaire et dont aucune en soi n‟est suffisante : étudier la langue étrangère, étudier
l‟ETHNOGRAPHIE13 de la communauté dont la langue étrangère est l‟expression ».
Il convient de présenter dans cette partie trois points essentiels qui permettront de
faire comprendre aux lecteurs le peuple tupuri : Il s‟agit tout d‟abord des origines et
évolutions du Tupuri, ensuite, de la situation géographique et de la composition de la
population, et en fin, de l‟organisation socioculturelle du peuple tupuri.

I-1-Le Tupuri : aux origines complexes et diversifiées


L‟origine du peuple tupuri est d‟autant plus complexe qu‟on se demanderait d‟où est-
ce qu‟ils viennent exactement ? À cette question les avis divergent. Cela nous permet de
confirmer ce qu‟a affirmé DABA (2001) lorsqu‟il pense que « voici un peuple dont l‟origine
semble controversée, parce que sujette à plusieurs versions ». Nous avons recueilli une
diversité de données qui justifieent leur origine. Selon BALGA (2012 : 22) ; le milieu tupuri
est composite et forme un groupe ethnique opaque qu‟il est difficile de dissocier. Il s‟agit des
Tupuri parlant la langue et des Kéra aynt la même culture que ce dernier (FECKOUA,
1977 :30). Ces deux peuples ont un lien ancestral et une histoire commune. La seule
différence ne se situe qu‟au niveau linguistique. Ils ont la même culture et les mêmes
traditions. Il est de plus en plus étonnant lorsqu‟on observe les Kéra (pour la plupart)
dialoguer en tupuri, et paradoxale lorsque le Tupuri ne comprend pas à son tour le kéra.
Les populations tupuri présentent une mosaïque d‟origines différentes bien que
toutes parlent la même langue. Selon les traditions orales relevées par Marcel Affeté
SEBARA en 1959, les Tupuri occupaient les terres autour de la colline Illi au Tchad. Ils
auraient eu des liens anciens avec les Mundang, dont la langue est apparentée. C‟est au pied
de la colline Illi qu‟est installé le chef de terre du clan Doré. De cette zone de départ,
nombreux ont migré vers le nord du Cameroun jusque dans la région de Garoua.
Les lignages d‟obédience Doré, sacrifient de jeunes coqs pour la fête des prémices du
sorgho rouge hâtif, selon les années, entre septembre et début novembre. La cérémonie des
coqs est considérée comme le nouvel an chez tous les Tupuri.
Selon les sources de l‟histoire des origines des peuples africains en général et des
camerounais en particulier, les Tupuri seraient originaires du soudan 14. Parmi les tribus des
Noirs soudanais situés à cheval entre la haute Sanaga et le Chari, il faut dénombrer deux

13
Cette marque est nôtre et indique la visibilité du terme mise en exergue.
14
Diffèrent du Soudan administratif, ce nom était donné autrefois à la région naturelle située au Sud de l‟Egypte
et du Sahara. Cette région semi-désertique s‟étend de la mer Rouge (désert du Nubie), à l‟Est, jusqu‟à la Guinée.

19
groupes proches du Tupuri. Ce sont les Massa et les Sara. Le groupe Sara au Cameroun
s‟étend du Lac de Fianga aux montagnes de Dschang. Dans cette répartition géographique se
trouve aussi les Tupuri. Certains étaient tentés d‟assimiler les Musgum de la rive inférieure du
Logone et les Mussey aux Tupuri. Mais les recherches ont clairement démontré grâce aux
études menées qu‟il s‟agit de deux peules distinctement différents.
Une autre hypothèse est celle des patriarches de Guidiguis. En effet, il y avait un
homme du nom de Baidaga, ancêtre des Tupuri et fondateur de l‟actuel Guidiguis. Originaire
du mont Doré au Tchad, il fut chassé par les foulbés à cause du vol de bétail de ceux-ci. Il
quitta donc le Tchad avec une tête de bétail volée chez ses voisins nomades. Poursuivi, il
traversa la zone de Doukoula en direction du mont Lara. Il sera encore repoussé par les
chasseurs Mundang et décide cette fois-là, de reculer pour s‟installer dans la zone située entre
Touloum et Lara (la zone de Guidiguis). C‟est de là qu‟est né le nom de Guisguis selon
l‟appellation des Tupuri, et reconnu dans les archives administratives sous le nom de
Guidiguis. En tupuri guissi signifie « adosse » et le doublon guis veut dire « en attendant ».
On aura donc nąą guis la guissi =« Adossons-nous là en attendant ». Baidaga a trouvé dans la
grande forêt un tronc d‟arbre où il s‟est adossé pour se reposer. Il s‟y installa et devint premier
occupant de cet espace. D‟après notre informateur15, la tombe de Baidaga existe sous un
caïlcédrat (khayasenegalensis) au bord d‟un marigot dans un quartier de Guidiguis.
Aussi faut-il ajouter qu‟il y avait un homme nommé Duu venu de la zone de Léré au
Tchad. Habile chasseur Mundang, allait de forêt en forêt pour poursuivre les gibiers. Il va
séjourner dans la zone située entre Guidiguis et Touloum (Dubané). Dans cette forêt, il y avait
un Léopard (bèlə en tupuri) qui fut dompté par lui, et venait de temps en temps se reposer
sous un tamarinier. C‟est de là que le nom du village Dubané tire ses origines. Ce nom est
constitué de du le nom du chasseur Mundang Duu et de bane, de « bal ne » qui veut dire « l‟a
dompté ». On dira donc que « dubane » signifie littéralement « Duu l‟a dompté ». Le même
village est connu sous le nom de Bàrəbèlə= bàrə (tamarin), bèlə (Léopard) ; ce qui donne :
« le tamarin du Léopard ». Des lors que Duu s‟est installé dans cette zone, il est considéré
comme l‟ancêtre de cette partie du pays Tupuri. C‟est de lui que sortira le clan Mbarhặy
(Mundang) parmi les 56 clans qui existent chez les Tupuri (RUELLAND ,1992).
D‟après la thèse de certains chercheurs, les Tupuri se seraient étendus autrefois
jusqu‟aux rives du Logone. Mouchet16 (1938 :18) a trouvé chez les Massa, dans le Canton de

15
RINGBE Daniel, révérend pasteur retraité résidant à Guidiguis, 82 ans.
16
Mouchet, J- J, (1938), «Pratiques de divination massa et tupuri), Bulletin de la Société du Cameroun 4, pp 66-
74

20
Yagoua des houes larges ayant certainement appartenu aux Tupuri. On peut donc penser qu‟à
une époque donnée, les Tupuri ont eu à occuper un vaste espace au Nord que celui qu‟ils
occupent actuellement. Ils ont été contraints à se replier sur leur base de départ à cause de
l‟arrivée des Massa au bord du Logone.
Pour Guillard,
Les Tupuri se seraient installés sur les rives du Mayo-Kebbi, lacs de Fianga et de
Tikem, il y‟a environ trois cents ans. Avant eux, le pays aurait été occupé de façon
peu dense par des peuplades aujourd‟hui peu connues. Certains prétendent que les
Moungouri, actuellement dispersés et complètements assimilés à la masse tupuri,
exerçant le métier de forgeron, seraient les descendants de ces premiers occupants
17
du pays
Si l‟on interrogeait les Tupuri, la plupart déclarent comme le précise Kolyang : « tous
les Tupuri déclarent provenir du mont Doré qui est le seul relief important du pays servant de
point de repère historique. » Pour Feckoua, la structure linguistique du parler tupuri et du
parler moundang constitue un argument de poid confirmant la thèse de Guillard selon laquelle
les Tupuri seraient venus du Sud. Leur point de vue n‟est pas vide de sens et l‟on pourrait leur
donner raison lorsque DABA (2001) déclare : « En effet, historiens, ethnologues et même les
autochtones ont situé l‟évolution de ce peuple par rapport au mont Doré, non loin de Fianga
au Tchad »
Les arguments avancés par les premiers missionnaires religieux sur les origines du
peuple tupuri ne sont pas à négliger. Ceux-ci émettent l‟hypothèse selon laquelle les Tupuri
seraient de souche sao qui aurait occupé le sud du Kanem au Nord du Lac Tchad. Ils se
déplacèrent vers Pala. Dans ce secteur, l‟ancêtre du nom de Kemagne ou encore Grand Doré,
aurait peuplé par ses descendants cette immense dépression compressée entre les lacs de
Fianga-Tikem et les régions accidentées du Mayo-Kani. En effet, la théorie de l‟expansion des
proto-bantu (que sont les Tupuri, les Mundang et les Mbum) à partir du Cameroun-Nigeria est
corroborée par de nombreux archéologues. Compte tenu de la diversité des avis au sujet de
l‟origine des Tupuri, où se situent-ils et quelle peut être la situation démographique de ce
peuple composite ?

I-2-Situation géographique et démographique


Pour comprendre et connaitre un peuple, il est intéressant de faire les contours de son
espace vital et de son mode de vie. Nous présentons ici le cadre géophysique et
démographique du peuple tupuri.

17
Guillard, J. : Golonpoui : Analyse des conditions de modernisation d‟un village du Nord-Cameroun, Paris,
Mouton et Cie, 1965, P33

21
I-2-1-Situation géographique
Il est de nos jours difficile de délimiter l‟espace vital des Tupuri à cause du flux
migratoire et de leur départ vers les autres régions du Cameroun à la recherche du travail.
Mais, il est toutefois évident de reconnaitre qu‟il existe une zone où ils sont fortement peuplés
et qui sert de cadre référentiel pour leur situation dans l‟espace. D‟abord au Nord, la ligne
Domo-Guidiguis, à l‟Ouest, la ligne Guidiguis-Mbourao, ensuite, au Sud, Mbourao-Tikem, et
à l‟Est enfin, l‟étroite bande de terre longeant le Lac de Fianga à Domo, laissant sur les bords
du Lac une portion de terrain qui sera occupée ensuite par les Wina. Kolyang (2010 :13)
rappelle que :
Situé à cheval entre le Cameroun et le Tchad, le pays tupuri s‟étend de part et
d‟autre de la frontière séparant les deux pays vers le 10 de latitude Nord et 15de
longitude Est. Concrètement, il est situé au Sud de la République du Tchad et au
Nord-est de la République du Cameroun. Il est coincé entre les Massa au Nord et les
Mundang au Sud-ouest, et limité à l‟Est par les lacs du Mayo-Kebbi et au Nord par
les royaumes foulbés.
Un seul peuple pour deux pays. Les Tupuri du Tchad sont concentrés dans la zone du
Mayo-Kebbi, plus précisément dans la sous-préfecture de Fianga comprenant les cantons de
Fianga, Tikem, Youé, et débordant sur le canton Kéra. Quant aux Tupuri du Cameroun, ils
occupent la région de l‟Extrême-Nord, départagés dans deux Départements. Voici la carte qui
indique, localise la zone fortement peuplée par les tupuri au Cameroun.

22
Figure 1: carte de localisation du pays tupuri dans la rÉgion de
l'extrÊme-nord (CAMEROUN)

I-2-2-La situation démographique

S‟agissant du nombre de la population tupuri, il n‟est pas facile de donner un nombre


fixe et exact parce que cette population pratique l‟exode rural, et connaît une forte explosion
démographique. Nous pouvons avancer comme raison, le fait qu‟en plus de la région de
l‟Extrême-Nord, on retrouve les Tupuri dans la région du Nord (Lagdo ; Tourwa ; Ngong ;
Gouna ; Katé ; Poli ; Pitoa etc 18 ), de Mbandjock et Koteng au Centre et de Dizangué au
Littoral, etc. Aujourd‟hui, ils sont un peu partout dans le pays et sont souvent taxés de peuple
envahisseur. Ces mouvements vers le no man’s land et l‟exode rural peuvent avoir plusieurs
raisons ou motivations comme le souligne BALGA (2012 :29-30) :
18
Selon Yinyang Jonas, évangéliste et libraire à l‟Alliance Biblique du Cameroun (Agence de Maroua), entretient
du 12 mai 2017 dans son lieu de service, les Tupuri ont commencé à véritablement habiter la zone de Garoua
vers 1978, date à laquelle le barrage hydroélectrique de Lagdo fut créé.

23
Le boum démographique a contraint une bonne tranche de la population à abandonner
sa terre natale pour aller vers d‟autres horizons vermeils à la recherche de terres
cultivables. Aussi bien au Cameroun qu‟au Tchad, le phénomène touche en général tous
les Tupuri.

Cette explosion démographique amène la population jeune à aller se chercher


d‟autres espaces cultivables. Une autre raison peut s‟ajouter à celle précédente. En effet, les
jeunes se dirigent vers les métropoles régionales pour avoir d‟emploi. Plus souvent, ils
pratiquent des activités comme le gardiennage. Pour s‟en convaincre, il suffit de faire un tour
dans une des compagnies de gardiennage telles que DAK SECURITY ; PANTHERE
SECURITY; AFRICA SECURITY. Cette pratique trouve son fondement à notre avis, dans la
culture tupuri. Ces jeunes gens sont habitués à veiller pour garder les bétails contre tout vol
dans la nuit sans aucune rémunération.
Les études et recherches menées sur le Tupuri montrent qu‟au fil des années, la
population va grandissante. On peut le remarquer selon les époques de chaque étude. En1992,
RUELLAND estimait le nombre des locuteurs tupuri à deux cent cinquante milles (250 000)
habitant au Tchad et au Cameroun. En 1996, CAPPELLETTI totalise trois cent milles (300
000) âmes au Tchad et au Cameroun. En 2005, ZOCCARATO, estime la population tupuri à
« environ 350 000 âmes dispersées dans de nombreux et petits quartiers […] » (2005, p.4). En
2010, KOLYANG parle de cinq cent à sept cent cinquante milles (500 000 à 750 000) âmes
pour les deux pays suscités. De la manière que ceux qui partent travailler dans des grandes
plantations de canne à sucre de Mbandjock le font parce qu‟ils ont cultivé l‟habitude de
travailler durement. En 2012, ils sont estimés à huit cent milles (800 000) natifs dont trois
cent milles (300 000) pour le Tchad et cinq cent milles (500 000) pour le Cameroun.
Actuellement, cette population dépasse largement ce nombre puisque le taux de natalité est
fort et la mortalité est en régression (BALGA, 2012 :27).
Comme partout ailleurs, la population féminine dépasse largement celle masculine.
Les recherches menées montrent qu‟il y a une légère majorité de femmes. Dans certaines
localités, la population des filles par rapport aux garçons ne fait que s‟accroitre. Dans cette
partie du pays, il n‟existe presque pas une politique de limitation de naissance. Plutôt, le
nombre d‟enfants n‟est non seulement pas une richesse et une bénédiction, mais aussi et
surtout une main d‟œuvre pour les parents. Il faut aussi relever que la natalité est une des plus
fortes dans cette zone. Il existe des femmes qui ont mis au monde plus de 15 enfants. Si le
père a par exemple 3 femmes, il aura par conséquent 45 enfants en charge. Néanmoins, avec

24
le modernisme et la nouvelle génération scolarisée, on se rend compte que cette pratique va de
plus en plus à reculons.

I-3-Organisation sociale et quelques aspects culturels


Nous voulons présenter dans cette sous-partie les différents éléments sociaux qui sont
les identités remarquables du peuple tupuri et quelques traits culturels et patrimoniaux qui
les définissent.

I-3-1-Organisation sociale
L‟organisation sociale du peuple Tupuri présente tout de même quelques disparités de
point de vue. J. Guillard (1965) écrit :
Il semble qu‟avant leur installation dans leur zone actuelle, les Toupouri furent
organisés en groupes, unité sociale de gens en migration sous la conduite d‟un
ascendant commun. Ces pseudo-clans ou lignages se sont divisés en villages, à
l‟origine ensemble de familles du même lignage obéissant au même chef, en général
le plus âgé des hommes que le plus petit nombre de générations séparait de l‟ancêtre
commun.

I-3-1-1-La famille
Avant la colonisation et l‟infiltration d‟autres religions, l‟organisation sociale chez les
Tupuri était purement traditionnelle. La famille constitue la cellule de base. L‟homme est le
chef de la famille. Les femmes sont considérées comme des sujets et biens de famille, aucun
droit significatif ne leur est accordé. Dans les familles polygamiques, les premières épouses
méritent des soins et attentions particulières du chef de famille puisqu‟elle l‟accompagne dans
la pratique du sacrifice19. En général celles-ci ont naturellement des devoirs et ne contestent
pas l‟ordre du chef de la famille. Chaque homme plante lejagjiŋ20 à l‟entrée de sa concession
pour protéger sa famille et surtout pour surveiller ses femmes afin de les décourager de
commettre l‟adultère (Joseph DA‟AYANG, 2001 :4 ). Quant aux liens familiaux, les enfants
issus d‟un même père, les enfants de l‟oncle paternel sont tous des frères et sœurs.
Il est à noter que les lignages sont patrilinéaires, l‟exogamie concernant les lignées
maternelles et paternelles, le lévirat encore exercé laisse le choix du mari à la femme, qui,
âgée peut choisir de vivre chez un de ses fils, ou toute seule. L‟habitat est virilocal. Pour
mieux encore comprendre ce lien familial, abordons l‟aspect clanique.

19
RINGBE RESSALA, révérend pasteur retraité de l‟EFLC, entretient du 15 mai 2017 dans son domicile à
Guidiguis, âgé de 84 ans. Il a par ailleurs eu à traduire le catéchisme de Luther en tupuri.
20
Jagjiŋ : esprit matérialisé par un piquet (normalement de l‟arbre „sɛw, hoo ou hɔɓɛ‟), planté à l‟entrée de
l‟enclos familial. Bois protecteur, fétiche de la concession, censé protéger la famille et notamment empêcher
l‟adultère des épouses. Il oblige les femmes à avouer l‟adultère, sinon un enfant va mourir. Il s‟agit d‟un esprit :
„soo‟, mâle qui accompagne l‟esprit femelle „gama . Le sacrifice est appelé : „cɔ‟ge gama, cɔ‟ge jagjiŋ.‟

25
I-3-1-2-Le clan
Le peuple tupuri comporte 56 clans dont trois semblent être les premiers occupants du
pays et parlant la langue tupuri. Les autres sont des peuples venus d‟autres ethnies et furent
assimilés et par ricochet perdirent leur identité, leur langue, leur tradition et culture d‟origine,
pour la plupart. Les trois clans originaires sont :
 Les Baguri : Ils habitaient Dawa au Tchad.
 Les Donlonré : Ils habitaient également le village Doré au Tchad :Ils furent chassés
et allèrent à Sokom, puis Tchonlon et Dimguili au Cameroun.
 Les Guyuri habitaient près de la montagne de Doré au Tchad. Ils en ont été chassé
par les gens qui venaient de Péfé, pays Kado au Tchad, sous-préfecture de Pala, ils
sont venus s‟installer à Lalé (CAPPELLETTI, 1996 : 18). Chaque clan est dirigé par
un souverain sacrificateur. Qui est naturellement le patriarche ou l‟homme le plus
âgé du clan qu‟on appelle jee moobe (le gardien et protecteur du clan).
Le peuple tupuri actuel a connu au cours de l‟histoire un mélange à d‟autres ethnies,
ainsi qu‟il apparait dans les origines des clans en dehors des trois clans primitifs.
LAOUKISSAM FECKOUA Laurent, dans sa thèse de doctorat soutenue en 1977, a mené une
étude très nourrie sur les clans tupuri. Jean KOULANDI21, reprenant le travail de FECKOUA,
présente tout d‟abord les deux principaux clans tupuri que sont les Doré et les Goua. Les Doré
se décomposent en 28 clans et les Goua quant à eux se décomposent en14 clans. Il présente
ensuite les clans Bããhre qui sont au nombre de 8 et les clans Mbarhày, d‟origine Mundang,
qui sont au nombre de 4. Cependant, le groupe Bããhre n‟est pas uniforme, on y retrouve les
Massa et les Mousseye. Les autres ethnies intégrées aux Tupuri sont les Zimé ou Kado, les
Bainawa et les Kéra. L. FECKOUA (1977) décompose également les Kéra en 6 clans. J.
KOULANDI précise que « l‟intégration des autres groupes aux Tupuri s‟est faite
volontairement sinon, ils n‟auraient pas gardé chacun son origine » (idem.). L‟auteur continue
en affirmant que les Tupuri sont « le résultat de la fusion entre plusieurs groupes dont les plus
connus et encore vivant sont les Kéra, les Doré, les Gwa, les Bããhré et les Mberhèère ». Ce
fait traduit quelque peu une disparité d‟origines chez le peuple tupuri.

I-3-1-3-Pouvoir juridique et religieux


Le pouvoir juridique et religieux est assuré par les chefs des „terres‟ (terres = /sírï/
terme qui traduit aussi „village‟ en français). Les chefs des „terres‟ sont cooptés, voire „élus‟
21
J. KOULANDI, 2010, « Quelques aspects de la culture Tupuri », Garoua, BERAS, BP. 1305, pp. 82-84.

26
de nos jours parmi les chefs de lignages les plus âgés, et cela par les hommes adultes (= en
âge de se marier, ayant participé au Gürna) du „village/terres‟. Ces „chefs des terres‟ sont
„posés‟ (intronisés) sur une pierre, cérémonie au cours de laquelle la population les „pleure‟
par des chants de lamentations /ràa.gë/. Cette mort symbolique donne au chef des „terres‟ un
statut de médiateur entre les esprits des „terres‟ et des „pluies‟ et les humains. À leur décès,
contrairement aux fastes et fêtes des cérémonies de deuil entrepris pour les autres hommes
âgés, les chefs des „terres‟ sont enterrés dans la discrétion, sans lamentations ou réjouissances.
Les chefs des terres donnent l‟envoi des cérémonies propitiatoires ou de grâces envers les
„dieux‟ (les terres, la pluie, les eaux…). Dans les „villages/terres‟ chaque lignage a un chef
„religieux‟ qui sacrifie annuellement à ses ancêtres en accord avec les membres du même
lignage installé sur d‟autres „terres/villages‟.

I-3-1-4-Système de croyance
Les Tupuri célèbrent le culte des ancêtres et recourent, tous, à des rites d‟ordre
animiste envers des forces comme le pouvoir créateur bäa, divinité des pluies, les esprits des
eaux barkage22, l‟arbre koo, le serpent dont entre autres le python, etc. L‟esprit Man-houli,,
„mère de la mort‟, personnifiant la Mort cruelle, sans cause est une force néfaste à laquelle est
attribuée, entre autres, la mort des enfants jeunes non encore sevrés. Esprit féminin, elle opère
par l‟intermédiaire de l‟anthropophagie inconsciente de certaines femmes, auxquelles l‟on
attribue l‟irrésistible besoin de „manger‟ (= tuer) des enfants en bas âge, non seulement ceux
de leurs coépouses mais aussi tout bébé sur les „terres/villages‟ de leur habitat. Ce pouvoir de
mort est attribué à des femmes dont la mère a été accusée du même mal, plus rarement à un
homme dont la mère „mangea‟ des enfants lorsqu‟elle était enceinte de lui. Un simple serment
de renoncement public à son mal, de la part de la femme la „libère‟ de son mal de dévoreuse
kr ŋ23. Ce serment qui doit être fait avec l‟accord du mari et des parents de la femme est censé
la rendre stérile, raison pour laquelle l‟accord de la famille n‟est pas toujours acquis.

22
Barkage : mythe des Tupuri riverains, génie des eaux. On pense qu‟il habite les eaux, renverse les pirogues, fait
mourir les poissons, rend les gens malades et tue ceux qui entrent dans l‟eau. Sa natte est une couche de poissons.
S‟il lie d‟amitié avec quelqu‟un, il le prend, le cache sous l‟eau, le garde bien, lui donne à manger et il peut le
faire devenir un devin. Quand il le renvoie, il lui remet le bracelet en fer rouge, „boo-s ,‟ et un bâton en fer. Si
on trouve une pièce de cinq francs, c‟est lui qui l‟envoie et la personne qui la trouve dans l‟eau a déjà le „soo-
barkage‟ Autrefois c‟était un bracelet en fer rouge. ex : barkagbíi maa ka lɛ waŋ : le génie de cette eau est fâché.
Synonyme: mamiwata.
23
krɛŋ : sorcellerie inconsciente, transmise héréditairement (en général par la mère). Anthropophage malgré lui,
le sorcier est tenu responsable de la maladie et de la mort. C‟est par rêve que son identité se manifeste au malade
dont la famille exige une rétractation publique du sorcier pour la guérison, qui consiste à „donner de l‟eau‟ au
malade.

27
Cette forme de sorcellerie héréditaire, estimée inconsciente de la part de la femme fait
pendant à la sorcellerie volontaire, a a24attribuée aux hommes. Acheté en échange de la vie
de parents proches, ce pouvoir de sorcellerie est censé procurer des richesses en tuant des
adultes qui sont censés travailler comme des zombies invisibles dans les champs appartenant
au sorcier ; ce dernier aurait aussi le pouvoir de transformer ses proies en bétail pour les
vendre sur les marchés lointains. Les maladies et la mort, d‟un enfant, d‟un homme adulte en
plein exercice, d‟une femme encore en âge de procréer sont suspectes ; la famille du défunt ou
le malade consulte le devin qui détermine la force ou l‟esprit coupable en consultant des
pailles étalées en spirale sur le sol, dessinant des „maisons‟ aux noms des „divinités‟.

I-3-2-Quelques aspects culturels


Le peuple tupuri connait une diversité de traits culturels. Le quotidien est à prendre en
considération. Toutes les occasions semblent être indiquées pour se réunir et puiser ensemble
l‟ardeur au travail et le courage dans l‟affrontement du quotidien.

I-3-2-1-Le Gurna
Selon notre informateur25 , le gurna en pays tupuri est un trait de vie en groupe qui
rassemble les jeunes de presque tous les villages. En général, le gurna désigne un groupe de
personnes qui se retirent sous un arbre avec chacun une vache en lactation, avec pour objectif
de grossir, danser et de pouvoir échanger les expériences de vie. La durée annuelle du gurna
est de dix mois, et va d‟octobre à juillet. En cas de décès parmi les membres, le gurna est
strictement suspendu même s‟il était déjà installé. Cette pratique culturelle, avec l‟avènement
du modernisme et la scolarisation poussée des Tupuri, s‟estompe. On peut reconnaitre les
séquelles de cette culture dans les habitudes des jeunes de cette ethnie qui de plus en plus se
dirigent vers l‟armée.

1-3-2-2-Le few kagge


C‟est la fête du coq. Le few kagge reste à maints égards l‟un des principaux traits
culturels en pays tupuri. Il a lieu tous les ans et généralement au mois d‟octobre. C‟est une

24
Sa a : sorcellerie. Pouvoirs attribués à une personne qui serait censée mettre à mort par envoûtement une autre
personne dont il déterrera le corps immédiatement après son enterrement ; il la ressuscite et la rend invisible pour
qu‟elle travaille pour lui comme esclave. Son origine est très récente et viendrait des „Mundang .
25
MANKISSAM, 78 ans, chef du gurna et sacrificateur du clan Mankidif de Saotchay, entretient du 16 mai au
marché de Touloum.

28
fête qui marque la fin des pluies, la fin de l‟année et le début d‟une nouvelle année. En fait,
lorsque les pluies prennent fin, le Wang Doré qui est le souverain sacrificateur commence la
fête. Les sacrifices en signe de remerciements et de consécrations sont organisés. Le poulet
est immolé dans la journée et la nuit, les familles aisées peuvent y ajouter le bélier pour
compléter leurs sacrifices. Le bil-bil (bière de mil rouge) est la boisson indiquée pendant cette
période dans les familles. Plusieurs autres activités sont pratiquées en cette période telle que la
danse et la lutte traditionnelles etc. De nos jours et surtout au Cameroun, les Tupuri de la
diaspora s‟accordent à organiser cette fête dans les métropoles et les grandes villes où les
Tupuri sont fortement peuplés.

II-Présentation de la langue tupuri


À la fois ethnonyme et glossonyme, le tupuri désigne à la fois le peuple et la langue
parlée par ce peuple d'après Ruelland (1992), le mot « tupuri » désigne une langue parlée à la
frontière entre le Tchad et le Cameroun. Pour connaitre cette langue, nous proposons de
présenter tout d‟abord quelques aspects sociolinguistiques de la langue avant de donner un
aperçu sur quelques éléments relevant de la structure interne de la langue tels que la
phonétique, la phonologie et la sémantique lexicale.

II-1-Aspects sociolinguistiques de la langue


Il s‟agit de présenter ici les aspects de la langue en rapport avec la société qui en fait
usage. Pour ce faire, il est intéressant de donner un aperçu d‟abord, sur la dénomination et la
classification génétique de la langue, ensuite, présenter ses variantes dialectales pour enfin
présenter son statut.

II-1-2-Les dénominations et classifications génétiques de la langue tupuri

II-1-2-1-Dénominations ou variantes orthographiques du glossonyme


L‟unanimité est loin d‟être faite au sujet de l‟orthographe du glossonyme. Il existe une
pléthore d‟écriture du nom de la langue qui varie selon les auteurs. L‟explication que nous
proposons est une reprise de celle proposée par KOLYANG (2010 :22) parlant de l‟écriture
du nom de la langue tupuri. Il s‟interroge toupouri, toubouri, tupuri, tpuri –lequel est juste ?
Le peuple est désigné au Cameroun de Toupouri et la langue de toupouri, il faut tout
au moins reconnaitre d‟emblée qu‟il est sujet à caution. En effet, il existe plusieurs

29
orthographes du terme qui les qualifient. Chez Hanz Dominik (1902) et d‟autres auteurs
allemands l‟on trouve l‟écriture Tupuri. De même, l‟expression Toubouri parsème la
littérature coloniale française (Milbratt, 1912), Herse (1934), Marin (1937). Ebert écrit de fois
Tubiri. RUELLAND Suzanne dans tous ses travaux de recherches sur la langue préfère
tupuri. Laurent FECKOUA lui, reste dans l‟ambivalence. Tantôt tupuri (dans sa thèse, 1977),
tantôt toupouri (2002). D‟autres chercheurs dans la langue et la culture de ce peuple
s‟accordent aussi à écrire toupouri. Mais certains religieux catholiques à l‟instar de Samuel
KLEDA et CAPPELLETTI s‟accordent aussi sur l‟orthographe tupuri.
En revanche, KOLYANG Dina Taïwe (2010) prône dans ses écrits une nouvelle
orthographe. En tant que locuteur natif de ladite langue, il justifie cette utilisation par la
prononciation de ce peuple. Il affirme :
Pose-t-on la question « qui es-tu ? (ndɔ diŋ je mãy ?) à un membre de ce groupe, il
répondra je suis un Tpuri (ndi diŋ je Tpuri). Le « T » étant « humide » comme
comportant un « e » aspiré. Le « i » final étant une déclinaison. En effet, l‟on dit a
diŋ jar tpur wɔɔ (ce sont des tpur). Le terme je (pluriel jar) désigne le genre
humain suivi de la spécificité raciale, clanique ou sociale. Le peuple se nomme lui-
même Tpur (décliné en Tpuri.
Pour cet auteur, cette orthographe est préférable à toutes les autres appellations parce
qu‟elle se rapproche de la vraie prononciation proposée par le peuple lui-même. Mais dans le
cadre de ce travail nous préférons plutôt tupuri car cette écriture semble connue et rependue
dans la littérature scientifique.

II-1-2-2-Classification génétique de la langue tupuri


À notre avis, il ne nous semble pas fortuit de situer la zone de la langue tupuri dans un
contexte large sur le plan linguistique, et ce pour deux raisons principales: Premièrement,
parce que cette zone est un lieu de rencontre de plusieurs aires linguistiques dont il est bon de
voir l‟extension. Deuxièmement, parce qu‟en matière de classification génétique des langues
africaines, beaucoup d‟incertitudes voire d‟idées fausses subsistent chez les non-spécialistes,
la faute revient aux linguistes qui n‟ont pas su diffuser les quelques acquis de leurs
recherches.
Le Cameroun couvre à lui seul trois des quatre grandes familles linguistiques en
Afrique. On peut citer : le phylum Nilo-sahélien, le phylum Afro-asiatique et du phylum
Niger-Kordofan. Il faut préciser que la langue tpuri, contrairement à ceux qui ont pensé
qu‟elle ferait partie des langues tchadiques, fait plutôt partie du phylum Niger-Kordofan, du
sous-phylum Niger-Congo et de la famille Adamaoua-oubanguienne malgré sa situation
géographique. Celui-ci est le plus représenté au Cameroun. Ruelland (1992 : 9) distingue trois

30
familles linguistiques. La famille ouest-atlantique : elle comprend une seule langue qui est le
fulfulde.
 La famille Bénoué Congo : 146 langues réparties en 4 sous-familles
 La famille adamawa-oubanguienne : elle comprend 40 langues réparties en deux sous-
familles :
 la sous-famille oubanguienne ;
 la sous-famille adamawa.
Si la sous-famille Oubanguienne compte trois langues - le gbaya, le baka, le bagandu,
la sous-famille Adamawa, elle, dénombre 37 langues réparties en 8 groupes :
1. Le groupe samba dont la langue est samba-leeko;
2. Le groupe daka qui a une seule langue : le dega-mumi;
3. Le groupe kobo-dii ou vere-durus qui comprend 10 langues : le kobo, le koma-
ndera, le gimmime, le gimne, le dooyaayo, le lonto, le peere, le duupa, le pa’noet le dii ;
4. Le groupe mumuyedodont la langue est mome;
5. Le groupe mbum avec 12 langues : le TUPURI, le mundang, le mambay, le
dama, le mono, le pam, le ndai, le mbum-ouest, le mbum-est, le kali, le kuo et le gbete;
6. Le groupe fali qui dénombre 6 langues : le fali-dourbeye, le fali-bossum, le bveri, le
kaang, le fali-bélé, le fali-tinguelin; comptent 188 unités de langues identifiées et regroupées
dans trois familles.
7. Le groupe nimbari dont la seule langue a donné son nom au groupe, Nimbari ;
8. Les langues qui composent ce groupe sont en voie de disparition : le gey, leduli,
l‟oblo, le la‟bi, le to.
Cette classification nous permettra de comprendre les spécificités lexicale et
sémantique de la langue tupuri.

II-1-3-Les variantes dialectales du tupuri : Des points de vue divergents


Par opposition à « langue », le dialecte est défini par DUBOIS. J.et al, (2007 :142)26
comme étant :
Un système de signes et de règles combinatoires de même origine qu'un autre
système considéré comme la langue, mais n‟ayant pas acquis le statut culturel et
social de cette langue indépendamment de laquelle il s‟est développé.
Le dialecte est la variante d‟une même langue. Le tupuri, comme d‟autres langues,
présente des dialectes diversifiés, qui, issus de la langue mère varient en fonction du cadre

26
DUBOIS. J.et al, (2007) Dictionnaire de linguistique, Larousse-Bordas.

31
géographique. Le nombre des dialectes varient en fonctions des chercheurs ayant investis sur
la langue.
D‟abord, la thèse de Suzanne RUELLAND (1992 :8), la thèse de BALGA (2012 :51)
et le mémoire de RHOUSGOU M. H, (2013 :30)27 démontrent qu‟il existe quatre dialectes
tupuri. Le ɓaŋ-liŋ, le ɓaŋ-gɔ, le ɓaŋ- wεrε et le faalë-piyew. Toutesfois, en dehors des quatre
dialectes existants (pour certains), BALGA (2012 :55) découvre un autre dialecte appelé
Poɗɔkge28 .
Ensuite, KOLYANG Dina Taïwe (2010 :34) quant à lui pense qu‟il existe deux
variétés dialectales « désignées en référence aux découpages géographiques ».
Pour finir, nous nous alignons derrière la pensée de ce dernier pour insinuer qu‟il faut
parler véritablement de deux variétés dialectales du tupuri. Pour ce fait, nous n‟allons
développer ici que les deux variétés (ɓaŋ-liŋ et ɓaŋ-gɔ) qui sont à notre avis digne d‟être
appelés dialectes majoritaires.

II-1-3-1-Le ɓaŋ-liŋ
Le ɓaŋ-liŋ (/ɓaŋ : vers ;-liŋ : domicile ; à la maison ; chez soi /) désigne la variété
dialectale parlée où les tupuri sont originaires : C‟est la variété qui semble être originelle et
pure car elle n‟a pas subi des ramifications dues aux contacts des langues avoisinantes. Le
ɓaŋ-liŋ est parlé dans certaines régions de Mayo-Kebbi au Tchad telles que : Lalé, Séré,
Daoua, Mindaoré, Gouyou etc. (RUELLAND, 1988, p.9). De même qu‟une partie de la
région tupuri au Cameroun surtout les villages frontaliers tels que Warsaye, Guisaye, Guna,
Danglao, Doudoula… (Confère carte). Pour démontrer la particularité de ce dialecte, nous
étudierons ici quelques uns de ses traits phonétiques, lexicaux et sémantiques.

II-1-3-1-1-Phonétisme du ɓaŋ-liŋ
Le phonétisme d‟un lexème est sa particularité de prononciation. En effet, dans les
dialectes tupuri, il existe des mots dont la prononciation est le propre des locuteurs qui en

27
RHOUSGOU M. H, (2013) « Essai d‟analyse morphosyntaxique du substantif en tupuri : Genre, nombre et
fonction », Mémoire pour l‟obtention du diplôme de Master en langue et linguistique, Université de
N‟Gaoundéré.
28
Pour lui, cette variété est parlée à l‟extrême ouest du pays tupuri, précisément dans les villages Mbourao,
Tulao, Sumkaya, Longko, Gongong où Peuls, Mundang, Mambaï et Tupuri vivent en étroite collaboration. Il
précise que ce régiolecte désigné sous ce nom est inconnu les locuteurs du tupuri. Poɗɔkge dérive de jar pele
(gent du front) faisant références aux Peuls en raison de leurs pratiques religieuses.

32
font usage : C‟est l‟accent régional. Cette prononciation varie d‟une zone à une autre. On peut
le constater à travers les exemples suivants :
1. Cébéle joo laa ne nene
//Acné /jeune / atteindre+ passé / lui / yeux //
Il est atteint de l‟acné juvénile au niveau de la face.
Dans ce dialecte l‟acné est désigné par cette orthographe : cébélé
2. à yee tay ɓen go
//Il / vendre/ bœuf/ son /+ accompli //
Il a vendu son bœuf.
Dans cet exemple, ces locuteurs préfèrent /t/ : qui se réalise apico-alvéolaire ; occlusif,
sourd et oral.
3. Nàa sée
// Nous / aller+incoactif //
Allons !
Dans ce dialecte, le ton est haut (ˊ) (KOBADA, 2016 :41).

II-1-3-1-2-Particularisme lexicale du ɓaŋ-liŋ


Ce dialecte présente des particularités au niveau lexical (l‟ensemble des mots formant
le vocabulaire, la langue de la communauté). Lorsque l‟on est dans cette zone comme
présentée ci-haut, il y a des mots qui relèvent proprement de cette variété du tupuri.
Exemples :
4. Náá séé nää noo célaŋ
//Nous+première personne+pluriel /allons+présent / enlever+infinitif / huile / abeille //
Allons récolter de l‟huile d‟abeille.
Ici, célaŋ qui veut dire abeille dans ce dialecte n‟aura pas la même appellation dans
l‟autre.
5. ɓaale ɓɛ mbuɗguri
//Pied / lui / tourner+passé, gauche//
Il a eu une entorse au pied.
Mbuɗguri étant composé de mbuɗ (tourner) et -guri (gauche), semble être une construction
originale. C‟est un procédé de création lexicale propre à cette variété lexicale.
6. FALNA ndii bàabúr ma wɔge fransɛ
//Falna= nom propre/ monter+ présent/ avion / pour / aller+infinitif / France//

33
FALNA a pris l‟avion pour la France.
L‟avion est désigné ici par bàabúr.

II-1-3-1-3-Sémantisme de la variété ɓaŋ-liŋ


Le sémantisme d'une unité linguistique est son contenu sémantique. Le tupuri présente
des mots dont le sens ou l‟usage varie d‟une zone à une autre. Dans la zone de la variété ɓaŋ-
liŋ, ces lexèmes ont des contenus sémantiques particuliers. Pour s‟en convaincre, prenons les
exemples ci-dessous :
7. Maŋ laswaré29 le me ndi céé ti gomo.
// Prendre+ présent / lame de rasoir/ à moi / je / raser /tête/ à toi +accompli//
Apporte moi la lame de rasoir je veux te raser la tête.
8. à càà dò ɓē gō dē màà-pále.
// On / couper /main /lui / marque d‟aspect accompli/ avec / le couteau //
On a coupé sa main avec le couteau.
Màà-pále peut avoir comme synonyme dans les deux dialectes « le couteau », mais désigne
exactement ici le long couteau.

II-1-3-2-Le ɓaŋ-gɔ
Ɓaŋ-gɔ est formé de ɓaŋ = vers et de -gɔ = pratique traditionnelle qui consiste à aller
prendre un bouc ou un belier de gré ou de force dans une zone un peu éloignée du chef
supérieur tupuri (Waŋ Doré) pour le sacrifice. Généralement connue sous le nom de « maŋge
kalkao ». Le ɓaŋ-gɔ est donc la variété dialectale tupuri parlée dans la zone ciblée par la
pratique du gɔ. C‟est la zone du pays tupuri du Cameroun, plus précisément les villages des
circonscriptions administratives suivantes : Kar-Hay, Porhi, Kalfou, Guidiguis Tchatibali,
Dziguilao…C‟est la variété qui semble la mieux connue et parlée des locuteurs du tupuri. On
peut dire qu‟elle s‟écarte du parler originel, mais semble être celle qui est de nos jours
indiquée pour faire référence à la langue tupuri. Son extension n‟est pas seulement locale mais
plus ou moins nationale ou générale, son rayon de communication est étendu et elle est
dynamique. Toutefois, elle présente une particularité structurale tant au niveau phonétique que
lexico- sémantique. Suzanne RUELLAND (1992 :9) précise que cette différenciation est
rendue possible à cause du contact avec les langues limitrophes du pays tupuri à l‟Extrême-

29
Laswaré est un emprunt du français rasoir

34
Nord du Cameroun. Il s‟agit des langues identitaires telles que : le mundang, le fulfulde et le
guiziga…
Les phrases (1) à (8), ci-dessus sont rendues en ɓaŋ-gɔ ainsi qu‟il suit :

II-1-3-2-1-Phonétisme de la variété ɓaŋ-gɔ


9. Jebelé (confère glose exemple 1)
Au lieu de cebelé en ɓaŋ-liŋ, les locuteurs du ɓaŋ-gɔ préfèrent celle-ci jebelé. Le
contexte d‟emploi reste partagé.
10. Dày (confère glose exemple 2)
Le bœuf est ici désigné par dày. Ces locuteurs utilisent plutôt le phonème /d/ qui se
réalise apico-alvéolaire, occlusif, sonore et oral.
10 Nàà séé (confère glose exemple 3)
A travers cet exemple, nous comprenons que dans ce dialecte le ton ( è) est bas.

II-1-3-2-2-Particularisme lexicale du ɓaŋ-gɔ


11 oore (confère glose exemple 4)
Dans cette variété l‟abeille est désignée par yoore.
12 Mburguɗi (confère glose exemple 5)
Ce mot est né de la déformation du premier à l‟exemple précédant mais désignent la
même réalité.
13 Afiyoŋ (confère exemple 6)
Ce mot afiyoŋ est un emprunt au mot français avion, rendu possible suite au contact
du tupuri avec le français à l‟Extrême-Nord comme le présente BALGA (2012) dans sa thèse.

II-1-3-2-3-Sémantisme du ɓaŋ-liŋ
14 Ndodiŋ jelaswaré30
// Tu /être / personne / sonder les gens //
Tu es une personne qui sonde les gens.
15 Màà-páálë m{ ni waŋ ndé debaŋ.
// Cheval /pour / chef / courir+ duratif/ trop //
Le cheval du chef coure trop.
Ici Màà-páálë peut avoir pour synonyme piri (cheval) dans les deux dialectes.

30
KOLYANG D.T. (2010), Parlons tpuri, Paris, l‟Harmattan, p.34, neuvième mot du tableau qu‟il propose pour
établir la différence entre les deux dialectes.

35
De nos jours, tous les locuteurs du tupuri ou presque savent qu‟il n‟existe pas qu‟une
seule langue tupuri. Mais des langues tupuri. C‟est pour insinuer que la communication à
l‟intérieur du pays tupuri s‟établie au quotidien des variétés de la langue tupuri. Celles-ci sont
tributaires de leur environnement sociolinguistique. Cette diversité complexifie et rend
difficile l‟apprentissage ou la pratique du tupuri « standard ».

II-2-Brèves descriptions phonétiques, phonologiques et sémantiq ues du tupuri


Cette sous partie est consacrée à la présentation de la structure interne de langue
tupuri. Il s‟agit précisément de faire une présentation brève des aspects de la phonétique, de
la phonologie et de la sémantique lexicale du tupuri.

II-2-1-Le système phonétique du tupuri


La phonétique étudie les sons du langage tels qu'ils sont produits. La langue tupuri
possède de nombreux sons vocaliques et consonantiques dont nous nous proposons de
présenter.

II-2-1-1-Sons vocaliques
Dans la langue tupuri,Suzanne Ruelland (1992) distingue 24 voyelles (repris par
Kolyang31) divisées en 14 orales dont 7 brèves et 7 longues et 10 nasales dont 5 brèves et 5
longues réparties comme suit :
 Orales brèves : a, e, ɛ, i, o, ɔ, u ;
 Orales longues : aa, ee, ɛɛ, ii, oo, ɔɔ,uu ;
 Nasales bréves : a, e, i, o,u ;
 Nasales longues: aa, ee, ii, oo, uu ;
Les voyelles longues sont indiquées à l‟aide du doublement de la lettre : « aa, ee, ii,
oo, ɔɔ, uu ».
La nasalisation de voyelles est représentée par le tilde sur la lettre : «ã ; ẽ ; ĩ ; õ ; ũ ».
L‟opposition de longueur n‟est distinctive qu‟en syllabe ouverte. En syllabe fermé où
l‟opposition est neutralisée, lorsque la syllabe supporte un ton modulé, la voyelle est
légèrement allongée. Cet allongement n‟est pas pertinent. Pour cette raison, il a été possible
d‟écrire un redoublement de voyelle pour indiquer un simple support de ton modulé en
syllabe fermée.

3131
KOLYANG D.T. (2010), Parlons tpuri, Paris, l’Harmattan, p.23

36
II-2-1-2-Sons consonantiques
Dans la langue tupuri, il existe 25 consonnes32 repartie comme suit : 18 orales, et 7
nasales et pré-nasalisées dont on aura : b, c(t), d, f, g, h, j (dz), k, l, m, mb, n, nd, n, ŋg, p, r, s,
t, w, y(j).

II-2-2-Le système phonologique du tupuri


La phonologie est définie par Maurice Grevisse et André Goose33 comme une science
qui étudie des « sons du point de vue de leur fonction dans une langue. » Pour ceux-ci, « les
sons minimaux qui permettent de distinguer les mots les uns des autres s'appellent
phonèmes ». Il convient donc de présenter ici les phonèmes du tupuri. Mais avant cette
présentation des phonèmes vocaliques et consonantiques, il n‟est pas inutile de comprendre
la complexité de cette langue à travers ses hauteurs tonales qui sont à l‟origine de la variation
sémantique du lexique de ladite langue.

II-2-2-1-Les tons tupuri


Le tupuri est une Langue à tons. Pour DI CRISTO (2013 :3) cité par KOBADA
(2016 :40),
En linguistique, les tons sont usuellement définis comme des unités mélodiques
minimales distinctives (des phonèmes de hauteurs en quelques sorte, ou des tonèmes)
dont les oppositions ont pour effets de changer le sens des mots (ou des
morphèmes).
Les tons permettent de faire des différences nettes entre les phonèmes. De même, on
peut aussi constater que la variation des hauteurs tonales sur un même mot peut être à
l‟origine de la multiplication du sémantisme de ce lexème comporte quatre grandes hauteurs
tonales. On en distingue dans la langue tupuri quatre hauteurs tonales34 :

 le ton haut [´], exemple : « húúli » (la mort) ;


 le ton mi- haut [ ¯ ], exemple : « kōō » (l‟arbre) ;
 le ton mi-bas [ ¨ ] comme dans « söörē »(honte);
 le ton bas [`] comme dans le mot « gàmlà » (bélier).

Le système phonologique du tupuri est fondé sur le modèle latin et comprend


quarante-neuf (49) phonèmes repartis en vingt-cinq (25) consonnes et vingt-quatre (24)
voyelles. Prenons quelques exemples illustratifs pour comprendre leurs réalisations.

32
Op. cit. p.23
33
GREVISSE M. ,& GOOSE A., Le Bon Usage, 14 éditions, De Boeck , 2007.
34
Op. cit. p. 36

37
II-2-2-2-Phonèmes vocaliques
 Le phonème / a / : áálē (motte de terre), gārā–áárë (espèce de mil (rouge)) ;
 Le phonème / e / : èege (expulser, excréter), èerɛgge waare (diffamer, dénigrer) ;
 Le phonème / ε / : εrɛŋge (enfler anormalement);
 Le phonème / i / : iggi (le repos), tiŋ (la maison, la case) ;
 Le phonème / o / : oɗge (stationnement) ;
 Le phonème / ɔ/ : sɔŋ (la houe), klɔbɔ (la bouteille) ;
 Le phonème / u / : hum (l‟os), tuu (le trou) ;
 Le phonème / aa / : faage (nier, douter) ;
 Le phonème / ee / : ɗeere (fruit du jujubier), feere (les choses) ;
 Le phonème / εε/ : pεεle (la commission), dεεle (droit) ;
 Le phonème / ii / : fiiri (les chèvres), fíí (l‟herbe) ;
 Le phonème / oo / : koo (arbre, bois), tǝɓoole (la marmite) ;
 Le phonème / ɔɔ/ : pɔɔlε (le pommier de Sodom), hɔɔlε (la nourriture) ;
 Le phonème / uu / : suusε‟ε (merci), cuu (la potasse) ;
 Le phonème / ã/ : hã (méchanceté), fãy- fãy (de bonne odeur) ;
 Le phonème / ĕ / : hĕn ɓi (mon frère);
 Le phonème / ĩ / : ĩɗgi (tuer en grand nombre) ;
 Le phonème /õ/ : põ (pion) ;
 Le phonème / ũ / : hũy (le nez), fũy dɔɔ (l‟ongle) ;
 Le phonème / ãã / : jããre (les ordures), sããge (les cendres) ;
 Le phonème / / : h ne (la peur), g ge (grandir) ;
 Le phonème /ĩĩ / : dĩĩgi (déformer), cwĩĩgi (éternuer) ;
 Le phonème /õõ/ : cõõre (la saveur), hõõre (l‟épine) ;
 Le phonème /ũũ/ : kũũni.

II-2-2-3-Phonèmes consonantiques
 Le phonème / b / : balɔn (le ballon), barge (l‟amitié) ;
 Le phonème / ɓ/ : ɓrewge (partager), ɓreɗge (forcer l‟entrée de quelque chose) ;
 Le phonème / c / : co‟oge (fêter (traditionnelle)) ;
 Le phonème / d / : daage (la pirogue), darge (la chasse) ;
 Le phonème / ɗ/ : ɗarge (l‟insulte), ɗuugi (piler) ;
 Le phonème / f / :faage (la route), figliw(l‟adultère) ;
 Le phonème / g / : gamge (le chalenge), graw (le baton) ;
 Le phonème / h / : haw (la joue), húúli (la mort) ;
 Le phonème / j / : jare (les gens) ; jɔ‟ɔge (semer) ;
 Le phonème / k / : kage (le poulet), knɛ‟ge(la réparation ) ;
 Le phonème / l / : lɛŋ (inapte), liw (la pintade) ;
 Le phonème / m / : may (une fille), mooda (la voiture) ;
 Le phonème / mb / : mbarga (un enfant), mbεrge (l‟homonyme) ;
 Le phonème / n / : naw (le jour), nene (regard, yeux) ;
 Le phonème / nd / : ndare (sac), ndalge (causerie) ;
 Le phonème / ɲ/ : ɲaa (silure), ɲoo-ge ti (oublier) ;
 Le phonème / ŋ / : riŋ(les cheveux), suŋ (la nuit) ;
 Le phonème / ŋg / : saŋgu (le médicament), ŋgel (une place, un lieu) ;

38
 Le phonème / p / : paare (les parents, les œufs), pur (beaucoup) ;
 Le phonème / r / : rɔɔ (pleurs), raŋge (promenade) ;
 Le phonème / s / : sag-ge (briller), siri (la terre) ;
 Le phonème / t / : tawgi (temoin), tamsir (le monde) ;
 Le phonème / w / : waare (l‟étranger), way (le chien) ;
 Le phonème / y / : ywaale (la porte (sécrète) secours), yaale (la saison pluvieuse) ;
 Le phonème /¿ / : mba¿a (gros, grand), ¿a (il, elle) ;

II-2-2-3-Quelques éléments de sémantique lexicale du tupuri


Dans cette sous partie nous voulons faire une présentation succincte de quelques
relations sémantiques lexicales nous permettant ainsi de faire les contours de l‟analyse
sémique de la définition (nous y reviendrons dans la suite de notre travail dans la langue
tupuri. Précisément, cette section porte sur les deux relations sémantiques retenues pour notre
recherche, soit la relation synonymique et la relation polysémique . La relation sémantique
exprime un lien entre au moins deux sens.

II-2-2-3-1-La polysémie
Il faut comprendre que « le terme polysémie est utilisé pour décrire le fait qu‟une unité
lexicale correspond à plusieurs significations, au niveau du signe on dira qu‟un seul signifiant
est en relation avec plusieurs signifiés35 ».
C‟est aussi et surtout la propriété qu‟ont certains lexèmes à présenter plusieurs
signifiés. En tupuri comme partout ailleurs, il existe des lexèmes ou des entrées
dictionnairiques qui présentent une pluralité de sens ou signifiés. C‟est ne qu‟au niveau de
leurs environnements lexicaux qu‟on peut les distinguer. Par exemples :
16 Dɔɔ aura comme sens : 1) bras. 2) main. ex da wɔ dɔɔ ne kaara : ils sefont
signe avec la main. 3) dizaine. ex ndi na lɛgɔTibal dɔɔ ɓɔgɛ : j‟ai passé deux
dizaines de jours à Tibale. 4) empreinte digitale. 5) mesure de longueur de la
paume de main depuis la base du pouce jusqu‟au bout du majeur. 6) hauteur du
bras étendu (unité de mesure tupuri). ex dɔɔ par parnaa : il est profond d‟à
peu près 8 mètres. 7) style en art. ex pay maa ta diŋ dɔɔ May boo : cette poterie
est la marque de May boo. 8) branche ou partie ex : dɔɔ koo : une branche
d‟arbre ;dɔɔ darge : une partie des chasseurs.

35
ARRIVE M., GADET F., GALMICHE M., La grammaire d’aujourd’hui: guide alphabétique de linguistique de
linguistique française, Flammarion, Paris, 1986.

39
Certains noms admettent un complément référentiel dans son environnement lexical pour le
spécifier son sens. C‟est le cas du sens 8). Cette adjonction du complément au nom est appelée
par Ruelland comme « combinatoires métaphoriques »
17 Jaŋge I 1) trottiner. 2) durcir, se fortifier. ex : ti mbarga jaŋ wɛ : la tête de l‟enfant
a durci. 3) mûrir (arachides, pois de terre, courges).
18 Jaŋge II 1) lire. 2) éduquer, apprendre. 3) s‟entraîner à la course. Syn.: keege.
Certains ont souvent pensé que « jaŋge I » et « Jaŋge II » comme présentés ci-haut,
sont considérés comme polysémiques, or il s‟agit à notre avis de deux lexèmes homonymes.
Les deux sont étymologiquement opposés, par conséquent on devrait plutôt les assimiler à
des homonymes. En effet le premier est une imitation (onomatopée) du trottinement (jaŋ –
jaŋ) et le deuxième est un emprunt au mot fulfulde « jaŋgugo » (lire//étudier, apprendre//
réciter).

II-2-2-3-2-La synonymie

La synonymie est couramment définie comme une relation d‟équivalence sémantique


entre deux signes distincts. Deux mots sont synonymes lorsqu‟ils sont morphologiquement
éloignés mais sémantiquement proches. Dans la langue tupuri nous pouvons avoir des
lexèmes ayant des rapprochements sémantiques. On aura comme exemples :
19 Flèw (vélo) = kéké ; ɗeŋɗeŋ ;baskur
Le premier (kéké) est un idéophone ou une imitation du bruit du vélocipède, le
deuxième (baskur) est un emprunt au fulfulde du mot baskuuru qui veut dire vélo. Flèw est
utilisé couramment par tous les locuteurs du tupuri et ɗeŋɗeŋ (idéophone ou une autre forme
d‟imitation de la fonction du vélocipède) est rarement utilisé, sans distinction dialectale. Par
contre kéké (soutenue) est utilisé généralement par les locuteurs de la variété ɓaŋ-liŋ et
baskur (soutenue,) généralement en usage dans la variété ɓaŋ-gɔ. La synonymie est ici
fonction des variétés dialectales et de registres de langue.
20 Céné (chaine) = réce‟e = paklam
Céné est un emprunt du français (chaine= Dispositif formé d'anneaux entrelacés, servant à
attacher quelque chose.) et a un usage familier. Réce’e et paklam désignent tous deux la
chaine. Sauf que, le premier est rependu et le deuxième est recherché.
Pour finir, les différentes recherches menées montrent à suffisance que les tupuri sont
un peuple complexe et difficile à situer historiquement, géographiquement. Malgré ces

40
origines contestés, il convient de soutenir que les ais convergent pour dire qu‟ils sont
originaires de la zone soudanaise (zone frontalière mayo-kebbi au Tchad et l‟Extrême-Nord
du. C‟est un peuple socialement organisé, présentant des marques culturelles les rapprochant
d‟autres peuples voisins. C‟est aussi un peuple en perpétuel mouvement à l‟intérieur des deux
pays cités. Cette proximité avec les autres peuples et ces mouvements vers les autres localités
sont à l‟origine de cette pluralité de variété dialectale (le ɓaŋ-liŋ, le ɓaŋ-gɔ, le ɓaŋ- wεrε et le
faalë-piyew) dont le ɓaŋ-liŋ et le ɓaŋ-gɔ constituent ceux qui sont remarquables et faciles à
repérer et par conséquent digne d‟être classés au rang des dialectes. Ces dialectes influencent
le sémantisme de quelques lexiques de la dite langue. Néanmoins, il convient d‟analyser la
définition dans le dictionnaire tupuri-français de Suzanne Ruelland afin de voir comment le
sens est traduit du tupuri vers le français dans cet ouvrage lexicographique.

41
CHAPITRE II : ANALYSE DE LA
DÉFINITION LEXICOGRAPHIQUE(DL)
BILINGUE TUPURI-FRANÇAIS DANS LE
DITFA

42
Le deuxième chapitre analyse la définition lexicographique (DL) sous l‟angle de la
traduction du contenu des lexèmes tupuri vers le français. La nécessité d‟inclure une
définition dans la microstructure du dictionnaire bilingue est à notre avis un élément
fondamental pour un lexicographe (monolingue ou bilingue), même si cette pratique a été
souvent un sujet controversé (Hausmann 1990, Zgusta 1971: 321-329). Nous abordons la
question dans la perspective des dictionnaires bilingues généraux. À travers l‟étude de
quelques unités lexicales tupuri et leurs équivalents français dans la DITFA, nous montrons
l‟intérêt de la définition. Cette analyse offre la possibilité de dégager la structure interne des
sens lexicaux ce qui nous permet de mieux sélectionner l‟équivalent traductif et d‟expliciter
les liens de sens et d‟équivalence qui existent entre les vocables des deux langues. Avant de
faire une analyse et description du sens de quelques unités lexicales tupuri et établir leurs
équivalences en français, il nous semble inéluctable de faire le contour définitionnel du
concept de définition lexicographique, et élaborer une typologie de ces définitions
lexicographiques.

I-Définition et typologie de la définition lexicographique


I-1-Qu’est-ce qu’une définition lexicographique bilingue ?
La définition lexicographique est l‟élément incontournable dans la présentation
formelle du sens, ou signifié, de la lexie vedette d‟un dictionnaire .Elle est par conséquent
considérée par les lexicographes comme le noyau central de l'article de dictionnaire .Son
importance est capitale non seulement pour la description du sens du lexème définie, mais
aussi et surtout pour l‟usager du dictionnaire. En effet, il est impossible de traiter en
profondeur le régime syntaxique ou la cooccurrence lexicale du lexème avant d'avoir formulé
son sens ou ses multiples acceptions. Pour IGOR A. MEL‟ČUK/ André CLAS/ Alain
POLGUERE (1995 :74), « la définition lexicographique d'une lexie L n'est pas autre chose
qu'une représentation du sens de L».
La définition est incontestablement l‟élément de l‟article dictionnairique qui est
difficile à réaliser (BAYLON C. & FABRE P, 1989 : 236). Elle mérite un soin minutieux
pour sa réalisation. Il s‟agit de procéder « par un processus d‟abstraction, d‟isoler le mot de
ses [sic] contextes, c‟est-à-dire de réaliser une description résumée qui ne constitue pas un

43
appauvrissement dangereux de la réalité »36. La définition se présente comme une périphrase
qui se veut synonyme de la lexie à définir (POTTIER, 1965). Pour DUBOIS et al (2007 : 132),
Dans un dictionnaire, la définition est l‟analyse sémantique du mot d‟entrée.
Elle est constituée d ‟une série de paraphrases synonymiques du mot d'entrée,
chaque paraphrase, distincte des autres, constituant un sens, ou, dans la
terminologie lexicographique, une acception. Les définitions (ou sens), distinguées
les unes des autres par des numéros, des tirets, des barres, etc., se succèdent selon
un rapport historique ou logique (parfois dans l‟ordre de la fréquence en
langue).
Dans un contexte bilingue tupuri-français, la définition d‟une lexie consiste à présenter
les différentes acceptions de L de la langue de départ (LD) vers la langue d‟arrivée (LA). Pour
connaitre le sémantisme d‟un lexème, il faut nécessairement indiquer ses traits distinctifs. Ces
procédés constituent les règles principales de la définition et la meilleure façon d‟extraire le
sens d‟une lexie. Cette spécificité se contente de ce que l‟analyse sémique révèle. Pour s‟en
convaincre, observons les exemples suivants :
1) Dɔrnö n. labret des femmes traditionnellement fait en
poterie. (DITFA, 70D)

2) Düŋdūlüŋ n. instrument de musique fait d’une courge oblongue


évidée frappée contre la cuisse, joué par les filles. (DITFA, 71D)

3) Kērē n. bouillie faite de boule de mil délayée dans du


lait ; peut aussi se faire en cuisant de la farine dans de l’eau et en
ajoutant ensuite du lait. (DITFA, 151K)

Dans chaque exemple, on se rend effectivement compte du fait que la microstructure


de la partie définitionnelle de la vedette présente exhaustivement ses différents sèmes. Les
lexies (L) des exemples ci-dessus auront donc pour sèmes (S) suivants :
L1 (Dɔrnö) = S1 : labret ; S2 : traditionnel ; S3 : pour femme ; S4 : en poterie.
L2 (Düŋdūlüŋ)= S1 : instrument ; S2 : pour musique ; S3 : fait d‟une courge ; S4 :
oblongue ; S5 : évidée ; S6 : frappée contre la cuisse ; S7 : Joué par les filles.
L3 (Kērē)= S1 : bouillie ; S2 : faite de boule de mil ; S3 : délayée ; S4 : dans du lait.
S1 ; S2 ; S3 ; S4 ; S5 ; S6 ; S7, sont les sèmes qui ont rendu possible la définition de L1 ;
L2 ; L3. Définir un lexème de la langue tupuri vers le français consiste à ressortir tous les
contenus sémantiques possibles du lexème et établir les équivalences en français. Il ne s‟agit
pas d‟un exercice simple, cette activité exige du lexicographe bilingue une connaissance
poussée de la culture tupuri. Les adresses du dictionnaire sont en tupuri (qui est la langue de
départ) et les gloses définitionnelles de L1, L2 et L3 sont présentées en français (qui est ici la

36
Idem

44
langue d‟arrivée). Cette glose est l‟équivalent sémantique de la lexie ou son synonyme dans la
L A. La DL consiste à faire ressortir les différents sèmes de chaque lexie. Contrairement à la
définition lexicographique dans les dictionnaires monolingues, les définitions
lexicographiques bilingues exigent une configuration spécifique. À chaque entrée correspond
un équivalent en français qui prend en compte la culture tupuri. En effet, cette structuration
assure la visibilité de la culture tupuri dans la sphère francophone. Pour l‟analyse sémique,
nous y reviendrons dans la suite de notre travail.
Il existe plusieurs manières de définir. Lorsqu‟on observe attentivement la structure de
la zone définitionnelle des trois exemples précédents (1 ; 2 ; 3) et celle des trois exemples
suivants (4 ; 5 ; 6) :
4) bulfuŋ n. épidémie (DITFA, 39B)
5) caage v.intr. 1) couper, casser. ex s|alen caa gɔ : la corde
s’est coupée. 2) abattre. ex | caa koon gɔ gesiŋ : il a abattu
l’arbre. 3) blesser. ex : koo caan ɓaale : il s’est blessé le pied.
4) vacciner. ex { de caa kamliiri wɔ wara : on vaccine les
enfants aujourd’hui. 5) scarifier. ex : wel gɔɔni caa se ɓɛ : le
jeune initié se fait des scarifications. 6) se sauver (animal
attaché...). ex pirncaahaa suu : le cheval s’est sauvé depuis hier.
7) semer : coton, niébés, mil pénicilaire.... ex | diŋw r maa caa
mb|araw c’est le moment de semer le coton, récolter. ex { caa
gar{ gɔ jag gesaŋ : le fait de couper le sorgho rouge ‘gar{’ et le
laisser secher sur les tiges entrecoupées et croisées. (DITFA,
46C)
6) Busgi v.intr.1) divorcer.2) répudier.ex : blɔɔn bus way ɓɛn wɛ
gɔ : l’homme a répudié sa femme.3) renvoyer.ex | kal bus naare
maa wɛr ɓɛn wɔ gɔ ɓuy : il a renvoyé toutes ses
femmes.4) rendre.5) refuser. (DITFA, 39C)
On se rend compte que le sémantisme de chaque lexème exige le type de définition
qui convient pour sa présentation. Dans les exemples 1 ; 2 ; 3, les lexèmes présentent des
définitions qui prennent en considération tous les différents sèmes qu‟ils renferment. Par
contre, avec les lexèmes bulfuŋ (4) caage (5) ; busgi (6), nous ne retrouvons que les
équivalents lexicaux en français, sans des précisions sur son sémantisme. Il s‟agit donc des
différents types de définitions lexicographiques bilingues.

I-2-Typologie de la définition lexicographiq ue dans le DITFA


La définition a fait l‟objet de recherche de plusieurs lexicologues français qui ont
chacun eu à établir une typologie de définitions qu‟on retrouve dans la description des entrées
de dictionnaire. Le domaine de la définition est un domaine vaste qui englobe une quarantaine
de types de définitions différents, regroupés autour de quelques sept axes majeurs (situation

45
d'emploi, mode définitoire, composants formels, fond de la définition, rôle de la définition,
moyens utilisés pour définir et fonctions de la définition).

I-2-1-La classification classique de la définition (suivant QUEMADA)


B. QUEMADA (1966), établie trois types de définitions classiques 37 :Il s‟agit
premièrement de la définition nominale, la définition logique et la définition littéraire, ou
humoristique ou encore polémique.

I-2-1-1-La définition nominale


Dans la définition nominale, les mots-concepts inconnus sont définis à partir des
mots-concepts connus. On délimite le sens d‟un terme par ses contraires ou on fait un
rapprochement des mots sémantiquement équivalents (ayant une inclusion de sens). Ce type
de définition est assimilable à la définition par équivalence. Notons à cet effet les exemples
suivants :
7) ɓaalen.1. Jambe, pied, patte. 2. roue. 3. + num. =fois. Ndi dɔk ne
ɓaale ɓog. (DITFA, 41Ɓ)
8) C in.1. sang. 2) lèpre. ex c igɔ de caa blɔɔ maa caw no : cet
homme a la lèpre. (DITFA, 53C)

Dans ces exemples, les deux entrées (ɓaale et C i ) qui sont des concepts inconnus sont
définies par des mots français « jambe, patte et roue » et « sang » et lèpre » connus de l‟usager.
Ces entrées sont aussi délimitées par ces unités lexicales (jambe, pied, patte et roue) ayant une
inclusion de sens. Ce type de définition concerne plus les entrées qui ont des sgnifiées
identiques en français comme en tupuri. Nous avons eu à repertorier dans le corpus pour ce
type de dictionnaire un nombre qui avoisine 500 entrées.

I-2-1-2-La définition logique


Il évoque deuxièmement, la définition logique : dans ce type de définition, il s‟agit
d‟énumérer « les qualités et les attributs distinctifs d‟une chose pour en faire connaitre la
nature. » 38 . À travers les deux premiers exemples (1et 2). On peut expliquer ce type de
définition lexicographique : « 1) Düŋdūlüŋ n. instrument de musique fait d‟une courge
oblongue évidée frappée contre la cuisse, joué par les filles. (DITFA, 71D) » . En effet, dans

37
C. BAYLON et FABRE P., 1989 : 236
38
Op.cit. 237

46
cet exemple, nous remarquons que les différents sèmes permettent de montrer la nature de
l‟entrée « Düŋdūlüŋ ». Elle a pour nature : « instrument de musique ». Le matériel de
fabrication est « une courge ». Sa forme est « oblongue » et son contenu est « évidée ». Pour
le jouer, il faut le frapper « contre la cuisse ». L‟instrument est « joué par les filles ». Dans
l‟analyse sémique de ce lexème, on se rend compte que les premiers sèmes (S1 ; S2 ; S3) sont
plutôt généralisant. Ceci est dû au fait qu‟il existe plusieurs types d‟instruments musicaux
fait à base de ce matériel. Nous nous réservons de parler ici de sèmes génériques. Cette
appellation sied lorsque nous nous situons dans une analyse sémique contrastive. Par contre
lorsque le lexème est analysé isolement, le métalangage de la sémantique lui attribue
l‟appellation de sème généralisant39. Les derniers sèmes (S4 ; S6 ; S7) permettent d‟établir
des différences spécifiques, différences qui précisent : l‟appartenance à un genre (par les
femmes) ; la fonctionnalité ; etc. On peut aussi observer ce phénomène à travers l‟exemple
suivant :
9) düu-lἑkἑ n. Jeu entre jeunes de différents quartiers le soir, où
une personne désignée doit rattrapper et toucher une autre qui à son
tour doit toucher un autre joueur. (DITFA, 71D)

Il en va de même pour le deuxième exemple : 2) Kērēn. bouillie faite de boule de mil


délayée dans du lait ; peut aussi se faire en cuisant de la farine dans de l‟eau et en ajoutant
ensuite du lait. (DITFA, 151K). Il existe au total 420 adresses environs qui s‟arriment à ce
type de définition dans le corpus.

I-2-1-3-La définition littéraire, ou humoristique ou littéraire


Le dernier type de définition classique que propose QUEMADA est la définition
littéraire, ou humoristique ou polémique. Ce sont des définitions contextuelles et connotatives,
qui ne tiennent généralement pas compte du sens qu‟on assigne à ce lexème. Cela ne relève
pas de la norme standard. Dans le DITFA, l‟auteure n‟est pas restée classique dans ses
définitions. Elle se veut de plus en plus moderne. C‟est ce qui a fait dire à P.FABRE et C.
BAYLON (1989) lorsqu‟ils pensent que « les lexicographes, aujourd‟hui, essaient de
substituer à la définition classique, une description structurale. » Cette dernière est admise

39
Ibid.

47
comme « la traduction explicite de tous les traits sémantiques distinctifs qui définissent le mot
dans une structure donnée »40.
La définition nominale et la définition littéraire, ou humoristique ou politique ne
permettent pas à un apprenant et à un traducteur d‟opérer le bon choix du sens du lexème à
chercher. La définition logique est l‟unité d‟étude qui permet mieux de faire une description
structurale de la vedette d‟un dictionnaire.
I-2-2-Les classifications ultérieures
Ces définitions ont été quelques années plus tard améliorées par les travaux des
lexicologues et lexicographes (IGOR A. MEL‟ČUK / André CLAS / Alain
POLGUERE, (1995);HAMEK BRAHIM, (2012 : 242 )) qui ont fait une restructuration et des
ajustements sur la base des recherches de QUEMADA.

I-2-2-1-Définition phrastique
Lorsqu‟on parle de définition phrastique, l‟on désigne le plus souvent les énoncés
définitoires qui comprennent l‟adresse ou l‟entrée du dictionnaire. Dans ce cas, l‟énoncé que
le lexicographe propose au lecteur n‟est plus l‟équivalent ou le synonyme du mot-vedette
exprimé dans la langue d‟arrivée (LA) ; mais il s‟agit plutôt d‟une phrase dans laquelle le sens
du mot-vedette est suffisamment explicité. Observons la structuration de ce type de définition
à travers les exemples suivants :
10)Joo- kaʼraŋ n. grand tambour d’environ 1 m 80 de haut
entreposé chez le chef de village ou chef de quartier. Il est
décoré d’attributs féminins et coloré au giri kaolin rouge. Sorti
au moment de la fête du kaʼraŋ avant le mene il concerne tout le
village tupuri.( DITFA, 134J)
11)j ɗ m n. emplacement dans la cour de l’enclos o on allume
le feu en période fraiche, ce qui crée un tas de détritus. (DITFA,
134J)
12)kàlsɔŋ n. empr .fr. maillot de bain coloré que les danseurs
gurna revêtent pour les cérémonies. (DITFA, 143K)
13)titiri n. grand tambour de 2 m 50 environ de haut et 1 m de
diamètre coloré de kaolin rouge. Entreposé chez le chef de terre
ce dernier l’utilise pour annoncer les grands événements, décès
et guerres. (DITFA, 265T)
14) torla n. groupe de travail collectif qui réunit voisins et amis
{ l’instigation d’un paysan. En échange de leur main d’œuvre
dans son champ, il leur offrira repas et boisons et à leur
demande leur rendra le même service. (DITFA, 26T)

40
Avant-propos du DFC cité par FABRE ET BAYLON (1989)

48
Dans ces exemples ci-haut, on constate effectivement que la lexicographe propose aux
lecteurs des commentaires détaillés de toutes les informations qui rentrent dans la description
des entrées. Ce type de définition semble être à notre avis plus pédagogique et complet. Elle
permet au lecteur qui n‟a aucune maitrise de la culture tupuri d‟apprendre et comprendre ce
dont il s‟agit exactement. Selon Josette REY-DEBOVE, la principale vertu pédagogique de la
définition phrastique est « de constituer l‟unité minimum de communication, la phase, ce
qui facilite la compréhension. »41 Elle est donc une définition que l‟on préconise dans les
dictionnaires bilingues.

I-2-2-2-Définition par inclusion


La définition par inclusion consiste à définir l‟adresse en incluant la classe qu‟elle
désigne dans une autre plus large. Ce type de définition, comme la définition par équivalence,
est majoritairement utilisé par les lexicographes pour décrire les lexèmes. C‟est ce qui a fait
dire à GAUDIN F. et GUESPIN L. (2000 : 146) lorsqu‟ils pensent que : « La majeure partie
des disjonctions sont de type inclusif. Elles procèdent à la définition du mot-vedette en
incluant la classe qu‟il désigne dans une classe plus large ».
Prenons quelques exemples pour illustrer cette pensée :
15)Guwee n. herbe sp. (DITFA, 113G )
16)gay poo n. gay-jaw , gay de razzia. (DITFA, 97G)

Le sens de guwee inclus dans celui d‟herbe. Ce dernier est appelé le générique. En
effet, guwee est une espèce d‟herbe parmi tant d‟autres. Il en va de même pour l‟exemple 15).
Dans le même type de définition, après l‟équivalence générique, la suite de l‟énoncé
permet d‟indiquer ce qui constitue la spécificité du lexème. C‟est le cas par exemple des
entrées suivantes :
17)guɗɓuli n. 1. tronc d’arbre servant de banc. 2. n. arbre. (DITFA,
109G)
18)hosaɓe n. 1. Serpent de couleur verte. 2. n .herbes aquatiques sp.

Guɗɓuli a pour sème générique tronc d‟arbre, la suite vient préciser la spécificité de la
vedette avec le sème spécifique servant de banc. hosaɓe a pour équivalent générique serpent,
cette définition est ensuite nuancée par la présence de la précision de couleur verte qui
spécifie le serpent (hosaɓe) inclus dans un ensemble .Ces caractéristiques plus précises sont
appelées différences spécifiques. Ce type de définition est un héritage de la logique d‟Aristote.
Le spécifique est donc l‟unité de sens de rang inférieur et on parle pour l‟unité de sens de
41
REY-DEBOVE J., (1971 : 154)

49
rang supérieur de générique ou de genre. Dans le cas d‟espèce, ci-haut, ces termes peuvent
correspondre aux relations hyperonymiques et hyponymiques. Suivant une approche
sémique, l‟on peut se résumer ainsi qu‟il suit : Sèmes d‟hyperonyme (guɗɓuli, hosaɓe) ⊂
(inclus dans) sèmes d‟hyponyme (arbre, Serpent). Ce type de définition est plus fréquent dans
les dictionnaires monolingues. Mais, lorsqu‟un lexicographe bilingue en fait usage cela fait
problème. L‟usage ne connait pas l‟unité lexicale dans laquelle le définissant est inclus. Elle
abonde dan s le corpus avec un nombre important de 360 adresses environs.

I-2-2-3-Définition morphosémantique
Une DL est dit morphosémantique lorsqu‟elle fait appel aux relations morphologiques
et sémantiques existantes entre le mot-base et un dérivé. Elle est aussi comprise comme une
« définition qui consiste à décrire un mot ou un terme en explicitant sa morphologie à l‟aide
d‟une structure sémantiquement équivalente. » (VÉZINA R. et al, 2009 : 38). Dans les
dictionnaires bilingues généralement, l‟on utilise certaines expressions qui indiquent ce type
de définition. Ces expressions sont présentées dans la langue d‟arrivée. Prenons quelques
exemples qui illustrent mieux notre pensée :
19)gar{-carage n. variété de sorgho caudatum ; rouge, tardif, très
apprécié pour la fabrication de la bière de mil ; ses longues tiges
sont brulés pour faire du sel. (DITFA, 93G)
20) gar{-depuy n. variété de sorgho cautatum blanc, demi-hâtif.
(DITFA, 93G)
21)gar{-desee n. variété de sorgho caudatum à grain rouge, demi-
hâtif très cultivé. (DITFA, 94G)
22)gar{-duk. gi n. variété de sorgho caudatum à grain rouge et
blanc, demi-hâtif ; peut être mangé vert. (DITFA, 94G)
23)gay jaw n. variété de ‘gay42’ avec cinq pions dans chaque trou ;
le joueur ramasse les « pions »dans la cupule faisant face à celle
où il a fini sa propre série. (DITFA, 96G)
24)gay kerɛŋ n. variété de gay o chaque trou n’aurait que deux
« pions ». (DITFA, 97G)
25)gay may n. variété de gay ; dans lequel il y a 4 pions » dans
chaque trou. (DITFA, 97G)
26)gay naare n. variété de gay; avec cinq pions dans chaque trou.
(DITFA, 97G)
Dans la structure syntaxique de ces définitions, la lexicographe a eu pour habitude
d‟utiliser une métalangue appropriée «… action de… » ; « …fait de… » ; « personne qui… » ;

42
gay : jeu de ‘pions’ qu’on fait circuler dans des trous creusés au sol avec les graines du ‘fɛw (arbre sp. on
fabrique des pirogues et mortiers avec son bois ; avec ses grosses graines rouge foncé, le chef de Daawa
fait le ‘halge’ de ‘lim’ (divination).Afzeliaafricana.)ʼ, ou avec des petits cailloux, ou des tessons de poterie,
ou des fragments de calebasse.

50
« …espèce de… » ; « variété de… ». Cette définition est généralement utilisée pour traduire
les mots dérivés ayant des sèmes génériques. Dans les exemples 19) ; 20) ; 21) ; 22), les
termes-objets 43 garà-carage ; garà-depuy ; garà-desee ; garà-duk. giont en commun le mot-
vedette garà (désigne le mil rouge en général et considéré ici comme l’archilexème de ces
lexèmes ) qui est présent dans tous les autres lexies. De même que dans les exemples 23) ;
24) ; 25) ; 26) ces entrées se regroupent autour du champ notionnel de gay (jeu).
Parfois, la paraphrase morphosémantique n‟est pas suffisante pour comprendre le
sémantisme du lexème mise en exergue. L‟on peut le constater à travers les exemples
suivants :
27)geɓel n. plante sp44. (DITFA, 98G)
28)geɗer n. rat sp. (DITAFA, 99)
29)geljew n. Oiseau sp. de plumage turquoise. (DITFA, 102)

Cette définition que nous propose RUELLAND dans le DITFA ne permet pas à
l‟usager du dictionnaire de reconnaitre l‟arbre (pour l‟exemple 27) et l‟animal (pour les
exemples 28 et 29).
Delà, la lexicographe est souvent contrainte de joindre quelques éclaircissements
pertinents et indispensables dans la définition de chaque lexie. C‟est le cas des exemples 14) ;
15) ; 16), qui renferment respectivement des sèmes spécifiques (avec cinq « pions » ;
deux « pions » ; a 4 « pions »). En effet, il existe une multitude de jeux aux pions. Dans cette
multitude, tout lexicographe doit accompagner chaque article des gloses qui permettront à
l‟usager d‟identifier chaque lexie dans sa particularité. Le corpus nous donne un répertoire de
600 adresses environ où l‟auteure a fait de la définition moorphosémantique.

I-2-2-4-Définition par équivalences ou le terme à terme


La définition par équivalence fait recours le plus souvent à des synonymes, c‟est-à-dire
qu‟elle propose les équivalences. Une lexie L1 est donc définie en rapport à une autre lexie L2.
Les sèmes de L1 se retrouvent aussi dans L2 : Ce sont des sèmes génériques basés sur la
similarité des traits sémantiques.
Le procédé le plus simple, et qui n‟est pas sans évoquer le dictionnaire bilingue,
consiste à mettre en relation un mot et son synonyme. Il s‟agit alors de définitions
par équivalences. Cette technique a été souvent critiquée, surtout après les travaux
des synonymistes qui montraient qu‟il n‟y a jamais équivalence totale entre deux
45
signes mais elle reste toujours indispensable.

43
Selon une conception greimassienne (GREIMAS, 1966), le terme-objet est sans doute un lexème
44
Sp : espèce
45
GAUDIN F. & GUESPIN L. ,(2000 :144)

51
Ce type de définition lexicographique s‟avère être le plus répandu et même plus
présent dans notre corpus à cause de sa simplicité. Dans notre corpus, nous avons répertorié
près de 1750 entrées qui s‟arriment à ce type de définition. Mais pour un dictionnaire bilingue
au service d‟un traducteur et d‟un apprenant, elle nous semble être la moins indiquée, parce
que ne permet pas d‟établir de bonnes équivalences interlangues tupuri-français. Selon le
principe de non-tautologie (PNT), la définition ne doit pas être une paraphrase du terme qui
désigne le concept; elle ne peut se résumer à des termes identiques ou équivalents qui ne
disent rien de plus que le terme défini. On peut constater que ce principe s‟applique plus
souvent aux dictionnaires monolingues, mais dans un contexte bilingue, il est aussi important
d‟outiller chaque entrée d‟une glose dans la langue d‟arrivée pour permettre aux usagers de
mieux saisir son sémantisme. Ce phénomène est remarquable à travers les exemples
suivants :
30)Faŋ ↷ n. 1. placenta 2. cordon ombilical. (DITFA, 78F)
31)Fultoo ↷ n. vessie.(DITFA, 87F)
32)Fuygi ↷ n. 1. ongle. 2. griffe. (DITFA, 88F)

Lorsqu‟on observe la structure de cette définition, on comprend qu‟il s‟agit de donner


des mots correspondant aux entrées. Il n‟existe pas ici de glose définitionnelle. Dans ce
dictionnaire ne proposant qu‟une équivalence terme à terme pour certaines entrées, l‟usager
n‟a accès qu‟au résultat, qu‟à la phase finale du processus conceptuel ; il lui manque, en
quelque sorte, une étape. Comme on peut le remarquer, faŋ a pour équivalents français :1.
Placenta 2. cordon ombilical; fultoo a pour équivalent français « vessie » et enfin fuy gi
présente deux équivalents français : 1. ongle. 2. griffe.
Dans l‟exemple 11), il est important de préciser qu‟il y‟a problème dans le choix de la
lexie et la présentation de ses équivalences. Il est reconnu que les principales fonctions de la
définition sont de décrire les concepts, de les délimiter, de les distinguer entre eux et d‟établir
les relations qui se répètent dans le système conceptuel. Les principes qui découlent de ces
fonctions exigent, d‟une part, que la définition énonce avec précision les caractères essentiels
d‟un concept et, d‟autre part, qu‟elle soit adéquate, c‟est-à-dire qu‟elle ne s‟applique qu‟au
concept défini et à lui seul. C‟est en fonction du principe d‟adéquation et d‟explicitation (PAE)
qu‟une définition doit être complète, ni trop étroite ni trop large. Ce lexème est ambigu et
demande une analyse minutieuse dans le processus de sa désambiguïsation. En effet, dans la
lexie fuygi on peut ressortir en plus des sèmes existants, le sème de « bouger ». Pour relever
l‟ambiguïté, il faut par conséquent préciser l‟environnement lexical. On aura donc fuy gi-
(dɔɔ= main) pour « ongle »et fuy gi pour « bouger ».

52
II-Mode définitoire ou formes de la définiton et modes langagiers dans la
définiton des lexies
II-1-Mode définitoire formes de la définiton
Dans cette sous partie qui traite du mode définitoire et de forme de définition des
lexies, nous envisageons le traitement de ces deux aspects sous un même point. Car il y a en
effet interdépendance forte entre le mode définitoire et la forme de la définition. Plus
encore, le premier constitue le pendant conceptuel du second, structure concrète de la
définition.
La définition peut prendre plusieurs formes, qui mettent en œuvre des types d'éléments
définitoires distincts. Certaines typologies de définitions (mentionnées ci-haut), comme celle
de SAGERJ. (1990)46, sont en grande partie basées sur cet aspect formel de la définition. Les
modes définitoires – partant, leurs formes respectives – peuvent être répartis en trois
catégories : les modes liés aux concepts et aux systèmes auxquels ils participent ; les modes
ancrés dans la réalité ; et les modes qui s'inscrivent dans une perspective linguistique,
langagière.

II-1-1-Mode conceptuel : par l'intension ou en compréhension


Le mode définitoire reflétant la structure conceptuelle du défini doit avoir
obligatoirement pour forme concrète, une définition qui énumère les caractères, nécessaires et
suffisants, décrits en la langue cible (qui est dans le cas d‟espèce le français), pour assurer et
faciliter la compréhension de son sémantisme. C‟est la définition par l'intension ou en
compréhension, (DEPECKER, 2000 : 94), ou encore définition par inclusion (REY-DEBOVE
J., 1971) ou définition spécifique (FELBER, 1987). Par exemple :
33)Kipeen. bâton de semailles en bois d’environ 50 cm, la ,sic-
manche formant angle, utilisé sur les sols sableux pour la
semence du mil, des arachides, des poids de terre. (DITFA, 154K)
34) Kurufin.coll. sorgho estimé d’une variété très sucrée » cultivé
aux alentours de l’enclos. Le jour de la moisson on fait cuire les
épis entiers { l’eau. Après séchage, les graines sont pilées et la
farine sert à confectionner le maakoo47. (DITFA, 163K)

46
SAGER J. (1990 : 42) dans A practical course in terminology processing parle de methods of definition
(méthodes définitoires).
47
Le maakoo est une pâte faite de farine de kurufi ou de doŋloŋ (variété de mil) cueillis frais, bouillis puis
séchés et ensuite pilés et réduits en farine

53
35) Niini n. meule composée d’une pierre encastrée dans une
construction en poterie que chaque femme a dans sa case pour
moudre les grains âpres les avoir pilés. (DITFA, 203)
36)dügüt.g n. plante sauvage dont les graines couleur de sable
sont mangées en cas de famine. (DITFA, 70D)
Dans ces exemples qui illustrent ce mode définitoire, il faut remarquer qu‟il y‟a la
présence d‟une partie qui donne une perception plus globale du sens des différentes lexies.
C‟est la partie colorée en vert dans la microstructure de chaque entrée dans l‟exemple. Le
concept super ordonné et plus global et suffisant. Dans la structure hiérarchique des
constituants de la définition, le générique se trouve proche du défini comme les démontrent
les exemples ci-haut mentionnés. La partie colorée en cyan représente les sèmes spécifiques et
/ou différenciateurs que l‟on appelle aussi caractères. Ces éléments de différenciation
permettent de comprendre profondément les contours sémantiques d‟un lexème. Il est aussi à
noter que le mode conceptuel (par intention ou par compréhension) propose une description
analytique dans la définition d‟une lexie.
Toutesfois, il existe des entrées qui ne nécessitent pas ce mode définitoire. C‟est le
cas de la traduction terme à terme dans les dictionnaires comme nous l‟avons démontré en
amont dans le type de définition par équivalence. La définition par intention, de part sa facilité
dans la compréhension et l‟analyse poussée du sens des vedettes, est donc à notre avis le
mode model et l‟idéal à proposer pour la structuration de la microstructure des dictionnaires
bilingues. En effet, l‟on ne devrait pas seulement attribuer des équivalences lexicales (terme à
terme) dans les dictionnaires bilingues comme généralement rependu, mais aussi et surtout,
accompagner chaque entrée d‟une description conceptuelle ou sémantique pour les spécifier
afin de rendre l‟ouvrage pratique aux usagers (apprenants et traducteurs).

II-1-2-Mode référentiel en extension


Dun point de vue sémantique, l‟extension désigne l‟ensemble des champs notionnels
d‟une lexie. Pour DEPECKER (2000 : 94), elle « représente l‟ensemble des objets auxquels
s‟applique [un] concept. » Autrement dit, la définition en extension ou dénotative (SAGER,
1990 :45) ou encore définition générique (FELBER, 1987), s‟explique par l‟énumération des
éléments qui se retrouvent au même niveau dans la description de la vedette. Dans le corpus
qui fait l‟objet de notre étude, ce mode de définition lexicographique n‟est pas présent. En
effet, elle n‟explique pas vraiment en quoi consiste le concept ou ce que veut véritablement
signifier une lexie, ce qui la caractérise, mais en propose simplement les référents. Ce mode
définitoire n‟est donc pas efficace à notre avis.

54
II-2-Modes langagiers dans la définition : le phénomène de renvoi
sémantique
Il s‟agit des mots utilisés pour servir de description des vedettes des dictionnaires
bilingues. Il existe des modes définitoires en usage dans le DITFA : par renvoi à d‟autres
unités lexicales (ce mode peut être subdivisé suivant la forme que prennent les définitions
(synonyme, antonyme, équivalence)).
Lorsque nous parlons de mode définitoire par renvoi, nous faisons allusion aux
renvois soit à un synonyme, soit à un antonyme ou encore à un équivalent de sens proche.

II-2-1-Renvoi synonymique
La définition par renvoi synonymique ou définition synonymique (Robert MARTIN,
1992 ; CLAS, 1985) est couramment pratiquée dans les dictionnaires bilingues de langue.
Elle permet d'évoquer le sens d'une lexie en proposant une autre au sens très proche. La
synonymie en tant que mode définitoire peut cependant être considérée comme une autre
forme possible de la définition en compréhension. Ainsi, Josette REY-DEBOVE (1971 : 232)
assigne au synonyme une valeur d'incluant particulier. Pour elle, il s'agit du générique le plus
proche et le plus spécifique qui puisse exister pour un concept : « Le synonyme est le dernier
incluant de la chaîne, si étroit qu'il n'inclut plus que le défini auquel il s'identifie. ». On peut le
constater à travers ces quelques exemples qui illustrent ce mode définitoire :
37)wɛsɛk.ge v.tr.p. détruire en émiettant, réduire en lambeaux
pour rendre inutile. syn. wɛs.ge(DITFA, 282W)
38)wéela n. 1. Graine dans le noyau du kↄlga48fruit du palmier
doum ; comestible quand il est frais. 2.syn. de méela.(DITFA,
280W)
39) Wii.gi.dↄo menacer du doigt. Syn.hir.gi.do. (DITFA, 282)
40)Fir-fii n. syn. fiiri-bii. (DITFA, 85F)
Le renvoi synonymique consiste à travers ces exemples à faire un rapprochement entre
la lexie vedette et celle proposée comme synonyme : wɛsɛk.ge wɛs.ge ; wéela de méela,
Wii.gi.dↄo hir.gi.do. Dans la microstructure de la définition lexicographique, ce mode
définitoire est toujours précédé de l‟abréviation « syn » qui indique qu‟il s‟agit du synonyme
du défini. Dans ces exemples, on se rend compte qu‟il y‟a plus de rapprochement formel que
de sens. En effet, ces lexies sont des variantes orthographiques de la lexie vedette au lieu
d‟être son synonyme. Ce sont des particularités de prononciation qui dépendent des locuteurs

48
kↄlga est l‟équivalent français du fruit du rônier ou fruit du palmier doum.

55
et des dialectes. Dans l‟exemple 39) on constate que le lexème proposé sous forme de
définition n‟indique aucune description du de la lexie vedette. La lexicographe propose
sèchement le synonyme de fir-fii = n. syn. fiiri-bii. Non seulement l‟équivalent en français
est absent mais aussi et surtout, elle indique aucune analyse de l‟entrée.

II-2-2-Renvoi antonymique
Il est bien vrai qu‟il existe des lexicographes qui proposent aux lexies vedettes des
lexèmes de sens opposés pour les définir, mais il faut toutefois reconnaitre qu‟une définition
ne peut en principe pas être négative49, mais il existe des cas où la négation est indispensable,
notamment celui de la définition antonymique (MARTIN, 1992) ou par opposition–
également appelée définition par contraste ou définition négative (CLAS, 1985) –, qui peut
prendre différentes formes. Dans notre corpus ce mode définitoire n'est pas présent. Or, une
chose existe à cause de son contraire (GREIMAS, 1966) : D‟où la nécessité même de définir.

II-2-3-Renvoi à un équivalent
Le dernier mode définitoire est celui de la définition par renvoi à un équivalent. Ce
dictionnaire qui fait l‟objet de notre étude est d‟un type particulier puisqu'il est bilingue,
propose en guise de définition un ou plusieurs équivalents appartenant à un autre système de
signes linguistiques (du tupuri vers le français). SAGER (1990 :40) parle de word-word
definition. Le principe est le même que celui de la définition par équivalence et démontré en
amont. Elle se fait dans des langues différentes. En fait, cette "définition" – qui n'en est pas
vraiment une – est tautologique à l'extrême, puisque si l'on prend la même langue des deux
côtés, il y a fort à parier que l'on se retrouve avec le même mot de part et d'autre de l'équation
définitoire. L‟exemple 39) est illustratif pour ce mode définitoire. Lorsqu‟on est en contexte
bilingue, la définition est normalement proposée dans la langue d‟arrivée pour faciliter sa
compréhension. Le contraire de cette pratique nous amène tout droit à un phénomène de
tautologie, qui, ne permet pas la désambiguïsation de la lexie vedette mis en exergue. Pour
plus de preuves prenons ces exemples :
41) wië.giit. de wii.gi (DITFA, 281W)
42) woë.ge it. wooge ( DITFA, 282W)

Dans ces exemples, les unites lexicales «wië.gi, woë.ge » ne sont pas du tout définies.
Ces équivalents auxquelles elles renvoient ne permettent pas de les spécifier. Ces renvois à

49
Si ontologiquement parlant, ce principe constitue une évidence, puisqu‟on cherche à travers la définition, à
affirmer et non à nier l‟existence d‟un lexème ou du sens de celui-ci, il n‟est pas pour autant, à notre
connaissance, jamais expliqué.

56
des lexèmes morphologiquement similaires sont aussi considérables dans le corpus et peuvent
être assimilés à la définition par équivalence.

III-Analyse et classement des sens dans la structure définitoire de quelques


unités lexicales tupuri-français dans le DITFA
L‟analyse de la microstructure de la définition des concepts dans la DIFTA exige que
l‟on passe par les points suivants que propose IGOR A. et al (1995 :72) pour une description
minutieuse des lexies : La présentation de la définition et son concept fondamental (actant
sémantique); l‟explicitation des règles d‟élaboration et critères de formulation de la DL.

III-1-Présentation de la définition lexicographique


Formellement, la définition lexicographique propose une présentation du sens, ou
signifié (dénotationnel) de L. Le sens dénotationnel reçoit une autre appellation sous le nom
de sens situationnel ou sens propositionnel50 . Comme nous l‟avions mentionné en amont, la
définition lexicographique se trouve être le pivot et même le noyau central de l‟adresse du
dictionnaire. Il est incontournable dans la description de la microstructure de la vedette du
dictionnaire. Pour traiter en profondeur le régime syntaxique, la cooccurrence lexicale et la
zone phraséologique de L, le lexicographe est contraint de passer nécessairement par la balise
de ses éléments définitoires pour l‟extraction de ses sens. Elle apparait à cet effet comme une
représentation du sens (MEL'CUK 1988 : 52) de L s‟écrivant sous la forme d‟un réseau
sémantique.
Pour tout dire, la définition des entrées dans le dictionnaire qui nous sert de corpus
peut se résumer sous la forme de l‟expression mathématique suivante :

Où , le défini, est la lexie vedette incluse dans ce que IGOR et al (1995) appellent la

forme propositionnelle (expression à variables), et , le définissant, est une description du

sens de L, faite dans un métalangage lexicographique en français (puisqu‟elle est la langue


cible. Pour s‟en convaincre, prenons les exemples suivants :
43) Jewlɛɛre n. empr. peul. case d’entrée de l’enclos de certains
chefs, empruntée aux peuls. (DITFA, 134J)
44) ɓɔ .gë māy t bïi céremonie d‟intégration chez son mari de la
nouvelle épouse. (DITFA, 45Ɓ)

50
Idem

57
45) f r y h u. l cadeaux en biens (bétail) ou en argent au moment
du décès d’une femme, versés par son mari aux parents de son
épouse ; au moment du décès d’un homme, versés par son père
et aux oncles maternels du défunt. Ces prestations sont censées
mainténir les relations entre alliés. (DITFA, 78F)
Dans ces exemples, les parties colorées en vert représentent , les définis. Les

parties colorées en cyan sont les définissants . Jewlɛɛre, ɓɔ .gë māy t bïi et f r y h u. l

sont les définis et « case d’entrée de l’enclos de certains chefs, empruntée aux peuls ;

céremonie d’intégration chez son mari de la nouvelle épouse et cadeaux en biens (bétail)
ou en argent au moment du décès d’une femme, versés par son mari aux parents de son
épouse ; au moment du décès d’un homme, versés par son père et aux oncles maternels
du défunt. Ces prestations sont censées mainténir les relations entre alliés » representent

les définissants .
Au total on aura environ 400 adresses qui s‟allient à ce métalangage sur les 3000 que
compte notre corpus.

III-1-1-Concept fondamental de la définition lexicographique : actant sémantique

Dans la description de la définition lexicographique, le concept fondamental et


incontournable est à notre avis l‟actant sémantique51. Pour le définir ce concept, nous aurons
recours à d‟autres concepts à savoir : prédicat sémantique, argument sémantique et
argument de prédicat sémantique (LEPAGE, 1991 :115 ; LYONS, 1977 : 147). Un prédicat
pris comme terme logico-sémantique :
Est un sens qui a des « trous » pour recevoir d'autres sens; un sens prédicatif est un
sens « liant » - il réunit d'autres sens en des configurations sémantiques tout comme
un tube de jonction réunit les pôles d'une tente pour former le squelette porteur de la
tente. Les prédicats sémantiques désignent des actions, des événements, des
processus, des états, des propriétés, des relations, etc. - en un mot, des faits qui
52
impliquent nécessairement des participants.

51
Ce concept est emprunté à MEL‟CUK I. A (1995), conçue pour servir de métalangage dans la description du
dictionnaire explicatif et combinatoire(DEC).
52
MEL‟ČUK et al, 1995 :76

58
Une équation s‟impose pour expliciter la compréhension de ces concepts : Prenons à
cet effet, PSem (pour prédicat sémantique) et admettons qu‟il représente un fait ayant par
exemple des arguments (A) de 1 jusqu‟à x-argument. On écrira cette équation comme suit :

PSem *𝐀𝟏 + 𝐀𝟐 + 𝐀𝟑; … 𝐀𝐱+

FIGURE 2: ÉQUATION D'UN PRÉDICAT SÉMANTIQUE

Citons quelques exemples illustratifs pour l‟application de notre équation


définitionnelle:
46) wii.gi v.tr. dire de façon exigeante, demander de quelqu’un,
exiger en paroles. (DITFA, 280W)
47) waayn. 1. femme. 2. épouse. 3. Reine aux jeux de cartes. (DITFA,
276W)
48) leɁ.ge naa dormir (tomber/ de sommeil). (DITFA, 172L)
Dans l‟exemple (34), wii.gi (demander) est un prédicat à trois arguments : quelqu’un
(A1) demande quelque chose (A2) à quelqu’un (A 3). Dans l‟exemple (35), waay (femme ou
épouse) est un prédicat à deux arguments : quelqu’une (A1) épouse de quelqu’un (A2) .Et en
fin, dans l‟exemple (36), le sens deleɁ.ge naa (dormir) est un prédicat à un seul argument. On
aura donc simplement : quelqu’un (A2) dort. Il faut noter toutes fois qu‟un Asem de L n‟est
pas forcement présent à la surface dans sa définition. Il existe parfois des définitions de L qui
emmènent à faire usage du non-dit (c‟est-à-dire la présupposition) ou à analyser la structure
profonde.
Lorsqu‟en logique, LEPAGE (1991) parle des concepts prédicat et de ses arguments,
en linguistique et, plus précisément en sémantique et lexicologie, MEL‟CUK (1995) propose
plutôt les concepts de sens prédicatifs et actants sémantiques (Asem). Ce dernier reste donc le
concept intéressant et même primordial dans la description des L à sens prédicatif. On
comprend donc aisément que l’actant sémantique est « une expression qui correspond à un
argument du prédicat »53 et dans sa structuration, « cette expression est soit un sens, soit une
variable dans la définition »54.

53
idem
54
Idem

59
Nous constatons dans notre corpus que toutes les lexies n‟ont pas d‟Asem. Nous ne
retrouvons d‟Asem que dans la définition des lexies dont le sens est un prédicat qui possèdent
des Asem. C‟est le cas des lexies wii.gi, waay, leɁ.ge naa .Chaque lexème est porteur d‟au
moins un prédicat sémantique en plus de l‟argument sémantique. Toutes fois, il existe dans
notre corpus des lexies qui n‟ont pas d‟Asem conformément à la définition que propose la
lexicographe. C‟est le cas par exemple des lexèmes tels que (cités ci-haut) : Jewlɛɛre n. empr.
peul. Case d’entrée de l’enclos de certains chefs, empruntée aux peuls. (DITFA,
134J) ; Faŋ n. 1. Placenta 2. Cordon ombilical. (DITFA, 78F) ; Fultoo n. vessie.
(DITFA, 87F) ; Fuygi n. 1. ongle. 2. griffe. (DITFA, 88F). Or, les lexies de la langue
française, langue dans laquelle la définition dans la DITFA nous est présentée regorgent une
panoplie d‟Asem. En effet, les Asem ne se retrouvent pas uniquement dans la définition de la
sémantique verbale, l‟Asem n‟est pas le complément qu‟admet le verbe. Mais, les verbes qui
admettent le complément facilitent l‟extraction des Asem. Les lexèmes des autres classes de
la langue (noms, adjectifs, adverbes, etc.) admettent aussi dans certains cas des Asem.

III-1-2-Critère de formulation de la définition lexicographique bilingue : la pertinence


linguistique
Pour garantir la bonne formulation des définitions lexicographiques, quelques critères
ont étés développés. Ces critères sont en conformité aux règles d‟élaboration sur lesquelles
nous allons revenir dans la suite de notre travail. Lorsqu‟une définition ne répond pas au
moins à une des règles établies par MEL‟ČUK (1995), on dit qu‟elle n‟est pas formellement
correcte. Elle est dite correcte lorsqu‟elle remplit une condition nécessaire afin d‟être
efficacement utilisable. Nous nous inspirons ici de la théorie du dictionnaire explicatif et
combinatoire de MEL‟ČUK et al (1995 :96).
Le critère de pertinence linguistique se pose sous la forme suivante :
Désignons par (sigma) une composante potentielle pour la définition de la lexie L ; elle
reflète une propriété non constitutive, mais intrinsèque du référent de L. Une condition
d‟inclusion de la définition s‟impose. On dira avec MEL‟ČUK55 que : « La définition de L
doit inclure la composante si et seulement on peut trouver dans la langue étudiée une autre
lexie L1 qui est formellement liée à L et dont la définition comprend de façon discutable. »

55
Ibidem

60
La lexie L1 qui est susceptible d‟étayer la pertinence linguistique de la composante
potentielle dans la définition de L peut être liée à L d'une des trois façons
suivantes :
 Premièrement, L1 est une lexie faisant partie du même vocable que L (L1, et L se
trouvent dans une relation de polysémie);
 Deuxièmement, L1 est une lexie dérivée de L (L1 et L se trouvent dans une relation de
dérivation morphologique);
 Troisièmement, L1 est un phrasème incluant L (phraséologique).
Dans les trois cas ci-dessus, il s‟agit pour nous de vérifier dans notre corpus les liens
sémantiques explicites entre deux lexies perçues comme sémantiquement apparentées (pont
sémantique). Prenons un exemple illustratif pour concrétiser notre argumentation :
49) Saŋgu n. 1. nom donné à toute plante utilisée comme
médicament. 2. touffe de plantes cultivée par le chef de famille
plantée { gauche de l’entrée de sa maison et qu’il utilise comme
« contre poison ». 3. poison (DITFA, 236S)

Dans cet exemple de lexème polysémique, on aura :


L = saŋgu 1 « nom donné à toute plante utilisée comme médicament » ;
= la composante « utilisée comme médicament » ;
L1 = et saŋgu 3 « poison » fait à base de certaines plantes.
L‟existence, dans la langue tupuri, de saŋgu 3 démontrela pertinence linguistique de
la composante = qui est « utilisée comme médicament » dans la définition de saŋgu 1
En effet, dans le lien sémantique entre saŋgu 3 et saŋgu 1 est absolument évident
pour un francophone. Selon la règle de pont sémantique, ce lien doit être explicitement
indiqué dans la définition desaŋgu 3 par comparaison avecsaŋgu 1, comme il faut en plus
spécifier la base de la comparaison, cela nous amène à la composante en question.

III-2-Structure et contenu de la définition lexicographique bilingue


Dans la structuration du contenu de la définition lexicographique, il existe divers
problèmes généraux que soulève la définition lexicographique bilingue. Dans le cadre de
notre travail, nous ne retiendrons que les deux suivants qui sont sans doute les deux
problèmes les plus présents : Il s‟agit premièrement de la hiérarchisation des composantes
sémantiques, et deuxièmement, de l‟ordonnancement des composantes sémantiques
(MEL‟CUK et al, 1995 : 102).

61
III-2-1-Hiérarchisation des composantes sémantiques dans la définition lexicographique
bilingue tupuri-français
La structure hiérarchique d‟une définition lexicographique bilingue dans la DITFA, se
présente comme un énoncé homogène, constitué des lexies traduites en français munies de
numéros lexicaux distinctifs. Chacun des numéros correspond à une signification particulière.
Il s‟agit de la structuration de la définition des différentes significations qu‟on assigne à une
lexie car « la tâche du lexicographe est à la fois de classer les définitions d‟un mot et établir
entre elles une hiérarchie »56. Elle va du sens propre (dénotation) de la lexie à son sens figuré
(connotation). Cette structure est donc composée de plusieurs couches ayant des
comportements et propriétés différents selon qu‟on va d‟une composante à une autre. IGOR
MEL‟ČUK et al (1995 :103) distinguent six types de composantes sémantiques : La
composante ordinaire ; la composante générique ; la composante faible ; la composante
optionnelle ; les contraintes sur les variables ; et la partie présupositionnelle. Les deux
derniers sont des composantes descriptives qui rendent compte de la structure sémantique
d‟un dictionnaire monolingue, or nous nous situons ici dans une perspective bilingue. Par
conséquent nous n‟en ferons pas usage.

III-2-1-1 Composante ordinaire


Elle est la composante qui est rependue dans le Dictionnaire tupuri-français-anglais
de Suzanne RUELLAND. « Une définition comprenant la composante sémantique hérite
automatiquement TOUTES les propriétés sémantiques et syntaxiques de » 57 et ces
composantes sont fondamentales, c‟est-à-dire, qui est conforme à l'ordre normal des choses;
qui est, se fait, arrive d'une façon habituelle (isotopique) et sans condition particulière dans la
structure définitionnelle du dictionnaire. Reprenons les exemples suivants :
Kurufi n. coll. sorgho estimé d’une variété très sucrée » cultivé aux
alentours de l’enclos. Le jour de la moisson on fait cuire les épis entiers {
l’eau. Après séchage, les graines sont pilées et la farine sert { confectionner
le maakoo. (DITFA, 163K)
gar{-carage n. Variété de sorgho caudatum ; rouge, tardif, très
apprécié pour la fabrication de la bière de mil ; ses longues tiges sont
brulés pour faire du sel. (DITFA, 93G)
L‟exemple ci-haut démontre le fait qu‟au niveau sémantique, gar{-carage ne peut se
définir comme « variété de sorgho » non « sucrée », étant donné que Kurufi se définit comme

56
MATORE G., Histoire des dictionnaires français, cité par BAYLON C. & FABRE P.,(1989), La sémantique
Fernand Nathan p.238
57
Ibidem

62
« sorgho estimé d‟une variété très « sucrée » » ; la substitution de cette dernière définition à la
composante « sorgho » dans la définition de gar{-carage produirait une contradiction
évidente ( elle doit se définir par « sorgho » avec une différenciation de sème de couleur
«rouge »).

III-2--1-2-Composante générique
Lorsqu‟on parle de la composante générique, on fait allusion à la définition de la lexie
L référant au genre prochain (au sens logique) auquel appartient le signifié de L. Dans les
deux exemples précédente, Kurufi ; gar{-carage sont sans doute des sorghos, et la
composante générique dans leur définition est par conséquent « sorgho ». Cette composante
doit être choisie de façon à assurer pour L la description de la cooccurrence lexicale libre de L.

III-2--1-3-Composante faible
Il existe des composantes définitoires qui souvent s‟estompent dans des conditions
très précises et détaillés ; ce sont des composantes faibles. C‟est le cas par exemple de la
définition de la lexie Düŋdūlüŋ 58 qui est un « instrument de musique fait d‟une courge
oblongue évidée frappée contre la cuisse, joué par les filles ». On remarque dans cette
définition, une composante faible, qui est la composante « jouée par les filles » (sexe
féminin). C‟est la raison pour laquelle dans la structure syntaxique de la définition, cette
composante apparait en dernière position.

III-2-1-4-Composante optionnelle :
Dans l‟exemple ci-dessous, la composante «dans du lait » dans la définition de la lexie
Kērē est optionnelle. En général, Kērē (bouillie) implique par défaut, la composante « lait ».
Cependant, elle n‟est pas obligatoire : En effet, il existe des bouillies faites sans « lait ».
Kērē59n. bouillie faite de boule de mil délayée dans du lait ; peut
aussi se faire en cuisant de la farine dans de l’eau et en ajoutant
ensuite du lait.
Pour mettre en exergue ce fait, l‟on marque la composante «dans du lait » comme
optionnelle, variable ou instable.

58
Op.cit.
59
OP.Cit

63
III-2-2-Disposition des composantes sémantiques dans la définition lexicographique
bilingue tupuri-français
Généralement, dans une définition, l‟ordre des composantes sémantiques est déterminé
par leur nature et celle des liens avec d‟autres composantes. Cependant, il existe des cas où,
au premier abord, l‟ordonnancement des composantes semble arbitraire. La décision voulue et
souhaitée est donc apportée par la règle d‟ordonnancement par pertinence sémantique, qui
fixe l‟ordre des composantes dans des cas de ce type.
Pour le traitement de la disposition des composantes sémantiques dans la définition
lexicographique dictionnaire tupuri-français, nous utiliserons la règle d’ordonnancement par
60
pertinence sémantique . Cette dernière stipule : « La composante exprimant une
caractérisation 1 sémantiquement plus pertinente qu‟une autre caractérisation 2doit précéder
la composante exprimant 3. »

Appliquons ce principe à la définition d‟une entrée dictionnairique comme :


50) gↄlↄgɛ n. fesse, postérieur. (DITFA, 107G)
Dans cet exemple, la lexie L exprime la caractérisation 1 (sigma) « fesse »

sémantiquement plus pertinente que la caractérisation 2 qui à son tour doit précéder la

composante expriment 3 , qui , dans cette définition est absente. En effet, dans la définition
de la lexie L, il manque une composante sémantique. La caractéristique « fesse » peut se
perdre lors d‟une métaphorisation de la lexie. Ainsi, dans cette phrase par exemple :
«WELBA naa ni ɓaara gↄlↄge taw »
// Welba+ nom propre /sortir+ passée composé / chez / eux / dernier /absolument //
WELBA est sorti dernier de sa salle.
Lorsqu‟on observe l‟emploi de la lexie L dans cette phrase, perd son sémantisme de
« fesse » pour donner place à la composante « dernier ». Il n‟y a donc pas d‟inconvénient à
définir aussi la lexie « gↄlↄgɛ» comme « adj. Dernier ». Il s‟ensuit que la définition de la lexie
devrait prendre en considération cette composante définitionnelle pour respecter le principe
énoncé.
Il faut aussi bien noter que, dans un réseau sémantique, il n‟est évidemment pas
possible d‟utiliser cette règle à bon escient, car les éléments d‟un réseau ne sont pas soumis à
l‟ordre linéaire. Et, dans la représentation sémantique véritable, il faudra introduire une
technique appropriée explicite pour marquer le degré de pertinence sémantique.

60
MEL’CUK et al (1995 : 106)

64
Dans la définition lexicographique, l‟analyse du contenu61 des unités lexicales permet
de dégager les domaines et dimensions62 (généralement séparés du reste de la définition mais
incontournable pour une bonne définition), les définisseurs initiaux (un incluant ou un faux
incluant) et un ou des caractères (essentiels ou distinctifs)63.

III-2-2-1-Le définisseur initial d’une lexie : les incluants


Le définisseur initial peut être compris comme étant « l‟élément lexical ou le groupe
d‟éléments lexicaux par lequel débute, en principe, une définition et qui en constitue le point
d‟ancrage. » 64 . Ces mots ou expressions servent à introduire une définition dans la
microstructure d‟un dictionnaire bilingue. Ce métalangage de la définition permet à l‟usager
de l‟ouvrage lexicographique d‟identifier la zone de définition parmi tant d‟autres (zone
phonologique, zone syntaxique, zone d‟exemple etc.). Le définisseur initial permet également
de situer la vedette à définir par rapport aux autres dans un système. Dans l‟étude faite, nous
avons pouvons regrouper les définisseurs initiaux en deux grandes classe : les incluants et les
faux incluants (VEZINA R., 2009 et al ; SEPPÄLÄ S., 2004).Dans cette sous partie nous
n‟allons développer que les vrais incluants, les faux incluants ferons l‟objet d‟une analyse
dans le chapitre V.
On parle d’incluant(ou vrai incluant) lorsque dans la définition d‟un lexème, le terme
qui rend cette définition possible (définisseur initial) établit une relation dite générique.
Autrement dit, l‟incluant constitue pour l‟entrée du dictionnaire un terme qui a un contenue
sémantique plus général, englobant que la lexie vedette. Observons par exemple les cas
suivants :

51)Koo-joo n.plante épineuse qui donne une sève blanche utilisée


(en incision ) contre le paludisme. (DITFA, 156K)
52)Lèelén.Chant de femme, composé de couplets chantés par une
femme et des refrains repris par plusieurs femmes. (DITFA,
172L)

On ne peut (efficacement) définir quelque chose sans faire de rapprochement avec


autre chose de (supposément) connu, « Car la chaise N'EST PAS DÉFINIE par « pour
s'asseoir, sur pieds, pour une personne, avec dossier » s'il n'y figure pas « objet » […] »

61
RASTIER, F., M. CAVAZZA et A. ABEILLÉ (1994), Sémantique pour l'analyse, Paris, Masson, 240 p.
62
RASTIER, F. (1987).
63
VÉZINA R. et al, 2009 : 8
64
VÉZINA R. et al, 2009 : 8

65
(REY-DEBOVE, 1971 : 215). Une définition se doit donc de débuter par un élément
générique ou (vrai) incluant (REY-DEBOVE, 1971 : 230 ), qui « reste la plus petite partie de
la définition […] qui fonde la synonymie du défini et de sa définition. Il la fonde sans l'établir,
mais aucun autre mot de la définition n'est apte à jouer ce rôle primordial dans l'organisation
hiérarchisée du sémème. » (REY-DEBOVE, 1971 : 237) En somme, un générique « C'est la
réponse naturelle minimum à la question « Qu'est-ce qu'un X? » […]. » (REY-DEBOVE,
1971 : 230).

III-2-2-2-Caractères du défini
65
On appelle caractère dans la définition d‟une lexie, tout élément de la pensée ou de
la culture de l‟être qui reflète les différentes propriétés intrinsèque ou extrinsèque attribuées
à un objet donné et servant à en former et à en délimiter le champ de la dite lexie. C des es
éléments caractéristiques contribuent à définir le lexème tout en facilitant sa compréhension.
Reprenons les exemples (1 et 2) cités ci-haut : « labret » + « traditionnel » + « pour
femme » + « en poterie » sont les caractères qui constituent la compréhension de la lexie «
dɔrnö »de même que « düŋdūlüŋ » peut avoir les caractères suivants : « instrument » +
« pour musique » + « fait d‟une courge » + « oblongue » + « évidée » + « frappée contre
la cuisse » + « joué par les filles ». Cependant, les caractères attribués à un objet n‟ont pas
tous la même importance.
Cependant, les caractères attribués à ces objets n‟ont pas tous la même importance. On
distingue ainsi les caractères essentiels(les caractères jugés indispensables à la détermination
du sens du lexème traité) des caractères non essentiels(les caractères qui apportent un
complément d‟information sans être absolument nécessaires pour comprendre, décoder ou
distinguer un lexème)66. Dans la définition du premier lexème, le caractère « pour femme »
lui est essentiel par contre « en poterie » est non essentiel pour sa définition.
Que conclure ? Sinon que l‟élaboration de la définition lexicographique selon la
lexicologie explicative et combinatoire (LEC) et la structuration explicite du sens lexical en
des composantes sémantiques variées permettent d‟établir une vraie mise en correspondance
entre les lexies des deux langues mise en exergue. Il est ainsi intéressant, non seulement
d‟établir la base de description sémantique d‟une lexie en passant obligatoirement par

65
Tiré du glossaire de l‟ouvrage de VEZINA Robert et al , ( 2009), La rédaction de définitions terminologiques,
Québec p. 34.
66
Parmi les caractères non essentiels, on distingue parfois les caractères superfétatoires(les caractères de nature
encyclopédique qui s‟appliquent à un concept mais dont la mention est superflue) des caractères accidentels (des
caractères fortuits, de la nature du possible, qui ne sont pas réalisés dans la totalité des cas).

66
l‟identification du type de définition convenable pour l‟extraction de son sens intrinsèque afin
de la rendre explicite et exempt de toute ambiguïté sémantique , mais aussi et surtout, faire le
contour du mode définitoire en usage. Le travail de définition lexicographique bilingue passeà
chaque fois par l‟identification structurelle de l‟ordonnancement et des différents composants
du sens des lexies. L‟objectif est de convoquer les liens sémantiques que les deux langues
entretiennent entre elles. Cette identification est utile lors de la rédaction de l‟article de
dictionnaire bilingue pour fournir à l‟usager les informations complémentaires dont il a besoin
pour réussir son encodage ou sa traduction. Cela dit, ce travail de mise en correspondance ne
saurait être complet si on néglige de prendre en considération les caractéristiques sémantiques
des unités lexicales à décrire. La lexicographe Suzanne RUELLAND propose aux usagers
dudit ouvrage des définitions approximatives des adresses et qui reste à parfaire. Les articles
bilingues qui résultent de tout ce travail de mise en correspondance complétés par une analyse
sémantique approfondie de l‟équivalent peut servir ainsi de modèle pour la construction d‟un
véritable dictionnaire bilingue qui constituera un outil didactique efficace dans
l‟enseignement et l‟apprentissage du français par les locuteurs du tupuri et vice-versa.

67
CHAPITRE III : POLYSEMIE ET
HOMONYMIE TUPURI-FRANÇAIS DANS LE
DITFA

68
Dans ce chapitre, « l’important est que le classement satisfasse l’intuition
linguistique du lecteur qui « passe » d’un sens à l’autre, dans la lecture d’un article de
dictionnaire ; ce lecteur doit percevoir un rapport entre un sens initial et des sens dérivés,
sinon la polysémie est détruite au profit de l’homonymie. » (Christian BAYLON et Paul
FABRE, 1989 :239). Nous allons chercher à mieux cerner ce que nous entendons par
polysémie et homonymie (qui sont les deux unités d‟analyses linguistiques fondamentales ici)
tout en précisant quelques critères spécifiques servant à les distinguer. Nous inventorions par
la suite une typologie de chacune des unités d‟analyses. Nous statuerons enfin, sur une
analyse des lexèmes polysémiques et homonymiques de notre corpus dans une perspective
bilingue tupuri-français où nous verrons comment dans un dictionnaire bilingue, la pluralité
du sens et les sens sous-spécifiés des lexèmes se structurent afin d‟envisager des pistes de
désambiguïsation des lexies vedettes.

I-Mise au point des unités d’analyse


Étant donné qu‟il n‟y a pas de bonne science qui n‟eut fait recours à la définition de
ses concepts, il est donc évident, pour une appréhension globale de ces concepts de partir des
définitions en vue d‟établir une différenciation entre ces unités linguistiques que sont : la
polysémie et l‟homonymie.

I-1-Polysémie
Contrairement à une croyance largement répandue, ce n‟est pas à Michel Bréal, mais à
l‟orientaliste Joseph HALÉVY (B. COURBON, 2015) que l‟on doit accorder la paternité de
l‟invention du terme polysémie en français. L‟attribution erronée du terme est présentée tant
dans des manuels que dans des articles et des monographies spécialisées67. Les dictionnaires
contemporains, en fondant leur description sur la légende, perpétuent cette idée (c‟est encore
le cas de l‟article polysémie du Nouveau Petit Robert 2013 ou de la rubrique historique du
Trésor de la langue française, mise à jour en 2012 pour ce mot). L‟erreur s‟explique sans
doute par le fait que l‟œuvre de Bréal, et notamment son Essai de sémantique, a été un
puissant vecteur de promotion des idées, celles de son auteur, bien sûr, mais plus
généralement, celles de son époque. Le nom de Bréal est associé très tôt au terme polysémie :

67
On peut énumérer quelques textes dans lesquels l‟origine du terme polysémie est associée à la personne de M.
Bréal : Firth (1935/1957 : 15), Ullmann (1952 : 199), Larrivée (2008 : 22)

69
dès 1887, dans un compte rendu de son article paru la même année dans la Revue des deux
mondes (BAALE, 1887)68. En effet, J. HALÉVY est celui qui donna le nom de polysémie
dans les années 1870.
La polysémie fait partie des concepts originaires de la nouvelle « science des
significations » telle que la conçoit M. Bréal (le terme figure dans ses écrits à la fin des années
1880). S‟il n‟a pas été l‟inventeur du concept, Bréal a très certainement contribué à en faire la
promotion, grâce notamment au succès de son Essai de sémantique (1897). Inscrivant la
polysémie dans la tradition historico-linguistique, Bréal poursuit et approfondit la réflexion de
son contemporain A. DARMESTETER.
Dès les premières études sur la sémantique, les chercheurs portent une attention
particulière à la propriété des mots de prendre, occasionnellement, un sens nouveau. M. Bréal,
dans son Essai de sémantique (1897), décrit ce phénomène de multiplication de significations
des mots :
Le même terme peut s'employer tour à tour au sens propre ou au sens
métaphorique, au sens restreint ou au sens étendu, au sens abstrait ou au sens
concret... À mesure qu'une signification nouvelle est donnée au mot, il a l'air de se
multiplier et de produire des exemplaires nouveaux, semblables en forme, mais
différents de valeur. (Bréal 1897 : 155)
L‟auteur emploie le terme polysémie pour faire état de cette propriété des mots dans
les langues naturelles, laquelle se présente comme antipode de la synonymie.
Georges KLEIBER a donné une définition consensuelle de la polysémie devenue la
référence en cette matière. Pour lui, on parle de polysémie lorsqu‟il y a « (1) une pluralité de
sens liée à une seule forme, (2) des sens qui ne paraissent pas totalement disjoints, mais se
trouvent unis par tel ou tel rapport » (KLEIBER, 1999: 55). Il ajoute que le consensus
s‟arrête dès qu‟il s‟agit de préciser la notion de sens et la nature dudit rapport. Pour rendre
cette définition complète afin d‟y apporter des précisions nécessaires, M. STEFFENS (2008)
propose d‟envisager deux notions essentielles, celle de chapeau abstractif et celle de facette
(de CRUSE). L‟objectif est de préciser la notion de sens d‟un polysème. Un lexème est donc
polysémique quand il renvoie à plusieurs signifiés.
Pour rendre compte de la polysémie, on peut tenter de décrire le lien en expliquant, a
posteriori, l‟acquisition, par une forme lexicale, d‟un sens nouveau, puisque la question de
lien entre les sens d‟un polysème est d‟une évidence centrale dans la définition de la
polysémie. Chez STEFFENS (2008), le chapeau abstractif « est une sorte de définition
générale et abstraite du mot, destinée non seulement à décrire le lien entre ses différents sens,

68
BAALE, L. M. (1887): « Bulletin bibliographique », Taalstudie, 8, pp. 277-278.

70
mais aussi à structurer son sémantisme voire à prédire ses emplois ». De ce fait, l‟on choisit
de faire une réduction au maximum de certain sens typiques (MARI Alda, 2000 :17) et
calculer déductivement les possibilités d‟emplois du lexème en contexte. Ceci, dans le but de
structurer toutes ses acceptions dans le dictionnaire bilingue (de la langue source vers la
langue cible).

Par exemple :
49) jäg-tíŋ n. porte. « Jäg-t ŋ camiɔŋ », « porte d’un camion »
(DITFA, 131J)
Cette définition par chapeau abstractif que nous propose ce dictionnaire est partielle
et ne rend pas par conséquent compte de tout le sémantisme de la lexie. Car elles sont :
Trop abstraites pour pouvoir à elles seules rendre compte des emplois d‟un
mot, les définitions par le chapeau abstractif et par les propriétés extrinsèques du
référent sont également trop puissantes. Autrement dit, non seulement elles
peinent à expliquer, de manière satisfaisante, la totalité des emplois attestés des
polysèmes, mais elles autorisent également des emplois qui ne se réalisent
69
pas.

Une explication détaillée sera fructueuse et rendra mieux compte de son contenu
sémantique. Il est donc par voie de conséquence évident de faire recourt à la théorie des
facettes.
La deuxième notion que propose STEFFENS, est la théorie des facettes (CRUSE).
Pour CRUSE (2OO3 : 132), les facettes « ne sont pas des sens, mais sont les composantes
d‟un sens ». Pour expliciter cette théorie, reprenons l‟exemple ci-haut.
Pour rendre compte de la variation de sens de cette lexie, l‟on est contraint de faire
exploser ses composantes sémantiques car cette définition que nous propose le dictionnaire
n‟est pas efficace. On aura donc à l‟employer dans trois phrases différentes que nous
proposons:
a) Ndi yèè jäg-tìŋ súu tï lumo Touloum « j’ai acheté une porte
hier au marché de Touloum »
b) Jéé freŋ nduu go jäg-tìŋ « le voleur est sorti par la porte »
c) Ndo tor jäg-tìŋ wara. « Tu nettoies la cour de la maison
aujourd’hui »
Dans l‟optique de CRUSE, pour rendre donc compte de la variation d‟interprétation
sémantique constatée entre a), b) et c), autrement dit des trois lectures possibles de jäg-tíŋ, on

69
STEFFENS M., (2008), « Qu‟est-ce que la polysémie ? Vers une nouvelle définition de la polysémie », in
Journées de linguistique, Actes du XXIIème colloque, Centre international de recherche sur les activités
langagières, Québec, pp. 159-169

71
considère qu‟à cette lexie correspond ce qu‟il appelle « concept global » qui contient les
facettes [CADRE] identifiable dans a), [OUVERTURE] qui est manifeste dans b) et
[DEVANTURE] que l‟on identifie dans c) . À chaque facette d‟un lexème correspond ainsi un
référent différent, le châssis de la porte en a), l‟ouverture de la porte en b) et la devanture de la
porte en c).
Ces illustrations peuvent se matérialiser à travers la figure suivante :

SÈME1 SÈME2

LEXÈME 1

Figure 3: Définition schématique de la


polysémie
I-1-2-Homonymie
L‟homonymie n‟est pas à confondre avec la polysémie quoique l‟on trouve souvent
quelques points de convergences entre les deux (MULLER, 1962). Elle « est l‟identité
phonique (homophonie) ou l‟identité graphique (homographie) de deux morphèmes qui n‟ont
pas, par ailleurs, le même sens.» (DUBOIS et al, 2007 :234). L‟homonymie s‟attache à
étudier les lexèmes qu‟on appelle communément homonyme. Dans la conception courante,
sont appelés homonymes deux ou plus de deux signes qui comportent des signifiants
identiques (même collection de phonèmes rangés dans le même ordre, avec les mêmes traits
prosodiques et, le cas échéant, quand il s‟agit d‟un signe complexe, les mêmes pauses) sans
que cette identité se retrouve au plan des signifiés. (FABRE & BAYLON, 1989 :162).
Pour DUCHÀEK O ((1962), « L‟homonymie et la polysémie », dans Structure du
lexique, p .69-82.), deux termes sont homonymes quand leur étymologie est différente, même
s‟ils coïncident dans leur forme; les deux termes homonymes représentent différents concepts.
Les homonymes peuvent être homophones (s'ils se prononcent indépendamment de leur
graphie) ou homographes (s'ils sont écrits de la même façon). Prenons quelques exemples
qui illustrent ces définitions de l‟homonymie :
50) gon n. Cantharide. (DITFA, 107G)

72
51) gon n. Petit batracien. . (DITFA, 107G)
52) got.ge v.tr. rassembler : goot.ge fiiri wo « rassembler les
chèvres ». (DITFA, 108G)
53) got.gev.intr.1. Fleurir. 2. Bourgeonner. (DITFA, 108G)
Dans ces exemples, on comprend que ces entrés sont homonymiques. La lexie gon à
elle seule reçoit deux entrées parce que dans le sémantisme de chacune (gon1et gon2) on se
rend compte qu‟il n‟existe pas de pont sémantique pouvant les confondre à un mot
polysémique. La traduction que l‟auteure nous propose en français permet de les
désambigüiser et faire comprendre aux usagers qu‟il s‟agit de deux lexèmes
morphologiquement et phonologiquement proches mais éloignés dans leurs sens : Ce sont des
homophones homographes. Le premier est une « cantharide » et le deuxième est présenté
comme un « petit batracien ».De même, got.ge1 (rassembler) et got.ge2 (fleurir et
bourgeonner) sont deux lexèmes différents, de même forme mais de sens éloigné. Dans un
contexte bilingue, il n‟existe pas d‟équivalence de sens ni de forme du lexème de LS vers LC.
Il s‟agit de deux langues différentes du point de vue de leur système orthographique. Les
universaux de forme dans ce cas est inexistant comme les universaux sémantiques dans les
homonymes d‟une langue à une autre est impossible.
La figure ci-dessous est une synthèse de la définition de l‟homonymi

SÈME1 SÈME2

LEXÈME 1 = LEXÈME 2

Figure 4 : Définition schématique de l'homonymie

I-2-Typologies de la polysémie et de l’homonymie


Il n‟est pas fortuit d‟inventorier les types de polysémies et d‟homonymies dans le
cadre de ce travail. Cet inventaire nous offre des possibilités de distinction entre lexèmes
polysémiques et ceux homonymiques.

73
I-2-1Quelques typologies de lexèmes polysémiques
Il existe une pluralité de types de polysémies dont nous n‟allons évoquer que
quelques-uns.

I-2-1-1-Polysémie absolue
Une polysémie absolue peut être perçue dans les dictionnaires comme des sens
relevant des emplois rares et conçus sous la base de la liberté de créativité des locuteurs
d‟une langue. Sous cet angle, ils sont le plus souvent amenés ou conduits à employer certains
mots dans des sens très inattendus, sinon soumis à interprétation de la part de l‟interlocuteur.
D‟un point de vue sociolinguistique, la polysémie absolue marque les décalages inévitables
dans les compétences linguistiques des locuteurs d‟une langue ainsi que dans leur sensibilité
tout court. Ce type de polysémie est remarquable chez les écrivains. Ils « n‟éprouvent jamais
la nécessité d‟expliciter certaines de leurs métaphores, laissant toute liberté à leurs lecteurs de
construire un nouveau sens lexical original, ou pas. » (HANON S, 2006 :42). Il est d‟une
grande importance de le spécifier dans la description d‟une entrée de dictionnaire afin que
l‟usager sache toute la spécificité de la lexie. Chez Suzanne RUELLAND, les sèmes des
entrées à polysémie absolue ne sont pas spécifiés. Cela est dû au fait que la méthode
employée pour l‟extraction du sens des lexies est faillible.

I-2-1-2-Polysémie logique
La polysémie logique se produit quand un mot unique donne accès à plusieurs sens
différents mais liés. Caractérisée par James PUSTEJOVSKY (1996), la polysémie logique
désigne le phénomène de cohabitation entre deux acceptions en apparence contradictoires
mais liées pour le même objet linguistique. Prenons l‟exemple suivant:
54) ɗéére n. 1. Jujubier. 2. Lit (à madriers en jujubier). (DITFA,
74D)
Dans cet exemple, avant de commencer l‟analyse proprement dite, il est intéressant de
préciser qu‟il manque le sens du jujube (fruit du jujubier) et la traduction en français le prouve.
Pour comprendre la polysémie logique nous dévons observer le comportement de la lexie en
contexte. Lorsque l‟on dit par exemple :
1) ɗeere ma de hoore (le jujubier épineux);
2) ɗeere no co ga (le jujube n‟est pas sucré)
En 1), il s‟agit de l‟arbre qui produit les jujubes or en 2) c‟est le fruit du jujubier.
Chaque élément possède une forme. Le deuxième est une conséquence du premier. Dans la

74
polysémie logique, il peut avoir concurrence (qui crée souvent de l‟ambigüité au niveau de la
saisie de l‟information par l‟usager du dictionnaire ou un auditeur dans une situation de
communication) entre les deux acceptions car, certes elles désignent le même objet, mais elles
ne peuvent pas toujours être employées conjointement dans la même occurrence, sauf
contraintes particulières portant sur la qualification :
3) ɗeere ma ka‟a de coore debaŋ. (Ce jujubier est vraiment sucré)
Dans ce cas il y a conflit entre l‟arbre (jujubier) et le fruit (sucré).

I-2-1-3-Polysémie verticale
La polysémie verticale a été caractérisée par GEVAUDAN (1997). Selon lui, elle
désigne la possibilité pour un terme de s‟englober lui-même, d‟être son propre hyperonyme.
Reprenons l‟exemple illustratif de la polysémie logique pour expliquer cette fois ci la
polysémie verticale. La lexie ɗéére sert aussi bien à désigner l‟arbre dans son ensemble (sens
et concept englobant ou hypéronyme) que le fruit pour des raisons naturelles qui stipule que
l‟arbre produit des fruits (concept englobé ou hyponyme).

I-2-2-Quelques types d’homonymes


Comme nous l‟avons montré ci-haut, lorsque nous parlons des homonymes dans une
classification lexicographique, nous faisons allusion aux lexèmes de prononciation identique
et de sens différent. Il s‟agit des mots dont le signifiant est identique. Dans le corpus qui fait
l‟objet de notre investigation, nous avons répertorié quelques types d‟entrées homonymiques
que nous allons présenter.

I-2-2-1-Les homonymes homographes


Les homonymes homographes sont, dans notre contexte, des adresses qui ont la même
graphie mais des sens différents. Ils la même graphie et, généralement, aussi la même
prononciation (Otto DUCHÀČEK, 1962 :4). On peut observer le phénomène au travers des
exemples suivants :
55) déjoo n. civette (DITFA, 63D)
56) déjoo n. plante épineuse sp. Sa sève blanche a des propriétés
médicinales. (DITFA, 64D)

75
La première adresse « déjoo1 » (ayant pour équivalent français « civette » qui est un
animal) a la même forme orthographique que la deuxième adresse « déjoo1 » (avec
l‟équivalent français « plante épineuse ») lorsque nous observons soigneusement leurs
distributions paradigmatiques. Ils ont des étymologies différentes, des sens différents,
mais la même représentation graphique et la même prononciation. C‟est ce type
d‟homonyme qui est à l‟origine de sérieux problème dans la structuration des entrées du
dictionnaire tupuri-français. Lorsqu‟une étude n‟est pas menée pour le distinguer d‟un lexème
plutôt polysémique, cela pose une difficulté pour un usager d‟opérer le choix entre les deux
entrées. Nous approfondirons cette problématique dans la suite de notre travail. Qu‟en est-il
des entrées qui présentent des similarités au niveau phonétique ?

I-2-2-2-Homonymes homophones
Les homonymes homophones sont, dans notre contexte d‟étude, des entrées du
dictionnaire ayant la même prononciation, mais un sens différent avec une légère
différence au niveau graphique: Ainsi, dans le DITFA, et dans la langue tupuri en général, les
lexèmes qui ont les mêmes prononciations sans différence au niveau graphique sont répandus.
On peut le constater à travers les différentes entrées suivantes :
57) daa n. flûte à six trous en tige ou en tuyau de métal. (DITFA,
62D)
58) daa n. ordalie. Daa baa ne « l’ordalie l’a dénoncé ». (DITFA,
62D)
59) fuk.gi v.tr.p. Souffler avec la bouche. (DITFA, 87F)
60) fuk.gi v .intr. faire un petit sacrifice d’œuf, eau et de
farine.(DITFA, 87F)
Les lexèmes « daa 1» qui a pour équivalent français « flûte à six trous en tige ou en
tuyau de métal» et « daa2», «ordalie » sont deux entrées qui ne se différencient qu‟au plan
sémantique. Il en va de même pour les entrées «fuk.gi1 » dont l‟équivalent français est
«Souffler avec la bouche» et «fuk.gi2» qui a pour équivalent en LC : « faire un petit
sacrifice d’œuf, eau et de farine». La désambigüisation de ces lexies ne passe que soit par sa
traduction en LC ou encore par une précision de son environnement lexical. La structuration
de ces types d‟homonymes dans macrostructure du dictionnaire bilingue.
Par contre, ceux qui se prononcent de la même façon et présentant une légère
différence au niveau de leurs graphies sont presque inexistant à notre connaissance (dans le
corpus).

76
Toutefois ce phénomène est remarquable lorsque le ton du lexème est marqué. Dans ce
cas, il ne s‟agit pas exactement des entrées lexicales homophones, nous conservons cette
terminologie spécifiquement pour désigner des entrées qui se prononcent de la même façon.
Ce phénomène reçoit l‟appellation d‟ homotones qui « sont des mots qui exhibent les mêmes
schèmes tonologiques mais qui ont différentes significations selon le contexte. »
(Gisèle KOBADA, 20016 :52).

I-2-2-3-Autres types d’homonymies


La division faite des types d‟homonymies ci-haut n‟est pas satisfaisante. Nous
pouvons encore les repartir d‟une autre manière c‟est-à-dire en homonymes lexicaux
Les homonymes lexicaux sont ceux qui appartiennent à la même espèce de mots et
coïncident dans toutes les catégories grammaticales. Pour s‟en convaincre prenons les
exemples suivants :
61) sid.gi it. de sii.gi. Séjourner. (DITFA, 242S)
62) sid.gi v.tr.p. Fumer une viande ou un poisson. Syn. hidil.gi.
(DITFA, 242S)
63) sii.gi v.tr.p.raconter, narrer, révéler, rapporter. ndi sii jak soo-
baa ᵷi.n sii « j’ai offert un sacrifice { mon génie de la pluie hier ».
(DITFA, 242S)
64) sii.gi v.tr. passer une journée. Ndi sii ni naa ᵷi « j’ai passé la
journée chez ma tante ». aa dok sii go ᵷoge « il a réitéré par deux
fois son séjour d’un jour, il est revenu deux jours de suite ».exp.ti
ᵷe sii.gi .avoir du succès, de la chance. Ti be sii le ti lumo « elle a eu
de la chance au marché (elle a vendu). Sangu.n sii ti ᵷe . « Le
médicament l’a rendu chanceux ». (DITFA, 242S)
Les deux premiers homonymes lexicaux sont des verbes (sid.gi1 = séjourner ;
sid.gi2= fumer une viande ou un poisson) et les deux derniers (sii.gi1= raconter, narrer,
révéler, rapporter ; sii.gi2= passer une journée) appartiennent à la classe des verbes.
S'ils sont en même temps homographes, on peut les appeler absolus. Tels sont par
exemples les deux paires d‟entrées citées ci-haut : les deux premiers lexèmes appartiennent à
la classe des substantifs et les deux autres à la classe des verbes. S'i l y a une différence
graphique entre les homonymes lexicaux, on peut les appeler partiels :
65) sre n. gros sésame rouge. (DITFA, 236S)
66) sare q. rd. différent. prov. « tikoge riŋga nay hik bi sir sar-
sare » « épervier a dit “la viande sèche différemment selon le
village“ ».(DITFA, 236S)

77
Dans cet exemple, les deux entrées sont de natures différentes. « Sare1 » (gros sésame
rouge) est un substitutif alors que «sare2» (différent) appartient à la classe des adjectifs.

II-Critères de distinctions entre lexèmes polysémiques et homonymiques,


continuité et rupture
La distinction entre l‟homonymie et la polysémie est une des problématiques de
la lexicographie. On parle d‟homonymie, si « à deux signifiés distincts correspondent
deuxsignifiants distincts tout en étant identiques » . L‟homonymie est une relation entre
deux ou plusieurs termes ayant le même signifiant. Sur le plan théorique, l‟homonymie
implique des signifiés radicalement différents.
Lorsqu‟aucune mise en relation entre les significations n‟est possible, on n‟a pas à
faire à un mot polysémique mais à autant de mots homonymes, qui seront représentés
dans la nomenclature des dictionnaires par des entrées différentes. Le choix entre la
polysémie et l‟homonymie n‟est pas toujours simple. C‟est l‟un des problèmes principaux
posés par le dictionnaire tupuri-français. Pour ce faire, l‟on recourt à plusieurs critères de
distinctions possibles. On aura entre autres : le critère étymologique, critère de relation de
sens, critère formel, syntaxique et morphologique.

II-1- Critères de distinctions entre lexèmes polysémiques et homonymiques

II-1-1-Critère étymologique
Les lexicographes recourent à des critères étymologiques ou diachroniques
(DUBOIS et al, 2007 :369-370) pour distinguer homonymie et polysémie. Les homonymes
sont souvent issus d‟étymons différents. Pour que le mot soit polysémique, il faut que ses
sens remontent à un même et seule étymon. Un mot est polysémique, dès lors que les diverses
significations qu‟il peut prendre en contexte sont issues dans l‟histoire de la même origine.
Prenons l‟exemple de la lexie suivante :
67) Jaŋ.gev.tr .1. Éduquer, apprendre. Ndi jaŋ lakɔle « j’apprends
({) l’école ». S’entrainer, s’exercer { (la course, la lutte). Jaŋ.ge piri
« entrainer le cheval », le faire trotter. 3. Durcir, se fortifier. Exp. Ti
mbarga jaŋ we la tête de l’enfant a durcie » (= il ne comprend
rien). 4. Mûrir, (pour des arachides, poids de terre). 5. Lire. Cf.
kee.ge. (DITFA, 131J)
Lorsque la lexicographe accorde une seule entrée à cette lexie c‟est pour dire qu‟il
s‟agit d‟une entrée polysémique. Or, la lexie jaŋge est loin d‟être considérée comme une

78
simple polysémie. Lorsqu‟on songe à son analyse approfondie, on se rend compte que la lexie
devrait faire l‟objet de deux entrées différentes, et par conséquent homonymes pour deux
raisons : Premièrement, la lexie jaŋge est un emprunt au mot fulfulde jaŋgugo (qui veut dire
lire//étudier, apprendre//réciter). Deuxièmement, il existe aussi dans la langue tupuri une lexie
sous la même forme orthographique « jaŋge » qui signifie « durcir, mûrir » et dont le
substantif qui en dérive est « jaŋ.re 70» (dureté). Les autres sens ne sont que des sens dérivés
par les procédés de la métonymie intégrée et de la métaphore. C‟est le cas de s’entrainer,
s’exercer à la course, faire trotter, imitation (onomatopée) du trottinement (jaŋ–jaŋ =
doublure imitant le trottinement d‟un homme ou d‟un animal) et se fortifier.
Ces deux lexies sont étymologiquement opposées, par conséquent on devrait plutôt
les assimiler à des homonymes qu‟à une seule lexie polysémique. Et par ricochet les
représenter dans le dictionnaire par deux entrées différentes. Mais on se rend compte que le
critère étymologique seul n‟est pas suffisant, à partir d‟un seul étymon deux sens peuvent
générer. Il faut donc d‟autres critères de distinction.

II-1-2-Critère de relation de sens


Pour établir une distinction entre l‟homonymie et la polysémie, les lexicographes
recourent ensuite à un autre critère : si on a une relation de sens entre les mots, il s‟agit de la
polysémie, sinon, il s‟agit d‟homonymie. Il faut également que l‟on arrive à expliquer le
passage d‟un sens à un autre. Robert Martin (1992, Pour une logique du sens) parle de la
polysémie d‟acceptions : il faut que les sens d‟un même mot soient reliés par l‟un des
quatre indicateurs : par restriction, par extension, par métonymie (matière à objet, partie
pour un tout, etc.) ou par métaphore (emploi d‟un mot concret pour exprimer une notion
abstraite et par extension emploi de tout terme auquel on substitue un autre qui lui est assimilé
après suppression des mots introduisant la comparaison)). Pa exemple :
68) fàage v.tr.p. 1. Nettoyer. 2 guérir une maladie due à un sorcier
grâce au jè-saŋgu ou au guérisseur, désensorceler, fàa.ge tikwaare
(guérir/les rhumatismes) [ ?].

Ici, le lexème fàage, par essence de sens est « nettoyer, balayer, rendre propre et
pure » reçoit une extension de sens par le procédé de métaphore pour désigner toute action
relevant du surnaturel (abstrait) consistant à chasser des esprits impurs qui habitent en

70
Se trouve dans le DITFA, p.132

79
l‟homme. Il s‟agit là d‟une entrée polysémique parce que les deux sens sont reliés l‟un à
l‟autre par l‟indicateur métaphorique.

II-1-3-Le critère formel, syntaxique, et morphologique


En fin, un autre critère est de nature formelle, syntaxique et morphologique : deux
homonymes peuvent se distinguer par leurs genres, leur catégorie grammaticale et leur
fonction syntaxique. On peut constater que la distinction entre polysémie et homonymie
est arbitraire. Cela a pour effet de produire le lexique avec beaucoup moins d‟entrées. Le
problème ne se pose pas lorsqu‟il s‟agit de la distinction entre un lexème polysémique et deux
homophones mais entre deux homographes (dans ce cas l‟ambigüité est forte). Traitons les
cas suivants :
69) giri. n. kaolin rouge. (DITFA, 105G)
70) giri q.se dressant droit, en érection. (DITFA, 105G)
Dans les deux cas, la distinction peut être faite au niveau de la classe des mots. Le
premier est un nom alors que le deuxième est un adjectif. Ces deux homonymes se distinguent
par leur classe grammaticale. Ce critère peut ne pas être fructueux car il existe des emprunts
interne lorsqu‟il y a transcatégorisation, l‟on fera recourt à la fonction syntaxique.
Premièrement, lorsqu‟on dit : Ndi ma’a giri se ᵷi ma raa gurna = j’ai mis du kaolin rouge sur
mon corps pour danser le gurna, kaolin rouge = giri est un complément d‟objet direct du
verbe « mettre » = « ma‟a ». Or, lorsqu‟on dit : Hay go giri debaŋ wa = Ne t’assieds pas trop
droit, droit = giri qualifie la manière dont la personne est assise. De cette façon l‟ambigüité
est donc levée. Dans la description de l‟entrée que nous propose la lexicographe, il n‟existe
pas de zone d‟exemple dans les deux cas, ce critère s‟avère plus rentable que d‟autres dans ce
cas précis.
La distinction entre entrées homonymique et polysémiques est donc délicate. Lorsque
le flou sémantique est semé, un des critères suscités peut être rentable, pour leur
désambiguïsation.

II-2-Polysémie et homonymie : continuités et rup tures de sens


Il existe un lien étroit entre les deux concepts et dont la distinction est complexe. Nous
l‟avons démontré en amont. Il convient aussi de faire une distinction entre les éléments qui les
unissent (continuités de sens) et ceux qui les désunissent (ruptures de sens) dans cette sous
partie. Pour ce fait, nous prendrons pour point de départ la définition de la polysémie
proposée par KLEIBER (1999 :55) :

80
a. Une pluralité de sens liée à une seule forme ;
b. Des sens qui ne paraissent pas totalement disjoints, mais se trouvent unis par
tel ou tel rapport.
Cette définition de la polysémie est opposée à celle de l‟homonymie où nous
constatons que seule (a.) est valable. Ainsi dira-t-on par exemple que la lexie kↄlge est
polysémique parce qu‟il prend des sens différents dans kↄlge bii (transvaser l‟eau) et kↄlge se
(se transformer), et que ces sens sont unis par l‟évocation commune de mouvoir quelqu‟un ou
quelque chose d‟une situation A vers une situation B. On peut le voir à travers la description
de cette lexie que nous propose la lexicographe dans l‟exemple ci-dessous :

71) kↄlge v.tr.p.1. Déplacer, changer de place. 2. Transvaser. 3. Se


transformer en, prendre une autre forme. (DITFA, 157K)

En revanche, on parlera d‟homonymie dans le cas de déŋ parce que ses deux sens
dans ur oo go déŋ = (lève-toi et reste débout) et nay ɓe déŋ = (il y‟a de la viande en
quantité) sont totalement disjoints. Alors que kↄlge apparait bien comme une unité lexicale
unique malgré sa pluralité de sens, on aura tendance à considérer dans le cas de déŋ que l‟on
a affaire à deux unités lexicales distinctes, déŋ 1et déŋ 2 qui partagent une même forme et une
même orthographe. Pour s‟en convaincre, observons l‟exemple suivant :
72) déŋ adv.pos. Débout, dressé (DITFA, 66D)
73) déŋ adv. en nombre, en quantité. (DITFA, 66D)

Il faut cependant noter que la frontière entre polysémie et homonymie n‟est pas très
nette, comme en témoigne le caractère assez vague de la formulation de la deuxième
caractéristique (b.) de la polysémie et le constat fait du dictionnaire de RUELLAND
Suzanne sur le nombre d‟entrées consacrées à telle ou telle unité. Observons les exemples
suivants :
74) baa-gev.tr.o. Attraper, saisir.it. bak-ge (DITFA, 29B)
75) baa-gev. intr. Coaguler, cailler. (Ibid.)
76) baa-ge v.tr.p. Remplir (Ibid.)
Ainsi doit-on traiter baa-ge comme une seule unité polysémique, ou faut-il distinguer
baa-ge1 (attraper, saisir quelqu’un / quelque chose ou le /la maintenir à un état souhaité)et
baa-ge2 (coagulation sanguine, cailler du lait) de baa-ge3 (remplir un vase) ? On constate
que les deux premières sont sémantiquement proches et la troisième est très éloignée. On
aurai dû laisser les deux premières comme une unité polysémique présentant des sens sous-

81
spécifiés et la troisième lexie comme une entrée sémantiquement disjoint avec rapprochement
morphologique des précédentes.
Alors, plutôt que de chercher à trancher de manière inévitablement arbitraire, il faut
sans doute mieux accepter l‟existence d‟un continuum et adopter une définition de la
polysémie qui en tienne compte (VICTORRI et FUCHS, 1996 ; Guillaume
71
JACQUET ,2005 :23)

II-3-Statuts et variations du sens des entrées polysémiques


De quelque manière que l‟on aborde la polysémie, l‟on souscrit nécessairement à l‟une
de ces deux options : il est possible d‟une part d‟expliquer cette pluralité de sens liée à une
seule forme en considérant qu‟à chaque sens correspond un sémème, un signifié donc ; dès
lors, il faut soit renoncer à la définition saussurienne du signe qui relie UN signifiant à UN
signifié, soit disposer d‟une conception homonymique de la polysémie dans laquelle
homonymes et acceptions polysémiques sont, de manière égale, des signes linguistiques
distincts (Christophe CUSIMANO,2007 :77). À l‟inverse, la seconde option postule
l‟existence d‟un signifié « multiple », en d‟autres termes qu‟un polysème, pourvu de toutes
ses acceptions, doit être relié à UN seul sémème. La difficulté dans ce cas est alors de parvenir
à une unité de compromis sémantique, recoupement des divers sens associés au même
signifiant. Ce traitement conditionne la structuration des acceptions des unités lexicales dans
le dictionnaire bilingue tupuri-français. Dans ce contexte, une entrée en langue source
équivaut à plusieurs lexèmes en langue cible.
Le travail qui nous incombe ici est de proposer à travers des entrées polysémiques,
des hypothèses d‟approches singulières de cette problématique. Selon l‟analyse que nous
proposons, il est fructueux de faire un regroupement des constituants de la description en trois
chapeaux : d‟abord celui la théorie du sémème unique proposé par Christian TOURATIER
(2000 :96) ; ensuite, celui qui l‟évoque mais opte pour l‟association d‟un sémème à chaque
acception polysémique ; enfin, celui qui tend à contourner ou faire un dépassement de la
question.

II-3-1-La théorie du sémème unique


Si l‟on veut éviter toutes les conséquences non satisfaisantes de l‟hypothèse
descriptive qui voit autant de sémèmes différents dans les différentes significations
d‟un mot polysémique, une solution assez simple vient à l‟esprit : il suffit de définir

71
G. JACQUET, (2005), Polysémie verbale et calcul de sens, Thèse de doctorat nouveau régime en sciences
cognitives dirigée par B . VICTORRI, Ecole des hautes études en sciences sociales.

82
le sémème d‟un lexème polysémique par l‟intersection sémique de ces différentes
72
significations.
La résolution du problème passe premièrement par l‟étude des théories du sémème
unique de Christian TOURATIER 73 qui relève qu‟il existe plusieurs types de polysémie
(reprenant les distinctions proposées par Robert MARTIN en 1983). Selon lui, la première
résulterait d‟une restriction de sens qui provient d‟«addition de sèmes spécifiques »74. Par
exemple :
77) saraw n. 1. Fibre, crin végétal ; racines de rônier avec
lesquelles on fabrique les nasses ; racines utilisées comme cordes
de harpe. 2. fil de fer, rayon, fil de nylon. (DITFA, 238S)
Avec le sens générique de « fibre» en français, soit « crin végétal ; racines de rônier
avec lesquelles on fabrique les nasses ; racines utilisées comme cordes de harpe » a pur sens
restreints exprimés par le nouveau sémème, « fil de fer, rayon, fil de nylon ». Ceci est
formulé comme suit :

⅀2 = ⅀1 + S 22

Figure 5 : Équation sémique

Où : ⅀2 = (sémème 1) ; ⅀1 = (crin végétal ; racines de rônier avec lesquelles on


fabrique les nasses ; racines utilisées comme cordes de harpe et S22 = (sème : « fil de fer,
rayon, fil de nylon ». Selon Christian TOURATIER, Robert MARTIN omet de préciser que
c‟est le contexte moderne qui ajoute ce trait : en effet, dans la société tupuri du temps jadis,
l‟on ne reconnaissait comme fibre que ce qui dérive du végétal, mais avec l‟arrivée de la
civilisation occidentale et moderne, cette société est appelée à spécifier saraw comme en 2.
(Fil de fer, rayon, fil de nylon.) . Ici, la matière reste mais la qualité change en fonction des
progrès scientifiques. Le premier sémème (surtout le dernier sème) disparait de plus en plus
dans l‟usage, parce que de nos jours il n‟existe plus de « harpe » dont les « cordes » sont fait à
base des racines. Ainsi, le sémème serait prolongé par un trait sémique de nature contextuelle,
que TOURATIER se garde bien de qualifier de « sème ». Or, si l‟on admet que le sémème ne
contient que des sèmes (au sens où l‟entend celui-ci), par conséquent, la polysémie qui relève

72
TOURATIER C., (2000), La sémantique, Paris, Armand Colin, p.94.
73
Ibid.
74
MARTIN R., (1983), Pour une logique du sens, Paris, PUF, Linguistique Nouvelle, p. 77.

83
d‟une restriction de sens n‟en modifie point la structure. Robert MARTIN a recours à
plusieurs sémèmes correspondant aux différents sens du polysème, TOURATIER cherche
quant à lui, au contraire, à préserver un seul sémème dont sont dérivées les différentes
acceptions, par le biais de diverses procédures.
Une autre théorie applicable à l‟unicité du sémème est celle adoptée notamment par
Mariana TUESCU (1978) cité par Christophe CUSIMANO (2007 :81) est celle de
l‟intersection sémique qui stipule que dans eux acception d‟un polysème, on dispose d‟un
seul signifié (un seul noyau en quelque sorte) qui comprend un trait sémique supplémentaire
selon à qui ou à quoi le lexème correspondant est appliqué, ce qu‟illustre le schéma suivant.
Nous le réaliserons nous-mêmes en nous inspirant de celui que propose TUTESCU (1978)
repris par CUSIMANO (2007 :81) :

 Fil de fer, nylon


 Crin végétal
« Saraw »
(FIBRE)

Figure 6 : L'intersection sémique (TUTESCU)

II-3-2-La polysémie comme pluralité de sémèmes


Les entrées polysémiques présentent une pluralité de sémèmes. « Dans l‟analyse
sémique, le sémème est l‟unité qui a pour correspondant formel le lexème » (DUBOIS et al,
2007 :424).C‟est un ensemble formé de sème qui est une unité minimale non susceptible de
réalisation indépendante et dont l‟analyse sémique en rend compte. Ces sémèmes dans une
description lexicographique peuvent être l‟équivalent terminologique des acceptions ou des
différentes définitions proposées pour une entrée polysémique La structuration des lexèmes
polysémiques dans le dictionnaire bilingue mérite un soin particulier. Les différents sens de la
lexie polysémique doivent être fidèlement représentés de la langue source vers la langue cible.

84
Dans l‟analyse sémique des entrées polysémiques du dictionnaire tupuri-français, nous avons
constaté deux différentes hypothèses75 qui structurent la forme de cette polysémie lexicale.
Ces hypothèses ont été proposées par les différentes théories sémantiques lexicales
(Guillaume JACQUET et al, 2005) qui cherchent à préserver l'unicité de l'unité lexicale face à
la prolifération des sens :
 Hypothèse 1 : Ici l‟on postule l'existence d'un noyau (sèmes nucléaires : toujours présents)
de sens commun, ou potentiel de sens, à partir duquel s‟opère une « dérivation » ou
« l‟enchâssement » des divers autres sens. Divers mécanismes peuvent alors jouer pour
spécifier un sens particulier à partir du noyau commun : par spécialisation (le noyau de
sens étant alors vu comme générique) et/ou par enrichissement, par apport d‟un contexte
d‟usage.
 Hypothèse 2 : Il existe ici le postulat d'un sens premier, de base76, dont les autres
sens seraient dérivés par des opérations (généralement métaphores et métonymies
intégrées) aboutissant à des sens conventionnels différents, souvent relatifs à différents
« domaines » (de pensée, de connaissance…).
Il est nécessaire de connaitre au préalable cette structuration sémantique en LS pour
pouvoir proposer des équivalents adéquats en LC. On peut le comprendre à travers les deux
hypothèses de la structuration polysémique de la lexie vedette caage (cf. exemple (5)) :
caage v. intr. 1) couper, casser. Ex s|alen caagɔ : la corde
s’est coupée. 2) abattre. Ex | caa koon gɔgesiŋ : il a abattu l’arbre.
3) blesser. Ex : koo caan ɓaale : il s’est blessé le pied. 4) vacciner.
Ex { de caa kamliiri wɔwara : on vaccine les enfants aujourd’hui.
5) scarifier. Ex : wel gɔɔni caa se ɓɛ : le jeune initié se fait des
scarifications. 6) se sauver (animal attaché...). Ex pirn caa haa
suu : le cheval s’est sauvé depuis hier. 7) semer : coton, niébés, mil
pénicilaire.... ex | diŋ w r maa caa mb|araw c’est le moment de
semer le coton, récolter. Ex { caa gar{ gɔjag gesaŋ : le fait de
couper le sorgho rouge ‘gar{’ et le laisser secher sur les tiges
entrecoupées et croisées. (DITFA, 46C)

Faisons en une synthèse dans cette figure ci-dessous:

75
Guillaume Jacquet, Fabienne Venant, Bernard Victorri, (2005), « Polysémie lexicale », Patrice Enjalbert.
Sémantique et traitement automatique du langage naturel, Hermès, pp.99-132.
76
La terminologie à ce niveau est variable : pour PICOCHE (1986), utilisant un vocabulaire de Guillaume, parle
de saisie plénière.

85
SENS GÉNÉRIQUE (couper) Contexte 1 Contexte 2 Contexte 3

Sens
premier Sens Sens
Contexte1 (abattre) Contexte3 (vacciner)

Contexte2 (blesser)
Dérivations

Sens Sens Sens

HYPOTHÈSE 1
HYPOTHÈSE 2

Figure 7 : Les deux hypothèses de structuration de la polysémie


lexicale (source: Guillaume JACKET et al, 2005: 9)
Les autres sens qui dérivent du noyau sémique 77 (hypothèse 1) sont des sèmes 78
contextuels (hypothèse 2), facultatifs, « suspendus » dans certains contextes et « activés »
dans d‟autres comme le témoigne le sémantisme de caage. La polysémie est un phénomène
très fréquent qui se produit comme conséquence de l'élargissement du signifié d'un mot
préexistant pour désigner de nouvelles réalités, c'est-à-dire, c‟est la propriété d‟un signifiant
de renvoyer à plusieurs signifiés. De cette façon, la polysémie permet d'agrandir le nombre de
concepts nommés sans augmenter le lexique. Un lexème peut avoir plusieurs signifiés dans le
registre standard, dans ce registre et dans le domaine d‟une ou plusieurs disciplines, il peut
même avoir plusieurs signifiés à l'intérieur de la même matière. Les signifiés spécialisés
seront les seules signifiés à être considérés par la terminologie, et, en ce sens, il y a un
traitement différent entre la terminologie et la lexicographie en ce qui concerne les termes
polysémiques et homonymes. Dans un ouvrage lexicographique (un dictionnaire général) tous
les signifiés d'une vedette sont inclus et doivent être décrits en détail, alors que dans une
terminologie (un dictionnaire spécialisé du lexique d'une discipline), on inclut seulement
le signifié ou les signifiés qui a le terme dans ce domaine de spécialisation en omettant
le reste de signifiés. Cette pluralité sémémique donne naissance aux sous sens de la lexie à
décrire.

77
Noyau sémique est une expression de Greimas (Sémantique structurale, 1986 :41)
78
Ibid.

86
II-3-3-La polysémie comme signification sous-spécifiée
Lorsque nous parlons sens sous spécifié d‟une lexie vedette, nous faisons allusion aux
différents sous dégroupement sémantique. Cette sous-spécification se présente par rubrique et
numérotée dans notre corpus en chiffre arabe (1 ; 2 ; 3 ; etc.) selon le nombre d‟acception que
regorge cette lexie. Dans chaque rubrique il y a des inclusions de sens dans un autre considéré
plus englobant et générique. Dans d‟autres ouvrages lexicographiques, le sens sous-spécifié
est marqué par une lettre minuscule (a ; b ; c ; etc.). Pour rendre compte des significations
sous-spécifiées de la lexie caage, nous procédons à son dégroupement sémantique et
présenter pour chaque sens sous-spécifié ses équivalents en LC.
Les acceptions de caage dans la DITFA sont les suivantes :
1) couper, casser. Ex s|alen caagɔ : la corde s’est coupée.
2) abattre. Ex | caa koon gɔgesiŋ : il a abattu l’arbre.
3) blesser. Ex : koo caan ɓaale : il s’est blessé le pied.
4) vacciner. Ex { de caa kamliiri wɔwara : on vaccine les enfants aujourd’hui. 5) scarifier.
Ex : wel gɔɔni caa se ɓɛ : le jeune initié se fait des scarifications.
6) se sauver (animal attaché...). Ex pirn caa haa suu : le cheval s’est sauvé depuis hier.
7) semer : coton, niébés, mil pénicilaire.... ex | diŋ w r maa caa mb|araw c’est le
moment de semer le coton, récolter. Ex { caa gar{ gɔjag gesaŋ : le fait de couper le
sorgho rouge ‘gar{’ et le laisser sécher sur les tiges entrecoupées et croisées.
On se rend compte que dans Le dictionnaire tupuri-français, les sens sous-spécifiés ne
sont pas marqués mais sont existentiels dans la description que nous propose l‟auteure. Dans
le sens 1) par exemple, le sens englobant c‟est « couper, casser », dans l‟exemple s alen
caagɔ, on peut y extraire le sème de « briser ». On dira « la corde s‟est brisé » pour question
de registre de langue, ou la « corde s‟est coupée »comme l‟indique la traduction proposée par
l‟auteure. En plus, dans la description qu‟elle propose aux usagers, il y a des sens non
marqués que voici et sur lesquels nous reviendrons en profondeur dans les chapitres V et VI.
8 ) naw caage. Naw be caa (ses jours se sont coupé/pour dire qu’il est décédé (figure
d’atténuation)
9) caa.ge ti ngel po : passer quelque part. Ndi caa ban la je passe de l’autre coté
Cette imperfection se remarque à travers plusieurs autres entrées du dictionnaire. Cela
est dû sans doute à notre avis faute d‟une analyse approfondie préalable du contenu des
adresses dans un travail de structuration du lexique. L‟on est donc en droit de donner raison à
BAYLON et FABRE (1989 :238) lorsqu‟ils pensent que le lexicographe n‟est pas un
sémanticien car il n‟intervient dans l‟analyse des significations.

87
III-Classement et analyse des sens
L‟analyse des significations (BAYLON & FABRE, 1989 : 238) conditionne
étroitement la composition des articles du dictionnaire bilingue en vue de sélectionner
l‟équivalent adéquat dans la langue cible. Autrement dit, l‟organisation des acceptions
enregistrées aboutit à leur structuration hiérarchique.

III-1-Classement des sens


BAYLON et FABRE (Ibid.) pensent qu‟il existe généralement trois types de
classement des polysèmes : Un classement fondé sur la fréquence en synchronie, un
classement historique et un classement logique.

III-1-1-Le classement fondé sur la fréquence en synchronie


Ce type de classement de sens consiste à faire figurer le sens le plus rependu, et on
termine par les acceptions rares, et les plus souvent archaïques. On peut le comprendre à
travers l‟exemple suivant :
78) rè.ge v.tr.p.1. Manger t.g hoole.n rè « boule » (de mil) a rè
we « il a mangé » = « c’est mangé ». ré. ge nene. macher .reé neén
nay no « mache bien la viande ». 2. User, se détériorer { l’usage.
Taarak bi re go. «Mes chaussures sont usées ». 3. Engloutir,
consommer quelque chose qui n’est pas { vous. Ndo ré horok bi
buy. « Tu as consommé toute ma richesse (bétail) ». 4. Gagner
(aux jeux) ; écraser son adversaire. à ré caca « il a gagné au jeu de
cauris ». 5. S’enfoncer profondément. Jaaw ré yaw. « La lance s’est
enfoncée profondément. ré.ge bay, frimer. re. ge gew. Avoir =
prendre de la valeur. (DITFA, 229R)
Les acceptions sont classées ainsi qu‟il suit : 1) Manger ;2) User, se détériorer à
l‟usage ; 3) Engloutir ;4) Gagner (aux jeux), écraser son adversaire ;5) S‟enfoncer
profondément. Deux autres sens sous-spécifiés rarement employés et relevant du parler jeune
s‟ajoutent aux cinq premiers. Il s‟agit de :6) frimer (aussi souvent, se venter) ; et 7) Avoir ou
prendre de la valeur. Il est intéressent de remarquer sur l‟observation faite du corpus, que ce
type de classement ne fait pour la plus part que cataloguer les sens, faute de données précises
sur la fréquence relative des emplois.

III-1-2-Le classement historique


Lorsqu‟on parle du classement historique, l‟on fait allusion à la représentation des
acceptions dans leur ordre d‟apparition. Ce type de classement est efficace en ce qu‟il permet

88
d‟éviter les fausses reconstitutions et les erreurs. Nous l‟attribuons aussi l‟appellation de
classement diachronique. Dans le corpus étudié, nous n‟avons pas eu un cas de classement
des significations selon leur ordre d‟apparition. Cela s‟explique par le fait qu‟aucun intérêt
des recherches scientifiques n‟a été accordé pour l‟étude diachronique du lexique de la langue
tupuri. Il donc aberrant pour la lexicographe de songer à une pure imagination de la date de
parution de la lexie vedette mise en exergue. Une étude diachronique et étymologique
préalablement faite serai fructueuse pour améliorer la métalangue de ce dictionnaire afin
d‟éclairer la lanterne des usagers sur les fausses reconstructions.

III-1-3-Le classement logique


Le classement logique, le plus souvent, s‟appuie sur les liens de dérivation logique
établis entre les diverses acceptions. La logique du classement des significations des lexies
dans le dictionnaire bilingue consiste à aller d‟un sens supposé étymologique vers le sens le
plus éloigné. Pour s‟en convaincre, prenons cet exemple :
79) Juwa’age v.tr.p.1.fouetter, « chicoter ».2. Gauler (des tamarins
par ex.).3. ôter le son, l’écorce en frappant. Juwa’age suwée.
Enlever les arachides des cosses. 4. Transpercer d’une flèche ou
d’une lance. waa juwa’a ndi la flèche m’a transpercé ». (DITFA,
139J)
Dans cette structuration de sens, on retrouve en 1) Fouetter, « chicoter » qui représente
en LC le sens générique de la lexie Juwa’age dans LS. Les autres sens dérivent tous de ce
sens premier. Logiquement, on se rend compte qu‟il y a continuité de sens dans les
significations. En 2) Gauler ; 3) ôter le son, l‟écorce en frappant ; et en 4) transpercer d‟une
flèche ou d‟une lance, il y a dérivation sémantique s‟éloignant de moins en moins du sens
étymologique. Dans chaque acception, nous retrouvons une fine substance du sens générique
de Juwa’age (fouetter). Fondé sur les bases d’une description scientifique du lexique, le
DITFA donne autant que faire se peut priorité à la distribution du terme et à son
environnement sémantico-syntaxique.
En bref, notre corpus lexicographique (dictionnaire) recoure constamment à la
polysémie. La lexie vedette est considérée comme une unité de la langue, dont les réalisations
dans le discours impliquent des variations de sens selon les contextes. Chaque unité comprend
un noyau sémique, un invariant de sens, qui, selon les contextes, prend des acceptions
différentes en fonction des sèmes contextuels qui s‟ajoutent au noyau. Dès lors, comment se
structure le sens des lexèmes polysémiques ?

89
III-2-Structure sémique d’une entrée lexicale polysémi que tupuri et ses
équivalents en français: le cas de doo (main)

Nous allons essayer d‟appréhender le traitement de la polysémie à travers l‟analyse


sémique du lexème « doo ».

III-2-1-Ressources d’analyse
Il convient dans cette sous partie de faire l‟analyse sémique du polysème « doo ». La
définition proposée ci-dessous est celle que l‟auteure considère meilleure. L‟usager du
dictionnaire doit comprendre au préalable que le lexème présenté (en tupuri) n‟a pas le même
sémantisme que son équivalent dans la langue cible. On constatera néanmoins que le noyau
sémique (main, bras) est celui attesté en français, les autres extensions de sens font références
aux réalités propres à la culture tupuri. On peut le comprendre au travers de l‟exemple
suivant qui constitue notre ressource pour l‟analyse:
80) doon.1. main, bras. Doo bi bay sé bo wa « mes mains ne sont
pas sur ton corps = tu es libre, je ne te retiens pas. 2. Mesure qui
fait la hauteur du corps plus la hauteur du bras étendu. 3. Mesure
qui comprend la longueur de l’avant-bras plus la longueur de la
main.4.mesure de la longueur de la main depuis la base du pouce
au bout du majeur.5. Trompe de l’éléphant.6.branche.7.cinquante.
(DITFA, 69D)

Nous pouvons voir que la lexicographe a pris ici le soin de diviser en sept points les
différentes acceptions du lexème « doo » : en simplifiant, il y aurait d‟une part les sens qui
naissent de l‟application aux êtres vivants (homme, animal et végétal), et d‟autre part les
sens résultant de l‟application à l‟unité de mesure.(1) « main ou bras » d‟un être humain ; (2)
unité de « mesure qui fait la hauteur du corps plus la hauteur du bras » ; (3)unité de
« mesure » qui va « de la longueur de la main depuis la base du pouce au bout du majeur » ;
(4) unité de « mesure » qui va « de la longueur de la longueur de la main depuis la base du
pouce au bout du majeur » ;(5) « trompe de l‟éléphant » ; (6) « branche » d‟un arbre par
exemple et (7) « cinquante » . Sans juger pour l‟heure du bien-fondé du découpage, notons
néanmoins que celle-ci met à jour un inventaire et un arrangement plus ou moins complet et
satisfaisant des sens du polysème en question. L‟analyse que nous en ferons avec des outils
adéquats nous révélera ces manquements.

90
III-2-2-Outils ou appareils conceptuels d’analyse sémique

Pour réaliser l‟analyse sémique de notre corpus, nous allons nous servir des concepts
des concepts de dimensions, domaines et taxèmes développés par François RASTIER (1987)
et de sème, sémème, arcchisémème, sémantème, et virtuème ( GREIMAS, 1966 ;POTTIER,
1974 et RASTIER , 1987). L‟analyse sémique consiste, pour une étude lexicographique, à
ressortir des sèmes ou traits minimaux de signification afin d‟avoir une vue d‟ensemble du
sémantisme de la lexie mise en exergue. Le manque à gagner dans cet exercice réside dans la
désambigüisation des entrées polysémiques. Il ne s‟agit pas d‟analyser ici le signifiant, mais le
signifié. Notre analyse se situe donc, uniquement au niveau du signifié et toute ressemblance
avec certaines propriétés du référent ou du concept n‟est que fortuite.

III-2-3-Les constituants du polysème


À l‟entame de l‟analyse, il convient inévitablement de s‟interroger. Quels sont les
sèmes de « doo » ? Autrement dit, quelles propriétés sont communes à toutes les acceptions
du polysème et peuvent ainsi prétendre accéder au noyau sémique, le sémème ?
Il semble que les acceptions de « doo » (qui sont au nombre de sept, selon sa
numérotation) proposées par l‟auteure, peuvent se regrouper sous deux sèmes qui
correspondent à des classes de généralité supérieure, c‟est-à-dire les dimensions. Ces derniers
sont les niveaux macrogénériques du polysème. Premièrement, on retrouve les sèmes de \êtres
vivants\ dans les acceptions 1. (Main, bras) ; 5. (Trompe d‟éléphant) et 6. (Branche d‟arbre).
Chaque division appartient à un domaine précis de la vie correspondant au niveau
mésogénérique de l‟analyse. Trois domaines correspondent respectivement aux acceptions
spécifiées ci-dessus : 1. (humain) ; 5. (Animal) et 6. (Végétal). Deuxièmement, dans les
acceptions 2. (Mesure qui fait la hauteur du corps plus la hauteur du bras) ; 3. (Mesure de la
longueur de la main depuis la base du pouce au bout du majeur) ; 4. (Mesure de la longueur
de la longueur de la main depuis la base du pouce au bout du majeur) et 7. (Cinquante), on
peut extraire le sème de \unité de mesure\. Nous constatons que dans les quatre derniers
acceptions (2 ; 3 ; 4 ; et 7), le sème « mesure » est générique. L‟ensemble de ces sèmes
génériques constitue le classème (POTTIER, 1974 : 68). « Mesure » est donc le classème
dans ces acceptions.
Lors du classement des différents sens du lexème dans le dictionnaire, l‟auteure n‟a
pas tenue compte de cette structure sémique. En effet, tous les sèmes qui sont à l‟intérieur

91
d‟un ensemble donné doivent être regroupés sous une même acception et faire l‟objet d‟une
sous-spécification

III-2-4-Ajout d’autres traits sémiques ou des attestations complémentaires


Nous avons fait l‟hypothèse que la polysémie trouvait une explication dans les
différentes applications du noyau sémique (le sémème), chacune étant représentée par un
archilexème ou un syntagme nominal équivalent.
De ce fait, après avoir réalisé un inventaire des sens existants dans le dictionnaire
tupuri-français de RUELLAND en mêlant les définitions étudiées qu‟elle soumet aux usagers,
nous avons recueilli une série d‟attestations selon le critère suivant : nous avons regroupé des
énoncés contenant « doo » et un autre lexème subordonné à un archilexème auquel « doo »
pouvait aussi être subordonné , dans l‟une de ses acceptions ; ainsi, nous allons attester ce
lien . Nous en présentons les résultats ci-dessous :79
 Dans l‟acception 7) ci-dessous, l‟équivalent français «cinquante » ne tient presque du
tout pas pour exprimer ce qu‟elle véhicule en tupuri. Voici la glose qui correspond à
cette acception 7) : doo = dizaine (ndi na Dang doo swa‟a)= j‟ai passé trente jours à
Dang. La main chez les tupuri comme chez d‟autres peuples, est considérée comme
une unité de mesure ou une calculette. Les mains étant constituées de dix doigts, à
partir de 20 l‟on fait intervenir cette unité qui est la dizaine. Par exemple : doo bog =
vingt ; doo swa‟a = trente ; doo naa = quarante ; et doo dwee = cinquante (litt. Dizaine
ou dix fois cinq).
 Bay doo.= (littérale. Sans main). incapable, inhabile. A pour contraire « de doo » =
(litterale. Avec main) adroit ; habile Ex. a de doo = il est adroit.
 Hage doo. Au début du mariage, la nouvelle épouse réserve une partie de la nourriture
ou boisson pour son mari ou pour sa belle-mère en signe d‟affection.
 Hage doo. (litt. Donner la main) .Corrompre. Mouiller la barbe. A pour synonyme
kange doo (litt. Mettre la main), kange jage (litt. Mettre la bouche) = être généreux
 Rege doo (litt. Manger la main) escroquer.
 Doo n. (sens figuré) sort, envoutement.
 Doo n. style. Marque de fabrique. Façon de faire de quelqu‟un. .Exp. Pay ma ta‟a din
doo Mayhorlon = cette poterie est la marque de Mayhorlon.

79
Nous ne disposons pas d‟une base textuelle, il s‟agit des énoncés que nous avons générés en tant que locuteur
natif de la langue tupuri.

92
 Doo n. capital d‟un commerce. Exp. Ndi bay kan yii waso doo bi caa go. (litt. Je ne
fermante plus de bil-bil ma main est coupée)= je ne fermante plus de bil-bil, mon
capital est fini.
 En plus de ce que l‟auteure a présenté au niveau de l‟acception 5), il existe une espèce
d‟insecte du nom de Doo balè n. Insecte sp. qui creuse des trous par terre.

Eu égard à ce qui précède, il est intéressant de rappeler qu‟à ce chapitre était


consacré le traitement de la polysémie et de l‟homonymie dans une perspective bilingue
tupuri-français dans le DITFA. Les concepts de polysémie et d‟homonymie ont fait l‟objet de
longs débats théoriques. Des préalables définitionnels des auteurs nous ont permis dès
l‟entame de ce chapitre de faire un point sur les concepts de polysémie et d‟homonymie.
Nous avons fait un inventaire des types de polysémie et d‟homonymie en présence
dans le dictionnaire. Cependant, nous remarquons l‟absence des lexèmes qui présentent des
sens polysémiques de type absolus. Les emplois rares ne sont pas marqués et pourtant, ce
phénomène est un maillon dans la chaine du dynamisme sémantique des lexèmes dans la
pratique langagière des locuteurs du tupuri. Et dans la langue, le phénomène de cohabitation
entre deux acceptions en apparence contradictoires mais liées pour le même objet linguistique
est rependu. Cette logique du sens permet de créer sur la base d‟unité lexicale une autre unité
liée à la première par un pont sémantique.
Une analyse sémique minutieuse doit être faite pour différencier les entrées
polysémiques de celles homonymiques. Il existe dans notre corpus des ambigüités
morphosémantiques au niveau des vedettes. Il est difficile de différencier (pour un usager du
dictionnaire tupuri-français) les lexèmes homographes des lexèmes qui présentent juste une
pluralité de sens. Quelques critères de distinctions peuvent être fructueux pour un processus
de désambigüisation de sens dans la langue tupuri. Après analyse, on se rend compte que le
critère étymologique est faillible. Il existe des lexèmes homographes qui présentent le même
étymon. Pour contourner ce problème, l‟usage des critères de relation de sens, le critère
formel, syntaxique et morphologique s‟avèrent donc rentables.
Cette ambigüité remarquable à cause de l‟ambivalence statuaire dont certains lexèmes
font montre. L‟analyse de la situation révèle trois statuts de la variabilité du sens des entrées
polysémiques : la théorie du sémème unique de Christian TOURATIER pour qui les sèmes
d‟une unité lexicale polysémique sont régis par un noyau sémique. La polysémie est aussi
perçue comme une pluralité de sémème. Ici existe un sens nucléaire dont les autres seraient

93
dérivés par plusieurs procédés. C‟est aussi et surtout une signification sous-spécifiée, à
l‟intérieur de chaque acception se trouvent inclus d‟autres sens.
Toutefois, un travail d‟analyse et de classement fondé sur la fréquence en synchronie,
le classement historique que nous avons appelé classement diachronique, et le clament
logique. Dans une perspective interlinguistique tupuri-français, le traitement des entrées
choisies doit être rigoureusement mené afin que l‟équivalent qu‟on aura à proposer en LC
soit exact et exempt de toute velléité. S‟il est vrai que le traitement des entrées polysémiques
et celles liées par une ressemblance formelle/ phonétique semble être délicat, qu‟en est-il des
adresses qui ont une relation d‟inclusion sémantique ?

94
CHAPITRE IV : LA RELATION
SYNONYMIQUE ET SON TRAITEMENT EN
CONTEXTE BILINGUE TUPURI-FRANÇAIS

95
Ce chapitre se fixe pour objectif d‟analyser dans le dictionnaire tupuri-français le
phénomène lié à la relation d‟équivalence sémantique entre les lexies vedettes. Suzanne
RUELLAND propose aux lecteurs un traitement des lexèmes synonymiques qui demande
une analyse approfondie afin de désambigüiser le sens de ces entrées pour les usagers. Pour ce
faire, nous allons tout d‟abord faire un point sur les préalables définitionnels du concept de
synonymie qui n‟est pas aussi facile saisir comme pourrait le croire certains. Avant de faire
une classification typologique des entrées synonymiques dans notre corpus, il s‟en suit que la
mise au point des méthodes d‟analyse adéquates pour la description de notre corpus révèle un
intérêt méthodologique qu‟il faut en prendre compte. Ensuite, nous analyserons dans une
perspective bilingue la synonymie en ressortant ses liens de traduction de la langue tupuri vers
la langue française. En fin, il conviendrait d‟étudier la structure, la variation ou la
différenciation des lexèmes synonymes et analyser le système de renvoi dans l‟optique de
déceler les mauvais traitements des relations d‟équivalence sémantiques dans le DITFA.

I-1-Préalables définitionnels et méthodes d’analyse


Avant de nous pencher dans l‟analyse proprement dite de la synonymie dans notre
corpus, il est intéressant de faire un contour définitionnel du concept de synonymie et ressortir
les méthodes d‟analyse que nous allons utiliser pour ce traitement.

I-1-1-Les préalables définitionnels


Pour Sébastien HATON (2006 :240) la synonymie est une « relation entre deux mots
ou deux expressions qui ont des significations très voisines ou le même sens ». Elle est aussi
perçue comme une relation mathématique qui n‟a pas une orientation fixe car la synonymie
implique deux sens de part et d‟autre des lexèmes mises en exergue. Pour expliquer cette
définition, prenons deux lexèmes synonymes et appliquons-les à la fameuse équation que
nous propose HATON (Ibid. p.240) :
81) Jäk-jöo n. 1. langage recherché, métaphore, style indirect.2.
proverbe, devinette. Syn.Jäk-hīilā.
82) Jäk-hīilā n.cf. Jäk-jöo.
Si le lexème a (Jäk-jöo) est synonyme du lexème b (Jäk-hīilā), alors le lexème b est
synonyme du lexème a ; tel que a est le premier lexème, b le deuxième et S soit le lien de
synonymie. On obtiendra la combinaison suivante :

96
[(aSb => bSa) ^ (bSa => aSb)]

Figure 8 Équation d’une relation de synonymie (HATON)

Pour Martin RIEGEL et al (2014 : 925) :


Le phénomène inverse de l‟homonymie, la synonymie est la relation entre deux
formes lexicales formellement différentes (elles se distinguent par leurs signifiants)
mais de même sens (elles ont le même signifié). Au sens strict du terme, deux unités
synonymes seraient donc sémantiquement équivalentes, c‟est-à-dire librement
substituables sans modifier le sens de où elles figurent, partageraient le même
ensemble de traits sémantiques, auraient les mêmes antonymes, etc.

C‟est en effet une relation entre deux mots ou expression qui se rapprochent dans les
sens ou leurs significations (BAYLON et FABRE, 1989 : 167). La synonymie est une relation
asymétrique au niveau du signe linguistique. On a affaire à un signifié et à deux ou plusieurs
signifiants. Deux unités lexicales sont dits synonymes lorsque leurs sens sont identiques ou
presque identiques, et, parfois interchangeables, mais qui diffèrent par leurs formes soit
partiellement ou absolument. On ajoutera donc que « deux unités lexicales sont en relation
de synonymie si toute occurrence de l'une peut être remplacée par une occurrence de
l'autre dans un certain nombre d'environnements sans modifier notablement le sens de
l'énoncé dans lequel elle se trouve » (PLOUX & VICTORRI, 1998 : 162).D‟après cette
conception, et l‟imagerie populaire, la seule synonymie réellement active dans la langue est la
synonymie partielle, car la « synonymie complète » suppose d‟outrepasser le principe
d‟économie linguistique, laquelle prévaudrait sur la possibilité de substituer une unité à une
autre dans tous les contextes. Le même décalage existe dans un rapport interlangue pour des
raisons extérieures à l‟économie du langage : il n‟y a aucune raison a priori pour que deux
langues adoptent le même système lexico-conceptuel dans une parfaite symétrie (ce qui au
demeurant rendrait inutiles les recherches en traductologie). Il existe une pluralité de
synonymie dont nous inventorions quelques-unes qui ressortent dans notre corpus.
Dans l‟esprit de HANON (2006), la synonymie est en quelque sorte la polysémie du
sens primitif, celui qui n‟est pas directement verbalisé. Ce qui revient à dire que la synonymie,
comme la polysémie du reste, est une notion qui ne se laisse pas facilement « apprivoiser »
dans les théories linguistiques, comme nous le savons depuis bien longtemps.
Nous reviendrons pour exemplifier ces différentes définitions dans la suite de notre
développement. L‟analyse que nous proposons pour cette partie consiste en réalité à étudier le

97
traitement lexicographique des lexèmes synonymiques dans notre corpus lexicographique. Il
s‟agira dans un premier temps, de comprendre comment l‟auteure structure et décrit les
entrées qui ont une relation de sens. Mais avant cette description, présentons quelques théories
qui nous serviront de base.

I-1-2-Méthodes d’analyse des lexèmes synonymiques


En étudiant les synonymes, il faut partir de l'analyse de leurs contenus sémantiques.Il
faut donc vérifier s'il y a entre les acceptions des deux mots examinés une coïncidence
absolue de tous les éléments qu'elles contiennent ou non. Pour cela, quelques théories peuvent
êtres rentables et fructueuses pour mener cette analyse.

I-1-2-1-L’analyse componentielle
L‟analyse componentielle 80 comme définie dans les chapitres précédents, nous
permettra de caractériser les synonymes dans la mesure où les unités contiennent les mêmes
traits définitoires. Nous nous inspirons d‟une formule de DUBOIS et al (2007:465) pour
l‟adapter à l‟analyse componentielle de la manière suivante :Admettons deux unités lexicales
L1et L2 différant seulement par le fait que L1 a une unité sémique x et L2 a une unité sémique
y là où L1 a une unité sémique x1 et si L1⊃ L2 et L2 ⊃ L1 (double implication), on pourra
dire que x et y sont des synonymes.

I-1-2-2-La substitution des lexèmes synonymes et l’investigation des « opposés » (suivant


PALMER)
La méthode d‟analyse des lexèmes synonymiques est d‟après PALMER (1981) repris
par Simone ARTUK (1986 :95) la substitution où on remplace un lexème par un autre. Par
cette méthode on peut constater tout de suite si et jusqu‟à quel degré il est possible de
substituer un lexème par un autre dans un énoncé sans que celui-ci ne perde sa substance.
PALMER, repris toujours par Simone ARTUK (Ibid. p. 95), propose une autre
théorie permettant de retrouver les lexèmes synonymiques qu‟il appelle investigation des
« opposés »(les antonymes). Pour lui, le fait que deux mots semblent avoir les mêmes
antonymes peut-être un motif ou une raison suffisante pour les traiter comme synonymes.

80
Nous allons l„appliquer dans la suite de notre travail.

98
I-1-2-3-Les propriétés algébriques comme méthode d’analyse de la synonymie
DOUALAN (2011 :17) propose des propriétés algébriques pour l‟analyse des lexèmes
synonymes. Ces propriétés servent à insérer la notion de synonymie dans une
perspective logique, afin, en partie, d'accéder à une modélisation mathématique de cette
notion. Les propriétés de la relation de synonymie dans l'ordre classique de l'algèbre
sont la réflexivité, la symétrie et la transitivité (Ibid. :17), propriétés qui servent à
définir toute relation algébrique. Voyons donc chacune de ces propriétés :
 la réflexivité : « nous pouvons affirmer sans risque que la relation de synonymie est
réflexive, puisque toute unité lexicale peut se substituer à elle-même » (Manguin,
2004b : 2).
 la symétrie: si A a pour synonyme B alors B doit avoir A pour synonyme. Par exemple :

83) däagē böo bateau, bac (pirogue/en fer). Syn. däagē wüu (DITFA,
59D)
84) däagē wüu bateau, (pirogue/du blanc). Syn. däagē böo (DITFA,
59D)
Les deux entrées sont liées par une relation de symétrie. Ces lexèmes sont
interchangeables. « däagē böo » et « däagē wüu » sont deux lexèmes désignant parfaitement
le même signifiant qui est ici le bateau. En effet, dans la langue tupuri, il n‟ya pas un terme
générique pour désigner le bateau. Un realia culturel sert de référentiel pour nommer ce
signifiant. L‟image de la pirogue et l‟usage qu‟on en fait peut être un élément de référence
pour exprimer cette réalité. Dans cet exemple, tout se joue au niveau de l‟environnement
lexical. Dans les expressions « däagē böo » et « däagē wüu », däagē est en tupuri « la
pirogue », connue dans l‟univers culturel de ce peuple. Pour l‟adapter adapter cette réalité à
langue cible il faut se servir de la culture de la langue source. On aura donc « böo » en
français « fer » et « wüu » qui renferme les sèmes de « Blanc, armé, fonctionnaire ». Pour
tout dire, le bateau est donc présenté chez les Tupuri comme « la pirogue en fer ou la pirogue
du blanc ». Il s‟agit donc là des synonymes absolus.
 la transitivité : « si A est synonyme de B, et B est synonyme de C, alors A est
synonyme de C » (Ibid. : 2).
Si la relation de synonymie respecte ces trois propriétés alors c'est une relation
d'équivalence et en tant que telle elle est aisément formalisable en traitement des
langues. Seule la synonymie pure telle que la définissent PLOUX & VICTORRI est
une relation d'équivalence, à la fois réflexive, symétrique et transitive. Cependant, il

99
s'agit d'une relation très restrictive, quasi impossible. En revanche, la synonymie
partielle s'observe dans le discours. Elle est même la seule que l'on y rencontre.
Toutefois, elle n'est que réflexive et symétrique, elle n'est pas transitive. En effet, A
peut être synonyme de B et B synonyme de C mais A n'est pas forcément synonyme
de C. Prenons l‟exemple des entrées suivantes :
85) gér-w ā n. syn. w ā (DITFA, 103G)
86) w ā n. étoile du matin. Cf. gérë (273W)
87) gérë n. étoile t.g. 2.torche.3. Cataracte de l’œil. (DITFA,
103G)
Contrairement à la propriété énoncée ci-haut, on se rend compte que dans ces
relations,« gér-w ā » (A)(étoile du matin)est synonyme de« w ā »(B) (étoile du matin)
qui à son tour a pour synonyme « gérë »(C)(étoile ; torche ; cataracte de l’œil), mais
l‟entrée « gérë » n‟est pas synonyme de « w ā ». Ceci est dû au fait que le lexème A est une
expression explicative de B et sont en relation de synonymie absolue. A et B sont des
hyponymes de C, car il existe une variété d‟étoile dont A et B en font partie. Plus encore,
c‟est un lexème polysémique et lorsque ce cas de polysémie s‟infiltre dans une relation de
synonymie, la transitivité est impossible. Ceci donne raison à DOUALAN (2011) lorsqu‟elle
pense que
deux synonymes d'un même lexème ne sont pas systématiquement synonymes
entre eux. Ainsi, la transitivité se rencontre peu dans le discours du fait de la
polysémie des mots. Cela fait que la synonymie n'est pas une relation
d'équivalence au sens strict; elle ne peut donc être aisément formalisable.
Il faut tout de même noter qu‟il existe un autre problème de description de sens de
l‟entrée « w ā »qui, en réalité est un lexème polysémique. Nous y reviendrons en profondeur
dans le chapitre V.

I-2-Classement typologique et quelques variantes des entrées synonymes


dans notre corpus
Dans cet ouvrage, quelques remarques préalables sont intéressantes : Pour faciliter
l‟extraction des lexèmes synonymiques à l‟intérieur de la macrostructure du dictionnaire qui
fait l‟objet de notre étude, nous nous referons à quelques éléments métalinguistiques. Il s‟agit
premièrement de « cf. » pour « confère ou renvoi à un terme de sens comparable »,
deuxièmement de « syn. » pour « synonyme » et troisièmement « var. » pour « variante ou

100
doublet »81. Ces éléments nous servirons de guide afin de mener à bien l‟analyse descriptive
des liens sémantiques que ces unités lexicales entretiennent entres elles. Cette sous partie
traite primo, de la classification typologique des lexèmes synonymes et secundo, des variantes
synonymiques des entrées.

I-2-1-Classement typologique des lexèmes synonymes


Il est important de classifier au préalable les types de lexèmes synonymiques que nous
envisageons analyser. Sommairement, nous pouvons dire que la synonymie est une
relation de substituabilité en contexte. Plus précisément, nous pouvons énoncer la
définition de la synonymie par S. Ploux et B. Victorri (1998) en sachant que ces deux
auteurs distinguent deux synonymies : une synonymie pure (encore appelée totale ou
absolue) et une synonymie partielle. À côté de ces types on retrouve aussi les parasynonymes.

I-2-1-1-Les synonymes absolus


Le répertoire lexical tupuri-français présente un type tout à fait particulier de
synonymie : Il s‟agit de la synonymie parfaite ou absolue. L‟unanimité est loin d‟être faite au
sujet de l‟existence des lexèmes qui ont un contenu sémantique exact et total (Alena
POLICKÁ, 2014 :78). D‟aucun pense que c‟est une aberration de parler de la synonymie
totale. « Deux unités lexicales sont en relation de synonymie pure si toute occurrence
de l'une peut être remplacée par une occurrence de l'autre dans tout environnement
sans modifier notablement le sens de l'énoncé dans lequel elle se trouve» (PLOUX &
VICTORRI, 1998 : 162).
À travers quelques tests d‟identifications linguistiques, nous pourrons convenir et
accepter qu‟il existe des lexèmes qui ont des sens exacts. Certes, la synonymie parfaite est un
état rare.

I-2-1-1-1-L’emprunt critère d’identification de la synonymie absolue


Pour DUBOIS et al (2007 :177) :
Il y a emprunt linguistique quand un parler A utilise et finit par intégrer une unité ou
un trait linguistique qui existait précédemment dans un parler B (dit de langue) et
que A ne possédait pas; l‟unité ou le trait emprunté sont eux-mêmes qualifiés
d‟emprunts.

81
Ces éléments sont préalablement présentés par Suzanne RUELLAND, dans la partie « abréviations et
symboles » dans le DITFA (pp.11-12)

101
La langue tupuri a emprunté des lexèmes à divers langues. Il se trouve que dans la
langue tupuri il existe des signifiants qui ont les mêmes signifiés. Le premier existe dans la
langue tupuri, le second est un emprunt externe. Les emprunts extérieurs sont des indicateurs
qui permettent d‟identifier les lexèmes présentant un lien de synonymie absolue. On parle de
synonymie absolue lorsque deux unités d‟une même langue désignent la même réalité. Dans
une langue donnée, une unité lexicale existe mais les locuteurs de ladite langue en contact
avec une autre langue intègrent dans le lexique de la première une autre unité lexicale ayant le
même sémantisme. Dans le dictionnaire tupuri-français, ce phénomène est remarquable.
Observons les entrées suivantes :
88) gàagë n.Corbeau. syn. g wlā (DITFA, 96G)
89) g wlā n.empr.K82.corbeau. prov.“G wlā rīŋ g{ cūu ɓë daŋ n y
ɓë “corbeau dit le bouillon est meilleur que la viande“ (allusion
aux notables qui, chez le chef, par respect pour lui, ne touchent au
bouillon, se dit des personnes dépitées qui se ventent contre toute
évidence d’être satisfaits de leur sort). Syn.gàagë F83.,gëwlē- T84.
,g wlē- (DITFA, 95G)
Dans la langue tupuri ces deux unités lexicales permettent de désigner l‟équivalent
« corbeau» en français. Il s‟agit de « gàagë» qui est le terme de la langue tupuri et « g wlā »
qui est un emprunt à la langue kéra. Les deux lexèmes désignent exactement la même chose et
sont utilisés dans deux dialectes différents. Le premier est une variante dialectale du ɓāŋ-wérë
et la deuxième est une variante dialectale du fáalë-pīyēw.
Il en va de même pour les entrées suivantes :
90)gɔŋgā n . empr. ( ?) vérité .syn. cūwāy
91) cūwāy n.coll.vérité. á cūwāy “ c’est vrai“
L‟auteure précise que «gɔŋgā » (vérité) est un emprunt extérieur mais la langue à
laquelle elle a été empruntée n‟est pas identifiée. Nous dirons que cette lexie serait empruntée
du fulfulde. Ce terme emprunté retrouve dans la langue d‟accueil (tupuri) un autre terme dont
le sémantisme est identique. «Cūwāy » et « gɔ ŋgā » n’ont pas de différence au niveau
de leur sémantisme. Il s’agit en effet de deux lexèmes absolument synonymie.

82
« K. » signifie : emprunt au Kéra. (RUELLAND, 1988 :11)
83
« F. » est une variante dialectale de Fourkoumay (ɓāŋ-wérë). (Ibid.p: 11)
84
« T. » est la variante dialectale parlée à Tikem (fáalë-pīyēw). (Ibid.p.12)

102
Ces emprunts peuvent aussi être considérés dans une certaine mesure comme des
doublets parce que l‟unité empruntée vient s‟ajouter à une autre existante dans la langue
d‟arrivée. Ce sont des lexèmes d‟origine différente qui arrivent à s‟appliquer à un même objet,
une même idée. Les synonymes absolus peuvent être aussi définis par des doublets.

I-2-1-1-2-Le doublet comme critère de définition de la synonymie absolue


Le doublet est un élément essentiel qui nous permet d‟analyser la synonymie
authentique. Nous tenons appeler pour synonymes authentiques ici, les entrées qui peuvent se
substituer réciproquement dans n‟importe quel contexte sans le moindre changement dans la
signification objective (Simone ARTUK, 1990 : 84). Prenons l‟exemple du couple suivant :
92) bàlàr.gë var. bàr.gë. (DITFA, 32B)
93) bàr.gëv.tr.Couvrir, étaler, s’étendre. Duwee.re ɓàr wo. « Les
oiseaux se sont posés en groupe ». (DITFA, 32B)
Nous comprenons de ces entrées que le premier «bàlàr.gë » n‟est pas défini, l‟auteure
l‟indique par l‟abréviation « var. » symbolisant sa variante ou son doublet. Pour l‟auteure,
cette entrée est une variante ou un doublet de «bàr.gë» (couvrir, étaler, s‟étendre).Si le
premier lexème n‟a pas fait l‟objet d‟une description ou une définition particulière, cela
peutêtre une raison suffisante pour insinuer qu‟en effet, l‟entrée ne possède pas un
sémantisme particulier autre que sa variante (bàr.gë). Le doublet en linguistique, est perçu
comme :
Un couple de mots issus d‟un même étymon, mais dont le premier est le résultat du
jeu des lois phonétiques telles qu‟on peut les déduire des autres mots de la langue, et
dont le second est un calque direct d‟un terme de la langue mère et qui n‟a subi que
des adaptations minimes. (DUBOIS et al, 2007 :160)

Ce doublet est rendu possible par un processus phonologique qui s‟est opéré par la
suppression de la syllabe médiane « -la -». Pour les locuteurs de la langue tupuri, le choix
entre les deux lexèmes dans une situation de communication s‟explique par la fluidité dans la
prononciation de « bàr.gë» qui est ici, le terme le plus rependu et par conséquent populaire,
courant. Dans ce cas, « bàlàr.gë» et « bàr.gë» sont des lexèmes synonymes parce qu‟il
n‟existe pas de frontière sémantique qui délimite leurs sens. Le pont sémantique est assuré et
permet la continuité de sens. Pour s‟en convaincre, procédons par test sous la base des
théories que nous avons mentionné en amont.

103
La théorie qui semble à notre avis fructueuse pour lever l‟ambigüité entre ces deux
entrées est sans doute la substitution. Nous prendrons deux énoncés dans lesquels nous allons
employer les deux termes et voir leur substitution au plan paradigmatique.
Notons préalablement que dans la morphologie verbale du tupuri, «-ge » de
« bàr.gë »et « bàlàr.gë» est le marqueur de l‟infinitif.
On aura donc :
 Ndi bàlàr oobe ne hen ti.
Je / couvre/ habit / sur / lui /tête /
Je couvre sa tête avec un tissu.
 Ndi bàr oobe ne hen ti.
Je / couvre / habit / sur / lui / tête /
Je couvre sa tête avec un tissu.
On constate de ces critères de substitution que ces lexèmes sont interchangeables dans
tous les contextes sans que le sens soit modifié. Parmi tous les paires de lexèmes
synonymiques que nous avons répertoriées dans notre corpus, quand deux unités lexicales
deviennent synonymes parfaits dans la langue commune, populaire ou familière, l‟une d‟elles
sort, généralement, peu à peu de l‟usage et disparait enfin ou bien se différencie
sémantiquement, en enrichissant son contenu sémantique par un nouveau complémentaire.
Lorsque ces unités lexicales reçoivent une connotation particulière que le sens d‟origine, la
synonymie absolue laisse place à la synonymie partielle Par ce fait, les synonymes exacts,
parfaits ou totaux changent en synonymes approximatifs ou partiels.

I-2-1-2-Les synonymes partiels


Les synonymes partiels sont des unités lexicales qui, appartenant à la même catégorie
de mots, ont une seule et même dominante et témoignent d'une coïncidence parfaite en ce qui
concerne leurs éléments complémentaires les plus importants, mais diffèrent en ce que l'u n
d'eux ne comporte pas un ou plusieurs éléments complémentaires plus ou moins négligeables
qu'on peut vérifier dans le contenu sémantique de l'autre (différence privative) ou bien en ce
que l'un ou plusieurs éléments complémentaires pas trop importants sont différents. À la
différence des synonymes absolus, les synonymes partiels « chevauchent dans leurs traits
sémantiques centraux mais diffèrent par leurs traits marginaux, voire par leurs nuances
pragmatiques »85. À cause du caractère approximatif des synonymes, on emploie les termes de

85
POLICHÁ Alena, (2014), Initiation à la lexicologie française, Université Masaricova, Brno, p.78.

104
quasi-synonyme86ou de parasynonyme87 pour désigner les lexèmes dont les sens ne sont pas
exactement identiques. Citons à titre d‟exemple les entrées suivantes :
94) fèn -kīŋn. luette dans le parler des femmes .Syn. fí. (DITFA,
80F)
95) fín. 1. Luette. 2. Inflammation de la gorge, angine( ?) attribuée à la
luette dans certains lignages dans lesquels elle est entrée. Càa.gefí
« ôter la luette » cf.fèn –kīŋ. (DITFA, 84F)

Il est vrai, les deux entrées désignent le même signifiant, mais, dans l‟usage « fí» est
rependu, alors que « fèn -kīŋ » (luette dans le langage des femmes) est moins utilisé. On
constate que le premier lexème ne présente qu‟une seule acception (luette dans le parler des
femmes), or l‟auteure attribue deux acceptions au deuxième (1. Luette .2. Inflammation de la
gorge, angine ( ?) attribuée à la luette dans certains lignages dans lequel elle est entrée).
Pourtant, les deux termes sont substituables sans que les contenus différent. Observons les
phrases suivantes :
 Ndi ráw càa fèn –kīŋ ɓarga no.
Je / part / couper / l‟inflammation de la gorge /enfant/ de /
Je pars soigner l‟inflammation de la gorge de l‟enfant.
 Ndi ráw càa fí ɓarga no.
Je / pars / couper / l‟inflammation de la gorge/ enfant / de /
Je pars soigner l‟inflammation de la gorge de l‟enfant.
De ce test de substitution, on constate qu‟il n y a aucune différence entre les deux
entrées. Appliquons à ces lexèmes l‟analyse componentielle. L1 = lexème « fèn-kīŋ
», L2 = lexème « fí» et S= sème ; on aura :
L1 (fèn -kīŋ ) = S1 ( luette ) ; S2 ( dans le parler des femmes)
L2 (fí) = S1 (luette) ; S2 (inflammation) ; S3 (de la gorge); S4 (angine(?));S5 (dans certains
lignages)
Les sèmes S1 de L1 et S2 de L2 sont des sèmes génériques (à ce stade on peut parler de
synonymie absolue parce que ces sèmes sont identiques). On dira par conséquent que dans
une situation de dénotation on peut parler de synonyme absolu. Alors que S2 de L1 lui est
spécifique comme S2, S3, S4, et S5 de L2 lui sont aussi spécifiques. Par contre, lorsqu‟il s‟agit
d‟un emploi connoté, la synonymie parfaite n‟a plus sa place. De cette analyse faite, un autre
problème se fait constater. Dans la langue source, les deux lexèmes ont un lien synonymique
total, alors que les équivalents que propose l‟auteure nous révèlent une autre réalité.

86
Ibid.p.78
87
Ibid.p.78

105
L‟équivalent n‟est donc pas exact, la terminologie que l‟auteure assigne à ces entrés en
langue cible n‟est donc pas adaptée et la description qu‟elle propose aux lecteurs n‟est pas
adéquate. L‟ambigüité de sens est donc remarquable et peut être un problème pour les usagers
(traducteurs ou apprenants de la langue source). Dès lors, il se pose un problème de transfert
sémantique de la langue tupuri vers le français .Le lien synonymique à ce niveau n‟est donc
pas parfait. Le concept de polysémie absolue dévient donc comme un leurre (LEHMANN et
BERTHET, 2000 : 54 ; Alena POLICKÁ, 2014 :75).
Les synonymes partiels sont rependus dans la langue tupuri. L‟équivalence qu‟on les
attribue en français doit être choisie avec minutie pour éviter toute ambigüité sémantique. La
connotation et la polysémie sont des éléments qui permettent de définir la synonymie partielle.
Deux lexèmes sont en relation de synonymie partielle lorsque l‟un d‟eux présente une
pluralité de sens et l‟autre est monosémique ou les deux sont souvent employés
connotativement. De cette pluralité sémantique on se rend compte que les deux unités
lexicales n‟ont pas totalement le même sémantisme. Les sèmes du premier terme se
retrouvent dans le second et ou vice versa. Pour illustrer cette idée, prenons cette paire
d‟entrées :
96) cēgān.coll.faim de viande. Cēgā Jóŋ mē.“j’ai faim de viande“.cf.
sāy (DITFA, 50C)
97) sāy n.1. faim de viande. Sāy n y b{a ndï “ j’ai été pris d’une
forte envie de viande“ .2. désir sexuel sāy ɓē t ɓ “ je le/la désire”
(DITFA, 237S)
En effet, l‟adresse « cēgā» qui a pour équivalent français « faim de viande» est
monosémique comme on peut le remarquer dans la définition que l‟auteure propose. Elle n‟a
qu‟une seule acception et ne désigne qu‟un seul signifié ou réalité qui est ici l‟envie de
manger de la viande. Par exemple : Cēgā Jóŋ mē “j’ai faim de viande“ ou encore j’ai envie
de manger de la viande. Cette lexie est méliorative et peut être employé dans une situation
de communication par un locuteur pour parler de lui-même (lorsqu‟il éprouve le besoin ou
l‟envie de manger de la viande). La lexie « sāy» a pour équivalents français «1. Faim de
viande » et « 2. Désir sexuel ». Par conséquent, elle est polysémique parce qu‟elle regroupe
deux acceptions dans son sémantisme.
La première acception, c‟est-à-dire « faim de viande » est le sens dénoté, propre. C‟est
ce sens dénotatif qui se retrouve dans le lexème « cēgā». Elle est souvent péjorativement
perçue et est utilisée pour parler d‟une personne qui aime (à l‟excès) la viande. Cette

106
connotation péjorative se perçoit lorsqu‟on observe la définition et l‟exemple proposés par
l‟auteure du DITFA dans la microstructure de cette lexie.
La deuxième acception qui est «désir sexuel » relève du tabou et est plus souvent
employée pour ne pas être cru dans le style lorsque l‟homme ou la femme demande à sa
conjointe ou à son conjoint de s‟acquitter de son devoir conjugal. Il est vrai que dans ce cas il
y a un pont sémantique (sème générique) entre les deux acceptions de la lexie « sāy» puisque
de part et d‟autre nous retrouvons les sèmes « besoin, envie et désir». Mais il faut toutefois
reconnaitre qu‟au niveau de la dernière acception il y a un sème de différenciation ou un sème
spécifique qui occasionne la rupture de sens entre les deux lexies. D‟où la présence d‟une
relation de synonymie partielle entre elles. Le choix des locuteurs de la langue tupuri entre ces
deux lexèmes. Lorsqu‟on parle de soi-même, on n‟emploie pas « sāy». Les deux peuvent être
substituables dans certains cas dans les énoncés maisne sont pas interchangeables dans tous
les environnements lexicaux. Prenons quelques exemples pour voir leurs substituabilités dans
les phrases :
 Cēgā jóŋ mē.
// Faim de viande / fait / moi //
// J‟ai faim de viande //
J‟éprouve l‟envie de manger de la viande.
 Sāy jóŋ mē.
// Faim de viande / fait / moi //
// J‟ai faim de viande //
J‟éprouve l‟envie de manger de la viande.
Ici, ces lexèmes sont apparemment substituables sur le plan paradigmatique. Le problème ne
se perçoit pas au niveau phrastique mais pragmatique. Comme nous l‟avons souligné ci-haut,
aucun locuteur (natif) du tupuri ne dira «sāy jóŋ mē » parce que cette phrase connote la
gourmandise et par conséquent dysphorique. La traduction en français nous égare et nous fait
croire que ces phrases ont les mêmes sémantismes. L‟on observe souvent deux possibilités
d‟emploi de « sāy» chez les locuteurs.
Premièrement, lorsqu‟on éprouve le besoin soi-même de manger de la viande. Dans ce
cas nous n‟aurons pas les mêmes constituants comme dans notre exemple en amont.
Observons l‟exemple suivant :
 sāy näy bàa ndï
//envie/ viande/ prendre+passé/moi//

107
//l‟envie de viande m‟a pris //
“ J‟ai été pris d‟une forte envie de viande“
Dans cet exemple, on constate que pour rendre euphorique son emploi, il faut lui
adjoindre un complément déterminatif (näy= viande) dans son environnement lexical.
Deuxièmement, on l‟emploi lorsqu‟on veut traiter quelqu‟un d‟envieux, gourmand.
Cet emploi a une connotation péjorative. Ce sème dysphorique est rendu possible parce que
dans la culture tupuri, les personnes qui ont « la faim de viande » sont généralement traités
des sorcières (wãy- krɛŋ88). Voilà l‟exemple illustratif :
 Ndo de sāy debaŋ.
// tu / avec/faim de viande /trop //
//tu as trop la faim de viande//
Tu éprouves trop d‟envie de manger de la viande.
De toute cette analyse approfondie, nous convenons que ces deux lexèmes sont
partiellement liés au niveau sémantique. Les frontières entre les types de synonymes ne sont
véritablement pas étanches. Leurs différenciations (POLICKÁ 2014 :79) s‟avèrent important
à étudier dans un processus de désambigüisation du sens des lexèmes synonymes.

I-2-2-Variantes ou différenciations sémantiques de quelques entrées


Les différences qui s‟établissent entre les lexèmes synonymes sont manifestes sur trois
aspects de la langue. Ces différences constituent des critères essentiels pour distinguer les
termes qui sont sémantiquement proches (parasynonymes) et dont la distinction est délicate. Il
s‟agit du critère stylistique, syntaxique et sémantique. Il est généralement admis qu‟il n‟existe
pas de vrais synonymes et qu‟ « il paraitrait invraisemblable que deux mots ayant exactement
le même sens survivent tous deux dans la même langue. » 89 Dans l‟analyse des unités
lexicales qui sont liées par une relation de synonymie, nous retrouvons un ensemble de
situations variables. Quelques cas de variantes sémantiques ont été identifiés dans notre
corpus. Il s‟agit entre autres des variantes géographiques, les variantes stylistiques, et les
variantes combinatoires90.

88
krɛŋ dans la culture tupuri est une sorcellerie inconsciente, transmise héréditairement (en général par la mère).
Anthropophage lui, le sorcier est tenu responsable de la maladie et de la mort. C‟est par rêve que son identité se
manifeste au malade dont la famille exige une rétractation publique du sorcier pour la guérison, qui consiste à
„donner de l‟eau au malade.
89
FABRE & BAYLON, 1989 :168
90
Ibid. p.168

108
I-2-2-1-Variantes géographiques ou dialectales
Nous avons indiqué au chapitre premier qu‟il existe des variétés dialectales de la
langue tupuri. Cela se matérialise dans ce dictionnaire. Dans le DITFA, il existe des lexèmes
qui appartiennent à des dialectes différents. Une analyse poussée de ces lexèmes prouve qu‟ils
sont intrinsèquement liés par le sens. Ces lexèmes se trouvent divergent dans leurs formes,
mais sémantiquement unis. On peut encore le comprendre encore davantage lorsqu‟il faut
proposer un équivalent à chacun de ces lexèmes en français. Il se trouve qu‟on aura qu‟un seul
équivalent pour les deux unités lexicales. Par exemple :
98) bäncéeré var. bäycéeré (DITFA, 31B)
99) bäycéeré n. plante sp.aux feuilles comestibles .var. bëmcéeré,
bäncéeré. (DITFA, 33B)
100) bëmcéeré var. bäycéeré. (DITFA, 35B)
Pour désigner cette variété de légume ou « plante aux feuilles comestible» en tupuri,
une partie du pays tupuri utilise le terme « bäycéeré», l‟autre partie « bäncéeré» et une autre
utilise «bëmcéeré». Il s‟agit respectivement de la variété dialectale du ɓäŋ-lìŋ et ɓäŋ-gö
(pour le terme bäycéeré) et celle du fāalë-píyèw (pour les variantes bäycéeré et bëmcéeré).
Ces doublets ou ces variantes dialectales n‟ont pas d‟impact sémantique majeur à l‟intérieur
chez les locuteurs de la langue tupuri, mais le problème se pose lorsqu‟on veut trouver un
équivalent à chacune de ces unités en français. Dès lorsqu‟on se rend compte que ces unités
lexicales ont un équivalent unique en français, on dira qu‟elles sont liées par une relation de
synonymie absolue.

I-2-2-2-Variantes stylistiques
Les variantes91 stylistiques sont liées à des « registres». Elles peuvent être aussi liées
à des styles distincts qui dépendent soit de la situation du locuteur dans le groupe soit de la
recherche d‟effet formels. Les variantes stylistiques sont assimilables aux synonymes
stylistiques. Les synonymes stylistiques sont Reprenons les exemples suivants :
gɔŋgā n . empr. ( ?) vérité .syn. cūwāy
cūwāy n.coll.vérité. á cūwāy “ c’est vrai“
Les deux entrées sont unies par une relation d‟équivalence de sens. Lorsqu‟on emploi
« gɔŋgā » (vrai) plus souvent, pour un locuteur du tupuri, c‟est pour jouer sur le caractère
partiel de la vérité dont il est question. Ce lexème ne dénote pas une vérité absolue, mais un
jeu de camouflage de la vérité qu‟on pense dire. Lorsqu‟on emploi « cūwāy» dans une

91
Op.cit. p.168

109
situation de communication, avec l‟intensité de sa prononciation, l‟interlocuteur a
l‟impression que ce de quoi on parle est « véritablement vrai ». Les deux sont des synonymes
il est vrai et peuvent être mutuellement substituables dans tous les environnements, mais les
deux n‟ont pas le même degré ou intensité. Observons cette situation de communication
suivante :
 Wäa cūwāy !
//dire+présent/ vérité//
Dis la vérité !
 cūwāy!/ gɔŋgā !
C‟est vrai ! (conforme) / C‟est vrai ! (apparent)
Au niveau de la première phrase, on se rend compte que c‟est un substantif or au
niveau de la deuxième phrase il s‟agit plutôt d‟un adjectif. Lorsque la première exprime ce qui
est conforme à la vérité, la deuxième connote ce qui est apparent ou parait vrai. Ce sont des
synonymes stylistiques ou fonctionnels92.À une injonction comme « dis la vérité !» on peut
attendre deux réponses : si l‟interlocuteur emploi «cūwāy » l‟on pensera que c‟est conforme à
la vérité (même si dans la plupart des cas certains l‟emploient pour penser vrai ce qui parait),
au cas contraire, c‟est-à-dire quand l‟interlocuteur utilise «gɔŋgā » l‟on prend pour menteur
car ce lexème connote une partialité de vérité. On dira donc que les deux lexèmes n‟ont pas le
même contenu sémantique parce qu‟un sème de différenciation les désunis. Le choix entre
l‟une des unités est orienté vers la recherche d‟un fait ou d‟un jeu de style. Ici, comme dans la
variante dialectale, le problème ne se pose pas dans la langue source mais plus lorsqu‟on veut
attribuer des équivalents à ces entrées dans la langue cible (français). Trouvera-t-on
d‟équivalent à chacune ? Doit-on les donner le même équivalent (« vérité») comme l‟auteure
les présente dans le dictionnaire ? Un besoin de description approfondie s‟impose pour lever
l‟ambigüité entre les deux lexèmes. Par ailleurs, on utilisera des syntagmes pour identifier le
sémantisme de chaque lexème.

I-2-2-3-Variantes combinatoires
Lorsqu‟on parle de la variante combinatoire, on fait allusion à la différenciation dans
la combinaison syntaxique (différence dans l‟environnement syntaxique 93 ) de deux ou
plusieurs unités lexicales qui ont une relation d‟équivalence sémantique. Pour FABRE &
BAYLON, parlant des variantes combinatoires, pensent que « l‟identité de sens n‟apparait

92
Op.cit.p.168.
93
Alena POLICKÁ 2014 :79.

110
que dans des syntagmes de nature particulière, et en nombre limité »94. Autrement dit, les
lexèmes substituables dans un nombre limité de contextes ont en réalité des aires sémantiques
fort différentes dans leur composition et non « juxtaposable»95. Voici quelques entrées qui
illustrent ce phénomène :
101) gèɗɛr n. rat sp. syn. mbïirí-fí ? (DITFA, 99G)
102) mbïirí-fí n. rat .sp. (déchet /d’herbe). T.mbïirí-
fïí(excrément/de chèvre). (DITFA, 194M)
Lorsque deux lexèmes partagent le même contexte d‟emploi, on parle de la synonymie
contextuelle 96 . Celle-ci est en grande partie provoquées par la polysémie, les différences
d᾽emplois ont pour effet la restriction de la synonymie à un sous-ensemble de contextes
communs97. Observons les contextes d‟emploi suivants :

gèɗɛr

//nous /manger+passé composé/ rat/ hier//


Wür rè süu.
Nous avons mangé le rat hier.
mbïirí-fí

Le premier terme « gèɗɛr» = « rat » n‟est pas polysémique or le second est


polysémique. Les deux sont substituables quand le deuxième (« mbïirí-fí » = rat) est
métaphoriquement employé. Cette substitution n‟est pas possible au sens dénoté qu‟a le
lexème « mbïirí-fí ». Ce lexème signifie « excréments de chèvre » :

* Gèɗɛr

rùm ŋèlē.

Mbïirí-fí
 * Gèɗɛr r m ŋèlē.
// rat /fertiliser+présent /terrain//
*Le rat fertilise le sol.

 Mbïirí-fí r m ŋèlē.

94
FABRE & BAYLON (1989 :169.
95
Ibid. p.169.
96
Alena POLICKÁ 2014 :79
97
Ibid. p. 79.

111
//excréments de chèvre /fertiliser+présent/terrain//
Les excréments de chèvre fertilisent le sol.
La combinaison entre les deux lexèmes synonymes est, dans certains
environnements syntaxiques, possible et ne l‟est pas dans d‟autres. Ce phénomène, en
grande partie est dû à la polysémie de l‟entrée « mbïirí-fí » (« rat » et « excréments de
chèvre »), est appelé synonymie contextuelle ou partielle comme nous l‟avons indiqué en
amont. Il en résulte que, sur le plan méthodologique, une étude des synonymes doit
être d'abord contextuelle (prise en considération du discours). La méthode de l'analyse
distributionnelle est ici primordiale (LEHMANN et BERTHET, 2000 :56). Elle consiste à
préciser les environnements possibles de chaque mot, du point de vue syntaxique et
sémantique. A partir d'une étude des phrases où l'unité apparaît, elle dégage les
propriétés distributionnelles qui appartiennent en propre à cette unité en spécifiant les
constructions syntaxiques (sous-catégorisation syntaxique) et en indiquant la nature
sémantique des .
Ce n'est donc qu'après avoir montré l‟environnement syntaxique dans lequel
deux lexèmes synonymes peuvent être interchangeables que l'on pourra procéder à une
analyse de ce qui les différencient.

I-2-2-4-Variantes sémantiques
La variante sémantique est un élément essentiel qui permet de différencier deux ou
plusieurs lexèmes synonymes. Les synonymes sémantiques diffèrent plus que les synonymes
stylistiques. Leurs contenus sémantiques se distinguent soit par l'intensité de la dominante,
soit par l'absence d'un ou de plusieurs éléments complémentaires ou bien par le fait qu'un ou
plusieurs de ces éléments diffèrent plus ou moins. Les différences entre les sémèmes des
synonymes portent sur les sèmes spécifiques 98 . Observons la description des lexèmes
suivants :
103) gùr-köo n. 1. Racine .2. Souche d’arbre. 3.[sic] poison. Cf.
gùn.gi. 4. [sic] médicament. Cf. sàŋgü (DITFA, 112G)
104) sàŋgü n. 1. Nom donné à toute plante utilisée comme
médicament. 2. Touffe de plantes cultivée par le chef de famille
plantée { gauche de l’entrée de sa case et qu’il utilise comme
“contre poison“.3. poison. (DITFA, 236S)
Gùr-köo se distingue de sàŋgü par les sèmes « racine » et « souche d‟arbre ». Ce
lexème a quatre acceptions. Les deux autres unités sémiques : «poison » et « médicament» le

98
Op.cit. p.56.

112
rapprochent du lexème sàŋgü qui à son tour se distingue du premier par un seul séme de
différenciation « plante99». Dans les deux cas, les sèmes qui les différencient relèvent de leurs
sens dénotés. Les sèmes qui les unissent sont des emplois métaphoriques. Cette variance
sémique limite la continuité sémantique entre ces lexèmes. C‟est ce qui justifie l‟existence des
parasynonymes. Les deux lexèmes ont en commun des sèmes, c‟est la raison pour laquelle
l‟auteure indique le lexème équivalent par un système de renvoi lexical.

II-Les renvois lexicaux : entre synonymie et analogie


Dans la description de la macrostructure et de la microstructure du dictionnaire tupuri,
on constate deux systèmes de renvois lexicaux. L‟un est fondé sur la relation d‟équivalence
sémantique, l‟autre est un procédé d‟analogie qui a un lien étroit avec le premier.

II-1-Renvois synonymiques
Dans la description des entrées de dictionnaire, les relations de synonymie sont
utilisées pour circonscrire le sens. Ces renvois lexicaux paraissent en complément de l‟analyse
sémantique proprement dite. Ils figurent, généralement, en fin d‟article. Par exemple :
105) dáäwa n. igname. Syn. déw (DITFA, 59D)
106) déwn. igname. syn. dáäwa (DITFA, 64D)
À travers ces entrées, on comprend que le renvoi lexical participe de la définition
d‟une adresse de dictionnaire. Les synonymes sont donc vus comme des aides à la définition
et à la compréhension. En plus de la définition qui est censée définir l'entrée en langue et
en plus des exemples qui apportent des contextes d'emploi de l'entrée, les renvois
lexicaux étendent le champ définitoire à des relations de sens que sont les « synonymes » ou
les « rapports logiques» 100.Ces entrées sont des synonymes réciproques et le renvoi prouve
qu‟elles sont interchangeables.
Il existe des renvoi qui n‟indiquent pas l‟interchangeabilité des deux unités lexicales.
Il y a rupture de renvoi. La première adresse indique un renvoi synonymique, mais la
deuxième ne fait mention d‟aucun renvoi lexical. Observons la structure des entrées suivantes :
107) déw-köo n. manioc (igname/de l‟arbre). Syn. mbāy (DITFA,
65D)
108) mbāy n. empr. ? manioc. (DITFA, 193M)

99
Dans la culture africaine en général et celle tupuri en particulier, les poisons et les médicaments sont fabriqués
à base des plantes naturelles.
100
GOUALAN G. (2011 :6) entend par « rapports logiques : métonymie, synecdoque… »

113
II-2-Renvois analogiques
Le système de renvoi lexical dans les dictionnaires équivaut dans une certaine mesure
au phénomène de l‟analogie. Signalons que nous retrouvons également l‟analogie dans le
dictionnaire tupuri-français. Ce dictionnaire dispose en effet d‟un système de renvois
analogique indiqués par des abréviations (comme démontré ci-haut).
109) pɔrɗɔ n. pétales rouges de l’hibiscus sabdariffa utilisées pour
faire de la sauce, « karkandzé ». cf. nèe-síŋ (DITFA, 224P)
110) nèe-síŋn. plante dont les feuilles dites “oseille“ sont
appréciées pour les sauces. hibiscus sabdariffa.(DITFA, 202N)

Les deux entrées sont liées par une relation d‟hyponymie et d‟hyperonymie. Le
premier article « pɔrɗɔ» dont l‟équivalent français est : « pétales rouges de l’hibiscus
sabdariffa utilisées pour faire de la sauce, « karkandzé» constitue une unité en relation
d‟inclusion au deuxième terme. Le deuxième terme, « nèe-síŋ» qui veut dire «plante dont
les feuilles dites “oseille“ sont appréciées pour les sauces », est l‟hyperonyme du premier.

II-3-La distinction entre renvois synonymique et renvois analogiques


Les renvois analogiques doivent être distingués des synonymes. Dans le dictionnaire
de Suzanne RUELLAND, ils constituent des jonctions capitales entre les différentes entrées,
cela permet de circuler à l‟intérieur de la microstructure du dictionnaire d‟une façon
méthodique. Cette relation d‟analogie y est utilisée d‟une manière systématique.
La notion de synonymie concerne en principe les mots interchangeables dans un
énoncé. L‟analogie, généralement, appartient à la même catégorie grammaticale que le mot
qu‟il remplace. Autrement dit, les deux entrées peuvent être des substantifs comme le
confirme l‟exemple ci-dessous :
111) fír-fïi n. syn. fíirí-bïi (DITFA, 85F)
112) fíirí-bïi n. roseau. Syn.fír-fïi (herbes/ de l’eau). (DITFA,85F)
L‟analogie joue plus un rôle indicatif, elle renvoi le lecteur vers des mots
correspondant à des notions proches du mot de départ. Elle indique les autres mots qui
constituent la même famille et indique qu‟en consultant l‟article de ce terme, on apprendra des
choses sur la vedette. Contrairement aux synonymes, ils peuvent appartenir à d‟autres classes
grammaticales, ce qui unit l‟entrée et le mot en renvoi est simplement une relation associative.
Ce type d‟analyse n‟est pas présent dans le DITFA.
Ces relations associatives permettent de recenser les mots qui sont sémantiquement
liés de façon privilégiée au mot de départ. Quand ce mot de départ, la vedette, possède

114
plusieurs sens ou emplois, les renvois analogiques sont indiqués pour chacun d‟entre eux. Le
renvoi analogique permet le recensement de relations lexicales telles que l‟hyperonymie,
l‟hyponymie, l‟antonymie, la synonymie et elle permet aussi de répertorier les relations
notionnelles, surtout les relations de types partie-tout.

II-4-Fonctions des renvois


L'organisation du système des renvois est, dans le contexte démontré en amont, très
importante pour l'obtention de bons résultats dans la recherche des données. Ce système a, en
tant que réseau de relations lexico-sémantiques, pour objectif de garantir la circulation des
informations et orienter les lecteurs sur le parcours à suivre pour obtenir les informations
recherchées. Dans la préface de la deuxième édition du Dictionnaire alphabétique et
analogique de la langue française (1985), on peut lire que :
Ce système [analogique] est une pédagogie du vocabulaire. Ce type de
dictionnaire est le seul où, ne connaissant pas ou ayant oublié une forme de
la langue, l'utilisateur a les plus fortes chances de la trouver de la manière la
plus naturelle qui soit, c'est-à-dire au moyen des formes qu'il maîtrise déjà (Rey,
1985 : LI).
Ceci dit, les renvois dans les dictionnaires en général ont un but pédagogique.
L‟observation faite montre que certains renvois n‟y figurent qu‟à titre indicatif, ils
complètent la définition. On peut donc dire que la présence des lexèmes synonymes en tant
que renvois dans le DITFA s'explique par le soutien à la compréhension qu'ils
peuvent apporter, mais surtout ils contribuent à l'élargissement de la définition et créent des
connexions entre des entrées que l'ordre alphabétique ne peut évoquer.
Dans une certaine mesure, nous dirons que ces renvois lexicaux offrent aux usagers la
possibilité de se faufiler à l‟intérieur du dictionnaire et ainsi d‟accéder aux différentes
informations d‟une façon ordonnée. L‟absence de renvoi dans un dictionnaire le rend non
stimulant et dépourvu de toute connexion de l‟entrée à une autre. Il ne faut donc pas
s‟arrêter seulement au terme qu‟on recherche afin de sombrer dans une sorte de ghettos.

Pour finir, si l‟existence des synonymes totaux fait problème, dans le traitement
lexicographique, il est une des sources qui complexifient le classement et le traitement du sens
des entrées dans le dictionnaire tupuri-français. En effet, dans le DITFA, l‟auteure utilise le
système de renvoi lexical pour rapprocher les adresses qui ont une relation d‟équivalence
sémantique. L‟auteure pense qu‟il existe pour certains lexèmes des synonymes totaux et il
n‟est pas évident de décrire comme entrée de dictionnaire cette lexie vedette. La définir serait
pour elle une aberration et une répétition inutile. Or, pour quelques cas d‟entrées que nous

115
avons analysées, il est loin de penser qu‟il s‟agit effectivement des synonymes parfaits. Par
conséquent, un soin particulier doit être accordé pour définir chaque entrée que l‟on renvoi
sous prétexte que celle-ci est exactement la même chose. L‟analyse sémique de deux lexèmes
synonymiques révèle qu‟il existe un pont sémantique entre les deux, mais une distanciation
des sèmes de chacun se fait ressentir dans leur emploi. Pour d‟autres cas de lexèmes
synonymiques mise en exergue dans le dictionnaire, il est difficile qu‟on puisse parler de
synonyme comme le fait entendre l‟auteure. Pour des lexèmes qui ne se différent qu‟au niveau
de quelques lettres, nous leur conférons la terminologie des paronymes. Ceux-ci sont rendus
possibles à cause des timbres vocaux des locuteurs de chaque dialecte. Il est donc difficile
pour un usager (qu‟il soit un apprenant de la langue tupuri ou un traducteur professionnel) du
dictionnaire tupuri-français, de le consulter aisément parce qu‟on y rencontre plusieurs
problèmes de description des vedettes.

116
CHAPITRE V : PROBLÈME DE TRAITEMENT
SÉMANTIQUE DANS LE DITFA SUGGESTION
D’UNE MÉTALANGUE POUR UNE VERSION
AMÉLIORÉE DU DICTIONNAIRE TUPURI-
FRANÇAIS

117
Globalement dans ce présent mémoire, nous avons opté pour deux démarches : la
première est une analyse descriptive et la deuxième est une analyse prescriptive. L‟aspect
descriptif a été l‟objet des trois derniers chapitres (II ; III ; IV). Ce chapitre fait un inventaire
des problèmes rencontrés dans le DITFA et propose un métalangage approprié pour une
version améliorée du dictionnaire tupuri-français. Ces propositions sont pour la plupart
inspirées des théoriciens, mais certaines découlent de notre propre constat de l‟analyse faite
du corpus.

I-Problèmes de traitement sémantique


Dans l‟analyse sémantique de la microstructure de notre corpus lexicographique, il en
ressort plusieurs imperfections dues au mauvais traitement des articles du dictionnaire. Ces
problèmes se situent sur trois aspects essentiels de notre angle de réflexion : il s‟agit d‟abord
des problèmes liés au traitement de la définition lexicographique bilingue, ensuite, ceux qui
relèvent du traitement des polysèmes et des homonymes, et enfin, des imperfections causées
par le mauvais traitement des adresses synonymes et leurs équivalents en LC.

I-1-La définition lexicographique


S‟agissant de la définition lexicographique, nous avons répertorié quelques problèmes
qui touchent non seulement les types de définitions en usage dans le dictionnaire tupuri-
français mais aussi et surtout les éléments ou composants de la définition.

I-1-1-Quelques types de définitions défaillantes


Nous n‟avons pas la prétention d‟avoir épuisé l‟inventaire de toutes les définitions
défaillantes. Il en existe plusieurs et nous ne mentionnons ici que quelques-unes qui sont
visibles. Entre autres nous aurons la définition hypospécifique et la définition synonymique.

I-1-1-1-Définitions hypospécifiques
Après analyse de quelques unités lexicales on se rend compte qu‟il y existe des
lexèmes qui ne sont pas suffisamment présentés du point de vue de leur définition : Il s‟agit
de la définition hypospécifique (LEHMANN et BERTHET, 2000 :18). Cette dernière se
conçoit comme une description insuffisante des traits d‟une entrée de dictionnaire. Exprimer
le défini et rien que le défini, tel est, nous le savons, l'objectif de la définition. Ceci

118
dans le but de désambigüiser tous les lexèmes de la langue et satisfaire l‟usager du
dictionnaire. Mais la justesse de l'adéquation défini /définition n'est pas toujours obtenue
dans le DITFA. Cette insuffisance définitoire est remarquable dans plusieurs adresses que
décrit l‟auteure. Par exemple :
113) lɛtgë v .tr. 1. Essuyer de la main, épousseter.2. racler pour
nettoyer .le’et ɓi haarë. “racler la calebasse“ (DITFA, 172L)
Cette description de la lexie ne permet pas à l‟usager (apprenant non natif de la langue)
de se retrouver lorsqu‟il sera en situation de communication avec un natif de la langue qui
maitrise tout l‟environnement lexical de la lexie mise en exergue. Il faut reconnaitre que
cette entrée n‟est pas suffisamment présentée. En effet, plusieurs autres sémèmes manquent à
cette entrée. Il faut donc compléter lɛtgë de ses environnements lexicaux ou des
combinatoires métaphoriques :
 lɛtgë- cèë est un verbe transitif qui signifie littéralement, tirer avec
force le poisson de l’eau. C’est en fait l’action de pêcher les poissons {
l’aide de l’hameçon.
 lɛtgë-dɔɔ : tirer avec force la main.
 lɛtgë-koo tirer les branches d’arbre pour en faire des bois de
chauffage ou l’élaguer.
La lexie lɛtgë a pour variante orthographique «lwɛɗgë». Lorsque l‟entrée est ainsi
présentée l‟usager est tout au moins satisfait et l‟ambigüité sémantique est levée.
Les entrées suivantes présentent aussi des problèmes de description qui peuvent être
rangés dans les définitions hypospécifiques :
114) dùu.gï 1.v.tr.p.toucher, palper. 2. v. tr. o.provoquer(DITFA,
71D)
115) d ’.gï v. tr.chasser les mauvais esprits, notamment män-hùulí
en faisant du bruit. Cf. dò’.gë (DITFA, 71D)
Deux problèmes sont soulevés ici : Premièrement, il y a confusion au niveau de la
description de ces entrées ou inversion de définition de ces lexies. Dùu.gï n‟a pas les
équivalents français (1.v.tr.p.toucher, palper. 2. v. tr. o. provoquer) tels que présentés par
l‟auteure, mais plutôt la définition qu‟elle attribue àd ’.gï (chasser les mauvais esprits,
notamment män-hùulí en faisant du bruit) .De même, d ’.gïa plutôt la définition suivante :

119
« 1.v.tr.p.toucher, palper. 2. v. tr. o. provoquer». Deuxièmement, nous avons repéré le
problème d‟insuffisance des sémèmes dans la description de la lexie -vedette dùu.gï. Au lieu
de ce que nous présente l’auteur, on aura donc la description suivante pour les deux entrées:
 Dùugi 1 n. [Culture]. Cérémonie spéciale du Chef de Daawa, après la fête
du coq. Elle commence à Daawa et se poursuit dans les autres villages
tupuri avec des grands bruits pour chasser les esprits des ancêtres
“manmuyuuri“ hors du village. 2. dùugi bàa grondement detonnerre. ex :
bàa dúu lɛwɛrɛ la pluie gronde { l’Est.
 d ’.gïv.intr. 1) toucher. 2) palper.ex : du’ we dɔɔ me se : touchez-moi. 3)
provoquer.ex : ndɔ du’ me lɛ la ?pourquoi me provoques-tu ? 4).du’gi de
waare déranger qqn.ex : á duɗ wɔ me de waare ils me dérangent.5)
appara tre. ex paa de duɗ man dwȩȩ : ses seins apparaissent gros comme
un furoncle. 6) .du’gi gɔr jobo gɔ gesiŋ : vaincre quelqu’un. à la lutte ;
renverser quelqu’un.
Tous ces environnements lexicaux nous ont permis de lever l‟ambigüité sémantique
de cette lexie et d‟ajuster sa description pour qu‟elle ne soit pas hypospécifique mais spécifiée
ou hyperspécifiée.

I-1-1-2-Définition synonymique
Les synonymes ne sont pas uniquement présents dans le DITFA en tant que renvois
analogiques. La synonymie est également présente dans les articles dédiés aux entrées.
Dès lors, ils font partie de la définition, ils sont la définition même (DOUALAN G,
2011 :6). Ce ne sont plus des ajouts présents à titre indicatif comme nous l‟avons
présenté dans le chapitre consacré à ce type de relation sémantique. La synonymie est
parfois utilisée comme procédé lexicographique, mais elle est une facilité dont les
lexicographes ne devraient guère faire usage. Elle ne garantit pas la description exhaustive
et suffisante d‟une unité lexicale surtout que nous nous situons dans une perspective bilingue.
Définir une unité lexicale c‟est dire ce qu‟elle est. Il ne s‟agit pas de donner comme élément
de définition une autre unité lexicale qui n‟est pas son synonyme exact. Il est tout à fait
difficile pour un francophone qui voudrait apprendre au travers de cet ouvrage
lexicographique la langue tupuri de se retrouver. Reprenons ces exemples :
fír-fïi n. syn.fíirí-bïi (DITFA, 85F)

120
gér-w ān. syn. w ā (DITFA, 103G)
Lorsque dans un dictionnaire bilingue la définition est présentée de cette façon,
l‟usager est dans l‟obligation d‟aller à l‟intérieur du dictionnaire consulter le lexème
synonyme qui n‟a toujours pas les mêmes sèmes que la lexie à laquelle elle fait référence.
Cette pratique rend indigeste, ennuyeuse l‟utilisation dudit ouvrage. Un accent doit être
particulièrement mis sur la présentation ou la description de ces unités lexicales.

I-1-2-Les éléments définitoires défaillants

Nous avons répertorié quelques problèmes qui relèvent des composantes de la


définition des unités lexicales dans le DITFA. Il s‟agit du domaine, de la dimension et des
incluants d‟une lexie vedette.

I-1-2-1-Domaines des lexies

Le domaine (VÉZINA R. et al, 2009 :8), qui constitue une branche spécialisée de la
connaissance, sert de cadre à l‟intérieur duquel est établi le champ conceptuel. Il correspond,
d‟une certaine façon, à une orientation que l‟on donne à la définition. Il est donc important de
définir un concept en fonction du domaine ou du sous-domaine dans lequel il s‟inscrit.
L‟indication des domaines dans le processus de la définition lexicographique contribue ainsi
à la description et à la délimitation de l‟entrée et peut être considérée comme un élément
définitoire, bien que cette information soit généralement consignée à l‟extérieur de la
définition. Nous nous sommes rendu compte après analyse faite que dans notre corpus, les
domaines dans lesquels se retrouvent chaque vedette ne sont malheureusement pas présentés.
Sur les 3000 entrées du dictionnaire, l‟on ne retrouve aucun métalangage dans la zone
sémantique qui précise le domaine d‟appartenance de la lexie.On peut le remarquer à travers
les exemples ci-haut mentionnés.

Pourtant, l‟indication du domaine participe ainsi de façon significative à


l‟explicitation du sens et peut de ce fait être considérée comme élément définitoire. Il s‟agit
toutefois d‟un définissant d‟un type particulier. L‟indication du domine d‟une unité lexicale
est importante pour deux raisons essentiels : soit pour présenter les conditions d‟emploi
monosémique d‟une unité polysémique, soit pour fournir, sur une entrée donnée, des
informations de nature encyclopédique (DUBOIS et al, 2007 : 158). La perspective

121
onomasiologique a permis à François RASTIER de donner une orientation à ce concept
lorsqu‟il pense que c‟est « un groupe de taxèmes tel que dans un domaine donné il n‟existe
pas de polysémie ».

I-1-2-2-Dimensions des lexies

Les sèmes, qu‟ils soient inhérents ou afférents, devraient encore être distingués en
fonction du type de contenu auquel ils renvoient. Présentons deux types de sèmes
particulièrement faciles à identifier : les sèmes qui correspondent aux domaines de l‟activité
humaine (les indicateurs lexicographiques des dictionnaires devraient en principe en donner
une bonne idée, par exemple : Cult. (Culture), Géo. (Géographie)); les sèmes qui
correspondent à des classes de généralité supérieure, des dimensions (VÉZINA R. et al, 2009 :
8), regroupées par oppositions, par exemple concret vs abstrait, humain vs animal,
animal vs végétal, etc. Par exemple, le signifié „tassawa‟= assiette, contient les sèmes
/alimentation/ (qui constitue son domaine) et /inanimé/, /concret/ (fait référence à la
dimension). En termes techniques, les sèmes reliés aux domaines sont des sèmes
mésogénériques et ceux reliés aux dimensions, des sèmes macrogénériques (RASTIER,
1987).

I-1-3-Les faux incluants


Les faux incluants sont les éléments introductifs d‟une adresse qui ne permettent pas
de répondre de façon minimale, claire et précise à la question : Qu‟est-ce que le lexème α
(alpha)? Les faux incluants n‟arrivent pas à évoquer le terme générique auquel appartient le
défini. De ce fait, on comprend que le recours à un faux incluant est souvent considéré
comme la marque d‟une définition inadéquate, inappropriée, et même incomplète. Ainsi, si
l‟on quitte du tupuri vers le français en définissant par exemple l‟entrée suivante ainsi qu‟il
suit:
dùugï[sic]vt. chasser les mauvais esprits, notamment le man-huuli
en faisant des bruits.,(DITFA, 71D)
La définition n‟est pas satisfaisante puisque dùugï qui a le sens de chasser les esprits
n‟est pas un verbe mais un nom. Dans ce cas, un nom doit avoir pour incluant un substatif.
Nous pensons proposer plutôt ce métalangage :
dùugï1 n.[Culture].Cérémonie spéciale du Chef de Daawa, après la
fête du poulet. Elle commence à Daawa et se poursuit dans les
autres villages tupuri avec des grands bruits pour chasser les
esprits des ancêtres ‘manmuyuuriʼ hors du village.

122
dùugï2 1) v.intr.mettre le feu à.ex bargiŋn duu gɔ :la cuisine s’est
brûlée.Syn.: dɔ’ge, rɔɗge.2) reprendre vie.

dùugï b{a grondement de tonnerre. ex b{a duu lɛ wɛrɛ :la pluie


gronde { l’est.

Dans le sémantisme de la vedette dùugï1l‟incluant est en effet la « cérémonie » qui


appartient au domaine de la « culture ».Cette adresse n‟a pas qu‟un seul sens comme l‟a
présenté la lexicographe dans la DITFA. Les faux incluants ne permettent pas aux usagers du
dictionnaire de comprendre profondément le sens de la lexie mise en exergue.

II-Polysémie, homonymie et équivalents en LC


L‟auteure du dictionnaire est elle-même consciente du problème qui existe dans le
traitement des unités lexicales du dictionnaire lorsqu‟elle affirme à l‟introduction dudit
dictionnaire: « La distinction entre homonymes et termes en relation de polysémie est
délicate pour un non-locuteur de la langue » (S. RUELLAND, 1988 :23).Bien encore, « un
cas plus problématique est celui de la place des idiotismes, en particulier lorsque la langue
propose plusieurs entrées homonymes » (Ibid. p.23), qui, souvent se confondent à des unités
lexicales polysémiques.

II-1-Distinction entre polysèmes et lexèmes homonymes


Un des problèmes fondamentaux de la conception des dictionnaires, en plus du choix
des mots à définir, est de savoir distinguer entre les homonymes et les polysèmes. Le
problème est le plus pertinent dans le cas des homographes, qui ont une graphie identique.
Quand est-ce qu‟on peut dire qu‟il s‟agit de deux mots et non d‟un seul avec des sens variés ?
L‟existence d‟homographes pose le problème sémantique de la distinction entre les
homonymes et les polysèmes ? C‟est aussi une des sources des difficultés sérieuses dans la
recherche de leurs différents équivalents dans la langue cible. Soient les formes suivantes :
116) bàa.gev.tr.o. Attraper, saisir. it.bàk.ge (DITFA, 29B)
117) bàa.gev.tr. Coaguler, cailler (DITFA, 29B)
118)bàa.gev.tr.p remplir, bàa hoolè go de bii . remplir la
gargouillette d’eau. (DITFA, 29B)
Elles ont plusieurs sens (attraper, saisir, pour la première entrée ; coaguler, cailler,
pour la deuxième entrée, et, remplir, pour la troisième) avec une forme commune. Doit-on
considérer là des acceptions d‟une même lexie (polysémie) ou trois lexies bàa.ge de même
forme et ayant des formes éloignées? Les fondements de la distinction entre ces trois entrées

123
ont été cherchés dans les rapports existant entre les unités considérées dans le lexique actuel
puisque l‟on ne dispose pas d‟outils adéquats pour interroger les connaissances historiques
(étymologie). En synchronie, les homonymes présentent des dérivés différents : Dans les deux
premières entrées il y a un sème commun de maintenir dans un état désiré or la dernière
s‟éloigne de moins en moins (arrêter le processus de remplissage lorsque le récipient ou
l‟objet à remplir est plein ou a atteint son degré/état maximal). Il est donc ici difficile de
parler des entrées homonymes, mais plutôt les consacrer l‟appellation de polysèmes car les
sens sont intrinsèquement liés. Un mot polysémique possèderait plusieurs synonymes, chacun
correspond à un de ses sens ; les homonymes se caractériserait par des antonymes différents.
Cette confusion de sens demande une analyse poussée du sens des lexies pour un processus de
désambigüisation des entrées du dictionnaire.
Il y a trop d‟homonymes qui créent des problèmes de confusions car ils sont utilisables
dans les mêmes contextes. Observons la description des entrées suivantes :

119) w ā n. étoile du matin. Cf. gérë (273W)


120) w ān. flèche 2. Aiguille en bois pour coudre des pailles, des
calebasses. Cf. pàadälë
Il existe ici un problème de classement des deux entrées. Les deux ne doivent pas être
décrites distinctement. Il y a continuité de sens entre les deux. Par conséquent le premier
lexème doit être spécifié comme une acception de la deuxième. On dira donc qu‟il s‟agit
plutôt d‟une entrée polysémique au lieu qu‟elles soient considérées comme deux entrées
homonymes.

II-2-La polysémie divergente


La divergence des unités lexicales polysémiques est un problème crucial dans le
dictionnaire tupuri-français. L‟équivalent à proposer dans LC ne peut couvrir toutes les lexies
d‟un seul vocable de LS. En effet, la polysémie symétrique ou parallèle
(BOUCHADHAKHS., 2008 : 2)est inexistante ou rarissime entre les langues. Prenons
l‟exemple suivant :
121) m ŋgüur n. forge. Traditionnellement transmis dans un
lignage, de nos jours on peut l’acquérir par l’achat du bïgi
(marteau) ou on peut l’acquérir par l’alliance. ngüurí. (DITFA,
190M)
Le vocable français « forge », ne peut pas être proposé comme un équivalent à
m ŋgüur , d‟abord, parce que la polysémie de ce dernier est différente et ensuite, parce que
certaines acceptions de m ŋgüur peuvent avoir comme équivalent des lexies appartenant à

124
d‟autres vocables. Dans la langue source, l‟unité lexicale est polysémique or l‟équivalent
proposé en langue cible ne correspond pas à ces acceptions. Un sens manque donc à cette
unité. On doit par conséquent le spécifier : « m ŋgüur » a d‟abord par essence le sens de
« clan tupuri» pour ensuite désigner l‟activité pratiquée par ce clan : « forge». L‟équivalent
proposé à cette lexie de LS est appelé équivalent partiel.

II-3-Polysémie asymétrique et équivalent partiel


En plus de la polysémie asymétrique ou divergente comme définie en amont, les
équivalents partiels s‟étendent aussi au cas d‟une divergence au niveau des composantes
sémantiques de deux lexies dites « équivalentes ». C‟est surtout ce dernier type d‟équivalent
qu‟il convient, selon nous, de qualifier réellement de « partiel ». Ici, l‟équivalent à proposer
est tout d‟abord une lexie de LC qui correspond à une autre lexie de LS. Il n‟est pas évident
de songer qu‟il existe réellement de polysémie parallèle entre deux lexèmes appartenant à
deux systèmes linguistiques appartenant à deux phylums totalement éloignés. Il importe de
préciser quelques cas de figures de l‟équivalent partiel.

II-4-Quelques cas de figures de l’équivalent partiel


Nous faisons ici ressortir trois cas de figures101 qui structurent l‟équivalence partielle
des lexies de LS (tupuri) vers LC (français).
Tout d‟abord, le premier cas de figure est visible lorsque « l‟équivalent à proposer a
un sens plus précis, plus étroit que l‟unité en langue source »102. Par exemple :
122) kūlɛɗē q. lisse. (DITFA, 161K)
Ceci dit, l‟entrée « kūlɛɗē» peut avoir comme équivalent plus spécifique« lisse ». La réalité
dans la langue source regorge une pluralité de sens. Inventorions l‟environnement lexical de
la lexie pour désambigüiser son sens en français :
 Céége kūlɛɗē= raser de façon à rendre lisse.
 Jwa’ge kūlɛɗē= fouetter correctement.
 Yogge kūlɛɗē= laver soigneusement.

101
BOUCHADHAKH S., (2008), « La définition dans les dictionnaires bilingues : Problèmes de polysémie et
d‟équivalence interlangues », Université de Sherbrooke, p.4.
102
Ibid.p.4.

125
Ensuite, dans le deuxième cas de figure l‟équivalent à fournir a un sens plus large, plus
général que le lexème tupuri. Nous pouvons citer l‟exemple suivant :
123) mücúycüy n. fourmi noire sp. (DITFA, 189M)
« Fourmi noire » n‟est pas l‟équivalent exact de la lexie « mücúycüy». Ces unités lexicales
sont unies par un lien d‟inclusion (hyperonyme et hyponyme) de sens, car il existe une
pluralité de « fourmi noire». Cette entrée peut recevoir la description suivante :
Mücúycüy n. fourmi-cadavre : grosse fourmi noire (genre
paltothyreus) à effluence de putréfaction.
En fin, le troisième cas de figure de l‟équivalent partiel se présente, généralement,
lorsque l‟équivalent proposé et la lexie en langue source sont sémantiquement proches, ou
encore lorsqu‟ils partagent certaines composantes sémantiques sans que l‟une des deux
lexèmes ne renvoi à l‟autre et sans que les deux ne soient liés par une relation
d‟hyperonymie/hyponymie.

II-5-Multiplicité des équivalents pour un lexème : le cas de la polyéquivalence


La multiplicité des équivalents pour une seule lexie se manifeste lorsqu‟il n‟existe
aucune relation de synonymie entre les équivalents proposés. Ces derniers sont simplement
des quasi-équivalents qui dénotent ou renvoient à des choses différentes. Le seul lien qui
existe entre eux est réalisé via la lexie en langue source. Reprenons l‟exemple suivant :
d ’.gï1.v.tr.p.toucher, palper. 2. v. tr. o. provoquer
Ces équivalents proposés ne sont pas des synonymes parfaits. Dans ce cas, comme la
différenciation sémique est marquée entre les unités de LC, l‟usager peut être confus et
opérera avec peine le choix entre ces unités. Au lieu que cette polyéquivalence soit pour
l‟usager une source d‟enrichissement de son vocabulaire, l‟amène plutôt à faire une mauvaise
traduction. Ils partagent, certes, entre elles quelques traits sémiques, mais se distinguent par
d‟autres composantes.
Prenons un autre cas de polyéquivalence qui fait problème :
124) ɗ{k.ge v.tr. constater, analyser. Ndi ɗ{k rë nō “ j’ai réfléchis {
cette affaire“. ɗ{k ne “ penses-y“ .cf. ɗɛk.gë, ɗìk.gï. (DITFA, 78ɗ)
Les deux équivalents proposés ici ne traduisent pas exactement l‟idée véhiculée dans
la langue source.

126
III-Problèmes de traitement de la synonymie
Après analyse en profondeurr du corpus, nous avons eu à repertorier quelques cas de
problèmes liés au tratement de la synonymie.

III-1-La non traduction des renvois synonymes


Un constat général a été fait au niveau de la description des liens de sens. Si les
lexèmes mise en exergue, de part et d‟autre ne sont pas définis et ne sont pas traduit
(puisqu‟il s‟agit d‟un dictionnaire bilingue), alors le système de renvoi devient défaillant. Le
système de renvois peut ainsi se présenter dans la macrostructure et/ou dans la microstructure.
Toutes les entrées qui font appel à un renvoi synonymique ou à un renvoi analogique ne sont
pas décrites. Elles ne donnent pas lieu à un article complet. Dans un dictionnaire bilingue qui
a une visée d‟apprentissage, ces renvois devraient faire l‟objet d‟une traduction en LC afin de
faciliter la tâche à l‟usager. Ce type de traitement ne profite qu‟à un locuteur du tupuri. Il est
difficile pour un non natif de se retrouver lorsque la traduction n‟est pas indiquée. On peut le
remarquer à travers les exemples 83) ; 84) ; 88) et 94 (dans le chapitre IV).

III-2-Les faux synonymes


Nous accordons ici l‟expression « faux synonymes » aux unités lexicales que l‟auteure
indique comme ayant une relation d‟équivalence de sens, mais qui n‟ont pas de lien
sémantique ou encore n‟ont qu‟une différenciation morphologique. La différence de genre et
de nombre d‟une lexie n‟est pas un critère pertinent pour les rapprocher afin d‟établir une
relation de synonyme. Ce sont donc des faux synonymes. Observons la morphologie des
entrées suivantes :
125) g{y-n arë .n. varieté de g{y avec 5pions dans chaque trou
(g{y /de femmes). (DITFA, 97G)
126) g{y -w|ayn.Syn. g{y-n arë (g{y /de femme). (DITFA, 97G)
La différence entre ces deux adresses se situe au niveau de l‟environnement lexical. En
effet, g{y-qui se retrouve de part et d‟autre des deux unités mise en exergue signifie jeux en
français ; n arë (femmes) est le pluriel de w|ay (femme). Par conséquent, l‟on ne doit en
principe pas parler des entrées synonymes mais de deux formes différentes d‟une même unité
lexicale. Une seule entrée peut tenir pour désambigüiser les deux lexies.

127
IV-Suggestion de la métalangue nécessaire pour une version améliorée du
dictionnaire tupuri-français
L‟analyse sémantique de la structure du DITFA de Suzanne RUELLAND nous
laisse comprendre que la description des lexèmes en vue de la réalisation d‟un ouvrage
lexicographique est un travail de point et ne peut se faire sans avoir préalablement consulté
les théories adéquates. Cet exercice nécessite un arsenal théorique permettant de faire une
analyse sémique poussée de chaque adresse. Pour améliorer le métalangage 103 de la
description des unités lexicales dans le DITFA, il convient tout d‟abord de prendre pour
modèle la structure du DEC dans le but de désambigüiser les unités lexicales qui en font
appelet proposer des méthodes de description rigoureuse, formelle et exhaustive du lexique. Ensuite,
faire usage des théories traductologiques actuelles rentables puisque nous sommes en contexte
interlinguistique. Enfin, pour des réalités qui échappent à ces théories, il est dans ce cas
incontournables de passer à une création lexicale.

IV-1-Les principes de rédaction du Dictionn aire Explicatif et Combinatoire


(DEC)
Le DEC104 est une abréviation du Dictionnaire Explicatif et Combinatoire. Explicatif
dans le titre de l’Introduction à la lexicologie explicative et combinatoire 105 voudrait
simplement signifier que toute adresse qui est consignée dans ce dictionnaire idéal
soit infailliblement accompagnée « d‟une EXPLICATION SÉMANTIQUE formelle » 106 .
L‟adjectif Combinatoire laisse entendre que dans le DEC, la présentation de la
« COMBINATOIRE LEXICALE » 107 doit être rigoureuse et exhaustive. Pour réussir la
description de la structure d‟un dictionnaire, le DEC propose des exigences générales et des
rigueurs logiques fondées sur quatre principes suivants : le principe de formalité, le principe
de cohérence, le principe d‟uniformité et le principe d‟exhaustivité. Ces principes peuvent se
résumer selon la formule suivante énoncée par MEL'ČUK et al(1995 :34) :
RIGOUREUX=FORMEL+COHÉRENT+UNIFORME+EXHAUSTIF.

103
LA METALANGUE « On convient de donner le nom de métalangue à la langue en tant qu‟elle –même et
non de l‟univers. Or, si un article de dictionnaire est un discours sur un mot-vedette considéré comme un objet
d‟étude, il est donc entièrement – à part le mot-vedette – un fait de métalangue. » J. PICOCHE (1992 :148)
104
MEL'ČUK et al,1995
105
Ibid.
106
Ibid. p.10
107
Ibid. p.10

128
IV-1-1-Principe de formalité

Le principe de formalité stipule que toute description lexicographique doit être


effectuée dans un métalangage formel. Il faut décrire une entrée de dictionnaire en indiquant
tous les éléments qui rentrent dans présentation d‟une adresse de dictionnaire. Il s‟agit entre
autre, généralement de la présentation de la prononciation (phonétique/phonologie), de la
classe grammaticale à laquelle appartient l‟unité lexicale (nom, verbe, adjectif, adverbe …),
indiquer s‟il s‟agit d‟un lexème emprunté à une langue ou encore s‟il y a différenciation
géographique ou dialectale. Le principe de formalité fait une précision formelle de la
description syntaxique en inventoriant tout l‟environnement lexical dans le but d‟extraire tous
les emplois de la lexie mise en exergue.
Dans le cadre de ce travail, nous n‟allons davantage expliciter que l‟aspect sémantique.
Le DEC met un accent particulier sur le métalangage formalisé expressif pour la description
sémantique des entrées de dictionnaire. Dans l‟aspect sémantique, la présentation d‟une
vedette doit faire mention d‟une définition rigoureusement présentée. Le lexicographe doit
faire preuve d‟une description poussée des acceptions de chaque unité lexicale si elle est
polysémique. Où il y a problème de distinction entre les lexies polysémiques et
homonymiques, leurs étymologies doivent être formellement spécifiées afin de lever
l‟ambigüité sémantique de ces lexies.
La description lexicographique doit être par conséquent explicite, l‟on ne doit pas
laisser le soin à l‟usager d‟user de son intuition, cela exclurai la fonction pédagogique qu‟on
assigne à un ouvrage lexicographique.
La formule du principe de la formalité se structure comme suit :
FORMEL=ÉCRITDANSUNMÉTALANGAGEPRÉÉTABLI+EXPLICITE108.

IV-1-2-Principe de cohérence
La description microstructurale d‟un article de dictionnaire, pour souci de clarté,
impose inévitablement à son rédacteur la rigueur d‟une cohérence interne. Pour assurer la
liaison étroite, l‟adhérence entre les différents éléments internes du sens d‟une unité lexicale,
il faut insister sur leurs descriptions logiques.
Le sens et la structure de la définition doivent être exempts de toute ambiguïté de sens
et de rupture de cohérence dans la description. Les termes utilisés doivent être non équivoques,

108
Ibid. p.36.

129
afin d‟éviter qu‟elle ne prête à confusion ou que l‟usager ne soit pas confus. Observons cette
description insatisfaisante :
127) sɔɓgë v.tr. 1. Sucer. mb|rgā sɔɓ lɛ’gë-kòo “ le bébé suce un
fruit“. 2. Embrasser. (DITFA, 246S)
Ici, la continuité entre la première acception et la deuxième n‟est pas assurée, il y a
rupture de cohérence interne. En effet, « sɔɓgë» n‟a pas pour signification « embrasser »
(serrer, étreindre entre ses bras). Ce sens ne s‟y retrouve que par extension. Au lieu de
« embrasser », il convient plutôt de dire « baiser» (sucer les lèvres de quelqu‟un).
Voilà une définition satisfaisante que nous proposons:
sɔɓgë v. tr.1. Sucer. sɔɓgë sugare, baa re, degɔrgɔre, ta a gi sucer
le sucre, le tamarin, les fruits du savonnier ‘mb|ga’, le citron.
sɔɓgë dɔɔ manger la viande. 2 .sɔɓgë jag kaara -se dit de deux
personnes qui se sucent les lèvres en faisant l’amour, baiser. -
être nombreux à manger un petit repas. 3. sɔɓgë j ge saluer d’un
baiser. Par extension : embrasser.
Un autre cas d’incohérence se fait remarquer { travers l’exemple suivant cité en
amont :
128) ɗ{k.ge v.tr. constater, analyser. Ndi ɗ{k rë nō “ j’ai réfléchis {
cette affaire“. ɗ{k ne “ penses-y“ .cf. ɗɛk.gë, ɗìk.gï. (DITFA, 78ɗ)
Il y a rupture de cohérence interne parce que les deux équivalents proposés de la lexie
« ɗ{k.ge» en français « constater, analyser» n‟apparaissent pas dans l‟exemple. Ce dernier
nous propose plutôt un autre lexème synonyme des deux premiers. Le constat, l‟analyse ne
signifient pas réflexion. On dira plutôt :
ɗ{k.gev.tr. analyser. Ndi ɗ{k rë nō “ j’ai analysé { cette affaire“.
Syn.m{ŋ.gē fíi. Var. ɗɛk.gë.
ɗìk.gï1 v.intr. 1) Penser. 2) se remémorer. 3) réfléchir. ex :ndɔ jɔŋ
fen maa ɓɔn mbɔ tuu bay ɗìk.gï lɛɓa ?Pourquoi agis-tu sans
réfléchir ? Syn.: ɗ{k.ge, ɗɛk.gë. 4) distiller. 5) filtrer goutte à goutte.
ɗìk.gï1 n. 1) pensée. 2) projet.3) désir. 4) ambition. 5) nostalgie. 6)
écoulement.
Bien entendu, de nombreux autres cas, et souvent beaucoup plus complexes, se
présentent : par exemple au niveau de la cohérence entre la définition de la lexie vedette et
l'inventaire de ses actants syntaxiques. Ainsi, brièvement, il faut noter que dans le contenu
du principe de cohérence interne, un article du dictionnaire doit mettre en correspondance le
sémantisme, l‟environnement lexical de la lexie mise en exergue dans la description.

130
IV-1-3-Principe d'uniformité interne
Une exigence dans le traitement uniforme de la macrostructure de dictionnaire vient
résoudre plusieurs problèmes posés dans la description des formes sémantiquement proches
ou qui appartiennent au même champ notionnel. Pour assurer l‟uniformité interne de la
description des articles dans un dictionnaire qui se veut explicatif et combinatoire, les lexies
sémantiquement proches sont traitées en usant les mêmes métalangages descriptifs. Citons à
titre d‟exemple le traitement des termes suivants:
129) ɓāŋ-gɔ1. Désigne la région tupuri du Cameroun autour de
Doukoula dont la variété dialectale est considérée comme la plus
pure. 2. Désigne la région tupuri des villages autour de Lallé au
Tchad dont les parlers sont les plus proches de ceux du Cameroun.
(vers/n.i.) (DITFA, 43ɓ)
130) ɓāŋ-l ŋ désigne sa propre région et son propre dialecte
pour un locuteur. (DITFA, 43ɓ)
131) ɓāŋ-wɛ rɛ désigne toute région { l’est du lieu o se trouve le
locuteur ou du lieu dont il parle. (Du coté de/ dessous)(DITFA,
43ɓ)
Nous constatons que ces entrées ne sont pas uniformément présentées. Pour la
première lexie «ɓāŋ-gɔ», l‟on constate deux acceptions pendant que les deux derniers « ɓāŋ-
l ŋ» et « ɓāŋ-wɛrɛ» n‟ont pas la même structure descriptive. Or, le principe d‟uniformité
interne voudrait que les lexèmes sémantiquement proches doivent avoir le même métalangage
de description. Par conséquent, il est d‟une évidence notoire de spécifier la zone géographique
que couvre ce dialecte pour maintenir l‟uniformité interne dans la description.
Voici la description que nous proposons, et qui, à notre avis, répond à l‟exigence de
l‟uniformité interne du sens des lexies mise en exergue. Elles exigent que leurs traitements
soient harmonisés et répondent aux mêmes exigences métalinguistiques. Il faut évoquer dans
chaque acception les trois acceptions dont ces entrées font mention. Les trois entrées
appartiennent toutes à presqu‟une même réalité. Celle des toponymes ou noms de dialectes :
Ɓāŋ-gɔ n.1. Composé de ɓāŋ- (vers)et du morphème -gɔ qui
compose l’ensemble de l’unité lexicale est une pratique
traditionnelle qui consiste à aller prendre un bouc ou un bélier de
gré ou de force dans une zone un peu éloignée du chef supérieur
tupuri (Waŋ Doré) pour le sacrifice. Généralement connue sous le
nom de « maŋge kalkao ». 2. Le ɓāŋ-gɔ est donc la variété
dialectale du tupuri parlé dans la zone ciblée par la pratique du gɔ.
{ l’origine désigne la région des Tupuri qui ont émigrés du Tchad
dans la zone forestière au Cameroun. 3. C’est la zone du pays
tupuri du Cameroun, plus précisément les villages des
circonscriptions administratives suivantes : Kar-Hay, Porhi,

131
Kalfou, Guidiguis Tchatibali, Dziguilao… Les Tupuri restés au
Tchad les appellent “jar ɓaŋ yoo koowɔ”. Ces derniers les
appellent aussi “jar ɓaŋ liŋ wɔ“. Par suite de contraction, le terme
“ɓaŋ yoo koo“ est devenu “ɓaŋ-gɔ“ ou “ɓi koo“. Il désigne
aujourd’hui le territoire tupuri du Cameroun hormis les villages
camerounais de la frontière à ɓāŋ-l ŋ, sans prendre en
considération le côté ɓaŋwɛ rɛ. ex : jar Tupur maa Tulum wa ɗ wɔ
jag ɓaŋ gɔ les Tupuri de Touloum parlent le langage de ‘ɓāŋ gɔ’.
Ɓāŋ-l ŋ n. 1. Composé de ɓāŋ- (vers) et de -liŋ (chez soi, la
maison).Terme qui désigne la maison d’origine. 2. Aujourd‟huile
terme désigne les villages suivants : Nenbagre, Sɛɛrɛ,Daawa,
Gaŋwu, Darbe, Mondawré, Blambale, Laale, Guwɛɛ, Ciŋriŋ, Guyu,
Guɗum, Yoway..., 3. Désigne la variété dialectale du tupuri parlée
dans ces villages et les villages frontaliers du côté du Cameroun
ayant le même parler. Ex : jar ɓāŋ-l ŋ ɗe wɔ dày ga tày : les Tupuri
de ɓāŋ-l ŋ appellent le bœuf “tay“.
ɓāŋ-wɛ rɛ. 1. Composé de ɓāŋ- (vers) et de -wɛrɛ (derrière,
levant), vers le soleil levant, l’Est. 2. Le terme désigne le peuple
tupuri rapproché de Fianga et les villages frontaliers du côté du
Cameroun .3 . Variété dialectale en usage dans ces régions.

IV-1-4-Principe d'exhaustivité
Le principe d‟exhaustivité est un point incontournable dans la description des entrées
de dictionnaire. Dans le but d‟améliorer la structure définitionnelle du DEC le lexicographe
doit se rassurer que tous les sens des adresses prise en compte. Le principe d‟exhaustivité est
appréhendé sous deux angles : une interne et l‟autre externe.

IV-1-4-1-L'exhaustivité interne
Premièrement, dans un DEC, l‟exhaustivité interne consiste à ne négliger aucun
détail dans le traitement d‟une unité lexicale. Ce principe touche la microstructure du
dictionnaire. C‟est ce qui a fait dire à MEL'ČUK et al (1995) lorsqu‟ils pensent que :

Dans un DEC, l'article d'une lexie L inclut TOUS les renseignements


lexicographiques nécessaires, d'une part, pour bien utiliser L elle-même, et d'autre
part, pour pouvoir trouver les autres lexies L1 , L2 etc., sémantiquement liées à L.

Pour ainsi dire, ce principe exige de la part du lexicographe un travail de description


poussé en inventoriant tous les acceptions possibles qu‟une lexie vedette peut avoir. Ce
principe est clairement énoncé, car il ne s‟agit en effet pas de décrire L en mettant juste en
exergue les lexèmes qui lui sont sémantiquement liés. Or dans le DITFA, les entrées
présentent des descriptions défaillantes qui sont partielles. Observons les exemples suivants :

132
Au lieu de cette description :
132) bäa n. 1. Dieu. 2. Pluie, b a rāa “ il pleut“. (Dieu/pleure) b a
tuf sāarē. Se dit en début de saison (pluie/crache/la salive). Prov.à
jo’ dë b a jè kìtè’ë g “ on ne sème pas avec la pluie du menteur “.
(DITFA, 29B)
Nous proposons plutôt la version améliorée suivante :
bàa1 n. ,Culture-. Dieu Il est considéré comme le créateur et c’est
lui qui tient tout dans ses mains : les vivants, les morts, les
puissances de la nature, celui qui donne la vie et la mort. Il est
encore le juge suprême. Tous les autres gardiens de la tradition
comme : les ancêtres (moorebe), les âmes des morts
(manmbuyuuri), les puissances qui gardent la nature, demandent
reconnaissance et respect ( soore ), ne sont que des instruments
d’une seule volonté, celle de dieu. Il y a différentes façons de
penser { dieu. Il y a le dieu suprême qu’on appelle Waŋkluu »,
grand chef, ou simplement bàa, et il y a le b{a maa laa tiŋ, le Dieu
qui fonde le foyer et les « bàa » personnels, le bàa de chaque
famille. Au début de la saison des pluies, tout Tupuri marié
prépare un bélier ou un mouton accompagné du yii pour offrir un
sacrifice au seul dieu fondateur de son foyer et créateur de
l’univers. On pense qu’il y a un bàa censé protéger le mariage, qui
aide { trouver la femme et { unir l’homme et la femme b{a ha way
ne sɛ wɛr maa laa tiŋ ne sɛti . Dieu lui donne la femme pour fonder
la famille. Figure : Bàa tag ɗuu ɓɛ gɔdieu a effacé son nom. À
l’annonce de la mort d’une personne, les gens disent que Dieu a
effacé son nom. Si la personne estgravement malade, les gens
disent : B{a ŋgar ɗuu ɓɛ gɔ gà ɗa Dieu n’a pas encore effacé son
nom. Proverbe : kurkudu wa a ga { jɔŋ hun se kawre ɓɔ wɔ gà, sɛn
mokay se ɓɔ ni ndɔ ma’ wel B{a de dɔɔhaw Pigeon dit qu’il ne faut
pas être jaloux de ses proches, cela équivaut à un coup degifle
donné { l’enfant de Dieu. Syn.: Waŋkluu, Pantway, Manwúr-Bàa et
Dieu par Jésus-Christ, pour les croyants chrétiens.
bàa2 n. 1) cause qui détermine les phénomènes atmosphériques.2)
pluie. 3) foudre, grêle. Proverbe: à kab de bàa je getɛ’ g{ : on ne
sème pas avec la pluie d’un menteur. bàa bayraage ti wǔr ɓɛ wa : il
ne pleut pas au bon moment. bàa caa swaare le ciel est couvert de
nuages. ex : b{a caa swaare wara ciŋ debaŋ : le ciel est couvert de
nuages aujourd’hui. b{a de buggi pleuvoir en gouttelettes. ex : bàa
de buggi yaf-yafe, yɛf-yɛfɛ: il pleut en gouttelettes. bàa de cwȩ’ge il
y a une fine pluie. bàa duu lɛ le tonnerre gronde. Bàa jɔŋ re Dieu a
agi en produisant un malheur. Var.: Waŋkluu jɔŋ re. b{a ‘wuy lɛ la
pluie se prépare.

Voici une autre défaillance descriptive :


133) w ā n. étoile du matin. Cf. gérë (273W)

133
Tous les sens de la lexie «wäā » ne sont pas décrit. La lexie « wäā» est polysémique et
l‟unité sémique dont l‟auteure a fait mention ci-haut n‟est qu‟un sens connoté qui est né de
son emploi métaphorique (flèche=étoile). Nous proposons plutôt la description suivante :
W ā n . 1) flèche. waa maa jag ndelɛm ɓɛ’ kȩȩ gà : la flèche dont le
bout est pointu ne pique pas l’autre.2) aiguille en fer pour coudre
les calebasses. W ā maa saa hane : aiguille pourcoudre la
calebasse. 3) étoile du matin. naa laa dewaa naage : nous partirons
{l’apparition de l’étoile du matin. 4) germination desplantes. W ā
sùwɛɛ la we go les germes d’arachide sont sortis.
On pourra donc finalement dire que
EXHAUSTIVITÉ (INTERNE) = PRÉSENTATION DE LA TOTALITÉ DES
INFORMATIONS LEXICOGRAPHIQUES POUR CHAQUE LEXIE, Y
COMPRIS LES RÉFÉRENCES À TOUTES LES LEXIES APPARENTÉES (faites
109
de façon directe ou à travers d'autres lexies) .

IV-1-4-2-L’exhaustivité externe
Le principe d‟exhaustivité externe se situe au niveau macrostructural du dictionnaire.
La réussite d‟un dictionnaire réside aussi et surtout dans l‟inventaire de tous les lexèmes
disponibles dans la langue source. Si tous les lexèmes de la langue sont mis en exergue dans
ledit dictionnaire, il y aura à notre avis moins d‟ambigüité au niveau sémantique surtout
lorsque ces unités lexicales suffisamment présentées. Le DITFA est un répertoire d‟environ
3000 entrées lexicales, or une langue comme le tupuri présente une mosaïque d‟unité lexicale
qu‟il faut considérer. Par conséquent, pour répondre à ce principe rédactionnel du
dictionnaire explicatif, il faut inventorier tous les lexèmes de la langue.
Le principe d‟exhaustivité externe peut être entrevu comme des principes qui guident
le lexicologue dans la constitution de la documentation linguistique ou son point de départ. Ce
principe de recherche des entrées doit être indépendant du lexicographe et basé sur des faits
réels et des points de vue objectivement orientés. Ceci dit, il faut obligatoirement consulter
des bases de données textuelles. C‟est une source très importante de renseignement sur la
langue. En plus du dictionnaire existant, la source de documentation qui nous semble
accessible et rentable est celle de faire recours aux ouvrages traduits du français vers le
tupuri pour servir de base de données lexicale. L‟exemple qui est patente est celle de la Bible
en tupuri qui est un produit de traduction de la version française. Cet ouvrage est un répertoire
de presque tous les lexèmes possibles d‟une langue. Le rédacteur du dictionnaire tupuri-
français peut s‟en servir comme base de données pour l‟extraction de la matière première

109
Ibid. p.43.

134
nécessaire afin d‟organiser la macrostructure du dictionnaire idéal vers lequel nous voulons
tendre.

IV-2-Les règles de description de la définition lexicographique bilingue


En s‟appuyant sur les principes de description présentés dans la section précédente, on
peut énoncer un certain nombre de règles de rédaction. Dans la rédaction de la définition
lexicographique (DL), la rigueur de la logique de la structuration du sens des lexies doit
absolument être respectée. Cette logique passe par le respect des règles d‟élaboration de la
DL. Bien qu‟on les appelle règles, ces lignes directrices, ces conventions, ne revêtent pas
toutes un caractère strictement obligatoire; si certaines ne connaissent guère d‟exceptions,
d‟autres correspondent plus à des recommandations. Compte tenu des problèmes que nous
avons répertoriés dans le DITFA, nous pouvons énoncer quelques règles susceptibles de
contribuer à la réalisation d‟un dictionnaire modèle. Les règles ont été regroupées sous trois
sous-ensembles : d‟abord celles qui portent sur le domaine ou le sous-domaine, ensuite,
celles qui sont associées au définisseur initial, et enfin celles qui portent sur les caractères
définitoires.

IV-2-1--Règles relatives au domaine et au sous-domaine


Il existe des règles applicables au domaine et au sous-domaine. La définition ne doit
pas inclure d‟indication du domaine ni du sous-domaine. Dans le cas des unités lexicales à
thème, la mention de domaine peut en outre s‟avérer redondant lorsque le domaine est le
même pour l‟ensemble de l‟entrée dont il est question.
Concernant la description des lexèmes (et surtout au niveau du choix initial et des
caractères), on doit tenir compte du domaine (et le cas échéant, du sous-domaine) auquel
appartient le concept à définir et selon la façon dont ce domaine est structuré, le concept
s‟inscrit dans une arborescence particulière, ce qui peut influencer, entre autres, le choix du
d définisseur.
L‟incluant générique ne doit pas être précédé de syntagmes comme espèce de, type de
ou genre de. Dans une relation générique, le concept spécifique correspond nécessairement à
une classe (espèce, genre, type, etc.) du concept générique, ces mentions sont donc superflues.
Cette règle précédente comporte des exceptions. Ainsi, des syntagmes tels que forme
de, type de, ou variété de et espèce de peuvent occasionnellement être placés devant le terme
générique notamment lorsque le lien entre l‟incluant et le défini ne parait pas suffisamment

135
évident, ou encore lorsque l‟incluant ne transmet pas tous ses caractères au concept que l‟on
souhaite définir.

IV-2-2-Règles relatives au définisseur initial

Le définisseur initial doit être normalement de la même catégorie grammaticale


que le terme défini. Ainsi, le définisseur initial d‟un substantif, celui d‟un verbe doit être un
verbe à l‟infinitif. La définition ne doit commencer ni par un article, ni par adjectif
démonstratif, ni par un pronom démonstratif (VÉZINA R. et al, 2009 :20).Elle ne devrait non
plus commencer par un adjectif indéfini ni par un pronom indéfini. Par exemple, dans la
définition suivante :
134) tënënē q. 1. Frais (désigne la nourriture fraîche, crue et non
cuisinée) .2. d’un être animé : en bonne santé, épanoui. (DITFA,
259T)
Dans cette définition, la structure définitionnelle de la deuxième acception n‟est pas
satisfaisante. Comme énoncé par la règle, il est inadmissible qu‟on introduise une définition
par un article lorsque l‟entrée est un adjectif. On dira que « d’un être animé » est
insatisfaisant. Nous recommandons plutôt la description suivante :
Tënënē adj. 1) vivant, en vie.2) frais (nourriture fra che). 3) cru.
n{y tenene viande cru, paare-kage maa tenene œuf frais, paa
tenene: lait non caillé, mbay tenen : manioc cru. 4) éveillé. Ndi
tënënē : je suis éveillé 5) épanoui, en bonne santé.
Cependant, cette règle ne s‟applique pas toujours lorsqu‟il s‟agit de la définition d‟un
adjectif ou d‟un adverbe introduite par un faux incluant.
La définition ne doit pas être métalinguistique, car l‟énoncé définitoire doit décrire le
concept et non le signe ; elle ne débutera donc pas par des tournures telles que terme qui
désigne, nom donné à, verbe qui signifie.
En ce qui a trait aux adjectifs qualificatifs, le recours à des définisseurs initiaux tels
que se dit de et qualifie le s‟avère souvent inévitable, notamment lorsque les objets qu‟un
adjectif peut adjectif peut qualifier sont restreints. Toutes fois, lorsque cela sera possible, on
aura plutôt recours à des définisseurs initiaux tels que : qui, relatif à, apte à, propre à, destiné.
Cette métalangue de description permet au rédacteur de l‟ouvrage lexicographique de
définir sans recours à une tournure métalinguistique (définition tautologique) et ainsi de
respecter le principe de substitution.

136
IV-3-Quelques solutions à l’inexistence des équivalents dans la langue cible
Il est très délicat de trouver l‟équivalent exact de l‟unité lexicale tupuri en français
pour ce qui est de certains lexèmes qui ont une charge culturelle forte. Pourtant, dans un
dictionnaire bilingue, le lexicographe doit donner satisfaction aux utilisateurs tels que les
traducteurs et les apprenants de la langue dont il est question. Comment traduire alors, dans le
dictionnaire bilingue, ces unités lexicales de la langue source qui n‟ont pas à priori un
équivalent dans la langue cible? (Lynne FRANJIÉ, 2008)
Des lexicographes tel que ZGUSTA (1984: 147) postulent que le dictionnaire ne doit
pas offrir des paraphrases explicatives ou des définitions, mais de vraies unités lexicales de la
langue-cible, qui, lorsqu‟elles sont insérées dans le contexte, produisent une traduction fluide.
Les deux options précitées, paraphrases explicatives ou définitions et vraies unités lexicales
correspondent aux deux types d‟équivalents du dictionnaire bilingue qu‟a définis ZGUSTA
(1971: 319): les équivalents de traduction ou insérables et les équivalents explicatifs ou
descriptifs. Les premiers étant des unités lexicales stabilisées qui fournissent une bonne
traduction et peuvent être facilement utilisées en contexte, tandis que les seconds donnent plus
d‟informations sur l‟unité lexicale de la langue cible mais sont difficilement insérables en
discours.
Deux remarques s‟imposent ici à notre avis: d‟une part, la solution préconisée par
ZGUSTA n‟est pas toujours réalisable110. D‟autre part, cette typologie n‟est pas suffisante
pour éclairer le type d‟équivalence mise en jeu: les trois composantes du sens lexical
(dénotation, connotation, domaine d‟application) ne sont pas toujours réalisables. Par
conséquent, il faut tout d‟abord, insister sur le rapport signifié/signifiant de la langue source et
son équivalent en langue cible, ensuite, décrire suffisamment l‟unité lexicale et proposer à
chaque acception des exemples qui permettront de compléter le sens de l‟entrée en LC, et
enfin, si ces propositions que faisons s‟avèrent non rentable ou faillible, il faut cette fois-là
recourir à la création d‟une unité lexicale.

110
Cette position ne fait pas l‟unanimité de certains auteurs. Lynne FRANJIÉ (2008) par exemple,
épouse la pensée selon la quelle il faut faire appelle à la traduction de ce type d‟unités lexicales par
des équivalents explicatifs afin qu‟ils soient compris de tous les utilisateurs.

137
IV-3-1-Le rapport entre signifié/signifiant de LS et équivalent en LC
Pour résoudre le problème de rapport entre signifié/signifiant et équivalence en langue
cible, il est nécessaire de repartir à l‟interprétation du lexème comme ayant double face : le
lexème est un signe formé d‟un signifié, qui renvoie à la réalité extérieure et d‟un signifiant,
qui renvoie à sa représentation dans la langue. Les problèmes d‟équivalence vont se poser
sur deux plans: le plan du réel et le plan de la langue: le réel existe-t-il ou non dans la langue
des locuteurs? Le lexème qui le désigne existe-t-il ou non dans la langue des locuteurs? À
partir de ces interrogations, Lynne FRANJIÉ (2008), distingue trois cas de figure que nous
illustrerons par des exemples extraits de notre corpus :
a. Cas où le signifié renvoie à une même réalité culturelle et le signifiant est
représenté par un élément du lexique dans les deux langues. Ici, l‟équivalence est
totale, le problème sémantique s‟en trouve contrecarré. Non seulement la tâche du
lexicographe s‟en trouve facilitée, mais aussi et surtout l‟usager est satisfait. Par
exemple:
135) w āy n.chien. (DITFA, 175W)
136) wàagë n. plaie. (DTFA, 275)

b. Cas où le mot existe dans les deux langues mais la réalité culturelle est absente
dans l‟univers de la langue cible, donc peu ou pas connue de son locuteur. C‟est le
cas, par exemple, de certains realia culturels appartenant à la culture africaine en
général et celle tupuri en particulier:
137) wàalë-män-sām n. sorgho sp., le nom vient de la forme de la
panicule. (DITFA, 272W)

L‟équivalent est dans ce cas une unité lexicale correspondant à l‟entrée, mais le
locuteur de la langue cible ne reconnait pas forcement le signifié exact ou ne comprend pas
forcement l‟équivalent cité.
c. Cas où l‟équivalence est inexistante : ni la réalité culturelle (signifié) ni le lexème
(signifiant) n‟existent en français (LC). Les unités lexicales qui correspondent à ce
cas entrent dans la catégorie de ce que l‟on appelle les intraduisibles. C‟est ce
phénomène qui pose le problème de traitement du sens des entrées dans les
dictionnaires bilingues. Les exemples sont nombreux entre deux langues comme
le tupuri et le français. Citons à titre d‟illustrations les éléments de l‟initiation :
138) gɔɔni n. Initiation des hommes. Syn.: gɔnɔgáy, lɛɓɛ. (DITFA,
108G)

138
Pour résoudre le problème des intraduisibles, DUVAL (1991) préconise le recours à
une glose contextuelle, c‟est-à-dire une phrase explicative qui remplace l‟équivalent lorsqu‟il
n‟existe pas ou est partiellement présenté et qui est assimilable à une définition de
dictionnaire monolingue par la description sémantique de l‟entrée qu‟elle fournit et à un
article d‟encyclopédie par l‟information sur l‟aspect culturel. Pour lui,
L‟équivalent se réalise par une glose contextuelle qui prend la forme d‟une
définition, analogue à celle que l‟on rencontre dans les monolingues [mais qui est,
en fait,] un compromis entre la forme de l‟article de dictionnaire monolingue et celle
de l‟article d‟encyclopédie.
Nous suggérons, pour l‟entrée « gɔɔni» la glose contextuelle suivante :
gɔɔni n. [Culture]. initiation des hommes (Les dernières
remontent à 1955(Debsikreo) 1975 (Dɔɔlɛ Disdandi). En 1975
elle se déroula avec l’aval du gouvernement tchadien et sous la
répression du gouvernement camerounais et récemment en 2009
et2010 avec l’aval du gouvernement camerounais. Syn.: gonogáy,
lɛɓɛ.

IV-3-2-Description hyperspecifique de l’unité lexicale et exemples définitoires :


compléments de sens des lexèmes dans la langue cible

IV-3-2-1-Description hyperspecifique de l’unité lexicale


Faire une description hyperspecifique (Alise LEHMANN & Martin BERTHET,
2000 :19) d‟une entrée de dictionnaire c‟est suffisamment la présenter pour qu‟elle soit
exempte de toute ambigüité lexicale. Elle répond positivement à la double question et
indique les conditions nécessaires et suffisantes permettant d'isoler de façon distinctive
la classe des référents à laquelle renvoie le signe. Elle énumère un nombre allant au-
delà de la description nécessaire. Soit l‟exemple suivant :
139) dɔŋdōlɔŋ n. 1. du verre. 2. Lunettes (DITFA, 68D)
Pour définir suffisamment une unité lexicale, il ne s‟agit pas de densifier la description
au point que cela soit ennuyeux et finalement difficile pour l‟usager d‟avoir les sens ou la
signification précise qu‟il recherche, mais il s‟agit plutôt d‟inventorier toutes les acceptions
possibles en tupuri et proposer les équivalents en français. La lexie « dɔŋdōlɔŋ» n‟est pas
suffisamment présentée à notre connaissance. Nous proposons la version améliorée suivante :
dɔŋdōlɔŋ n. 1) sève. p a k o (lait / d’arbre) sève d’arbre. Syn. r o
k o (pleures /d’arbre), k ’{y . 2) verre 3) lunette: hee dɔŋdōlɔŋ
ɓɔn nen ɓɔ : porte tes lunettes. 4) bouteille.

139
IV-3-3-Des exemples définitoires : compléments de sens des lexèmes dans la langue cible
Pour résoudre le problème de l‟inexistence des unités lexicales dans la langue cible,
une des solutions envisageables est celle de proposer des exemples définitoires. Ceci dans le
but de compléter le sens des lexèmes qui ne sont pas reconnus dans l‟univers culturel de la
langue source et en proposer sa définition comme équivalent en LC. Il y a nécessité de mettre
dans un exemple la lexie vedette pour compléter sa définition. Dans le bilingue, si dans la
langue source il y a une absence d‟équivalent codé du mot-entrée (variantes culturelles, etc.),
nous avons donc recours à une glose définitionnelle dans la langue cible. Pour rendre possible
ces exemples définitoires, nous suggérons deux règles nécessaires:
 Les exemples doivent justifier ou fonder la définition au lieu d‟être incohérents
comme le montre la description de la lexie « ɗ{k.ge » (cf. principe de cohérence);
 Les exemples sont une partie du commentaire sémantique qui complète la paraphrase
lexématique.

IV-4-Créativité lexicale
La créativité lexicale est une source d‟enrichissement d‟une langue des nouveaux
lexèmes. Les dictionnaires bilingues ne sont pas des simples outils traductifs sans fonctions
communicatives; ils mettent aussi en rapport deux mondes culturels où la langue sert de lien.
Si la réalité n‟existe pas dans la langue cible, le lexicographe doit trouver un équivalent
approximatif, faire appel à un calque ou un emprunt, comme c‟est le cas de SIDA désigné
par m cumc m en tupuri et dont l‟équivalent en français est le naja. (A. DJAKBE, 2007). La
liberté de création des lexicographes est conditionnée par une série de traits culturels qui
permettent de mieux saisir la réalité dans les deux langues (NATHALIA CAMPOS MARTIN
M., 2010). C‟est ainsi que les langues utilisent leurs potentialités morphologiques et
syntaxiques là où il existe une lacune lexicale. L‟idée de la création lexicale permet de
résoudre le problème de la non exhaustivité externe (c‟est-à-dire l‟inexistence de certains
termes en langue tupuri et pourraient servir pour désambigüiser d‟autres) fait référence
indirectement à l‟inventaire des éléments macrostructurels du dictionnaire.
Dans ce chapitre, nous avons dans une première partie inventorié des problèmes liés
au traitement sémantique des unités lexicales dans le DITFA, et dans une deuxième partie, il
était inévitable de proposer des solutions pour pallier ces difficultés afin d‟aboutir à une
version améliorée d‟un dictionnaire tupuri-français. Nous n‟avons pas la prétention d‟avoir

140
recensé tous les problèmes que pose cet ouvrage lexicographique, non plus la prétention
d‟avoir épuisé toutes les solutions possibles servant de métalangue adéquate pour l‟améliorer.

141
CONCLUSION GÉNÉRALE

142
Notre travail de recherche portait sur l‟analyse sémantique d’un ouvrage
lexicographique interlinguistique : cas du Dictionnaire tupuri-français-anglais de Suzanne
RUELLAND. Nous l‟avons structuré en cinq articulations essentielles qui ont fondées notre
réflexion.
Nous sommes partis de l‟idée selon laquelle, une étude qui allie deux langues dans
une perspective du transfert des lexèmes de la première vers la seconde ne peut réussir sans
une base de connaissance en ethnographie et une maitrise des aspects de la langue source. Il
ressort de ces points que plusieurs avis divergent sur l‟origine du peuple tupuri. La situation
démographique et l‟organisation sociale sont des paramètres incontournables car ils orientent
le traitement des termes dans ces domaines. Faut – il aussi souligner que la langue tupuri
présente une mosaïque de dialectes qui rendent complexe sa description. Pour certains, il
existe cinq dialectes tupuri : le ɓaŋ-liŋ, le ɓaŋ-gɔ, le ɓaŋ- wεrε le faalë-piyew et le
poɗɔkge, pour d‟autres, il faut considérer pour dialectes tupuri trois variétés qui sont : Le
ɓaŋ-liŋ, le ɓaŋ-gɔ, le ɓaŋ- wεrε. Nous avons constaté après analyse personnelle et
investigations auprès de nos informateurs qu‟il existe fondamentalement deux variantes
dialectales majeures. Les autres ne sont qu‟une ramification du ɓaŋ-liŋ et du ɓaŋ-gɔ qui ne
se distinguent en effet que par quelques aspects d‟ordres phonétiques, lexicaux et sémantiques.
Cette étude a un impact déterminant dans le processus de l‟analyse du contenu des entrées du
dictionnaire.
Pour l‟analyse sémantique de la microstructure du DITFA, la définition
lexicographique a servie d‟unité d‟étude. Partie d‟une volonté de comprendre la définition
lexicographique et, tout particulièrement, sa composition interne, nous avons commencé par
passer en revue l‟ensemble des traits caractérisant les définitions en général, tous types
confondus, pour mieux cerner la nature de celle qui nous intéresse en particulier. Notre
démarche a consisté à nous pencher tout d‟abord sur le domaine de la définition dans son
sens le plus large, afin de situer l‟objet de notre étude dans le système auquel il participe. Cela
nous a tout naturellement conduit à examiner brièvement les typologies de définitions. Parce
que l‟approche systématique s‟est finalement révélée insuffisante pour saisir pleinement ce
qu‟est une définition, nous nous sommes alors concentré sur les caractères qui fondent les
différents types de définitions que nous avons retrouvés dans le corpus d‟étude, car c‟est
autour de l‟un ou l‟autre de ces caractères que s‟articulent les différentes typologies.
Les moyens utilisés pour définir, les fonctions et le fond de la définition, ses
composants, sa forme et les modes qui y sont associés, tout comme son rôle et ses situations

143
d‟emploi, sont ainsi devenus autant de critères définitoires de la définition que nous avons
abordés plus en détail, de sorte à établir une grille de lecture des définitions. Elle constitue le
point pivot du système sémantique de l‟adresse du dictionnaire. À cet effet, quelques types de
définitions étaient mis en exergue. Il s‟agit fondamentalement de la définition par inclusion, la
définition morphosémantique et la définition par équivalence ou le terme à terme. Nous avons
analysé le classement de sens des unités lexicales dans la structure définitoire de quelques
adresses du DITFA. Ces analyses ont sans doute permis de comprendre le concept
fondamental de DL qui est l‟actant sémantique. Pour comprendre les subtilités de la DL, il
faut passer en revue ses critères de formulation avant d‟évoquer ses composantes sémantiques,
sa disposition et ses différents éléments définitoires.
Dans la troisième articulation, nous nous sommes essentiellement attelé à
analyser le traitement que l‟auteure réserve aux unités polysémiques et homonymes en
contexte bilingue tupuri-français. Après l‟inventaire de leurs typologies, il était intéressant
d‟établir des critères de distinction entres les lexèmes polysémiques et ceux homonymes pour
un processus de désambiguïsation des entrées tupuri-français. Une seule unité lexicale de la
langue cible traduit spécifiquement les deux unités synonymes en langue source. Pour lever
l‟ambiguïté entre certains homonymes homographes et les lexèmes polysémiques il a fallu
user de la théorie du sémème unique et considérer la polysémie comme une pluralité de
sémème. Quel que soit la manière de traiter le problème de polysémie et de l‟homonymie, il
apparait que ces deux termes recouvrent un phénomène extrêmement riche et complexe,
capable de rendre compte de l‟infinie particularité des significations avec stock lexical réduit
dont dispose la langue tupuri. En sémantique, c‟est-à-dire dans l‟étude du sens et
particulièrement dans le cadre de l‟analyse sémique, l‟utilisation du concept « polysémie »
peut pour certains prêter à confusion. Si toutes les unités lexicales sont polysémiques vu
qu‟elles possèdent plusieurs sèmes, toutes ne sont pas polysémiques parce qu‟elles n‟ont pas
forcément plusieurs sèmes. Dans ce cas particulier, le concept de « polysémie » est préférable
à « polysémémie ».
Le quatrième point de notre travail était consacré à l‟analyse de la relation de
synonymie en contexte bilingue tupuri-français. Les typologies de la synonymie (absolue ou
partielle) ont considérablement retenues notre attention dans ce chapitre. Les synonymes
absolus et ceux partiels constituent, dans le traitement lexicographique, des éléments qui
complexifient le classement et le traitement du sens des entrées dans le dictionnaire tupuri-
français. L‟auteure utilise le système de renvoi lexical pour rapprocher les adresses qui ont

144
une relation d‟équivalence sémantique. Elle pense qu‟il existe pour certains lexèmes des
synonymes totaux et il n‟est pas évident de décrire comme entrée de dictionnaire cette lexie
vedette. La définir serait pour elle une aberration et une répétition inutile comme nous l‟avons
mentionné en amont. Pourtant, ce traitement rend compte d‟une façon exhaustive des unités
lexicales liées par une relation d‟équivalence sémantique. Par conséquent, un soin particulier
doit être accordé à la définition des entrées synonymes. Nous constatons généralement dans le
corpus que les lexèmes peuvent être synonymes dans la langue source mais ne trouvent pas
les mêmes équivalents en français ou bien encore, on ne retrouve pas distinctement
d‟équivalents à chacun des lexèmes en relation de synonymie.
Le cinquième et dernier chapitre, qui est d‟ailleurs plus prescriptif que descriptif, avait
une double tâche à effectuer : premièrement, il fallait procéder à l‟inventaire d‟un ensemble
de problèmes dont souffre le DITFA au niveau du traitement sémantique, deuxièmement,
proposer des solutions pour les résoudre. Ces problèmes touchent d‟abord quelques types de
définitions (hypospécifiques, synonymiques) et les éléments définitoires tels que les
domaines/dimensions des lexèmes et les faux incluants. Ensuite, les problèmes de la
polysémie divergente, la polysémie asymétrique et équivalent partiel, le problème lié à la
multiplicité des équivalents pour une seule entrée ou cas de la polyéquivalence et le problème
de distinction entre lexème homonyme et polysème. Enfin, les problèmes liés au traitement
de la synonymie qui peuvent être entre autres la non traduction des renvois synonymes et les
faux synonymes.
Nous avons suggéré des métalangues nécessaires pour une version améliorée du
dictionnaire tupuri français. Pour résoudre les problèmes d‟ordre général dans la description
de la macrostructure ou encore la microstructure des entrées, les principes de rédaction du
DEC (MEL'CUK I. A. et al, 1995) sont incontournables, car ces principes rendent compte
de la formalité et de la cohérence de la définition des lexies vedettes, de l‟uniformité interne et
de l‟exhaustivité externe et interne des unités lexicales. Pour résoudre les problèmes
spécifiques aux éléments définitoires des entrées, nous proposons quelques règles relatives
aux définisseurs initiaux, relatives aux domaines et aux sous domaines et applicables aux
caractères définitoires. Les définitions hypospécifiques doivent être suffisamment
(hyperspecifique) présentées. Lorsqu‟il n‟existe pas d‟équivalent exact en français, l‟on doit
faire recours à une glose définitoire. Si le problème persiste, alors il faut procéder à une
création lexicale. Plus encore, il faut avoir une base de données lexicale textuelle pour bâtir
la nomenclature dudit dictionnaire. Dans le cas d‟espèce, la Bible traduite en tupuri est

145
incontournable pour inventorier un nombre important de lexies de la langue source (tupuri).
C‟est donc cette partie qui constitue les résultats de cette recherche.
La question centrale qui a orienté notre réflexion était : Quels sont les unités
sémantiques que l‟on retrouve dans la zone sémantique des entrées que propose le
Dictionnaire tupuri-français-anglais (DITFA) de Suzanne RUELLAND ou comment y est
structuré le sens ? À cette orientation générale, il fallait premièrement se demander si ces
unités rendent suffisamment compte du sens des lexèmes choisis. Deuxièmement, si ces
métalangues s‟avèrent non rentables, quelles suggestions faire pour les améliorer?
La sémantique lexicale nous a servi de cadre théorique pour parvenir à l‟analyse
approfondie de la zone sémantique des entrées du dictionnaire. Compte tenu du fait que nous
sommes en contexte bilingue, nous avons aussi convoqué la traductologie pour repondre aux
questions de transfert de sens des lexèmes du tupuri vers le français.
Après analyse minutieuse du corpus, nous avons eu à étudier trois aspects essentiels
du sens des unités lexicales qui correspondent respectivement à la définition lexicographique,
le couple polysémie/homonymie et la relation de synonymie : ce qui confirme d‟ailleurs
l‟hypothèse générale. Dans la description des entrées tupuri-français que propose l‟auteure
en usant des éléments métalinguistiques suscités, il y existe plusieurs traitements défaillants
dont nous avons apporté quelques solutions palliatifs. Cette analyse répond donc efficacement
pour confirmer les hypothèses secondaires.
Nous pensons avoir atteint partiellement les objectifs prioritaires qui ont guidé cette
analyse. Il était globalement question d‟avoir un lexique ou une terminologie capable de
rendre parfaitement compte de la sémantique du lexique tupuri, pour proposer en langue
étrangère des équivalents ou gloses culturelles ainsi que des définitions pour la description de
l‟expérience culturelle et la structuration du réel du peuple tupuri qui sont forcements
différents. Spécifiquement, il était question d‟analyser et de décrire le sens des lexèmes que
propose l‟auteure du DITFA à travers la définition lexicographique, le traitement de la
pluralité de sens, de l‟homonymie et de la synonymie dans une perspective bilingue dans
l‟optique d‟inventorier les problèmes liés à la description du sens des unités lexicales pour
enfin les résoudre.
Pour atteindre totalement les objectifs de cette recherche, nous pensons mettre à profit
ces propositions afin de les rendre concrètes dans la réalisation d‟un dictionnaire biunivoque
tupuri-français et français-tupuri sur lequel nous travaillons actuellement.

146
L‟élaboration d‟un dictionnaire du type envisagé ici est un chemin long et parsemé
d‟embûches de divers ordres. Nous venons d‟évoquer quelques problèmes d‟ordre technique
et sémantique auxquels nous avons été confrontés le long du chemin parcouru et pour lesquels
nous avons proposé des solutions. Au stade actuel de notre travail, ces solutions nous
paraissent satisfaisantes. Mais, comme il n‟est pas encore achevé, elles ne sont peut-être pas
définitives. L‟aspect sémantique seul ne suffit pas pour analyser un dictionnaire aussi dense
que le DITFA. La zone syntaxique et la zone d‟exemple sont aussi perfectibles. Outre ces
problèmes il en existe d‟autres dont nous aurions pu parler, comme par exemples ceux liés à
l‟exploitation d‟un logiciel (analyseur sémique) choisi comme outil de description, ceux liés
au choix des variétés dialectales dans le dictionnaire en général ou aux problèmes qui
touchent les domaines de la graphie et de la lexicologie. Mais nous avons dû faire des choix
parce que nous ne pouvions pas tout aborder ici de front (puisque nous sommes en
sémantique). Toutefois, nous espérons avoir l‟occasion de revenir très prochainement sur
d‟autres aspects.
Il ne s‟agit pas, comme pourrait le penser certains, d‟un dictionnaire virtuel ou encore
idéel, ce travail « nous fait aboutir à un modèle de dictionnaire, qui est un dictionnaire
théorique-non pas dans le sens qu'il n'a pas d'existence concrète, mais dans l'acception qu'il
répond à une certaine vision théorique de la réalité linguistique, que son pouvoir descriptif est
maximalisé, et donc que la justesse de la présentation des faits de langue rend justice à la
théorie sous-jacente.» (MEL‟ČUK et al, 1995:5).

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V- NOTES DE COURS
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Sciences du langage, inédit, Université de N‟Gaoundéré.
CALAÏNA T., (2017), Sémantique, notes de cours (ML 332), Master II, Sciences du langage,
inédit, Université de N‟Gaoundéré.

VI- SITES WEB


http://www.crisco.unicaen.fr
http://www.silcam.org
http://www.sorossoro.org
http://www.sudlangues.sn
http://www.tupuri.org

158
ANNEXES

159
Annexe 1 : Quelques entrées du Dictionnaire tupuri-français-
anglais utilisées dans le travail

B
bäa n. 1. Dieu. 2. Pluie, b a rāa “ il pleut“. (Dieu/pleure) b a tuf sāarē. Se dit en
début de saison (pluie/crache/la salive). Prov.{ jo’ dë b a jè kìtè’ë
g “ on ne sème pas avec la pluie du menteur “. (p.29)
bàa.ge v. tr. Coaguler, cailler (p.29)
bàa.ge v.tr.p remplir, b{a hoolè go de bii . remplir la gargouillette d’eau. (p.29)
bàa.ge v.tr.o. Attraper, saisir. it.bàk.ge (p.29)
bàlàr.gë var. bàr.gë. (p.32)
bäncéeré var. bäycéeré (p.31)
bàr.gë v.tr. Couvrir, étaler, s’étendre. Duwee.re ɓàr wo. « Les oiseaux se sont posés
en groupe ». (p.32)
bäycéeré n. plante sp.aux feuilles comestibles .var. bëmcéeré, bäncéeré. (DITFA, 33B)
bëmcéeré var. bäycéeré. (p.35)
b lfūŋ n. épidémie (p.39)
bùsgi v. intr. 1) divorcer.2) répudier. ex : blɔɔn bus way ɓɛn wɛgɔ : l’homme a
répudié sa femme.3) renvoyer. ex | kal bus naare maa wɛr ɓɛn wɔ gɔ
ɓuy : il a renvoyé toutes ses femmes.4) rendre.5) refuser. (p.39)

Ɓ
ɓààle n.1. Jambe, pied, patte. 2. roue. 3. + num. =fois. Ndi dɔk ne ɓààle ɓog. “ Je
l’ai fait deux fois“. (p.41)
ɓāŋ-gɔ 1. Désigne la région tupuri du Cameroun autour de Doukoula dont la variété
dialectale est considérée comme la plus pure. 2. Désigne la région
tupuri des villages autour de Lallé au Tchad dont les parlers sont les
plus proches de ceux du Cameroun. (vers/n.i.). (p.43)
ɓāŋ-l ŋ désigne sa propre région et son propre dialecte pour un locuteur. (p.43)
ɓāŋ-wɛrɛ désigne toute région { l’est du lieu o se trouve le locuteur ou du lieu dont
il parle. (du coté de/ dessous). (p.43)
C
cààge v. intr. 1) couper, casser. ex s|alen caa gɔ : la corde s’est coupée. 2) abattre.
ex | caa koon gɔ gesiŋ : il a abattu l’arbre. 3) blesser. ex : koo caan
ɓaale : il s’est blessé le pied. 4) vacciner. ex { de caa kamliiri wɔ wara :
on vaccine les enfants aujourd’hui. 5) scarifier. ex : wel gɔɔni caa se ɓɛ :
le jeune initié se fait des scarifications. 6) se sauver (animal attaché...).
ex pirn caa haa suu : le cheval s’est sauvé depuis hier. 7) semer : coton,
niébés, mil pénicilaire.... ex | diŋ w r maa caa mb|araw c’est le moment
de semer le coton, récolter. ex { caa gar{ gɔ jag gesaŋ : le fait de couper
le sorgho rouge ‘gar{’ et le laisser secher sur les tiges entrecoupées et
croisées. (46)
cēgā n. coll. faim de viande. Cēgā Jóŋ mē.“j’ai faim de viande“.cf. sāy (p.50)
ci n.1. sang. 2) lèpre. ex c i gɔ de caa blɔɔ maa caw no : cet homme a la lèpre.
(p.53)

a
cūwāy n. coll. vérité. á cūwāy “ c’est vrai“ (p.53)
D
d agē b o bateau, bac (pirogue/en fer). Syn. d agē wüu (p.59)
d agē wüu bateau, (pirogue/du blanc). Syn. d agē b o (p.59)
dáäwa n. igname. Syn.déw (p.59)
déŋ adv.pos. Débout, dressé (p.66)
déŋ adv. en nombre, en quantité. (p.66)
déw n. igname. syn. dáäwa (p.64)
déw-köo n. manioc (igname/de l’arbre). Syn. mbāy (p.5)
dɔŋdōlɔŋ n. 1. du verre. 2. Lunettes (p.68)
doo n.1. main, bras. Doo bi bay sé bo wa « mes mains ne sont pas sur ton corps =
tu es libre, je ne te retiens pas. 2. Mesure qui fait la hauteur du corps
plus la hauteur du bras étendu. 3. Mesure qui comprend la longueur de
l’avant-bras plus la longueur de la main.4.mesure de la longueur de la
main depuis la base du pouce au bout du majeur.5. Trompe de
l’éléphant.6.branche.7.cinquante. (p.69)
dɔrnö n. labret des femmes traditionnellement fait en poterie. (p.70)
düŋdūlüŋ n. instrument de musique fait d’une courge oblongue évidée frappée contre
la cuisse, joué par les filles. (p.71)
dùu.gï 1.v.tr.p.toucher, palper. 2. v. tr. o. provoquer (p.71)
d ’.gï v. tr. chasser les mauvais esprits, notamment män-hùulí en faisant du bruit.
Cf. dò’.gë (p.71)

Ɗ
ɗ{k.ge v.tr.constater, analyser. Ndi ɗ{k rë nō “ j’ai réfléchis { cette affaire“.ɗ{k ne
“ penses-y“ .cf. ɗɛk.gë, ɗìk.gï. (p.78)

F
faŋ n. 1. placenta 2. cordon ombilical. (p.78)
fàage v.tr.p. 1. Nettoyer. 2 guérir une maladie due à un sorcier grâce au jè-saŋgu
ou au guérisseur, désensorceler, fàa.ge tikwaare (guérir/les
rhumatismes) [ ?]. (p.79)
fèn –kīŋ n. luette dans le parler des femmes .Syn. fí. (p.80)
fí n. 1. Luette. 2. Inflammation de la gorge, angine( ?) attribuée à la luette dans
certains lignages dans lesquels elle est entrée. Càa.gefí « ôter la luette »
cf.fèn –kīŋ. (p.84)
fíirí-bïi n. roseau. Syn.fír-fïi (herbes/ de l’eau). (DITFA,85F)
fír-fïi n. syn. fíirí-bïi (p.85)
fultoo n. vessie.(p.87)
fuygi n. 1. ongle. 2. griffe. (p.88)

b
G
gàagë n. Corbeau. syn. g wlā (p.96)
gar{-carage n. variété desorgho caudatum ; rouge, tardif, très apprécié pour la
fabrication de la bière de mil ; ses longues tiges sont brulés pour faire
du sel.(p.93)
gar{-depuy n. variété de sorgho cautatum blanc, demi-hâtif. (p.93)
gar{-desee n. variété de sorgho caudatum à grain rouge, demi-hâtif très cultivé.
(p.94)
gar{-duk. gi n. variété de sorgho caudatum à grain rouge et blanc, demi-hâtif ; peut
être mangé vert. (p.94)
g wlā n.empr.K111.corbeau. prov.“G wlā rīŋ g{ cūu ɓë daŋ n y ɓë “corbeau dit : le
bouillon est meilleur que la viande“ (allusion aux notables qui, chez le
chef, par respect pour lui, ne touchent au bouillon, se dit des personnes
dépitées qui se ventent contre toute évidence d’être satisfaits de leur
sort). Syn.gàagë F112.,gëwlē- T113. ,g wlē- (p.95)
gay jaw n. variété de ‘gay114’ avec cinq pions dans chaque trou ;le joueur ramasse
les « pions »dans la cupule faisant face à celle où il a fini sa propre série.
(p.96)
gay kerɛŋ n. variété de gay o chaque trou n’aurait que deux pions ». (p.97)
gay may n. variété de gay ; dans lequel il y a 4 pions » dans chaque trou. (p.97)
g{y-n arë n. varieté de g{y avec 5 pions dans chaque trou (g{y /de femmes). (p.97)
gay poo n. gay-jaw , gay de razzia. (p.97)
g{y –w|ay n. Syn. g{y-n arë (g{y /de femme). (p.97)
geɓel n. plante sp115. (p.98)
gèɗɛr n. rat sp. syn. mbïirí-fí ? (p.99)
geljew n. Oiseausp. de plumage turquoise. (p.102)
gérë n. étoile t.g. 2.torche.3. cataracte de l’œil. (p.103)
gér-w ā n. syn. w ā (DITFA, 103G)
giri. n. kaolin rouge. (p.105)
giri q. se dressant droit, en érection. (p.105)
goŋ n. Cantharide. (p.107)
goŋ n. Petit batracien. (p.107)
gↄlↄgɛ n. fesse, postérieur. (p.107)
gɔŋgā n . empr. ( ?) vérité .syn. cūwāy (p.107)
gɔɔni n. Initiation des hommes. Syn.: gɔnɔgáy, lɛɓɛ. (p.108)
got.ge v.tr. rassembler : goot.ge fiiri wo « rassembler les chèvres ». (p.108)
got.ge v.intr.1. Fleurir. 2. Bourgeonner. (p.108)
guɗɓuli n. 1. tronc d’arbre servant de banc. 2. n. arbre. (DITFA, 109G)
gùr-köo n. 1. Racine .2. Souche d’arbre. 3. poison. Cf. gùn.gi. 4. médicament. Cf.
sàŋgü (p.112)

111
« K. » signifie : emprunt au Kéra. (RUELLAND, 1988 :11)
112
« F. » est une variante dialectale de Fourkoumay (ɓāŋ-wérë). (Ibid.p: 11)
113
« T. » est la variante dialectale parlée à Tikem (fáalë-pīyēw). (Ibid.p.12)
114
gay : jeu de ‘pions’ qu’on fait circuler dans des trous creusés au sol avec les graines du ‘fɛw(arbre sp.
on fabrique des pirogues et mortiers avec son bois ; avec ses grosses graines rouge foncé, le chef de Daawa
fait le ‘halge’ de ‘lim’ (divination).Afzeliaafricana.)ʼ, ou avec des petits cailloux, ou des tessons de poterie,
ou des fragments de calebasse.
115
Sp : espèce

c
guwee n. herbe sp. ( p.113)

H
hosaɓe n. 1. Serpent de couleur verte. 2. n .herbes aquatiques sp. (p.126)

J
Jäk-hīilā n.cf. Jäk-jöo. (p.129)
Jäk-jöo n. 1. langage recherché, métaphore, style indirect.2. proverbe, devinette. Syn.
Jäk-hīilā. (p.130)
jäg-t ŋ n. porte . « jäg-t ŋcamioŋ », « porte d’un camion » (p.131)
Jaŋ.ge v.tr .1. Éduquer, apprendre. Ndi jaŋ lakole j’apprends ({) l’école ». S’entrainer,
s’exercer { (la course, la lutte). Jaŋ.ge piri entrainer le cheval », le faire
trotter. 3. Durcir, se fortifier. Exp. Ti mbarga jaŋ we la tête de l’enfant
a durcie » (= il ne comprend rien). 4. Mûrir, (pour des arachides, poids
de terre). 5. Lire. Cf. kee.ge. (p.131)
Jewlɛɛre n. empr. peul. case d’entrée de l’enclos de certains chefs, empruntée aux
peuls. (p.134)
Joo- kaʼraŋ n. grand tambour d’environ 1 m 80 de haut entreposé chez le chef de
village ou chef de quartier . Il est décoré d’attributs féminins et coloré
au giri kaolin rouge. Sorti au moment de la fête du kaʼraŋ avant le mene
il concerne tout le village tupuri. (p.134)
j ɗ m n. emplacement dans la cour de l’enclos o on allume le feu en période
fraiche, ce qui crée un tas de détritus. (p.134)
juwa’age v.tr.p.1.fouetter, « chicoter ».2. Gauler (des tamarins par ex.).3. ôter le son,
l’écorce en frappant. Juwa’age suwée. Enlever les arachides des cosses.
4. Transpercer d’une flèche ou d’une lance. waa juwa’a ndi la flèche
m’a transpercé ». (p.139)

K
kalsɔŋ n. empr .fr. maillot de bain coloré que les danseurs gurna revêtent pour
les cérémonies. (p.143)
kērē n. bouillie faite de boule de mil délayée dans du lait ; peut aussi se faire en
cuisant de la farine dans de l’eau et en ajoutant ensuite du lait. (DITFA,
151K)
kipee n. bâton de semaillesen bois d’environs 50 cm, la ,sic- manche formant
angle, utilisé sur les sols sableux pour la semence du mil, des arachides,
des poids de terre. (p.154)
kↄlge v.tr.p.1. Déplacer, changer de place. 2. Transvaser. 3. Se transformer en,
prendre une autre forme. (p.157)
koo-joo n. plante épineuse qui donne une sève blanche utilisée (en incision )
contre le paludisme. (p.156)
kūlɛɗē q. lisse. (p.161)
kurufi n. coll. sorghoestimé d’une variété très sucrée » cultivé aux alentours de
l’enclos. Le jour de la moisson on fait cuire les épis entiers { l’eau. Après

d
séchage, les graines sont pilées et la farine sert à confectionner le
maakoo116. (p.163)

L
lèelé n. Chant de femme, composé de couplets chantés par une femme et des
refrains repris par plusieurs femmes. (p.172)
lɛtgë v .tr. 1. Essuyer de la main, épousseter.2. racler pour nettoyer .le’et ɓi haarë.
“racler la calebasse“ (p.172)
leɁ.ge naa dormir (tomber/ de sommeil). (p.172)

M
mbāy n. empr. ? manioc. (DITFA, 193M)
mbïirí-fí n. rat .sp. (déchet /d’herbe). T. mbïirí-fïí (excrément/de chèvre). (p.194)
mücúycüy n. fourmi noire sp. (p.189)
m ŋgüur n. forge. Traditionnellement transmis dans un lignage, de nos jours on
peut l’acquérir par l’achat du bïgi (marteau) ou on peut l’acquérir par
l’alliance. ngüurí. (p.190)

N
nèe-síŋ n. plante dont les feuilles dites “oseille“ sont appréciées pour les sauces.
hibiscus sabdariffa. (p.202)
nïiní n. meule composée d’une pierre encastrée dans une construction en poterie
que chaque femme a dans sa case pour moudre les grains âpres les
avoir pilés. (p.203)

P
pɔrɗɔ n. pétales rouges de l’hibiscus sabdariffa utilisées pour faire de la sauce,
« karkandzé ». cf. nèe-síŋ (DITFA, 224P)

R
rè.ge v.tr.p.1. Manger t.g hoole.n rè « boule » (de mil) a rè we « il a mangé »
= « c’est mangé ». ré. ge nene. macher .reé neén nay no « mache bien la
viande ». 2. User, se détériorer { l’usage. Taarak ɓi re go. «Mes
chaussures sont usées ». 3. Engloutir, consommer quelque chose qui
n’est pas { vous. Ndo ré horok bi buy. Tu as consommé toute ma
richesse (bétail) ». 4. Gagner (aux jeux) ; écraser son adversaire. à ré
caca « il a gagné au jeu de cauris ». 5. S’enfoncer profondément. Jaaw ré
yaw. « La lance s’est enfoncée profondément. ré.ge bay, frimer. re. ge
gew. Avoir = prendre de la valeur. (p.229)

S
s{ŋgü n. 1. nom donné à toute plante utilisée comme médicament. 2. touffe de
plantes cultivée par le chef de famille plantée { gauche de l’entrée de sa
maison et qu’il utilise comme contre poison ». 3. poison (p.236)

116
Le maakoo est une pâte faite de farine de kurufi ou de doŋloŋ(variété de mil)cuillis frais, bouillis puis
séchés et ensuite pilés et réduits en farine

e
sare n. gros sésame rouge. (p.236)
sare q.rd. différent. prov. « tikoge riŋga nay hik bi sir sar-sare » « épervier a
dit “la viande sèche différemment selon le village“ ». (p.236)
saraw n. 1. Fibre, crin végétal ; racines de rônier avec lesquelles on fabrique les
nasses ; racines utilisées comme cordes de harpe. 2. fil de fer, rayon, fil
de nylon. (p.238)
sāy n. 1. faim de viande. Sāy n y b{a ndï “ j’ai été pris d’une forte envie de
viande“ .2. désir sexuel sāy ɓē t ɓ “ je le/la désire” (p.237)
sɔɓgë v.tr. 1. Sucer. mb|rgā sɔɓ lɛ’gë-kòo “ le bébé suce un fruit“. 2.
Embrasser. (p.246)

T
tënënē q. 1. Frais (désigne la nourriture fra che, crue et non cuisinée) .2. d’un être
animé : en bonne santé, épanoui. (p.259)
titiri n. grand tambour de 2 m 50 environ de haut et 1 m de diamètre coloré de
kaolin rouge. Entreposé chez le chef de terre ce dernier l’utilise pour
annoncer les grands événements, décès et guerres. (p.265)
torla n. groupe de travail collectif qui réunit voisins et amis { l’instigation d’un
paysan. En échange de leur main d’œuvre dans son champ, il leur
offrira repas et boisons et à leur demande leur rendra le même service.
(p.26)

W
w ā n. flèche 2. Aiguille en bois pour coudre des pailles, des calebasses. Cf.
pàadälë (p.272)
w ā n. étoile du matin. Cf. gérë (p.272)
wàagë n. plaie. (p.275)
wàalë-män-sām n. sorgho sp., le nom vient de la forme de la panicule. (p.272)
w āy n. chien. (p.175)
waāy n. 1. femme. 2. épouse. 3. Reine aux jeux de cartes. (p.276)
wéela n. 1. Graine dans le noyau du kↄlga117fruit du palmier doum ; comestible
quand il est frais. 2.syn. de méela.(p.280)
wii.gi v.tr. dire de façon exigeante, demander de quelqu’un, exiger en paroles.
(p.280)
wië.gi it. de wii.gi (p.281)
wɛsɛk.ge v.tr.p. détruire en émiettant, réduire en lambeaux pour rendre inutile. syn.
wɛs.ge (p.282)
Wii.gi.dↄo menacer du doigt. Syn.hir.gi.do. (DITFA, 282)
woë.ge it. wooge ( DITFA, 282W)

117
kↄlga est l‟équivalent français du fruit du rônier ou fruit du palmier doum.

f
Annexe 2 : Quelques unités lexicales du DITFA aménagées
B
bàa1 n. [Culture]. Dieu : Il est considéré comme le créateur et c’est lui qui tient
tout dans ses mains : les vivants, les morts, les puissances de la nature,
celui qui donne la vie et la mort. Il est encore le juge suprême. Tous les
autres gardiens de la tradition comme : les ancêtres (moorebe), les
âmes des morts (manmbuyuuri), les puissances qui gardent la nature,
demandent reconnaissance et respect ( soore ), ne sont que des
instruments d’une seule volonté, celle de dieu. Il y a différentes façons
de penser { dieu. Il y a le dieu suprême qu’on appelle Waŋkluu »,
grand chef, ou simplement bàa, et il y a le b{a maa laa tiŋ, le Dieu qui
fonde le foyer et les « bàa » personnels, le bàa de chaque famille. Au
début de la saison des pluies, tout Tupuri marié prépare un bélier ou un
mouton accompagné du yii pour offrir un sacrifice au seul dieu
fondateur de son foyer et créateur de l’univers. On pense qu’il y a un
bàa censé protéger le mariage, qui aide à trouver la femme et à unir
l’homme et la femme b{a ha way ne sɛ wɛr maa laa tiŋ ne sɛti. Dieu lui
donne la femme pour fonder la famille. Figure : Bàa tag ɗuu ɓɛ gɔdieu a
effacé son nom. À l’annonce de la mort d’une personne, les gens disent
que Dieu a effacé son nom. Si la personne estgravement malade, les
gens disent : B{a ŋgar ɗuu ɓɛ gɔ gà ɗa Dieu n’a pas encore effacé son
nom. Proverbe : kurkudu wa a ga { jɔŋ hun se kawre ɓɔ wɔ gà, sɛn
mokay se ɓɔ ni ndɔ ma’ wel B{a de dɔɔhaw Pigeon dit qu’il ne faut pas
être jaloux de ses proches, cela équivaut à un coup degifle donné à
l’enfant de Dieu. Syn.: Waŋkluu, Pantway, Manwúr-Bàa et Dieu par
Jésus-Christ, pour les croyants chrétiens.
bàa2 n. 1) cause qui détermine les phénomènes atmosphériques.2) pluie. 3)
foudre, grêle. Proverbe: à kab de bàa je getɛ’ g{ : on ne sème pas avec la
pluie d’un menteur. Bàa bayraage ti w r ɓɛ wa : il ne pleut pas au bon
moment. Bàa caa swaare le ciel est couvert de nuages. ex : bàa caa
swaare wara ciŋ debaŋ le ciel est couvert de nuages aujourd’hui. Bàa de
buggi pleuvoir en gouttelettes. ex : bàa de buggi yaf-yafe, yɛf-yɛfɛ: il
pleut en gouttelettes. Bàa de cwȩ’ge il y a une fine pluie. Bàa duu lɛ le
tonnerre gronde. Bàa jɔŋ re Dieu a agi en produisant un malheur. Var.:
Waŋkluu jɔŋ re. Bàa ‘wuy lɛ la pluie se prépare.

Ɓ
ɓāŋ-gɔ n.1. Composé de ɓāŋ- (vers)et du morphème -gɔ qui compose l’ensemble
de l’unité lexicale est une pratique traditionnelle qui consiste à
aller prendre un bouc ou un bélier de gré ou de force dans une
zone un peu éloignée du chef supérieur tupuri (Waŋ Doré) pour le
sacrifice. Généralement connue sous le nom de « maŋge kalkao ».
2. Le ɓāŋ-gɔ est donc la variété dialectale du tupuri parlé dans la
zone ciblée par la pratique du gɔ. À l’origine désigne la région des
Tupuri qui ont émigrés du Tchad dans la zone forestière au
Cameroun. 3. C’est la zone du pays tupuri du Cameroun, plus
précisément les villages des circonscriptions administratives
suivantes : Kar-Hay, Porhi, Kalfou, Guidiguis Tchatibali,

g
Dziguilao… Les Tupuri restés au Tchad les appellent “jar ɓaŋ yoo
koowɔ”. Ces derniers les appellent aussi “jar ɓaŋ liŋ wɔ“. Par suite
de contraction, le terme “ɓaŋ yoo koo“ est devenu “ɓaŋ-gɔ“ ou “ɓi
koo“. Il désigne aujourd’hui le territoire tupuri du Cameroun
hormis les villages camerounais de la frontière à ɓaŋ liŋ, sans
prendre en considération le côté ɓaŋwɛ rɛ. ex jar Tupur
maaTulum wa ɗ wɔ jag ɓāŋ-gɔ: les Tupuri de Touloum parlent le
langage de ‘ɓāŋ-gɔ’.
ɓāŋ-l ŋ n. 1. Composé de ɓāŋ- (vers) et de -liŋ (chez soi, la maison).Terme qui
désigne la maison d’origine. 2. Aujourd’huile terme désigne les
villages suivants : Nenbagre, Sɛɛrɛ, Daawa, Gaŋwu, Darbe,
Mondawré, Blambale, Laale, Guwɛɛ, Ciŋriŋ, Guyu, Guɗum, Yoway...,
3. Désigne la variété dialectale du tupuri parlée dans ces villages
et les villages frontaliers du côté du Cameroun ayant le même
parler. ex : jar ɓāŋ-l ŋ ɗe wɔ dày ga tày : les Tupuri de ɓāŋ-l ŋ
appellent le bœuf “tay“.
ɓāŋ-wɛrɛ n. 1. Composé de ɓaŋ- (vers) et de -wɛ rɛ (derrière, levant), vers le
soleil levant, l’Est. 2. Le terme désigne le peuple tupuri rapproché
de Fianga et les villages frontaliers du côté du Cameroun .3 .
Variété dialectale en usage dans ces régions.

D
dɔŋdōlɔŋ n. 1) sève. p a k o (lait / d’arbre) sève d’arbre. Syn. r o k o (pleures
/d’arbre), k ’{y . 2) verre 3) lunette: hee dɔŋdōlɔŋ ɓɔn nen ɓɔ :
porte tes lunettes. 4) bouteille d ’.gï v.intr. 1) toucher. 2)
palper.ex : du’ we dɔɔ me se : touchez-moi. 3) provoquer.ex : ndɔ du’
me lɛ la ?pourquoi me provoques-tu ? 4).du’gi de waare déranger
qqn.ex : á duɗ wɔ me de waare ils me dérangent.5) appara tre. ex
paa de duɗ man dwȩȩ : ses seins apparaissent gros comme un
furoncle. 6) .du’gi gɔr jobo gɔ gesiŋ vaincre quelqu’un. à la lutte ;
renverser quelqu’un.
dùugï n.[Culture].Cérémonie spéciale du Chef de Daawa, après la fête du
poulet. Elle commence à Daawa et se poursuit dans les autres villages
tupuri avec des grands bruits pour chasser les esprits des ancêtres
‘manmuyuuriʼ hors du village.
dùugï 1) v.intr.mettre le feu à.ex bargiŋn duu gɔ :la cuisine s’est brûlée.Syn.:
dɔ’ge, rɔɗge.2) reprendre vie.
dùugï b{a grondement de tonnerre. ex b{a duu lɛ wɛrɛ :la pluie gronde { l’Est.

Ɗ
ɗ{k.ge v.tr. analyser. Ndi ɗ{k rë nō “ j’ai analysé { cette affaire“. Syn.m{ŋ.gē f i.
Var. ɗɛk.gë.
ɗìk.gï1 v.intr. 1) Penser. 2) se remémorer. 3) réfléchir. ex :ndɔ jɔŋ fen maa ɓɔn
mbɔ tuu bay ɗìk.gï lɛɓa ?Pourquoi agis-tu sans réfléchir ? Syn.: ɗ{k.ge,
ɗɛk.gë. 4) distiller. 5) filtrer goutte à goutte.
ɗìk.gï2 n. 1) pensée. 2) projet.3) désir. 4) ambition. 5) nostalgie. 6) écoulement.

h
G
gɔɔni n. [Culture]. initiation des hommes (Les dernières remontent à
1955(Debsikreo) 1975 (Dɔɔlɛ Disdandi). En 1975 elle se déroula avec
l’aval du gouvernement tchadien et sous la répression du
gouvernement camerounais et récemment en 2009 et2010 avec l’aval
du gouvernement camerounais. Syn.: gonogáy, lɛɓɛ.

M
mücúycüy n. fourmi-cadavre : grosse fourmi noire (genre paltothyreus) à
effluence de putréfaction.

S
sɔɓgë v. tr.1. Sucer. sɔɓgë sugare, baa re, degɔrgɔre, ta a gi sucer le sucre, le
tamarin, les fruits du savonnier ‘mb|ga’, le citron. sɔɓgë dɔɔ
manger la viande. 2 .sɔɓgë jag kaara -se dit de deux personnes qui
se sucent les lèvres en faisant l’amour, baiser. - être nombreux à
manger un petit repas. 3. sɔɓgë j ge saluer d’un baiser. Par
extension : embrasser.
T
Tënënē adj. 1) vivant, en vie.2) frais (nourriture fraîche). 3) cru. này tenene :
viande cru, paare-kage maa tenene œuf frais, paa tenene lait
non caillé, mbay tenen : manioc cru. 4) éveillé. Ndi tënënē : je suis
éveillé 5) épanoui, en bonne santé.

W
W ā n . 1) flèche. waa maajag ndelɛm ɓɛ’ kȩȩ gà : laflèche dont le bout est
pointune pique pas l’autre.2) aiguille en fer pour coudreles
calebasses. w ā maa saa hane aiguille pourcoudre la calebasse. 3)
étoiledu matin. naa laa dewaa naage nous partirons {l’apparition
de l’étoile dumatin. 4) germination desplantes. w ā s wɛɛ la we go :
les germes d’arachide sont sortis.

Annexe 3: Liste des informateurs


 DJAGJING Bernard, révérend pasteur de l‟EFLC, traducteur tupuri, 53 ans.
 MANKISSAM, chef du gurna et sacrificateur du clan Mankidif de Saotchay, 78 ans.
 RINGBE Daniel, révérend pasteur retraité de l‟EFLC, résidant à Guidiguis, 82 ans.
 YINYANG Jonas, évangéliste (auteur du Cantique tupuri) et libraire à l‟Alliance Biblique
du Cameroun (Agence de Maroua), 49 ans.

i
TABLE DES MATIERES

DÉDICACE .................................................................................................................... ii
REMERCIEMENTS ...................................................................................................... iii
SOMMAIRE .................................................................................................................. iv
RÉSUMÉ ........................................................................................................................ v
ABSTRACT ................................................................................................................... vi
ABRÉVIATIONS ET SIGNES CONVENTIONNELS ............................................... vii
LISTE DES FIGURES ................................................................................................ viii
ÉPIGRAPHE................................................................................................................... 1
INTRODUCTION GÉNÉRALE .................................................................................... 2
CHAPITRE I : ETHNOGRAPHIE ET ASPECTS LINGUISTIQUES TUPURI ........ 17
I-Ethnographie du tupuri ........................................................................................... 18
I-1-Le Tupuri : aux origines complexes et diversifiées ......................................... 19
I-2-Situation géographique et démographique ....................................................... 21
I-2-1-Situation géographique .............................................................................. 22
I-2-2-La situation démographique ...................................................................... 23
I-3-Organisation sociale et quelques aspects culturels .......................................... 25
I-3-1-Organisation sociale .................................................................................. 25
I-3-1-1-La famille ............................................................................................ 25
I-3-1-2-Le clan ................................................................................................ 26
I-3-1-3-Pouvoir juridique et religieux ............................................................. 26
I-3-1-4-Système de croyance .......................................................................... 27
I-3-2-Quelques aspects culturels......................................................................... 28
I-3-2-1-Le Gurna ............................................................................................. 28
1-3-2-2-Le few kagge ...................................................................................... 28
II-Présentation de la langue tupuri ............................................................................ 29
II-1-Aspects sociolinguistiques de la langue ......................................................... 29

165
II-1-2-Les dénominations et classifications génétiques de la langue tupuri ....... 29
II-1-2-1-Dénominations ou variantes orthographiques du glossonyme ......... 29
II-1-2-2-Classification génétique de la langue tupuri ..................................... 30
II-1-3-Les variantes dialectales du tupuri : Des points de vue divergents ......... 31
II-1-3-1-Le ɓaŋ-liŋ .......................................................................................... 32
II-1-3-1-1-Phonétisme du ɓaŋ-liŋ.................................................................... 32
II-1-3-1-2-Particularisme lexicale du ɓaŋ-liŋ................................................. 33
II-1-3-1-3-Sémantisme de la variété ɓaŋ-liŋ ................................................... 34
II-1-3-2-Le ɓaŋ-gɔ ........................................................................................... 34
II-1-3-2-1-Phonétisme de la variété ɓaŋ-gɔ .................................................... 35
II-1-3-2-2-Particularisme lexicale du ɓaŋ-gɔ ................................................ 35
II-1-3-2-3-Sémantisme du ɓaŋ-liŋ.................................................................. 35
II-2-Brèves descriptions phonétiques, phonologiques et sémantiques du tupuri ... 36
II-2-1-Le système phonétique du tupuri ............................................................. 36
II-2-1-1-Sons vocaliques ................................................................................. 36
II-2-1-2-Sons consonantiques ......................................................................... 37
II-2-2-Le système phonologique du tupuri ......................................................... 37
II-2-2-1-Les tons tupuri ................................................................................... 37
II-2-2-2-Phonèmes vocaliques ........................................................................ 38
II-2-2-3-Phonèmes consonantiques ................................................................. 38
II-2-2-3-Quelques éléments de sémantique lexicale du tupuri ....................... 39
II-2-2-3-1-La polysémie .................................................................................. 39
II-2-2-3-2-La synonymie ................................................................................. 40
CHAPITRE II : ANALYSE DE LA DÉFINITION LEXICOGRAPHIQUE(DL)
BILINGUE TUPURI-FRANÇAIS DANS LE DITFA ................................................ 42
I-Définition et typologie de la définition lexicographique ........................................ 43
I-1-Qu‟est-ce qu‟une définition lexicographique bilingue ? .................................. 43
I-2-Typologie de la définition lexicographique dans le DITFA ............................ 45
I-2-1-La classification classique de la définition (suivant QUEMADA) .............. 46
I-2-1-1-La définition nominale .............................................................................. 46
I-2-1-2-La définition logique ................................................................................. 46

166
I-2-1-3-La définition littéraire, ou humoristique ou littéraire ................................ 47
I-2-2-Les classifications ultérieures ....................................................................... 48
I-2-2-1-Définition phrastique.............................................................................. 48
I-2-2-2-Définition par inclusion ......................................................................... 49
I-2-2-3-Définition morphosémantique................................................................ 50
I-2-2-4-Définition par équivalences ou le terme à terme ................................... 51
II-Mode définitoire ou formes de la définiton et modes langagiers dans la définiton
des lexies.................................................................................................................... 53
II-1-Mode définitoire formes de la définiton ......................................................... 53
II-1-1-Mode conceptuel : par l'intension ou en compréhension ......................... 53
II-1-2-Mode référentiel en extension .................................................................. 54
II-2-Modes langagiers dans la définition : le phénomène de renvoi sémantique . 55
II-2-1-Renvoi synonymique................................................................................ 55
II-2-2-Renvoi antonymique ................................................................................ 56
II-2-3-Renvoi à un équivalent ............................................................................. 56
III-Analyse et classement des sens dans la structure définitoire de quelques unités
lexicales tupuri-français dans le DITFA.................................................................... 57
III-1-Présentation de la définition lexicographique ............................................ 57
III-1-1-Concept fondamental de la définition lexicographique : actant
sémantique .......................................................................................................... 58
III-1-2-Critère de formulation de la définition lexicographique bilingue : la
pertinence linguistique ........................................................................................ 60
III-2-Structure et contenu de la définition lexicographique bilingue..................... 61
III-2-1-Hiérarchisation des composantes sémantiques dans la définition
lexicographique bilingue tupuri-français ............................................................ 62
III-2-1-1 Composante ordinaire ...................................................................... 62
III-2--1-2-Composante générique ................................................................... 63
III-2--1-3-Composante faible .......................................................................... 63
III-2-1-4-Composante optionnelle : ................................................................ 63
III-2-2-Disposition des composantes sémantiques dans la définition
lexicographique bilingue tupuri-français ............................................................ 64
III-2-2-1-Le définisseur initial d‟une lexie : les incluants .............................. 65
III-2-2-2-Caractères du défini ......................................................................... 66

167
CHAPITRE III : POLYSEMIE ET HOMONYMIE TUPURI-FRANÇAIS DANS LE
DITFA ........................................................................................................................... 68
I-Mise au point des unités d‟analyse ......................................................................... 69
I-1-Polysémie ......................................................................................................... 69
I-1-2-Homonymie ............................................................................................... 72
I-2-Typologies de la polysémie et de l‟homonymie .............................................. 73
I-2-1Quelques typologies de lexèmes polysémiques .......................................... 74
I-2-1-1-Polysémie absolue .............................................................................. 74
I-2-1-2-Polysémie logique ............................................................................... 74
I-2-1-3-Polysémie verticale ............................................................................. 75
I-2-2-Quelques types d‟homonymes................................................................... 75
I-2-2-1-Les homonymes homographes ........................................................... 75
I-2-2-2-Homonymes homophones .................................................................. 76
I-2-2-3-Autres types d‟homonymies ............................................................... 77
II-Critères de distinctions entre lexèmes polysémiques et homonymiques, continuité
et rupture .................................................................................................................... 78
II-1- Critères de distinctions entre lexèmes polysémiques et homonymiques ....... 78
II-1-1-Critère étymologique................................................................................ 78
II-1-2-Critère de relation de sens ........................................................................ 79
II-1-3-Le critère formel, syntaxique, et morphologique ..................................... 80
II-2-Polysémie et homonymie : continuités et ruptures de sens ............................ 80
II-3-Statuts et variations du sens des entrées polysémiques ................................. 82
II-3-1-La théorie du sémème unique .................................................................. 82
II-3-2-La polysémie comme pluralité de sémèmes ............................................ 84
II-3-3-La polysémie comme signification sous-spécifiée .................................. 87
III-Classement et analyse des sens ............................................................................ 88
III-1-Classement des sens ...................................................................................... 88
III-1-1-Le classement fondé sur la fréquence en synchronie ............................. 88
III-1-2-Le classement historique ........................................................................ 88
III-1-3-Le classement logique............................................................................. 89
III-2-Structure sémique d‟une entrée lexicale polysémique tupuri et ses
équivalents en français: le cas de doo (main) ........................................................ 90

168
III-2-1-Ressources d‟analyse .............................................................................. 90
III-2-2-Outils ou appareils conceptuels d‟analyse sémique ............................... 91
III-2-3-Les constituants du polysème ................................................................ 91
III-2-4-Ajout d‟autres traits sémiques ou des attestations complémentaires ...... 92
CHAPITRE IV : LA RELATION SYNONYMIQUE ET SON TRAITEMENT EN
CONTEXTE BILINGUE TUPURI-FRANÇAIS DANS LE DITFA .......................... 95
I-1-Préalables définitionnels et méthodes d‟analyse .............................................. 96
I-1-1-Les préalables définitionnels ..................................................................... 96
I-1-2-Méthodes d‟analyse des lexèmes synonymiques ...................................... 98
I-1-2-1-L‟analyse componentielle ................................................................... 98
I-1-2-2-La substitution des lexèmes synonymes et l’investigation des
« opposés » (suivant PALMER) ..................................................................... 98
I-1-2-3-Les propriétés algébriques comme méthode d‟analyse de la synonymie
......................................................................................................................... 99
I-2-Classement typologique et quelques variantes des entrées synonymes dans notre
corpus....................................................................................................................... 100
I-2-1-Classement typologique des lexèmes synonymes ...................................... 101
I-2-1-1-Les synonymes absolus ....................................................................... 101
I-2-1-1-1-L‟emprunt : critère d‟identification de la synonymie absolue ..... 101
I-2-1-1-2-Le doublet comme critère de définition de la synonymie absolue103
I-2-1-2-Les synonymes partiels ........................................................................ 104
I-2-2-Variantes ou différenciations sémantiques de quelques entrées ................. 108
I-2-2-1-Variantes géographiques ou dialectales ............................................... 109
I-2-2-2-Variantes stylistiques .......................................................................... 109
I-2-2-3-Variantes combinatoires ....................................................................... 110
I-2-2-4-Variantes sémantiques.......................................................................... 112
II-Les renvois lexicaux : entre synonymie et analogie ........................................... 113
II-1-Renvois synonymiques ................................................................................. 113
II-2-Renvois analogiques ..................................................................................... 114
II-3-La distinction entre renvois synonymique et renvois analogiques ............... 114
II-4-Fonctions des renvois.................................................................................... 115

169
CHAPITRE V : PROBLÈME DE TRAITEMENT SÉMANTIQUE DANS LE DITFA
SUGGESTION D‟UNE MÉTALANGUE POUR UNE VERSION AMÉLIORÉE DU
DICTIONNAIRE TUPURI-FRANÇAIS ................................................................... 117
I-Problèmes de traitement sémantique .................................................................... 118
I-1-La définition lexicographique ........................................................................ 118
I-1-1-Quelques types de définitions défaillantes ............................................. 118
I-1-1-1-Définitions hypospécifiques ............................................................. 118
I-1-1-2-Définition synonymique ................................................................... 120
I-1-2-Les éléments définitoires défaillants ....................................................... 121
I-1-2-1-Domaines des lexies ......................................................................... 121
I-1-2-2-Dimensions des lexies ...................................................................... 122
I-1-3-Les faux incluants .................................................................................... 122
II-Polysémie, homonymie et équivalents en LC ..................................................... 123
II-1-Distinction entre polysèmes et lexèmes homonymes ................................... 123
II-2-La polysémie divergente ............................................................................... 124
II-3-Polysémie asymétrique et équivalent partiel ................................................ 125
II-4-Quelques cas de figures de l‟équivalent partiel ............................................ 125
II-5-Multiplicité des équivalents pour un lexème : le cas de la polyéquivalence 126
III-Problèmes de traitement de la synonymie .......................................................... 127
III-1-La non traduction des renvois synonymes .................................................. 127
III-2-Les faux synonymes .................................................................................... 127
IV-Suggestion de la métalangue nécessaire pour une version améliorée du
dictionnaire tupuri-français ..................................................................................... 128
IV-1-Les principes de rédaction du Dictionnaire Explicatif et Combinatoire
(DEC) ................................................................................................................... 128
IV-1-1-Principe de formalité ............................................................................ 129
IV-1-2-Principe de cohérence ........................................................................... 129
IV-1-3-Principe d'uniformité interne ................................................................ 131
IV-1-4-Principe d'exhaustivité .......................................................................... 132
IV-1-4-1-L'exhaustivité interne .................................................................... 132
IV-1-4-2-L‟exhaustivité externe ................................................................... 134
IV-2-Les règles de description de la définition lexicographique bilingue .......... 135

170
IV-2-1--Règles relatives au domaine et au sous-domaine ................................ 135
IV-2-2-Règles relatives au définisseur initial ................................................... 136
IV-3-Quelques solutions à l‟inexistence des équivalents dans la langue cible .... 137
IV-3-1-Le rapport entre signifié/signifiant de LS et équivalent en LC ........... 138
IV-3-2-Description hyperspecifique de l‟unité lexicale et exemples
définitoires : compléments de sens des lexèmes dans la langue cible .............. 139
IV-3-2-1-Description hyperspecifique de l‟unité lexicale ........................... 139
IV-3-3-Des exemples définitoires : compléments de sens des lexèmes dans la
langue cible ....................................................................................................... 140
IV-4-Créativité lexicale ........................................................................................ 140
CONCLUSION GÉNÉRALE ..................................................................................... 142
BIBLIOGRAPHIE ...................................................................................................... 148
ABRÉVIATIONS ET SIGNES CONVENTIONNELS ............................................. 148
ANNEXES .................................................................................................................. 159
TABLE DES MATIERES .......................................................................................... 165

171

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