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Propriétés contrastives roumain/français et difficultés possibles pour les élèves ayant le roumain pour L1
Contenu
1. Introduction
1.2. Ecriture
3. Morpho-syntaxe
3.1. Le nom
3.2.1. Valence verbale
3.2.9. Choix du subjonctif dans la subordonnée en fonction de l’évaluation du contenu propositionnel (possible
etc)
3.3. Circonstants
3.3.2. Adverbes
4. Phrase
4.4. Interrogatives
REFERENCES
1. Introduction
Le roumain (româna) est une langue indo-européenne de la famille des langues romanes, représentant la
branche orientale de cette famille, parlée par environ 24 millions de locuteurs (Roumanie et République de
Moldavie). Le roumain standard parlé en Roumanie est relativement homogène ; le roumain parlé en
République de Moldavie présente certaines caractéristiques dialectales, mais ne se distingue pas
fondamentalement du roumain de Roumanie. En revanche, les dialectes parlés essentiellement dans des
régions au sud du Danube, en Bulgarie et ex-Yougoslavie (l’aroumain, parlé aussi dans la communauté
aroumaine de Roumanie, le mégléno-roumain et l’istro-roumain) sont des dialectes bien distincts de celui
parlé en Roumanie, aussi nommé daco-roumain.
Le vocabulaire de la langue est en grande partie d’origine latine, surtout pour le fonds principal, mais le
roumain est la langue romane qui a été le plus enrichie d’emprunts, étant donné sa situation géographique
(une enclave latine entourée par des langues slaves et le hongrois). Quelques centaines de mots
proviendraient du substrat thrace ; l’apport slave se situerait à 30-35% du vocabulaire, et on identifie
également un apport hongrois, allemand, grec, turc, français, allemand et anglais à différentes moments
de l’évolution de la langue. L’influence romane (et plus particulièrement celle du français partir du XIXème
siècle) est notable, et a eu pour effet une « relatinisation » du vocabulaire. On peut ainsi noter des
doublons dans lesquels un terme est hérité du latin et en conséquence affecté par les changements
phonétiques, l’autre est emprunté par la voie du vocabulaire savant.
Tableau 1 Doublons populaire/savant dans les termes dérivés du latin
bou ‘bœuf’ bovin ‘bovin’
columnă 'colonne' coloană ‘colonne’
martor 'témoin’ martir 'martyr’
mormânt 'tombeau' monument 'monument'
vână 'veine’ venă 'veine’
1.2. Ecriture
Le roumain est écrit avec l’alphabet latin depuis la fin du XIXème siècle (moment où l’alphabet latin a été
adopté à la place de l’alphabet cyrillique), et il y a eu des réformes qui ont successivement simplifié
l’orthographe, qui se heurtait à la difficulté des sons spécifiques au roumain. L’orthographe de la langue
se base essentiellement sur le principe phonétique : un son/une graphie.
Tableau 2.
ț
ă
ce
ci
ge
gi
[ke] che
[ki] chi
ghe
ghi
La Roumanie a une longue tradition d’enseignement du français (moins intense tout de même depuis
1989), et les relations culturelles entre la France et la Roumanie ont une longue histoire. Beaucoup de
Roumains parlent couramment français (même si cela semble changer avec la forte influence de l’anglais
dans les dernières décennies) ; et il y a une immigration roumaine importante en direction de la France.
Le roumain est également une langue migrante, surtout à commencer par les années ’90, et développe des
variétés qui subissent l’influence des langues secondes acquises dans le processus de l’immigration
(l’anglais, les langues romanes – surtout l’italien, l’espagnol et le français).
On peut supposer qu’une certaine facilité des Roumains pour l’apprentissage du français pourrait venir de
l’origine commune des deux langues. Il existe cependant beaucoup de différences entre les deux systèmes
linguistiques (domaine nominal et verbal, flexion, structure de la phrase) ainsi que des faux amis au niveau
du vocabulaire d’origine latine; beaucoup de termes qui existent dans les deux langues ont eu en effet des
évolutions sémantiques différentes.
En tant que langue romane, le roumain partage un lexique latin avec le français, mais aussi des patrons de
dérivation aussi bien nominale que verbale.
Le roumain présente deux types de dérivés très productifs, à savoir ce qu’on appelle ‘infinitif nominal’
(base verbale + suffixe féminin –re) et ‘supin nominal’ (base participiale nominalisée) qui sont des mots
abstraits dérivés de verbes et exprimant des événements. Le français ne dispose pas de ce système de
dérivation mais d’un système varié basé sur des suffixes comme –tion,-ment,-age. En revanche, le
roumain présente également des noms en –țiune/-ție/-siune/-sie empruntés du français ou hérités du
latin.
L’impression d’être en terre connue peut donner lieu à un certain nombre de « faux amis » ou bien peut
amener le locuteur roumanophone à produire des mots français qui n’existent pas. Le locuteur
roumanophone peut comprendre assez vite que beaucoup de noms d’événement en français sont dérivés
par l’ajout du suffixe –tion, et peut généraliser ce patron de dérivation ; de surcroît, on peut généraliser
également le thème –at– (>-ation) qui n’est pas toujours présent dans les dérivés du français. D’autres
patrons de dérivation propres au roumain peuvent également être prêtés au français, comme par exemple
le suffixe adjectival –ic ‘-ique’, ou la dérivation sur une base nominale ou verbale sans ajout de suffixe,
patrons qui existent également en roumain qu’en français mais sur des bases qui ne sont pas toujours les
mêmes. Un certain nombre de telles formations sont attestées et sont illustrés dans le tableau ci-dessous.
On peut également s’attendre à des transferts lexicaux dans certains cas où un verbe construit sur une
base latine n’a pas le même sens en roumain qu’en français, comme par exemple le verbe a ajuta ‘aider’,
formé sur une base existant aussi en français ; un locuteur roumanophone pourra donc produire des
phrases mal formées comme (1) :
Artizanat ‘boutique d’objets d’art faits par un artizan’ Artisanat ‘conditia, starea de meser
3. Morpho-syntaxe
3.1. Le nom
Ce contraste permet de s'attendre à ce que les apprenants roumanophones tendent à produire en français
des formes comme (2b) ou (3b), c'est-à-dire des noms nus en contexte prépositionnel.
Les noms nus sont également utilisés en roumain dans la position d’objet, exprimant une quantité
indéfinie (4), qui en français est rendue par des indéfinis pluriels (5) ou singuliers dans le cas des noms de
substances.
Notons à ce propos l’inexistence en roumain de l’article partitif, dont le fonctionnement est recoupé par
l’utilisation des noms nus ; cela doit donc faire l’objet d’un effort particulier de la part des apprenants
roumanophones.
Le roumain a encore des cas morphologiques : les noms présentent des formes différentes selon leur
fonction dans la phrase.
On peut observer que lorsque le nom n’a pas d’article, la désinence de cas (lorsqu’elle est présente)
apparaît sur le nom nu ; lorsqu’il a un article, c’est l’article qui prend la marque de cas (qui s’amalgame
avec celles de genre et de nombre).
‘fille / la fille / une fille / de la/d’une fille / à la/une fille’
Le complément d’objet (à l’accusatif) ‘personnel’ est marqué en roumain par la préposition pe ‘sur’, aussi
appelée marqueur d’« accusatif prépositionnel », lorsque l’objet ‘personnel’ est défini (cf. 14a), et donc
toujours lorsqu’il s’agit d’un nom propre (14b-e) ou d’un pronom (14f).
On peut également voir dans (14) que l’objet prépositionnel est doublé – soit anticipé, comme c’est le cas
toujours avec les noms masculins – soit repris, dans le cas des objets féminins et lorsque le verbe est à un
temps composé – par un pronom faible (o 'la', îl/l- 'le', îi/i- 'les'). Ce phénomène n’existe pas en français
standard :
Il est donc possible que les apprenants roumanophones fassent le transfert des formes avec redoublement
pronominal vers le français, produisant des structures comme (15c) ou (17b).
Ce type de transfert est également prédit pour les subordonnées relatives, où en roumain il y a reprise du
relatif objet par un pronom (18), à la différence du français (19). L’apprenant roumanophone produira
donc des structures avec reprise pronominale en français, comme en (20) :
On s’attendrait que cette différence soit un problème potentiel pour les apprenants roumanophones qui
les déterminerait à produire des formes comme (21)c ; or, il s’avère que cette distinction est acquise assez
vite et de manière stable. Seulement dans un premier temps il est possible de trouver des formes de type
*femme-la (aussi en association avec cette femme-là)
En revanche, la morphologie n’est pas parallèle dans les deux langues. A la différence du français qui a
trois formes de démonstratifs pour le singulier (en incluant l’allomorphie devant un masculin commençant
par une voyelle) et une seule forme pour le pluriel (cf. ce, cet, cette – ces), le roumain a deux formes pour
le singulier et deux formes pour le pluriel. Les apprenants roumanophones pourront produire des formes
tendant à régulariser la situation en français, comme par exemple *cettes roses.
3.1.3.3. Le possessif
Le possessif roumain est un adjectif qui se combine avec l'article défini, alors qu'en français moderne les
déterminants défini et possessif s'excluent mutuellement :
Cette différence entre les deux langues peut être une source de transfert du roumain vers le français,
générant des structures comme (23b).
Alors que l'adjectif précède ou suit directement le nom en français, sans marqueur interposé, le roumain
possède un article défini spécial (cel/cea/cei/cele), qui se place entre le nom et l’adjectif épithète. Cette
insertion n’est pas obligatoire ; lorsqu’elle apparaît, elle attire un effet de notoriété ou de contraste :
‘le grand garçon [que nous connaissons / et non pas le petit] passe dans la rue’
Afin d’obtenir l’effet illustré en (24)a dans une phrase française, on pourra théoriquement trouver dans les
productions d’apprenants roumanophones des structures comme (25)b.
Le roumain ne présente pas les allomorphies des articles (défini et démonstratif) que l'on observe en
français, ce qui est également de nature à poser des difficultés aux apprenants. A la différence du français,
le roumain ne connaît pas la contraction de l’article défini avec la préposition – d’autant moins que l’article
défini est suffixé :
D’autres phénomènes d’allomorphie des articles présents en français par exemple pour l’article
démonstratif, sont également absents en roumain :
Les apprenants roumanophones auront donc des difficultés à assimiler les cas d’allomorphie et produiront
en un premier temps des formes comme en (27b), (28b) et (30b).
Comme nous l’avons déjà noté, l’article partitif n’existe pas en roumain ; ces formes devront faire l’objet
d’un apprentissage attentif. Une difficulté particulière est représentée par l’alternance entre la
forme du/de la/des et la forme de, par exemple en contexte négatif, menant à maintenir la forme du/de
la/ des là où elle devrait être remplacée par de, cf. *je n’ai pas de l’argent ; ce problème étant d’ailleurs
une difficulté potentielle pour tous les allophones.
L’ordre canonique dans le groupe nominal en roumain est Nom-Adjectif, pour tous les adjectifs. L’ordre
Adjectif-Nom est hautement marqué et littéraire. Cela peut conduire les roumanophones à généraliser
l’ordre Nom-Adjectif en français et à produire des séquences comme (32b), calquant (31) en roumain :
Le français a deux formes, fortes et faibles, pour les pronoms sujet, par exemple dans des exemples où le
sujet pronominal est accentué (33a-b) mais aussi dans le contexte d’une coordination (33c). Le roumain en
revanche ne connaît de formes faibles que pour les pronoms objet, et utilise l’intonation pour donner
l’effet d’accentuation ; de plus, le roumain est une langue à sujet implicite, le pronom sujet pouvant être
complètement omis.
IL a arrivé
Les formes fortes sont également utilisées en français dans les contextes prépositionnels. Dans ce cas
encore, le roumain connaît une seule forme :
Cette situation de contraste entre les deux langues mènera à des productions mal formées de la part des
locuteurs roumanophones :
Le roumain n’a pas de pronom indéfini analogue au français on, qui, selon les contextes, pourra se
traduire par exemple par les équivalents de 'tu' ou 'nous' :
Litt: Nous sommes souvent flattés par les compliments
Les apprenants roumanophones pourront utiliser donc le pronom tu pour rendre les valeurs de on en
français, produisant des structures du type :
(39) a. #Tu peux souvent te tromper pour 'on peut souvent se tromper’
b. #Nous sommes souvent flattés par les compliments pour 'on est souvent flatté
L’ordre des pronoms compléments n'est pas toujours parallèle dans les deux langues :
Les apprenants roumanophones auront des difficultés à produire l’ordre correct des pronoms
compléments en français et feront des transferts comme en (40)c.
Avec le verbe putea ‘pouvoir’ suivi d’une subordonnée infinitive, les pronoms objet du verbe enchâssé vont
se réaliser en roumain sur le verbe principal (41a-b), ce qui n’est pas le cas en français
Ces contrastes prédisent l’apparition de productions mal formées chez les locuteurs roumanophones, qui
auront tendance à placer le pronom sur le verbe principal en français :
Le roumain et le français disposent d'une syntaxe spéciale connue sous le nom de "Possession Inaliénable"
parce qu'elle met prototypiquement en jeu des noms dénotant des parties inaliénables du corps humain
(ou animé) . En français, la syntaxe de la Possession Inaliénable, qui associe un pronom datif incarnant le
Possesseur à un nominal défini dénotant le Possessum (ex. (44b)), est restreinte à certains noms lexicaux
— canoniquement, les noms de parties du corps (comme cheveux en (44b), mais non chemise en (43b)) :
En roumain, la syntaxe de la Possession Inalianéble, illustrée par le patron (44b), a une extension
beaucoup plus large que son homologue en français : elle est compatible non seulement avec les noms de
parties du corps comme 'cheveux', mais avec quasiment n'importe quel substantif — comme 'chemise', par
exemple (cf. (45b)), ou 'soupe' en (46) :
(46) Mănâncă-ţi supa!
Il s'ensuit une difficulté potentielle pour les roumanophones, qui tendront à produire la syntaxe Inaliénable
là où on ne l'attend pas en français standard, comme en (47), exemple attesté faisant écho au roumain (46)
:
Les noms roumains peuvent avoir trois genres – Masculin, Féminin et Neutre (cf. section suivante). En soi,
cela ne pose cependant pas de difficulté particulière aux apprenants. En revanche des problèmes de
confusion de genre apparaissent étant donné le fait que les deux langues ont une distribution arbitraire
des genres pour les noms inanimés.
Notamment, les différences de genre entre des mots roumains et français similaires par le sens ou ayant
une étymologie commune sont une source prévisible de difficultés :
pays ma
un allumette
un dent
Les apprenants roumanophones se tromperont donc sur le genre de certains noms inanimés comme en
(49). La confusion en (49b) est d’autant plus plausible que le mot télévision existe en roumain, et veut dire
‘(chaîne de) télévision’.
Plus particulièrement, les noms roumains terminés par –a ou –é (dont un bon nombre sont des emprunts
du français) sont masculins en français mais féminins en roumain et donc représentent une source de
confusions, cf. (50):
camelia dalia
Pour les apprenants d’un niveau plus avancé, des interférences peuvent encore se faire sentir dans l’accord
à distance des pronoms anaphoriques :
3.1.6.2. « Neutres »
Ce que l’on appelle ‘neutre’ en roumain (voir aussi section précédente) est majoritairement un ‘faux’ genre
qui emprunte ses formes au masculin pour le singulier et au féminin pour le pluriel. Cependant, comme il
ne s’agit pas de noms qui changent de genre mais qui prennent le masculin au singulier et le féminin au
pluriel, et comme ces noms sont très nombreux dans la langue, on considère cela comme un genre à part.
L’accord au féminin pluriel en roumain peut générer des accords fautifs pour certains noms en
français: ces trains… *elles etc.
On peut s’attendre aussi à des situations d’accord partiel dû aux hésitations de genre, comme en (55) où
seul l’un des mots accompagnant le nom s’accordent
La morphologie des adjectifs français en –al /-aux (ex. l'exercice final/les exercices finaux ) risque d'être
difficile à assimiler pour un roumanophone, étant donné l’existence en roumain d'une classe d'adjectifs
en –al, présentant dans cette langue une flexion régulière: final, finală, finali, finale. Il est donc certain que
l’apprenant roumanophone produira en français des formes comme finals :
Les indéfinis ont des propriétés syntaxiques particulières qui peuvent poser des problèmes
d’apprentissage du français.
(57) mulți/puțini copii
En un premier temps, il est donc possible d’avoir des productions du type (61)b avec l’insertion de la
préposition. Par ailleurs, on peut signaler l’existence en français des nominaux dizaine, centaine et leur
inexistence en roumain, qui utilise les numéraux respectifs, déjà de nature nominale.
Ce contraste prédit l’apparition de transferts de la part des locuteurs roumanophones, sous la forme de
productions mal formées comme (63)b.
Il existe en roumain une forme plurielle et définie du cardinal un, unii/unele 'les uns/les unes' qui
fonctionne comme un déterminant indéfini (cf.64), étant donc suivi du nom indéfini. En français, un ne se
pluralise que dans l’expression les uns / les autres. L’interprétation de cet indéfini en français peut être
rendu par l’indéfini certains ou quelques, selon le contexte. Ces contrastes et la coïncidence de forme
avec les uns... les autres en français peut mener chez les apprenants roumanophones à des productions
comme (65b), qui fait écho au roumain (64):
Le fonctionnement de ce pronom est assez parallèle des pronoms relatifs lequel, laquelle, duquel, de
laquelle etc ; le roumain n’a pas de formes courtes comme dont, qui et que qui devront être apprises telles
quelles par les apprenants roumanophones. Les difficultés que peuvent poser les relatives françaises à un
locuteur roumanophone sont donc notamment de nature morphologique (la forme des pronoms relatifs).
(68) a. câinele pe care l-a cumpărat fata b. le chien que la fille a acheté
On observe que le relatif à l’Accusatif est précédé par la marque d’accusatif prépositionnel pe. L’apprenant
roumanophone devra donc acquérir le système des pronoms relatifs courts en français. On observe
également le redoublement pronominal que nous avons mentionné plus haut et qui peut être généralisé
dans les relatives en français (cf. plus haut section 3.1.2).
Dans les relatives prépositionnelles (où le pronom relatif est précédé d’une préposition), le roumain et le
français sont assez parallèles, sauf pour la contraction qui n’existe pas en roumain, et qui prédit
l’apparition chez les apprenants roumanophones de formes comme à lequel, de lequel, etc. Là encore,
donc, la difficulté est de nature morphologique.
(70) a. exemplul la care am făcut aluzie b. l’exemple auquel j’ai fait allusion
Lorsque l’élément relativisé est oblique, le roumain n’a pas non plus de formes contractées :
'Les voisins avec les enfants de qui je suis parti en vacances...’
b. Fata ai cărei ochi au fost remarcați de toată lumea
fille-la D-Gen qui-Gen yeux ont été remarqués de tout monde-la
lit. 'la fille de laquelle (les) yeux ont été remarqués par tout le monde'
‘La fille dont les yeux ont été remarqués par tout le monde’
On peut donc prévoir des difficultés à mettre en place la distribution des formes courtes et contractées des
pronoms relatifs. Les apprenants roumanophones pourront produire en un premier temps des phrases
comme (72)a, où l’usage des formes complexes est généralisé, ou bien des exemples où l’usage
de dont n’exclut pas la présence d’un possessif dans la phrase relative :
(72) a. *La fille de laquelle les yeux ont été remarqués par tout le monde.
Ce même verbe aura en roumain une construction différente si les deux compléments sont réalisés,
comme en (75) avec une construction oblique pour l’objet personnel, ou bien en (76) avec un objet direct
et un complément prépositionnel inanimé.
En revanche, pour un apprentissage raisonné, on peut se baser sur la construction en (75), avec où le
bénéficiaire du pardon est exprimé par un oblique, et qui est parallèle au français.
Le roumain, à la différence du français, présente dans le cas de certains verbes une construction avec deux
objets accusatifs. Par exemple, le verbe a învăța, qui se traduit par ‘enseigner’ ou ‘apprendre’, selon le
contexte. Ce verbe peut avoir deux objets directs, une propriété inexistante en français (78b) et que les
locuteurs roumanophones seraient susceptibles de produire:
Une autre construction de nature à poser des difficultés est celle du verbe changer. Ce verbe ( a schimba)
en roumain a une construction directe, à la différence du français (79)a-b:
L’apprenant roumanophone pourra donc produire des phrases mal formées comme (80), où le complément
du verbe changer est en régime direct :
Des contrastes de même type concernent des constructions avec verbe être + adjectif qui n’ont pas les
mêmes prépositions dans les deux langues, comme străin de ‘étranger à’ Litt. « étranger de» ou îmbrăcat
în 'vêtu de', Litt. "vêtu en", qui peuvent donner des interférences du type *étranger de, *vêtu en noir. Pour
d’autres interférences concernant les prépositions, voir aussi plus bas, section 3.4.
Les formes actives et passives sont construite de la même façon en roumain et en français (verbe être +
participe passé accordé en genre et en nombre) :
(81) a. copilul a cules florile b. l’enfant a cueilli les fleurs
(82) a. florile au fost culese de (către) copil b. les fleurs ont été cueillies par l’enfant
Les verbes roumains peuvent, comme ceux du français, apparaître à ce qu'on appelle traditionnellement
la forme pronominale, caractérisée par l'occurrence du pronom se à la troisième personne :
Français
e. Ce bébé se sert déjà d'une cuiller. (forme pronominale lexicalisée)
Roumain
se aiment
En revanche, les formes pronominales lexicalisées ne correspondent pas toujours dans les deux langues.
Certains verbes pronominaux en roumain peuvent correspondre à des verbes non-pronominaux en
français :
se jouent
se pensent
se craignent
évadent
'ils s’évadent'
Les apprenants roumanophones pourront produire des formes pronominales là où en français elles
n’existent pas (cf.89a-c) et l’inverse (cf.89d) :
A noter enfin le cas des verbes pronominaux réciproques, qui en roumain admettent aussi bien la forme
purement réciproque comme (90)a, que la forme N1 se V avec N2, qui n’existe pas en français. En
conséquence, on s’attend à ce que les roumanophones produisent des énoncés français mal formés
comme (90)c :
En roumain comme en français, la forme du passé simple a disparu de la langue courante. Elle reste
vivante seulement dans certains dialectes et dans un style littéraire archaïque (contes). Même dans la
langue écrite, le temps standard du récit au passé est le passé composé, construit sur le même modèle
qu'en français (v.auxiliaire + participe passé).
Contrairement à ce qu'on observe en français, toutefois, les temps composés du roumain n'utilisent qu'un
seul auxiliaire à la voix active — 'avoir :
(91) a. j’ai chanté; je suis tombé; je me suis cassé la jambe
b. am cântat; am căzut; mi-am rupt piciorul
Les contextes requérant en français l'auxiliaire être à la voix active nécessiteront donc un apprentissage
attentif de la part des roumanophones, qui risquent de généraliser l'auxiliaire avoir en français en
produisant des suites comme (926a), au lieu de (92b) :
Le futur s'exprime en roumain standard au moyen du verbe 'vouloir' employé comme auxiliaire :
En français, il existe deux formes, l’une périphrastique (aller + infinitif) et l’autre flexionnelle (basée sur
des désinences: -erai, -eras, -era etc).
En revanche, en roumain familier, d’autres formes basées sur la forme de subjonctif précédée de la marque
de futur o sont beaucoup plus vivantes :
L’apprenant roumanophone devra apprendre à maîtriser en français les formes temporelles avec leurs
valeurs respectives et le registre où elles fonctionnent, et comprendre par exemple que la forme
périphrastique avec vouloir n’a pas pour correspondant exact en français la forme périphrastique
avec aller.
Le français et le roumain utilisent tous les deux des formes appelées "conditionnel" pour l’expression des
valeurs hypothétiques:
Le conditionnel en roumain n’a que des valeurs hypothétiques et n'exprime jamais le 'futur du passé',
comme en français.
L’apprenant roumanophone aura donc besoin d’un effort pour maîtriser la distribution des formes de futur
et de conditionnel en français. En particulier, il pourra produire des phrases comme (99) sans faire ce
qu’on appelle la concordance des temps:
Contrairement au français standard, le roumain n'interdit pas les temps Futur et Conditionnel dans les
subordonnées conditionnelles en 'si' :
Les apprenants roumanophones risquent donc de produire en français des phrases mal formées comme en
(101), sur le modèle roumain illustré en (100b) :
3.2.6. Auxiliaires aspectuels
Le roumain, comme le français, utilise certains verbes pour signaler le commencement d'un procès
(l'"aspect inchoatif"). Mais les verbes utilisés dans cette fonction ne se correspondent que partiellement,
comme illustré dans le tableau en (102) :
(102)
'a se pune pe' A pus cartea pe masă mettre
Il a mis l
'Il a mis le livre sur la table.'
S-a pus pe cântat
'Il s'est m
lit. 'se mettre sur' Lit. 'Il s'est mis sur chanter." se mettre à
A se apuca
'Se apucă de roman.'
'prendre' prendre Il prend s
Se apucă de citit
Lit. 'Il se prend de fumer.'
Lit. 'se prendre de' se mettre à Il se met
On peut donc s'attendre à certains transferts de la part des apprenants roumanophones, produisant en
français des suites mal formées telles que (97) :
En roumain standard ou courant, il n'existe pas de locutions verbales pour signaler le procès en cours de
déroulement ou de répétition, analogues à être en train de, ne pas arrêter de, ne pas cesser de : l'effet
progressif ou répétitif est signalé dans cette langue par des adverbes (par exemple tocmai'justement').
L'apprentissage des locutions verbales du français dans des phrases telles que (104) pourra donc présenter
une certaine difficulté :
Dans le but d’exprimer le sens d’un procès qui commence, le locuteur roumanophone pourra faire appel à
des adverbes, ce qui peut mener à des productions comme en (105), qui ne sont pas l’équivalent de (104) :
On appelle ainsi de "petits" verbes à sens assez abstrait qui, en combinaison avec certains compléments
d'objet, forment des locutions verbales dénotant des types d'événements ou d'activités — cf. en
français donner dans donner une gifle à quelqu'un (= 'gifler'), prendre dans prendre racine (=
's'enraciner'), faire dans faire les courses (= 's'approvisionner'), etc. Il existe en roumain, comme en
français, des constructions à verbe léger, mais elles ne se correspondent pas terme à terme, ce qui peut
être une source de difficulté dans l'apprentissage de l'autre langue. Ceci est illustré dans le tableau en
(106).
(106)
ROUMAIN FRANCAIS
On peut donc s’attendre à trouver des interférences dans le choix des verbes supports pour les
périphrases du français :
3.2.8. La flexion verbale en subordonnée (subjonctif, infinitifs, participes)
En français comme en roumain, il existe des phrases subordonnées qui utilisent soit des verbes avec une
flexion complète (indicatif), soit des verbes à flexion appauvrie (subjonctif, qui présente toutefois des
formes conjuguées, ou infinitif, qui n’en présente pas).
Toutefois, les deux langues n’utilisent pas de la même façon les formes verbales dans la subordonnée. En
français, dans une phrase comme (108a) on utilise l’infinitif, alors qu’en roumain on utilise une forme
fléchie qui est proche du subjonctif français:
En français la forme de subjonctif est utilisée dans les contextes où le sujet du verbe principal et celui de la
subordonnée ne renvoient pas à la même personne ; ici, le français et le roumain correspondent :
Ces contrastes laissent attendre de la part des locuteurs roumanophones des structures mal formées
comme (113)a-b :
Dans certains contextes, lorsque le verbe subordonné et laisser/faire ont un sujet qui renvoient à la même
personne, la forme du verbe subordonné en roumain peut être le participe, alors que le français utilise
l’infinitif :
En vue de ces contrastes, les locuteurs roumanophones produiront des phrases mal formées comme (115),
où le participe remplace l’infinitif attendu en français. La difficulté est d’autant plus grande que dans
certains contextes, le français aussi peut utiliser le participe, comme dans le cas des verbes d’état comme
en (116), où il y a correspondance entre les deux langues:
Avec un prédicat évaluatif et un verbe subordonné qui exprime un événement non encore réalisé, en règle
générale les deux langues utilisent le subjonctif (la forme en que pour le français et en sa pour le roumain)
b. E preferabil să fii mai prevăzător Il est préférable que tu fasses attention
En revanche les deux langues divergent lorsque le prédicat de la subordonnée dénote un fait accompli. En
roumain, c'est l’indicatif (passé) qui est utilisé, même quand le verbe principal est évaluatif.
b. Îți pare rău că n-am plecat? Tu regrettes que je ne sois pas parti?
te paraît mal que ne ai parti
Ces contrastes sont de nature à prédire des transferts comme celui qui est illustré en (119), où l’indicatif
prend la place du subjonctif en français :
Un contraste du même type concernant le choix du mode est représenté par le comportement des noms
comme fait, qui attirent le choix du subjonctif en français standard mais de l’indicatif en roumain :
Là encore, on s’attend à des productions mal formées comme en (121), issu d’un transfert à partir de
(120)a :
Le contexte négatif dans la principale influence le choix du mode en français mais pas en roumain, où
nous trouvons jusqu’à un certain point la variation libre, à moins que le verbe principal n’exprime une
hypothèse (conditionnel):
Avec les verbes impersonnels à interprétation générique comme il faut, il suffit de, le roumain utilise le
subjonctif conjugué à la deuxième personne du singulier, alors que le français utilise l’infinitif :
(125) a. Trebuie să citeşti toate lucrările recente. Il faut lire tous les travaux récents.
b. E de-ajuns să-ţi faci liniştit datoria. Il suffit de faire tranquillement son travail.
Ces contrastes sont de nature à prédire en français des roumanophones des constructions comme en
(126), qui font écho au roumain :
Beaucoup de différences se présentent également dans le choix du mode dans les diverses subordonnées.
En subordonnée concessive, par exemple, le roumain n’utilisera pas le subjonctif mais l’indicatif, alors que
le français impose le subjonctif (127a). Les locuteurs roumanophones produiront donc des exemples mal
formés du type (127b) avec l’indicatif.
(127) a. Deși nu e de acord, nu spune nimic Bien qu’il ne soit pas d’accord, il ne dit rien
Le conditionnel en alternance avec l’indicatif est utilisé en roumain dans des concessives comportant une
idée de choix possible, alors que le français utilise le subjonctif:
(128) Oricare ar fi /este jocul, regulile sunt aceleași Quel que soit le jeu...
‘Quel que soit le jeu, les règles sont les mêmes’
Ce contraste est à nouveau source de transfert possible, donnant des structures mal formées comme
(129) :
(129) *Quel que serait / est le jeu, les règles sont les mêmes.
Le subjonctif roumain n’est jamais sélectionné dans la relative, à la différence du français (130a-b), sauf
dans le cas d’une interprétation claire de but poursuivi, auquel cas les deux langues sont parallèles (131a-
b) :
(130) a. Este cartea cea mai interesantă pe care am publicat-o anul acesta
est livre-le le plus intéressant pe-que avons publié-3SgFém année ce
‘C’est le livre le plus intéressant que nous ayons publié cette année’
b. C’est le livre le plus intéressant que nous ayons publié cette année
Le contraste illustré en (130) est une source potentielle de difficultés. On s’attend à des productions
comme (132) où l’indicatif remplace le subjonctif attendu en français :
(132) *C’est le livre le plus intéressant que nous avons publié cette année
3.3. Circonstants
Les découpages différents dans l’usage de diverses prépositions sont des sources possibles de difficultés
pour les apprenants roumanophones. Vu qu’il existe une certaine similarité au sein des éléments marquant
la relation spatio-temporelle, mais que les combinaisons dans les cas complexes ne sont pas forcément
les mêmes, on s’attend à des interférences comme dans le cas de depuis vs. de et leurs formes
composées: >*de quand pour depuis quand, de pour depuis :
L’existence de ce contraste prédit l’apparition de phrases mal formées comme () chez les locuteurs
roumanophones :
Le roumain utilise beaucoup de prépositions complexes formées sur de, qui n’existent pas en français :
par exemple de+en=din ‘en, provenant de’, de pe ‘de sur’, de sub ‘de sous’ – pour exprimer la source, la
provenance, ou bien le contenu – d’où possibilités d’interférences avec utilisation d’une forme complexe
pour une forme simple:
En revanche, dans d’autres contextes le roumain n’insère pas de préposition (cf. de en 137) là où le
français le fait. De ce pas, on peut s’attendre chez les roumanophones à des productions comme (138) :
3.3.2. Adverbes
Certains adverbes roumains ont la même forme que les adjectifs correspondants (absence de morphologie
correspondant au suffixe adverbial –ment). Par exemple :
Les apprenants roumanophones peuvent donc avoir des difficultés à maîtriser les adverbes français en -
ment, risquant de produire des formes inacceptables telles que (140) a. On peut également mentionner la
confusion possible chez les roumanophones entre l’adverbe comment et la conjonction comme, qui en
roumain ont la même forme, ce qui peut mener à des phrases mal formées comme (140b) :
(140) a. *je connais parfait le français ; *parler mauvais ; *se débrouiller difficile
La place des adverbes représente une autre propriété distinctive des deux langues. Le roumain, à la
différence du français, place les adverbes à la suite du complexe verbal y compris aux temps composés:
Cette propriété est de nature a poser uné légère difficulté aux apprenants roumains qui devront apprendre
l’ordre auxiliaire-adverbe-participe passé qui est standard français, et pourront en un premier temps
produire des constructions mal formées comme (142) qui ne sont pas standard en français:
Les adverbes ici et là ont des propriétés différentes dans les deux langues. Ainsi, là en français est non
spécifié pour l’opposition proche/lointain, à la différence du roumain où les adverbes aici - ici et acolo –
là apparaissent en contraste pour marquer cette opposition. De telles nuances peuvent poser des
problèmes de traitement aux apprenants roumanophones.
On peut noter l’absence en roumain d’équivalent pour les proformes adverbiales y et en, propres au
français (cf. 144). Le fonctionnement de ces « pronoms adverbiaux » doit donc faire l’objet d’un effort pour
les L1roumains. L’effet est la production de phrases elliptiques dans une étape initiale de l’acquisition de
la langue, comme en (144b) :
me vais
On peut aussi s’attendre à l’utilisation généralisée de l’adverbe là dans les contextes où l’on attend y :
Pour exprimer les degrés de signification en roumain, on utilise en roumain des constructions complexes
qui sont complètement différentes de celles du français. Plus précisément, on se sert de
l’adverbe mai ‘plus’ pour la forme de comparatif de supériorité, et la forme complexe mai puțin ‘plus
moins’ pour le comparatif d’infériorité.
Il est donc possible de trouver chez les locuteurs roumanophones des constructions qui généralisent la
construction complexe en français :
Pour les adjectifs exprimant la quantité la comparaison implique plus de termes termes qu’en français:
On s’attend donc à voir apparaître des constructions mal formées affectant la syntaxe de beaucoup et
des autres quantifieurs dans des constructions comparatives, telles (151) :
L’expression de l’intensité pour les adjectifs qualificatifs utilise en roumain la forme atât ‘tant’ qui est par
ailleurs un quantifieur, suivie de la préposition de – alors que le français utilise simplement la construction
si+adjectif:
L’existence de la construction proche tant de en français peut amener les locuteurs roumanophones à
produire des constructions comme (153) en calquant la construction roumaine de degré en (152) :
4. Phrase
4.1. Sujet implicite.
Le pronom sujet, qui est obligatoirement présent en français, est implicite ou absent en roumain (153,
154b). On dit que le roumain est une langue "à pronom sujet implicite."
b. Plouă.
pleut
b. Mănânc.
mange1sg
On peut s’attendre donc, en un premier temps, de trouver des productions mal formées en français des
roumanophones, avec l’omission du pronom sujet comme en (155) :
(155) a. *Pleut.
b. *Mange.
La présence du pronom sujet en roumain produit un effet d'emphase rendu en français par un pronom fort
accentué :
(156) a. LUI, il a fait ça
Les contreparties roumaines des formes impersonnelles du français comme il y a, il est bon, il est
important apparaissent sans pronom sujet apparent en roumain. Certains prédicats impersonnels prennent
la forme réfléchie: se poate 'il se peut’, se cuvine 'il convient’. En raison de ces contrastes, on peut
s’attendre à trouver chez les roumanophones des phrases mal formées comme (158):
(157) a. Se poate să plecăm mâine Il se peut que nous partions demain
L’Ordre VS est possible dans le cas des verbes intransitifs non-agentifs comme arriver, venir, tomber. La
phrase (159)b est possible en tant que réponse à la question « Que se passe-t-il ? » et met l’accent sur
l’événement. En (159c), on observe le même ordre des mots dans un contexte où l’on veut faire ressortir le
sujet :
Ion a venu
Les apprenants roumanophones risquent donc de produire en français des formes comme (160c). Notons
également que le roumain ne dispose que de l’intonation pour mettre en relief des constituants de la
phrase, et que donc des exemples de phrases dites ‘clivées’ comme (160b) sont inexistants.
Le système de la négation est différent dans les deux langues. Alors qu’en français standard la négation de
phrase comporte deux constituants, le roumain n'utilise qu'un seul marqueur :
ne mange
Le contraste illustré en (161) conduit l'apprenant roumanophone à établir un parallèle entre un morphème
négatif (nu) en roumain et deux morphèmes (ne...pas) en français. Toutefois, en présence de mots
comme rien, personne, jamais (mots dits à polarité négative), le roumain nu semble avoir pour contrepartie
le seul morphème ne en français :
(162) a. Je ne mange rien
On s'attend donc à ce que les apprenants roumanophones hésitent sur l'identification du/des marqueur(s)
de négation en français en produisant des formes comme (9) ou (164) :
En (164), l'apprenant aura incorrectement généralisé que nu = ne...pas à partir d'exemples comme (162b) ;
en (165) il aura incorrectement généralisé que nu = ne à partir d'exemples comme (161).
Des problèmes spécifiques concernent aussi la conjonction de négation ni – nici en roumain, sa position et
ses combinaisons avec d’autres mots négatifs dans la phrase. Cette conjonction négative a deux usages en
roumain; elle peut mettre en contraste un constituant sur lequel elle fait porter la négation, auquel cas elle
correspond en français à ... non plus (166); ou bien elle sert à la coordination négative, comme ni en
français cf. (167) :
Cette situation peut engendrer des structures mal formées comme en (168), dans lesquelles la conjonction
française ni se voit attribuer le rôle d’élément marquant en même temps le contraste et la négation de
constituant.
Un contraste entre les deux langues peut être observé en ce qui concerne l’ordre des constituants de la
phrase négative contenant un quantifieur comme tous. En roumain, c’est la négation nu qui apparaît en
première position, alors qu’en français on a l’ordre inverse (169):
(169) Nu toți copiii au venit Tous les enfants ne sont pas venus.
Les locuteurs roumanophones produiront, comme conséquence de ce contraste entre les deux langues,
des phrases mal formées comme (170) :
Comme noté précédemment, le roumain n’a pas de structures clivées du type c’est... que. Une
conséquence de ce fait dans la phrase négative est que la négation va occuper la première place, et sera
focalisée tout comme le constituant qui la suit. Cela donne en roumain des constructions comme (171), qui
sont l’équivalent de clivées négatives en français :
Les difficultés des locuteurs roumanophones portant sur ces constructions donneront des constructions
mal formées en (172) proches du roumain (171) :
4.4. Interrogatives
La différence la plus notable entre les deux langues concernant les structures interrogatives est
représentée par la construction est-ce que/ inversion du sujet qui apparaît en français, et qui est une
source de difficultés pour tous les locuteurs allophones. Pour les roumanophones, il est difficile de faire la
différence entre les phrases interrogatives en qui et en que, et les structures en est-ce que et inversion du
sujet sont difficiles à maîtriser, pouvant mener à des productions mal formées diverses, comme par
exemple celles en (174).
b. *Qui se passe ?
REFERENCES
Câșlaru, Mariana-Diana. 2013. L’interlangue des apprenants roumains de FLE au carrefour des langues
romanes. Thèse de doctorat, Université d’Avignon et Université Alexandru Ioan Cuza de Iasi.
Mollaert, Céline. 2002. Les erreurs de français des roumanophones : essai de typologie. Buletinul Științific
al Universității Politehnica – Timișoara.